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Monologue:
Monologue : parole d’un personnage seul sur scène (ou se croit seul), le
monologue est toujours un moment très théâtral, apprécié par le lecteur-
spectateur car il partage avec le personnage en question, sa méditation, sa
réflexion, ses tourments ou sa douleur (on compte 12 monologues dans L’Ecole
des femmes, tirades d’Arnolphe, mais aussi courtes phrases); le monologue est
une pensée verbalisée : « j’avoue qu’il est quelquefois bien agréable sur le
théâtre, de voir un homme seul ouvrir le fond de son âme et de l’entendre parler
hardiment et dire tout ce que la violence de sa passion lui suggère ; mais certes
il n’est pas toujours bien facile de le faire avec vraisemblance », L’abbé
d’Aubignac, Pratique du théâtre, éd. Martino, p. 250.
Fonctions du monologue :
+ fonction introspective, psychologique du monologue (l’expression d’une
émotion) ; le monologue révèle, certes, les sentiments du personnage, son état
psychologique ; au niveau des formes de phrases triomphent les phrases
exclamatives, expression d’une parole qui ne s’adresse pas à un interlocuteur ; il
s’agit alors une parole auto-réflexive, lyrique, émotionnelle. On y trouve aussi, la
phrase interrogative, expression d’une pensée inquiète, perplexe devant le
monde. C’est le cas par exemple du dilemme où le personnage hésite entre
plusieurs décisions et doit absolument trancher…
+ mais le monologue peut rappeler aussi des faits qui servent l’action (dimension
dramatique) et intervient souvent à un moment crucial de l’action pour attirer
l’attention du spectateur sur le désarroi du héros.
+ Il peut aussi lier deux scènes (fonction de liaison), par exemple : dans Phèdre
de Racine, IV, sc 5, lie les scènes entre Phèdre et Thésée et Phèdre et Oenone.
Le monologue de l’héroïne de Racine sert à expliquer les tourments de la jalousie
de Phèdre qui vient d’apprendre qu’Hippolyte aime Aricie..
+Très utilisé dans la tragédie au XVIIème siècle, le monologue est aussi une
grande tirade (aspect poétique : nature des phrases (interrogatives,
exclamatives, plus ou moins longues), procédés verbaux pour dire l’hésitation, la
confusion ou le dilemme du personnage, le choix des mots à la rime ; aspects de
la versification mettant en exergue le déchirements des sentiments ; procédés
de l’invocation des anciens ou de la famille (dans Hernani de V. Hugo, le
monologue de Don Ruy Gomez devant les portraits de ses ancêtres) qui suspend
la tension dramatique en introduisant un aspect « statique » dans l’intrigue (ça
dépend des auteurs) : le monologue peut être ressenti comme antidramatique,
voire invraisemblable : pourquoi un homme se parlerait-il à haute voix, ce qui
serait ridicule et irréalise ? La justification théâtrale du monologue est liée à la
situation dramatique du personnage : entamer une méditation, laisser libre
cours à une effusion lyrique, être l’objet d’un dilemme cornélien, exprimer un
débat de conscience. Un personnage qui médite (méditation psychologique ou
morale), qui se parle, c’est le cas du soliloque (révéler au spectateur l’âme ou
l’inconscient du personnage ; dimension introspective du soliloque). Le soliloque
est un morceau détachable du reste du texte : par exemple le soliloque d’Hamlet
sur la vie et la mort ; le soliloque s’apparente à un dialogue avec soi-même, car
l’unité personnelle est momentanément brisée et se cherche (Figaro, I, sc 2).
Tirade :
C’est une « réplique d’un personnage, le plus souvent dans la tragédie. La tirade
et souvent longue et véhémente ; elle s’organise rhétoriquement en une suite
de propositions, de questions, d’arguments ou de bons mots (la « tirade des
nez » dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand). La tirade est fréquente en
dramaturgie classique, lorsque le texte est réparti en discours assez longs et
autonomes, formant presque une suite de monologues. Chaque tirade tend à
devenir un poème ayant sa propre organisation interne et répondant aux tirades
précédentes. » P. Pavis, Dictionnaire du théâtre, p.418.
C’est donc une parole développée, en termes quantitatifs, elle enrichit le texte
théâtral par son contenu et sa rhétorique ; moment d’éloquence fort apprécié
par le spectateur de l’époque classique ; dans l’histoire du théâtre classique,
Beaumarchais est passé maître de la tirade. Il faudra rappeler l’usage des tirades
notamment dans les scènes de délibération ; au théâtre classique, parler c’est
agir : les discours «doivent être comme des actions de ceux qu’on y fait paraître ;
car là, parler, c’est agir », L’Abbé d’Aubignac, Pratique du théâtre, livre IV, chap.
II, p.282. Dans cette tradition littéraire du théâtre, il en sera tout autre aux XXè
et XXIè siècles (crise du langage et incommunicabilité entre individus, métaphore
d’un monde qui a perdu ses valeurs humanistes).
La tradition de la tirade dans théâtre classique remonte à l’Antiquité, mais aussi
pour des raisons théâtrales : calmer un public le plus souvent turbulent (selon
Jacques Scherer), mais moment idéal où le dramaturge fait montre de son talent
d’écrivain ou de poète.
Aparté :
« Le Comte, à part -Il veut venir à Londres, elle n’a pas parlé.
Figaro, à part – Il croit que je ne sais rien ; travaillons-le un peu, dans
son genre. » Beaumarchais, Le mariage de Figaro. »
Récit :
La fonction du récit dans le théâtre classique est double :
1- décrire des scènes se passant à l’extérieur de la scène (surtout s’il s’agit de
mort atroce, par souci de bienséance, par exemple : la mort d’Hippolyte dans
Phèdre de Racine.
2-pour des raisons techniques, le récit rapporte des actions qu’on ne représenter
sur scène (l’espace scénique reste tout de même limité) ; exemple : des
batailles ; des attroupements d’individus…
Dans Dom Juan, Molière commence ses trois premiers actes par des récits plus
ou moins longs où les personnages rapportent des actions passées autrefois ou
dans un passé récent. L’action ayant eu lieu dans l’entracte est ainsi ramenée sur
scène grâce au récit, à l’image d’un raccord, en termes de cinéma, afin
d’enchaîner sur le présent de la scène en question ; donc double intérêt du récit
dans Dom Juan de Molière: dramatique et temporel.