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Indispensable, objet de convoitise, source de conflits, signe de la puissance,

la monnaie reste mystérieuse. Comment et par qui se crée-t-elle ? Quel est


au juste le fondement de sa valeur ?
L’or ? La décision arbitraire de l’État ? L’activité économique ? Si l’on
accepte de poser les vraies questions, il est possible de mieux comprendre le
rôle de la monnaie, des banques et de la Banque de France dans la vie
économique.
Cet ouvrage, fruit d’une longue expérience pédagogique, démystifie
certaines croyances et précise les mécanismes fondamentaux de la création
monétaire. Il permet de mieux juger les instruments de la politique
monétaire, d’en saisir la signification et les limites.
A toutes les étapes du cheminement, grâce à une série de tests, le lecteur
peut vérifier ses connaissances et mieux se situer par rapport à l’approche
que lui proposent les auteurs.
J. ADENOT ET J.-M. ALBERTINI

LA MONNAIE ET LES
BANQUES
Troisième édition
revue et corrigée

ÉDITIONS DU SEUIL
27, rue Jacob, Paris VIe
Sommaire

Couverture
Présentation

Page de titre

Liste des tableaux


Avant-propos
INTRODUCTION

Introduction

Introduction
Pour ceux et celles qui n’ont jamais lu un livre d’initiation économique

I - LES DIVERS TYPES DE MONNAIE ET LEUR CRÉATION

1. Monnaies et masse monétaire

MONNAIE MATÉRIELLE ET MONNAIE SCRIPTURALE

La monnaie matérielle

La monnaie scripturale

LA MASSE MONÉTAIRE

2. Comment créer de la monnaie. Le rôle des banques


LES MÉCANISMES DE LA CRÉATION DE MONNAIE

SCRIPTURALE PAR LES BANQUES

Les cas où la banque n’a pas besoin de monnaie fiduciaire

Première étape.
Deuxième étape : la compensation.

Le cas où la banque a besoin de payer en monnaie fiduciaire

ATTENTION

COMMENT LES BANQUES PEUVENT-ELLES FAIRE FACE

A LEURS BESOINS DE MONNAIE FIDUCIAIRE ?

Trouver de la trésorerie auprès des autres banques

Faire appel à la Banque de France

3. La création de la monnaie fiduciaire

LES FONCTIONS DE LA BANQUE CENTRALE

La Banque de France, banque des banques

a) Comment en est-on arrivé là ?

b) Pourquoi est-il nécessaire d’avoir une banque des


banques ?

c) Quelle forme prend la monnaie de la Banque

centrale ?

La Banque centrale, banque de l’État


a) Pourquoi un État a-t-il recours à la Banque centrale ?

b) Comment la Banque centrale intervient-elle pour

aider l’État à faire face à ses engagements ?

La Banque centrale, banque de la nation

a) Création de monnaie et relations avec l’extérieur.

b) La Banque de France et la gestion des réserves de la

nation.

LE POUVOIR MONÉTAIRE DE LA BANQUE CENTRALE

Les limites du rôle de la Banque centrale dans la création de

monnaie

Quelle est la nature de l’engagement de la Banque centrale ?

II - LA VALEUR DE LA MONNAIE ET SA DÉFENSE

4. La valeur de la monnaie

L’ÉCONOMIE NATIONALE EST L’ULTIME FONDEMENT

DE LA VALEUR DE LA MONNAIE

LES CONTREPARTIES DE LA CRÉATION MONÉTAIRE ET

LA VALEUR DE LA MONNAIE

Au niveau des banques

Au niveau de la Banque centrale


A QUOI SERVENT LES RÉSERVES D’OR ET DE DEVISES

DE LA BANQUE CENTRALE ?

Mais alors à quoi sert la réserve d’or (et de devises) de la


Banque centrale ?

Mais que signifie alors la définition de chaque monnaie par

rapport à l’or, quand elle est encore utilisée ?

5. La défense de la monnaie et le financement du crédit

LA DÉFENSE DE LA MONNAIE PASSE PAR UNE ACTION

AU NIVEAU DE LA CRÉATION MONÉTAIRE

LE FINANCEMENT DES DIVERS TYPES DE CRÉDIT

Le financement du crédit à court terme

Le financement du crédit à long terme

A QUEL MOMENT PEUT-ON FINANCER UN CRÉDIT PAR

DE LA CRÉATION DE MONNAIE ?

UNE GRANDE INCONNUE : LA CAISSE DES DÉPÔTS ET

CONSIGNATIONS

Les fonctions de la CDC

a) Banque du travail

b) Banque des collectivités locales

c) Banque du Plan
Les causes économiques du développement de la CDC

6. L’arsenal de la Banque centrale

LA POLITIQUE DES TAUX D’INTÉRÊT L’ACTION SUR

LES DEMANDEURS DE CRÉDIT

Les armes de la Banque de France dans le maniement des

taux d’intérêt.

Les limites de la politique des taux

Ces limites tiennent aussi aux banques elles-mêmes

LA POLITIQUE VISANT A RÉAGIR SUR LA LIQUIDITÉ

BANCAIRE. L’ACTION DIRECTE SUR LES BANQUES

Les moyens mis à la disposition de la Banque centrale

Les limites de l’action sur les liquidités

LA SOLUTION DE DERNIÈRE CHANCE : LES NORMES

DE PROGRESSION DES ENCOURS

7. La place de la politique monétaire dans la politique économique

MANIEMENT DE LA MASSE MONÉTAIRE ET NIVEAU

D’ACTIVITÉ DE L ÉCONOMIE

DE COMBIEN DOIT-ON FAIRE VARIER LA MASSE

MONÉTAIRE POUR AVOIR DES RÉSULTATS

TANGIBLES ?
MONÉTARISTES ET KEYNÉSIENS AUX PRISES AVEC LA

STAGFLATION ET LA CRISE ACTUELLE

En guise de conclusion

À propos de l’auteur

Notes

Copyright d’origine

Achevé de numériser
Liste des tableaux

TABLEAU D
Avant-propos

Ce livre fait partie d’une collection.


Il est le fruit d’une expérience et d’une recherche.
Il est l’œuvre d’un travail d’équipe.

Il fait partie d’une collection, créée en commun, en 1975, par les Éditions
ouvrières et les Éditions du Seuil, qui furent les premières à s’intéresser à
l’initiation économique des adultes dans le cadre de la formation
permanente. Ne croyez pas cependant que vous serez amené(e) à lire un
nombre incalculable de livres ; d’abord, parce que chaque ouvrage peut être
lu séparément ; ensuite, parce que cette collection n’a pas pour but
d’accumuler les titres : tout au plus en comportera-t-elle une dizaine. La
première année furent édités : le Circuit de l’économie nationale, la
Monnaie et les Banques et l’Inflation, successivement réédités en 1980 et
en 1983. La seule ambition de cette collection est d’apporter à un public de
non-spécialistes, la possibilité de mieux se situer dans la vie économique et,
ainsi, de mieux appréhender l’approche qu’on peut faire du monde dans
lequel nous vivons, quand on se met en position d’économiste, ce qui,
parfois, est un bien curieux point de vue.

Il est le fruit d’une expérience et d’une recherche. Les auteurs de ces


livres ne se sont pas demandé, dans l’abstrait, ce qu’il fallait dire et
comment le dire. Tous sont engagés depuis plusieurs années, dans la
formation permanente. La façon dont ils ont été amenés à aborder certains
problèmes, l’insertion des tests et des encadrés, l’illustration par de
nombreux schémas témoignent de leur expérience et de leur pratique
pédagogiques. Ils reprennent aussi, en maints endroits, l’approche originale
des problèmes économiques utilisée dans les sessions de formation du
CEREP (Centre d’études et de réalisations pour l’éducation permanente),
notamment celle des jeux pédagogiques. C’est à travers les difficultés qu’ils
ont rencontrées dans leur tâche d’animateur, qu’ils ont cherché à vous
expliquer, par exemple, comment une banque crée de la monnaie, ce qu’est
la demande, les éléments que recouvre le mot revenu, ou encore, la limite et
la relativité de la notion de production.
Parallèlement, ils ont été, directement ou indirectement, associés à une
recherche du CNRS sur les méthodes pédagogiques dans l’initiation
économique des adultes. Cette recherche porte, notamment, sur la façon
dont un adulte aborde spontanément les problèmes économiques. Ils ont été,
ainsi, amenés à mieux comprendre pourquoi l’initiation est d’abord un choc
de langage et pourquoi. dans bien des cas, l’initiation économique doit
commencer, pour le lecteur, par une prise de conscience de ses propres
représentations. c’est-à-dire de la manière dont il perçoit les problèmes
étudiés et par laquelle il cherche, avant tout, à se situer dans et par rapport à
l’économie. Le déroulement et le rythme de chacun des ouvrages, ainsi que
le contenu et la présentation ont été profondément influencés par cette
recherche. Ainsi les auteurs espèrent aider, dans sa démarche, le public de la
formation permanente, peu attiré par les formes plus classiques du manuel
scolaire.

Il est le résultat d’un travail d’équipe. La conception originale de chaque


ouvrage a été élaborée et critiquée en équipe. Deux auteurs se sont ensuite
chargés de la rédaction. Il y a eu plusieurs rédactions, la première ayant été
celle de l’auteur le premier cité :
— J.-M. Albertini et J.-J. Lambert pour le circuit économique,
— J. Adenot et J.-M. Albertini pour la monnaie,
— A. Viau et J.-M. Albertini pour l’inflation.
Les tests ont été établis, pour la plupart, en liaison avec Pierre et Pierrette
Vergès et Arlette Lacout ; la rédaction a été parachevée par M. Auvolat et
J.-B. Mathieu ; l’ensemble des schémas et des graphiques est l’œuvre de F.
Lerouge ; Mme Moingeon a assumé la majeure partie des travaux de
dactylographie. Bien d’autres emprunts, conseils et critiques ont été
demandés aux autres membres de l’équipe, ou à des amis extérieurs. Que
tous soient remerciés.
INTRODUCTION
Test introductif
Il y a plusieurs façons de parler de la monnaie. Parmi celles. qui
vous sont proposées et qui sont extraites d’interviews de diverses
personnes, laquelle choisiriez-vous ?

1. Auparavant la monnaie n’existait pas ; lorsque deux individus


avaient besoin de produits ils échangeaient directement, par
exemple, un sac de blé contre une quantité de laine. Plus tard, la
monnaie a remplacé le troc.

2. La monnaie est fondée sur l’or parce que c’est un métal rare.

3. La monnaie n’a pas de valeur, parce que c’est du papier ; la


monnaie n’a que la valeur qu’on lui donne dans une société, c’est
une habitude.

4. La monnaie est une convention sociale : à un moment donné,


on a remplacé l’or par des billets parce que c’était plus pratique.

5. La monnaie est un moyen d’échange ; qu’il s’agisse d’or ou de


billets, une quantité de monnaie permet d’obtenir, en échange,
une certaine quantité de biens.

6. La monnaie est un instrument de mesure de la valeur des


produits.
7. La monnaie est accumulée par les capitalistes qui exploitent les
ouvriers.

8. Pour qu’une monnaie soit forte, il faut que les gens lui fassent
confiance.

9. Les banquiers et les financiers qui spéculent, gouvernent le


pays.
Il y a bien des manières de percevoir ce qu’est la monnaie et, finalement,
de ne pas comprendre ce qu’elle signifie. Il n’en reste pas moins vrai
qu’elle fait partie de notre vie quotidienne.
Au cours de cette journée où vous commencez à lire ce livre, vous vous
êtes sans doute servi de monnaie. En effet, elle est indispensable à la vie
dans une économie moderne. Plus aucun homme, plus aucune famille ne
peut produire tout ce qui lui est nécessaire pour vivre. L’échange est ainsi
devenu l’acte fondamental de la vie économique. L’histoire de la monnaie
est liée à cette extension des échanges. Dans les économies primitives,
l’échange était réduit au strict minimum et n’avait souvent qu’un caractère
religieux ou magique. Assez rapidement, lorsque l’échange se développa,
on essaya d’introduire un bien intermédiaire que tout le monde désirait et
qui permettait non seulement de faciliter l’échange mais encore de mesurer
la valeur des biens échangés 1.
Il est aisé de comprendre pourquoi les hommes ont eu besoin de faire
intervenir un bien intermédiaire dans les échanges lorsque ceux-ci se
développèrent. Le troc n’est possible que dans la mesure où celui qui
possède ce que vous désirez, veut accepter, en échange, ce que vous
possédez. Dans les économies modernes, où chaque homme est spécialisé
dans une seule tâche, elle-même partie d’une seule production et a donc
besoin de multiples biens et services produits par d’autres hommes, le troc
n’est plus praticable. Bien sûr, il subsiste des zones de troc : par exemple, le
troc entre des collectionneurs de timbres, ou encore, le troc que réalisent les
enfants dans la cour des écoles pour de menus objets ; mais pour l’essentiel
c’est l’échange monétaire qui est prédominant. Imaginez un instant
comment aurait dû faire le poinçonneur du métro pour subvenir à ses
besoins, en échangeant le résultat de son travail contre les biens qu’il
désirait ! Lorsque la perte de confiance dans la monnaie oblige à revenir au
troc. cela se traduit toujours par une diminution considérable des activités
économiques.

Réponses au test
Reportez-vous à la ou les phrases choisies.
1 et 4. Vous vous situez dans une perspective historique qui vous
permet d’aborder la monnaie à travers le rôle de commodité
qu’elle joue dans l’échange. En réalité, cette perspective est
contestable. L’anthropologie montre que l’échange ne se
développe qu’au moment où la monnaie, sous une forme
quelconque, apparaît.

2 et 3. Vous abordez la monnaie en termes de valeur : valeur


intrinsèque d’une matière (2), ou valeur fixée par une convention
(3).

5 et 6. Ces propositions considèrent la monnaie du point de vue


de sa fonction présente, celle de mesure dans l’échange.

8. Vous privilégiez des comportements psychologiques qui


affectent la monnaie.

7 et 9. Vous envisagez la monnaie d’un point de vue économique


et politique.

La monnaie est donc un simple instrument économique, mais le rôle


qu’elle joue dans la vie économique lui a donné un pouvoir de fascination
sur l’imagination des hommes. L’argent. car tel est le mot que l’homme de
la rue emploie le plus souvent pour désigner la monnaie, devient le symbole
de la richesse, du pouvoir, de la sécurité comme de l’exploitation ; le test
introductif de cet ouvrage fait comprendre combien sont diverses les
représentations que les hommes peuvent se faire de la monnaie dont ils se
servent quotidiennement. Il est vrai que si la monnaie ne crée rien et n’est
finalement qu’un intermédiaire qui facilite l’échange en décomposant le
troc en deux temps, elle n’est pas neutre pour l’économie. Celui qui a de la
monnaie peut agir, celui qui n’en possède pas est voué à l’impuissance.
Dans toute économie moderne, socialiste ou capitaliste, la monnaie confère
plus qu’un droit, elle donne aussi un pouvoir. Selon la manière dont elle est
dépensée ou non dépensée, ou encore selon le rythme auquel elle est créée.
l’économie peut subir des crises, connaître des impulsions bénéfiques.
Dans cet ouvrage nous voudrions essayer de bien vous faire comprendre
ce qu’est la monnaie et vous éviter d’être prisonnier d’une certaine
mythologie. Il est facile de trouver une définition simple de la monnaie :
c’est un signe qui, en raison d’une convention sociale reconnue par tous les
membres d’une collectivité économique donnée, est accepté par tous et qui
symbolise le droit de prendre une part de ce qui est produit et offert à la
vente, dans la collectivité où cette monnaie est reconnue. Quelles sont les
diverses formes de ces droits ? Comment sont-ils créés ? Qu’est-ce qui
fonde leur valeur ? Comment contrôler leur création ? Tels sont les sujets
que nous abordons.
Pour ceux et celles qui n’ont jamais lu un
livre d’initiation économique

Il y a plusieurs manières de réaliser un échange. Prenons un exemple.


Supposons que M. Dupont possède un appartement à Rungis. Il cherche à
le vendre et à en acquérir un autre à Moulins. Parallèlement. M. Durand qui
habite Moulins doit venir habiter à Rungis.
Que peut-il se passer ? Plusieurs hypothèses sont possibles :

1re hypothèse : M. Durand désire lui aussi vendre son appartement de


Moulins afin d’en acheter un à Rungis. Si les deux appartements sont
similaires, et si M. Dupont et M. Durand sont mis en contact, ils peuvent
décider d’échanger leurs appartements. M. Dupont et M. Durand vont
procéder à un simple échange.

Le troc est l’échange d’un produit contre un autre produit.

2e hypothèse : Mais si M. Durand et M. Dupont ne se connaissent pas, si


leurs appartements ne sont pas similaires ou n’ont pas même valeur, le troc
n’est pas possible.

Le troc ne peut pas permettre tous les échanges de la vie


moderne, car il suppose que celui qui possède ce que vous
désirez, désire ce que vous possédez, et que vous puissiez être
mis en rapport.

M. Dupont va donc vendre son appartement. Celui-ci ne lui appartiendra


plus, mais, en contrepartie, M. Dupont aura une certaine somme d’argent
(de monnaie) à sa disposition. Il est probable que. grâce à cette somme
d’argent, il pourra acquérir un appartement à Moulins et s’y installer.

Il y a eu échange monétaire. Dans un tel échange, l’opération


primitive du troc, est décomposée en deux temps grâce à
l’intervention d’un bien similaire : la monnaie.

3e hypothèse : Imaginons maintenant que M. Dupont soit logé à Moulins,


dans un appartement de fonction. Il n’a pas besoin d’acheter un nouvel
appartement, mais il se trouve en possession de la somme d’argent
correspondant à la vente de son appartement de Rungis. Il peut la mettre en
réserve, afin d’attendre une occasion de la dépenser : par exemple. l’achat
d’une maison à la campagne pour sa retraite.

La monnaie n’est pas seulement un instrument d’échange. c’est


aussi un instrument de réserve.

Et maintenant, lisez l’encadré suivant.

Ceux qui voudraient aller plus loin dans la compréhension des échanges
monétaires, peuvent lire notre livre : le Circuit de l’économie nationale,
chapitre 1.

A travers l’exemple ci-dessus, nous voyons que la monnaie est


indispensable à une économie moderne, car elle peut jouer, grâce
à ses caractéristiques, un rôle d’intermédiaire :
— Elle peut être possédée par tous. Évidemment, pour chacun,
les échanges possibles, les achats possibles sont limités par la
quantité de monnaie dont on dispose.
— Elle est également désirée par tous, puisqu’elle sert
d’intermédiaire pour acquérir n’importe quel bien marchand,
c’est-à-dire qui se vend. Du même coup, elle permet de comparer
et de mesurer la valeur de tous les biens.
— Elle est divisible. c’est-à-dire qu’elle permet d’acheter des
produits de n’importe quel prix. Chaque produit peut être
échangé contre sa valeur exacte. Avec de la monnaie, on peut
acheter aussi bien un litre de lait, de 3,55 F, qu’un appartement de
400 000 F.
La monnaie joue également un rôle de réserve de valeurs,
puisqu’elle peut servir à acheter des biens tout de suite, ou être
mise de côté pour un achat futur, précisé ou non. Pendant des
mois, je peux mettre de « l’argent de côté » pour acheter ensuite
une voiture, ou bien tout simplement pour le jour où j’en aurai
besoin. « par précaution ». Dans les deux cas. la monnaie est
« épargnée ». c’est-à-dire, non affectée à des dépenses de
consommation. On dit qu’elle est une réserve de valeurs.... Bien
entendu, il y a l’inflation, mais c’est un autre problème.
I

LES DIVERS TYPES DE MONNAIE ET


LEUR CRÉATION
1. Monnaies et masse monétaire

Au cours des siècles on a utilisé bien des formes de monnaie.


Aujourd’hui encore, dans l’économie française, plusieurs coexistent. Il
existe, d’une part, une monnaie matérielle, billets de banque et pièces de
monnaie ; d’autre part, une monnaie scripturale, bien moins connue,
beaucoup plus utilisée et qui n’est qu’un nombre écrit sur les livres des
institutions bancaires. La somme des monnaies matérielle et scripturale, à la
disposition des agents économiques d’un pays, représente la masse
monétaire.

MONNAIE MATÉRIELLE ET MONNAIE SCRIPTURALE

Ce sont les nécessités de l’échange qui amenèrent progressivement la


transformation de la monnaie, de monnaie métallique en monnaie papier et
de monnaie papier en monnaie scripturale. Les mêmes exigences qui
poussèrent à la disparition progressive du troc, amenèrent cette
dématérialisation de la monnaie.

La monnaie matérielle
Les pièces de monnaie, appelées aussi monnaie divisionnaire, parce
qu’elles ne représentent plus que de petites valeurs nominales et servent à
faire l’appoint dans les paiements, sont les derniers témoins des monnaies
métalliques qui servirent pendant des siècles. En France, c’est
l’administration des Monnaies et Médailles, dépendante du Trésor public,
qui les fabrique et les vend en quelque sorte à la Banque de France, avec
bénéfice puisque, normalement, les coûts du métal et de la frappe devraient
être inférieurs à la valeur marquée sur chaque pièce. Ce n’est d’ailleurs pas
toujours le cas et le Trésor a dû arrêter la production des pièces de 1 et 2
centimes, elles lui revenaient plus cher que leur valeur faciale. Le pouvoir
libératoire 2 de ces pièces n’est pas total car on ne peut obliger quelqu’un à
être payé en monnaie divisionnaire 3. Bien sûr le Trésor est obligé de les
admettre sans limite puisqu’il est l’émetteur de ces pièces. Il est vrai que
certains contribuables malveillants essayaient de payer leurs impôts en
pièces de un centime. Ils ont parfois trouvé dans cette exception un moyen
d’ennuyer leur percepteur.

Quelques points de repère sur la dématérialisation


progressive de la monnaie
Pendant des siècles, sinon des millénaires, la monnaie fut d’abord
une marchandise plus prisée qu’une autre et qui, à ce titre,
pouvait servir de bien intermédiaire. En Anatolie apparaît la
première pièce de monnaie en or, frappée par le roi Crésus vers
550 av. J.-C. Il ne s’agit plus d’une simple marchandise, mais
d’une pièce de métal qui tient sa valeur non seulement du poids
du métal mais du pouvoir que lui a conféré le pouvoir politique.
Durant des siècles. c’est cette monnaie métallique qui fut à la
base des échanges et c’est seulement en 1609 que les banques
d’Amsterdam. suivies en 1619 par celles de Hambourg,
commencèrent à émettre des billets de banque qui étaient, en fait,
des certificats de dépôt d’or. Très vite on comprit qu’une banque
ayant une bonne réputation pouvait émettre plus de billets que ce
qui était garanti par ses dépôts en or, car on préférait utiliser les
billets plutôt que l’or et la loi des grands nombres jouant, la
quantité d’or dont la banque avait besoin était bien inférieure au
montant des billets qu’elle créait. En Angleterre, on fit même
mieux puisqu’on permit à la banque d’Angleterre d’émettre, par
privilège spécial, une valeur égale en billets de banque à l’or qui
avait été prêté au gouvernement de Sa Majesté britannique. Bien
sûr ces papiers de la Banque d’Angleterre étaient remboursables
en or. mais ils n’étaient gagés que sur la certitude que le roi
d’Angleterre rembourserait, sur la confiance accordée au crédit
public. Cela n’alla pas sans mal au moment des guerres
napoléoniennes. mais un pas de plus avait été fait dans la
dématérialisation de la monnaie.
En France, le crédit public n’ayant jamais été très important, cette
dématérialisation eut plus de mal à s’imposer. D’autant plus que
nous eûmes à connaître des aventures assez cuisantes. Après la
mort de Louis XV, le financier Law voulut systématiser le papier
monnaie, prouvant par là que l’on pouvait créer « une nouvelle
espèce de monnaie meilleure que l’or et l’argent ». En fait. il
confondait crédit et monnaie, et il émit tant de ces billets stipulés
en « livres tournois » que l’on dut imposer le cours forcé, ce qui
ne fit qu’accélérer sa banqueroute. Par la suite, l’expérience des
assignats de la Révolution gagés sur les biens confisqués au
clergé, ne fit qu’accroître la méfiance des Français vis-à-vis du
papier monnaie.
Au début du XIXe siècle, tant en France qu’en Angleterre, on se
mit à contrôler très strictement la création de monnaie papier.
L’Angleterre reconstruisit un système fondé sur l’or. En 1844,
l’Act de Peel donna un quasi-monopole d’émission à la Banque
d’Angleterre en lui imposant de ne mettre en circulation
pratiquement que des billets correspondant à une couverture d’or.
On donnait ainsi raison à une école d’économistes, celle de la
Currency School qui ne faisait du billet qu’un simple substitut de
l’or. Par contre, en France, c’est l’école adverse, celle de la
Banking School. qui l’emporta. Bien sûr, le billet devait pouvoir
être, au départ, convertible au gré des porteurs. Mais l’on
admettait que la circulation des billets excédât l’encaisse or et
qu’entre la circulation et l’encaisse or fût établi un lien assez
souple. Le billet de banque devenait ainsi un moyen de prêter de
l’argent créé par la banque d’émission qui. par contre, avait un
monopole, total en 1848. Ce papier monnaie devint de plus en
plus indépendant de la monnaie métallique. D’abord, son cours
légal lui donnait le véritable pouvoir libératoire. au même titre
que les pièces d’or ou d’argent. Ensuite, à partir de 1914. on en
vint, au-delà du cours légal, au cours forcé ; dorénavant, on ne
pouvait plus se procurer des pièces d’or auprès des banques
d’émission.
Bien sûr, un particulier peut passer à la Banque de France un
ordre d’achat d’or. En fait. la Banque de France, grâce à son
service des titres, agira ici comme n’importe quelle banque dont
un client passe un ordre d’achat en Bourse. Elle ne « piochera »
pas l’or dans ses réserves, mais l’achètera sur le marché de l’or
qui fonctionne sous l’égide de la chambre syndicale des agents de
change. En fait. la Banque de France n’a pas eu dix ordres
d’achat d’or à passer en Bourse. Certes il y a à la Banque de
France, et cela trompe parfois certains, une Direction du
commerce de l’or. mais ce service ne vend pas de l’or. Il
réglemente l’importation et l’exportation de l’or.

Le chèque est-il une monnaie ?


Partons de la pratique quotidienne du détenteur d’un carnet de
chèques : M. Albert.
Lorsqu’il veut payer un achat. M. Albert porte par exemple sur le
premier chèque de son carnet une somme de 100 F. indique à qui
elle doit être versée et signe après avoir noté la date.
En réalité, qu’y a-t-il d’inscrit sur ce chèque ?

Banque : SOCIÉTÉ GÉNÉRALE.M. ALBERT. Compte 27

« Veuillez payer la somme de cent francs à M. Bucol


Compte 5025 - Banque Nationale de Paris — Agence de Lyon. »

Or, le fait d’inscrire « veuillez payer » signifie déjà que la simple


remise du chèque n’est pas un paiement ; d’autre part, pour qu’il
y ait effectivement paiement, il faudra que M. Bucol demande à
sa banque (la BNP, Agence de Lyon) d’en recouvrir le montant
auprès de la Société générale, ou bien se présente directement à la
Société générale pour en obtenir le paiement. Enfin, si par hasard
le chèque émis par M. Albert était sans provision, le paiement ne
serait pas effectué.
Nous constatons donc que le chèque n’est pas de la monnaie,
puisqu’une remise de chèques ne signifie pas le paiement
immédiat et, parfois même, pas de paiement du tout.
— Le chèque n’est qu’un ordre de paiement par lequel une
personne. que l’on appelle « le tireur ». donne l’ordre à sa
banque, appelée « le tiré ». de payer une certaine somme, à une
certaine date, au bénéfice d’un tiers, appelé le bénéficiaire. Le
chèque peut être libellé « au porteur » ; dans ce cas. le
bénéficiaire du chèque est la personne qui détient le chèque. C’est
sur simple présentation et remise du chèque au guichet de la
banque du tireur, que la somme inscrite sera remise au porteur si
le chèque est payable à vue.
Alors que le billet se suffit à lui-même dans son rôle d’instrument
d’échange et de moyen de paiement, la monnaie scripturale
nécessite, pour circuler. l’emploi d’un instrument : le chèque.
D’autre part. le chèque pourra servir aussi d’instrument de
transformation de la monnaie scripturale, en billets de banque
(retrait à vue en billets aux guichets).
— Le chèque n’est pas une monnaie, mais un instrument de
circulation et de transformation de la monnaie scripturale.

Les billets de banque ont été, à l’origine, des certificats de dépôt d’or
dans une banque. Les premiers furent utilisés en 1609 et avaient été émis
par une banque d’Amsterdam. Bien entendu, il était tentant de créer plus de
billets qu’il n’y avait de dépôt d’or, parce que tout le monde ne vient pas
réclamer son or en même temps. Ainsi le billet de banque prit une existence
autonome par rapport à la monnaie métallique qu’il commença à remplacer.
Au cours du XIXe siècle, l’émission de billets prit une telle importance
qu’on en donna le monopole à des banques contrôlées par les pouvoirs
publics. C’est ainsi qu’une loi du 13 février 1800 crée la Banque de France,
établissement mixte, ayant le privilège d’émettre les billets dans la région
parisienne ainsi que neuf banques départementales d’émission en province,
le gouverneur de la Banque de France étant nommé par le ministre des
Finances. En 1848, les neuf banques de province sont supprimées, et à
partir de 1870 les billets de banque de la Banque de France ont, ce que l’on
appelle, cours légal : on peut se libérer de ses dettes de manière illimitée en
payant en billets. Jusqu’en 1870, en dehors d’une brève période allant de
1848 à 1850, les billets n’avaient donc pas un pouvoir libératoire et bien des
receveurs généraux refusaient d’accepter les billets de banque et préféraient
être payés en bonnes pièces d’or. Il est vrai que, pour ceux qui avaient
connu le règne de la monnaie métallique en or, il fallait une bonne dose de
foi pour attribuer d’emblée à un morceau de papier, la même valeur qu’à
une pièce d’or. Le mot de monnaie fiduciaire, que l’on donne
habituellement aux billets de banque, vient d’ailleurs de fidus (foi en latin).
Jusqu’en 1914, cet acte de foi était soutenu par le fait que quiconque
pouvait demander et obtenait auprès de la Banque de France un échange de
son billet contre une pièce d’or pour une valeur faciale équivalente. La
guerre de 1914 fit perdre aux billets cette possibilité. Dorénavant il y a
cours forcé. La convertibilité du billet de banque en or au gré des porteurs
est supprimée. Ici, à la faveur d’une circonstance historique, un pas de plus
a été franchi dans la dématérialisation de la monnaie. En fait, dès avant
1914, on était allé beaucoup plus loin dans la dématérialisation par la
monnaie scripturale.

La monnaie scripturale
Si l’on vous demandait ce qu’est la monnaie scripturale, certains d’entre
vous répondraient assez facilement : le chèque. Après tout, le chèque ne
sert-il pas à payer, comme les billets de banque ? Un peu de réflexion
devrait leur faire comprendre leur erreur. Car si le chèque était vraiment de
la monnaie, cela donnerait à chacun d’entre nous le droit de créer de la
monnaie, pour autant qu’il ait un carnet de chèques. Le chèque n’est qu’un
ordre donné à votre banque de payer, grâce à la monnaie scripturale qui est
inscrite à votre crédit sur ses comptes. La monnaie scripturale est donc un
simple nombre inscrit sur le livre de comptes d’une banque en face du nom
d’une personne ou d’une entreprise. Par un simple jeu d’écritures, elle peut
servir d’intermédiaire pour les échanges entre des personnes ou des
entreprises qui ont un compte dans une banque ou aux chèques postaux.
L’opération est semblable à celle faite par des joueurs lorsque, au lieu
d’échanger des jetons ou de l’argent pendant une partie de cartes, ils se
contentent d’ajouter ou de retrancher des points sur un papier. Comme le
billet. la monnaie scripturale peut permettre d’effectuer des transactions et
de garder de la monnaie en réserve.

Quelques points de repère Sur la dématérialisation de


la monnaie
(Suite et..., peut-être, fin)
La dématérialisation du billet de banque ayant été accompagnée
d’une réglementation de plus en plus stricte de son émission par
les pouvoirs publics, les banques, qui avaient autrefois le droit de
mettre en circulation les billets remboursables à vue en monnaie
métallique et qui se voyaient privées de ce droit, au fur et à
mesure que les pouvoirs publics donnaient le monopole de
l’émission des billets à des banques qu’ils contrôlaient.
essayèrent de tourner la difficulté. C’est sans doute en 1742. en
Angleterre. que certaines banques imaginèrent de donner à tous
ceux qui avaient déposé de l’argent le droit de tirer sur elles des
mandats appelés « checks ». qu’elles s’engageaient à payer sur
simple présentation. En fait. la plupart des personnes intéressées
par ce système comprirent très vite que cet ordre de paiement
donné à une banque pouvait leur permettre, non seulement de
retirer de l’argent, mais de payer quelqu’un d’autre qui
demanderait simplement à sa banque de bien vouloir créditer son
compte du montant du « check » et de transférer ainsi, par un jeu
d’écritures, le dépôt d’un individu à un autre. La monnaie
scripturale était inventée. C’est une innovation considérable, car
elle va permettre l’adaptation très souple de la circulation
monétaire aux besoins de l’économie, comme nous le verrons
plus loin. Cette invention ne connut cependant une expansion très
importante qu’au début du XIXe siècle, à partir du moment où. en
Angleterre. la Banque d’Angleterre, institut d’émission, n’eut
plus le droit de créer tous les billets qu’elle désirait. Pour faire
face aux besoins de leur clientèle, les banques de dépôt
répandirent l’usage de la monnaie scripturale. En France, cet
usage fut beaucoup plus lent à être admis, car la Banque de
France pouvait émettre des billets de manière beaucoup plus
ample sans tenir compte d’une manière très stricte de son
encaisse-or.

Notons qu’aujourd’hui, nous atteignons un nouveau degré dans la


dématérialisation. La monnaie scripturale était véritablement,
jusqu’à une époque récente, une écriture matérielle. Avec
l’informatique, elle n’est plus qu’une impulsion magnétique sur
la bande d’un ordinateur. Et l’on peut imaginer le moment où.
grâce à des cartes de crédit et à des terminaux, des individus
pourront transférer, payer, garder en réserve la monnaie qu’ils
possèdent, sur la bande d’un ordinateur... Quant à après-
demain !...

A l’origine, la monnaie scripturale s’est surtout développée en Angleterre


car les règles qui étaient imposées à l’Institut d’émission britannique étaient
tellement strictes qu’il ne pouvait pas créer suffisamment de billets. Aussi
les banquiers trouvèrent-ils le moyen de mettre en circulation une autre
forme de monnaie : la monnaie scripturale. Nous verrons plus loin comment
ils la créèrent. Par la suite, cette forme de monnaie a pris une extension
considérable, car pour effectuer les paiements d’un certain montant. elle est
beaucoup plus pratique que la monnaie matérielle, qu’il s’agisse des pièces
ou des billets. Dans la plupart des pays développés, c’est au moins 80 % de
la masse monétaire qui est représenté par cette monnaie scripturale. Aux
États-Unis on approche même de 90 %.
En effet. la monnaie scripturale offre d’abord une très grande sécurité.
Bien sûr, la banque peut faire faillite, mais cela est maintenant devenu
relativement rare. Ce ne sont pas les hold-up qui remettent en question ce
que la banque s’est obligée à donner à son client quand elle lui ouvre un
compte à vue. Et comment voler un compte à vue ? Sans doute le vol de
carnets de chèques n’est-il pas à exclure, mais il s’agit seulement du vol de
l’instrument de circulation de la monnaie scripturale, et le propriétaire du
carnet de chèques peut immédiatement informer son banquier et s’opposer
ainsi à tout paiement par les chèques volés. Essayez donc de procéder de la
même façon lorsque vous perdez votre portefeuille ou qu’on vous l’a
dérobé. Vous ne pourrez évidemment pas faire opposition auprès de la
Banque de France, car les billets de la Banque de France sont au porteur. Ce
n’est pas uniquement pour des raisons de sécurité que l’utilisation de la
monnaie scripturale est répandue ; c’est surtout par suite de la facilité
qu’elle permet dans les modalités de règlement. De simples jeux d’écriture
permettent en effet de faire circuler des montants considérables de monnaie
scripturale. Enfin et surtout, la monnaie scripturale peut être créée de
manière extrêmement souple et décentralisée, et répondre ainsi aux besoins
de l’économie.
La monnaie et les banques. Shéma n° 1

LA MASSE MONÉTAIRE
L’ensemble des différentes monnaies mises à la disposition des agents
économiques d’une nation représente la masse monétaire de cette nation.
Contrairement au sens commun, la masse monétaire n’est pas seulement
constituée par les billets de banque, mais par la somme de tous les moyens
de paiement mis à la disposition des agents économiques. Il faut donc
ajouter, aux billets de banque, la monnaie divisionnaire et la monnaie
scripturale.
Toutefois, il faut remarquer que les billets ainsi que les pièces possédés
par les banques ou les chèques postaux ne sont pas compris dans la masse
monétaire. Sinon cela reviendrait à surestimer la masse monétaire puisque
les billets ou les pièces qui ont été déposés dans les banques ou les CCP, ont
disparu de la circulation monétaire et y ont été remplacés par de la monnaie
scripturale.
En ce qui concerne la monnaie scripturale, il faut tenir compte de tous les
comptes à vue qui peuvent permettre des paiements immédiats : en d’autres
termes, les comptes à vue dans les banques, qu’ils aient été crédités par
dépôt préalable de monnaie ou par l’ouverture d’un crédit, ou encore les
comptes à vue dans les centres de chèques postaux, au Trésor et à la Banque
de France. En effet, des personnes ont des comptes à la Banque de France
qui joue alors le rôle d’une banque ordinaire. Il faut bien dire que ces
comptes se font rares, et il est assez prestigieux d’avoir son compte en
banque à la Banque de France. Il existe aussi des disponibilités moins
immédiates : ce sont les dépôts sur les comptes de livrets gérés par les
banques qui sont, en fait. une forme d’épargne, mais que l’on peut retirer à
vue : l’épargne liquide. Il faut ajouter les dépôts à terme et les bons de
caisse dans les banques, au Trésor, à la Caisse nationale du Crédit agricole,
voire les dépôts dans les comptes d’épargne-logement gérés par les
banques. Ces disponibilités peuvent être assez facilement transformées en
monnaie. On les appelle d’ailleurs des disponibilités quasi monétaires, car
on peut se faire rembourser à vue et retrouver ses disponibilités en monnaie.
Toutefois, contrairement aux billets ou aux comptes à vue proprement dits,
il est nécessaire de procéder à une opération intermédiaire ; ainsi, on peut
retirer de l’argent de son livret d’épargne au Crédit lyonnais, mais on ne
peut payer un commerçant en présentant ce livret d’épargne. Il faut
préalablement passer au Crédit lyonnais pour retirer la somme dont on a
besoin 4. Toutefois, la convertibilité en monnaie moyen de paiement est
facile, rapide et on peut donc assimiler ces disponibilités à de la monnaie,
d’où le nom de disponibilités quasi monétaires.

La monnaie et les banques. Schéma n° 2.

Cependant, il faut bien constater qu’une partie de l’épargne liquide, que


nous n’avons pas citée dans notre énumération. est exclue de la masse
monétaire ; il s’agit notamment de la quasi-monnaie représentée par les
fonds gérés par les caisses d’épargne, soit les caisses d’épargne ordinaires,
soit la Caisse nationale d’épargne des PTT. Ces dépôts dans les caisses
d’épargne sont très proches des comptes sur livrets tenus par les banques.
De même on exclut les bons du Trésor qui sont aussi très proches des bons
de caisse délivrés par les banques, ou des bons du Crédit agricole. Pourquoi
cette distinction ? Il s’agit pourtant de disponibilités. En fait, la définition
de la masse monétaire en France a répondu au souci des autorités
monétaires de distinguer ce qui est réellement de la monnaie nouvellement
créée, de ce qui est utilisation de la monnaie déjà créée, donc pré-existante.
On a alors distingué les disponibilités monétaires ou quasi monétaires
gérées par des organismes ayant un véritable pouvoir de créer de la
monnaie, des disponibilités quasi monétaires gérées par des organismes qui
n’ont pas un pouvoir de création monétaire. C’est le cas des caisses
d’épargne et de l’organisme qui recueille leurs fonds, la Caisse des dépôts
et consignations. Ils ne peuvent prêter que l’argent déposé et créé
préalablement par d’autres institutions financières, qu’il s’agisse de la
Banque de France ou des banques. De même, les bons du Trésor détenus
par des particuliers représentent une épargne réalisée au moyen de monnaie
pré-existante.
Remarquez que dans une économie on ne peut pas se désintéresser
totalement de ces liquidités non comptabilisées dans la masse monétaire.
Après tout. les titulaires de carnets de caisse d’épargne et de bons du Trésor
peuvent à tout moment retrouver leurs disponibilités et provoquer, au grand
dam du ministre des Finances, une brutale augmentation de la demande.

La monnaie et les banques. Schéma n° 3

Ainsi que nous l’avons expliqué à propos de la dématérialisation


progressive de la monnaie, notons enfin que la monnaie scripturale a pris de
plus en plus de place dans la masse monétaire totale. D’un peu plus de 50 %
de la masse totale, à la fin de la guerre de 1939-1945, elle dépasse
maintenant 80 %. Et dans cette masse totale, les disponibilités quasi
monétaires augmentent beaucoup plus rapidement que les autres. De 10 %
de l’ensemble de la masse monétaire en 1960, on est en effet passé à plus de
50 % aujourd’hui. Cela tient moins à la rémunération de la quasi-monnaie
qu’à l’élévation du niveau de vie qui a entraîné une augmentation de
l’épargne, sans que la préférence des Français à la garder sous forme de
dépôts à vue change et à la mise en place de nouvelles formes de
placements, en épargne liquide (livret d’épargne dans les banques ou encore
livret d’épargne-logement). Ces nouvelles formes d’épargne liquide se sont
d’autant plus facilement développées, que les banques ont tout fait pour
transformer les dépôts à vue en disponibilité quasi monétaire, afin d’assurer
une plus grande stabilité des dépôts.

La monnaie en Union soviétique


En dehors de la brève période du communisme de guerre entre
1918 et 1920, où les responsables de l’Union soviétique tentèrent
de supprimer la monnaie et de remplacer ses fonctions par des
répartitions autoritaires et des bons de travail, la monnaie a
continué à jouer dans l’économie soviétique un rôle prépondérant
dans les échanges.
Toutefois, il existe une différence essentielle entre le système
monétaire de l’URSS et le nôtre. L’URSS utilise en fait deux
monnaies n’ayant pas de véritable interpénétration. La première
sert aux achats de biens de consommation et circule uniquement
au niveau des particuliers et du commerce de détail. Son origine
se trouve dans le fonds des salaires, déterminé chaque année au
niveau national en fonction de la masse de la production destinée
à la consommation des ménages, puis réparti par branche et par
entreprise selon les besoins de l’économie. La seconde, purement
scripturale, sert aux achats de biens de production effectués par
les entreprises et à ceux des administrations.
Ainsi, chaque entreprise reçoit d’une part la monnaie nécessaire à
l’alimentation de son fonds de salaire et celle qui lui permet de se
procurer les biens de production dont elle a besoin. Elle ne peut
jamais se servir de la monnaie destinée au paiement des salaires
pour acheter des biens de production et vice versa. Une fois
perçue par le commerce de détail, la monnaie retourne dans les
caisses publiques.
La seule exception notoire, jusqu’à ces dernières années, était le
marché kolkhozien. En effet, sur ce marché, les agriculteurs des
kolkhozes, c’est-à-dire des coopératives agricoles, vendent
directement la production du lopin de terre qu’ils possèdent en
propre et cultivent individuellement. Notons aussi qu’avec la
réforme Kossyguine, les entreprises qui réalisent des gains de
productivité peuvent en distribuer une partie sous forme de
salaires. Il a été ainsi créé un certain passage entre la monnaie
servant au circuit de biens de production et la monnaie destinée à
la consommation.
De toute façon, ces interpénétrations demeurent encore limitées et
l’existence de deux monnaies empêche tout mouvement
cumulatif d’auto-emballement ou d’auto-freinage. Aucune
production ne peut être amenée à croître par une simple
augmentation de la demande.
L’existence des deux monnaies est en quelque sorte la garantie de
l’application du Plan. Ces différences étant posées, il faut bien
constater que la monnaie joue en URSS, des rôles assez
identiques à ceux qu’elle joue dans les pays capitalistes, et que si
au niveau des biens de production il n’existe qu’une monnaie
scripturale, au niveau des biens de consommation nous
retrouvons les divers types de monnaie (billets de banque, pièces,
et bien sûr monnaie scripturale).
2. Comment créer de la monnaie. Le rôle
des banques

Chacun sait que la Banque de France crée les billets de banque. La


« planche à billets » est célèbre. Moins nombreux sont ceux qui savent que
les pièces de monnaie, la monnaie divisionnaire, sont créées, comme nous
l’avons dit. par l’Hôtel de la Monnaie qui dépend du Trésor, c’est-à-dire du
ministère des Finances. La création de la monnaie scripturale est plus
mystérieuse. Un bon nombre croient qu’après tout la monnaie scripturale ne
fait que se substituer aux autres monnaies. La banque est ainsi considérée
un peu comme une espèce de cagnotte dans laquelle des déposants
viendraient mettre la monnaie qu’ils ne veulent pas garder dans leur
portefeuille ou dans leur coffre, et les banques prêteraient ces dépôts aux
entreprises. Dans le cas où la cagnotte serait insuffisante, les banques iraient
chercher de la monnaie fiduciaire à l’Institut d’émission (en France, la
Banque de France). En fait, il n’en va pas ainsi, et les banques ordinaires,
comme le Crédit du Nord, la Société lyonnaise, la BNP. etc. qui sont aussi
appelées banques commerciales et que l’on distinguait autrefois des
banques d’affaires, ont véritablement un pouvoir de création de la monnaie
scripturale. Le processus de cette création paraît mystérieux, aussi
commencerons-nous par l’expliquer. Cela nous permettra de mieux
comprendre comment sont créés ou mis en circulation les autres types de
monnaie, billets de banque et monnaie divisionnaire.

Test introductif
Soit une banque qui ouvre des crédits à des entreprises pour 1
million à un taux d’intérêt de 10 %. Nous supposons que ces
crédits sont pour un an. Elle gère d’autre part des dépôts.
Supposons qu’elle en ait pour 200 000 F et que la gestion de ces
dépôts lui coûte en frais divers 15 000 F. Supposons enfin qu’elle
puisse éventuellement se procurer de la monnaie Banque de
France à un taux de 5 % par an.
Pouvez-vous dire quelle sera, à la fin de l’année, la marge brute
en chiffre absolu, marge devant couvrir divers frais de son
fonctionnement et lui permettre de réaliser un bénéfice ?

Réponse
Il n’est absolument pas possible de déterminer quelle est sa marge
brute. Si vous avez pu le faire, vous avez supposé que la banque
emprunte à la Banque de France la différence entre la monnaie
que les déposants y ont laissée et le montant de ses crédits. Vous
supposez donc que la banque ne prête que l’argent qu’elle a. Elle
ne crée pas de la monnaie. Lisez donc vite ce chapitre.

LES MÉCANISMES DE LA CRÉATION DE MONNAIE


SCRIPTURALE PAR LES BANQUES

Vous savez sans doute que la monnaie scripturale peut être créée dès que
quelqu’un vient faire en contrepartie, un dépôt de monnaie fiduciaire.
Aussi, nous ne partirons pas de ce type de création, mais de celle qui se
produit lorsqu’une banque ouvre un crédit à une entreprise. Prenons une
entreprise, l’entreprise Bucol. Elle a besoin d’un crédit, car elle a vendu des
biens à une autre entreprise qui ne l’a pas payée immédiatement, lui
demandant crédit pour quelques mois. Elle lui a d’ailleurs signé une
reconnaissance de dette. L’entreprise Bucol va trouver sa banque, que nous
appellerons la Banque du Nord et lui demande de lui ouvrir un crédit. Celle-
ci alimente simplement le compte de l’entreprise du montant du crédit
qu’elle a consenti. Du même coup, elle crée de la monnaie scripturale pour
le montant du crédit ouvert. C’est bien de la monnaie qu’elle crée, puisque
l’entreprise Bucol pourra s’en servir immédiatement pour payer des
fournisseurs ou ses salariés, ou éteindre une dette d’un emprunt précédent,
ou encore garder ce crédit en réserve pour faire face à un événement
imprévu. Bien entendu, il y a plusieurs manières pour la banque d’accorder
ce crédit. Elle peut simplement permettre à l’entreprise un découvert, c’est-
à-dire la possibilité de tirer sur son compte au-delà de l’argent qu’elle y a
déposé. Dans ce cas, la banque est garantie par la notoriété de l’entreprise,
sa « surface financière ». Dans d’autres cas, elle peut demander à
l’entreprise de lui donner en garantie quelque chose de plus tangible que sa
simple notoriété et sa bonne renommée. Ainsi l’entreprise peut-elle être
amenée à céder à la banque les reconnaissances de dette qu’avaient signées
les clients qui n’avaient pu la payer immédiatement. Cette cession de
reconnaissance de dette s’effectue généralement sous forme d’une opération
d’escompte.
Mais, revenons à l’ouverture du crédit et construisons le tableau de bord
de la Banque du Nord. Si nous supposons que la Banque du Nord a accordé
10000 F de crédit, et que pour garantir ces 10000 F l’entreprise Bucol lui a
cédé 10000 F de reconnaissance de dette, on obtient le tableau suivant :

La lettre de change et l’escompte


Les relations financières qu’une entreprise établit avec sa
clientèle concernent essentiellement la vente des biens ou des
services payés en monnaie, soit à la livraison des marchandises,
soit quelques jours plus tard, soit avant même la livraison, dans le
cas d’une avance sur monnaie. Il se peut cependant que, pour des
raisons de politique commerciale, l’entreprise accorde à son
client un délai de paiement. Dans ce cas, et pour se prémunir d’un
non-paiement à échéance, l’entreprise demande à son client de lui
signer un effet de commerce, c’est-à-dire une forme de
reconnaissance de dette.
Prenons l’exemple de l’entreprise Bucol qui établit une lettre
stipulant que le client Dupont lui doit 10 000 F, payables dans 60
jours. Cette lettre est envoyée à M. Dupont qui la signe,
reconnaissant ainsi sa dette, et la renvoie à l’entreprise Bucol. Si
dans le mois qui suit la vente, l’entreprise Bucol a des difficultés
de trésorerie, la lettre pourra être échangée auprès d’une banque
(moyennant intérêt) contre de la monnaie, ou auprès d’un
fournisseur de l’entreprise Bucol, contre l’extinction d’une dette
qu’elle a envers lui, d’où son nom de lettre de change.
Ainsi, la lettre de change est un effet de commerce par lequel un
créancier (le tireur) commande à son débiteur (le tiré) de payer à
une date donnée (l’échéance) une somme déterminée
(généralement le prix de vente d’une marchandise) à une
personne (le bénéficiaire) dont le nom est inscrit sur l’effet.
Notons que le bénéficiaire peut être le tireur lui-même, ou toute
autre personne à qui l’entreprise fournisseuse devrait de l’argent.
La lettre de change peut être :
— acceptée par le tiré qui signera en inscrivant le mot accepté et
s’engagera ainsi au paiement à échéance ;
— également avalisée par un tiers qui signera en inscrivant le mot
aval et s’engagera à payer pour le tiré si celui-ci est insolvable à
l’échéance ;
— ou encore portable à l’encaissement par le bénéficiaire ou par
un tiers (auquel cas le bénéficiaire l’endossera au nom d’un
tiers) ;
Le tiré peut mentionner sur la lettre de change l’adresse de son
banquier qui la paiera sur son compte, à l’échéance : c’est la
domiciliation.
Il existe aussi, parmi les effets de commerce. des billets à ordre
qui ne font intervenir que deux commerçants : un débiteur et un
créancier, mais qui circulent comme les lettres de change. On
peut encore assimiler à l’effet de commerce le récépissé warrant
qui constate l’existence. de préférence dans un magasin général,
d’une marchandise donnée en garantie.
Nous venons de voir que l’entreprise peut utiliser un effet de
commerce (une lettre de change, par exemple) et l’échanger, en
cas de besoin de monnaie, auprès d’une banque. La banque, en
contrepartie de la lettre de change, ouvre un crédit à l’entreprise
(si la lettre de change est à 60 jours d’échéance, le crédit sera
consenti pour 60 jours).
Que s’est-il passé ? L’entreprise possédait une créance et. grâce à
l’opération avec la banque, dispose maintenant de monnaie.
L’ouverture du crédit a donc rendu liquide et a mobilisé une
créance (un actif non monétaire) qui ne l’était pas. L’opération
qui s’est établie entre l’entreprise et la banque, par la remise
d’une créance en contrepartie de l’ouverture d’un crédit (ici. à
court terme, 60 jours) s’appelle l’escompte. En effet, le banquier
escompte être remboursé à l’échéance :
— soit par le client de l’entreprise.
— soit à défaut par l’entreprise elle-même,
— soit par l’avaliste éventuel.
Dans la pratique courante, il faut noter que si l’entreprise apporte
à l’escompte du banquier, une créance de 100 n’arrivant à
échéance que dans un an. ce dernier n’offrira qu’un crédit de 90.
On dira alors que le taux de l’escompte est de 10 %, le taux de
l’escompte étant la rémunération que le banquier prend pour le
service rendu.
Notez qu’il ne faut pas confondre le taux de l’escompte et le taux
de réescompte, que nous aurons l’occasion d’expliquer plus loin.

COMPTE DE LA BANQUE DU NORD

L’entreprise Bucol ne va pas laisser dormir ce crédit, d’autant plus que la


banque ne fait pas de philanthropie et qu’elle lui demande un taux d’intérêt
et des agios parfois fort élevés. Peut-être, vous demandez-vous comment la
banque va pouvoir se sortir du mauvais pas dans lequel elle s’est mise ?
D’une part elle n’a dans ses avoirs que des reconnaissances de dette, du
moins pour l’instant, et aucune monnaie de la Banque de France. D’autre
part elle s’est engagée à payer à vue à toute personne désignée par
l’entreprise Bucol 10000 F. En fait, il n’est absolument pas certain que la
banque ait besoin de monnaie fiduciaire pour faire face au crédit qu’elle a
ouvert.
La monnaie et les banques. Schéma n° 4

Les cas où la banque n’a pas besoin de monnaie fiduciaire


Tout d’abord l’entreprise Bucol peut demander à la Banque du Nord,
grâce à un chèque ou à un ordre de virement, de payer une personne qui a
un compte dans cette même Banque du Nord. Dans ce cas. il y a
simplement transfert de monnaie scripturale par un simple jeu d’écritures
du compte de l’entreprise Bucol au compte de cette entreprise que nous
supposons être l’Entreprise textile du Nord et du Rhône. La Banque du
Nord n’a donc pas besoin de payer en monnaie fiduciaire pour le compte de
son client l’Entreprise textile du Nord et du Rhône. Si par exemple le
transfert interne représente 2 000 F, à la fin de l’opération, le compte de la
Banque du Nord sera le suivant :
BANQUE DU NORD

Nous insistons sur le fait qu’il n’y a pas eu besoin de transférer de la


monnaie fiduciaire. Si tous les crédits étaient ouverts à l’intérieur d’une
même banque et si personne ne demandait à sortir de la monnaie de cette
banque, celle-ci aurait une capacité de création de monnaie infinie.
Dans la plupart des cas, l’entreprise va demander à sa banque d’utiliser
son crédit pour payer une entreprise ayant un compte dans une autre
banque. Par exemple l’entreprise Bucol veut payer une entreprise ayant un
compte à la Banque du Sud. En réalité, comme toutes les banques font en
même temps crédit, il y a de fortes chances pour que la Banque du Sud qui
devrait ainsi bénéficier d’un transfert de monnaie fiduciaire doive aussi
réaliser un transfert au profit de la Banque du Nord. Il y a ce que l’on
nomme un phénomène de compensation.
Décomposons-le pour bien comprendre ces diverses étapes :

Première étape.
L’entreprise Bucol, qui a obtenu le crédit dans la Banque du Nord,
utilisera les 8 000 F de crédit qui lui restent à payer par des chèques à
l’entreprise Aden qui a un compte à la Banque du Sud. L’entreprise Aden
apporte le chèque à sa banque. Supposons que la Banque du Sud ait de son
côté accordé 8 000 F de crédit à M. Dupont. Supposons aussi que M.
Dupont utilise son crédit pour payer, grâce à un chèque, M. Alain qui a un
compte à la Banque du Nord. Sous réserve d’encaissement, les deux
banques du Nord et du Sud vont créditer les comptes respectivement de
l’entreprise Aden et de M. Alain. Nous pouvons schématiser ainsi les
résultats des opérations précédentes :
BANQUE DU NORD

BANQUE DU SUD

Les chèques tirés sur les crédits, n’ayant pas encore été présentés à leur
banque d’origine, n’ont pas encore été débités.

Deuxième étape : la compensation.


La Banque du Nord et la Banque du Sud engagent la compensation. Elles
constatent alors que les chèques tirés sur l’une et l’autre banques
représentent des montants identiques. Elles procèdent à l’échange des
chèques et il y a compensation totale entre leurs dettes réciproques,
lesquelles sont éteintes.
La Banque du Nord rentre alors en possession du chèque émis par
l’entreprise Bucol, et il en est de même pour la Banque du Sud, qui rentre
en possession du chèque émis par M. Dupont.
Chaque banque va ainsi pouvoir débiter le compte de son client, tireur du
chèque :
— Banque du Nord : le compte de Bucol sera débité de 8 000 F ;
— Banque du Sud : le compte de Dupont sera débité de 8 000 F.
A la fin de l’opération de compensation, les comptes des deux banques
sont devenus :

BANQUE DU NORD

BANQUE DU SUD

La compensation a permis de transformer des paiements externes en


transferts internes.
Ainsi, jusqu’ici, nous devons remarquer que les banques ont pu créer de
la monnaie scripturale sans avoir besoin de posséder de la monnaie
fiduciaire ou, si vous préférez, de la monnaie créée par la Banque de
France. Notons aussi que les banques créent cette monnaie scripturale
contre l’échange de créances qui ne peuvent pas servir véritablement de
moyen d’échange. Cela est aussi vrai en ce qui concerne le découvert de
l’escompte. Le crédit a donc pour objet de permettre de rendre liquides des
actifs qui ne le sont pas ; par exemple des créances libellées à trois mois et
qui ne représenteront donc un avoir monétaire que dans trois mois. Le crédit
permet ainsi d’anticiper sur les opérations. Nous voyons là un phénomène
important : la monnaie n’est pas seulement un instrument d’échange, mais
aussi le résultat d’une anticipation.

Le cas où la banque a besoin de payer en monnaie fiduciaire


Tout ne se passe pas toujours aussi bien. Certains bénéficiaires des
chèques tirés sur les comptes crédités demandent, par exemple, à être payés
en monnaie fiduciaire. Ou encore la compensation n’est pas toujours
parfaite. La banque doit alors régler en monnaie fiduciaire. En effet, la
monnaie scripturale d’une banque ne peut être utilisée qu’en transfert
interne. Nous avons vu d’ailleurs que la compensation n’amène pas le
passage d’une monnaie scripturale d’une banque à une autre. Elle évite
simplement des transferts externes et amène chaque banque à transformer
des transferts externes en transferts internes.
Dans le cas de la compensation parfaite, nous venons de voir que les
deux banques avaient :
1. crédité les comptes des bénéficiaires des chèques à l’encaissement ;
2. compensé les dettes réciproques de leurs clients en échangeant les
ordres de paiement : les chèques ;
3. débité les comptes des tireurs des chèques échangés.
Si les opérations précédentes ont pu être effectuées sans utiliser de
monnaie fiduciaire, c’est uniquement parce que la compensation entre les
banques était totale.
Prenons un exemple où cette compensation n’est pas totale.
Supposons que la Banque du Nord ait accordé le crédit de 10 000 F à
l’entreprise Bucol, mais que l’entreprise Bucol ait remis un chèque de
10 000 F à l’entreprise Aden qui a un compte à la Banque du Sud. D’autre
part, la Banque du Sud a accordé le crédit de 8 000 F à M. Dupont, qui a
remis un chèque de 8 000 F à M. Alain ayant un compte à la Banque du
Nord.
Voyons comment se présentent les comptes des banques du Nord et du
Sud au moment de la présentation des chèques à la compensation. (Les
comptes des bénéficiaires des chèques ont été crédités sous réserve
d’encaissement et les comptes des tireurs n’ont pas encore été débités.)
BANQUE DU NORD

BANQUE DU SUD

Nous voyons que les chèques n’ont pu être échangés entre les deux
banques, car on ne pouvait les compenser. La Banque du Nord (pour le
compte de son client Bucol) doit 10000 F à la Banque du Sud (pour le
compte de son client Aden). La Banque du Sud (pour le compte de son
client Dupont) doit 8 000 F à la Banque du Nord (pour le compte de son
client Alain).
Si une compensation partielle avait eu lieu, la Banque du Nord aurait dû
encore 2 000 F à la Banque du Sud.
La banque doit alors régler en monnaie fiduciaire, c’est-à-dire en
monnaie de la Banque de France.
Cette monnaie fiduciaire peut provenir tout d’abord des personnes qui en
ont déposé à la banque pour approvisionner leur compte (par exemple des
commerçants qui sont très souvent payés en monnaie fiduciaire). En effet,
ces personnes ne retirent pas immédiatement la monnaie qu’elles viennent
de déposer et, en tout cas, paient le plus souvent leurs dépenses par chèques
qui donnent lieu, soit à des transferts internes, soit à nouveau à des
compensations. La monnaie fiduciaire demeure dans tous ces cas dans les
avoirs de la banque.
Reprenons notre exemple : supposons qu’un certain M. Lambert, séduit
par tous les avantages que lui offre la Banque du Nord (gestion de son
compte, relevé hebdomadaire ou mensuel, prélèvement automatique des
impôts, de ses notes d’électricité, etc.), y ait déposé 4 000 F de billets. Les
comptes de la Banque du Nord peuvent alors s’établir comme suit :

BANQUE DU NORD

M. Lambert a reçu un carnet de chèques, et bénéficie d’un certain


nombre de services de la Banque du Nord. M. Lambert paie ses dépenses
grâce à des chèques, lesquels donnent lieu soit à des transferts internes, soit
à une compensation. La monnaie fiduciaire demeure dans tous ces cas, dans
les avoirs de la Banque du Nord. La Banque du Nord va donc pouvoir
utiliser une partie de cette monnaie fiduciaire (billets...) : 2 000 F pour clore
enfin la non-compensation avec la Banque du Sud.

Les comptes des banques après la clôture des opérations sont les
suivants :
BANQUE DU NORD

BANQUE DU SUD

La non-compensation de départ est devenue une compensation partielle


complétée par un paiement en monnaie fiduciaire. Les transferts externes
(entre banques) n’ont été effectués que pour leur solde (différence).
Bien entendu, les dépôts réalisés par les divers clients de la banque
peuvent ne pas suffire et la banque est alors amenée à se procurer de la
monnaie fiduciaire, soit à la banque d’émission, soit auprès des banques qui
en posséderaient sans en avoir l’utilisation immédiate. Nous reverrons ce
problème dans la prochaine section. Ce qui est certain, c’est que, sauf crise
grave et panique financière, les banques n’ont pas à faire face à des retraits
représentant l’ensemble de leurs engagements de payer à vue.
Certains retirent de l’argent, d’autres en remettent. Si vous, par exemple,
vous retirez de l’argent pour effectuer divers achats, les commerçants ne
garderont pas cet argent dans leur coffre ou leur tiroir-caisse. Le soir même
ils s’empresseront peut-être de le déposer au guichet de leur banque. Bien
sûr, ce ne sera peut-être pas la banque à laquelle vous avez retiré de
l’argent, mais des phénomènes de compensation joueront à nouveau. Ils
seront d’autant plus équilibrés que le nombre des personnes retirant et
déposant de l’argent est très important. La loi des grands nombres joue.
Certes, il faut que les banques soient prévoyantes et qu’elles maintiennent
dans leurs avoirs une proportion relativement constante, entre leurs
engagements à payer à vue et la monnaie fiduciaire qu’elles possèdent, En
France cela ne fait guère plus de 10 % du total de ses engagements, mais
avec les autres avoirs mobilisables on obtient près de 60 % de ses
engagements.

La monnaie et les banques. Schéma n° 5


La répartition très simplifiée des comptes d’une banque serait pour 100
d’engagements :

Nous constatons donc :


1. que l’ouverture de crédit aux entreprises est une création pure et
simple de monnaie scripturale ;
2. que cette création ne se fait pas à partir d’une autre forme de monnaie.
La banque n’a pas besoin d’avoir la contrepartie exacte en billets de
banque du crédit qu’elle ouvre ;
3. que l’expérience montre qu’il est nécessaire, pour les banques, de
conserver un minimum de billets ou de monnaie Banque de France,
pour répondre aux opérations courantes. Si les banques recherchent
ainsi des dépôts, ce n’est pas, du moins directement, pour consentir des
crédits, mais pour faire face à un besoin de liquidité. Il s’agit
essentiellement pour elles d’obtenir des dépôts en billets Banque de
France pour résoudre leurs problèmes de trésorerie. Au fond, les
banques sont des entreprises qui fabriquent de la monnaie scripturale,
et, comme toute entreprise, pour leur fonctionnement, elles ont besoin
d’un certain volume de trésorerie.

ATTENTION
Nous venons de voir que le crédit accordé par une banque à une
entreprise aboutit à une création de monnaie scripturale.
Mais attention, tout crédit n’aboutit pas à une création de monnaie.
Certains crédits sont financés par des ressources non monétaires,
notamment par l’épargne. Il en va notamment ainsi de ceux qui sont
financés par les organismes spécialisés de crédit (Crédit national. Crédit
foncier de France. Caisse des dépôts et consignations, le Fonds de
développement économique et social...).
Nous aurons l’occasion d’en reparler. De toute manière vous pouvez vous
reporter au chapitre 6, « Les institutions financières », dans l’ouvrage de la
même collection le Circuit de l’économie nationale.

COMMENT LES BANQUES PEUVENT-ELLES FAIRE FACE A


LEURS BESOINS DE MONNAIE FIDUCIAIRE ? 5

Dans la première section de ce chapitre, nous avons évoqué le cas où la


banque doit finalement faire face à une sortie nette de monnaie fiduciaire.
Cela peut avoir lieu dans diverses occasions :
Tout d’abord, des clients retirent des billets à ses guichets. Nous l’avons
vu plus haut. les transactions payées en monnaie fiduciaire représentent
environ 16 % de la masse monétaire. Il est d’ailleurs des périodes de
l’année où les sorties sont beaucoup plus fortes que les rentrées, notamment
en fin d’année.
La banque peut aussi, à la demande de ses clients, se procurer des devises
étrangères et procéder ainsi à des transferts à l’étranger qui vont aboutir à
une diminution de ses disponibilités. Elle devra échanger dans ce cas la
monnaie Banque de France contre de la monnaie étrangère.
Enfin, la banque peut être amenée à transférer au profit du Trésor des
sommes dues par ses clients, par exemple le paiement des impôts, ou encore
le paiement de sommes dues à des titulaires de chèques postaux qui sont
détenus par le Trésor public.
Ce sont là, en quelque sorte, les causes naturelles de la fuite des billets
hors de la banque. Nous verrons plus loin que les autorités monétaires
peuvent aussi imposer aux banques des règles qui les obligent à se procurer
plus de monnaie fiduciaire qu’il n’en serait naturellement nécessaire.
Il n’est pas question pour une banque de ne pas faire face à ses
engagements. Toute la confiance dans le système bancaire serait réduite à
néant. Certes, on a vu dans le passé des banques faire banqueroute, et il
arrive parfois encore que certaines petites banques n’arrivent plus à faire
face à leurs engagements. En réalité, il existe des recours possibles pour la
banque, même dans le cas où les sorties de monnaie Banque de France, de
monnaie fiduciaire. n’étaient pas prévisibles. Ainsi en 1968. à Paris,
certaines banques durent faire face à des retraits massifs de billets à leurs
guichets. Certaines personnes ayant des comptes dans ces banques avaient
peur que ces dernières ne possèdent pas l’argent qu’elles y avaient déposé.
La méfiance se répandit vite et les premiers retraits furent rapidement
accompagnés d’autres. Certes, dans des cas aussi imprévus. on peut
toujours décider de fermer les guichets. Le remède risque parfois d’être pire
que le mal. La méfiance s’étendra d’une banque ou de quelques banques à
l’ensemble du système bancaire. Or. vous l’avez compris, à travers la
compensation, c’est le crédit d’une banque qui fonde le crédit d’une autre
banque. L’ensemble du système bancaire risque alors de s’effondrer comme
un château de cartes. On a vu d’ailleurs dans le passé des krachs bancaires
entraîner plusieurs dizaines de banques, notamment en Angleterre et aux
États-Unis.

Test introductif

1. Lorsque les banques n’ont plus de VRAI ou


monnaie fiduciaire, elles s’en procurent FAUX
auprès de l’Institut d’émission (en France,
la Banque de France) grâce au
réescompte.
2. Les banques doivent se procurer, auprès VRAI ou
de la Banque de France, la différence en FAUX
monnaie fiduciaire entre les crédits
qu’elles ont accordés et la monnaie
fiduciaire qu’elles possèdent déjà.
3. Le marché monétaire est un marché de VRAI ou
monnaies situé dans les locaux de la FAUX
Banque de France.

Réponses
Toutes ces propositions sont des erreurs.
1. Si vous avez répondu « VRAI », vous vivez sur des
réminiscences. Le réescompte n’est plus aujourd’hui qu’un
moyen exceptionnel pour les banques de se procurer de la
monnaie fiduciaire. C’est essentiellement à travers le marché
monétaire que les banques font face à leurs besoins de trésorerie
et que la Banque de France les y aide. Vous auriez dû lire plus
attentivement la section précédente. En tout cas, lisez rapidement
cette section.
2. Si vous avez répondu « VRAI », comment faut-il lutter contre
l’idée que la banque ne peut prêter que l’argent qu’elle possède ?
Relisez obligatoirement la section 1.
3. Si vous avez répondu « VRAI », vous avez avantage à lire la
présente section et notamment le passage concernant le marché
monétaire.

Aujourd’hui un tel accident est de plus en plus improbable, car des


recours existent. Ainsi, en France, les banques peuvent à tout moment se
procurer la monnaie Banque de France dont elles ont besoin. Les clients,
pris de panique, s’aperçoivent au bout d’un moment qu’au fond ils peuvent
retirer quand ils veulent les billets qu’ils avaient déposés. Chacun retrouve
alors son calme et surtout la certitude de ne pas avoir été dupé. La confiance
est revenue. les clients déposent à nouveau leur argent aux guichets. Tout
est rentré dans l’ordre !
De toute manière, même en dehors de circonstances aussi graves. la
banque a toujours la possibilité de faire face à ses besoins de trésorerie. Il
existe pour elle deux grands types de recours : elle peut :
— soit trouver de la trésorerie auprès des autres banques.
— soit faire appel à la Banque de France.

Trouver de la trésorerie auprès des autres banques


Reprenons notre exemple et supposons que la Banque du Nord présente
au départ les comptes suivants (p. 53) :
La monnaie et les banques Schéma n° 6
Supposons maintenant que la Banque du Nord doive faire face à une
sortie nette de 10 000 F de monnaie fiduciaire. Certes, elle les possède,
mais ces 10 000 F une fois sortis, elle n’aura plus un pourcentage de
disponibilité immédiate suffisant. En effet. il ne lui restera plus que 10 000
F de monnaie Banque de France, alors que ses engagements se montent à
110 000 F ; elle doit donc au plus tôt retrouver de la trésorerie, lorsqu’elle
juge qu’elle est en difficulté. Si, parallèlement, d’autres banques ont
justement de la trésorerie disponible donc oisive, supérieure à leurs besoins
normaux, ces banques vont tenter de rentabiliser cette trésorerie, chercher à
la prêter. La Banque du Nord va donc formuler une demande auprès des
autres banques qui seront ainsi amenées à lui prêter, bien entendu contre
une rémunération, l’argent nécessaire à sa trésorerie. Comme dans toute
opération de prêt, il faudra des garanties. La Banque du Nord apportera en
garantie une partie des créances qu’elle possède et, en échange, les autres
banques lui céderont pour une durée déterminée, généralement très courte,
la monnaie fiduciaire. La Banque du Nord aura ainsi obtenu le
refinancement d’une partie des créances qu’elle possédait. Le taux d’intérêt
qu’elle sera amenée à payer variera en fonction de l’offre et de la demande
de trésorerie. Si la demande de trésorerie est importante par rapport à
l’offre, elle devra payer fort cher la trésorerie offerte en faible quantité pour
être sûre de l’obtenir. Inversement, si le besoin de trésorerie est faible par
rapport à l’offre, les banques qui offrent de la trésorerie accepteront sans
doute de prêter à des taux plus faibles. Mieux vaut un faible taux que ne
rien gagner et garder une trésorerie oisive. Tel est le principe de ce que l’on
appelle le marché monétaire. C’est en quelque sorte le marché des surplus
de trésorerie et de monnaie fiduciaire. Son fonctionnement réel est
évidemment un peu plus complexe.
1. Les banques ne sont pas les seules à intervenir sur ce marché
monétaire en tant qu’offreurs ou demandeurs. Le Conseil national du
crédit, qui est l’institution exerçant le pouvoir législatif dans le
domaine du crédit, autorise à intervenir sur ce marché, non seulement
les banques, mais aussi des établissements publics ou semi-publics à
caractère financier, comme la Caisse des dépôts et consignations, les
sociétés d’assurances. de capitalisation, de prévoyance, de retraite.
2. Les transactions qui s’opèrent sur ce marché et qui sont souvent
relatives à des crédits très courts, parfois d’un ou deux jours, et qui. de
toute manière, ne doivent pas dépasser trois mois, s’effectuent sous la
forme, soit de cessions définitives (vente d’effets). soit temporaires (on
parle alors de prise en pension, l’effet étant véritablement transféré
d’une banque à une autre). Dans certains cas. la procédure est encore
plus simple : il y a simplement mise sous dossier, à la banque
d’origine, des effets au nom de la banque qui a accordé l’avance de
trésorerie. La pension est la formule la plus usitée. Nous verrons plus
loin que les nouveaux modes d’intervention de la Banque de France
sur ce marché tendent à donner la prépondérance aux achats fermes.
Les effets qui sont ainsi cédés ou pris en pension sont, soit représentatifs
de crédit accordé à des entreprises, soit publics comme les bons du Trésor.
Notons cependant que certaines transactions ont la forme de prêt en blanc
de banque en banque et ne sont donc pas couvertes par des cessions de
créances.
3. Les transactions ne se font pas directement. Elles passent par
l’intermédiaire de courtiers et de maisons de réescompte, comme la
Compagnie parisienne de réescompte, la Société privée de réescompte
ou encore la Banque d’escompte. Notons que dans ce cas le terme de
maison de réescompte n’a rien à voir avec l’escompte puisque les
opérations se passent sur le marché monétaire.
Ces intermédiaires agissent essentiellement par téléphone ou par télex.
Le matin ils essaient de mettre en relation des demandeurs et des offreurs de
trésorerie. Il n’existe pas un lieu où siégerait le marché monétaire comme il
existe, par exemple, la Bourse pour les actions et les obligations.
4. Les taux sont librement débattus et ils peuvent varier d’heure en heure.
Une banque qui, le matin, a craint d’avoir des besoins de trésorerie
importants peut. dans l’après-midi, essayer de reprêter l’argent qu’elle
a emprunté le matin si ses besoins en trésorerie se sont finalement
révélés inférieurs à ce qu’elle craignait. Le taux du marché monétaire
qui est publié est en définitive un taux moyen. Il est à noter que
lorsque la demande est forte le marché est dit emprunteur ; lorsque
l’offre est forte le marché est dit prêteur. En France, la tendance
permanente exprime un très fort endettement des banques. Les besoins
de trésorerie sont grands et le marché est le plus souvent emprunteur.
Ici les opérations ne pourraient s’équilibrer sans l’intervention de la
Banque de France, qui fournit au marché monétaire de la monnaie
Banque de France, que ne permet pas de dégager la simple gestion de
la trésorerie des banques et des autres organismes agissant sur le
marché monétaire.
Faire appel à la Banque de France
Nous abordons ainsi le deuxième moyen dont dispose une banque pour se
procurer de la monnaie fiduciaire : faire appel à la Banque de France.
Beaucoup pensent que ce recours à la Banque de France se réalise
essentiellement par le réescompte. Ce fut longtemps vrai mais. depuis 1971.
la Banque de France n’intervient plus qu’exceptionnellement par le
réescompte. Sa principale intervention se fait à travers le marché monétaire.
Comme une autre institution financière, la Banque de France peut, soit
acheter ferme, soit prendre en pension des effets représentatifs de crédit. La
procédure, bien-qu’instituée en 1938. n’avait été jusqu’à une date récente,
que faiblement utilisée. C’est au début de 1971 que la Banque de France a
abandonné en grande partie le réescompte, le réservant aux opérations
qu’elle veut privilégier, comme les crédits à l’exportation ou certains crédits
à moyen terme. Dès le début de 1972 on a pu constater que les effets
achetés à la Banque de France sur le marché monétaire atteignaient près de
trois fois le montant des effets portés au réescompte de la Banque de
France. Il est intéressant de souligner que ce type d’intervention de la
Banque centrale sur le marché monétaire, si elle est nouvelle dans le cas
français, existait depuis de très longues années en Grande-Bretagne et aux
États-Unis où son rôle y était prépondérant. Notons ici que depuis 1973, la
Banque de France n’intervient plus chaque jour sur le marché monétaire,
mais qu’elle fixe chaque mois le maximum d’effets qu’elle achètera sur ce
marché et procède alors à des achats fermes et non plus à de simples prises
en pension. Les banques sachant. chaque mois. quelle quantité limitée de
monnaie Banque de France elles peuvent escompter, sont ainsi incitées à
une plus grande prudence.
Le réescompte n’en demeure pas moins. Dans ce cas. les garanties que
peut posséder une banque (dans notre exemple la Banque du Nord), et
qu’elle a reçues de ses clients, sont cédées à la Banque de France
moyennant une rémunération. Le taux de réescompte vient en déduction de
la valeur de la créance, lorsque cette dernière arrivera à échéance. Si. par
exemple, cette créance, représentée par une traite commerciale, vaut 10 000
F à l’échéance de deux mois et si le taux de réescompte est de 6 %. la
Banque de France sera amenée à acheter cette créance 10 000 F moins 100
F (effet du réescompte pour deux mois au taux de 6 %). Lorsque la créance
arrivera à échéance. la Banque de France se fera payer 10000 F. Elle aura
donc gagné 100 F soit le montant correspondant au taux de réescompte,
entre le moment où elle acquiert la créance et le moment où cette créance
vient à échéance. Notez qu’il y a similitude entre les opérations d’escompte
et de réescompte. Comme dans le cas du marché monétaire, il y a
refinancement du crédit.
Bien entendu, qu’il s’agisse du marché monétaire ou de réescompte, la
Banque de France n’accepte que certaines catégories d’effets ; nous les
examinerons plus loin en étudiant le bilan de la Banque de France.
Quelles sont les raisons qui ont amené la Banque de France à substituer
au réescompte les interventions sur le marché monétaire ?
La principale est d’abord la souplesse. Le marché monétaire, à la
différence du réescompte, n’est pas soumis à des normes rigides : le volume
des transactions et les taux d’intérêt sont variables. Ainsi. la Banque de
France peut-elle en permanence adapter son action aux objectifs de sa
politique monétaire, en particulier en faisant varier les taux sur le marché en
fonction de ce qu’elle estime souhaitable.
On a reproché par contre à ce système de priver la Banque de France
d’un contrôle sur la qualité des effets et l’empêcher ainsi de choisir les
secteurs où il serait préférable d’orienter le crédit. Le réescompte, en
permettant de choisir quels types d’effets seront acceptés ou non au
réescompte, inciterait les banques, mieux que le marché monétaire, à prêter
à telles catégories d’entreprises plutôt qu’à telles autres. C’est là une
interprétation erronée des faits. Pour être éligible au marché monétaire un
effet doit être mobilisable, c’est-à-dire avoir obtenu un accord de
mobilisation de la Banque de France. A travers cet accord, la Banque de
France peut donc agir sur la qualité des effets et orienter le crédit. Bien
entendu son action n’est possible qu’à la condition que son intervention soit
nécessaire, mais c’est aussi vrai en ce qui concerne le réescompte.
Nous retrouverons tous ces problèmes à propos du contrôle de la création
monétaire.
Dans tous les cas, le refinancement des banques aboutit, pour les banques
qui ont besoin de se procurer des moyens de trésorerie. à une transformation
d’avoirs non liquides, non mobiles, en avoirs liquides, mobiles ou, si vous
préférez, d’actifs réels représentatifs de marchandises. les effets, en actifs
monétaires.

Test introductif au chapitre 3

L’expression « planche à billets » évoque- OUI NON


t-elle pour vous (on peut donner plusieurs
réponses positives) :
1. Le crédit aux entreprises ☐ ☐
2. Le déficit budgétaire ☐ ☐
3. L’entrée de l’or dans les caves de la ☐ ☐
Banque de France
4. L’inflation ☐ ☐
5. Rien du tout ☐ ☐
[réponses]
3. La création de la monnaie fiduciaire

Vous savez sans doute que la Banque de France, l’Institut d’émission, que
l’on nomme aussi Banque centrale, fabrique et met en circulation les billets.
On lui prête souvent le même rôle pour les pièces de monnaie. Or, nous
avons déjà eu l’occasion de le dire, si elle met bien en circulation la
monnaie divisionnaire (les pièces de monnaie), elle ne les fabrique pas.
Rappelons que c’est le Trésor public qui a gardé cette prérogative.
A quelle occasion un institut d’émission émet-il de la monnaie ? Vous
avez peut-être pensé spontanément à la planche à billets et au déficit
budgétaire ; ou bien à l’entrée de l’or et des devises (les monnaies d’autres
pays) dans les caves de l’Institut. Ce n’est pas tout à fait faux, mais c’est
une représentation trop étroite. Le but de ce chapitre permettra d’élargir et
de préciser le rôle de l’Institut d’émission, ou si vous préférez, de la Banque
centrale 6, en examinant à quel propos est créée et mise en circulation la
monnaie scripturale.

LES FONCTIONS DE LA BANQUE CENTRALE

Dans le chapitre premier, nous avons vu que l’émission de billets fut. à


l’origine, inventée par des banques ordinaires (ou presque). Pendant
longtemps, il en alla ainsi. Les billets de banque, qui étaient au départ de
simples certificats de dépôt d’or dans les banques, devinrent ainsi
progressivement un moyen de crédit, soit aux entreprises, soit aux
gouvernements. Ce fut la cause de bien des illusions. Aussi, les
gouvernements tentèrent-ils de remettre de l’ordre dans les émissions de
billets en favorisant la création de banques auxquelles ils donnèrent, parfois
par étape, le monopole de la création des billets. Ce fut le cas notamment en
Suède pour la « Banque du Parlement » instituée en 1656 et qui fut. sans
doute. la première banque centrale. Ou encore pour la Banque de France.
créée en 1800, avec pour mission de redonner confiance à une opinion
ébranlée par l’aventure des assignats et celle. tout aussi malheureuse, de
Law.
Réponses
— Si vous avez répondu oui partout ou oui à 5 et à tout autre
terme, vous devriez faire attention à ce que vous lisez.
— Si vous avez répondu oui seulement à 5, décidément vous
avez vécu sur une île déserte.
— Si vous avez répondu oui seulement à 2 et, à plus forte raison,
seulement à 2 et à 4, vous avez parfois raison mais vous ne voyez
qu’une des utilisations possibles de la « planche à billets » et
vous assimilez un peu vite déficit budgétaire et inflation. Vous
n’êtes pas le seul à avoir cette opinion.
— Si vous avez répondu oui seulement à 4 vous avez aussi
parfois raison mais vous assimilez un peu vite « planche à
billets » et inflation. Heureusement, émettre des billets ne signifie
pas toujours inflation. (Lisez donc notre livre sur l’inflation.)
— Si vous avez répondu oui à 1, 2 et 3, bravo ; vous connaissez
déjà les trois grandes raisons de l’émission de la monnaie
fiduciaire. Ce chapitre vous permettra d’approfondir vos
connaissances.
— Si vous avez répondu oui à 1, 2, 3 et 4, ajoutez à la remarque
précédente celle que nous avons faite à propos de ceux qui ont
répondu oui seulement à 4.
— Si vous avez répondu oui seulement à 1 et à 3, pourquoi
négligez-vous l’opinion la plus courante qui associe planche à
billets et déficit budgétaire : ce peut être une cause de la création
de monnaie fiduciaire.
— Si vous avez répondu oui seulement à 3, vous croyez donc que
l’émission de monnaie fiduciaire correspond uniquement à une
entrée d’or ou de devises. Ce chapitre va vous causer quelques
surprises.

A l’époque, ces banques qui avaient des liens plus ou moins directs avec
les pouvoirs publics n’avaient pas le monopole de la création des billets. La
Banque d’Angleterre ne détenait ce privilège que dans une limite de 65 km
autour de Londres. Lorsqu’elle l’étendit au-delà, l’Ecosse y échappa ainsi
que les sociétés de plus de six personnes ! Ce qui revenait à donner
théoriquement le droit d’émettre des billets à toute personne privée. Bien
plus. durant la dernière guerre, le gouvernement britannique émit lui-même
des « currency notes », sorte de bons du Trésor pouvant servir de moyens
de paiement. Ce n’est qu’après 1945 que la Banque d’Angleterre obtint le
monopole de la création de billets. Longtemps, la situation fut, aux États-
Unis, encore plus anarchique. Avant 1939. on ne comptait pas moins de 50
types de billets de banque. Il n’est pas étonnant dans ces conditions, que les
États-Unis devinrent alors le paradis des faussaires. Quant à la France,
savez-vous que ce n’est qu’en 1848 que la Banque de France obtint le
monopole véritable de l’émission ?

La Banque de France, banque des banques


Lorsqu’une banque commerciale manque de monnaie fiduciaire, la
Banque centrale peut lui en procurer soit en intervenant sur le marché
monétaire, soit en réescomptant ses effets de commerce, soit, comme cela
se pratique dans certains pays, en avançant directement aux banques la
monnaie fiduciaire qui leur manque. Dans tous les cas, la Banque centrale
facilite le crédit des banques en substituant sa propre monnaie à la leur en
les refinançant. La création de monnaie qu’elle réalise est donc bien un
véritable crédit à l’économie. Sans elle. les banques, et à travers elles
l’économie tout entière, manqueraient de moyens de paiement.

Les divers statuts des banques centrales


Toutes les Banques centrales sont, bien entendu, liées aux
pouvoirs publics. Mais toutes ne sont pas publiques. La plupart
d’entre elles ont été. à l’origine, des banques privées et elles ne
furent nationalisées que récemment. La Banque d’Angleterre,
créée en 1694, et la Banque de France en 1800, ne l’ont été
respectivement qu’en 1945 et 1946. Dans certains pays. la
Banque centrale a encore un caractère privé. C’est notamment le
cas aux États-Unis où le Bureau fédéral de réserve est la propriété
des banques commerciales (proportionnellement aux dépôts de
chacune d’entre elles). Dans d’autres pays, la Banque centrale est
une société d’économie mixte alliant les capitaux publics et
privés selon des proportions variables (c’est le cas de la Banque
nationale de Belgique ou encore de la Banque nationale de
Suisse). En Italie. ce sont les caisses d’épargne qui sont
majoritaires. les autres actionnaires étant les grandes banques et
les compagnies d’assurance.

Quels que soient les statuts, les fonctions sont identiques et


définies par la loi. La nomination de leurs dirigeants (gouverneur
ou président) dépend des pouvoirs publics, et les gouvernements
exercent un contrôle étroit sur leurs activités. La Banque centrale
fait partie de ce que l’on appelle parfois les Autorités monétaires
d’une nation.

Toutefois, cette étroite liaison n’empêche pas une certaine


indépendance de la Banque de France. Napoléon disait déjà : « Je
veux que la Banque de France soit entre les mains du
gouvernement et n’y soit point trop. » En effet, une trop grande
servilité vis-à-vis de gouvernements à la recherche d’expédients
financiers risquerait d’ébranler la confiance dans la monnaie
fiduciaire. Bien des gouverneurs de la Banque de France ont
d’ailleurs profité de cette liberté pour tancer parfois publiquement
le ministre des Finances.

Quoi qu’il en soit. aujourd’hui, en dépit de statuts fort divers,


dans tous les pays il existe une Banque centrale qui. grâce au
monopole de l’émission de billets, est devenue à la fois la banque
des banques, celle de l’État et finalement de la nation. Là encore,
ces trois fonctions n’ont pas été immédiatement instituées ; elles
apparurent surtout à partir du moment où la conversion libre des
billets en or ne fut plus possible. Le cours forcé, en faisant du
billet la monnaie suprême, mettait en effet au centre de la
circulation monétaire d’un pays. l’organisme chargé de son
émission.

a) Comment en est-on arrivé là ?


Autrefois, cette action en faveur de l’économie était beaucoup plus
directe. La banque d’émission, comme les autres banques. accordait des
crédits aux entreprises et acceptait les dépôts à vue. Cette possibilité a
pratiquement disparu. Il reste cependant quelques privilégiés qui peuvent
avoir un compte à la Banque de France. On comprend d’ailleurs pourquoi
les instituts d’émission ont perdu cette possibilité. Les banques ordinaires
subissaient une concurrence déloyale car elles n’ont pas la possibilité de se
procurer gratuitement de la monnaie fiduciaire. De fait. en Union
soviétique, où la Banque centrale (la Gossbanck) fournit elle-même en
monnaie les entreprises sur les indications du Plan.

b) Pourquoi est-il nécessaire d’avoir une banque des banques ?


En accordant des crédits à l’économie, la Banque de France est devenue
uniquement la banque des banques. Ce rôle est fondamental pour le
fonctionnement des systèmes bancaires de type capitaliste.
Nous avons vu, en effet, à propos de la monnaie scripturale, que les
banques pouvaient créer de la monnaie. Celle-ci est en quelque sorte une
monnaie privée. Nous avons vu aussi qu’elle peut agir ainsi parce que, en
définitive, elle n’est obligée à transformer que très partiellement sa monnaie
en monnaie fiduciaire, car, d’une part, il existe des transferts internes de
compte à compte, et, d’autre part, les transferts externes, grâce à la
compensation, peuvent être transformés en transferts internes.
En réalité, si dans les transferts internes la monnaie reste purement
privée, quand il est nécessaire de faire intervenir la compensation, on ne
peut se passer de la Banque centrale. Dans le chapitre précédent, nous
avons pris, dans un souci de simplification, le cas de deux banques. Dès le
moment où l’on fait intervenir plus de deux banques, les mécanismes se
compliquent, pour devenir vite inextricables lorsqu’il existe plusieurs
dizaines, sinon centaines de banques et des millions de chèques.
Une seule solution demeure praticable : organiser un système de compte
courant ; chaque banque apporte à son compte courant l’ensemble des
chèques lui appartenant, tirés sur d’autres banques et elle est débitée des
chèques tirés sur elle-même, au profit des comptes des autres banques.

Pour ceux qui veulent aller plus loin


Que recouvre, à l’actif du bilan de la Banque de France, le poste :
Créances provenant d’opérations de refinancement, qui s’est
substitué, depuis 1974. à l’ancienne dénomination Crédit à
l’économie ?
Ce poste reprend les diverses créances que la Banque de France a
acquises dans son rôle de banque des banques.

1. Les effets réescomptés


Ce sont presque exclusivement des effets correspondant à des
crédits à moyen terme à l’exportation, réescomptés à des taux
inférieurs au marché monétaire. Bien entendu, ces effets peuvent
être, a fortiori, admis au marché monétaire mais ils n’y ont aucun
avantage. Quand l’intervention sur le marché monétaire diminue,
la part des effets réescomptés dans le refinancement augmente.

2. Effets achetés sur le marché monétaire et obligations


a) Effets publics : essentiellement des bons du Trésor. La Banque
de France n’achète pas directement des bons du Trésor mais les
prend en pension ou acquiert ceux achetés au Trésor par les
banques et les diverses institutions financières ;
b) les obligations admises à la cote officielle des bourses de
valeurs et remboursables dans un délai n’excédant pas trois ans ;
c) bons à moyen terme d’une durée maximum de 7 ans et émis
par des organismes spécialisés de crédit ;
d) crédits à moyen terme (7 ans maximum) distribués par les
banques et autres organismes de crédit. Ils sont partiellement
mobilisables par les banques, à la double condition, d’avoir reçu
un accord préalable de mobilisation et d’être présentés par un
organisme spécialisé réescompteur (Crédit national. Caisse
nationale des marchés de l’État, Crédit foncier...) ;
e) les crédits à court terme recouvrent les créances nées de crédits
à court terme à l’exportation (moins de 18 mois), les effets
garantis par l’Office national interprofessionnel des céréales et,
surtout, les autres effets sur la France, représentatifs de crédits de
trésorerie (effets commerciaux et ventes à tempérament). Ces
autres effets sur la France doivent avoir fait l’objet d’accords
préalables de mobilisation.
3. Avances sur titres. Il s’agit d’avances en compte courant,
garanties par des dépôts d’effets publics ou de valeurs mobilières
dont la liste est établie par la Banque de France.

4. Effets en voie de recouvrement. Ce sont les valeurs (chèques et


effets remis à échéance) dont le recouvrement est en cours.
Pour fixer les idées, au 30 septembre 1982, les créances
provenant d’opérations de refinancement représentaient 187210
millions se décomposant ainsi :

Effets réescomptés 81 753


Effets achetés sur le marché monétaire et 84810
obligations
Avances sur titres 203
Effets en cours de recouvrement 20 444

Dans ce total les crédits à moyen terme et à court terme,


représentaient à eux seuls près de 71 milliards, dont plus de 25
pour les effets à moyen terme et près de 46 pour les effets à court
terme.

1. A un premier stade, la Banque centrale se borne à tenir des comptes.


Ainsi la Banque de France a 237 comptoirs à Paris et en province.
Tous les matins, vers 10 h 30, les représentants des banques situées sur
la circonscription qui dépend du comptoir, y échangent grâce au
système précédent, les chèques tirés sur des banques de la place. Les
autres chèques sont envoyés au siège de la Banque de France à Paris,
qui les envoie aux comptoirs régionaux intéressés, afin qu’ils les
mettent en compensation. En outre, en ce qui concerne les virements
bancaires de salaires, les prélèvements automatiques et les règlements
par cartes de crédit, la Banque de France a mis en place une
compensation sur ordinateur qui libère les banques de la manipulation
des papiers. L’ordinateur de la Banque de France se contente de traiter
les bandes magnétiques fournies par les banques et tient ainsi les
comptes courants des différentes banques.
2. Au second stade, la Banque centrale va plus loin que la tenue des
comptes courants des banques ; elle leur avance la monnaie fiduciaire
qui leur manque lorsqu’elles doivent effectuer un paiement non
compensé à une autre banque, ou bien faire face à une sortie de billets.
Sans cette possibilité, l’ensemble du système bancaire pourrait, dans
certaines circonstances, être totalement bloqué, car à partir du moment
où une banque ne pourrait plus faire face à ses engagements,
l’ensemble du système s’écroulerait. A travers la compensation, ce
sont les crédits accordés par une banque qui fondent les crédits offerts
par les autres banques et vice versa.

c) Quelle forme prend la monnaie de la Banque centrale ?


Pour jouer le rôle de banque des banques, la Banque centrale peut, bien
entendu, émettre des billets, mais ce n’est pas sa seule possibilité.
Lorsqu’une banque a besoin de monnaie fiduciaire, non pour effectuer des
paiements à ses guichets, mais pour approvisionner son compte courant à la
Banque centrale afin, par exemple, de régler à une autre banque un
paiement qui ne peut être compensé, il n’est pas nécessaire de se servir de la
« planche à billets ». La Banque centrale porte simplement au crédit du
compte de la banque commerciale le montant de monnaie fiduciaire dont
elle a besoin. Ce système est évidemment plus rapide et moins onéreux.
C’est sans doute surprenant : la monnaie de la Banque de France n’a pas
seulement la forme de billets de banque, elle est aussi constituée par de la
monnaie scripturale qui prend la forme d’engagements à vue de la Banque
de France vis-à-vis des autres banques.

Nous pouvons ainsi commencer à construire


le bilan de la Banque de France

Actif Passif
Créances provenant Monnaie Banque de France
d’opérations de
refinancement
Effets réescomptés Billets en circulation
Effets possédés, par suite Avoirs des autres banques
des interventions sur le dans leur compte courant à la
marché monétaire et Banque de France
obligations
Avances sur titres
Effets en voie de
recouvrements

La Banque centrale, banque de l’État


Le budget de l’État dépasse maintenant les 200 milliards. Il serait
étonnant qu’un tel budget et les mouvements de fonds qu’il suppose
n’entraînent pas, à un moment quelconque, l’appel à un banquier.
Premièrement, la Banque centrale tient les comptes de l’État. Ainsi la
Banque de France tient-elle les comptes du Trésor public qui est
l’administration gérant le budget de l’État. D’un côté, les percepteurs
versent au compte du Trésor dans les succursales de la Banque de France
les impôts qu’ils recouvrent et, parallèlement, les dépenses se font par débit
des comptes du Trésor à la Banque de France. Il peut arriver qu’au-delà de
ce rôle de caissier et de comptable. la Banque centrale soit amenée à prêter
de l’argent à l’État. Ce fut. à l’origine, l’une des fonctions essentielles et la
raison d’être des premières Banques centrales. En 1694, la Banque
d’Angleterre prêta ainsi, au gouvernement britannique. la totalité de son
capital.

a) Pourquoi un État a-t-il recours à la Banque centrale ?


Trop souvent. le recours de l’État à la Banque centrale évoque le déficit
budgétaire et la mauvaise gestion. En réalité, la situation est plus complexe.
Chaque mois, l’État est obligé de payer des fonctionnaires, de verser des
pensions, de faire face à des engagements. Or, en face de dépenses très
régulières, les rentrées fiscales se font par à-coups, fortes certains mois,
faibles en d’autres périodes ; ainsi une grande partie des impôts sur le
revenu n’est payée au percepteur qu’au cours du dernier trimestre de
l’année. Un décalage momentané peut donc se produire entre les dépenses
et les recettes.
Il n’en va pas de même lorsque la défaillance des recettes fiscales est
définitive. Il peut, en effet, arriver que les rentrées fiscales d’une année
soient insuffisantes pour couvrir les engagements de l’État. L’homme de la
rue parle immédiatement de déficit et agite le spectre de l’inflation, voire de
la banqueroute.
La situation réelle est cependant plus complexe et, pour essayer de
donner quelques éléments d’un sain jugement, il faut préciser les notions de
déficit et de découvert du Trésor. Il peut y avoir découvert du Trésor, ou
encore appel aux ressources spéciales du Trésor sans qu’il y ait pour cela
déficit. Il n’y a déficit que dans la mesure où les dépenses définitives
(paiement des fonctionnaires. investissements des administrations, achat de
matériel militaire) sont supérieures aux recettes définitives (les impôts et le
revenu des domaines). Il peut d’ailleurs y avoir excédent budgétaire (si les
dépenses définitives sont inférieures aux recettes définitives) et cependant
découvert du Trésor et appel à ses ressources spéciales, dans la mesure où
cet excédent ne couvre pas la totalité des dépenses provisoires 7.

b) Comment la Banque centrale intervient-elle pour aider l’État à faire face


à ses engagements ?
Bien entendu, l’État peut se procurer des recettes provisoires en dehors
de la Banque de France en émettant des emprunts, des bons du Trésor, ou
encore en faisant appel à ce que l’on nomme les correspondants du Trésor
(CDC, Caisse des dépôts et consignations...) 8.
Toutefois, la Banque de France peut intervenir pour permettre à l’État de
se procurer la trésorerie, voire les fonds qui lui manquent.
Cette intervention peut être directe, dans ce cas la Banque fait des
avances à l’État en créditant le compte du Trésor du montant de l’avance.
C’est généralement à ce propos qu’un bon nombre de personnes évoquent le
déficit et la « planche à billets », expression en grande partie inexacte
puisque, la plupart du temps, il y a simplement création de monnaie
scripturale Banque de France au profit du Trésor public.
Quoi qu’il en soit, d’après la convention du 17 septembre 1973,
l’ensemble des concours du Trésor public ne peuvent dépasser 23,6
milliards dont 13,4 sans intérêts. Au 30 septembre 1982 les concours
atteignent 5,1 milliards et une partie de ces concours provenait des avances
consenties avant... 1947, notamment durant la guerre de 1939-1945.
L’aide de la Banque de France peut être indirecte 9 quand elle accepte
d’acheter ou de prendre en pension des titres et des effets publics,
notamment les bons du Trésor possédés par les banques. Cette mobilisation
par les banques des bons du Trésor qu’elles possèdent se réalise grâce aux
interventions de la Banque de France sur le marché monétaire. Autrefois,
les effets publics étaient même l’instrument privilégié de son intervention.
Les banques commerciales acceptent d’autant plus facilement de souscrire
des bons du Trésor et d’aider ainsi l’Etat dans ses fins de mois, qu’elles ont
la certitude de pouvoir céder ces bons à la Banque de France. si elles
manquent à leur tour de trésorerie. D’une certaine manière, cette
mobilisation des effets publics par la Banque centrale est à la fois un crédit
à l’économie et un crédit à l’État.
A propos de crédit à l’État, il reste à nous poser une question : les
avances de la Banque centrale à l’État, et plus généralement les crédits à
l’État, contrepartie d’une création monétaire, sont-ils inflationnistes ? En
d’autres termes, ne risquent-ils pas de provoquer une hausse des prix ? Là
encore, il n’y a pas de réponse simple à cette question. Il faut, en fait, poser
une autre question : toute création monétaire est-elle inflationniste ? Nous
aurons l’occasion d’aborder ce problème dans le prochain chapitre. Ceux
qui voudraient l’approfondir peuvent se référer à l’ouvrage que nous
consacrons dans cette collection à l’inflation.

Nous pouvons maintenant continuer à construire


le bilan de la Banque de France

Actif (contrepartie de la
Passif (monnaie émise par
monnaie émise par la
la Banque de France)
Banque de France)
Créances sur le Trésor Monnaie Banque de France
– monnaies divisionnaires – billets en circulation
– comptes courants – compte courant du
postaux 10 Trésor 11
– concours au Trésor public – avoirs des autres banques
dans leur compte courant
Créances provenant
d’opérations de
refinancement (voir tableau
précédent)

La Banque centrale, banque de la nation


Rares sont ceux qui ignorent que la Banque centrale est la gardienne de
l’or et des devises étrangères. Beaucoup croient même que c’est
uniquement à l’occasion d’entrées d’or et de devises que la Banque centrale
crée des billets. Comme vous venez de le voir, c’est une conception qui
s’enracine dans un passé révolu et tient de la mythologie. Nous avons
d’ailleurs préféré, quitte à vous dérouter peut-être, ne citer qu’en dernier
lieu le rôle de la Banque centrale et la création de monnaie fiduciaire qui en
résulte.

Test
Quand sera-t-il nécessaire de faire fonctionner « la planche à
billets » provoquant ainsi le gonflement de la masse monétaire
française ?

1. Quand le commerce extérieur OUI NON


est déficitaire
2. Quand le commerce extérieur OUI NON
est excédentaire

Réponses
Quand le commerce extérieur est excédentaire. En effet, dans
ce cas, nous gagnerons plus de devises que nous n’en
dépenserons. Des dollars, des marks, des lires, des livres sterling
seront changés contre des francs qu’il faudra créer au fur et à
mesure que ces devises entreront dans les réserves de la Banque
de France.

Si vous avez répondu quand le commerce extérieur est


déficitaire, pour vous « planche à billets », gonflement de la
masse monétaire, sont des termes chargés de dangers
inflationnistes et évocateurs du terme de déficit. Vous devriez
vous méfier de vos réactions spontanées et des transpositions
d’un niveau d’analyse à un autre.

a) Création de monnaie et relations avec l’extérieur.


Aucun pays ne vit plus aujourd’hui sans entretenir des relations
économiques et financières avec le reste du monde. Plus le développement
s’amplifie, plus il est nécessaire d’acheter et de vendre à l’étranger, non
seulement des biens mais aussi des services. Parallèlement, les mouvements
de capitaux s’accroissent et donnent lieu à d’importants transferts de
revenus. L’ensemble des règlements entre nations qui en résultent sont
comptabilisés dans la balance des paiements 12. Les opérations donnent
généralement lieu à des échanges de monnaie. En effet, une entreprise
française vend une partie de sa production, par exemple aux États-Unis ;
elle sera payée en dollars ; or, pour payer ses ouvriers, ses achats, ses
impôts, l’entreprise a besoin de francs. Il lui faut donc changer, au moins
une partie, des dollars contre des francs. Elle peut en conserver une autre
partie pour financer ses opérations à l’étranger. Parallèlement, chaque jour,
d’autres entreprises ou d’autres personnes, françaises ou étrangères,
cherchent à se procurer des monnaies étrangères (les devises) ou à en
vendre. Il apparaît ainsi une offre et une demande de devises qui constitue
le marché des changes.
Ce marché est contrôlé par les banques, mais il est probable qu’à certains
moments la demande de monnaie étrangère dépasse l’offre et qu’à d’autres
moments ce soit le contraire. C’est ici qu’intervient la Banque de France
pour le compte du Fonds de stabilisation des changes dont elle assume la
gestion. Dans d’autres pays, la Banque centrale intervient pour son propre
compte. En réalité, dans le cas français, le Fonds de stabilisation des
changes n’est pratiquement qu’un service de la Banque de France.
Lorsque la demande de monnaie est plus forte que l’offre (cas, par
exemple, d’un déficit commercial), la Banque de France tire les devises
nécessaires de ses réserves et les vend (par l’intermédiaire du Fonds de
stabilisation des changes) contre des francs. Il y a alors diminution de la
monnaie française en circulation puisqu’une partie de la masse monétaire
française est transformée en monnaies étrangères, destinées à régler des
achats à l’étranger.
Dans le cas où l’offre de monnaies étrangères est plus forte que la
demande (cas notamment de l’excédent commercial) la Banque de France
(par l’intermédiaire du Fonds de stabilisation des changes) les achète pour
les mettre en réserve. Il y a alors gonflement de la masse monétaire
française, la Banque de France devant, à cette occasion, émettre de la
monnaie fiduciaire française, afin d’acheter les monnaies étrangères en
excédent sur le marché des changes.

b) La Banque de France et la gestion des réserves de la nation.


Afin de pouvoir toujours répondre aux demandes des particuliers et des
entreprises, la Banque de France est donc amenée à gérer au mieux les
réserves de la nation.
Ces réserves sont généralement d’une composition plus complexe que ne
l’imagine l’opinion qui les assimile un peu rapidement au stock d’or.
D’abord, l’essentiel des opérations de change ne se fait pas, comme nous
venons de le voir, par des mouvements d’or, mais par des ventes et des
achats de devises. Notons ici que ces devises n’ont pas, la plupart du temps,
la forme de billets mais d’avoirs à vue dans des banques étrangères. On les
trouve dans le bilan de la Banque de France sous la rubrique : Or et
disponibilités à vue à l’étranger (les billets en monnaie étrangère étant, bien
entendu, eux aussi, des avoirs à vue à l’étranger). Depuis la création du
Système monétaire européen, une partie des réserves prend la forme
d’ECUS 13.
L’encaisse-or de la Banque de France provient essentiellement de la
vente de devises à d’autres Banques centrales, notamment au Bureau
fédéral de réserve des États-Unis, quand cela était encore possible. En fait.
cette encaisse-or demeure stable depuis de nombreuses années car, en
attendant la revalorisation du prix officiel de l’or, les Banques centrales
évitent d’entamer leur stock 14. Depuis le 7 janvier 1975. « le cours
d’évaluation de l’or est égal à la moyenne quotidienne des cours, durant les
trois derniers mois de chaque trimestre 15 ».
Certes, la banque a toujours la possibilité d’acheter de l’or à des
particuliers, mais il ne s’agit pas d’une conversion de ses billets en or. Elle
réalise l’opération, non à la parité officielle de l’or, mais selon sa valeur
marchande. En somme, dans ce cas, elle achète de l’or comme elle
achèterait une marchandise. Notons, cependant, que le prix de l’or étant très
supérieur à sa parité officielle, la Banque de France a suspendu tout achat
d’or aux particuliers.

Nous pouvons maintenant continuer à construire


le bilan de la Banque de France
(en simplifiant à l’extrême)

Actif (contrepartie de la
Passif (monnaie émise par
monnaie émise par la
la Ban- que de France)
Banque de France)
Or et créances sur l’étranger Billets en circulation
Or Comptes créditeurs
extérieurs 16
Disponibilités à vue à Comptes des banques,
l’étranger institutions et personnes
étrangères et leurs dépôts en
ECUS devises
Avances au fonds de Compte spécial du Fonds de
stabilisation des changes 16 stabilisation des charges
contre partie des allocations
Créances sur le Trésor de DTS
Créances provenant Compte courant du Trésor
d’opérations de public
refinancement
Or et autres actifs de Comptes créditeurs des
réserves à recevoir du agents économiques et
FECOM financiers
Comptes courants des
établissements astreints à des
constitutions de réserves
Autres comptes, dispositions
et autres engagements à vue
ECUS à livrer au FECOM
Réserves de réévaluation des
avoirs publics en or

Pour ceux qui le désirent : quelques informations


complémentaires sur les opérations en or et en
devises de la Banque de France
En plus de l’encaisse-or et des disponibilités à vue à l’étranger (y
compris les ECUS), le bilan de la Banque de France fait ressortir
un certain nombre d’autres postes liés aux opérations en or et
devises.
A L’ACTIF : Dans la rubrique : or et créances sur l’étranger, au
poste.
1. « Avances consenties au Fonds de stabilisation des changes » :
a) les avances consenties au Fonds de stabilisation des changes
pour lui permettre de remplir ses obligations vis-à-vis du FMI
(Fonds monétaire international) : valeur de l’or remis au FMI et
prêts en francs consentis par la France à d’autres pays à la
demande du FMI.
b) les avances nécessaires à l’achat des DTS. Les Droits de
tirages spéciaux sont. en quelque sorte, une monnaie scripturale
internationale que le FMI a créée en quantité limitée pour
accroître les disponibilités mondiales en monnaie internationale.
Cette monnaie est échangeable contre des devises. Elle est
distribuée aux États membres du FMI et la Banque de France la
rachète au Trésor public français, par l’intermédiaire du Fonds de
stabilisation des changes.
c) enfin sous le titre « Autres opérations » les avances consenties
pour lui permettre de faire face à ses opérations courantes.
2. Comme, dans sa première phase, le Système monétaire
européen (SME) n’entraîne pas une cession définitive des 20 %
des réserves françaises au FECOM (Fonds européen de
coopération monétaire), la transformation d’une partie des
réserves en ECUS donne lieu à un crédit croisé. A l’actif, la
Banque de France a une créance sur le FECOM pour le montant
des devises et de l’or qu’elle lui a livré. Au passif, elle a une
reconnaissance de dette vis-à-vis du FECOM pour le montant des
ECUS qu’elle doit lui rembourser à terme. Par suite des
variations des réserves, des variations des cours et de l’utilisation
éventuelle des écus, ces deux sommes ne sont pas égales.
AU PASSIF :
1. Les comptes des banques, institutions et personnes étrangères
ayant des avoirs en francs convertibles en devises. Il est en effet
normal de déduire ces avoirs des réserves possédées par la France
si on veut savoir ce que nous possédons vraiment en monnaie
étrangère. Ces francs sont. en quelque sorte, des créances à vue
qui peuvent à tout moment provoquer une sortie de devises.
2. Le compte spécial du Fonds de stabilisation des changes. Les
fonds cédés au Trésor public pour acheter les DTS sont bloqués
dans un fonds spécial. D’une part. cela évite un accroissement
abusif des disponibilités du Trésor et, d’autre part, on a voulu
marquer ainsi la position française qui considère que les DTS ne
sont pas une véritable monnaie internationale mais une dette qu’il
faudra rembourser. En apparaissant ainsi à l’actif et au passif, les
DTS acquis directement au FMI ne sont plus considérés comme
un élément de nos réserves. Notons, cependant, que ce poste fait
ressortir le montant des DTS alloués à la France, tandis que le
poste de l’actif fait ressortir le montant des DTS détenus par la
France.
3. Les nouvelles modalités d’évaluation de l’or, comptabilisé
dans le bilan de la Banque de France, ont dégagé une plus-value
qui a été portée à un compte de passif, spécialement créé à cet
effet. Ce poste est intitulé « Réserve de réévaluation des avoirs
publics en or ». Y est enregistrée la contrepartie des
modifications qui affecteront semestriellement ces avoirs. Ainsi
est-il bien marqué que la réévaluation de l’or n’influence en rien
la circulation monétaire interne.
Comment calculer les réserves de la France. On peut calculer
d’après la formule suivante :
(or et disponibilités à vue à l’étranger + avances au Fonds de
stabilisation des changes + annuités des prêts de la BIRD et de
l’Export-Import Bank) à retrancher du total (comptes des
banques, institutions et personnes étrangères + compte spécial du
Fonds de stabilisation des changes en contrepartie des DTS
achetés au Trésor public).

LE POUVOIR MONÉTAIRE DE LA BANQUE CENTRALE

Banque des banques, Banque de l’État, Banque de la nation, la Banque


centrale semble donc avoir un pouvoir monétaire important.
Toutefois, vous vous êtes sans doute aperçu, qu’en réalité, le pouvoir
monétaire de la Banque centrale est beaucoup plus limité qu’il n’apparaît.
En temps normal et en l’absence d’une réglementation particulière, elle
accompagne plus la création de monnaie qu’elle ne la gouverne.

Les limites du rôle de la Banque centrale dans la création de


monnaie
Prenons en effet les divers rôles de la Banque centrale. Elle crée de la
monnaie fiduciaire qu’elle cède aux banques, soit à l’occasion d’opérations
dans le marché monétaire, soit à propos du réescompte, soit lorsque les
banques lui apportent, par l’intermédiaire du Fonds de stabilisation des
changes, les excédents de devises qu’elles n’écoulent pas sur le marché des
changes. Dans tous les cas. y a-t-il eu gonflement de la masse monétaire ?
NON. il y a eu simple substitution de la monnaie fiduciaire (en billets ou
scripturale) à la monnaie scripturale déjà créée par les autres banques. De
même, quand la Banque centrale rachète aux banques les bons du Trésor
qu’elles possèdent et qu’elles avaient donc déjà achetés au Trésor contre
leur propre monnaie, elle ne fait. une fois de plus. que substituer sa propre
monnaie à celle des autres banques.

Test : vérifions si vous avez compris la nature de


l’engagement d’une Banque centrale
Voici le bilan simplifié d’une Banque centrale

1re question : Les particuliers déposent une partie des billets qui
étaient en circulation (30) dans les banques qui, à leur tour,
approvisionnent leur compte courant à la Banque centrale en lui
apportant leurs billets. Comment indiquez-vous cette opération
sur le bilan de la Banque centrale ?

2e question : Vous vous présentez à la Banque centrale avec un


billet pour faire valoir l’engagement de la Banque centrale.
Qu’est-ce que vous pouvez obtenir ?
[réponses p. 80]

Ce n’est pas pour rien que l’on dit que la Banque de France refinance les
autres banques.
Il n’y a vraiment création nette et directe de monnaie Banque centrale et
non substitution, que dans le cas où l’État a besoin d’une avance. Nous
avons d’ailleurs vu que la Banque de France est tenue, dans ce cas, par des
limites qui ne peuvent être changées que par la loi. Notez que là encore,
dans bien des cas. la création d’une monnaie scripturale par l’État a précédé
l’avance de la Banque de France. En effet, que se passe-t-il lorsque l’État
veut exécuter un règlement, par exemple payer un fonctionnaire : le Trésor
public crédite le compte courant postal du fonctionnaire. Tant que ce
fonctionnaire ne se sert pas de cet argent, ou tant qu’il ne s’en sert que pour
régler des personnes ayant un CCP. ou encore tant que le paiement à un
compte dans une banque est compensé par un mouvement en sens inverse
vers les CCP. le Trésor public n’a pas besoin de se procurer de la monnaie
Banque de France. Si, au moment où le Trésor public doit faire face à une
sortie nette de monnaie Banque de France il ne dispose pas de recettes
fiscales, il devra s’en procurer. Dans ce cas, la Banque de France agit
exactement comme avec les autres banques : elle facilite le refinancement
du Trésor et substitue sa monnaie à celle du Trésor public (en l’occurrence
celle des CCP).
Finalement, la Banque centrale semble ne répondre qu’à des besoins en
monnaie fiduciaire qui naissent de la création de monnaie scripturale
réalisée par d’autres, à travers les crédits accordés par les banques aux
entreprises ou à l’État, l’exécution des dépenses publiques ou les
opérations de change.
En fait, si les banques commerciales et, à un degré moindre le Trésor
public, ont la possibilité de créer de la monnaie, ils n’ont pas un pouvoir
monétaire total. car seule la Banque centrale a le pouvoir de créer la
monnaie fiduciaire qu’il faut obligatoirement posséder lorsque les
virements internes et les phénomènes de compensation deviennent
insuffisants pour faire face aux engagements à payer à vue, que les banques
et le Trésor public ont pris en créant de la monnaie.

Réponses
à la 1re question : La Banque centrale va soustraire 30 du poste
« billets en circulation » et augmenter d’autant le poste « compte
courant des banques ». Si vous avez eu la tentation d’augmenter
de 30 l’actif de la Banque après avoir crédité les comptes
courants des banques, vous devriez réfléchir qu’un billet
représente un engagement de la Banque centrale et qu’on ne peut
compter parmi ses avoirs des engagements sur soi-même. Cela
reviendrait pour une société anonyme à placer dans ses actifs ses
propres actions.

Ainsi le bilan va être transformé de la manière suivante :

à la 2e question : Un autre billet, puisque depuis la suppression


de la convertibilité en or l’ultime monnaie d’un pays est la
monnaie de la Banque centrale. Bien entendu, vous pouvez
demander des devises, mais seulement dans la limite de la
réglementation des changes. Dans ce cas, vous obtiendrez une
monnaie qui vous permettra d’acheter des biens seulement dans
le pays où elle a cours. A l’engagement d’une Banque centrale,
vous aurez substitué l’engagement d’une autre Banque centrale.

La monnaie Banque centrale est la monnaie suprême et ultime. Comme il


faut obligatoirement, tôt ou tard, lui en demander, celle-ci peut en profiter
pour imposer sa loi. Bien sûr, les Banques centrales peuvent ne pas utiliser
ce pouvoir et ne faire qu’avaliser la création de monnaie réalisée
notamment par les banques, mais alors elles risquent rapidement de ne plus
pouvoir faire face à leur engagement.

Quelle est la nature de l’engagement de la Banque centrale ?


Nous avons, au cours de la section précédente, construit progressivement
le bilan de la Banque de France.
A l’actif, nous avons mis les concours accordés à l’économie, les
créances sur le Trésor et la réserve-or, en d’autres termes, tous les éléments
d’actif qui sont les contreparties de la création de monnaie par la Banque
centrale.
Au passif, nous trouvons les engagements de la Banque centrale. En
effet, dans un bilan, le passif signifie l’origine des avoirs. Cette origine est
claire, du moins pour le bilan simplifié que nous présentons : pour se
procurer les avoirs qu’elle possède dans ses actifs, la Banque centrale a
émis de la monnaie fiduciaire soit pour la mettre en circulation, soit pour
créditer les divers comptes courants situés au passif. La monnaie émise par
la Banque centrale représente donc ses engagements.
Mais la notion d’engagement de la Banque centrale est donc d’une
nature fort différente de l’engagement des autres banques.
Les autres banques, ou le Trésor public en ce qui concerne les CCP,
s’engagent à payer à vue quiconque se présentera avec un ordre de
paiement signé par un des titulaires des comptes à vue. Elles s’engagent
notamment à fournir au titulaire du compte, ou encore à toute personne se
présentant en son nom, les billets de banque qu’il réclamera (bien entendu
dans les limites du solde créditeur), en d’autres termes de la monnaie
Banque centrale.
A quoi s’engage la Banque centrale quand elle crédite un compte
courant ? — A fournir de ses billets, bien sûr. Mais quel est son engagement
lorsqu’elle émet des billets au porteur ? — A rembourser le porteur du billet
en or. Cela était vrai à l’origine ; le cours forcé a supprimé cette possibilité.
On ne peut obtenir des devises qu’à travers le mécanisme de change et
certainement pas de l’or. L’or n’a d’ailleurs plus de pouvoir libératoire pour
les transactions internes. — A rembourser les billets contre d’autres billets.
Ce serait absurde.
Comment interpréter le bilan de la Banque de France
L’actif du bilan de la Banque de France représente l’origine de la
création de monnaie de la Banque de France.
L’augmentation des sommes inscrites aux postes « Avoirs nets en
or et devises » et « Créances sur le Trésor » traduisent une
augmentation des liquidités à la disposition de l’économie. Il y a
création nette de monnaie.
L’interprétation du poste « Créances provenant d’opérations de
refinancement » est plus complexe. Une banque peut être amenée
à se procurer de la monnaie Banque de France, soit parce qu’elle
doit faire face à des sorties de monnaie Banque de France, soit
parce qu’elle doit alimenter son compte courant à la Banque de
France pour payer une autre banque ou satisfaire aux exigences
de la réglementation de la Banque de France qui lui impose une
augmentation de ses réserves obligatoires. Ainsi, une
augmentation du poste « Créances provenant d’opérations de
refinancement » ne signifie pas que les entreprises et les
particuliers ont fait un plus large appel au crédit et vice versa, de
même que leur ventilation ne reflète pas, de surcroit, la répartition
réelle des différentes catégories de crédits distribués à
l’économie. Leur variation traduit seulement celle des besoins
des banques en monnaie de la Banque centrale.
Par contre, au passif, l’augmentation du poste « Billets en
circulation et comptes courants des banques » traduit un
resserrement de la liquidité bancaire ; en effet, si les billets en
circulation augmentent rapidement, cela signifie que les banques
vont devoir faire face à une transformation plus importante de la
monnaie scripturale en monnaie fiduciaire. Notons ici que la
variation du poste « Billets en circulation » correspond souvent
au paiement des salaires dans la dernière décade de chaque mois.
La circulation fiduciaire diminue ensuite entre le 10 et le 20, au
fur et à mesure que les commerçants versent à leur compte,
l’argent dépensé par les salariés. A cela s’ajoutent des variations
saisonnières, au moment des fêtes de fin d’année et des départs en
vacances. Quant au gonflement ou au dégonflement des comptes
courants, il est généralement dû à des règles imposées par la
Banque de France ; si une banque n’est pas dans l’obligation de
gonfler son compte courant, elle préférera garder ses avoirs sous
d’autres formes plus rémunératives et ne laissera dans son compte
que les sommes strictement nécessaires à la compensation.
N’oubliez pas que ce poste ne lui rapporte rien. L’évolution du
solde des comptes courants bancaires est donc significative de la
pression de la Banque de France sur le système bancaire. Nous
allons retrouver plus loin ce problème et nous compléterons alors
cette information.
De toute manière, l’étude du bilan de la Banque de France ne
suffit pas à comprendre la situation monétaire, il faut le replacer
dans un cadre plus vaste et bien comprendre ce qui, finalement,
fonde la valeur de la monnaie.

L’engagement de la Banque de France n’en est pas pour autant illusoire.


Tout détenteur de billets est encore créancier de la Banque de France. Mais
cette créance est en quelque sorte morale. En créant de la monnaie, la
Banque s’engage à faire en sorte que ces billets gardent leur valeur, et que
l’on puisse ainsi toujours se procurer les biens et services que l’on désirera,
grâce à des quantités stables de monnaie. Afin de garantir cet engagement,
la Banque s’engage à se procurer des ressources qui le fonderont et
d’exercer dans ce sens son pouvoir monétaire.
Quels sont les éléments qui fondent la valeur de la monnaie ? Comment
la Banque centrale peut-elle agir pour la défendre ? Telles sont les questions
qui seront analysées dans la seconde partie de cet ouvrage.
II

LA VALEUR DE LA MONNAIE ET SA
DÉFENSE
Test introductif au chapitre 4 17
Nous venons de voir dans les chapitres précédents comment la
monnaie est créée. Tout au long de cette première partie vous
vous êtes sans doute posé une question :

« A quelles conditions la monnaie


conserve-t-elle sa valeur ? »

En effet, une monnaie qui perdrait sa valeur n’aurait plus d’objet,


puisqu’elle ne serait plus ni un étalon de la valeur des biens
existant à un moment donné dans une économie, ni un bien
intermédiaire facilitant les échanges, car plus personne n’en
voudrait, ni une réserve de valeur permettant de ne pas utiliser
immédiatement un pouvoir d’achat, puisqu’elle ne conserverait
plus rien du tout. Voici quelques opinions émises par des
personnes au sujet de la valeur de la monnaie. Si l’on vous
interrogeait à ce sujet, laquelle se rapprocherait le plus de votre
propre opinion ?

1. « La valeur de la monnaie dépend du stock d’or déposé dans


les caves de la Banque de France. »

2. « La valeur de la monnaie dépend de la décision du


Gouvernement qui décrète la parité avec les autres monnaies et
oblige les habitants d’un pays de l’accepter. »

3. « La valeur de la monnaie dépend des biens produits et offerts


dans une économie par rapport à la masse de monnaie qui a été
créée. »

4. « La valeur d’une monnaie dépend essentiellement de la


confiance que l’on a en elle. »
5. « La valeur d’une monnaie dépend de la capacité d’une
économie nationale à maintenir cette valeur. »
4. La valeur de la monnaie

Pourquoi peut-on, à un moment donné, acheter tel bien avec une certaine
quantité de monnaie ? Pourquoi ne peut-on plus le faire à un autre
moment ? Ces questions donnent lieu à bien des réponses contradictoires et
au développement de toute une mythologie. Cependant, si nous désirons
tous avoir de la monnaie et. éventuellement. la garder en réserve et si la
monnaie peut servir d’intermédiaire dans les échanges, c’est que nous lui
attribuons tous une valeur fondamentale qu’elle tend à conserver.

L’ÉCONOMIE NATIONALE EST L’ULTIME FONDEMENT DE


LA VALEUR DE LA MONNAIE

On peut partir d’une constatation bien simple : la valeur d’une monnaie


dépend de ce que nous pouvons acheter avec elle, c’est-à-dire de son
pouvoir d’achat. En prolongeant cette constatation, on peut exprimer en une
seule phrase, le fondement de la valeur de la monnaie : une monnaie
gardera sa valeur si l’économie nationale dans laquelle elle a cours le lui
permet.
Si la production, à un moment quelconque, devient insuffisante et ne peut
plus répondre à la demande, les commerçants, et avec eux la majeure partie
des entreprises, vont en profiter pour accroître leurs prix. Avec la même
quantité de monnaie, on ne pourra plus acheter la même quantité de biens et
de services : la monnaie perdra de sa valeur.
Si. à un moment quelconque, le prix d’une des composantes du prix de
vente des biens et des services produits dans une économie augmente (par
exemple la TVA, le prix de l’énergie. les matières premières importées, les
salaires, ou encore les coûts de la publicité. les frais généraux, etc.). et si les
entreprises sont bien placées, parce qu’elles ne sont pas gênées par la
concurrence, ou bien parce qu’elles savent vendre plus cher, de façon à
répercuter les hausses sur les prix de vente, l’ensemble des prix augmentera
et la valeur de la monnaie diminuera.
Réponses
Si vous avez choisi :

1. Bigre ! si vous pensez que la valeur de la monnaie dépend du


stock d’or possédé par la Banque de France, vous donnez à l’or
une valeur intrinsèque qui fonde la valeur de la monnaie. Vous
devriez vous poser la question suivante : « Si je suis perdu dans
une île déserte avec une valise pleine de pièces d’or, quelle est la
valeur de cet or ? » Monétairement elle est nulle, puisque vous ne
pouvez rien acheter avec lui. Souvenez-vous de la principale
fonction de la monnaie. Ne prenez cependant pas votre erreur au
tragique, il y a bien d’autres personnes qui pensent comme vous.
Leur opinion s’enracine dans l’histoire, en outre, on y retrouve
sous-jacente l’idée que seul ce qui a une consistance matérielle
peut avoir une valeur. Mais rappelez-vous ce que nous avons dit
de la dématérialisation progressive de la monnaie. Bien sûr, il
existe l’encaisse-or de la Banque de France ; nous reverrons plus
loin sa signification.

2. Certes, la monnaie étant nationale, il est nécessaire que l’État


ordonne à tout ceux qui vivent dans une économie d’accepter la
monnaie qui y a cours. Aucune monnaie ne peut avoir de valeur
sans cet ordre (le cours légal), mais de toute évidence la valeur
d’une monnaie ne se décrète pas. Il ne faut pas confondre l’action
par laquelle un gouvernement fixe la valeur de la monnaie
nationale par rapport aux autres monnaies (la dévaluation ou la
réévaluation) avec la fixation du pouvoir d’achat d’une monnaie à
l’intérieur de l’économie où elle a cours.

3. Une opinion très courante, et qu’on retrouve parfois chez des


économistes, veut que le rapport entre les biens disponibles et la
quantité de monnaie émise fixe la valeur de la monnaie. Il n’est
cependant pas toujours nécessaire qu’il existe un rapport direct et
proportionnel entre l’augmentation de la masse monétaire et celle
de sa production. Par exemple, une augmentation de la masse
monétaire peut se traduire par une augmentation de l’épargne et
pas forcément par une demande plus importante. Or, en
définitive, c’est la demande qui est déterminante dans la fixation
de la valeur de la monnaie. En outre, nous savons aujourd’hui que
l’inflation n’est pas seulement due à un excès de la demande,
mais encore à une élévation des coûts de production (voir
l’ouvrage sur l’inflation).

4. En effet, si quelqu’un perd confiance dans la monnaie, il aura


tendance à la dépenser le plus rapidement possible. La demande
augmentera et, si l’offre ne peut s’accroître aussi rapidement, les
entreprises profiteront de l’occasion pour accroître leurs prix.
Mais attention, même si la confiance existe, la monnaie peut
perdre de sa valeur (de son pouvoir d’achat). Il en va ainsi
lorsque l’État augmente la TVA, impôt perçu répercuté presque
automatiquement sur les prix.

5. C’est évidemment la réponse la plus satisfaisante, mais aussi, il


faut bien l’avouer, la plus imprécise. Elle renvoie finalement, à
l’ensemble des explications du phénomène inflationniste
contenues dans l’ouvrage de cette collection intitulé l’Inflation.
En effet, derrière cette réponse se profile une autre question :
« Pourquoi une économie ne permet-elle pas le maintien de la
valeur de la monnaie ? »

Si, à un autre moment, les habitants d’un pays perdent confiance en la


monnaie, parce qu’ils craignent les deux phénomènes précédents, ou bien
parce qu’ils n’ont plus confiance dans la politique de leur gouvernement, ils
auront tendance à se débarrasser plus vite de la monnaie qu’ils possèdent.
La demande risque donc de s’élever brutalement ; si l’offre ne suit pas, les
entreprises pourront facilement accroître leurs prix et la valeur de la
monnaie diminuera.
Comme vous le voyez, nous sommes loin des idées toutes faites qui font
de la « planche à billets » ou, de façon moins rudimentaire, de
l’augmentation de la masse monétaire, la cause de l’inflation. Nous sommes
encore plus loin de toutes les conceptions qui donnent à la monnaie une
valeur intrinsèque en liant son pouvoir d’achat à la quantité d’or mise en
réserve dans les caves de l’Institut d’émission.
Cette liaison très étroite entre l’économie d’une nation et la valeur de sa
monnaie suppose, bien entendu, que soient remplies un certain nombre de
conditions institutionnelles et politiques.
D’une part, le pouvoir politique doit faire en sorte qu’à tout moment
l’économie puisse disposer de la monnaie nécessaire à son fonctionnement.
Si la monnaie n’est qu’un intermédiaire dans les échanges, elle n’a
cependant pas de neutralité économique. L’organisation de sa création en
fonction des besoins de l’économie a une action sur le fonctionnement et la
croissance de l’économie qui, à leur tour, réagissent sur la valeur de la
monnaie et en sont le fondement. On comprend, dans ces conditions, que
les règles qui gouvernent le système bancaire et permettent aux pouvoirs
politiques d’exercer ou de faire exercer par la Banque centrale le pouvoir
monétaire, sont fondamentales pour garantir la valeur de la monnaie.
D’autre part. le pouvoir politique doit défendre le rôle joué par la
monnaie dans l’économie où elle a cours. Rien ne serait plus dangereux
pour une économie qu’une monnaie dont l’utilisation serait laissée au bon
vouloir de la population. A la moindre perte de confiance certains
chercheraient à substituer à la monnaie nationale d’autres monnaies ou
d’autres étalons de valeur. La monnaie perdrait alors sa valeur d’autant plus
vite que l’ensemble de l’économie serait profondément désorganisée. L’État
doit donc imposer, par le cours légal, l’utilisation d’une monnaie et fonder
ainsi, juridiquement et politiquement. la convention sociale qui permet à
une monnaie d’être utilisée comme moyen d’échange.
Bien entendu, il n’est pas possible de séparer l’économie et l’action des
pouvoirs politiques des rapports entre les forces sociales. Une économie ne
parvient plus à maintenir la valeur d’une monnaie. un pouvoir politique se
révèle incapable de maîtriser la création de la monnaie ou de défendre sa
valeur, lorsque la détérioration des rapports de production et les conflits
sociaux qui en résultent ne le permettent plus. Nous touchons là à la cause
principale de l’inflation contemporaine. A partir du moment où chaque
groupe social s’organise afin de maintenir son pouvoir d’achat et de
s’approprier une part plus grande de la production, nous entrons dans une
véritable société d’inflation.
Or nous sommes bien aujourd’hui dans une telle situation. Les
entreprises sont devenues puissantes et, même sans avoir le monopole de la
production, elles peuvent augmenter leurs prix. Bien plus, grâce à la
publicité, au marketing et au management, les chefs d’entreprises savent
vendre mieux et plus cher. Quand un coût de production augmente, elles
répercutent son augmentation sur le prix de vente sans trop craindre la
concurrence.
De leur côté, les salariés se sont organisés en syndicats et ont obtenu des
garanties contre le chômage. Quand les prix montent, ils exigent une
augmentation de leurs salaires.
Bien plus. chaque groupe cherche à anticiper sur la hausse et il arrive
parfois qu’en dépit de l’énorme capacité de production des économies
modernes, la demande dépasse l’offre. Les entreprises sont alors mieux
placées pour augmenter leurs prix. On entre ainsi dans une période de
dévalorisation rapide de la monnaie, c’est-à-dire en inflation 18.
Les perdants, ceux qui finalement subissent la dévalorisation de la
monnaie sont ceux qui ne peuvent pas répercuter sur d’autres
l’augmentation qu’ils subissent. On le voit, s’il est possible d’étudier de
manière technique les problèmes monétaires, la valeur de la monnaie d’un
pays et son évolution reflètent bien l’ensemble des problèmes économiques,
politiques et sociaux de ce pays.

LES CONTREPARTIES DE LA CRÉATION MONÉTAIRE ET


LA VALEUR DE LA MONNAIE

La création de la monnaie doit donc accompagner les besoins de


l’économie de telle manière que la valeur de la monnaie soit maintenue.
Normalement, le processus qui entraîne la création de la monnaie devrait
garantir au maximum les conditions de la « stabilité monétaire ».

Au niveau des banques


Prenons d’abord un bilan très simplifié d’une banque.
Au passif, les engagements à payer à vue représentent bien la monnaie
scripturale. Or, cette monnaie a comme contrepartie, d’une part, des effets
de commerce qui se sont accumulés au fur et à mesure que la banque a
accordé des crédits et. d’autre part, de la monnaie de la Banque centrale,
soit sous forme de solde créditeur au compte courant de la Banque centrale,
soit sous forme de billets de banque dans les coffres de la banque.
Dans le cas des effets de commerce, il s’agit de papiers représentatifs
d’actifs réels. Rappelez-vous le mécanisme de l’escompte. Une entreprise
ayant produit des biens et les ayant livrés n’a pas été payée au comptant ;
son client lui a donné une reconnaissance de dette qui l’engage à régler sa
dette dans un, deux où trois mois. Des biens ont été produits et mis dans le
circuit économique, mais l’entreprise qui les a produits n’a pas été payée, ce
qui signifie qu’il manque sans doute de la monnaie. En acceptant cette
reconnaissance de dette en contrepartie d’une création de monnaie
scripturale, la banque va donc faciliter l’adéquation de masse monétaire aux
besoins de l’économie avec un maximum de garanties : des biens réels
existent mais on peut demander du crédit pour acheter des biens qui.
justement, sont rares. Dans le cas d’un découvert, la banque n’a pas en
contrepartie un effet représentatif d’un bien déjà produit, mais une créance
sur l’entreprise. Notons cependant que. dans ce cas. la banque n’accordera
le découvert qu’à une entreprise offrant des garanties certaines. La
meilleure de ces garanties étant, bien entendu, la capacité pour cette
entreprise de continuer à produire des biens et à les vendre sur le marché...
Mais à quel prix ? Malheureusement très cher, car plus la capacité de
vendre cher sera grande, meilleure sera la garantie.
Dans le cas de monnaie fiduciaire, nous sommes en présence d’un actif
monétaire et non réel. mais en fonction de quelle contrepartie cette monnaie
a-t-elle été produite ? Il nous faut alors passer à l’examen du bilan de la
Banque centrale.
Au niveau de la Banque centrale
Rappelons brièvement les grands postes du bilan simplifié d’une Banque
centrale :

Actif Passif
Or et créances sur l’étranger Billets en circulation
Créances sur le Trésor Compte courant à la Banque
Créances provenant d’opérations centrale
de refinancement

Au passif, les billets en circulation et les comptes-courants représentent


l’ensemble des engagements monétaires de la Banque centrale. en d’autres
termes la monnaie créée par cette dernière.
A l’actif, les devises possédées par la Banque de France représentent des
créances sur les économies étrangères ; grâce à elles on peut acheter à
l’étranger les biens et services que l’économie viendrait à ne plus pouvoir
produire. Quant à l’or, s’il n’est pas, à proprement parler, une créance sur
l’étranger, il représente bien une réserve qui, le cas échéant, peut permettre
de se procurer des devises, des créances sur l’étranger qui, à leur tour...
Ainsi un pays a la possibilité de faire face momentanément, à une
défaillance de l’économie nationale, mais ses avoirs en or et créances sur
l’étranger ne sont pas inépuisables.
Quant aux concours à l’économie, ils ont été accordés à travers l’achat ou
la prise en pension par la Banque centrale d’effets de commerce. Or, ces
derniers sont, comme nous l’avons vu plus haut, des actifs réels,
représentatifs de biens et de services déjà créés.
La monnaie et les banques. Schéma n° 10.

EXPLICATION DU TABLEAU
La contrepartie de la masse monétaire française n’est rien
d’autre que la sommation des bilans des banques commerciales,
de la Banque de France et de certains éléments de la comptabilité
du Trésor (notamment les créances que possèdent les particuliers
et les entreprises par suite des soldes créditeurs dans les chèques
postaux ou au Trésor).
L’étude de ces contreparties montre le rôle croissant des
banques dans la création monétaire. Certes, une partie des crédits
à l’économie ont été refinancés par la Banque de France, mais de
manière relativement modeste et de toute façon les banques ont,
sous la pression des entreprises et des particuliers, l’initiative de
la création des crédits à l’économie.
Les créances sur le Trésor réparties, là aussi, entre les banques
et la Banque de France ont joué un rôle relativement restreint
dans la croissance de la masse monétaire. On peut même affirmer
que la masse monétaire due à l’acquisition de ces créances est (en
dehors bien sûr des CCP) un héritage du passé. La recherche d’un
meilleur équilibre budgétaire, mais aussi l’impulsion donnée
automatiquement aux recettes par l’inflation, expliquent cette
situation (cf. l’ouvrage : l’Inflation).
Les réserves de change tiennent, elles aussi, une place
relativement faible dans les contreparties de la masse monétaire.
Toutes les fois que la situation de la balance des paiements se
dégrade, cette contrepartie diminue et vice versa. Notons que les
devises que les banques conservent dans leurs avoirs ne sont pas
prises en compte dans cette rubrique. Elles apparaissent dans le
poste « divers » 19. En fait leur montant est relativement modeste.
On voit ici, lorsque l’on tient compte de tous les éléments de la
masse monétaire, combien est fausse l’idée que les réserves de la
Banque de France sont la garantie de notre monnaie. Les réserves
de change représentent aujourd’hui moins de 10 % de la masse
monétaire... Cela n’empêchera pas la monnaie française d’avoir
une valeur.

Restent les créances sur l’État. Ces créances sont en partie


représentatives de prêts fort anciens. A l’origine, la création monétaire qui
en a résulté a peut-être été sans contrepartie réelle ; depuis lors, avec
l’accélération de la croissance, des actifs réels ont certainement compensé
cette création monétaire. En ce qui concerne les avances et les effets publics
possédés par la Banque centrale, la situation est plus ambiguë. Lorsque ces
créances sur l’État ont été acquises et ont donné lieu à une création de
monnaie par suite d’un découvert temporaire du Trésor, il ne s’est agi que
d’une anticipation sur les recettes publiques. Sans cette anticipation, des
dépenses n’auraient pas pu être réalisées. Certaines entreprises, en
particulier, auraient alors manqué de monnaie et l’ensemble de l’économie
aurait donc eu à en souffrir. Mieux vaut une création monétaire fondée en
anticipant sur la production, que le risque d’une désorganisation
économique.
Le même raisonnement peut être appliqué au financement du déficit
budgétaire. Des économistes ont d’ailleurs montré que le financement de ce
déficit par une création de monnaie, en permettant une utilisation plus
grande de la capacité de production, provoque à terme une élévation de
l’épargne qui compense la création monétaire. Le raisonnement est le
suivant : au départ le financement des dépenses publiques par une création
de monnaie provoque un gonflement de la demande ; la production
augmente et, du même coup, les revenus distribués. Ces revenus provoquent
à leur tour une nouvelle augmentation de la demande qui entraîne une
augmentation de la production qui, à son tour, aboutit à une distribution
supplémentaire de revenus, etc. 20. Chaque fois l’augmentation de la
demande induite par l’accroissement des revenus est égale à l’augmentation
des revenus diminués de l’épargne volontaire et forcée (les impôts). Il arrive
un moment où l’épargne égalera le déficit budgétaire.
La croissance de la production due à ce déficit s’arrêtera puisque, à ce
moment-là, les fuites (l’épargne) seront égales à l’apport de monnaie
supplémentaire due au déficit budgétaire.
En fait, ce raisonnement suppose qu’il existe une capacité de production
inutilisée. Dans le cas contraire, l’accroissement de demande provoqué par
le déficit risque bien de ne provoquer qu’une hausse des prix et une
dévalorisation de la monnaie. Il n’est donc pas faux de dire que
l’accroissement des créances sur le Trésor risque bien d’entraîner, plus que
toute autre cause de la création monétaire, une diminution de la valeur de la
monnaie. Tout dépend de la conjoncture.

A QUOI SERVENT LES RÉSERVES D’OR ET DE DEVISES DE


LA BANQUE CENTRALE ?

Vous avez peut-être été tenté de voir dans l’or et dans les devises
possédés par un pays le fondement de la valeur de la monnaie. Ou bien,
sans aller jusque-là, vous avez pensé que, à toute monnaie nationale doit
obligatoirement correspondre un stock d’or dans les caves de la Banque
centrale.

Mais alors à quoi sert la réserve d’or (et de devises) de la Banque


centrale ? 21
Plus aucun pays, surtout s’il est industrialisé, ne peut vivre en autarcie. Il
a besoin d’acheter et de vendre à l’étranger. Les mouvements de capitaux
accompagnent nécessairement les échanges de biens et de services et des
mouvements indépendants des échanges de marchandises peuvent avoir lieu
si des firmes étrangères investissent dans le pays, ou si des capitaux
cherchent des placements avantageux à court ou à long terme.
S’il y avait une monnaie mondiale unique, les échanges commerciaux et
les transferts de capitaux ne poseraient pas de problèmes différents de ceux
qui existent à l’intérieur d’une économie nationale. Mais les monnaies sont
essentiellement nationales. Non seulement ce sont les États nationaux qui
donnent à une monnaie sa valeur libératoire, mais l’émission de chaque
monnaie dépend des besoins de chaque économie nationale et le maintien
de sa valeur sur le marché national dépend de la capacité de chaque
économie à offrir sur ce marché des biens et des services à un prix constant.
Comment, dès lors, régler les échanges internationaux et transférer des
revenus ou des capitaux d’un pays à un autre ? Le principe de la solution est
simple : il suffit de choisir une monnaie reconnue par tous et qui servira de
monnaie internationale.
A l’origine, l’or joua ce rôle. Toutefois, dès le début du XIXe siècle, avec
le développement du commerce international, des difficultés apparurent :
d’une part, le transport de l’or n’était pas facile, d’autre part, sa production
était insuffisante et peu flexible. Il en est du commerce extérieur comme des
échanges à l’intérieur d’un pays : pour qu’ils puissent se développer, les
moyens de paiement doivent être en quantité suffisante.
On chercha donc, à substituer à l’or d’autres monnaies internationales. Là
encore, au niveau international, il en va de même qu’au niveau des
économies nationales : lorsqu’il n’existe pas de pouvoir politique suprême,
c’est la loi du plus fort qui devient la règle. Ainsi, dès le XIXe siècle, les
crédits en sterling des banques de la Cité de Londres se substituèrent très
largement à l’or dans les échanges internationaux. Et après la période de
troubles économiques et monétaires que fut l’entre-deux-guerres, en 1945 le
dollar, monnaie du pays dominant, devint progressivement la monnaie
internationale suprême. Elle le devint d’autant plus que les États-Unis
s’étaient engagés, depuis 1934, à acheter et vendre leur or à un taux fixe. Le
dollar était désormais un substitut de l’or.
De cette situation est venu le drame monétaire, car les dollars des États-
Unis qui ont servi ou servent encore de monnaie internationale, n’ont pas
été émis en fonction des besoins de l’économie mondiale, mais de ceux de
la politique américaine. Il en est résulté une fuite devant le dollar qui vida
progressivement les caves du Bureau fédéral de réserve de l’or qu’elles
contenaient. Cela dura jusqu’au moment où, pour arrêter l’hémorragie d’or,
le gouvernement américain décida d’abord de ne plus vendre à n’importe
qui de l’or à un prix fixe (avril 1968) et de réserver cette possibilité aux
Banques centrales, puis de supprimer toute convertibilité de l’or. Par la
suite, la spéculation contre le dollar 22 continuant, en dépit de sa
dévaluation, c’est la parité fixe des monnaies qui a disparu. Les monnaies
ne sont plus définies par un rapport à l’or ou à un dollar stable, et ne
pouvant être modifié que par une dévaluation ou par une réévaluation. Leur
valeur les unes par rapport aux autres varie en fonction de l’offre et de la
demande de chaque monnaie sur le marché des changes. C’est le flottement
des monnaies, appelé aussi « système de changes flexible ». Pour
compliquer le tout, l’interpénétration des économies et des systèmes
bancaires, la possibilité pour les banques américaines d’accorder des crédits
en dollars au reste du monde à travers leurs filiales, les besoins de dollars
provoqués par la hausse du pétrole et le recyclage d’une partie des
excédents en devises des pays de l’OPEP ont provoqué une création
« externe » d’euro-devises ou d’euro-dollars. Au niveau international, les
banques ont créé des « devises » comme elles créent de la monnaie
scripturale. De décembre 1975 à juin 1979, les créances des banques
européennes en euro-devises sont passées de 258 milliards à 528 milliards ;
le montant brut des créances extérieures des banques (y compris des
banques américaines) est passé de 447 milliards à 946 milliards.
Devant les risques de spéculation, et afin d’éviter que des divergences
monétaires ne viennent briser le Marché commun, les membres de la CEE
ont été alors amenés à créer le SME (Système monétaire européen). Son
objectif principal est d’empêcher les monnaies des pays membres de trop
fluctuer les unes par rapport aux autres.
Quant à l’or des banques centrales, il est de plus en plus stérilisé dans
leurs caves, sauf aux États-Unis où, périodiquement, le Bureau fédéral de
réserves vend une partie de ses stocks. Le prix de l’or, déterminé librement
par l’offre et la demande, s’affole. Devant les risques de spéculation
monétaire, de plus en plus de personnes veulent de l’or et de moins en
moins veulent en vendre. En février 1980, l’once d’or (61 g), qui ne valait
encore que 35 dollars avant 1968, atteignait près de 700 dollars, mais
retombait, sans doute provisoirement, à 500 dollars en avril 1980.
Mais que signifie alors la définition de chaque monnaie par
rapport à l’or, quand elle est encore utilisée ?
Il s’agit simplement de pouvoir comparer entre elles la valeur des
monnaies dont le pouvoir d’achat est étroitement lié à l’économie nationale
où elles ont cours.
La solution théorique est simple : il suffit d’exprimer la valeur de chaque
monnaie en fonction d’un étalon commun à toutes les monnaies, par
exemple l’or.
Cette référence laisse parfois croire que, pour chaque franc, il doit y avoir
x milligrammes d’or déposés dans les caves de la Banque de France. C’est
évidemment une extrapolation abusive. Un étalon de mesure n’est ni une
contrepartie ni un moyen de règlement, ni une garantie.

On peut ainsi établir à quel taux on devra changer le dollar et le


franc.

Il reste à savoir à quel niveau doit se fixer le taux de change et selon


quelle procédure. Nous nous permettons de renvoyer ici à l’ouvrage de la
même collection consacré au Circuit de l’économie nationale.

LE SME
La création d’un Système monétaire européen a eu pour objectif
de diminuer les fluctuations des monnaies des pays de la CEE les
unes par rapport aux autres. La Grande-Bretagne a signé l’accord
du 6 décembre 1979 qui créait le SME, mais il a été admis que la
livre sterling continuerait pour l’instant à « flotter »
« séparément ».
Grâce à ce système, les fluctuations de chaque monnaie ne
devraient pas dépasser 2,25 % autour d’un taux pivot (c’est-à-dire
de la grille des parités déterminée par l’accord). Pour la lire, la
fluctuation maximale est portée à 6 %. Ces taux pivots peuvent
être révisés par des dévaluations ou des réévaluations.
1. Lorsqu’on risque de sortir des marges admises de fluctuation, il
y a intervention automatique du FECOM (Fonds européen de
coopération monétaire) et les banques centrales peuvent se
consentir des crédits.
2. Pour pouvoir intervenir, le FECOM a reçu une dotation
représentant 20 % des réserves en or (évaluées à un cours dérivé
du marché) et en devises des banques centrales. L’or est calculé
en fonction de la moyenne des cours enregistrés à Londres durant
les six derniers mois, sans que ce cours puisse excéder la cote des
deux derniers jours ouvrables.
3. Le système a été pourvu d’un dispositif d’alerte qui oblige un
gouvernement à intervenir pour freiner ou arrêter soit la baisse,
soit la hausse de sa monnaie. Ce seuil d’alerte (ou seuil de
divergence) est fixé à 0,75 % du taux pivot en ECU (European
currency unit).
4. L’ECU est l’unité de compte du SME ; il est calculé chaque
jour à partir du cours des monnaies des pays signataires de
l’accord (1 ECU = 0,828 deutsche Mark + 1,13 franc + 0,0885
livre + 0,286 florin + 3,66 francs belges + 109 lire + 0,217
couronne danoise + 0,00759 punt irlandais + 0,00759 franc
luxembourgeois. Le 19 mars 1979, date de son introduction,
l’ECU valait ainsi 5,7931 francs.
5. Chaque pays reçoit, en contrepartie de son dépôt au FECOM,
des ECUS.
6. Dans le plan initial, les apports de chaque membre prennent la
forme de crédits croisés. Le FECOM s’engage à racheter à terme
les ECUS, et l’État à revendre des ECUS. Ce n’est que dans une
deuxième phase que les transferts de devises seront définitifs.
5. La défense de la monnaie et le
financement du crédit

Dans les chapitres précédents, nous avons vu, successivement, comment


la monnaie peut être créée et le rôle respectif des banques commerciales et
de la Banque centrale (la Banque de France). A propos de cette dernière
nous avons vu que, détentrice du pouvoir monétaire, elle avait pour mission
de faciliter l’ajustement entre l’offre et la demande de monnaie, tout en
veillant au maintien de sa valeur.

LA DÉFENSE DE LA MONNAIE PASSE PAR UNE ACTION


AU NIVEAU DE LA CRÉATION MONÉTAIRE

L’ajustement de la création de la monnaie aux besoins de la monnaie


n’est pas une tâche facile.
Dans une première analyse et en simplifiant beaucoup, on peut avancer
que la Banque centrale doit veiller à ce que l’ensemble de la monnaie créée,
la masse monétaire, corresponde au montant des transactions impliquées
par la production et l’échange des biens et des services. Il doit donc y avoir
une étroite liaison entre la quantité de monnaie et le produit national.
Il s’agit donc théoriquement de créer de la monnaie en fonction de
l’évolution de la quantité de biens et services produits. Si d’une année à
l’autre le produit national augmente de 6 % et les prix de 8 %, la masse
monétaire devrait en première approche augmenter de 14 %. Si la masse
monétaire ne s’accroît pas de 14 %, il y a de fortes chances de voir
apparaître un déséquilibre : demande de biens inférieure à offre de biens ;
les entreprises auraient des stocks invendus puis ralentiraient leur
production. On aboutirait au chômage. Par contre, si la masse monétaire
s’accroît de plus de 14 %, la demande des entreprises et des consommateurs
aura tendance à augmenter fortement. Cela pourrait provoquer une hausse
des prix au-delà de ce qui était prévu initialement. On rentrerait dans un
début de phénomène inflationniste difficile à contrôler.
Dans la réalité, les choses sont nettement plus complexes.
1. D’une part la monnaie circule et sa vitesse de circulation varie. Si les
partenaires économiques conservent leur monnaie et ne l’utilisent que
faiblement, avec une même quantité de monnaie il n’y aura qu’un
faible nombre de transactions : c’est le cas en général quand la
confiance en l’avenir est bonne.

La théorie quantitative de la monnaie


Pour les tenants de la théorie quantitative de la monnaie, dits
« monétaristes », la quantité de monnaie en circulation règle, de
manière fondamentale, le taux d’inflation. Fischer, en 1907, a
proposé une équation qui synthétise les données du problème :
M. V + M′. V′ = P.Q
M = les billets en circulation et la monnaie divisionnaire
(monnaie fiduciaire)
M’ = la monnaie scripturale
V = la vitesse de circulation de M
V’ = la vitesse de circulation de M’
P = le niveau général des prix
Q = le produit national brut
Cette équation est, en effet, conforme à ce que nous avons dit
jusqu’ici : la demande, ou si l’on veut, le pouvoir d’achat utilisé
(M. V M′. V′) doit être égale à l’offre des biens sur le marché (Q
le produit national brut). Le niveau des prix (P) assure l’égalité de
la demande et de l’offre. Si la masse de monnaie augmente (par
exemple, si la vitesse de circulation des billets (M) augmente),
sans accroissement parallèle du produit national brut (Q),
l’égalité des deux termes de notre équation sera sauvegardée par
l’augmentation des prix (P).
De cette équation, les monétaristes tirent un principe de politique
économique : il suffit aux autorités monétaires, maîtresses de
l’émission de monnaie et régentes du crédit, de gouverner la
circulation de monnaie comme il convient, pour enrayer la hausse
des prix. En fait, ce n’est pas la masse monétaire par elle-même
qui est inflationniste, mais les dépenses qu’elle permet. Bien
souvent l’augmentation de la masse monétaire, voire de la vitesse
de circulation de la monnaie, est la conséquence et. non la cause
de l’inflation.
D’après R Maury. La Société d’inflation. éditions du Seuil.

Par contre, la vitesse de circulation de la monnaie a tendance à s’accroître


lorsque la confiance disparaît, car les consommateurs et les entreprises
cherchent à se prémunir de l’avenir (hausse de prix par exemple) en
achetant immédiatement.
Lorsque la production et les transactions se développent, selon la
variation de la vitesse de circulation de la monnaie, on peut donc, avec une
même masse monétaire et dans un laps de temps donné, procéder à plus ou
moins de règlements.
Pour apprécier la vitesse de circulation de la monnaie, on essaie, dans la
pratique, de suivre les mouvements de billets entre les banques et la Banque
de France, ou au niveau des chèques postaux, d’après le montant journalier
des chèques et des transferts entre ces organismes. Mais ce contrôle est très
insuffisant, car une partie de la masse monétaire reste inerte : il s’agit là
d’encaisses oisives ou thésaurisées. On constate simplement à leur sujet
que, lorsque les prix montent, la monnaie ayant tendance, à manquer, il y a
déthésaurisation, c’est-à-dire que cette masse inerte diminue ; et en période
de stabilisation des prix, c’est l’inverse qui se produit.
2. D’autre part, ce raisonnement est très simplifié et schématique, car la
masse monétaire, le produit national et le niveau général des prix ne
sont pas liés, dans la réalité, par un rapport constant. Les prix, par
exemple, n’évoluent pas avec la même ampleur dans les divers
secteurs d’activité économique ; et, dans le temps, il y a des périodes
de hausse et des périodes de calme plat, voire de baisse. En outre, et il
faut y insister, la quantité de monnaie disponible n’a pas toujours de
liaison évidente avec les variations qui affectent les prix, notamment
lorsqu’on est en présence d’une inflation par les coûts 23. Cependant,
cette relation, quantité de monnaie — quantité de biens et services
disponibles, n’est pas sans importance. Il faut en tenir compte, même
si elle n’a pas de liaison directe avec le niveau général des prix.
Ces réserves étant faites, à quelle occasion la Banque de France peut-elle
agir pour ajuster la création monétaire. au besoin de l’économie ? Elle peut
le faire à l’occasion des relations avec l’extérieur, des crédits qu’elle
accorde directement ou indirectement à l’État ou de ses concours à
l’économie. A ces trois occasions, comme nous l’avons vu, de la monnaie
peut être injectée dans le circuit économique.
En fait, une Banque centrale ne peut réellement agir qu’à l’occasion des
concours à l’économie, sauf période de crise grave. La Banque centrale peut
difficilement refuser d’acheter des devises puisque, dans le cadre de sa
mission, elle doit faciliter les ventes et les achats à l’étranger et, plus
généralement, la convertibilité de la monnaie nationale. Par ailleurs, ne plus
accepter les effets publics ou une avance à l’État aurait des conséquences
politiques et économiques telles que l’ensemble du système monétaire en
serait ébranlé. Elle peut profiter de l’occasion pour demander au
gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent ; elle ne peut ébranler
le crédit public.
Finalement, la seule zone d’action réelle est encore le crédit aux
entreprises. A ce propos, deux questions se posent. Peut-on, en période
normale, financer n’importe quel type de crédit par la création de monnaie ?
A quel moment doit-on financer le crédit par la création de monnaie ? En
effet, comme nous l’avons signalé à la fin du chapitre 2 de cet ouvrage, tous
les crédits accordés à une entreprise ne sont pas financés par la création de
monnaie.

LE FINANCEMENT DES DIVERS TYPES DE CRÉDIT

Prenons une entreprise : à quel moment a-t-elle besoin de monnaie ?


Tout d’abord, pour son fonctionnement normal, une entreprise peut avoir
besoin de monnaie pour un court laps de temps. Il s’agit là d’un besoin né,
par exemple, d’un crédit de 60 jours consenti par l’entreprise à l’un de ses
clients. Dans ce cas, le produit de la vente n’est pas reçu au moment de la
livraison de la marchandise, mais le sera 60 jours plus tard. L’entreprise a
sans doute consenti ce crédit clientèle à des fins de séduction commerciale,
mais en même temps elle s’est privée de monnaie pour payer ses propres
fournisseurs. Elle établit alors un effet de commerce 24 qui, après signature
du client, pourra être porté à l’escompte du banquier.
De la même manière, un industriel pourra emprunter en fin de mois pour
faire sa paie (facilité de caisse) ; le grossiste en jouets pourra emprunter au
moment des salons du jouet au printemps pour acheter des stocks qu’il ne
commencera à vendre qu’à l’automne (crédit de campagne) : une entreprise
ayant des difficultés passagères de trésorerie pourra demander à sa banque
de payer des chèques alors qu’elle n’a plus de dépôt dans cette banque
(découvert en banque).
En règle générale, des entrepreneurs empruntent à court terme (moins de
2 ans) pour permettre à leur entreprise commerciale ou industrielle de
continuer à fonctionner normalement.
Mais une entreprise ne se borne pas uniquement à fonctionner ; elle doit
aussi croître. L’objectif d’une entreprise c’est bien sûr d’augmenter sa
production. Pour cela elle doit moderniser ses équipements en machines...
ou encore créer de nouvelles unités de production. Or, les besoins en
capitaux sont très importants dans l’industrie moderne. Si l’entrepreneur est
obligé d’emprunter pour réaliser ces nouveaux investissements, il semble
difficile pour lui de rembourser au bout d’un an ; il doit donc trouver des
crédits remboursables en 5, 10, 15 ou même 25 ans. Bien sûr, l’entreprise
cherchera au maximum à financer ces investissements par elle-même. Elle
s’autofinancera, c’est-à-dire utilisera ses propres bénéfices (qu’elle aura eu
soin de ne pas distribuer), plus l’argent correspondant à ses amortissements,
provisions... Aujourd’hui, la part de l’autofinancement représente souvent
plus de 85 % des investissements privés (mais bien entendu il varie selon
les secteurs, selon les entreprises, et d’un exercice à l’autre). Elle peut aussi
faire appel à ses actionnaires.
Le recours au crédit peut s’imposer néanmoins lorsque l’entreprise doit
réaliser des investissements qui dépassent sa capacité d’épargne et les
possibilités de ses actionnaires. Cet appel sera source de profit, car en
accroissant la production, l’investissement permet d’accroître les bénéfices
et crée, par le fait même, la possibilité de remboursement. C’est du moins le
cas si l’entreprise a su prévoir correctement la rentabilité de ses
investissements.
Chaque fois qu’il sera nécessaire de réaliser des investissements portant
sur plusieurs milliards (voire plus dans certains cas), l’appel au crédit
s’imposera. Ce sera le cas pour construire des barrages, des équipements
d’industries portuaires, mettre en exploitation des mines et gisements,
construire des complexes d’industries chimiques ou sidérurgiques. Dans ce
cas, c’est par l’intermédiaire d’institutions financières que sera collectée
l’épargne d’une multitude d’entreprises et de particuliers. Nous verrons plus
loin comment.
L’appel au crédit, soit par les institutions financières, soit par des
relations personnelles (famille...) s’imposera aussi aux petits entrepreneurs
pour lancer leur entreprise ou pour la moderniser. Dans tous les cas le crédit
est au service de la croissance économique.
Ainsi. il existe deux grandes catégories de crédit pour les entreprises :
a) les crédits qui assurent le fonctionnement de l’entreprise : crédits
allant de 1 jour à 18 mois, appelés crédits à court terme ;
b) les crédits qui permettent la création de nouvelles entreprises ou la
croissance d’entreprises existantes : crédits de 5 à 15 ans ou plus,
appelés crédits à long terme.

Le financement du crédit à court terme


Supposons une entreprise qui a fonctionné pendant tout le mois et
fabriqué pour 10 millions de francs de produits à vendre 25 sur le marché des
biens de production (investissements). A la fin du mois, elle a besoin de 10
millions de francs pour payer ses salariés qui achèteront ainsi pour 10
millions de biens sur les marchés de biens de consommation (cf. schéma
n° 11, p. 108).
Mais l’entreprise n’a pas d’argent pour payer ses salariés car ses clients
ne l’ont pas encore réglée. Si bien que la production de 10 millions de biens
de consommation ne trouve pas preneur : il y a déséquilibre dans le circuit
économique. Si à ce moment-là une banque accorde à l’entreprise, grâce à
une création de monnaie scripturale, un crédit de 10 millions pour payer ses
salariés, les revenus sont normalement distribués et la production de biens
de consommation pourra être achetée (cf. schéma n° 12, p. 109).
En ajustant la masse monétaire aux besoins de l’économie, la banque
permet de mieux équilibrer l’offre et la demande sur le marché des biens de
consommation. Il est donc économiquement normal de financer ce type de
crédit par de la création de monnaie scripturale, relayée éventuellement par
de la monnaie fiduciaire si la banque a besoin d’un complément de
trésorerie. La banque ne prend par ailleurs qu’un risque limité. En effet, en
accordant un crédit, elle accroît ses besoins de trésorerie (cf. chapitre 2),
mais cet accroissement sera assez vite compensé par des remboursements.
Le financement du crédit à long terme
Supposons que la compagnie de Saint-Gobain achète 10 millions de
machines et équipements pour mettre en place la fabrication d’une nouvelle
usine de verre à vitres dont la demande augmente face à une production
insuffisante.
Pour ce faire, elle demande un crédit aux institutions financières, qui le
financent grâce à une création de monnaie scripturale de 10 millions (cf.
schéma n° 13, p. 110). Que se passe-t-il ? Ce crédit, accordé pour une
longue durée (7 à 15 ans) et dont l’objet est l’accroissement de la capacité
de production de Saint-Gobain-Vitres, ne se traduira pas immédiatement par
un accroissement des biens de consommation produits : les vitres. Il faut
parfois plusieurs années pour construire et mettre en route une usine.
Pendant ce temps des revenus supplémentaires seront distribués aux
entreprises et aux salariés travaillant à la mise en place de la nouvelle usine.
Que risque-t-il de se passer ? Bien sûr, il peut exister une capacité de
production inutilisée mais ce n’est pas sûr et en tout cas nous savons déjà
que la capacité de production de vitres est insuffisante et le demeurera
jusqu’à l’entrée en service de la nouvelle usine.
Supposons maintenant que les banques, au lieu de financer ce crédit
grâce à une création de monnaie, fassent appel à l’épargne des ménages
(émission d’un emprunt auprès du public par exemple). Dans ce cas. le
circuit économique reste équilibré, car l’effet déséquilibrant des revenus
supplémentaires sur le marché des biens de consommation est annulé par
cette épargne équivalant à une abstention de consommation (cf. schéma
n° 14. p. 111).
Il est donc plus normal de financer le crédit à long terme par de l’épargne
que par de la création de monnaie : d’autant plus que la création de monnaie
pour le financement du crédit à long terme implique pour les banques des
besoins de trésorerie d’autant plus importants que les prêts consentis ne
seront remboursés que plusieurs années après l’émission de monnaie
scripturale.
On comprend donc, pourquoi en France, le crédit à long terme. d’une
durée supérieure à 7 ans, est généralement financé par un certain nombre
d’organismes spécialisés au moyen de ressources collectées directement ou
indirectement auprès des épargnants : c’est-à-dire à partir de monnaie
préexistante.
La monnaie et les banques. Schéma n° 11

La monnaie et les banques. Schéma n° 12


La monnaie et les banques. Schéma n° 13

La monnaie et les banques. Schéma n° 14


Les principaux organismes spécialisés de crédit
Le Crédit foncier de France consent des prêts à long terme :
— sur hypothèque aux propriétaires d’immeubles, c’est-à-dire en
ayant comme garantie des crédits consentis : des immeubles.
— sans hypothèque aux départements et communes. Dans ce cas.
les frais sont financés par le biais d’emprunts communaux.
Le Crédit national consent des prêts à long terme pour la
réalisation d’investissements dans l’industrie et le commerce. Il
se procure des ressources en émettant des obligations sur le
marché financier, c’est-à-dire dans le public, ou auprès de la
Caisse des dépôts et consignations, ou des compagnies
d’assurances. Il utilise aussi ses dépôts d’épargne.
Le Crédit hôtelier consent des prêts à long terme aux petites et
moyennes entreprises pour financer les programmes
d’investissements de tourisme et autres.
Le Crédit agricole consent des prêts à long terme à l’agriculture
et aux industries agro-alimentaires pour financer les réalisations
de logement et d’équipements agricoles ou agro-industriels. Il
étend ses opérations de financement à l’ensemble des
investissements en zones rurales.
L’État intervient notamment dans le cadre du Fonds de
développement économique et social (FDES) pour garantir les
emprunts, accorder des bonifications d’intérêts, voire accorder
des subventions aux entreprises qui investissent en vue de la
reconversion de leurs activités conformément au Plan de
développement économique et social.
Enfin, il faut faire une place à part à la Caisse des dépôts et
consignations, dont nous analysons le rôle dans ce chapitre.

A QUEL MOMENT PEUT-ON FINANCER UN CRÉDIT PAR


DE LA CRÉATION DE MONNAIE ?
Ainsi, les deux grands types de crédit (le crédit à court terme et le crédit à
long terme) doivent être normalement financés suivant des modalités
différentes. Il ne faudrait pas. cependant, en conclure que l’on peut créer
toute la monnaie que l’on veut pour financer les crédits à court terme, ou
qu’il n’est jamais possible de le faire pour un crédit à long terme.
Les crédits à court terme ne sont pas toujours sans danger pour la valeur
de la monnaie. En effet, ils peuvent aussi bien être utilisés pour faciliter les
transactions, que pour constituer des stocks à but spéculatif, au moment de
la hausse des prix sur un produit, auquel cas, ils aggravent alors le
déséquilibre entre l’offre et la demande, dans un secteur où le manque de
produits provoque déjà une hausse des prix. Certes, il y a eu production
préalable de biens puisque l’entreprise offre, en garantie, des effets de
commerce représentatifs d’actif réel, mais le pouvoir d’achat
supplémentaire qu’on lui accorde, se portant sur un secteur où la demande
est déjà largement supérieure à l’offre, risque bien d’y provoquer des
hausses sectorielles qui pourront éventuellement se généraliser, par la suite,
à l’ensemble de l’économie et y provoquer une dévalorisation générale de la
monnaie, l’inflation 26.
Par contre, supposons que nous soyons dans une période de grave
marasme économique. Le chômage augmente rapidement, la mévente se
généralise et les entreprises n’utilisent plus qu’une faible partie de leur
capacité de production. On peut très largement recourir, dans ce cas, à la
création monétaire pour accorder des crédits à long terme. En effet la
monnaie ainsi créée augmentera le pouvoir d’achat disponible,
l’accroissement de la demande permettra une augmentation de la capacité
de production utilisée et les risques de dévalorisation de la monnaie seront
donc très minimes. L’utilisation de la création monétaire pour le
financement des grands travaux au cours de la dépression qui suivit la crise
de 1929 a largement vérifié ce processus.
Malheureusement, les situations précédentes ne sont pas toujours aussi
évidentes. Le choix entre la création monétaire et J’épargne, pour financer
le crédit suivant le type de crédit et la conjoncture économique, pose de
délicats problèmes. La situation est en outre compliquée par l’existence
d’un crédit intermédiaire entre le crédit à long terme (plus de 7 ans) et le
crédit à court terme (entre 1 jour et 18 mois), le crédit à moyen terme (2 à 7
ans).
A l’origine, ce crédit confié aux instituts spécialisés de crédit (Crédit
national, Crédit foncier, Caisse des marchés de l’État, Crédit maritime...) ne
se distinguait pas des modes de financement du crédit à long terme. Après
la guerre de 1939-1945, cette forme de crédit prit une place importante.
D’une part, il apparaissait que les entreprises pouvaient rembourser certains
prêts nécessaires à des achats d’équipement en une période plus brève que
la durée habituelle des prêts à long terme. D’autre part, le volume d’épargne
disponible était très insuffisant par rapport aux besoins de la reconstruction.
On autorisa donc les institutions financières à utiliser les ressources
monétaires pour financer ce type de prêts. Dans certains cas, ce n’était que
l’utilisation d’épargne déposée à vue (la Caisse des dépôts). Dans d’autres
cas (les banques) on finançait le crédit à moyen terme par la création de
monnaie. L’opération était hasardeuse et il fallait autoriser la mobilisation
de ce crédit, au cas où les institutions financières l’ayant accordé
manqueraient de trésorerie.
Il est bien évident que dans le cas du crédit à moyen terme, les risques de
déséquilibre entre la masse monétaire et la production sont plus grands que
dans le cas du crédit à court terme. On comprend donc, que des mesures
durent être spécialement prises, pour limiter la multiplication du crédit à
court terme et limiter sa mobilisation. Nous les examinerons dans le
prochain chapitre consacré aux moyens que la Banque de France possède
pour défendre la valeur de la monnaie et faciliter l’ajustement de la création
monétaire aux besoins de l’économie. Au-delà des choix entre les modes de
financement du crédit, se pose en effet la question : comment la Banque
centrale peut-elle gouverner ces choix ?

A titre d’information complémentaire, nous présentons les principales


formules de crédit à terme : court, moyen et long.

Ce tableau (voir p. suivantes), bien qu’important, n’est pas complet. On


comprend que les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles, se
perdent un peu dans l’ensemble des « produits » qui leur sont proposés par
le système bancaire.
CRÉDITS A COURT TERME
(durée maximum 2 ans)
CRÉDITS A MOYEN TERME
(2 à 7 ans)
CRÉDITS A LONG TERME
(durée 7 à 15 ans)

UNE GRANDE INCONNUE : LA CAISSE DES DÉPÔTS ET


CONSIGNATIONS

Nous avons cité. à plusieurs reprises, la Caisse des dépôts et


consignations. Certains d’entre vous se sont peut-être demandé quel était
cet organisme. Il est vrai que la Caisse des dépôts et consignations est
inconnue pour un grand nombre de Français. Elle est pourtant devenue,
progressivement, la première institution financière mondiale, devant la
« Bank of America » et sa situation cumulée (527 milliards de francs en
1978) est, quantitativement, comparable au budget de l’Etat français.
Les fonctions de la CDC
C’est là le résultat d’une longue histoire commencée en 1816 et qui
semble parfois s’être développée empiriquement, au hasard des tâches que
l’État ne voulait pas assumer lui-même. Mais il ne s’agit là que d’une
apparence : fondée pour donner asile aux deniers privés qui faisaient l’objet
de droits litigieux et qu’il importait de protéger, elle est progressivement
devenue, aux confins de l’administration et des activités commerciales, un
établissement financier qui joue à la fois le rôle d’une banque de travail.
d’une banque des collectivités et d’une banque du Plan.

a) Banque du travail
Ce fut un des premiers rôles de la Caisse en devenant, en 1837, la banque
gérant les fonds recueillis par les Caisses d’épargne qu’il fallait protéger, à
la fois, contre les erreurs de gestion et les services de l’État. Aujourd’hui,
les fonds recueillis par les Caisses d’épargne (locale ou nationale)
représentent 80 % des fonds gérés par la Caisse. Certes, tous ces fonds ne
sont pas issus de l’épargne populaire, mais cette dernière y demeure
cependant prépondérante. Par la suite, lorsque apparurent les organismes de
prévoyance collective, elle devint tout naturellement leur banquier et mit à
la disposition d’organismes de prévoyance (notamment pour certains
régimes de retraite) son administration, afin de faciliter sa gestion. Cette
fonction l’a amenée, en outre, à créer une Caisse nationale de prévoyance
qui. grâce à ses formules et à ses tarifs. représente 16 % du chiffre d’affaires
de l’assurance-vie.
Naturellement, une partie des fonds drainés ne sert qu’indirectement aux
travailleurs, à travers les rôles de la Caisse, en tant que banquier des
collectivités locales et banquier du Plan ; toutefois. il faut noter qu’une
partie des ressources de la Caisse est utilisée pour le financement du
logement et. plus spécialement. du logement social. Près de 20 % de la
formation brute du capital fixe en logement est financée conjointement par
la CDC et les Caisses d’épargne. Selon les années, près des deux tiers des
ressources de la Caisse des HLM sont financés par la CDC. En outre, la
CDC apporte indirectement son concours au financement de la
construction, en alimentant le marché hypothécaire et le Crédit foncier.

b) Banque des collectivités locales


Les opérations de prêts de la Caisse, au profit des collectivités locales,
ont pris une place considérable, par suite de l’importance croissante des
équipements collectifs, de l’insuffisance des ressources de ces collectivités
et de l’impossibilité pour elles de faire face à l’augmentation des taux
d’intérêt du secteur bancaire. Au 31 décembre 1978, les prêts cumulés et
non encore remboursés représentaient 128 millions, soit 26 % de l’actif de
la CDC.

c) Banque du Plan
La CDC l’est directement en accordant des prêts à long terme pour des
opérations d’intérêt général (mise en exploitation du gaz de Lacq. RATP.
prêts aux PTT...) ou encore en s’intéressant à l’ensemble des valeurs
mobilières émises en France, notamment des obligations. Elle est ainsi
devenue le premier investisseur institutionnel.
Elle l’est indirectement et d’une manière plus diffuse, en facilitant le
refinancement des effets du crédit à moyen terme, ou encore par ses
interventions sur les marchés monétaire et hypothécaire. Elle est même
devenue le premier offreur de monnaie sur le marché monétaire, dont elle
assure la régularisation grâce à des fonds de l’épargne liquide, évitant ainsi
une intervention trop importante de la Banque de France.
Notons ici que, contrairement à une opinion fort répandue, la CDC ne
joue pratiquement plus de rôle dans le financement du Trésor. Certes, elle
possède un important portefeuille de rentes. mais elle ne souscrit plus aux
emprunts publics et ses concours, sous forme de détention de bons du
Trésor et de versement en comptes courants, n’ont cessé de décliner.
TABLEAU D’ENSEMBLE SIMPLIFIÉ DES CAPITAUX
CONFIÉS A LA CDC AU 31 DÉCEMBRE 1978
(en milliards de francs)

Les causes économiques du développement de la CDC


En fait, derrière le développement continu des activités de la Caisse, nous
trouvons des particularités du comportement de l’épargnant français qui
préfère conserver son épargne sous une forme liquide, c’est-à-dire toujours
immédiatement disponible et hésite à s’engager à long terme. Cette
tendance s’est encore renforcée avec l’inflation et le développement des
institutions de prévoyance sociale. Pour la plupart des Français (et
notamment ceux des catégories modestes et moyennes). l’épargne est
d’abord une attente de dépense (on épargne pour acheter un téléviseur, une
voiture, pour l’apport initial dans l’accession à la propriété), puis afin de
constituer une réserve immédiatement disponible en cas de coup dur
(maladie, décès, chômage...). Seule la partie la plus privilégiée de la
population épargne encore afin de se constituer un capital lui assurant un
revenu ou des plus-values en capital. Ces comportements expliquent le
développement des Caisses d’épargne et plus récemment de son équivalent
dans le système bancaire, l’épargne sur livret 27.
Cette orientation de l’épargne pose de redoutables problèmes pour le
financement des investissements, notamment de ceux qui ne sont
amortissables qu’à long terme et dont la rentabilité directe est faible
(logements sociaux, équipements collectifs, infrastructure énergétique ou de
communication...). En France, pour financer de tels investissements, il faut
se servir de dépôts à vue en les transformant en placements à long terme.
Dans le cadre du système bancaire normal, c’est une opération risquée et en
tout cas onéreuse.
Afin de permettre à ces investissements d’être réalisés à des taux
convenables souvent très inférieurs aux taux pratiqués par les banques, on a
canalisé vers la Caisse des dépôts l’épargne liquide la plus stable, celle des
caisses d’épargne. Depuis 1837, il n’y a pas d’époque où les retraits aient
excédé très fortement et brutalement les dépôts. De 1932 à 1935, durant la
grande crise, où l’hémorragie fut durable, elle n’excéda jamais 1 à 2 % de la
masse versée. Lorsqu’elle fut importante, comme en 1968, l’excès de
retraits ne dura jamais plus de 4 à 6 semaines, et fut suivi par un fort
excédent de dépôts. Ainsi, la Caisse des dépôts peut-elle être le principal
organisme de transformation des dépôts à vue en placement à long terme,
ayant un taux relativement faible et ne nécessitant pas un système de
refinancement. Étant donné l’importance des sommes investies à long
terme, il ne serait d’ailleurs pas possible de trouver, en dehors de la Banque
de France, un partenaire auquel la Caisse pourrait recéder ses créances. Un
établissement bancaire qui a des fonds beaucoup plus volatiles, ne pourrait
absolument pas se livrer à ce genre d’opérations.
Bien sûr, ces avantages ont, pour les épargnants, un inconvénient : ils ne
les garantissent pas contre l’inflation 28. Notons tout de suite. qu’à de rares
exceptions, c’est le sort commun à l’ensemble des placements financiers.
Dans le cas de la Caisse, cette situation apparaît plus injuste par suite du
taux relativement faible de l’intérêt servi par la caisse d’épargne et du
caractère populaire d’une grande partie de ces dépôts. Cependant, il semble
que plus de la moitié des sommes déposées, le soit par des personnes qui
recherchent l’anonymat fiscal des carnets A et le caractère net d’impôts des
intérêts servis, ce qui fait partiellement tomber une partie des critiques
précédentes.
Telles sont les principales activités de la Caisse proprement dite et les
raisons de leur développement, mais là ne se limite pas son influence. Pour
chacun des domaines de son intervention, la Caisse a prolongé son
influence en créant des filiales techniques.
Certaines de ces filiales sont des organismes opérationnels. Il s’agit de la
SCIC, de la SCET et des VVF.
La SCIC (Société centrale immobilière de la Caisse), créée en 1954, a
pour tâche de faciliter les opérations de construction et de gestion des
logements édifiés. Depuis 1954, elle a lancé la construction de plus de
400 000 logements, dont 165 000 en location.
La SCET (Société centrale d’équipement du territoire), créée en 1955.
participe à l’aménagement urbain, à la mise en place de zones industrielles,
à la construction des autoroutes et des transports collectifs... L’importance
de ses activités l’a amenée à créer, à son tour. des bureaux d’études
(BETURE. SEREQUIP. SCETautoroute) et des sociétés de gestion des
services publics (pour les transports urbains, les parkings, ou la gestion,
grâce à l’informatique, des finances communales).
Les VVF (Villages Vacances Familles), créés en 1958, ont pris
rapidement une place prépondérante dans le tourisme populaire et familial.
Au 31 décembre 1973, WF possédaient 19 villages et 77 gîtes. Le nombre
de leurs lits s’élevait à 52000 et ils avaient totalisé 4 079 800 journées
vacances, pour la seule année 1973.
A côté de ces filiales opérationnelles, nous trouvons des sociétés
d’études, la SEDES pour les études économiques et sociales, le CAM pour
l’informatique. le CEREP pour la formation permanente, la SCET
internationale pour les activités orientées vers l’outremer et qui a aussi un
caractère opérationnel. la SINORG. filiale de la SEDES et du CAM pour
les prestations informatique outremer.
Aujourd’hui, une réforme en profondeur de la CDC est en cours. Il faut
adapter la CDC aux problèmes que doivent affronter l’économie et la
société française.
Ainsi il est envisagé :
1. de faire intervenir de manière plus importante la CDC dans le
financement des investissements productifs ;
2. de développer les missions d’intervention de la CDC dans le Tiers
Monde en adaptant de manière plus spécifique à chaque pays les
interventions de ses filiales ;
3. de créer de nouveaux secteurs d’intervention en liaison avec la
transformation des modes de vie (protection et amélioration de
l’environnement, développement de l’information et de son rôle dans
la communication, valorisation des potentiels énergétiques et économie
d’énergie, loisirs et aménagement du temps libre...).
A cette fin, on devrait assister à la fois, à une coordination de l’action des
filiales et à une décentralisation des activités de la CDC en étroite liaison
avec les collectivités locales.

La notion de liquidités
On nomme le rapport entre la masse des moyens de paiement
disponibles et le produit national brut, la liquidité nationale. Cette
notion paraît simple ; toutefois il y a quelque hésitation sur ce qui
doit être mis en relation.
Doit-on tenir compte uniquement de la masse monétaire au sens
strict du terme, ou doit-on y inclure l’ensemble de la quasi-
monnaie, y compris les dépôts dans les caisses d’épargne et les
bons du Trésor ? C’est cette dernière optique qui est
généralement retenue. On met donc le produit national brut en
rapport avec l’ensemble des liquidités immédiatement
disponibles ou non, éléments que l’on prend en considération
pour calculer la masse monétaire.
29

On peut aussi comparer au PNB non plus la masse des liquidités


existantes au cours d’une année mais leur variation.
Exemple :

soit pour 1973, 7,7 %

Cette méthode permet des comparaisons plus fines en mettant en


évidence les changements dans le rythme d’augmentation des
liquidités.
6. L’arsenal de la Banque centrale

Après avoir examiné, dans une première partie, les mécanismes de la


création monétaire, nous avons fixé les conditions auxquelles la monnaie
ainsi créée pouvait garder sa valeur. La Banque centrale, en liaison avec les
pouvoirs publics, doit tenter de sauvegarder la valeur de la monnaie en
adaptant la création de la monnaie aux besoins de l’économie. En fait,
l’essentiel de son action porte sur le crédit. En effet, d’une part, elle ne peut
efficacement maîtriser les relations avec l’étranger et la création monétaire
qui en résulte et, d’autre part, il serait grave de porter atteinte au crédit de
l’État, en refusant directement ou indirectement une avance au
gouvernement. Finalement, le seul domaine où l’action de la Banque
centrale semble réellement pouvoir se développer est bien celui du crédit
bancaire : veiller à ce que la création de monnaie scripturale soit faite à bon
escient peut paraître facile ; normalement le crédit à court terme ne devrait
pas provoquer de déséquilibre, tandis qu’au contraire, le crédit à long et à
moyen terme représenterait en lui-même un danger. En fait, la situation est
plus complexe. Tout dépend de la conjoncture. En période d’inflation il peut
être imprudent d’accorder à une entreprise un crédit qui lui permettra de
gonfler sa demande de matières premières, tandis qu’en période de
stagnation il est parfois utile de financer l’investissement par la création de
monnaie.
La Banque centrale doit donc suivre, de manière précise, la conjoncture
et ajuster sa politique et les moyens de sa politique, à la situation
économique. C’est une tâche d’autant plus difficile que l’initiative, en
matière de création monétaire, ne vient pas d’elle. Elle accompagne la
création monétaire en jouant le rôle de la Banque des banques. L’initiative
vient, d’abord des entreprises et des consommateurs, puis des banques
elles-mêmes.

Test : Que feriez-vous à leur place ?


1. Si vous étiez entrepreneur

2. Si vous étiez consommateur

Commentaires
1. a) oui, vous avez avantage à emprunter, car le taux d’intérêt
réel demeure finalement négatif : 17 % — 19 % = — 2 %.
1. b) si vous avez répondu oui, vous estimez que la reprise est
proche, sinon il est dangereux d’emprunter à un moment où les
ventes chutent.

2. a) oui, finalement le taux réel d’intérêt demeure acceptable :


22 % — 19 % = + 3 %.
2. b) si vous avez répondu oui, vous êtes vraiment pressé(e)
d’avoir un lave-vaisselle, ou bien vous pensez que bientôt les
taux d’intérêt vont à nouveau grimper.
Finalement tout dépend de l’anticipation et de la conjoncture.
LA POLITIQUE DES TAUX D’INTÉRÊT L’ACTION SUR LES
DEMANDEURS DE CRÉDIT

Normalement, des taux d’intérêt élevés devraient décourager les


emprunteurs et. au contraire, des taux d’intérêt faibles devraient encourager
les entreprises et les particuliers à emprunter. Dans un cas. la création
monétaire sera accélérée, dans l’autre, elle sera encouragée.

Les armes de la Banque de France dans le maniement des taux


d’intérêt.
Dans la mesure où les banques ont besoin de se procurer de la « Monnaie
Banque centrale » pour faire face aux besoins de trésorerie qui naissent des
crédits qu’elles accordent, les taux auxquels la Banque de France procure sa
monnaie aux autres banques pèsent sur l’ensemble des taux d’intérêt.
1. A cette fin, la Banque de France peut faire varier les taux de
réescompte. Le maniement des taux de réescompte qui remonte au
XIXe siècle, a longtemps été l’arme principale en matière de taux ; elle
ne l’est plus. mais n’en demeure pas moins une possibilité 30.
Le taux de réescompte pratiqué par la Banque de France a pour but de
rendre l’obtention des liquidités plus chère pour les banques. Par voie de
conséquence, celles-ci hésiteront à recourir à la Banque centrale et éviteront
d’octroyer trop de crédits à leurs clients.
Mais. parallèlement, et surtout, comme les banques ne sont pas des
organismes philanthropiques, l’augmentation du taux de réescompte sera
répercutée sur le taux de l’escompte. L’effet de découragement des clients
apparaîtra. Les demandeurs de crédits non satisfaits devront utiliser leurs
moyens personnels de financement (autofinancement) ou différer leurs
projets.
Inversement, une baisse du taux de réescompte viserait à provoquer une
augmentation des demandes de crédit, entraînant une reprise de l’activité
économique.
2. Elle peut aussi, et c’est, aujourd’hui, son arme principale dans la
politique des taux, faire varier son taux d’intervention sur le marché
monétaire.
Au niveau de l’action sur les taux d’intérêt. les effets sont comparables
aux variations du taux de réescompte. Toutefois. la procédure est différente
et le taux d’intervention de la Banque centrale sur le marché monétaire est
plus directement dépendant de la liquidité des banques.
En effet, que fait la Banque de France lorsqu’elle veut accroître les taux
d’intérêt ? Elle restreint ses achats d’effets publics ou privés, ou bien elle
vend des effets publics ou privés. Dans un cas. elle agit en raréfiant l’offre
de monnaie Banque caution, dans l’autre. elle accroît la demande de
monnaie Banque centrale. Rappelons que cette seconde procédure est peu
utilisée en France, car le système bancaire est trop endetté et la Banque de
France ne peut avoir qu’une position d’acheteur de titres et d’effets.
Inversement. lorsque la Banque de France veut faire baisser les taux, elle
augmente ses achats ou naturellement arrête ses ventes d’effets.
A la différence du réescompte qui présente un taux rigide. l’ « open
market ». c’est-à-dire l’intervention de la Banque centrale sur le marché
monétaire, a l’avantage d’offrir un taux flexible forcément adaptable en
fonction de l’équilibre du marché.
Reste à savoir à quelle condition la politique des taux peut être efficace.

Les limites de la politique des taux


Ces limites tiennent, d’abord, aux réactions des demandeurs de crédit. Si
vous avez fait le test introductif à la première section, vous en comprenez
déjà les raisons.
Prenons le cas où la Banque centrale cherche à élever les taux d’intérêt.
Si l’on admet que la Banque centrale, par son action, peut agir sur
l’ensemble des taux d’intérêt pratiqués par les autres banques, il n’est pas
certain que les entrepreneurs renonceront pour autant à des investissements
devenus plus onéreux et que les particuliers demanderont moins de crédit à
la consommation.
En période d’inflation, les entrepreneurs et les particuliers sont disposés à
accepter des taux d’intérêt élevés. En effet, le taux réel est, finalement, le
produit de la différence entre le taux d’intérêt pratiqué et la hausse des prix.
Si le taux d’intérêt est de 14 % et la hausse des prix de 12 %, le taux réel
n’est plus que de 2 % et l’on remboursera sa dette en monnaie dépréciée, en
« monnaie de singe ». Il se peut même que la hausse des prix soit plus
importante que le taux d’intérêt. On l’a bien vu lors des années qui suivirent
la Libération. On ne peut imaginer des taux d’intérêt, de l’ordre de la hausse
des prix qui approchait 50 % à cette époque.
Ensuite, les entrepreneurs savent, en dehors de ces périodes, répercuter la
hausse de leurs coûts sur leurs prix ; la hausse des taux d’intérêt contribuera
donc à accélérer l’inflation et non pas à la freiner. L’augmentation du coût
du crédit découragera peut-être certains investissements, mais rien ne
garantit, cependant, qu’il s’agisse des moins justifiés. Les investissements
spéculatifs (constitution de stocks, achats de biens immobiliers,
investissements commerciaux...) risquent fort de prendre la place
d’investissements dont la rentabilité est moins immédiate ou moins visible,
mais qui contribueraient, plus tard, à accroître l’offre et donc à lutter
véritablement contre l’inflation.
En période de récession, la baisse du taux d’intérêt n’est pas toujours très
efficace, au moins en ce qui concerne les entreprises. En effet, lorsque la
stagnation et la mévente règnent, il faut de l’optimisme pour s’endetter.
C’est au moment de la crise, que le pessimisme des entrepreneurs est le plus
grand. Le taux d’intérêt doit donc être très bas s’il veut être inférieur au
taux de profit escompté. Or, on ne peut tout de même pas descendre le taux
d’intérêt aux environs de zéro ; la marge d’action est donc relativement
réduite. Par contre, en ce qui concerne les crédits à la consommation et
surtout les crédits pour l’accession à la propriété, il semble que la baisse du
taux d’intérêt garde toute son efficacité.

Ces limites tiennent aussi aux banques elles-mêmes


Par ailleurs, les taux pratiqués par la Banque centrale n’auront
d’influence sur les taux pratiqués par les banques que proportionnellement à
leurs besoins de trésorerie.
Or, nous savons déjà que normalement les banques n’ont besoin de se
refinancer que pour une fraction relativement restreinte des crédits
accordés. En effet, leurs besoins en monnaie Banque de France sont
normalement très faibles. Une augmentation des taux de la Banque centrale
n’aura donc d’influence que sur cette fraction du crédit accordé. A la limite,
la banque commerciale peut même, dans ce cas, accorder des prêts à des
taux inférieurs à celui de la Banque centrale sans pour autant perdre de
l’argent. Si vous ne nous croyez pas, faites le petit calcul ci-dessous.
Soit une banque, qui a normalement besoin de maintenir un taux
de liquidité immédiate en monnaie Banque de France de 10 %.
Elle accorde un prêt de 100 000 F à 10 % d’intérêt. Le taux
d’intervention de la Banque centrale est de 15 %.
Fait-elle un bénéfice ? Nous supposons que tous les intérêts sont
payables sur un an ; c’est une hypothèse hardie mais
simplificatrice et qui renforce notre démonstration.
Intérêt versé à la banque : 10 % de 100 000 F = 10 000

Intérêt versé par la banque : 15 % de

« Bénéfice » de la Banque : 10 000 — 1 500 = 8 500.

Les limites des mesures prises par la Banque centrale sont d’autant plus
fortes que les banques, du fait de la multiplication de leurs agences, de
l’accroissement du nombre de leurs clients (tout ceci par extension de
l’usage des chèques) et par leur politique commerciale, ont accru les
probabilités de virements internes, de compensation et diminué ainsi leurs
besoins relatifs de liquidité en monnaie Banque centrale.
Pour rendre la politique des taux plus efficace, il faut obliger les banques
à faire appel à la Banque de France.

LA POLITIQUE VISANT A RÉAGIR SUR LA LIQUIDITÉ


BANCAIRE. L’ACTION DIRECTE SUR LES BANQUES

Ainsi, là encore, le principe est simple : afin de soumettre les banques


aux injonctions de la Banque centrale, il faut accroître leur dépendance vis-
à-vis d’elle. En d’autres termes, il faut accroître leur besoin en monnaie
Banque centrale, geler les liquidités qu’elles peuvent encore posséder, les
gêner dans leur recherche de liquidité supplémentaire.

Les moyens mis à la disposition de la Banque centrale


Nous avons vu qu’à travers le marché monétaire et sa politique d’ « open
market », la Banque centrale pouvait régler le volume et le prix des
liquidités.
— En ce qui concerne le volume, l’effet est immédiatement perceptible :
la Banque centrale achète ou vend des effets. Ce qui signifie soit un
accroissement de la monnaie fiduciaire en circulation (achats d’effets),
soit une diminution de cette monnaie fiduciaire (ventes d’effets). C’est
dire l’importance de ce moyen d’action que possède la Banque
centrale, qui, indirectement et par le biais de sa réponse aux besoins de
liquidité bancaire, pourra inciter les banques à créer de la monnaie
scripturale ou les en dissuader.
Notons qu’en France, comme dans les autres pays, la Banque de France a
la possibilité de vendre des effets, c’est-à-dire de retirer des liquidités, mais
elle n’utilise pas cette prérogative. Les banques ont, en effet, un besoin net
de trésorerie, c’est pourquoi la Banque de France ne peut agir qu’en
alimentant plus ou moins le marché monétaire en liquidités et ainsi, elle a
toujours une position d’acheteuse d’effets.
La politique d’ « open market » permet aussi la prévision. En effet, elle
offre la possibilité de précéder les besoins de liquidités bancaires, en
injectant sur le marché monétaire de la liquidité au moment opportun, alors
que le réescompte ne permet que de suivre l’évolution des besoins, en
n’intervenant qu’au moment où les opérations d’octrois de crédits bancaires
sont déjà engagées.
L’action anticipatrice de la Banque de France s’est encore accrue, depuis
qu’elle a suspendu son action au jour le jour, pour une adjudication
mensuelle. Les banques savent ainsi le montant (et le coût) de l’intervention
de la Banque de France et sont incitées à une plus grande prudence dans
leur propre politique.
— En ce qui concerne le prix des liquidités, la Banque centrale, en
intervenant plus ou moins sur le marché monétaire, modifie le prix
d’équilibre du marché. La vente d’effets fait monter le prix de la
liquidité, l’achat d’effets le fait descendre. Quand l’équilibre, offre et
demande, est à un instant donné réalisé, les échanges s’effectuent. Puis
de nouvelles opérations ont lieu et ainsi de suite chaque jour, chaque
semaine... Encore faut-il que les banques aient besoin de trésorerie.
1. L’action sur les besoins en monnaie Banque centrale : les réserves
obligatoires.
Elles tendent à obliger les banques à détenir plus de liquidités que le
fonctionnement normal du système bancaire ne les y obligerait. Elles sont
d’autant plus nécessaires que les banques se sont organisées pour diminuer
les besoins de trésorerie en généralisant l’usage de la monnaie scripturale et
en multipliant les phénomènes de virement interne par la concentration
bancaire.
Pour constituer leurs réserves, les banques sont amenées à se refinancer,
c’est-à-dire à vendre une partie du portefeuille d’effets mobilisables
qu’elles possèdent. En fait, cela se traduit par un gonflement des soldes
créditeurs des comptes courants de chaque banque à la Banque de France ;
un gonflement qui coûte cher à cette banque, car elle doit se procurer des
liquidités sur le marché monétaire, alors que les soldes créditeurs dans les
comptes courants de la Banque de France ne lui rapportent aucun intérêt.
Le taux de ces réserves et ces réserves elles-mêmes varient assez
souvent, et nous ne voulons en donner, ici, que les grands principes.
Deux grandes catégories de réserves existent : une première porte sur les
dépôts, en distinguant les dépôts à terme et les dépôts à vue ; l’autre,
sanctionne les dépassements d’octrois de crédits par rapport aux normes
autorisées dans la progression de ces crédits.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’en aucune manière il ne s’agit, à
travers ces réserves, de geler des liquidités comme on a trop tendance à le
dire. En réalité, les banques sont amenées à respecter un solde moyen
mensuel qui se calcule vers le 21. On assiste donc, autour du 21, à une
montée très rapide des soldes créditeurs dans les comptes courants à la
Banque de France, le montant de ces soldes pouvant être très en dessous du
pourcentage des réserves obligatoires pendant une autre partie du mois.
De toute façon, il faut considérer cette obligation faite aux banques
comme une augmentation artificielle de leurs besoins en monnaie Banque
de France. L’effet d’une augmentation des réserves obligatoires est
analogue à celui d’une augmentation des besoins de billets. Les banques
doivent alors mobiliser des effets auprès de la Banque de France ou du
marché monétaire, soit pour alimenter leur compte, soit pour satisfaire les
besoins de leur clientèle.
Le système des réserves obligatoires permet donc de maintenir les
banques dans un état de dépendance raisonnable envers l’Institut
d’émission, alors que dans le même temps les besoins en billets (des
entreprises et des particuliers) et l’amélioration de la liquidité due aux
excédents de la balance des paiements, tendraient à les en affranchir.
La politique des réserves obligatoires est, bien sûr, de nature
réglementaire, c’est-à-dire, que son application s’effectue par voie de
contrainte. Hélas, si son efficacité est très forte, un certain nombre de
problèmes d’ordre technique se posent.
En effet, même si le taux des réserves est souvent modifié, il est
difficilement concevable, pour la Banque de France, de modifier à tout
moment le niveau des réserves obligatoires des banques pour coller à ses
objectifs. L’effet sur la liquidité des banques serait brutal et provoquerait
une instabilité permanente, tant au niveau bancaire, qu’au niveau des
équilibres économiques généraux.

A titre de complément : L’ancienne politique des


plafonds de réescompte
Ce fut la première politique menée par la Banque de France pour
limiter les possibilités de refinancement. Dans cette politique, au-
delà d’un certain niveau, une banque n’a plus le droit de
réescompter auprès de la Banque de France les effets qu’elle
détient. Cette mesure n’a pas été aussi efficace qu’on aurait pu le
penser. C’est en effet une procédure très rigide et on ne peut
modifier le plafond de réescompte au jour le jour. En outre, sa
fixation pose un certain nombre de problèmes, car elle tend à
geler les situations acquises et ne permet pas aux banques de se
faire une véritable concurrence. Enfin, surtout, pour tenir compte
des situations particulières, on en était venu à multiplier les
exceptions. Certaines de ces exceptions visaient à favoriser les
opérations qui paraissaient indispensables pour l’économie
française (par exemple, le réescompte des effets garantissant les
crédits pour l’exportation).
Dans d’autres cas, au contraire, on voulait pénaliser les banques
qui avaient dépassé leur plafond. Le contrôle de la création de la
monnaie scripturale est a posteriori. Si les banques jouent la
politique du fait accompli, la Banque de France ne peut leur poser
des problèmes insolubles qui les obligeraient à déposer leur bilan.
On s’en tirait par la multiplication des taux, en cas de
dépassement du plafond de réescompte. Ainsi, à la date du 31
janvier 1969, les interventions de la Banque de France pouvaient
avoir lieu à une dizaine de taux différents. Si le réescompte de
droit commun fournissait aux banques 6,94 milliards, les régimes
particuliers leur en fournissaient 22,15. Inutile de dire que la
multiplicité de ces taux entravait la bonne orientation des crédits.
Ainsi, la capacité que posséda le réescompte pour orienter le
crédit en fonction des besoins de l’économie, s’en trouvait-elle
fortement diminuée.

L’économie passerait de phases d’inflation monétaire (en cas de baisse du


taux de réserves) à des phases de déflation monétaire (en cas de hausse du
taux de réserves).
Aussi, pour éviter ces écueils, la Banque de France n’agit-elle jamais
brutalement.
Les mesures prises sont toujours annoncées à l’avance, le taux des
réserves obligatoires ne subit que des variations de très faible amplitude.
2. L’action pour limiter le recours à la Banque centrale.
A l’époque où le réescompte était le mode normal de refinancement des
banques, on avait vu surgir toute une réglementation limitant les possibilités
d’appel à la Banque de France.
Aujourd’hui, comme nous l’avons vu, le réescompte ne joue plus qu’un
rôle limité et il trouve sa limite dans la nature des opérations auxquelles il
demeure appliqué (les crédits à moyen terme à l’exportation).
La Banque de France a, cependant, des moyens pour limiter la possibilité
qu’on a de recourir à elle.
D’une part, elle peut donner ou non son accord de mobilisation pour
certains effets susceptibles d’être apportés par les banques sur le marché
monétaire. A travers cet accord, la Banque de France peut, non seulement
orienter le crédit (on prêtera plus aisément à un secteur, une branche ou une
entreprise, dont les effets reçoivent plus facilement l’accord de
mobilisation), mais surtout elle peut limiter très fortement la possibilité de
refinancement. Certes, une banque peut toujours céder à une autre un effet
non mobilisable, mais cela se fera à un taux très élevé, car la banque
acheteuse de l’effet sait qu’elle ne pourra pas le revendre à la Banque de
France.
Par ailleurs, les banques sont obligées de financer elles-mêmes et sans
possibilité de recours à la Banque de France, une partie des crédits à moyen
terme qu’elles accordent. Actuellement, cette obligation est concrétisée par
un portefeuille minimum de créances à moyen terme et d’obligations. Cette
obligation fait parfois rechercher par les banques ces effets à moyen terme.
Sur le marché monétaire, les taux d’intérêt payés par les banques cherchant
à se procurer des liquidités en se dessaisissant d’effets à moyen terme, sont
ainsi toujours inférieurs au taux pour les effets à court terme.
Comme on le voit, l’ensemble de ces dispositions : réserves, obligations,
accord de mobilisation, portefeuille minimum d’effets à moyen terme et
d’obligations, a un effet dissuasif, contraignant, mais ne bloque pas son
action. Une banque peut toujours passer outre si elle est prête à payer le
prix. De plus, cette action de la Banque de France sur les liquidités repose
sur un postulat de base : l’ensemble du système bancaire ne sera pas
« inondé » de liquidités.

Les limites de l’action sur les liquidités


Ici, les limites du système se trouvent dans l’existence même d’autres
facteurs de la création de monnaie : le Trésor public et l’extérieur.
1. La première cause d’inondation et de mise en échec du système de
contrôle : le Trésor public.
Nous avons vu que la Banque de France effectuait, pour le compte du
Trésor, un certain nombre d’opérations : prêts et avances à l’État, prises en
pension d’obligations cautionnées, qui se soldaient par de la création de
monnaie scripturale Banque de France.
Cependant, tant que les utilisations de cette monnaie sont effectuées au
sein du circuit du Trésor, il n’y a pas lieu de créer de la monnaie fiduciaire,
du moins en quantité considérable. Il est bien certain qu’un minimum de
billets sera nécessaire pour effectuer les opérations courantes.
En effet, supposons que le Trésor ait reçu de la Banque de France 10 000
F sous forme de prêts. Si ces 10000 F sont utilisés pour payer des
fonctionnaires ayant un compte aux chèques postaux, il y aura transfert de
monnaie d’un compte du Trésor à un compte de chèque postal. Il n’y a pas
lieu d’avoir des billets pour faire ce transfert, un jeu d’écritures suffit, les
chèques postaux étant partie intégrante du circuit du Trésor.
Par contre, si M. Berger, qui a un compte créditeur aux chèques postaux,
désire transférer de la monnaie au compte que sa femme a ouvert dans une
banque, il est nécessaire de recourir aux billets. Il en est de même pour
toute opération de retrait aux guichets des chèques postaux.
Nous pouvons, à travers ce simple exemple, mesurer l’importance du
circuit du Trésor dans les fuites du système de contrôle de la Banque de
France. Plus il y aura d’opérations entre le circuit du Trésor et les banques,
plus il y aura de chances de voir transférer des liquidités, plus il y aura de
fuites possibles au système de contrôle de la Banque de France. On
comprend que les banques aient cherché à séduire des clients ayant un
compte créditeur dans le circuit du Trésor. Cette séduction a pour objet
l’obtention du maximum de liquidités existant hors circuit bancaire.

2. La deuxième cause d’inondation et de mise en échec du système :


l’extérieur.
Si le circuit du Trésor est susceptible de provoquer des fuites dans le
système de contrôle Banque de France, il en est de même pour l’extérieur 31.
En contrepartie de la vente de biens et services à l’étranger, les
exportateurs reçoivent des devises (monnaies étrangères). Celles-ci sont
apportées à la Banque de France qui les convertit en francs, l’opération
s’inversant pour les importations. Ce qui signifie :
— d’une part, qu’il y a création de monnaie fiduciaire chaque fois que
des opérations d’exportation ont lieu, ou du moins sont réglées ;
— d’autre part, que cette monnaie fiduciaire est autant de liquidité
nouvelle introduite dans le circuit des banques. A priori ce genre
d’opération va à l’encontre d’une limitation ou d’un contrôle Banque
de France sur la liquidité bancaire.
Peut-être, allez-vous penser, qu’après tout, la Banque de France peut fort
bien ne pas remettre de monnaie fiduciaire en échange de devises reçues.
Cela serait évidemment possible si les entreprises exportatrices n’avaient
pas besoin d’être payées. Or, comment pourraient-elles payer leurs propres
fournisseurs, leurs salariés..., si ce n’est grâce au paiement de leurs ventes à
l’étranger ?
La Banque de France ne peut donc pas empêcher cette création de
monnaie en contrepartie de devises, sans compromettre gravement, non
seulement les relations du pays avec l’extérieur, mais aussi le sort des
entreprises françaises qui vivent de l’exportation. Mais là n’est pas le plus
grand danger dû à l’extérieur. Plus graves encore peuvent être les
conséquences des transferts internationaux de capitaux.
Jusqu’à présent, nous n’avons abordé le marché monétaire que sous
l’angle d’un marché intérieur de liquidités moyennant un prix de marché,
avec la possibilité permanente pour la Banque de France d’intervenir, soit
pour injecter, soit pour aspirer des liquidités : politique d’open market.

Quelques armes à la disposition des Banques


centrales contre les risques d’inondation par les
capitaux étrangers
1. Mettre des réserves obligatoires de 100 % sur les comptes des
non-résidents. Les banques ne possèdent pas de liquidités
disponibles, il n’empêche que la masse monétaire a augmenté et
que, d’une manière ou d’une autre, les capitaux introduits dans
l’économie nationale vont y avoir une action.
2. Bloquer les avoirs étrangers ; ce qui revient à refuser de
convertir les capitaux étrangers en monnaie utilisable à l’intérieur
de l’économie nationale. Le tout est de pouvoir différencier, de
façon certaine, les devises qui sont le fruit d’opérations
commerciales et des capitaux dont l’objet est la spéculation. Il
existe, en fait, bien des moyens de passage de l’un à l’autre.
3. Instaurer les changes flottants ; c’est une mesure qui s’est
généralisée. Les monnaies ne sont plus échangées en fonction de
taux de change fixe. C’est l’offre et la demande d’une monnaie
qui fixent le taux de change. Si les capitaux rentrent en masse, le
taux de change va être élevé, les détenteurs de ces capitaux vont
obtenir de moins en moins de monnaie nationale, contre une
même quantité de devises. Cela devrait les décourager. En cas de
fuites, des conséquences inverses devraient freiner
progressivement le départ intempestif. En fait, cette pratique
complique énormément les relations internationales. A moins de
se couvrir à terme, on ne sait plus à quel prix on exporte. (Voir
l’ouvrage : le Circuit de l’économie nationale.)

Supposons qu’il y ait un excédent de liquidité bancaire et, qu’en même


temps, les entreprises et les particuliers exercent une très forte pression sur
les banques pour obtenir des crédits. Supposons, d’autre part, que la Banque
de France veuille limiter l’octroi de crédits par les banques, car un
déséquilibre existe entre la quantité de monnaie et la quantité de biens. La
Banque de France va chercher alors :
— à éponger les excédents de trésorerie de certaines banques, en
imposant aux banques des réserves obligatoires ;
— à éponger, par la politique d’open market, tous les excédents de
trésorerie que certaines banques ou organismes financiers
chercheraient à offrir sur le marché monétaire. Or, si les demandeurs
de crédits (entreprises et particuliers) exercent une forte pression sur
les banques afin d’obtenir, à tout prix, des crédits, la demande de
liquidités sur le marché monétaire s’accentuera. Les offres de liquidités
confrontées à des demandes très fortes provoqueront une hausse du
taux du marché monétaire.
Parallèlement, la Banque centrale voulant éponger au maximum les
liquidités excédentaires, acceptera de payer encore plus cher le prix de la
liquidité. La pression de la demande s’accentue, le taux du marché
monétaire grimpe.
Si, au même moment, des partenaires français ou étrangers possédant des
capitaux en devises 32 souhaitent les placer à des taux intéressants, il y a de
fortes chances pour qu’ils choisissent le pays où les taux d’intérêt sont
élevés. En l’occurrence, la France.
Les devises viennent ainsi se déposer dans les banques françaises qui
demandent à la Banque de France leur conversion immédiate en monnaie
fiduciaire. Puis les banques offrent cette monnaie fiduciaire sur le marché
monétaire.
Que peut alors faire la Banque de France ?
Elle va, sans aucun doute, augmenter sa demande en acceptant de payer
encore plus cher les liquidités. Il y a emballement. De nouvelles devises en
quête de rémunération arrivent en France et le processus s’accélère. La
Banque de France doit à nouveau absorber ces nouveaux excédents de
liquidités en offrant des taux de rémunération encore plus élevés !
Les capitaux flottants représentent, actuellement, une masse supérieure à
la masse monétaire allemande, mettant fort en question le pouvoir
monétaire des banques centrales. Les parades qu’elles possèdent sont, soit
difficilement praticables, soit entraînant des effets secondaires graves. Elles
en sont alors réduites à des mesures de plus en plus dures pour les
économies dont elles doivent assurer la sécurité monétaire.

LA SOLUTION DE DERNIÈRE CHANCE : LES NORMES DE


PROGRESSION DES ENCOURS

Nous avons vu, au cours des paragraphes précédents, un ensemble


d’instruments et de méthodes directs ou indirects de contrôle de la
distribution du crédit en France. Ces outils, fondés à la fois sur des mesures
quantitatives et sur une politique des taux, s’avèrent parfois insuffisants,
tant pour limiter la création monétaire des banques, que pour agir vite et
efficacement.
Certaines actions, tout en apparaissant des plus efficaces en première
approche, provoquent des situations très rapidement incontrôlables (la
politique d’ « open market »), si certaines décisions n’étaient pas
éventuellement prises en parallèle (rupture des parités de change fixes).
Par ailleurs, s’il semble nécessaire d’utiliser des outils très généraux de
contrôle de la création monétaire, il n’en est pas moins vrai que certaines
actions, plus liées à un secteur économique ou à un type de crédit en
particulier, peuvent être nécessaires.
— Dans un premier temps, on a tenté de réaliser cette action par des
mesures administratives d’interdiction : l’encadrement du crédit.
Par ce moyen, on interdisait à une banque de dépasser le volume des
crédits en cours, ou encore, on n’autorisait qu’une progression limitée. Ce
qui, compte tenu de la hausse des prix, aboutit à une régression de fait.
— Aujourd’hui, on allie la limitation de la progression des encours au
système des réserves obligatoires. Si la progression est dépassée, les
réserves obligatoires sur les dépassements vont augmenter plus que
proportionnellement. La rigidité est donc moins grande que celle d’une
interdiction formelle.
Ce système a, cependant, un grave inconvénient : il fige les situations des
différentes banques. Tous les établissements bancaires, ou, plus
généralement, de crédit, sont soumis à la même règle. Qu’un établissement
ait une politique dynamique ou non, les contraintes sont les mêmes pour
tous : la concurrence disparaît et le dynamisme est pénalisé.
On comprend aisément que devant de tels défauts, les banques acceptent
difficilement ces limitations et cherchent par toutes sortes d’astuces à les
tourner. Mais il faut bien avouer qu’avec le temps, les contrôles deviennent
plus efficaces et plus difficiles à tromper.

Avant de lire ce dernier chapitre : Quelques


constatations à propos de la lutte contre l’inflation ou
la récession et sur l’efficacité de la politique
monétaire
1. Il y a inflation, il faut empêcher les
banques d’accorder des crédits et de faire
augmenter aussi la masse monétaire OUI NON
2. Il y a récession, en faisant baisser les
taux d’intérêt, la Banque centrale favorise
d’abord l’investissement. OUI NON
3. Il y a récession, en faisant baisser les
taux d’inflation, la Banque centrale ne
favorise pas d’abord l’investissement,
mais les placements financiers à plus long
terme et notamment les placements
boursiers. OUI NON
4. Il y a inflation, certes il faut peut-être
éviter une expansion trop rapide de la
masse monétaire, mais il faut surtout
s’attaquer aux rapports de forces qui
permettent aux entreprises d’accroître
leurs prix. OUI NON
5. Il y a inflation, l’augmentation des taux
d’intérêt que l’on provoque pour
dissuader les demandeurs de crédit
provoquera d’abord une hausse des prix. OUI NON
6. Il y a un rapport direct entre la masse
monétaire et l’activité économique. OUI NON
7. Les causes fondamentales de l’inflation
résident dans un déséquilibre entre l’offre
et la demande. OUI NON
8. Une récession n’est, après tout, qu’un OUI NON
mauvais moment à passer, ce n’est pas
cher payer pour vaincre l’inflation ; après
tout, mettre le potentiel économique en
sommeil ne porte pas atteinte aux
possibilités de croissance à long terme,
bien au contraire puisque la récession
éliminera les activités les moins
dynamiques.
7. La place de la politique monétaire dans
la politique économique

Nous venons d’examiner l’arsenal d’une Banque centrale dans sa lutte


pour la sauvegarde de la monnaie et de la prospérité économique 33.
Certes, nous avons vu que chacune de ces armes n’était pas, à elle seule,
réellement efficace, mais nous avons vu aussi que les Banques centrales ont
progressivement perfectionné les moyens mis à leur disposition, renforcé
leurs méthodes d’intervention et de contrôle. Peut-on, dans ces conditions,
faire de la politique monétaire, même de la Banque centrale, l’outil
fondamental d’une politique d’expansion sans inflation, espoir souvent déçu
de tous les ministres des finances ?

MANIEMENT DE LA MASSE MONÉTAIRE ET NIVEAU


D’ACTIVITÉ DE L ÉCONOMIE

A l’origine, la politique monétaire actuelle est inspirée par l’économiste


britannique J.M. Keynes. Classiques et néo-classiques pensaient en effet
que l’équilibre économique était avant tout réalisé à travers les facteurs
réels, la quantité, de monnaie n’ayant d’influence que sur le niveau général
des prix. Bien des personnes croient d’ailleurs encore qu’il existe un lien
direct et constant entre la création monétaire (qu’elle soit due au crédit ou
au déficit budgétaire) et les prix. Keynes montra au contraire que. d’une
part, la variation de la quantité de monnaie dont disposent les agents
économiques d’un pays influence la demande, et que d’autre part, c’est à
travers cette variation de la demande que la création monétaire peut avoir
une influence sur les prix. Si l’augmentation de la demande provoquée par
l’augmentation de la masse monétaire entraîne une élévation de l’offre, car
la capacité de production n’est pas totalement élevée, les prix ne monteront
pas. Il n’y a de liaison entre la variation des prix et celle de la masse
monétaire qu’à partir du moment où la capacité de production est
totalement épuisée.
Réponses
Si vous avez répondu OUI à 1, 2, 6, 7, 8, et NON à 3, 4, et 5,
vous croyez fermement à l’efficacité de la politique monétaire, et
vous pensez sans doute qu’elle peut à elle seule maintenir
l’expansion sans récession.

Si au contraire vous avez répondu OUI à 3, 4 et 5 et NON à 1, 2,


6, 7 et 8, vous émettez de sérieux doutes sur l’efficacité de la
politique monétaire, surtout si elle tente à elle seule de lutter
contre la récession ou l’inflation.

Si vos réponses sont panachées, vous êtes perplexe, comme


d’ailleurs de nombreux ministres des finances des pays
occidentaux.

Si vous lisez ce dernier chapitre vous comprendrez pourquoi.

Depuis cette mise en cause de la pensée classique par Keynes. l’analyse


s’est affirmée et aux successeurs de Keynes se sont opposés les
« monétaristes » dont le plus célèbre est l’économiste américain Milton
Friedman de l’école de Chicago. Il fut un temps le conseiller du président
Nixon et il influence encore aujourd’hui une partie des responsables du
Bureau fédéral de réserve et des banques fédérales.
L’originalité des monétaristes est de reprendre en partie la distinction
entre l’économie monétaire et l’économie réelle des classiques ; ainsi à long
terme, l’équilibre économique général. ou plus exactement la production en
volume, serait déterminée en dehors de l’équilibre économique à court
terme et donc de la variation de la masse monétaire. Du même coup ils
proposent de lutter contre l’inflation par des politiques monétaires
drastiques maintenues durant de longues périodes. Certes cette politique
aura des conséquences sur l’équilibre à court terme et provoquera marasme
et chômage, mais les prix baisseront, ou du moins se stabiliseront. C’est un
mauvais moment à passer et il faut le rendre le moins douloureux possible
grâce à des garanties de revenus. Une fois le mauvais moment passé, on
pourra reprendre la marche en avant et la croissance ne sera pas mise en
question puisqu’elle ne dépend pas de facteurs de type monétaire. Les
keynésiens sont beaucoup moins optimistes car, dans la ligne directe de
Keynes, ils mettent l’accent sur le court terme et le valorisent aux dépens du
long terme (« à long terme, disait Keynes. nous serons tous morts ») ; ils
sont donc beaucoup moins patients devant une basse conjoncture provoquée
par une politique de restriction monétaire.

Les mécanismes de transmission des impulsions de la


politique monétaire à l’activité économique 34
La politique monétaire agit sur le volume de l’activité
économique à partir de trois effets :
1. L’effet de richesse, car la variation de la masse monétaire, en
faisant varier les taux d’intérêt, provoque par exemple une
variation des actifs possédés. notamment des titres mobiliers. La
variation de la valeur des actifs (de la richesse possédée) va avoir,
bien entendu, des conséquences au niveau des dépenses des
ménages, voire des entreprises, et par là sur l’activité
économique. Naturellement. cet effet de richesse est d’autant plus
important que les agents économiques sont plus engagés sur le
marché financier, ce qui n’est pas actuellement le cas.
2. L’effet coût du capital. Toute augmentation du taux d’intérêt
agit sur le coût de l’investissement, ce qui peut le financer tant au
niveau des ménages (logement) qu’au niveau des entreprises.
Cet effet sera d’autant plus fort que le rôle des banques dans le
financement sera plus grand, ce qui est le cas en France.
3. L’effet de liquidité. Il reprend l’idée qu’en bloquant ou en
facilitant l’accession aux liquidités on tend à. faciliter ou non
l’investissement car les agents ont plus ou moins besoin de
consacrer d’importantes sommes à leur fonds de roulement ou
encaisse liquide. Naturellement, cet effet joue à plein lorsque,
comme en France, le marché financier est moins développé que le
crédit bancaire et que l’autofinancement n’est pas trop important.
Il n’empêche que chacune des deux écoles sont d’accord : la
variation de la masse monétaire et des conditions du crédit ou des
conséquences à court et moyen terme sur la vie économique. Par
contre, les deux écoles se séparent quant à l’importance des effets
que l’on peut attendre d’une politique d’expansion ou de
stagnation de la masse monétaire et. du même coup, sur le rôle
que peut jouer une telle politique dans la régulation de l’activité
économique.

DE COMBIEN DOIT-ON FAIRE VARIER LA MASSE


MONÉTAIRE POUR AVOIR DES RÉSULTATS TANGIBLES ?

Pour les monétaristes, l’effet est rapide. Il existe d’après eux de


nombreux mécanismes de transmission de la politique monétaire à la vie
économique (du moins à court terme et moyen terme). Ces mécanismes
sont si nombreux qu’on peut même établir une équation passant directement
de la masse monétaire au niveau de production et à celui des prix. Il suffit
alors de maintenir la croissance monétaire de deux à trois points au-dessous
de celle des prix durant une période relativement importante, 16 à 22 mois,
pour arrêter l’inflation. De même, en maintenant pendant 6 à 8 mois le taux
de croissance monétaire au-dessus de celui des prix, on peut parvenir à
relancer l’économie. Sans adhérer aux thèses de M. Friedman, le
gouvernement tente de freiner l’augmentation de la masse monétaire.
Les néo-keynésiens doutent, de leur côté, d’une influence aussi sensible
de la politique monétaire. En effet, d’une part il y a, selon eux. une grande
élasticité de la demande de monnaie pour des encaisses liquides. Si le taux
d’intérêt baisse sous l’influence d’une augmentation de l’offre de monnaie,
dans un premier temps on thésaurisera (sous diverses formes) et bien
entendu on déthésaurisera si le taux d’intérêt monte. Les néo-keynésiens
montrent qu’il y a d’abord passage entre les divers actifs financiers. Ce
n’est qu’ensuite que la variation de la masse monétaire agit sur la demande,
la production et éventuellement les prix. Ainsi, au début de 1975, on
pouvait interpréter la « reprise » en bourse, non comme une anticipation de
la reprise et encore moins le signe de la reprise, mais simplement comme le
résultat de la substitution d’actifs financiers à des placements à court terme
par suite de la baisse des taux d’intérêt et d’une nouvelle abondance de
l’offre de monnaie. De même, ils mettent en doute l’efficacité des variations
des taux d’intérêt pour régler la conjoncture lorsque celle-ci est clairement
soit récessionniste. soit inflationniste.
Comme nous l’avons vu, dans un cas le pessimisme est trop fort pour
qu’une simple variation des taux d’intérêt relance l’investissement ; dans
l’autre il faudrait des taux d’intérêt incroyablement élevés pour compenser
l’espérance de rembourser en « monnaie de singe ».
Finalement, à la politique d’expansion de la masse monétaire, les néo-
keynésiens préfèrent choisir une politique de dépenses budgétaires qui. à
travers le multiplicateur de dépenses, va avoir un effet beaucoup plus direct
sur l’économie, soit pour la freiner, soit pour la relancer. Certes, ils ne nient
pas la nécessité d’accompagner cette politique budgétaire d’une politique
monétaire, mais cette action ne sera que seconde. Lorsqu’on désire relancer
ou freiner l’économie uniquement à travers la masse monétaire, on est
amené à exagérer ses variations, et du même coup, on risque de passer de la
récession à l’inflation, ou de l’inflation à la récession.
Les monétaristes sont d’accord sur cette dernière analyse. Ils
recommandent d’ailleurs de faibles disparités entre la hausse des
disponibilités et celle des prix, mais, à la différence des keynésiens, ils
croient à l’efficacité de ces faibles disparités, alors que les keynésiens n’y
croient pas et préfèrent une action à travers les dépenses publiques.
Derrière cette opposition théorique et politique, nous retrouvons d’un
côté la méfiance des économistes libéraux d’avant 1929 contre l’expansion
et l’intervention de l’État, et de l’autre la réhabilitation de cette même
intervention par Keynes. Les néo-libéraux monétaristes tentent une nouvelle
bataille d’arrière-garde contre l’intervention publique ; ils admettent la
politique monétaire mais non la politique budgétaire. Il n’est pas étonnant
que le patronat français, quand il parle de relance, parle avant tout de
desserrement global du crédit et de réduction des charges sociales.

MONÉTARISTES ET KEYNÉSIENS AUX PRISES AVEC LA


STAGFLATION ET LA CRISE ACTUELLE

Au-delà de cette divergence de fond, il faut bien avouer que la dispute est
aujourd’hui d’autant plus aiguë que monétaristes et keynésiens sont aux
prises avec la stagflation 35.
Derrière ce mot bizarre, se trouve une réalité que nous vivons chaque
jour un peu plus et qui frappa les pays anglo-saxons avant de toucher la
France : désormais la récession et le chômage n’empêchent plus les prix de
monter. Dorénavant les sociétés des pays industrialisés sont suffisamment
fortes pour maintenir leur pression sur les prix même lorsque la demande
faiblit. Et cette société d’inflation dépasse aujourd’hui les frontières à
travers la menace des pays de l’OPEP d’indexer le prix du pétrole sur notre
taux d’inflation. Nous sommes entrés dans une société d’inflation, et le
déséquilibre entre l’offre et la demande et, à plus forte raison, entre l’offre
et la croissance de la masse monétaire, n’est plus la cause unique, voire
fondamentale, de l’inflation.
Devant cette situation, les monétaristes ne perdent pas espoir. Il suffit,
disent-ils, de maintenir suffisamment longtemps la lutte contre le laxisme
monétaire et ne pas se laisser aller au découragement ou à une peur
excessive de la crise. N’oublions pas que, pour les tenants de cette thèse, les
péripéties à court ou à moyen terme n’influencent pas l’évolution à long
terme. Une déflation, même liée à une récession momentanée, ne met pas
en question le dynamisme et la croissance à long terme de l’économie.
Reste à se demander si, une telle politique étant efficace, elle pourrait être
politiquement supportable. M. Reagan, en alliant la diminution des
dépenses publiques et une régulation très stricte de la masse monétaire, a
provoqué une récession aux États-Unis. La chute de la production a entraîné
une chute encore plus rapide des recettes publiques. M. Reagan, qui voulait
relancer l’économie tout en arrêtant l’inflation par une politique de rigueur
monétaire et d’économies budgétaires, a abouti à une situation paradoxale.
Il a bien freiné l’inflation, mais le déficit budgétaire a atteint un niveau
record qui l’a amené à proposer une augmentation exceptionnellement
élevée des impôts. Parallèlement, le chômage a bondi et dépassé les
11000 000 de personnes, en février 1983.
Quelques chiffres sur la stagflation1 de 1970-1982

Il semble donc que nous voici parvenus à la revanche des keynésiens,


mais ces derniers n’ont finalement jamais porté une grande attention aux
prix. Cette négligence, en les amenant à ne pas lier trop étroitement masse
monétaire et prix, leur a ouvert assez rapidement la voie d’une approche
plus structurelle de l’inflation. Une bonne partie d’entre eux préconisent
aujourd’hui de peser sur la demande par les dépenses publiques et sur les
coûts par une politique des revenus. Au-delà du contrôle de la demande
globale. qui est une condition préalable de la politique des prix. car un
excès de demande entraîne fatalement l’inflation, il faut s’attaquer de front
à la formation des coûts par une politique des prix et des revenus.
Les néo-keynésiens rejoignent ainsi les plus chauds adeptes des
politiques de croissance et des politiques de revenus. Encore faut-il que les
conditions nouvelles de l’économie mondiale permettent la croissance.

Si une politique des revenus était réellement praticable, la politique


keynésienne par les dépenses publiques serait-elle efficace ?
Il n’est pas douteux que les ministres des finances seraient plus à l’aise
pour lutter contre l’inflation. Ce serait un premier pas vers la fin de la
société d’inflation ; reste à savoir à quelle condition politique 36 on peut
espérer un tel changement. Nous ne pensons pas. cependant, que nous
serions arrivés au bout de nos peines.
D’abord, comme les monétaristes, les keynésiens supposent une politique
monétaire, même si cette dernière n’a plus le rôle déterminant qu’elle joue
chez les monétaristes. Or, qui dit politique monétaire suppose une capacité
de maîtrise de la monnaie en circulation. Ce n’est plus tout à fait le cas
aujourd’hui. L’importance des liquidités internationales, des grandes firmes
multinationales et la masse croissante des pétro-dollars. rend assez désuète
la panoplie des armes nationales. Il faudrait pouvoir passer à une maîtrise
internationale des mouvements monétaires. Or, la contradiction
fondamentale entre la mondialisation de l’économie et la division de
l’espace mondial en états nationaux jaloux de leur souveraineté, est toujours
aussi flagrante.
Ensuite, comment espérer lutter contre la récession sans mettre en cause
l’équilibre du commerce extérieur compromis par la hausse du prix de
l’énergie. Le redressement de notre balance commerciale est, pour l’instant,
très largement lié au freinage de notre croissance et toute relance aboutirait
à une brutale poussée des importations, notamment, des importations
énergétiques. La campagne d’économie du pétrole n’a eu qu’un effet
modéré. Sommes-nous prêts à redéployer notre production au rythme de la
relance ? Ne risque-t-on pas, dans ces conditions, d’allier une fois de plus
plein emploi, nationalisme et protectionnisme économique ?
Enfin, à supposer que les conditions précédentes soient remplies, la
politique des revenus que nous avons supposée bien acceptée (ou les
mesures d’austérité imposées qui tentent de pallier son absence) pourra-t-
elle aller de pair avec les conséquences du prix élevé de l’énergie et de la
crise actuelle ? Un prix élevé de l’énergie n’est absolument pas
contradictoire avec un taux de croissance important. Tout au plus, voit-on se
déplacer les résultats de la croissance vers les biens intermédiaires et le
transfert d’une partie de ces résultats à l’étranger lorsqu’on doit importer
une partie de l’énergie nécessaire. Même si la croissance reprend, les biens
et services disponibles pour la consommation intérieure seront moindres
qu’auparavant. Ils seront d’autant plus restreints que nous aurons besoin
d’investir pour trouver de nouvelles sources d’approvisionnement et de
reconvertir certaines activités.
Or, comment modérer le désir de chacun d’obtenir plus, alors que nous
aurons déjà subi une perte à gagner considérable du fait de la récession 37 ?
Ces remarques sur les limites d’une politique de relance ne doivent pas
nous inciter au découragement. Elles doivent, quand même, nous inciter à
bien du scepticisme vis-à-vis de propositions ou d’exigences de relance ou
d’austérité monétaire un peu simplistes. Elles doivent, surtout, inciter les
responsables à rechercher une intégration de plus en plus étroite de la
politique de croissance et de la politique conjoncturelle monétaire et
budgétaire ; intégration qui a, jusqu’ici, été plus théorique que réelle et qui
s’est traduite, en France, par la dichotomie bien traditionnelle entre, d’une
part, le ministère de l’Économie et des Finances et, d’autre part, le ministère
du Plan et de l’Aménagement du Territoire, souvent écarté des prises de
décisions fondamentales pour la conjoncture économique.
En guise de conclusion

En fait, à travers les difficultés rencontrées par la Banque centrale dans


l’exercice de son pouvoir monétaire, nous touchons aux problèmes de fond
posés, aujourd’hui, par la monnaie.
L’ensemble du système monétaire national est, en apparence, construit
sur une organisation très stricte et sur des mécanismes régulateurs bien au
point. La réalité est tout autre.
D’une part, il y a une contradiction fondamentale entre ceux qui peuvent
obtenir des crédits auprès des banques et cherchent à le faire à tout prix
(avoir plus de monnaie c’est aussi accroître son pouvoir économique) et la
Banque centrale qui tente d’ajuster la création monétaire aux besoins de
l’économie mais dans les limites imposées par la défense de la monnaie.
Les banques sont entre les deux, mais penchent, fatalement, du côté de leur
clientèle. La Banque centrale doit alors faire face à des coalitions d’intérêts,
au sein desquelles elle retrouve parfois des entreprises publiques, voire des
ministères.
D’autre part, au moment où l’économie s’internationalise, où les firmes
multinationales gèrent d’énormes trésoreries et accentuent la vitesse de
déplacement des capitaux, les monnaies et leurs défenses demeurent
essentiellement nationales. Les banques centrales ne sont plus à la hauteur
des dangers qui menacent les monnaies nationales, mais comment dépasser
les souverainetés nationales, dans un monde déchiré par les conflits
d’intérêts et les effets de domination ?
Là, comme dans les autres domaines de l’économie, on ne peut étudier
les mécanismes sans être renvoyé à la réalité des rapports de forces.
J. Adenot. Né en 1947. Diplômé de l’Ecole supérieure de commerce de
Lyon. Concepteur, depuis 1970, de modules et de méthodes pédagogiques
pour la formation des adultes. A réalisé notamment : Ecofirme, Ecocircuit,
Ecobanque, Ecoencadrement-maîtrise, Ecodialyse et Ecocomptabilité
nationale. Responsable, au sein de « Cimes » (Centre pour l’innovation et
les méthodes dans l’économique et le social), à Grenoble, d’un atelier de
conception de supports et méthodes (information-formation) pour les
entreprises et organisations.
J.-M. Albertini. Né en 1929. Docteur en sciences économiques, maître de
recherche, directeur du laboratoire CNRS de pédagogie de l’économie
(IRPEACS), directeur scientifique au CEREP. Auteur notamment des
Rouages de l’économie nationale, de Premiers Pas en économie et de
Mécanismes du sous-développement et Développements, un des promoteurs
de la pédagogie par le jeu et les multimédia dans la formation permanente.
Notes

1
Ceux qui n’ont jamais lu un livre d’initiation économique ont avantage à se
reporter aux encadrés qui suivent, puis à reprendre la lecture de cette
introduction.

2
Expression signifiant pour le possesseur de monnaie : pouvoir d’utiliser
celle-ci pour se libérer de ses dettes.

3
Jusqu’à un maximum de : 1 F pour la pièce de 1 c ; 5 F pour les pièces de 5.
10. 20 c ; 10 F pour la pièce de 50 c ; 50 F pour la pièce de 1 F ; 250 F pour
celle de 5 F et 500 F pour la pièce de 10 F.

4
Toutefois on peut imaginer que l’on puisse tirer des chèques sur les livrets.
Les caisses d’épargne aimeraient que cette possibilité soit accordée à leurs
clients mais on comprend aussi la réticence des banques.

5
Voir test page suivante

6
Cette expression, qui supplante aujourd’hui dans le langage des spécialistes
celui d’Institut d’émission, est sans doute plus évocateur du rôle exact de la
Banque de France ou des banques qui jouent un rôle équivalent dans les
autres pays.

7
Voir le chapitre sur les administrations, dans l’ouvrage : le Circuit de
l’économie nationale.
8
Voir l’ouvrage : le Circuit de l’économie nationale.

9
Signalons aussi à ce chapitre les avances (très minimes) que la Banque de
France consent à l’Etat en contrepartie de la valeur faciale des pièces de
monnaie mises en circulation. La Banque de France achète, en quelque
sorte, au comptant la monnaie divisionnaire et la revend ensuite au fur et à
mesure des besoins de l’économie aux banques (ou éventuellement aux
particuliers), de façon à éponger les avances consenties à ce propos à l’État.

10
Ce sont les soldes des comptes à la Banque de France et aux Chèques
postaux. Notons ici que ce compte et celui de la monnaie divisionnaire sont
presque négligeables par rapport au dernier poste : concours au Trésor
public.

11
Ce compte courant est actuellement inférieur à celui des banques, car l’État
dépense régulièrement les sommes portées à son crédit. Ce compte courant
est surtout une pompe aspirante et refoulante de monnaie, tandis que les
banques, étant astreintes, comme nous le verrons plus loin, à des réserves
obligatoires sont amenées à gonfler le compte courant.

12
Cf. l’ouvrage : le Circuit de l’économie nationale.

13
Cf. encadré, p. 100.

14
Cf. l’ouvrage : le Circuit de l’économie nationale et l’Inflation.
Ces explications peuvent vous paraître obscures par suite de leur
concision. Vous en comprendrez sans doute mieux le sens après la lecture
du chapitre consacré à la valeur de la monnaie.

15
Avant cette décision unilatérale de la France, qui porte le prix du
kilogramme d’or, au 7 janvier 1975, à 20 078 F. l’or était évalué à 6 250 F
le kilogramme d’or fin, ce qui correspondait à la parité du franc, après la
dévaluation du 10 août 1969. Depuis la suppression du marché officiel de
l’or qui, jusqu’en avril 1968. tendait à stabiliser l’or à 35 $ l’once, et la crise
de confiance qui ébranle sérieusement la valeur du dollar. ce prix officiel
n’avait plus une grande signification. Aujourd’hui, le prix de l’or dépasse
souvent 600 $ l’once. La France a décidé d’aligner le bilan de la Banque de
France sur la réalité. Cette décision n’est cependant pas véritablement
acceptée par certains de nos partenaires.

16
Ceux qui voudraient approfondir ces éléments se référeront à l’encadré des
pages 76 et 77. Mais attention, sa compréhension n’est pas indispensable
pour comprendre l’essentiel.

17
Nous vous conseillons de faire ce test, surtout si vous n’avez pas lu le
Circuit de l’économie nationale [Réponses p 88]

18
Cf. l’ouvrage : l’Inflation.

19
Ce poste comprend aussi l’excédent des fonds propres sur les
immobilisations des banques et les engagements en francs et en devises des
banques envers leurs correspondants étrangers. Ce poste peut être, certaines
années, négatif.

20
Cf. l’ouvrage : l’Inflation.

21
Ceux qui veulent aller plus loin dans les relations monétaires avec
l’étranger sont renvoyés au chapitre 1 consacré à l’extérieur, dans l’ouvrage
le Circuit de l’économie nationale et au chapitre consacré à l’influence des
pays étrangers et des échanges extérieurs sur l’inflation, dans l’ouvrage sur
l’Inflation.
22
Cf. l’Inflation. l’Économie française et Comprendre l’économie mondiale.

23
Cf. l’ouvrage : l’Inflation.

24
Voir chapitre 3.

25
Suivre les explications sur le schéma p. 108 ; ce schéma illustre les relations
d’échange entre les agents économiques. Ceux qui voudraient étudier en
détail le circuit auquel il aboutit peuvent se référer à l’ouvrage de cette
même collection le Circuit de l’économie nationale.

26
Définissons ici très globalement l’inflation comme une hausse durable et
généralisée des prix. Pour ceux qui voudraient approfondir ces
connaissances, voir l’ouvrage de la même collection : l’Inflation.

27
Cf. dans l’ouvrage consacré au Circuit de l’économie nationale, le chapitre
réservé aux institutions financières, et dans l’ouvrage consacré à l’Inflation
le chapitre consacré aux banques.

28
Cf. dans l’ouvrage consacré à l’Inflation, l’encadré relatif à l’indexation de
l’épargne.

29
En prenant en numérateur la moyenne des liquidités existantes à la fin de
chaque mois puisque le PNB se forme aussi tout au long de l’année.

30
Notez qu’en ce qui concerne actuellement les effets réescomptés. le taux
concerne n’a aucune conséquence puisque ces effets sont réescomptés à un
taux très nettement inférieur à celui de réescompte officiel.
31
Cf. dans l’ouvrage, le Circuit de l’économie nationale, le chapitre consacré
à l’extérieur.

32
Ces devises reçoivent l’appellation de capitaux flottants. Ils sont souvent
exprimés en dollars, ce qui ne veut nullement dire qu’il s’agit de capitaux
détenus par les Américains. Ils peuvent fort bien être détenus par des
Français, des Allemands... Le périple de ces capitaux a, essentiellement,
pour objet la rentabilité à très court terme. Ils vont de places en places
financières à la recherche de placements à forte rentabilité. (Voir dans
l’ouvrage l’Inflation, le rôle de l’extérieur et des euro-dollars.)

33
Ce chapitre s’adresse à ceux qui veulent aller un peu plus loin. Peut-être
que certains d’entre vous auraient avantage d’aller directement à la
conclusion ou encore, s’ils n’ont pas certaines notions de base en ce qui
concerne les problèmes de l’inflation, pourraient-ils lire l’ouvrage que nous
consacrons, dans cette collection, à l’inflation.

34
D’après J.-H. David, La Politique monétaire, Dunod, 1974, p. 136-137.

35
La stagflation est un mot monstrueux qui tente d’unir stagnation et
inflation ; il signifie en clair que, désormais, la diminution de la demande
n’a plus d’action rapide sur le niveau des prix.

36
Il est. de ce point de vue. intéressant de voir que l’Allemagne maîtrise
mieux l’inflation que les autres pays. Les divers groupes sociaux y
acceptent plus aisément qu’ailleurs une certaine discipline et les
conséquences de la récession, en se souvenant de la grande inflation des
années vingt et de ses conséquences.

37
Comprendre l’économie mondiale et l’Économie française.
ISBN 2-02-004255-X
© 1975, Éditions ouvrières/Éditions du Seuil.
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