Vous êtes sur la page 1sur 12

Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Balance de Paiement et Système monétaire international

Introduction
La balance des paiements retrace sous forme comptable l’ensemble des transactions d’un pays
avec le reste du monde. Ces transactions peuvent être des échanges de biens et services et des
flux financiers. La balance de paiements fait apparaître les soldes caractéristiques des relations
du pays avec l’extérieur et constitue un instrument utile pour juger de l’ampleur et de la nature
des déséquilibres mondiaux. Les déséquilibres mondiaux dépendent des liaisons entre le
revenu national, le solde courant et les composantes de la demande globale, consommation,
investissement et dépenses publiques. Ces déséquilibres sont également affectés par le
système monétaire international, dont les principaux éléments (monnaies utilisées au niveau
international, régimes de change) évoluent à travers le temps. Comme objectifs, nous allons
d’une part, Exposer les principes de construction d’une balance des paiements (BP) ; ensuite,
Présenter les principaux postes et les principaux soldes de la BP et ; Analyser les liens entre
solde courant et agrégats macroéconomiques et enfin, Présenter les principaux caractères du
système monétaire international actuel : régimes de change, rôle du dollar, déséquilibres
mondiaux.

I.1. Principes de construction d’une balance des paiements


L’élaboration de la balance des paiements répond à des principes généraux qui font l’objet
d’une harmonisation internationale sous l’égide du Fonds monétaire international (FMI). Cette
harmonisation a pour objectif principal de prendre en compte le fort développement des
échanges internationaux depuis le début des années 1990. En particulier, il s’agit d’intégrer les
échanges effectués par les pays (beaucoup sont des économies émergentes) qui exportent des
matières premières mais qui importent et réexportent des biens manufacturés, éventuellement
sophistiqués. Il s’agit également de rendre compte de la diversité des instruments financiers
(titres, produits dérivés, etc.) et de l’hétérogénéité de leurs utilisateurs. En fin, de tenir compte
de la croissance du négoce international des biens entre les pays. Nous allons évoquer d’une
part les principes d’enregistrement des données et d’autres part l’enregistrement des
transactions gratuites.
I.1.1. Principes d’enregistrement des données
Les enregistrements dans les comptes des transactions courantes et de capital sont différentes
des enregistrements dans le compte financier. Dans les comptes des transactions courantes et
de capital, les opérations sont enregistrées en crédit (signe +) et débit (signe −) conformément
aux principes de la comptabilité en partie double. Toute opération de ces comptes entre le pays
déclarant et le reste du monde donne lieu à deux inscriptions de même montant et de signe
contraire. L’une traduit la nature économique de la transaction (exportation ou importation de
marchandises), l’autre traduit le mode de règlement de la transaction (règlement par virement
sur un compte bancaire).
Le principe d’enregistrement est le suivant : les flux de résident à non-résident s’inscrivent
en crédit, les flux de non-résident à résident s’inscrivent en débit. Ainsi, une valeur inscrite
en crédit traduit une diminution des avoirs sur l’extérieur (ou une augmentation des
engagements vis-à-vis de l’extérieur) alors qu’une valeur inscrite en débit traduit une
augmentation des avoirs sur l’extérieur (ou une diminution des engagements vis-à-vis de
l’extérieur).
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Exemple : Un résident de l’économie X achète des biens à un résident de l’économie Y pour


une valeur de 50. Le résident de l’économie X fait envoyer les biens à des résidents de
l’économie Z pour qu’ils soient emballés, mais sans que les biens passent par l’économie X. Le
coût de l’emballage facturé au résident de l’économie X est de 6. Enfin, les biens sont vendus
par le résident de l’économie X à des consommateurs résidents de l’économie Q pour une valeur
de 100.
Les écritures passées au compte « biens et services » de l’économie sont les suivantes.
Biens et services Crédit Débit Solde
Biens acquis dans l’économie Y -50
Biens acquis dans l’économie Q 100 50
Services de fabrication sur des intrants physiques détenus 6
par un tiers (avec l’économie Z)

Les opérations sont enregistrées différemment dans le compte financier. Les opérations sont
inscrites en « avoir » et en « engagement » qui peuvent, l’un comme l’autre, augmenter ou
diminuer en fonction des acquisitions et des cessions d’actifs et passifs financiers. Un chiffre
positif reflète une augmentation des avoirs ou des engagements, tandis qu’un chiffre négatif
représente une diminution des avoirs ou des engagements. Ainsi, chacun des soldes du compte
financier reflète la différence entre les avoirs et les engagements et s’inscrit dans une logique
de patrimoine : un flux net positif correspond à un accroissement des avoirs du Cameroun sur
l’étranger, un flux net négatif à un accroissement de la dette vis-à-vis de l’étranger.
En principe, les comptes de la balance des paiements sont équilibrés. Le solde financier est
égal à la somme du solde des transactions courantes et du solde du compte de capital, et de
même signe. Toutefois, dans la pratique, il existe des imperfections dans la collecte des données
et des problèmes de méthodes statistiques peuvent causer des déséquilibres. Ces déséquilibres
sont dénommés « erreurs et omissions nettes ». Par convention, le poste « erreurs et omissions
» est égal à la différence constatée entre le solde financier et la somme du solde des transactions
courantes et du solde du compte de capital.
I.1.2. Enregistrement des transactions gratuites
Les transactions gratuites font l’objet d’un traitement particulier. Il existe dans ce cas un seul
flux effectif entre le pays et le reste du monde. Ce flux est enregistré, selon son sens, en crédit
(résidents vers non-résidents) ou en débit (non-résidents vers résidents). Pour respecter le
principe de la partie double, la contrepartie comptable de ces transactions courantes est
enregistrée dans un compte appelé « revenu secondaire ».
Exemple : l’État camerounais a fait un don en nature de 900 millions de FCFA à un pays
connaissant une catastrophe humanitaire. Le don est assimilé à une exportation de marchandises
en tant que flux versé à l’extérieur. La contrepartie comptable est inscrite en débit sur la ligne
« Coopération internationale courante ». D’où la représentation comptable suivante :
Transactions courantes Crédit Débit
Exportations et importations de marchandises 900
Coopération internationale courante 900

I.2. Soldes de la balance des paiements


La balance des paiements peut être excédentaire ou déficitaire.
I.2.1. Principaux soldes de la balance des paiements
L’ensemble des flux réels et financiers entre résidents et non-résidents est réparti en trois
comptes : le compte des transactions courantes, le compte de capital et le compte financier.
a) Compte des transactions courantes
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Il regroupe 4 types de transactions : biens : exportations et importations de marchandises ;


services : transport, tourisme, services financiers, etc. ; revenus primaires : rémunération des
salariés, revenus d’investissements, loyers, ainsi que les impôts et subventions sur les produits
et la production ; revenus secondaires : transferts courants entre résidents et non-résidents sans
contrepartie d’un élément de valeur économique : transferts personnels (envois de fonds des
travailleurs), impôts courants sur le revenu, le patrimoine, etc., cotisations sociales, prestations
sociales, primes nettes d’assurance dommages et appels en garanties standards, indemnités
nettes d’assurance, dommages et appels en garanties standards, coopération internationale
standard et transferts courants standards entre résidents et non-résidents.
b) Compte de capital
L’intitulé de ce compte peut prêter à confusion. En effet, il ne concerne pas les mouvements de
capitaux qui sont enregistrés dans le compte financier. Ce compte enregistre les acquisitions et
cessions d’actifs non financiers non produits, tels que les acquisitions et cessions liées aux
ressources naturelles (terrains, droit d’exploitation des sous-sols, etc.), les ventes de baux et
licences ainsi que les transferts en capital, définis par des situations où sont fournies des
ressources à des fins de transactions en capital sans échange de valeur économique.
c) Compte financier
Il recense l’ensemble des mouvements de capitaux liés à l’acquisition et à la cession nettes
d’actifs et passifs financiers. Il est ventilé en 5 rubriques, selon la nature des flux financiers :
investissements directs, investissements de portefeuille, instruments financiers dérivés,
autres investissements et les avoirs de réserves.
Investissements directs : un investissement direct est un investissement transnational dans
lequel un résident détient le contrôle ou une influence importante sur la gestion d’une entreprise
non-résidente (FMI). Par convention, une opération d’investissement direct est établie dès
qu’un investisseur détient 10 % du capital social de l’entreprise investie. En deçà de ce seuil,
les opérations sur titres sont classées dans les investissements de portefeuille ;
Investissements de portefeuille : c’est l’ensemble des opérations sur des titres de créances
ou des actions qui relèvent d’une simple logique de placement et non d’une volonté de contrôle
de l’investisseur sur l’entreprise émettrice. Ces transactions sont ventilées par type d’instrument
: actions, obligations et instruments du marché monétaire ;
Instruments financiers dérivés : cette rubrique regroupe toutes les opérations sur produits
financiers dérivés (contrats à terme, primes sur options, etc.) ainsi que certaines opérations
comme les intérêts sur swaps ;
Autres investissements : cette rubrique englobe toutes les opérations sur les actifs et passifs
financiers vis-à-vis des non-résidents qui ne relèvent ni des investissements directs, ni des
investissements de portefeuille, ni des instruments financiers dérivés, ni des avoirs de réserve.
En pratique, cela recouvre, pour l’essentiel, les dépôts auprès des banques, ainsi que les
opérations de prêts et emprunts entre banques le plus souvent, mais aussi effectuées par des
sociétés d’assurances, des entreprises et des fonds d’investissement de toute nature ;
Avoirs de réserves : ce sont les actifs extérieurs que les autorités monétaires contrôlent et
dont elles peuvent disposer immédiatement pour répondre, notamment, à des besoins de
financement de la balance des paiements ou à des interventions sur le marché des changes. Elles
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

sont constituées des créances en or et devises, des avoirs en droits de tirage spéciaux (DTS),
de la position de réserve à l’égard du FMI et des autres avoirs de réserve.
I.2.2. Soldes et cohérence comptable
La balance des paiements est un document comptable équilibré, en principe, par construction.
Le solde du compte financier devrait être égal à la somme du solde des transactions courantes
et du compte de capital, et de même signe. Dans la pratique, un poste « erreurs et omissions »
est ajouté à cette somme afin de présenter la balance des paiements en équilibre. Il s’agit d’un
poste d’ajustement qui tient aux imperfections du système d’enregistrement des données. En
notant TC le solde des transactions courantes, CA le solde du compte de capital, EO le poste «
erreurs et omissions » et FI le solde du compte financier : on a FI = TC+CA+EO
La balance des paiements permet d’évaluer l’insertion du pays dans son environnement
extérieur, d’identifier l’apparition de déséquilibres et de mettre en lumière les transactions
compensatrices de ces déséquilibres. Si les transactions courantes font apparaître un déficit, la
balance des paiements permet d’analyser comment ce déficit est financé par le reste du monde.
Ou, dans le cas contraire, comment l’excédent est placé auprès du reste du monde. On trouvera
ci-dessous les principaux soldes utilisés pour l’analyse de la conjoncture et la conduite de la
politique économique.
Le solde commercial est égal à la différence entre les exportations et les importations de
marchandises.
Le solde des biens et services est égal au solde commercial augmenté du solde sur les
opérations de services.
Le solde des transactions courantes est l’indicateur majeur auquel se réfèrent les
commentaires et les analyses des économistes et des observateurs. Il additionne les soldes
(crédits/débits) des biens, services, revenus primaires et revenus secondaires.
La somme solde des transactions courantes + solde du compte de capital correspond à
la capacité ou au besoin de financement de la nation dans les comptes nationaux. Cette somme
est égale, aux erreurs et omissions près, au solde du compte financier et de même signe.
En cas de besoin de financement, le pays est emprunteur net, le solde du compte financier
est négatif ; les différentes rubriques du compte financier décrivent la structure des entrées de
capitaux qui correspondent au financement du déficit par le reste du monde. Si le pays dégage
une capacité de financement, le pays est prêteur net, le compte financier dont le solde est positif
traduit la composition de l’augmentation des avoirs nets du pays sur l’extérieur.
I.3. Interprétation macroéconomique de la balance courante
Les relations entre le solde des transactions courantes et les principales variables
macroéconomiques, épargne, investissement et solde budgétaire seront tout d’abord présentées.
On précisera ensuite les relations entre ces flux, relatifs à une période donnée, et les stocks
d’actifs financiers extérieurs détenus par le pays.
I.3.1. Balance courante, épargne et solde budgétaire
Dans une économie fermée, l’épargne nationale est nécessairement égale à l’investissement
domestique. Dans une économie ouverte, il en va autrement puisque le pays peut emprunter ou
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

prêter à l’extérieur. L’identité entre le produit intérieur brut (Y) et la somme des dépenses
intérieures et étrangères en biens et services produits sur le territoire national s’écrit, en notant
C la consommation, I l’investissement, G les dépenses publiques, Exp et Imp les exportations
et importations de biens et services, et BC le solde de la balance courante. Toutefois, les revenus
et les transferts courants sont négligés à ce niveau. D’où Y=C+I+G+BC or BC=Exp-Imp.
La balance courante apparaît donc comme la différence entre le revenu national et la dépense
intérieure (A) souvent appelée absorption : BC = Y-[C+I+G]
La balance courante est aussi égale à la différence entre l’épargne (S) et l’investissement
domestique, que l’on désigne souvent par le terme « investissement extérieur net ». En notant
S l’épargne, et T les impôts nets des transferts publics, et en décomposant l’épargne globale en
épargne privée SP = Y − C − T et épargne publique SG = T − G,
BC = S-I avec S= SP+ SG= (Y − C – T) + (T – G).
Le solde des transactions courantes revêt trois interprétations : les exportations nettes de biens
et services ; la différence entre le revenu national et la dépense intérieure ; la différence entre
l’épargne et l’investissement domestique.
La relation entre le solde de la balance courante et le déficit budgétaire peut également être mise
en évidence : SP- I = BC + (T – G)
Cette identité fait apparaître les trois affectations possibles de l’épargne privée : financement
de l’investissement domestique, achat des emprunts émis par l’État pour financer le déficit
budgétaire, ou acquisition d’avoirs sur l’extérieur. Elle montre aussi que l’équilibre du compte
courant implique que la capacité de financement du secteur privé soit juste suffisante pour
financer le déficit budgétaire. Si elle ne l’est pas, le déficit budgétaire s’accompagne d’un déficit
du compte courant. À l’inverse, un pays dont le secteur privé dégage une forte capacité de
financement peut financer un déficit budgétaire tout en dégageant un excédent de la balance
courante.
Déficit commercial et déficit budgétaire vont-ils nécessairement de pair ? Cette question
est celle des « déficits jumeaux », expression utilisée pour désigner le fait que le déficit
budgétaire serait l’une des principales causes du déficit des transactions courantes. Cette
interprétation a initialement été avancée pour rendre compte de la montée simultanée du déficit
budgétaire et du déficit commercial des États-Unis dans la première moitié des années 1980,
mais elle demeure controversée.
Cette identité SP- I = BC + (T – G) montre l’interdépendance entre le compte courant, l’épargne
privée et publique, et l’investissement. Elle fournit une première appréhension des phénomènes
macroéconomiques, mais en l’absence d’informations sur le comportement des agents et d’un
modèle explicatif global, elle ne renseigne en rien sur les liens de causalité. Elle met en évidence
les interrelations entre les déséquilibres internes et externes, mais ne permet pas d’identifier les
causes de l’évolution de la balance courante.
I.3.2. Balance courante, solde financier et position extérieure
On sait que, par construction FI = TC+CA+EO, en négligeant le compte de capital et le poste
« erreurs et omissions », le solde du compte financier (FI) est égal au solde des transactions
courantes (BC) et de même signe : BC = FI.
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Lorsque la balance courante est excédentaire (BC > 0), le pays exporte plus qu’il n’importe,
gagne plus qu’il ne dépense (Y > A), dégage un excès d’épargne par rapport à l’investissement
(S > I) et prête ce surplus à l’extérieur : un solde financier positif (FI > 0) traduit alors une
situation de prêteur net. Inversement, un pays dont la balance courante est déficitaire (BC < 0)
connaît un solde financier négatif, qui traduit une situation d’emprunteur net et décrit le
financement du solde courant : augmentation des engagements, et/ou réduction des avoirs vis-
à-vis de l’extérieur et/ou réduction des réserves en devises.
À la différence de la balance des paiements qui enregistre des flux, la position extérieure recense
les stocks d’avoirs et d’engagements financiers des résidents vis-à-vis des non-résidents en les
regroupant selon les mêmes rubriques que celles qui figurent dans le compte financier de la
balance des paiements. La position extérieure fournit des informations sur le montant et la
structure du patrimoine financier d’une économie vis-à-vis de l’extérieur et permet de mesurer
le degré d’ouverture financière d’un pays.
Un pays dont le compte courant est excédentaire (déficitaire) et le solde financier positif
(négatif) est prêteur (emprunteur). Le stock net d’actifs extérieurs de ce pays augmente
(diminue). Un pays dont le stock net d’actifs extérieurs est positif (négatif) est créancier
(débiteur).
II. Système monétaire international et déséquilibres mondiaux
Un système monétaire international peut se définir comme l’ensemble des mécanismes qui
permettent le réglement des transactions entre résidents et non-résidents.
Caractériser le système monétaire international revient à répondre à plusieurs questions :
Quelles monnaies sont employées au niveau international ?
Les taux de change (prix des monnaies les unes par rapport aux autres) sont-ils fixes ou flexibles
? Dans un système de changes flexibles, les taux de change sont déterminés par le marché, alors
que dans un système de changes fixes, les taux sont stabilisés par les interventions des banques
centrales ;
Existe-t-il ou non des mécanismes qui tendent à réduire les déséquilibres de paiements courants
ou, à l’inverse, observe-t-on la persistance d’excédents et de déficits ?
Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, plusieurs systèmes monétaires internationaux se sont
succédé, centrés sur l’or et la livre sterling, puis sur le dollar. L’alternance des régimes de
change, tantôt fixes, tantôt flexibles, reflète les difficultés des gouvernements à choisir entre
deux systèmes présentant chacun des avantages et des inconvénients.
II.1. De l’étalon-or à l’instabilité de l’entre-deux-guerres
Dans le système de l’étalon-or, toutes les monnaies sont définies par un certain poids d’or, et
les moyens monétaires utilisés, aussi bien au niveau interne qu’externe, sont constitués par l’or
et les monnaies convertibles en or. Du fait de cette convertibilité, la quantité d’or dont dispose
la banque centrale, détermine la masse monétaire du pays. Celle-ci est donc dépendante des
entrées et des sorties d’or, elles-mêmes liées à l’excédent et au déficit de la balance de base
(marchandises, services et capitaux). L’étalon-or est donc un système de change fixe, les
variations des cours étant comprises dans une étroite bande de fluctuations.
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

La période 1870-1914 est souvent considérée comme l’exemple type d’un régime d’étalon-or.
Même si les taux de change sont fixes et les monnaies sont convertibles en or, il y’a un
déséquilibre des balances courantes à cause de la non application par les banques centrales du
taux d’escompte recommandée. La livre sterling va donc dominer le système monétaire et
l’essentiel des transactions est réglé dans cette devise, ce qui dispense la banque centrale
d’Angleterre d’avoir à se préoccuper de posséder un stock important de métal jaune.
Après 1918, les puissances européennes ressentent la nécessité de définir un nouvel ordre
monétaire international, ne reposant plus uniquement sur la livre sterling et l’or. Elles décident,
à la conférence de Gênes (1922) : de limiter la convertibilité des monnaies en or, en ne
permettant celle-ci que pour le lingot, utilisable pour le financement des grosses transactions
internationales ; de reconnaître officiellement que les devises sont des moyens de réserve pour
les banques centrales, au même titre que l’or.
Dans ce nouveau système, qualifié de Gold Exchange Standard (étalon de change-or), les
autorités monétaires ont le choix entre les changes flexibles et les changes fixes. Dans la période
qui suit la fin des hostilités, les pays s’engagent dans des programmes de reconstruction
nécessairement inflationnistes, compte tenu de la rareté des ressources. Pour éviter que cette
inflation ne se solde par de trop profonds déficits courants, les gouvernements laissent les taux
de change fluctuer, ce qui se traduit, pour certains pays, par des phases de dépréciation
considérable (cas de l’Allemagne en 1922-1923). Après des mesures d’assainissement
monétaire, les pays d’Europe reviennent à des parités fixes : l’Allemagne en 1923, la Grande-
Bretagne en 1925, la France en 1926.
La crise de 1929 conduit les pays à se protéger des influences extérieures, en dressant des
barrières aux importations et en dévaluant leurs monnaies ou en les laissant flotter : abandon
des changes fixes par la Grande-Bretagne en 1931, dévaluation du dollar en 1933 et 1934,
dévaluation du franc français en 1936 et 1937.
II.1.1. Système de Bretton Woods
Le système monétaire mis en place en 1944 à la conférence de Bretton Woods vise à éviter
l’instabilité et l’anarchie qui caractérisent les relations monétaires de l’entre-deux-guerres. Il
repose sur la fixité des changes et sur l’utilisation du dollar américain comme monnaie
internationale.
a) Principes
Chaque pays choisit pour sa monnaie une parité, définie en or ou en dollars, ce qui est
équivalent, puisque le dollar est défini par une quantité fixe d’or. Les parités sont donc fixes :
le prix d’une monnaie en une autre est égal au rapport des quantités d’or ou de dollars qui
caractérisent chacune d’entre elles.
b) Difficultés du système de Bretton Woods
Dès les années 1950, la monnaie américaine devient la monnaie de référence pour les
transactions internationales. Les besoins en dollars, au niveau mondial, sont largement
satisfaits, dans la mesure où les États-Unis, par leur politique d’aide militaire et
d’investissements à l’étranger, versent les liquidités nécessaires. Mais le système révèle sa
fragilité au moment où le monde prend conscience du fait que la masse des dollars circulant à
l’extérieur du pays émetteur dépasse la valeur du stock d’or détenu par la Banque centrale
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

américaine et que le pays émetteur supporte un déficit élevé de sa balance de base. Cette prise
de conscience se traduit par une hausse du prix de l’or par rapport au dollar sur le marché libre
de Londres à partir de 1960. Les dispositions prises pour tenter de restaurer la confiance dans
le dollar (interventions des banques centrales sur le marché de l’or, consolidation de la dette
publique américaine) ayant finalement échoué, le président Nixon suspend la convertibilité du
dollar en or le 15 août 1971. Un des éléments essentiels du système de Bretton Woods disparaît.
La suppression de la convertibilité libère le gouvernement américain d’une contrainte, mais ne
restaure pas pour autant la confiance du marché dans le dollar. La spéculation contre cette
monnaie se maintient en 1971 et 1972 et aboutit à la décision de la conférence de Paris du 11
mars 1973 : les pays de la Communauté européenne décident de laisser flotter leurs monnaies
par rapport au dollar.
II.1.2. Système monétaire international actuel
Le système actuel ne relève d’aucun accord international et il s’avère extrêmement
composite, chaque pays ayant toute latitude pour choisir le régime de change qui lui convient.
Aujourd’hui, d’après le FMI [2018], sur 189 pays et 3 territoires (Aruba, Bonaire et Curaçao,
Saint Martin et Hong Kong), 66 (donc19 pays membres de la zone euro) ont des monnaies
flottantes c’est le cas de la plupart des pays avancés et 67 ont des taux fixes. Les autres pays
ont adopté des régimes intermédiaires qui consistent à ancrer le taux de change à l’intérieur de
marges dont la détermination est variable.
a) Régime de change flexible entre les principales monnaies marqué par une forte
instabilité
Depuis 1973, les trois principales monnaies le dollar, le yen, le Deutsche Mark (puis l’euro)
appartiennent à un régime de change flexible : le dollar demeure la monnaie dominante dans
les transactions internationales, qu’il s’agisse du commerce ou des transactions financières. Les
parités fluctuent en réponse aux forces du marché, mais cette flexibilité est imparfaite : on parle
souvent de flottement « impur ». En théorie, les banques centrales n’ont pas à intervenir pour
défendre la parité. Néanmoins, les banques centrales n’ont pas renoncé à la possibilité
d’infléchir les mouvements désordonnés sur le marché des changes. La flexibilité s’est avérée
source de fluctuations importantes des taux de change et les autorités monétaires ont
fréquemment utilisé les interventions sur le marché des changes pour corriger les tendances de
marché.
b) L’Europe : du régime de change fixe à la monnaie unique
En 1979, le SME (Système monétaire européen) instaure un régime de parités fixes mais
ajustables entre les monnaies des pays membres. En 1992-1993, face à l’accroissement de la
mobilité des capitaux et aux chocs provoqués par la réunification de l’Allemagne, le SME est
soumis à de fortes tensions. Les marges de fluctuations autorisées, fixées initialement à ± 2,5
%, sont portées à ± 15 %. Le régime de change fixe est devenu quasiment virtuel et pourtant, la
transition vers l’union monétaire s’effectuera quasiment sans heurts. Le lancement officiel de
l’euro en 1999 réduit à néant le risque de crise de change pour les pays membres de la zone
euro.
Depuis le lancement de l’euro en 1999, le Système monétaire international s’est orienté vers un
monde tripolaire organisé autour des trois principales monnaies des pays industrialisés (dollar,
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

euro et yen), dans lequel l’euro est devenu la deuxième monnaie la plus utilisée sur le plan
international.
c) Pays émergents et en développement : un large éventail de régimes de change
Les régimes de change adoptés par les pays émergents et en développement offrent une très
large diversité qui va de l’ancrage à l’une des principales monnaies, le dollar ou l’euro, ou à un
panier de monnaies, à la flexibilité complète, en passant par une grande diversité de régimes
intermédiaires. Cette diversité résulte elle-même des situations économiques et financières très
variables de ces pays à mesure qu’ils se sont intégrés à l’économie mondiale.
Le système international actuel est un système hybride où coexistent changes flottants et
changes administrés. Cette configuration, que l’on a souvent qualifiée de « non-système »,
s’accompagne depuis le début du XXIe siècle de déséquilibres croissants des balances
courantes, alors que l’économie mondiale a connu des mutations majeures avec la montée en
puissance des grands pays émergents comme la Chine.
II.2. Déséquilibres mondiaux
Jusqu’à la fin des années 1960, en l’absence d’un véritable marché international des capitaux,
les possibilités de financement externe sont très réduites, les déséquilibres courants sont limités
et correspondent à un transfert financier des pays du Nord vers les pays en développement.
Dans les années 1970, les chocs pétroliers sont à l’origine de transferts Sud-Sud : les excédents
dégagés par les pays exportateurs de pétrole sont, via le marché des euro-dollars (avoirs en
dollars déposés dans des banques extérieures aux États-Unis), placés dans des banques
occidentales qui les transforment en crédits aux pays en développement.
C’est seulement dans les années 1980 que la libéralisation financière permet le développement
d’un véritable marché financier international. En même temps, les transferts se centrent sur les
flux Nord-Nord : les États-Unis connaissent un important déficit courant et deviennent le
premier emprunteur, face au Japon et à l’Allemagne qui dégagent des excédents élevés.
a) Les deux phases des changes flexibles
Dans un article paru en 2018, Maurice Obstfeld estime que le système de change flexible qui a
vu le jour en 1973 peut être divisé en deux périodes. La première, qui a pris fin au milieu des
années 1990, était avant tout une période d’ajustement du système mondial au nouveau système
financier international. Elle se caractérise par la libéralisation des systèmes financiers, le
développement du commerce mondial et un processus d’apprentissage par les banquiers
centraux de la gestion de l’inflation. Cette première période se termine au moment de la
fondation de l’OMC et de la crise mexicaine de 1994-1995.
La seconde période s’étale sur les 25 dernières années. Elle se caractérise, selon Obstfeld, par
une « hyper-financiarisation », une plus grande flexibilité des taux de change dans nombre de
pays émergents et la montée de la Chine en tant que leader asiatique au détriment du Japon.
Durant cette seconde période, les déséquilibres mondiaux des comptes courants ont été
multipliés par trois avec un déficit américain financé par les pays exportateurs de pétrole
et les pays émergents, dont la Chine. La dérégulation financière et les déficits et excédents
des comptes courants persistants auraient créé un problème de soutenabilité du système
international qui expliquerait en partie la crise financière de 2008-2009. En effet, compte tenu
de la faiblesse des taux d’intérêt mondiaux tout au long de cette seconde période, les
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

emprunteurs (comme les États-Unis) se seraient de plus en plus endettés tandis que les
créanciers n’auraient pas cessé d’accumuler des titres de créances.
En août 2019, le yuan retrouve son niveau de 2008 après l’annonce par le gouvernement chinois
d’un relèvement des droits de douane portant sur 75 milliards de dollars de produits américains.
Un yuan plus faible, cependant, a pour effet de réduire les prix en dollars des biens chinois, ce
qui atténue une partie de l’impact des hausses de droits de douane décidé par les autorités
américaines. Cela illustre bien l’inefficacité de la guerre commerciale lancée par
l’administration Trump.
b) Le déficit des États-Unis a pour contrepartie les excédents des pays émergents
d’Asie et des pays producteurs de pétrole
Dans un monde où les marchés financiers sont intégrés, l’allocation optimale des ressources
implique que le capital doit aller des pays riches (le Nord) vers les pays pauvres (le Sud) où le
rapport capital/travail est faible et la productivité du capital élevée. La réalité est différente : les
capitaux sont aujourd’hui orientés des pays pauvres vers les pays riches. Cette contradiction
avec les prédictions théoriques est connue sous l’expression de « paradoxe de Lucas » [1990].
De nombreux facteurs ont été avancés pour expliquer l’émergence et la persistance des
déséquilibres ainsi que pour évaluer la position des États-Unis dans la configuration de ces
déséquilibres. La crise financière mondiale de 2007-2009 a suscité de nombreuses analyses
visant à déterminer le rôle qu’ont joué les déséquilibres mondiaux dans le déclenchement et la
propagation de la crise. Ainsi, le secrétaire au Trésor américain, Henry Paulson, affirma que la
crise globale de 2008-2009 trouva ses racines dans les déséquilibres courants mondiaux.
c) Origine des déséquilibres
Elles s’articulent autour de trois principaux axes : la faiblesse de l’épargne aux États-Unis,
l’excès d’épargne à l’extérieur des États-Unis et le régime de change adopté par les économies
émergentes d’Asie, associés à une forte préférence des investisseurs internationaux pour les
actifs internationaux.
Un point de vue largement répandu attribue la persistance du déficit américain à la chute de
l’épargne aux États-Unis. L’augmentation du déficit courant des États-Unis depuis la fin des
années 1990 s’est accompagnée d’une baisse continue de l’épargne des ménages. De multiples
facteurs sont avancés pour expliquer cette tendance : anticipation d’une croissance future
soutenue, vieillissement de la population, développement considérable du crédit, augmentation
de la richesse des ménages provoquée par la montée des prix de l’immobilier et du cours des
actions, politique monétaire accommodante menée par la Réserve fédérale.
Un autre axe d’analyse déplace l’interprétation des déséquilibres mondiaux. Ce n’est plus la
faiblesse de l’épargne des États-Unis qui est en cause, mais l’excès d’épargne dans le reste du
monde. Cette hypothèse, développée par Bernanke [2005], est connue sous l’expression de
saving glut. Le déficit de la balance courante des États-Unis est l’image de l’augmentation
considérable de l’épargne dans les économies émergentes. Cet « appétit » pour l’épargne est
amplifié par les surplus croissants des pays producteurs de pétrole qui ont épargné les gains
procurés par l’augmentation du prix du pétrole plutôt que de les utiliser à la consommation ou
à l’investissement.
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Un autre angle d’attaque privilégie la politique de change fixe de la Chine vis-à-vis du dollar
et son influence sur les autres économies émergentes d’Asie comme élément clé dans
l’explication des déséquilibres mondiaux. Certains analystes, comme Dooley et al. [2003], ont
développé l’idée que les économies d’Asie ont constitué un nouveau système de taux de change
fixe vis-à-vis du dollar. Cette hypothèse est connue sous l’expression de « Bretton Woods 2 ».
Les États-Unis seraient à nouveau, comme dans le régime de Bretton Woods, au centre d’un
système dans lequel les pays « périphériques » initialement l’Europe et le Japon, aujourd’hui
les pays émergents d’Asie et surtout la Chine misent sur une croissance tirée par les exportations
et enregistrent des excédents courants en maintenant des taux de change sous-évalués.
L’appréciation réelle du yuan de 40 % entre 2005 et 2015 a rendu ce troisième type
d’explication de moins en moins pertinent. Globalement, comme les grands déficits et les
grands excédents ont rétréci, le FMI estime que les risques systémiques qui découlent des
déséquilibres de flux ont baissé. Le FMI [2019a] estime également que les déséquilibres de flux
devraient continuer à se réduire dans les années à venir.
d) Position privilégiée des États-Unis
1) Les effets de valorisation
Les États-Unis empruntent sur les marchés internationaux en émettant des actifs libellés en
dollars et prêtent à l’extérieur essentiellement en acquérant des titres libellés en monnaie
étrangère. En conséquence, une dépréciation du dollar laisse inchangée la valeur en dollar des
engagements américains vis-à-vis de l’extérieur, mais élève la valeur en dollar des avoirs
détenus par les États-Unis sur l’extérieur. Une baisse du dollar a donc pour effet de stabiliser
automatiquement la dette extérieure nette des États-Unis.
2) Le différentiel de rendement en faveur des États-Unis
Les taux de rendement qu’ils retirent de leurs avoirs sur l’extérieur sont supérieurs aux taux
qu’ils versent sur leurs engagements vis-à-vis de l’extérieur. Les raisons avancées pour rendre
compte de ce « privilège exorbitant » tiennent à la composition de l’actif et du passif. Du côté
du passif, il s’agit principalement d’emprunts à court terme constitués de titres peu risqués et à
faible rendement, en particulier des bons du Trésor américain. L’actif est, au contraire, constitué
d’avoirs à long terme, d’actions et d’investissements directs plus risqués et procurant des
rendements plus élevés.
e) Déséquilibres mondiaux et crise financière de 2007-2009
Avant le déclenchement de la crise, le débat à propos des risques que comportent les
déséquilibres s’organisait autour de deux optiques : ajustement en douceur ou atterrissage
brutal. Certains considéraient que, du fait de l’intensification de la globalisation financière, les
marchés peuvent financer des déséquilibres croissants et procéder à des ajustements progressifs
et sans heurts. Néanmoins, la plupart des analystes mettaient l’accent sur les dangers que
comportent les déséquilibres globaux et envisageaient la possibilité d’un atterrissage brutal. Il
est peu probable que le reste du monde accepte d’accumuler autant de créances sur les États-
Unis. Face à ces risques, le FMI avait engagé en 2006 une concertation multilatérale entre les
pays concernés qui n’a débouché sur aucune disposition opérationnelle. La crise a eu lieu. Elle
s’est déclenchée aux États-Unis en 2007 avec la crise des crédits hypothécaires, s’est propagée
à l’économie mondiale en 2008 et 2009 et ses effets ont commencé à s’atténuer en 2010.
Economie Internationale Licence 3 2023-2024

Conclusion
Ce chapitre a permis de retenir que : la balance des paiements (BP) recense tous les flux
commerciaux et financiers du pays avec l’extérieur. Cette BP est comptablement équilibrée :
aux erreurs et omissions près, le solde des transactions courantes (biens, services, revenus) est
égal au solde des transactions financières (investissements directs, titres, monnaies). Un solde
courant négatif correspond à une insuffisance d’épargne domestique par rapport à
l’investissement domestique et un excédent courant correspond à la situation inverse. Le
Système monétaire international actuel est caractérisé par l’instabilité des taux de change entre
les principales monnaies et par la permanence des déséquilibres des balances courantes, les
États-Unis affichant un déficit structurel. Le déficit américain trouve son pendant dans les
excédents de la Chine, de certains pays d’Europe, du Japon et des pays pétroliers, l’épargne
excédentaire des seconds venant combler le manque d’épargne des États-Unis. Le rôle du
dollar, qui reste la première monnaie internationale et le fait que les actifs américains (actifs
réels et titres) soient recherchés, permettent aux États-Unis de financer facilement leur déficit
courant et de rester au centre du système. La crise de 2007-2008 n’est pas due à un manque de
confiance dans le dollar, mais à l’accumulation de deux dysfonctionnements : les mouvements
erratiques et massifs de capitaux entre pays et la bulle immobilière aux États-Unis.

Vous aimerez peut-être aussi