Vous êtes sur la page 1sur 36

2008

Rapport sur le développement dans le monde

L’Agriculture au service
du développement

Abrégé

Banque mondiale
Washington
© 2007 The International Bank for Reconstruction and Development / The World Bank

1818 H Street, NW
Washington, DC 20433, États-Unis d’Amérique
Téléphone : 202-473-1000
Site web : www.worldbank.org
Courriel : feedback@worldbank.org

Tous droits réservés.

1 2 3 4 10 09 08 07

Le présent Abrégé résume le contenu du Rapport sur le développement dans le monde 2008.
Il a été établi par les services de la Banque internationale pour la reconstruction et le
développement / Banque mondiale, et les opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas
nécessairement les vues du Conseil des administrateurs de la Banque mondiale ni des pays
que ceux-ci représentent.
La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données citées dans cet ouvrage. Les
frontières, les couleurs, les dénominations et toute autre information figurant sur les cartes
du présent rapport n’impliquent de la part de la Banque mondiale aucun jugement quant
au statut juridique d’un territoire quelconque et ne signifient nullement que l’institution
reconnaît ou accepte ces frontières.

Droits et licences
Le contenu de cette publication fait l’objet d’un dépôt légal. La publication ou la transmission
d’une partie ou de l’intégralité de la présente publication peut constituer une violation de
la loi applicable. La Banque internationale pour la reconstruction et le développement/
Banque mondiale encourage la diffusion de ses études et, normalement, accorde sans délai
l’autorisation d’en reproduire des passages.
Pour obtenir l’autorisation de reproduire ou de réimprimer toute partie de cette
publication, veuillez adresser votre demande en fournissant tous les renseignements
nécessaires, par courrier, au Copyright Clearance Center Inc., 222 Rosewood Drive,
Danvers, MA 01923, USA ; téléphone : 978-750-8400 ; télécopie : 978-750-4470 ; site web :
www.copyright.com.
Pour tout autre renseignement sur les droits et licences, y compris les droits dérivés,
envoyez votre demande, par courrier, à l’adresse suivante : Office of the Publisher, The World
Bank, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA ; par télécopie, au 202-522-2422 ; ou
par courriel à l’adresse : pubrights@worldbank.org.

Maquette de couverture : Chris Lester de Rock Creek Strategic Marketing et Bill Pragluski
de Critical Stages.

Photocomposition par Precision Graphics.

Photos de couverture prises par des membres des services de la Banque mondiale, dans le
sens des aiguilles d’une montre en partant de la photo en haut et à gauche : Thermomètre à
lait, Lillian Foo ; Battage du blé, Alexander Rowland ; Vache holstein, Lillian Foo ; Haricots
au supermarché, Lillian Foo ; Femme andine et son bébé au marché, Curt Carnemark/
Photothèque de la Banque mondiale ; Cotonnier, Arne Hoel.

ISBN : 978-0-8213-7299-9
Table des matières du Rapport
sur le développement dans le monde 2008

Abrégé
Première partie
Quelle contribution l’agriculture peut-elle faire
au développement ?
1 La croissance et la réduction de la pauvreté dans les trois
mondes ruraux
Thème A : La diminution de la pauvreté rurale a été un facteur déterminant
du recul de la pauvreté en général

2 Les résultats, la diversité et les incertitudes de l’agriculture


Thème B : Les biocarburants : espérances et risques

3 Les ménages ruraux et leurs voies de sortie de la pauvreté


Thème C : De quelle manière la production agricole et la sécurité alimentaire
sont-elles liées ?

Deuxième partie
Par quels moyens peut-on efficacement mettre
l’agriculture au service du développement ?
4 Réformer les politiques du commerce, des prix
et des subventions
5 Amener l’agriculture au marché
Thème D : L’agroentreprise au service du développement

6 Appuyer la compétitivité des petits producteurs


par des innovations institutionnelles
7 Innover grâce à la science et aux technologies
Thème E : Exploiter les avantages des organismes génétiquement modifiés
au profit des populations pauvres

iii
iv RAPPORT SUR Le DÉVeLOPPeMeNT DANS Le MONDe 2008

8 Accroître la durabilité écologique des systèmes agricoles


Thème F: L’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de leur
impact sur l’agriculture

9 Au-delà des activités agricoles


Thème G : Éducation et compétences au service du développement rural
Thème H : Les relations à double sens entre l’agriculture et la santé

Troisième partie
Quelle est la meilleure manière d’exécuter les plans
d’action pour mettre l’agriculture au service
du développement ?
10 De nouveaux programmes nationaux pour les trois
mondes ruraux
11 Le renforcement de la gouvernance, du niveau local
au niveau mondial

Notice bibliographique
Notes
Bibliographie
Grands indicateurs
Index
Avant-propos

L’agriculture est un instrument de développement crucial pour la réalisation de l’objectif de


développement pour le Millénaire qui consiste à réduire de moitié d’ici 2015 la proportion de
la population vivant dans l’extrême pauvreté et souffrant de faim chronique. C’est là le message
fondamental du Rapport sur le développement dans le monde de cette année, le 30e de la série. Les
trois quarts des habitants pauvres des pays en développement vivent dans les espaces ruraux, et la
plupart d’entre eux tirent, directement ou indirectement, leur subsistance de l’agriculture. Ce rapport
offre aux autorités nationales et à la communauté internationale des directives qui peuvent les aider
à concevoir et à exécuter des plans d’action pour mettre l’agriculture au service du développement
de manière à avoir un réel effet sur la vie de centaines de millions de ruraux pauvres.
Le Rapport met en relief deux grands défis régionaux. Dans la majeure partie de l’Afrique
subsaharienne, l’agriculture est un instrument puissant pour entraîner la croissance, surmonter
la pauvreté et renforcer la sécurité alimentaire. Il faut que sa productivité augmente pour que
d’autres secteurs de l’économie puissent connaître une expansion. Toutefois, pour accélérer cette
progression, il est indispensable de réaliser d’importants gains de productivité dans la petite
agriculture et aussi de fournir un appui plus efficace aux millions qui survivent en pratiquant une
agriculture de subsistance et qui habitent, pour la plupart, dans des régions isolées. L’amélioration
des résultats observée ces derniers temps est prometteuse, et le présent Rapport identifie de
nombreuses réalisations qui commencent à porter leurs fruits et qui pourraient être reproduites
sur une plus grande échelle.
en Asie, pour surmonter la pauvreté qui règne de manière importante, il faudra s’attaquer aux
disparités de plus en plus profondes entre les revenus ruraux et les revenus urbains. Les économies
asiatiques en rapide expansion continuent de compter plus de 600 millions de ruraux vivant dans
l’extrême pauvreté et, malgré un exode rural massif, la pauvreté continuera d’être plus prononcée
dans les espaces ruraux que dans les espaces urbains pendant encore plusieurs dizaines d’années.
C’est pourquoi le Rapport sur le développement dans le monde met l’accent sur les moyens de créer
des emplois ruraux en diversifiant l’agriculture pour privilégier des activités à forte intensité de
main-d’œuvre et à forte valeur ajoutée poursuivies en association avec un secteur rural non agricole
dynamique.
Dans toutes les régions du monde, étant donné les pénuries croissantes de terres et d’eau
et les pressions supplémentaires exercées par la mondialisation, l’avenir de l’agriculture est
fondamentalement lié à une meilleure gestion des ressources naturelles. Si des incitations
adéquates sont offertes et des investissements judicieux réalisés, il sera possible d’alléger l’empreinte
environnementale de l’agriculture et d’exploiter les services environnementaux pour protéger les
bassins versants et la diversité biologique.
Aujourd’hui, l’expansion rapide des marchés intérieurs et mondiaux, les innovations
institutionnelles ayant trait aux marchés, à la finance et aux actions collectives, et les révolutions
des technologies biologiques et de l’information sont autant d’opportunités prometteuses de
recourir à l’agriculture pour promouvoir le développement. Pour saisir ces opportunités, il faudra
toutefois que les pouvoirs politiques mettent résolument en œuvre des réformes pour améliorer la
gouvernance dans l’agriculture.
en fin de compte, les résultats dépendront également de la poursuite d’une action concertée de
la communauté internationale du développement pour s’attaquer aux défis à venir. Nous devons
appliquer des règles du jeu équitables dans le commerce international, produire des biens publics
mondiaux, comme les technologies relatives aux denrées alimentaires de base tropicales, aider les
pays en développement à faire face aux changements climatiques, et surmonter les pandémies qui
menacent les plantes, les animaux et les êtres humains. Les moyens de subsistance de 900 millions
de pauvres ruraux, qui méritent également de profiter des avantages d’une mondialisation durable
et sans exclus, en sont l’enjeu.

Robert B. Zoellick
Président
Groupe de la Banque mondiale
v
Remerciements

Ce Rapport a été préparé par une équipe de base dirigée par Derek Byerlee et Alain de Janvry
et composée d’Elisabeth Sadoulet, Robert Townsend et Irina Klytchnikova. Les membres
de l’équipe ont bénéficié de l’appui de Harold Alderman, Beatriz Avalos-Sartorio, Julio
Berdegué, Regina Birner, Lynn Brown, Michael Carter, Luc Christiaensen, Marie-Hélène
Collion, Klaus Deininger, Peter Hazell, Karen Macours, Michael Morris, Paula Savanti et
Dina Umali-Deininger, qui ont tous rédigé des parties du Rapport. L’équipe a aussi reçu
l’appui de Noora Aberman, Jorge Aguero, Shahrooz Badkoubei, Sarah Baird, Leandre
Bassole, Benjamin Davis, Nango Dembele, Ashok Gulati, Corinna Hawkes, Tidiane Kinda,
Melissa Klink, Alex McCalla, Claudio Montenegro, Stefano Pagiola, Eija Pehu, Catherine
Ragasa, Antti Seelaff et John Staatz.
Les travaux se sont déroulés dans le cadre des directives générales formulées par François
Bourguignon en collaboration avec le Réseau du développement durable. Le rôle de principal
directeur de publication est incombé à Bruce Ross-Larson. De nombreux et précieux
conseils ont été donnés par Kym Anderson, Hans Binswanger, Karen Mcconnell Brooks,
Mark Cackler, Manuel Chirib oga, Kevin Cleaver, Christopher Delgado, Shantayanan
Devarajan, Josue Dione, Gershon Feder, Alan Harold Gelb, Ravi Kanbur, Jeffrey Lewis,
Were Omamo, Keijiro Otsuka, Rajul Pandya-Lorch, Prabhu Pingali, Pierre Rondot, Kostas
Stamoulis, Erik Thorbecke, C. Peter Timmer, Joachim von Braun, différents membres du
personnel du Département de l’agriculture et du développement rural et du Réseau du
développement durable de la Banque mondiale, des agents du Centre latino-américain
pour le développement rural (RIMISP), et de nombreuses autres personnes que l’équipe
remercie sans réserves. Beaucoup d’autres encore, des services de la Banque mondiale et de
l’extérieur, ont émis de précieux commentaires et observations. Le Groupe de gestion des
données sur le développement a contribué à la préparation de l’Annexe et a été chargé des
Grands indicateurs du développement dans le monde.
L’équipe remercie également de leur généreux appui l’Agence canadienne de
développement international, l’Agence des États-Unis pour le développement international,
l’Agence suédoise de coopération pour le développement, le Centre de recherches pour le
développement international, le Conseil scientifique du Groupe consultatif pour la recherche
agricole internationale, la Direction suisse du développement et de la coopération, le Fonds
fiduciaire programmatique multidonneurs, le Fonds international de développement
agricole, The Ford Foundation, Global Donor Platform for Rural Development, InWEnt
(Capacity Building International), le ministère britannique du développement international,
le ministère français des Affaires étrangères, le ministère japonais des Finances, le Programme
du savoir au service du développement et The William and Flora Hewlett Foundation.
L’équipe a procédé à de très larges consultations. Des réunions et des ateliers régionaux ont
été organisés localement ainsi qu’en Allemagne, en Australie, au Canada, en France, en Inde,
en Italie, au Japon, au Kenya, au Mali, en Norvège, en Suède et au Royaume-Uni ; le projet
de Rapport a aussi fait l’objet de discussions en ligne. L’équipe tient à remercier tous ceux
qui ont participé à ces divers ateliers, vidéoconférences et discussions, auxquels ont participé
des universitaires, des chercheurs, de hauts fonctionnaires et des agents d’organisations non
gouvernementales et d’organisations du secteur privé ainsi que des membres de la société
civile.
Rebecca Sugui a fait fonction d’assistante exécutive pour l’équipe, Ofelia Valladolid,
d’assistante de programme et Jason Victor et Maria Hazel Macadangdang, d’assistants de
l’équipe. Evangeline Santo Domingo a fait fonction d’assistante de gestion des ressources.

vi
Abrégé

Une Africaine, courbée sous le soleil, un compétences, il faudra absolument promouvoir


enfant sur le dos, sarcle à la houe un champ l’agriculture pour pouvoir atteindre l’objectif
aride planté de sorgho — tableau éloquent de de développement pour le Millénaire qui
la pauvreté rurale. Comme les autres membres consiste à réduire de moitié à l’horizon 2015
de sa nombreuse famille et des millions d’êtres la proportion de la population vivant dans
humains comme elle, elle ne peut survivre la pauvreté et souffrant de faim chronique ;
que grâce au maigre produit de ses cultures et poursuivre la lutte contre la pauvreté et la
de subsistance. D’autres pourtant, aussi bien faim pendant encore plusieurs décennies.
des femmes que des hommes, ont pu s’engager L’agriculture ne pourra pas à elle seule réduire
dans des voies différentes pour échapper à la massivement la pauvreté, mais elle s’est révélée
pauvreté. Des petits fermiers sont devenus avoir un impact unique en ce domaine. Le
membres d’associations de producteurs pour dernier Rapport sur le développement dans
vendre les légumes qu’ils produisent dans le monde consacré à l’agriculture remontant à
des champs irrigués à des exportateurs et 25 ans, il est temps de redonner à celle-ci une
des supermarchés dans le cadre de contrats place centrale dans le programme d’action en
d’approvisionnement. D’autres travaillent faveur du développement, compte tenu du
comme ouvriers agricoles pour de plus gros contexte extrêmement différent défini par
exploitants qui peuvent obtenir les économies les opportunités et les problèmes apparus
d’échelle nécessaires pour approvisionner depuis lors2.
les marchés alimentaires modernes. D’autres L’activité agricole se déroule dans trois
enfin choisissent de poursuivre une activité mondes distincts — un monde à vocation
économique rurale non agricole, et montent agricole, un monde en mutation et un monde
une petite entreprise pour vendre des produits urbanisé. Le plan d’action pour mettre
alimentaires transformés. l’agriculture au service du développement
Les mondes agricoles sont vastes, diversifiés afin d’instaurer une croissance durable et
et en rapide évolution mais, lorsque des réduire la pauvreté est différent pour chacun
politiques adaptées sont poursuivies et que d’entre eux.
des investissements porteurs sont effectués Dans les pays à vocation agricole, comme
aux niveaux local, national et mondial, la plupart des pays d’Afrique subsaharienne,
l’agriculture peut donner à des centaines l’agriculture et les industries connexes sont
de millions de ruraux pauvres de nouveaux essentielles à la croissance ainsi qu’à la
moyens d’échapper à la pauvreté. Les voies de réduction de la pauvreté et de l’insécurité
sortie qu’elle leur ouvre sont, notamment, la alimentaire des masses. Pour que l’agriculture
petite agriculture et l’élevage, l’emploi dans la puisse entraîner la croissance économique dans
« nouvelle agriculture » de production à forte les pays à vocation agricole, il faudra que s’opère
valeur ajoutée, une entreprise commerciale ou une révolution au niveau de la productivité des
un emploi dans l’économie non agricole qui se petites exploitations agricoles. Étant donné
développe dans les zones rurales. le caractère unique de l’agriculture et des
Au 21e siècle, l’agriculture reste un instrument institutions des pays d’Afrique subsaharienne,
fondamental du développement durable et de cette révolution sera nécessairement différente
la réduction de la pauvreté. Les trois quarts des de la révolution verte qui s’est produite en
habitants pauvres des pays en développement Asie. Il reste difficile de déterminer comment
sont des ruraux — 2,1 milliards d’individus la provoquer, après de nombreuses années
ont moins de deux dollars et, dans le cas de d’efforts caractérisés par des résultats limités.
880 millions d’entre eux, moins d’un dollar Toutefois, les conditions ont changé, et il existe
par jour pour vivre — et la plupart tirent leur de nombreux exemples probants à l’échelle
subsistance de l’agriculture1. Étant donné leur locale ainsi que de nouvelles opportunités
situation géographique et leurs domaines de qu’il est possible d’exploiter.

1
2 rapport sur le développement dans le monde 2008

Dans les pays en mutation, qui comptent injustement car ils n’ont guère contribué à les
la plupart des pays d’Asie du Sud et d’Asie de causer.
l’Est ainsi que les pays du Moyen-Orient et L’agriculture est donc riche de promesses
d’Afrique du Nord, le rapide accroissement pour la croissance, la réduction de la pauvreté
des disparités entre les revenus ruraux et et la fourniture de services environnementaux
les revenus urbains et la persistance d’une mais, pour que ces promesses se concrétisent,
extrême pauvreté rurale sont les principales la main visible de l’État devra aussi se
causes des tensions sociales et politiques. Il manifester — pour fournir des biens
n’est pas possible de remédier durablement publics essentiels, améliorer le climat de
à ce problème en prenant des mesures l’investissement, réglementer la gestion des
de protection agricole qui auraient pour ressources naturelles et obtenir des résultats
effet d’accroître le prix des aliments (parce sociaux souhaitables. La poursuite de plans
qu’un grand nombre des ménages pauvres d’action pour mettre l’agriculture au service
doivent acheter au moins une partie de leur du développement exige une amélioration
nourriture) ou en accordant des subventions. de la gouvernance pour l’agriculture aux
Pour remédier aux disparités de revenus dans niveaux local, national et mondial. L’État
les pays en mutation, il faudra poursuivre devra disposer de capacités supplémentaires
un plan d’action intégré ouvrant différentes pour pouvoir coordonner les actions entre les
voies de sortie de la pauvreté — le passage secteurs et former des partenariats avec des
à une agriculture à haute valeur ajoutée, intervenants du secteur privé et de la société
la décentralisation d’activités économiques civile. Les acteurs mondiaux devront mener à
non agricole dans les espaces ruraux, et la bonne fin un programme complexe d’accords
fourniture d’une aide pour faciliter la sortie interconnectés et de biens publics mondiaux.
de l’agriculture. Les responsables de l’action Il sera essentiel d’habiliter la société civile, en
publique devront prendre des initiatives particulier les associations de producteurs,
novatrices et faire preuve d’une détermination pour pouvoir améliorer la gouvernance à tous
résolue pour y parvenir. L’enjeu, toutefois, les niveaux.
est l’amélioration des conditions de vie de Le présent Rapport examine trois grandes
600 millions de ruraux pauvres à l’échelle questions :
mondiale.
Dans les pays urbanisés, parmi lesquels • Quelle contribution au développement
figurent la plupart des pays d’Amérique latine l’agriculture peut-elle avoir ? L’agriculture
et une grande partie des pays d’Europe et a servi de fondation à la croissance et a
d’Asie centrale, l’agriculture peut contribuer permis de faire reculer la pauvreté dans
à réduire la pauvreté rurale qui perdure si les de nombreux pays ; mais ils seraient
petits producteurs fournissent directement encore plus nombreux à en profiter si les
les marchés alimentaires modernes, si de pouvoirs publics et les bailleurs de fonds,
bons emplois sont créés dans l’agriculture et qui pendant longtemps ont fait peu de
l’agroindustrie et si des marchés des services cas de ce secteur, remédiaient à leur sous-
environnementaux se constituent. investissement ou à leurs investissements
Étant donné la pénurie croissante injustifiés dans l’agriculture.
de ressources et l’alourdissement des
externalités, le développement de l’agriculture
• Par quels moyens peut-on efficacement
mettre l’agriculture au service du
et la protection de l’environnement sont développement ? La priorité doit être
maintenant étroitement liés. Il est possible donnée à l’accroissement des actifs des
de réduire l’importante empreinte écologique ménages pauvres, de la productivité des
de l’agriculture, d’atténuer la vulnérabilité
petits producteurs — et de l’agriculture en
des systèmes agricoles aux changements
général — et à la création d’opportunités
climatiques et d’exploiter l’agriculture pour
dans le cadre de l’économie rurale non
produire un plus grand nombre de services
environnementaux. La solution consiste, agricole que les ruraux pauvres peuvent
non pas à ralentir le développement agricole, saisir.
mais à rechercher des systèmes de production • Quelle est la meilleure manière d’exécuter
plus viables. Il importe en tout premier lieu les plans d’action pour mettre l’agriculture
d’établir le cadre incitatif requis en renforçant au service du développement ? Il faut
les droits de propriété et en éliminant les concevoir les mesures et mettre en place
subventions qui favorisent la dégradation les processus de décision les mieux
des ressources naturelles. Il est également adaptés aux conditions économiques et
impératif de prendre des mesures d’adaptation sociales de chaque pays, mobiliser l’appui
aux changements climatiques, qui frappent les politique, et améliorer la gouvernance
paysans pauvres le plus durement — et le plus dans l’agriculture.
Abrégé 3

Quelle contribution contribue pour 29 %, en moyenne, au


produit intérieur brut (PIB) et emploie 65 %
l’agriculture peut-elle faire de la population active. Les industries et
au développement ? les services associés à l’agriculture dans
L’agriculture présente des les chaînes de valeur contribuent souvent
caractéristiques qui en pour plus de 30 % au PIB dans les pays en
mutation et les pays urbanisés.
font un instrument unique La production agricole est importante
du développement pour la sécurité alimentaire car elle est
Le secteur agricole peut, conjointement à une source de revenus pour la majorité des
d’autres secteurs, accélérer la croissance, ruraux pauvres. elle revêt une importance
réduire la pauvreté et préserver durablement particulièrement cruciale dans une
l’environnement. Dans le présent Rapport, douzaine de pays d’Afrique subsaharienne
l’agriculture s’entend des cultures, de l’élevage, qui comptent conjointement environ
de l’agroforesterie et de l’aquaculture. elle ne 200 millions d’habitants, ont des niveaux
couvre ni la foresterie ni les pêches de capture de production intérieure extrêmement
commerciales car les analyses qui doivent variables, n’ont guère de débouchés
être réalisées dans ces deux domaines sont extérieurs pour leurs cultures de base, et
extrêmement différentes. Les interactions ne peuvent importer que dans une mesure
entre l’agriculture et la foresterie sont limitée pour satisfaire à leurs besoins
toutefois prises en compte dans l’examen du alimentaires par suite de l’insuffisance de
déboisement, des changements climatiques et leurs ressources en devises. Ces pays sont
des services environnementaux. exposés à des urgences alimentaires répétées
et aux incertitudes qui caractérisent l’aide
L’agriculture contribue au développement de alimentaire ; il est donc essentiel, dans
bien des manières. L’agriculture contribue leur cas, d’accroître et de stabiliser leur
au développement en tant qu’activité production intérieure pour assurer leur
économique, en tant que moyen de sécurité alimentaire.
subsistance et en tant que source de services • L’agriculture en tant que moyen de
environnementaux ; elle est donc un unique subsistance. Selon les estimations,
instrument du développement. l’agriculture offre un moyen de subsistance
• L’agriculture en tant qu’activité à 86 % des populations rurales. elle
économique. L’ agriculture peut alimenter emploie 1,3 milliard de petits paysans
la croissance de l’économie nationale, et de ruraux sans terres, elle assure une
offrir des opportunités d’investissement « protection sociale financée par la ferme »
au secteur privé et être le principal moteur lorsque des chocs se produisent dans les
des industries apparentées et de l’économie espaces urbains, et elle est la fondation
rurale non agricole. Les deux tiers de la de communautés rurales viables. Sur les
valeur ajoutée agricole dans le monde 5,5 milliards d’habitants du monde en
émanent des pays en développement. Dans développement, 3 milliards, soit près de
les pays à vocation agricole, l’agriculture la moitié de l’humanité, vivent dans des

Figure 1 Le nombre de pauvres a augmenté en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne entre 1993 et 2002 (seuil de pauvreté de 1 dollar par jour)
Pauvreté rurale Pauvreté urbaine
Millions de personnes Millions de personnes
En dessous du seuil de pauvreté de 1 dollar par jour En dessous du seuil de pauvreté de 1 dollar par jour
500 500

400 1993 2002 400 1993 2002

300 300

200 200

100 100

0 0
Afrique Asie du Asie de Moyen-Orient Europe et Amérique Afrique Asie du Asie de Moyen-Orient Europe et Amérique
subsaha- Sud l’Est et et Afrique Asie latine et subsaha- Sud l’Est et et Afrique Asie latine et
rienne Pacifique du Nord centrale Caraïbes rienne Pacifique du Nord centrale Caraïbes
Source : Ravaillon, Chen et Sangraula 2007
4 rapport sur le développement dans le monde 2008

espaces ruraux ; selon les estimations, réduire la vulnérabilité aux changements


2,5 milliards de ces derniers sont membres climatiques des systèmes agricoles des
de ménages exerçant des activités populations rurales pauvres. La gestion
agricoles et 1,5 milliard appartiennent à des interrelations entre l’agriculture, la
des ménages de petits exploitants3. protection des ressources naturelles et
La baisse récente du taux de pauvreté l’environnement doit faire partie intégrante
(mesuré au seuil de un dollar par jour) de l’action menée pour mettre l’agriculture
dans les pays en développement — qui au service du développement.
est tombé de 28 % en 1993 à 22 % en
2002 — tient essentiellement au recul de Les contributions de l’agriculture ne sont pas
la pauvreté rurale (qui a baissé de 37 à les mêmes dans les trois mondes ruraux. La
29 %), le taux de pauvreté urbain restant manière dont l’agriculture favorise le
pratiquement constant (13 %.) Le recul de développement diffère d’un pays à un autre
la pauvreté rurale s’explique, pour plus de selon la façon dont chaque pays l’utilise pour
80 %, par l’amélioration des conditions alimenter la croissance et réduire la pauvreté.
dans les espaces ruraux et non pas par Le classement des pays dans des catégories
l’exode des pauvres vers les villes. Il s’ensuit définies par la part de leur croissance globale
que, contrairement à l’opinion répandue, imputable à l’agriculture au cours des
la migration vers les villes n’a pas été le 15 dernières années et la proportion de leur
principal instrument de la réduction de la population pauvre totale (par référence à
pauvreté rurale (et mondiale). un seuil de pauvreté de deux dollars par
Toutefois, la forte diminution du nombre jour) vivant dans des espaces ruraux permet
de ruraux pauvres (qui est tombé de 1 036 de mettre en évidence la contribution de
millions en 1993 à 883 millions en 2003) l’agriculture à la croissance et à la réduction
ne s’est opérée que dans la région de l’Asie de la pauvreté (figure 2, page 5). Considérés
de l’Est et du Pacifique (figure 1, page 3). sous cet angle, les pays forment trois catégories
Le nombre de ruraux pauvres a continué — trois mondes ruraux distincts (tableau 1,
d’augmenter en Asie du Sud et en Afrique page 5) :
subsaharienne où il restera probablement
supérieur au nombre de pauvres dans les • Les pays à vocation agricole — l’agriculture
espaces urbains jusqu’en 2040. Dans ces est le principal moteur de la croissance :
régions, il importe donc en priorité de elle est responsable d’en moyenne 32 %
mobiliser l’agriculture pour promouvoir de la croissance du PIB — essentiellement
la réduction de la pauvreté. parce qu’elle produit une large part du
PIB — et la majeure partie des pauvres
• L’agriculture en tant que source de services (70 %) vivent dans les espaces ruraux.
environnementaux. Parce qu’elle utilise Ce groupe de pays compte 417 millions
(souvent abusivement) des ressources de ruraux, essentiellement dans les pays
naturelles, l’agriculture peut avoir des d’Afrique subsaharienne. La proportion
résultats environnementaux bons et mauvais. de la population rurale subsaharienne
Elle est de loin le plus gros utilisateur d’eau vivant dans des pays à vocation agricole est
et contribue aux pénuries. Elle est l’une de 82 %.
des principales causes de l’épuisement
des eaux souterraines, de la pollution • Les pays en mutation — l’agriculture n’est
agrochimique, de l’appauvrissement des plus un facteur primordial de la croissance
sols et des changements climatiques à économique et contribue en moyenne
l’échelle mondiale puisque jusqu’à 30 % pour seulement 7 % à l’augmentation du
des émissions de gaz à effet de serre PIB ; la pauvreté continue toutefois d’être
lui sont imputables. Mais elle est aussi un phénomène essentiellement rural
l’une des principales sources de services (82 % du nombre total de pauvres sont des
environnementaux — fixation de carbone, ruraux). Cette catégorie de pays, dont la
gestion des bassins versants et préservation Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Maroc et la
de la biodiversité — qui, pour la plupart Roumanie sont des exemples représentatifs,
ne sont pas appréciés à leur juste valeur compte plus de 2,2 milliards de ruraux. La
et ne sont pas rémunérés. Étant donné proportion de la population rurale vivant
les pénuries croissantes de ressources, dans des pays en mutation est de 98 % pour
les changements climatiques et le souci la région de l’Asie du Sud, de 96 % pour
des coûts environnementaux, il n’est l’Asie de l’Est et le Pacifique et de 92 % pour
pas possible de continuer d’utiliser les le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
ressources naturelles dans le cadre des • Les pays urbanisés — la contribution
activités agricoles comme elles l’ont été directe de l’agriculture à la croissance
jusqu’à maintenant. Il est impératif de économique est encore plus réduite (5 % de
Abrégé 5

Figure 2. La contribution de l’agriculture à la croissance et la proportion de ruraux dans la population


pauvre définissent trois catégories de pays : les pays à vocation agricole, les pays en mutation
et les pays urbanisés
Contribution de l’agriculture à la croissance, 1990-2005, %
80
Observations Pays à vocation
Prévisions agricole
Évolution
60

INDE
40 (1965–94)

20
CHINE
(1981–2001)

BRÉSIL INDONÉSIE
0 (1970–96) (1970–96)
Pays en mutation

Pays urbanisés
–20
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
Ruraux pauvres/total pauvres, 2002
Source : équipe du Rapport sur le développement dans le monde 2008
Note : les flèches indiquent les trajectoires du Brésil, de la Chine, de l’Inde et de l’Indonésie.

Tableau 1 Caractéristiques des trois catégories de pays, 2005


Pays à vocation Pays en Pays
agricole mutation urbanisés
Population rurale (millions), 2005 417 2 220 255
Proportion de ruraux dans la population (%), 2005 68 63 26
PIB par habitant (USD 2000), 2005 379 1 068 3 489
Contribution de l’agriculture au PIB (%), 2005 29 13 6
Taux de croissance annuel du PIB agricole, 1993-2005 (%) 4,0 2,9 2,2
Taux de croissance annuel du PIB non agricole, 1993-2005 (%) 3,5 7,0 2,7
Nombre de ruraux pauvres (millions), 2002 170 583 32
Taux de pauvreté rurale, 2002 (%) 51 28 13
Source : Ravaillon, Chen et Sangraula 2007 ; Banque mondiale 2006y
Note : le seuil de pauvreté retenu est 1,08 dollar par jour en dollars PPA de 1993.

l’augmentation du PIB, en moyenne) et la autre. L’évolution de la Chine et de l’Inde au


pauvreté est essentiellement un phénomène cours des 20 dernières années a eu pour effet
urbain. Les espaces ruraux comptent de les faire passer de la catégorie des pays à
néanmoins encore 45 % de la population vocation agricole à celle des pays en mutation,
pauvre et l’agroindustrie et l’industrie et tandis que l’Indonésie s’est rapprochée du
les services alimentaires peuvent générer groupe des pays urbanisés (figure 2). Il existe
jusqu’à un tiers du PIB. Cette catégorie par ailleurs de fortes disparités géographiques
de pays, où vivent 255 millions de ruraux, à l’intérieur des frontières d’un même pays :
regroupe la plupart des pays d’Amérique par exemple, de nombreux pays en mutation et
latine et des Caraïbes et un grand nombre urbanisés ont des régions à vocation agricole
des pays d’europe et d’Asie centrale. La (comme le Bihar en Inde et le Chiapas au
proportion de la population rurale de ces Mexique).
régions vivant dans des pays urbanisés est Lorsque les régions des différents pays sont
de 88 %. classées en fonction de leur potentiel agricole
et de leur accès au marché, il s’avère que 61 %
Les pays suivent des trajectoires qui des ruraux des pays en développement vivent
peuvent les faire passer d’une catégorie à une dans des zones favorisées — c’est-à-dire
6 RAPPORT SUR Le DÉVeLOPPeMeNT DANS Le MONDe 2008

irriguées, humides ou semi-humides, peu d’autres à continuer de vivre dans la pauvreté


exposées au stress hydrique et offrant des dans des taudis urbains.
conditions d’accès aux marchés moyennes Cette hétérogénéité généralisée de
à satisfaisantes (ces régions sont situées à l’agriculture et de la société rurale a de
moins de cinq heures de trajet d’un bourg de profondes répercussions sur l’action que
5 000 habitants ou plus). Toutefois, les deux peuvent mener les pouvoirs publics pour mettre
tiers des populations rurales d’Afrique l’agriculture au service du développement. Peu
subsaharienne vivent dans des zones de réformes pourront être réalisées sans faire
défavorisées, c’est-à-dire arides ou semi-arides des perdants en même temps que des gagnants.
d’où il est difficile de se rendre à un marché. Une politique de libéralisation du commerce
Dans cinq pays pour lesquels des cartes de ayant pour effet d’accroître le prix des denrées
la pauvreté détaillées ont été établies, le taux alimentaires pénalise les acheteurs nets (qui
de pauvreté est plus élevé dans les zones constituent le groupe de ruraux pauvres le plus
défavorisées, mais la plupart des pauvres important dans des pays comme la Bolivie et
vivent dans des zones où les conditions sont le Bangladesh) et profite aux vendeurs nets (le
favorables. Il s’ensuit que, pour réduire la groupe de ruraux pauvres le plus important
pauvreté par le biais de l’agriculture, il faut non au Cambodge et au Viet Nam). Il importe de
seulement investir dans des zones défavorisées différencier les mesures prises en fonction du
pour lutter contre l’extrême pauvreté, mais statut et des conditions de vie des ménages, en
aussi cibler les nombreux ruraux pauvres tenant particulièrement compte des normes
vivant dans les régions favorables. qui régissent les relations entre les hommes et
les femmes. Cette différenciation aura pour
Le monde rural est un monde hétérogène. objet non pas nécessairement de favoriser un
L’hétérogénéité économique et sociale est groupe plutôt qu’un autre mais de servir tous
une caractéristique fondamentale des espaces les ménages plus efficacement par rapport aux
ruraux. Les gros exploitants agricoles coexistent coûts, en adaptant les mesures sur la base de
avec les petits paysans. Ces derniers forment leurs conditions de vie et de leurs besoins, en
également des groupes très divers. Certains particulier pour les groupes de population
pratiquent une agriculture commerciale, les plus pauvres. L’un des problèmes les plus
vendent leur surplus sur les marchés difficiles auxquels sont confrontés les pays
alimentaires et profitent de l’expansion des pauvres qui ont des ressources très insuffisantes
marchés des produits à forte valeur ajoutée consiste à trouver un juste équilibre entre les
de la nouvelle agriculture. Beaucoup d’autres, mesures visant les sous-secteurs, les régions
en revanche, pratiquent une agriculture de et les ménages bénéficiant de conditions
subsistance, essentiellement parce qu’ils n’ont favorables et ceux qui sont défavorisés.
que peu d’actifs et opèrent dans des conditions
difficiles. Étant donné qu’ils consomment la
plus grande partie des denrées alimentaires
qu’ils produisent, ils sont, sur le marché,
acheteurs de produits alimentaires et vendeurs
de main-d’œuvre. La répartition des ruraux
entre ces différentes catégories est fonction,
non seulement de leurs actifs, mais aussi de
Figure 3 La croissance du PIB imputable
leur genre, de leur ethnie et de leur statut social à l’agriculture profite nettement plus à la moitié
car ces différents facteurs définissent la mesure la plus pauvre de la population
dans laquelle ils peuvent obtenir les mêmes Augmentation des dépenses induites par un accroissement
actifs et les mêmes ressources afin de saisir les de 1 % du PIB, %
opportunités qui se présentent. 8
L’hétérogénéité caractérise également le Agriculture
marché du travail dans les espaces ruraux car, 6 Autres secteurs
si la plupart des emplois agricoles exigent peu
de qualifications et sont faiblement rémunérés, 4
un petit nombre d’emplois font appel à des
qualifications poussées et offrent une porte 2
de sortie de la pauvreté. elle caractérise
0
l’économie rurale non agricole où il existe
aussi bien des emplois salariés ou pour compte –2
propre ayant un faible taux de productivité que Inférieur 2 3 4 5 6 7 8 9 Supérieur
des emplois dans des entreprises dynamiques. Déciles de dépenses
et elle caractérise les résultats des migrations Source : Ligon et Sadoulet 2007
Note : Graphique établi sur la base des données collectées
qui permettent à certains ruraux pauvres de sur 42 pays pour la période 1981-2003. Les gains affichés sont
sortir de la pauvreté mais en condamnent significativement différents pour les cinq déciles inférieurs.
Abrégé 7

L’agriculture a largement prouvé Premièrement, dans beaucoup de ces


pays, les denrées alimentaires ne sont pas
qu’elle pouvait contribuer parfaitement échangeables en raison du
au développement niveau élevé des coûts de transaction et de la
L’agriculture a une capacité de réduction prédominance de denrées de base qui ne font
de la pauvreté particulière. La croissance l’objet que d’échanges internationaux limités,
agricole a un impact spécial sur la réduction comme les racines et tubercules et les céréales
de la pauvreté dans toutes les catégories de locales. Un grand nombre de pays doivent
pays. Les estimations effectuées à partir d’un donc produire eux-mêmes les aliments
échantillon de pays montrent que la croissance qu’ils consomment. La productivité agricole
du PIB due à l’agriculture contribue au moins détermine le prix des denrées alimentaires
deux fois plus à réduire la pauvreté que la qui, à son tour, détermine les coûts salariaux
croissance du PIB due au secteur non agricole et la compétitivité des secteurs exportateurs.
(figure 3, page 6). en Chine, la croissance La productivité des cultures de base est donc
globale générée par l’agriculture a contribué, un facteur déterminant de la croissance.
selon les estimations, 3,5 fois plus à réduire Deuxièmement, l’avantage comparatif
la pauvreté que la croissance due aux autres des sous-secteurs exportateurs continuera
secteurs — et 2,7 plus en Amérique latine. d’être imputable aux activités primaires
Une rapide croissance agricole — en Inde par (agriculture et industries extractives) et à
suite d’innovations technologiques (diffusion l’industrie de transformation des produits
de variétés à haut rendement) et en Chine agricoles pendant de nombreuses années en
par suite d’innovations institutionnelles raison de la dotation en ressources et d’un
(système de responsabilisation des ménages climat de l’investissement difficile pour les
et libéralisation des marchés) — s’est industries manufacturières. La plupart des
accompagnée d’un important recul de la économies sont tributaires d’un portefeuille
pauvreté rurale. Récemment, au Ghana, la diversifié d’exportations de produits primaires
forte réduction de la pauvreté, induite en non transformés et transformés (y compris
partie par la croissance du secteur agricole, a le tourisme) pour se procurer des devises.
été en grande partie enregistrée au niveau des La croissance des sous-secteurs agricoles
ménages ruraux. non exportateurs et exportateurs induit
également une forte croissance dans d’autres
Le secteur agricole peut entraîner la secteurs de l’économie par le biais d’effets
croissance globale dans les pays à vocation multiplicateurs.
agricole. L’agriculture a amplement C’est pourquoi, pendant encore de
prouvé qu’elle pouvait contribuer à réduire nombreuses années, la stratégie de croissance
la pauvreté. Mais, le secteur peut-il aussi être de la plupart des économies à vocation agricole
l’assise d’une stratégie de croissance pour les devra reposer sur les avancées réalisées
pays à vocation agricole ? Outre l’ampleur dans l’agriculture. Il existe d’innombrables
même de ce secteur, deux arguments peuvent exemples du rôle joué par l’agriculture en tant
être invoqués dans le cas des pays d’Afrique que fondation de la croissance au début du
subsaharienne appartenant à cette catégorie à processus de développement. La croissance
l’appui d’une réponse affirmative. agricole a été le précurseur des révolutions

Figure 4 Le montant des dépenses publiques au titre de l’agriculture est plus faible mais la contribution de
l’agriculture aux PIB est plus élevée dans les pays à vocation agricole que dans les autres groupes de pays
Dépenses publiques au titre
PIB dû à l’agriculture/PIB de l’agriculture/PIB dû à l’agriculture
Pourcentage Pourcentage
35 35
30 29 29 1980 2000 30 1980 2000

25 24 25
20 20
16 17
15 14 15 12
10 10 11
10 10
5 5 4 4

0 0
Pays à vocation Pays en Pays Pays à vocation Pays en Pays
agricole mutation urbanisés agricole mutation urbanisés
Source : Fan, à paraître
8 RAPPORT SUR Le DÉVeLOPPeMeNT DANS Le MONDe 2008

industrielles qui se sont propagées dans les l’agriculture à promouvoir le développement


régions du monde à climat tempéré en partant reste inexploitée. Cette situation résulte de
de l’Angleterre vers le milieu du XVIIIe la poursuite de politiques qui ont pour effet
siècle pour atteindre le Japon vers la fin du d’imposer de manière excessive l’agriculture
XIX e siècle. Plus récemment, la rapide et de sous-investir dans cette dernière, et
croissance agricole observée en Chine, en de la domination de l’économie politique
Inde et au Viet Nam a été le précurseur de par les intérêts urbains. Contrairement à la
l’essor du secteur industriel. La contribution situation dans laquelle se trouvaient les pays
spéciale de l’agriculture au démarrage de la en mutation lorsqu’une part importante de
croissance est donc tout aussi bien établie que leur PIB provenait encore de l’agriculture,
sa contribution à la réduction de la pauvreté. la part des dépenses publiques consacrée à
l’agriculture est très faible par rapport à la
L’agriculture n’a, cependant, été mise contribution de ce secteur au PIB (4 % dans les
au service du développement que dans pays à vocation agricole en 2004 contre 10 %
une mesure très réduite. Malgré les dans les pays en mutation en 1980, voir
accomplissements précédents, de nombreuses figure 4, page 7). Sous l’effet des pressions
opportunités de mettre l’agriculture au engendrées par des crises alimentaires
service du développement n’ont pas été répétées, les bailleurs de fonds et les pouvoirs
saisies. Beaucoup de pays à vocation agricole publics donnent la priorité, dans leurs
continuent d’aff icher une croissance budgets, à la fourniture directe de produits
agricole par habitant anémique et de faibles alimentaires au détriment d’investissements
transformations structurelles (définies par sources de croissance et d’interventions
une baisse de la contribution de l’agriculture permettant d’assurer la sécurité alimentaire
au PIB et une augmentation de la contribution par le biais d’une augmentation des revenus.
de l’industrie et des services parallèlement Lorsque les femmes constituent la majorité
à la hausse du PIB par habitant). Il en va des petits fermiers, le fait qu’elles ne réalisent
de même pour de vastes régions de pays pas pleinement leur potentiel dans le
des autres catégories. La rapide expansion domaine agricole contribue à la lenteur de la
démographique, la réduction des superficies croissance et à l’insécurité alimentaire.
des fermes, la fertilité décroissante des sols Ce n’est pas uniquement dans les pays
et les occasions manquées de diversifier à vocation agricole que l’agriculture n’est
les sources de revenus et de migrer sont pas suffisamment mise au service du
lourdes de conséquences car la capacité de développement. Dans les pays en mutation
dont les secteurs non agricoles connaissent
une rapide croissance, le redéploiement
de la population active en dehors de
l’agriculture s’effectue généralement avec
un certain retard : de nombreux pauvres
continuent de vivre dans les espaces ruraux
Encadré 1 Comment les disponibilités alimentaires et les disparités entre les revenus ruraux et
mondiales évolueront-elles à l’avenir ? urbains s’accroissent. La population agricole
La production agricole a permis, dans production de viande de 85 % entre 2000 demande à bénéficier de subventions et
l’ensemble, de satisfaire la demande et 2030. Par ailleurs, la demande croissante d’une protection. Les pouvoirs publics sont
effective mondiale de denrées alimentaires. de matières de base pour la production
Toutefois plus de 800 millions de personnes de biocarburants a déjà entraîné une forte alors confrontés à un dilemme parce que
continuent de souffrir d’insécurité hausse des prix mondiaux des denrées l’état des finances publiques ne leur permet
alimentaire, et l’agriculture a une énorme alimentaires. pas d’effectuer durablement des transferts
empreinte environnementale. L’avenir est de Pour gérer la réponse globale de suffisamment importants pour réduire les
plus en plus incertain. l’agriculture à l’augmentation de la
Selon certains modèles, la tendance demande, il faudra adapter les politiques, disparités entre les revenus et les populations
longue à la baisse des cours des réaliser des investissements de longue urbaines veulent que les prix alimentaires
denrées alimentaires sur les marchés durée et ne pas se cantonner aux soient maintenus bas4. Le coût d’opportunité
mondiaux pourrait s’inverser et, partant, pratiques actuelles. Il est particulièrement
accroître les incertitudes relatives à urgent d’accroître considérablement les
des subventions (qui sont trois fois plus
la sécurité alimentaire mondiale. Les investissements en Afrique subsaharienne, élevées que les investissements publics dans
changements climatiques, les dégradations dont les importations alimentaires devraient l’agriculture en Inde) revêt la forme d’une
environnementales, l’intensification de la doubler d’ici 2030 si l’on maintient les diminution des biens publics axés sur la
concurrence pour les terres et pour l’eau, le pratiques actuelles et où les changements
renchérissement de l’énergie, et les doutes climatiques devraient avoir un fort impact
croissance et les services sociaux dans les
pesant sur les taux d’adoption futurs de alors que la région n’a que des capacités espaces ruraux. Toute stratégie doit donc
nouvelles technologies posent des risques et limitées pour y faire face et que les progrès faire une place au relèvement des niveaux de
des défis considérables qui rendent difficile accomplis pour améliorer les disponibilités revenu dans l’agriculture et dans le secteur
l’établissement de prévisions. alimentaires par habitant restent lents.
Pour répondre à la demande indiquée rural non agricole.
par les projections, la production céréalière
devra s’accroître de près de 50 % et la Source : Rosegrant et al. 2007. De nouvelles opportunités surgissent. Le
monde de l’agriculture s’est radicalement
Abrégé 9

transformé depuis le Rapport sur le Par quels moyens peut-on


développement dans le monde 1982 qui était
consacré à l’agriculture. Celle-ci prend
efficacement mettre
place désormais dans un contexte défini l’agriculture au service
par de nouveaux marchés dynamiques, du développement ?
des innovations technolog iques et L’agriculture peut être la principale source de
institutionnelles de grande envergure, et des croissance dans les pays à vocation agricole et
rôles différents pour l’État, le secteur privé elle peut faire reculer la pauvreté et améliorer
et la société civile. La nouvelle agriculture l’environnement dans les trois catégories de
émergente est pilotée par des entrepreneurs pays, bien que de manières différentes. Il faut,
privés opérant dans le cadre de vastes chaînes pour parvenir à ce résultat, améliorer les actifs
de valeur qui relient les producteurs aux dont disposent les ruraux pauvres, accroître
consommateurs et auxquelles participent de la compétitivité et la viabilité des petits
nombreux petits producteurs entreprenants producteurs, diversifier les sources de revenus
avec l’appui des organisations dont ils sont en favorisant les emplois qui peuvent être
membres. L’agriculture axée sur les cultures obtenus sur le marché du travail et les activités
de base et les produits d’exportation économiques rurales non agricoles, et faciliter la
traditionnels trouve également de nouveaux réussite de ceux qui sortent du secteur agricole.
débouchés car elle se différencie de plus
en plus pour répondre à l’évolution de la Élargissement de l’accès à des actifs
demande des consommateurs et aux nouvelles Les actifs des ménages sont d’importants
utilisations de ses produits (par exemple déterminants de l’aptitude de ces derniers
dans la production de biocarburants) et à opérer sur les marchés agricoles, à gagner
car elle profite de l’intégration des marchés leur vie dans le cadre d’une agriculture de
régionaux. Toutefois, le contexte de l’activité subsistance, à soutenir la concurrence en tant
agricole est extrêmement incertain et se prête qu’entrepreneurs dans le cadre de l’économie
mal à l’établissement de prévisions ; il importe rurale non agricole, et à trouver un emploi
donc de gérer les disponibilités alimentaires qualifié. La terre, l’eau et le capital humain sont
mondiales avec prudence (encadré 1, trois actifs fondamentaux. Toutefois, les actifs
page 8). des populations rurales pauvres sont souvent
La conception qui se dessine d’une amputés par la croissance démographique,
agriculture au service du développement la dégradation de l’environnement, les
redéfinit les rôles des producteurs, du secteur expropriations par des intérêts dominants et les
privé et de l’État. Dans cette conception, la distorsions sociales engendrées par les politiques
production est essentiellement le fait de petits et l’allocation des biens publics.
fermiers qui, souvent, restent les producteurs L’insuffisance des actifs n’est nulle part
les plus efficaces en particulier lorsqu’ils ailleurs dans le monde plus notable qu’en
bénéficient d’un appui de l’organisation Afrique subsaharienne où, dans un grand
à laquelle ils appartiennent. Toutefois, nombre des régions affichant les plus fortes
lorsque ces dernières ne peuvent pas réaliser densités de population, les fermes sont déjà
des économies d’échelle au niveau de la trop petites pour être viables et continuent de
production et de la commercialisation, le diminuer en superficie, les sols sont gravement
meilleur mode de production peut être celui dégradés, les investissements dans l’irrigation
d’une exploitation agricole commerciale à sont négligeables et le mauvais état de santé et
forte intensité de main-d’œuvre et, dans ce le faible niveau d’instruction de la population
cas, un marché du travail efficace et équitable limitent la productivité et l’accès à de meilleures
est le principal instrument de la réduction options. La pression démographique conjuguée
de la pauvreté rurale. Le secteur privé à la réduction de la superficie des fermes et
pilote l’organisation de chaînes de valeur les pénuries d’eau sont également de graves
qui mettent le marché à la portée des petits problèmes dans de nombreuses régions
agriculteurs et des fermes commerciales. d’Asie. Pour renforcer les actifs, il faudra que
L’État — qui a de nouvelles capacités et d’importants investissements publics soient
formes de gouvernance — remédie aux consacrés à l’irrigation, à la santé et à l’éducation.
échecs du marché, règlemente la concurrence Dans d’autres cas, il s’agira plus de promouvoir
et participe de manière stratégique à des le développement institutionnel, notamment
partenariats public-privé pour promouvoir la pour renforcer la sécurité des droits de propriété
compétitivité du secteur des agroindustries et la qualité de l’administration foncière. Il est
et favoriser une plus grande inclusion des possible qu’il faille aussi, pour accroître les
petits fermiers et des ouvriers agricoles. Dans actifs, adopter des mesures antidiscriminatoires
cette nouvelle conception, l’agriculture joue pour égaliser les chances offertes aux groupes
un rôle de premier plan dans le programme défavorisés ou exclus, par exemple les femmes
d’action pour le développement. et les minorités ethniques.
10 rapport sur le développement dans le monde 2008

La terre. Les marchés fonciers, en particulier échelle, il existe de nombreuses possibilités


les marchés des baux, peuvent accroître la d’accroître la productivité en rénovant les
productivité, aider les ménages à diversifier systèmes en place, en développant les petits
leurs sources de revenus, et faciliter leur sortie systèmes d’irrigation et en intensifiant les
de l’agriculture. Pour assurer le transfert des activités de collecte de l’eau.
terres aux utilisateurs les plus productifs et
pour faciliter la participation à des activités L’éducation. Si la terre et l’eau sont des actifs
rurales non agricoles ainsi que la sortie essentiels dans les espaces ruraux, l’éducation
de l’agriculture lorsque les agriculteurs est souvent l’actif qui a le plus de valeur pour
deviennent trop âgés ou dans le contexte de les populations rurales car elle leur permet
la diversification des économies rurales et de de saisir des opportunités dans la nouvelle
l’accélération des courants de migration, il est agriculture, d’obtenir un emploi qualifié,
important qu’il existe des marchés fonciers de lancer une entreprise dans le cadre de
fonctionnant de manière harmonieuse. l’économie rurale non agricole et de migrer dans
Toutefois, dans de nombreux pays, le caractère de bonnes conditions. Toutefois, les niveaux
flou des droits de propriété, le non-respect des d’instruction sont généralement extrêmement
contrats et les restrictions juridiques nuisent faibles dans les zones rurales du monde entier
à la performance de ces marchés et l’on peut : ils correspondent, en moyenne, à quatre
observer de graves inefficacités au niveau de la années de scolarité pour les hommes adultes
réallocation des terres et de la main-d’œuvre et à moins de trois années de scolarité pour les
ainsi qu’un renforcement des inégalités femmes adultes en Afrique subsaharienne, en
actuelles dans l’accès aux terres. Il importe Asie du Sud et dans la région du Moyen-Orient
de mettre en place des filets de protection et de l’Afrique du Nord. L’amélioration de
et d’offrir un accès au crédit pour réduire le l’éducation de base s’effectue plus lentement
plus possible les ventes de terre en catastrophe dans les espaces ruraux que dans les espaces
lorsque les fermiers sont exposés à des chocs. urbains. Lorsque la demande d’éducation des
La réforme agraire peut permettre aux ménages ruraux est faible, il est possible de
petits agriculteurs de pénétrer sur le marché, la stimuler en procédant à des transferts en
de réduire les inégalités dans la répartition espèces (comme au Bangladesh, au Brésil et au
des terres, d’accroître l’efficacité des activités Mexique) qui sont subordonnés à l’assiduité
et elle peut être organisée de manière scolaire. Toutefois, de plus en plus souvent,
à reconnaître les droits des femmes. La c’est surtout la qualité de l’éducation en milieu
redistribution de terrains provenant de grands rural qui doit être améliorée, l’éducation
domaines sous-exploités pour permettre à des s’entendant ici au sens large de manière à
petits producteurs de s’installer peut donner inclure les formations professionnelles qui
de bons résultats si elle s’accompagne de peuvent fournir des compétences techniques
réformes visant à assurer la compétitivité des et commerciales utiles dans le cadre de la
bénéficiaires — objectif qui s’est révélé difficile nouvelle agriculture et de l’économie rurale
à atteindre. L’Afrique du Sud et le Brésil ont non agricole.
recours à des subventions ciblées pour faciliter
les réformes foncières basées sur le marché ; il La santé. Lorsque le VIH/SIDA et le
importera de tirer les leçons de ces expériences paludisme sévissent de manière généralisée, le
nouvelles pour pouvoir, éventuellement, les nombre élevé de cas de morbidité et de décès
répéter à plus grande échelle. peut provoquer une réduction considérable
de la productivité agricole et gravement
L’eau. L’ accès à l’eau et à l’irrigation est compromettre les moyens d’existence. La
majorité des personnes infectées par le VIH
un facteur déterminant de la productivité
travaillent dans l’agriculture, et beaucoup
des sols et de la stabilité des rendements. La
pourrait être fait pour mieux adapter la
productivité des terres irriguées est plus du
politique agricole à cet égard, notamment en
double de celle des terres consacrées à des
appuyant des ajustements permettant de faire
cultures sèches. En Afrique subsaharienne,
face aux chocs au niveau de la main-d’œuvre
seulement 4 % des superficies exploitées sont et d’assurer la transmission du savoir aux
irriguées, contre 39 % en Asie du Sud et 29 % orphelins. En Zambie, la diminution de la
en Asie de l’Est. Les changements climatiques population a été particulièrement notable
ayant pour effet d’accroître les incertitudes dans la catégorie des jeunes adultes ruraux :
qui caractérisent l’agriculture pluviale et de 19 % des ruraux de 15 à 24 ans en 1990, c’est-à-
réduire le ruissellement des eaux provenant dire la classe d’âge la plus productive, avaient
des glaciers, il sera de plus en plus essentiel disparu en 2000. Toutefois, l’agriculture pose
d’investir dans le stockage de l’eau. Malgré également des menaces pour la santé des
la pénurie croissante d’eau et l’augmentation populations rurales pauvres. L’irrigation peut
du coût des systèmes d’irrigation à grande accroître l’incidence du paludisme, et l’on
Abrégé 11

Figure 5 Les pays en développement imposent moins les produits agricoles exportables
Produits exportables Produits importables
Taux nominal de l’aide (%) Taux nominal de l’aide (%)
30 30 26 23
1980–84 2000–04 1980–84 2000–04
20 20 14 13 11
10
10 10
2
0 0
–10 –10
–13 –14 –20
–20 –19
–30 –29 –30

–40 –40
–46
–50 –50
Pays à vocation Pays en mutation Pays urbanisés Pays à vocation Pays en mutation Pays urbanisés
agricole agricole
Source : Anderson, à paraître.
Note : le taux nominal de l’aide mesure le rapport entre les prix à la production intérieure et les prix à la frontière, et prend aussi en
compte les subventions intérieures au titre des facteurs de production.

estime que les empoisonnements par pesticides Améliorer les incitations par les prix
sont la cause de 355 000 décès chaque année. et accroître la qualité et le volume des
Les maladies zoonotiques, comme la grippe investissements publics. De récentes
aviaire, qui se communiquent par la proximité réformes ont permis d’améliorer les incitations
des êtres humains et des animaux sont une par les prix offerts aux producteurs agricoles
menace croissante pour la santé humaine. des pays en développement, et ont réduit,
L’amélioration de la coordination des sans toutefois les éliminer, les distorsions
programmes agricoles et sanitaires pourrait des politiques qui pénalisent de longue date
avoir des résultats très favorables pour la l’agriculture. entre les périodes 1980-84
productivité et le bien-être. et 2000-04, le taux net d’imposition de
l’agriculture est tombé, en moyenne, de 28 %
Accroissement de la productivité à 10 % dans les pays à vocation agricole et
et de la durabilité de la petite de 15 à 4 % dans les pays en mutation tandis
que les pays urbanisés, qui faisaient l’objet
agriculture d’une protection marginalement négative
L’amélioration de la productivité, de la rentabilité jouissent à présent d’une protection nette de
et de la viabilité de la petite agriculture est le 9 %. Toutefois, la faiblesse de la charge fiscale
principal moyen de sortir de la pauvreté offert par nette masque la coexistence de mesures
une agriculture au service du développement. Que de protection de produits importables et
faudra-t-il faire pour y parvenir ? Un large éventail d’imposition de produits exportables (en
d’instruments d’intervention qui, pour la plupart particulier dans les pays à vocation agricole
doivent être employés de manière différente pour et en mutation) qui peuvent être notables
les petits producteurs commerciaux et pour les dans les deux cas (figure 5). Les pays en
agriculteurs de subsistance, peuvent : développement disposent donc d’une marge
• améliorer les incitations par les prix et accroître de manœuvre considérable pour réaliser de
la qualité et le volume des investissements nouveaux gains d’efficacité en réformant
publics (chapitre 4) leurs propres politiques commerciales. La
libéralisation des importations de denrées de
• améliorer le fonctionnement des marchés des
base peut également avoir un effet favorable
produits (chapitres 5 et 6)
sur les populations pauvres car, bien souvent,
• élargir l’accès à des services financiers et
la plus grande partie des pauvres, y compris
réduire le degré d’exposition à des risques non
assurés (chapitre 6) les petits fermiers, sont des acheteurs
nets de produits alimentaires. Toutefois,
• renforcer la performance des organisations de de nombreux vendeurs nets pauvres (qui
producteurs (chapitre 6) forment parfois le groupe pauvre le plus
• promouvoir l’innovation par le biais de la important) se retrouveront perdants, et des
science et des technologies (chapitre 7) programmes adaptés à la situation propre
• rendre l’agriculture plus durable et en faire de chaque pays devront être formulés pour
une source de services environnementaux faciliter le passage aux nouvelles réalités
(chapitre 8). du marché.
12 rapport sur le développement dans le monde 2008

À l’opposé, l’appui aux producteurs (investissements dans les biens publics et


dans les pays membres de l’Organisation réformes institutionnelles).
de coopération et de développement L’économie politique déterminera
économiques (OCDE) n’a guère baissé de le rythme et l’envergure des nouvelles
manière globale. Cet appui est tombé de 37 % mesures de réforme du commerce, des prix
de la valeur du revenu brut agricole en 1986-88 et des dépenses publiques. L’appartenance
à 30 % en 2003-05. L’appui directement lié à l’Organisation mondiale du commerce
aux prix des produits a diminué au profit (OMC) peut contribuer à encourager des
d’autres formes d’aide engendrant moins de réformes, et les médias locaux peuvent
distorsions comme les transferts de liquidités exposer les coûts imposés aux contribuables
« découplés » de la production, en particulier et l’incidence inégale des gains. Dans certains
dans l’Union européenne (UE). Ces transferts cas, il peut être efficace de négocier des
n’ont toutefois pas toujours un effet neutre compromis ou d’adopter des mécanismes de
sur la production car ils réduisent l’aversion dédommagement des perdants — comme
au risque (effet de patrimoine) et la variabilité cela été fait dans le cadre des réformes de
des revenus agricoles (effet d’assurance), la politique du riz au Japon, des mesures
et permettent aux banques d’accorder aux prises par l’Union européenne pour le sucre
agriculteurs des prêts qu’elles n’auraient pas et des réformes réalisées dans le domaine
effectués sans ces transferts. des produits alimentaires de base par le
Selon les estimations, une libéralisation Mexique dans les années 90. L’association de
totale des échanges aurait un impact réformes agricoles nationales à un éventail
relativement important sur le bien-être. plus large de mesures couvrant l’ensemble
L’abolition par les pays industriels de la de l’économie peut accroître leurs chances
protection dont ils jouissent actuellement se de succès, comme on a pu l’observer dans
traduirait par des gains de revenu pour les de nombreux pays en développement dans
pays en développement qui équivaudraient au les années 80 et 90 ; mais ces réformes sont
quintuple des flux annuels d’aide au titre de souvent incomplètes pour l’agriculture.
l’agriculture. Cet impact ne se ferait toutefois D’autres mesures de subvention, telles que la
pas sentir de la même manière pour tous les fourniture d’électricité gratuite aux fermiers
produits et dans tous les pays. Les estimations indiens, restent au point mort dans l’attente
montrent que, dans l’hypothèse d’une de l’aboutissement de négociations entravées
libéralisation totale du commerce, les cours par des intérêts clientélistes, ce qui a un
mondiaux des produits de base agricoles coût d’efficacité élevé et est préjudiciable à
augmenteraient en moyenne de 5,5 % mais l’environnement.
que cette hausse serait de 21 % pour le coton Les réactions engendrées par l’amélioration
et de 15 % pour les graines oléagineuses. Ces des incitations par les prix dépendent
chiffres sont particulièrement préoccupants des investissements publics consacrés à
pour les pays importateurs de produits l’infrastructure des marchés, aux institutions
alimentaires dont les ressources en devises sont et aux services d’appui. Il reste que les
très limitées, comme le Burundi, le Rwanda dépenses publiques sont souvent d’une piètre
et le Niger. Les pays pauvres exportateurs de qualité qu’il importe de relever. Dans certains
coton ou de graines oléagineuses, comme pays, les subventions non stratégiques
le Tchad, le Soudan, le Burkina Faso, le représentent jusqu’à la moitié du budget
Mali et le Bénin en revanche y gagneraient. de l’État pour l’agriculture. Pour pouvoir
Les principaux bénéficiaires d’une telle mobiliser un appui politique en faveur d’une
libéralisation seraient, notamment, le Brésil, meilleure utilisation des dépenses publiques
la Thaïlande et le Viet Nam. dans le secteur agricole, il faudra commencer
Il importe de conclure le plus rapidement par fournir plus d’information au public,
possible le cycle des négociations commerciales accroître la transparence des allocations
de Doha, en particulier pour éliminer les budgétaires, et réaliser des études d’impact.
distorsions, comme celles engendrées par les
subventions versées par les États-Unis au titre Améliorer le fonctionnement des marchés des
du coton, qui sont préjudiciables aux pays les produits et des intrants. Étant donné les
plus pauvres. Il sera nécessaire d’adopter des profondes transformations structurelles des
mesures et des programmes complémentaires marchés agricoles et l’arrivée de puissants
(y compris une aide à la facilitation des intervenants sur ces marchés, un problème
échanges) pour dédommager les perdants crucial se pose qui consiste à accroître la
(programmes de transfert) et permettre participation des petits agriculteurs et à veiller
aux petits agriculteurs de procéder à des que la croissance agricole puisse effectivement
ajustements rapides et équitables pour tirer contribuer à faire reculer la pauvreté. Les
parti des nouveaux avantages comparatifs options diffèrent selon les marchés.
Abrégé 13

Figure 6 La demande intérieure et la demande d’exportation de produits à forte valeur ajoutée des pays en
développement augmentent rapidement
Consommation intérieure Exportations
Indice, 1980 = 100 Indice, 1980 = 100
350 350
300 300
250 250
200 200
150 150
100 100
50 50
0 0
1980 1985 1990 1995 2000 2005 1980 1985 1990 1995 2000 2005

Viande Horticulture Céréales Viande Horticulture Graines oléagineuses


Exportations traditionnelles
Source : http://faostat.fao.org, consulté en juin 2007, et http://comtrade.un.or

Les marchés des denrées alimentaires de associés à la volatilité des prix, et il continue
base. Une réduction des coûts de transaction d’être important, dans ces pays, de maintenir
et des risques sur les marchés des denrées des filets de protection efficaces jusqu’à ce que
alimentaires peut promouvoir une accélération les niveaux de revenus augmentent ou que la
de la croissance et profiter aux populations performance du marché s’améliore.
pauvres. Outre les investissements dans
l’infrastructure, certaines innovations sont Les exportations de produits traditionnels.
prometteuses comme les bourses de produits de La longue évolution à la baisse des cours
base, les systèmes de diffusion d’informations mondiaux du marché de produits d’exportation
sur le marché par l’intermédiaire des radios traditionnels comme le café et le coton
rurales et des services de messages courts, les menace les moyens d’existence de millions
récépissés d’entrepôt et les instruments de de producteurs. La réduction des taxes et
gestion des risques fondés sur le marché. la libéralisation des marchés d’exportation
L’un des problèmes les plus épineux ont permis de relever les revenus dans de
qui se posent sur les marchés des denrées nombreux contextes. Toutefois, un nouveau
alimentaires consiste à déterminer comment rôle est dévolu aux pouvoirs publics sur ces
gérer la volatilité des prix de produits de marchés libéralisés, qui consiste notamment à
base sensibles sur le plan politique dans les réglementer des activités de commercialisation
pays où ils représentent une partie élevée équitables et efficaces. On a pu observer,
des dépenses de consommation. Lorsqu’un dans ces conditions, une augmentation des
produit de ce type est exportable, il peut être quantités produites et de la qualité, comme en
possible de négocier des contrats à terme sur Zambie où la production de coton a triplé. Il
le marché boursier pour gérer les risques au est aussi crucial d’accroître la productivité des
niveau des prix comme le font les pays ou les exportations, ainsi qu’en témoignent les bons
négociants d’Afrique australe qui opèrent sur résultats récemment affichés par le Ghana pour
la bourse de commerce sud-africaine. Il est le cacao. Des produits de meilleure qualité et
également possible de faciliter la gestion des un commerce équitable peuvent être la clé de
risques en ouvrant davantage les frontières et nouveaux débouchés plus rémunérateurs pour
en encourageant le commerce privé, comme certains petits producteurs.
en témoignent les bons résultats donnés par
la gestion des pénuries de riz à la suite des Les marchés des produits à forte valeur
inondations au Bangladesh en 1998. Toutefois, ajoutée. Les petits agriculteurs peuvent
la plupart des produits alimentaires de base aussi pénétrer dans une plus large mesure sur
cultivés dans les pays à vocation agricole ne les marchés à forte valeur ajoutée, qu’ils soient
sont qu’en partie échangeables, et de nombreux mondiaux ou intérieurs, notamment dans le
pays subissant de fréquents chocs climatiques cadre de la révolution des supermarchés qui
gèrent des réserves céréalières nationales dans a lieu dans de nombreux pays. Les marchés
le but d’atténuer l’instabilité des prix — avec de produits à forte valeur ajoutée pour la
des résultats mitigés. Les agriculteurs et les consommation intérieure sont les marchés
consommateurs de nombreux pays à vocation agricoles qui se développent le plus rapidement
agricole sont encore exposés à des risques élevés dans la plupart des pays en développement,
14 rapport sur le développement dans le monde 2008

où ils augmentent de 6 % à 7 % par an grâce, l’entrée de distributeurs privés sur les marchés
principalement, aux produits de l’élevage et à des facteurs de production.
l’horticulture (figure 6). Les fruits et légumes Les subventions accordées au titre des
frais et transformés, les poissons et les produits facteurs de production agricole doivent, comme
de la pêche, la viande, les noix, les épices et les autres subventions, être utilisées avec
la floriculture constituent à présent 43 % des prudence car elles ont un coût d’opportunité
exportations agroalimentaires des pays en élevé en termes de biens publics productifs et
développement qui, en 2004, se sont chiffrées de dépenses sociales, et elles risquent d’être
à environ 138 milliards de dollars. La part des capturées par des intérêts politiques et d’être
ventes de détail de produits agricoles imputable irréversibles. Toutefois, un recours judicieux
aux supermarchés s’accroît parallèlement à aux subventions peut permettre de circonscrire
l’augmentation des revenus — et atteint 60 % les risques de l’adoption de nouvelles
dans certains pays d’Amérique latine. technologies pour les innovateurs et d’obtenir
L’impact sur la pauvreté de l’expansion les économies d’échelle nécessaires sur les
des marchés de produits à forte valeur ajoutée marchés pour réduire les prix des facteurs de
dépend de la façon dont la population rurale production. Il importe que les subventions
participe à ces marchés, qui peut être directe s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie
pour les producteurs (au Bangladesh, par globale d’amélioration de la productivité et
exemple) ou indirecte, par le biais du marché que des mesures crédibles aient été formulées
du travail (comme au Chili). L’accroissement en vue de leur élimination future.
de la participation des petits producteurs est
tributaire des infrastructures du marché, Élargir l’accès aux services financiers et
de l’amélioration des capacités techniques réduire le degré d’exposition à des risques
des agriculteurs, des instruments de gestion non assurés. Les contraintes financières
des risques et de la poursuite d’une action continuent d’être un problème généralisé
collective par l’intermédiaire d’associations de dans l’agriculture ; elles sont coûteuses,
producteurs. Le respect des normes sanitaires touchent les différents groupes de population
et phytosanitaires rigoureuses exigées sur les de manière inéquitable et réduisent gravement
marchés mondiaux soulève des difficultés l’aptitude des petits agriculteurs à soutenir
encore plus importantes. Pour y parvenir, il est la concurrence. Elles sont dues au fait que
nécessaire que des efforts soient conjointement ces producteurs ne possèdent pas d’actifs
déployés par le secteur public et le secteur qu’ils pourraient utiliser à titre de garantie
privé au niveau des politiques (législation sur (rationnement par le patrimoine) ou ne
l’innocuité des produits alimentaires), de la veulent pas offrir les actifs qu’ils possèdent en
recherche (évaluation des risques, bonnes garantie parce qu’ils en ont absolument besoin
pratiques), de l’infrastructure (installations pour assurer leur survie (rationnement par
de traitement des exportations), et de la le risque). L’élimination des lignes de crédit
supervision (veille sanitaire). spéciales ouvertes pour financer les activités
agricoles dans le cadre de programmes publics
Les marchés de facteurs de production. Les ou par des banques d’État a créé de graves
défaillances du marché, en particulier dans carences au niveau des services financiers,
le cas des semences et des engrais, continuent qui ne sont toujours pas comblées, pour
d’être très fréquentes en Afrique subsaharienne l’essentiel, malgré de nombreuses innovations
en raison du niveau élevé des coûts de institutionnelles.
transaction et des risques et de l’existence
d’économies d’échelle. Le faible taux Les finances rurales. La révolution de la
d’utilisation d’engrais est, pour cette raison, microfinance, qui donne accès au crédit
l’un des principaux obstacles à l’augmentation sans garantie formelle, a permis à des
de la productivité agricole dans cette région. millions de pauvres, des femmes surtout,
Étant donné le regain d’intérêt porté au d’emprunter mais le microcrédit ne couvre
subventionnement des engrais, il importe de pas la plupart des activités agricoles à
mettre l’accent sur la recherche de solutions l’exception de celles qui ont un cycle court
durables aux défaillances de marché. Parmi les comme le petit élevage et l’horticulture. La
mesures propices qui peuvent être prises pour gamme des produits financiers offerts aux
lancer les marchés de facteurs de production ruraux pauvres s’est néanmoins élargie pour
agricole figurent la fourniture ciblée de bons inclure l’épargne, les transferts monétaires,
d’achat pour permettre aux agriculteurs les services d’assurance et le crédit-bail. Par
d’acquérir des facteurs de production et suite du développement des chaînes de valeur
stimuler la demande sur les marchés privés, et intégrées et de l’agriculture sous contrat,
le financement de fonds de contrepartie pour les opérations d’intermédiation financière
couvrir certains coûts de démarrage associés à par le biais d’agents interconnectés sont
Abrégé 15

devenues plus courantes. Les technologies de souffrent de malnutrition à un âge précoce, ce


l’information réduisent les coûts de transaction qui a pour effet de transférer la pauvreté de
et le coût des prêts dans les régions rurales, par génération en génération.
exemple en permettant d’utiliser des cartes de Malgré de multiples initiatives, il n’a guère
crédit agricole pour acheter des facteurs de été possible de réduire les risques non assurés
production ou de conclure une transaction dans le contexte de la petite agriculture. Les
bancaire au moyen d’un téléphone cellulaire. mécanismes d’assurance gérés par l’État se
Les centrales des risques qui couvrent les sont révélés dans l’ensemble inefficaces. Les
institutions de microfinance et certaines des systèmes d’assurances indicielles conçus
banques commerciales aident aussi les petits pour couvrir les risques de sécheresse, qui
producteurs à exploiter la réputation qu’ils sont maintenant utilisés sur une plus grande
se sont faite en tant que microemprunteurs échelle dans le cadre d’initiatives privées,
pour obtenir des prêts plus importants sur notamment en Inde, peuvent réduire les
une base commerciale. Un grand nombre risques que courent les emprunteurs et les
de ces innovations en sont encore au stade prêteurs et débloquer le crédit agricole. Il
d’opérations pilote, et devront être évaluées est toutefois peu probable que ces initiatives
puis reproduites à une plus grand échelle avant atteignent une masse critique à moins qu’elles
d’avoir un impact réel sur la compétitivité des ne bénéficient de subventions, ne serait-ce que
petits agriculteurs. pour couvrir le coût de leur lancement.

La gestion des risques. L’ exposition à des Renforcer la performance des organisations


risques non couverts par une assurance — de producteurs. La poursuite d’action
catastrophes naturelles, graves problèmes collectives par les associations de producteurs
de santé, changements démographiques, peut permettre à ces derniers de réduire leurs
volatilité des prix et réorientation de l’action coûts de transaction sur le marché, d’avoir un
publique — impose de lourds coûts d’efficacité certain pouvoir d’intervention sur celui-ci
et de bien-être aux ménages ruraux. Pour gérer et d’être mieux représentés dans les forums
ces risques, les fermiers doivent renoncer à politiques nationaux et internationaux.
poursuivre des activités susceptibles de générer Pour les petits agriculteurs, l’appartenance
des revenus plus élevés. Vendre des actifs pour à une association de producteurs est le seul
survivre à un choc peut être très coûteux à moyen d’être compétitifs. Le nombre de ces
long terme parce que la décapitalisation (vente associations et de leurs adhérents a augmenté
en détresse de terres et d’animaux) a des effets avec une rapidité remarquable, souvent pour
irréversibles ou parce que l’acquisition de combler le vide laissé par le retrait de l’État des
nouveaux biens de production agricole ne peut activités de commercialisation, de fourniture
s’effectuer que très lentement. Par ailleurs, de facteurs de production et de crédit et pour
l’éducation et la santé des enfants peuvent profiter des ouvertures démocratiques qui
être compromises à long terme lorsque ceux-ci permettent à la société civile d’avoir un plus
large impact sur la gouvernance. entre 1982
doivent quitter l’école à la suite d’un choc ou
et 2002, le pourcentage de villages dotés
d’associations de producteurs est passé de
Figure 7 L’écart entre les rendements céréaliers
8 % à 65 % au Sénégal et de 21 % à 91 %
en Afrique subsaharienne et dans d’autres régions
s’est creusé au Burkina Faso. en Inde, Indian Dairy
Rendements, tonnes à l’hectare Cooperatives Network compte 12,3 millions
6 de membres, pour la plupart des ruraux sans
terre et des femmes, qui produisent 22 % de
5 l’approvisionnement total en lait du pays.
Malgré de nombreuses réussites, l’efficacité
4 des associations de producteurs est souvent
compromise par des restrictions juridiques,
3 le manque de capacités administratives,
la mainmise par les élites, l’exclusion des
2 pauvres et le fait que l’État ne les considère
pas comme de réels partenaires. Les bailleurs
1
de fonds et les autorités peuvent avoir une
contribution positive en ce domaine en
0
1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 facilitant l’application du droit d’organisation,
la formation de leaders, et l’habilitation des
Pays développés Asie du Sud membres opérant dans les conditions les plus
Asie de l’Est et Pacifique Afrique subsaharienne
précaires, en particulier les femmes et les
Amérique latines et Caraïbes
jeunes agriculteurs. Il reste toutefois difficile
Source : http://faostat.fao.org, consulté en juin 2007. de déterminer comment fournir cet appui
16 rapport sur le développement dans le monde 2008

aux organisations sans créer des relations de de plus haute valeur offrent de nouvelles
dépendance qui seront par la suite néfastes à possibilités au secteur privé de promouvoir
la performance. l’innovation dans la chaîne de valeur.
Pour saisir ces opportunités, il est souvent
Promouvoir l’innovation par le biais de la nécessaire de forger des partenariats entre le
science et des technologies. Le fossé du secteur public, le secteur privé, les agriculteurs
savoir se creuse entre les pays industriels et et la société civile au niveau du financement,
les pays en développement sous l’effet de la de la conception et de l’adaptation des
rapide augmentation de l’investissement innovations. Maintenant que la gamme des
privé dans la recherche et le développement options institutionnelles s’est élargie, il faudra
(R&D). Si l’on prend en compte aussi bien les déterminer plus précisément ce qui donne de
sources de financement publiques que privées, bons résultats dans les différents contextes.
la part du PIB agricole représentée par les Un autre problème se pose qui consiste à
investissements dans la R&D agricole dans les réduire les écarts de revenus et de productivité
pays en développement n’est que le neuvième entre les régions favorisées et les régions
de ce qu’elle est dans les pays industriels. défavorisées. Ces dernières ont besoin de
Pour réduire ce fossé, il importe de prendre meilleures technologies pour gérer les sols, les
des mesures pour donner la priorité à un ressources en eau et le bétail et pour établir
accroissement massif des investissements dans des systèmes agricoles plus viables et durables,
la R&D. Les investissements internationaux et notamment en utilisant des variétés culturales
nationaux à ce titre ont été très rentables dans plus résistantes aux organismes nuisibles, à
bien des cas, puisque le taux de rendement la maladie et à la sécheresse. En employant
interne moyen calculé pour 700 projets de des méthodes exploitant des processus
R&D évalués dans des pays en développement biologiques et écologiques, il peut être
de toutes les régions est de 43 %. Toutefois, possible de réduire le recours à des facteurs de
les défaillances des marchés et de la production externes, et surtout à des produits
gouvernance aux niveaux mondial et national chimiques agricoles. On peut citer à cet égard
se sont soldées par un sous-investissement les pratiques culturales anti-érosives, les
manifeste dans ce domaine et, de manière jachères améliorées, les cultures couvre-sol
plus générale, dans les systèmes d’innovation, d’engrais vert, la conservation des sols et la
surtout dans les pays à vocation agricole. lutte phytosanitaire fondée sur la biodiversité
Si les investissements dans la R&D agricole et la lutte biologique de préférence à l’emploi
ont triplé en Chine et en Inde au cours des de pesticides. La plupart de ces technologies
20 dernières années, ils n’ont augmenté que d’à revêtant un intérêt différent selon le lieu, leur
peine un cinquième en Afrique subsaharienne élaboration et leur adoption doit s’effectuer
(et ont même diminué dans la moitié des dans le cadre de démarches décentralisées
pays de la région) 5. Les pays africains sont et participatives, appuyées par une action
par ailleurs pénalisés par la spécificité de collective des fermiers et des communautés.
leurs caractéristiques agroécologiques, qui Les progrès révolutionnaires effectués
les empêche de profiter autant que d’autres dans le domaine de la biotechnologie
régions de transferts internationaux de pourraient procurer d’importants avantages
technologies et, pour nombre d’entre eux, par aux producteurs et aux consommateurs
leur petite taille qui les empêche de réaliser pauvres. Toutefois, les investissements actuels
des économies d’échelle dans la R&D agricole. dans ce domaine, qui sont essentiellement le
La stagnation des rendements céréaliers en fait du secteur privé et qui sont régis par des
Afrique subsaharienne qui est allée de pair intérêts commerciaux, ont un impact limité
avec la faiblesse des investissements dans la sur la productivité des petits producteurs du
R&D et celle des transferts internationaux monde en développement — à l’exception
de technologies s’est traduite par un des investissements dans le coton Bt en Chine
accroissement de l’écart entre les rendements et en Inde. La faiblesse des investissements
obtenus dans cette région et ceux affichés par publics dans les biotechnologies et la lenteur
le reste du monde (figure 7, page 15). Il est des progrès accomplis dans le domaine des
urgent, pour ces pays, que les investissements réglementations face aux risques que ces
et la coopération régionale en matière de R&D nouvelles technologies peuvent poser sur
s’accroissent très rapidement. le plan environnemental et alimentaire
Le faible niveau des dépenses n’est qu’une ont ralenti le développement d’organismes
partie du problème. De nombreux organismes génétiquement modifiés (OGM) qui
publics de recherche se heurtent à de graves pourraient aider les populations pauvres.
problèmes de leadership, de gestion et de Les opportunités que pourraient offrir ces
financement auxquels il importe de s’attaquer technologies ne seront pas saisies à moins
au plus tôt. Mais les marchés de produits que la communauté internationale de
Abrégé 17

développement n’accroisse considérablement Figure 8 L’agriculture et la déforestation contribuent dans une large mesure aux
son appui aux pays intéressés. émissions de gaz à effet de serre
Pourcentage du total des émissions de gaz à effet de serre
Rendre l’agriculture plus durable et en faire
63%
une source de services environnementaux.
60 Pays développés Pays en développement
L’empreinte écologique de l’agriculture est
importante, mais il existe de nombreuses
40
opportunités de la réduire. Depuis le Sommet
de la Terre à Rio en 1992, il est généralement 15%
20 11%
reconnu que le programme environnemental 7% 4%
est inséparable du programme, plus vaste, de
l’agriculture au service du développement. 0
Énergie Agriculture (non compris Déforestation Processus Déchets
enfin, l’avenir de l’agriculture est inéluctable- les changements des industriels
ment lié à une meilleure gestion de la base de modes d’utilisation
des sols)
ressources naturelles dont elle dépend.
Source : Équipe du Rapport sur le développement dans le monde 2008, sur la base des données de la Convention-
L’agriculture intensive comme l’agriculture cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, www.unfccc.int.
extensive se heurtent à des problèmes
environnementaux, bien que d’ordres La décentralisation de la gestion de l’irrigation
différents. L’intensification des cultures a aura plus de chances de porter ses fruits si les
engendré des problèmes environnementaux cadres juridiques définissent clairement les
qui tiennent à la réduction de la biodiversité, à rôles et les droits des groupes d’utilisateurs
une mauvaise gestion des eaux d’irrigation, à et si les capacités de gestion collective de
la pollution agrochimique et aux frais de santé l’irrigation s’accroissent.
et aux décès dus à des empoisonnements par Le recours à de meilleures technologies et à
pesticides. La révolution de l’élevage impose de meilleurs modes de gestion des facteurs de
aussi des coûts, en particulier dans les régions production agricole modernes peut également
à forte densité de population et dans les zones rendre l’agriculture pluviale plus viable sur
périurbaines, qui résultent de l’accumulation le plan écologique. Les pratiques culturales
des déchets animaux et de la propagation anti-érosives (zero tillage) comptent parmi
de maladies épizootiques comme la grippe les grandes réussites des 20 dernières années
aviaire. Les régions défavorisées souffrent de dans le domaine agricole. elles donnent de
la déforestation, de l’érosion des sols, de la bons résultats dans le cadre de l’agriculture
désertification et de la dégradation des terres commerciale en Amérique latine, des systèmes
de pâturage et des bassins versants. Dans de production blé-riz des petits producteurs
les hautes terres d’Afrique de l’est, l’érosion d’Asie du sud, et au Ghana. Dans les régions
des sols entraîne des pertes de productivité défavorisées, les approches communautaires
pouvant atteindre 2 à 3 % par an, en plus de de la gestion des ressources naturelles, comme
ses effets externes comme la sédimentation le programme de gestion des bassins versants
des réservoirs. dans la région turque de l’Anatolie de l’est
La solution consiste non pas à ralentir le sont très prometteuses. Les données provenant
développement agricole mais à rechercher d’une enquête menée dans 20 pays montrent
des systèmes de production plus durables qu’une participation active des femmes aux
et à accroître la fourniture de services activités des organisations communautaires a
environnementaux par l’agriculture. De pour effet d’accroître l’efficacité de la gestion
nombreuses innovations technologiques des ressources naturelles et la capacité à
et institutionnelles prometteuses peuvent résoudre les différends.
accroître la viabilité de l’agriculture à un Pour pouvoir gérer durablement les
prix minimum en termes de croissance et ressources, il faut en premier lieu établir un
de réduction de la pauvreté. Les stratégies de cadre incitatif adapté. L’adoption généralisée
gestion de l’eau dans les zones irriguées doivent de pratiques plus viables sur le plan écologique
améliorer la productivité de l’eau, satisfaire la est souvent compromise parce que les politiques
demande de tous les utilisateurs (y compris de prix et de subventionnement ne sont pas
l’environnement) et réduire la pollution de adaptées à la situation et que les externalités
l’eau et l’extraction écologiquement non viable ne sont pas gérées. Il importe de renforcer
des ressources souterraines. Ces stratégies sont les droits de propriété (par exemple dans les
tributaires de l’élimination des incitations parcs agroforestiers du Niger) et de fournir
au gaspillage de l’eau, de la dévolution de la des incitations de longue durée sous forme
gestion des ressources en eau à des groupes de d’avantages extra-agricoles (comme l’octroi
consommateurs locaux, de l’investissement de dons de contrepartie pour la conservation
dans de meilleures technologies et d’une des sols) pour promouvoir une bonne gestion
réglementation plus efficace des externalités. des ressources naturelles dans les zones de
18 rapport sur le développement dans le monde 2008

culture aussi bien intensive qu’extensive. Il mettre les systèmes culturaux des populations
faut réduire les incitations inappropriées qui pauvres à l’abri des variations climatiques en
encouragent l’extraction de ressources — particulier en Afrique subsaharienne, dans
comme le subventionnement de cultures les régions de l’Himalaya et dans les Andes.
consommant beaucoup d’eau qui exigent un Conformément au principe du pollueur
pompage excessif des eaux souterraines. payeur, c’est aux pays riches qu’il incombe
Les réformes sont souvent délicates à de dédommager les pauvres du coût de
mener sur le plan politique. Les progrès l’adaptation. Jusqu’à présent, les engagements
technologiques, comme ceux qui permettent pris à l’échelle mondiale pour financer les
de mesurer précisément les volumes d’arrosage fonds d’adaptation existants sont restés sans
(télédétection), l’amélioration de la qualité commune mesure avec les besoins.
des services d’irrigation et le renforcement de L’agriculture et la déforestation dans
l’obligation de rendre compte aux utilisateurs les pays en développement sont également
de l’eau peuvent avoir pour effet de générer d’importantes sources d’émissions de gaz
un appui politique à des réformes jusque-là au à effet de serre : selon les estimations, elles
point mort. contribuent pour 22 %, voire même jusqu’à
La rémunération des services environne- 30 %, au total des émissions, et plus de la moitié
mentaux peut contribuer à remédier aux de cette contribution résulte d’un processus
défaillances de marché au niveau de la gestion de déforestation provoqué en grande partie
des externalités environnementales. La par l’empiètement des cultures sur les zones
protection des bassins versants et des forêts forestières (13 millions d’hectares sont déboisés
sont sources de services environnementaux chaque année à l’échelle mondiale) (figure 8,
(eau de boisson salubre, alimentation régulière page 17)6. Les mécanismes d’échange de droits
en eau des systèmes d’irrigation, piégeage du d’émissions — surtout si leur portée est élargie
carbone, et protection de la biodiversité) dont de manière à inclure l’octroi de financements
la prestation devrait être rémunérée par le biais au titre des déboisements évités et du piégeage
de paiements effectués par les bénéficiaires de carbone dans le sol (par exemple grâce
de ces services. Ce type de mécanisme aux pratiques culturales anti-érosives) —
génère de plus en plus d’intérêt, surtout en offrent d’importantes perspectives encore
Amérique latine. Au Nicaragua, l’obligation inexploitées de réduire les émissions associées
de paiement a entraîné une réduction de aux changements des modes d’utilisation des
plus de 50 % des superficies de pâturage sols dans l’agriculture. Certaines améliorations
dégradées ou consacrées à des cultures apportées aux pratiques de gestion des terres et de
annuelles au profit du sylvopastoralisme, et l’élevage (par exemple, les pratiques anti-érosives
cette conversion a été réalisée pour moitié et l’agroforesterie) permettent souvent de gagner
par des producteurs pauvres. La certification sur tous les tableaux : une fois les investissements
écologique des produits permet également aux initiaux effectués, elles peuvent déboucher sur
consommateurs de payer pour une gestion des systèmes agricoles plus productifs et plus
écologiquement durable, par exemple dans le viables sur le plan écologique.
cadre du commerce équitable ou de la culture
du café sous ombrage. Les biocarburants — sources d’opportunités et
de défis. La production de biocarburants,
Il est urgent de faire face aux changements encouragée par le coût élevé de l’énergie,
climatiques. Les populations pauvres offre de nouvelles opportunités prometteuses
tributaires de l’agriculture sont les plus d’atténuer les changements climatiques et de
exposées aux changements climatiques. créer de vastes débouchés pour l’agriculture.
Le nombre croissant de mauvaises récoltes Toutefois, seul un petit nombre des programmes
et de décès d’animaux d’élevage causent actuels de biocarburants sont viables sur le plan
déjà de lourdes pertes économiques et économique, et beaucoup posent des risques
compromettent la sécurité alimentaire dans sur le plan social (augmentation des prix des
différentes régions d’Afrique subsaharienne ; denrées alimentaires) et environnemental
la situation s’aggravera considérablement au (déforestation). Jusqu’à présent, la production
fur et à mesure du réchauffement de la planète. de biocarburants des pays industrialisés s’est
L’accroissement de la fréquence des épisodes développée grâce à la forte protection tarifaire
de sécheresse et des pénuries d’eau pourraient de ces produits et au versement d’importantes
dévaster de grandes parties des zones subventions. De telles mesures sont
tropicales et entraver l’approvisionnement en préjudiciables aux pays en développement qui
eau d’irrigation et de boisson de communautés sont, ou pourraient devenir, des producteurs
déjà pauvres et vulnérables. La communauté efficaces pour de nouveaux marchés
internationale doit sans plus attendre accroître d’exportation rentables. Les consommateurs
l’envergure de l’appui qu’elle fournit pour pauvres payent aussi les produits alimentaires
Abrégé 19

de base plus cher parce que les cours des Figure 9 Les quatre objectifs du plan d’action pour une agriculture au service du
céréales sur les marchés mondiaux augmentent développement forment un losange
sous l’effet direct de la réaffectation des céréales Conditions préalables
à la production de biocarburants ou sous l’effet Fondamentaux macroéconomiques
indirect de la reconversion des terres et, partant, Gouvernance
de la réduction des superficies consacrées à la Contexte socio-politique
production alimentaire.
1
Le Brésil est le producteur de biocarburants Élargir l’accès aux
le plus important et le plus efficace en raison Demande marchés et mettre Demande
du faible coût de sa production de canne à de produits en place des chaînes de produits agricoles
sucre. Mais il est probable que peu d’autres agricoles de valeur efficaces et non agricoles
pays en développement pourront produire
efficacement des biocarburants en l’état actuel 4
des technologies. Les politiques adoptées dans 2 Accroître le nombre
Accroître la Voies de sortie d’emplois dans
le domaine des biocarburants doivent donner compétitivité des de la pauvreté l’agriculture et dans
lieu à la formulation de réglementations ou de petits producteurs et Petite agriculture, emploi l’économie rurale non
Effets de salarié, migration Effets de agricole et relever les
systèmes de certification pour atténuer l’impact faciliter l’entrée sur
revenu revenu niveaux de compétence
de l’empreinte écologique de la production de le marché
ces produits, qui pourrait être importante. Il
faudra accroître les investissements publics et 3
privés dans la recherche pour concevoir des Transition vers Améliorer les moyens Transition vers
le marché d’existence offerts par le marché
processus de production plus efficaces et plus
l’agriculture de
durables faisant appel à des produits autres que subsistance et les
des denrées alimentaires de base. emplois ruraux peu
qualifiés
Au-delà des activités agricoles : Source: Équipe du Rapport sur le développement dans le monde 2008.
une économie rurale dynamique
et les compétences nécessaires pour plus d’emplois dans l’agriculture et dans
en faire partie l’économie rurale non agricole. Une économie
rurale non agricole dynamique se caractérise
La création d’emplois ruraux. Étant donné fondamentalement par une agriculture
la rapidité de la croissance démographique en rapide expansion et un bon climat de
rurale et la faiblesse du taux d’accroissement l’investissement. Il est absolument essentiel
des emplois agricoles, la création d’emplois dans d’établir des liens entre l’économie locale
les espaces ruraux pose un défi considérable et des marchés plus vastes en réduisant les
qui ne reçoit pas l’attention qu’il mérite. entre coûts de transaction, en investissant dans
45 % et 60 % des actifs ruraux sont employés les infrastructures et en offrant des services
en tant que main-d’œuvre agricole ou dans le commerciaux et des informations sur le
cadre de l’économie rurale non agricole en Asie marché. Les grappes d’entreprises à vocation
et en Amérique latine. Ce n’est qu’en Afrique agricole — formées par des entreprises d’une
subsaharienne que l’activité agricole pour même région coordonnant leurs activités
compte propre reste le mode d’activité pour fournir leurs services sur une base
dominant des actifs ruraux, en particulier pour concurrentielle à des marchés dynamiques —
les femmes. Mais cette région sera, elle aussi, obtiennent de bons résultats, comme
confrontée au problème de l’emploi rural par suite en témoignent les activités axées sur les
de la rapide croissance démographique rurale et exportations non traditionnelles dans la vallée
de la diminution des superficies des fermes. de San Francisco au Brésil et la production
Le marché du travail rural offre des laitière au Pérou et en Équateur.
possibilités d’emploi aux populations rurales Le problème fondamental consiste à aider
dans le cadre de la nouvelle agriculture et du les populations rurales à accéder à des emplois
secteur rural non agricole. Les opportunités mieux rémunérés. Il faudra mettre en place des
sont toutefois meilleures pour les individus réglementations du travail qui permettront de
qualifiés de sorte que les femmes, qui sont faire passer une plus grande proportion des
moins instruites, se trouvent en position travailleurs ruraux dans le secteur formel et
de faiblesse. Quant à la migration, elle peut d’éliminer la discrimination entre les hommes
permettre à des travailleurs qualifiés et bien et les femmes. Il est possible d’améliorer le
préparés de progresser le long de l’échelle des niveau d’instruction, les compétences et
revenus ou bien ne contribuer qu’à déplacer la l’esprit d’entreprise — en donnant aux parents
pauvreté de l’espace rural à l’espace urbain. les incitations nécessaires pour qu’ils assurent
L’action que doivent mener en priorité une meilleure éducation à leurs enfants, en
les pouvoirs publics consistera à créer améliorant la qualité des écoles et en offrant
20 RAPPORT SUR Le DÉVeLOPPeMeNT DANS Le MONDe 2008

Figure 10 En Afrique subsaharienne, la croissance agricole s’est accélérée parallèlement à l’amélioration


des conditions macroéconomiques
Score macroéconomique Taux de croissance agricole, pourcentage annuel
10 6

5
8
4
6 3

4 2

1
2 1984–1995
0 1995–2005
0 –1
1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 –0,2 0 0,2 0,4 0,6
Variation annuelle moyenne du score macroéconomique
Source : Équipe du Rapport sur le développement dans le monde 2008, sur la base du International Country Risk Guide,
http://icrgonline.com
Note : le score macroéconomique est la moyenne des scores relatifs à l’équilibre budgétaire, l’inflation et la stabilité du taux
de change. Chaque point représente un pays.

des opportunités d’éducation adaptées aux Par suite de la réorientation des programmes
marchés du travail émergents. gouvernementaux et des bailleurs de fonds
observée au cours des 20 dernières années
La fourniture de filets de sécurité. Il est qui privilégie l’octroi de transferts en
possible d’accroître l’efficacité et le bien- tant qu’instruments de la réduction de la
être en accordant une aide sociale aux pauvreté, et l’attention croissante accordée
groupes de populations chroniquement ou à l’évaluation d’impact, l’on sait beaucoup
temporairement pauvres. Les gains d’efficacité mieux aujourd’hui comment cibler et calibrer
peuvent résulter d’un abaissement du coût de ces programmes pour en accroître l’efficacité.
la gestion des risques et d’une diminution du
risque de décapitalisation à la suite de chocs. Quelle est la meilleure manière
L’amélioration du bien-être tient, quant à elle, à
l’aide fournie aux populations chroniquement
d’exécuter les plans d’action
pauvres sous forme d’aide alimentaire ou de pour mettre l’agriculture au
transferts monétaires. Au Brésil, en Afrique service du développement ?
du Sud et dans la plupart des pays d’europe et Pour poursuivre un plan d’action afin de met-
d’Asie centrale, les caisses de retraite rurales tre l’agriculture au service du développement,
non contributives assurent une protection un pays doit nécessairement définir ce qu’il
aux personnes âgées, permettent de transférer lui faut réaliser et la manière de le faire. Pour
plus tôt les terres aux générations suivantes et déterminer ce qu’il faut faire, il lui faut repla-
soulagent les personnes ayant un emploi du cer l’action publique dans un cadre défini par
fardeau financier que constitue le soutien aux le comportement des agents — les producteurs
personnes âgées. Ces mesures se sont avérées et leurs organisations, la participation du sec-
avoir des retombées positives importantes sur teur privé dans les chaînes de valeur, et l’État.
l’état de santé et le niveau d’instruction des Pour avoir les moyens d’y parvenir, il faut une
petits-enfants des bénéficiaires des caisses gouvernance efficace qui permet de mobiliser
de retraite. l’appui politique et les capacités d’exécution
Les filets de sécurité comme les programmes requises, dans ce cas encore compte tenu du
combinant aide sociale et travail garanti et comportement des agents — l’État, la société
l’aide alimentaire ou les payements en espèces civile, le secteur privé, les bailleurs de fonds et
ont également une fonction d’assurance en les institutions mondiales.
ce sens qu’ils protègent les plus vulnérables
en cas de choc. Ces programmes doivent être La définition d’un plan d’action
organisés de manière à ne pas compromettre pour une agriculture au service
le fonctionnement du marché local du travail du développement
et de l’économie alimentaire, et à ne pas Ouverture et élargissement des voies de
inciter les bénéficiaires à ne pas travailler, sortie de la pauvreté. Les ménages ruraux
mais au contraire à faire parvenir une aide à poursuivent un ensemble d’activités agricoles
ceux qui en ont le plus besoin « juste à temps ». et non agricoles qui leur permet d’exploiter
Abrégé 21

les différentes compétences de leurs membres formuler un programme présentant les


et de diversifier leurs risques. Il existe diverses caractéristiques suivantes :
portes de sortie de la pauvreté, à savoir la
petite agriculture, l’emploi salarié dans
• Les conditions préalables sont remplies.
Il faut que la paix sociale règne, que la
l’agriculture, l’emploi salarié ou l’emploi pour gouvernance soit satisfaisante et que les
compte propre dans le cadre de l’économie fondamentaux macroéconomiques soient
rurale non agricole et le départ des espaces solides, sans quoi il ne sera possible de
ruraux. Ou encore une combinaison de ces mettre en œuvre efficacement que des
différentes possibilités. Les disparités dans parties très limitées d’un programme
l’accès aux actifs et les contraintes à la mobilité agricole. Or ces conditions préalables
entre hommes et femmes sont d’importants n’étaient souvent pas remplies dans les
facteurs déterminants des voies de sorties qui pays à vocation agricole jusqu’au milieu
peuvent être empruntées. des années 90, en particulier en Afrique
Pour que l’agriculture puisse plus subsaharienne.
eff icacement appuyer une croissance
durable et réduire la pauvreté, il faut, au
• Tous les objectifs sont pris en compte. Le
programme cible les quatre objectifs du
départ, un climat socio-politique favorable, losange dans des proportions qui sont
une gouvernance adéquate et de solides fonction du contexte national, et il précise
fondamentaux macroéconomiques. Il faut les indicateurs qui permettront de suivre
ensuite définir, pour chaque catégorie et d’évaluer les progrès en direction de
de pays, un programme axé sur une chaque objectif de l’action publique.
combinaison de quatre grands objectifs
— représenté par le losange de l’action
• Les programmes sont différenciés. Les
programmes diffèrent selon les catégories
publique (figure 9, page 19) : de pays, étant donné les différentes priorités
• Premier objectif : élargir l’accès aux et conditions structurelles dans les trois
marchés et mettre en place des chaînes de mondes agricoles. Les programmes doivent
valeur efficaces également être adaptés plus précisément
aux conditions propres à chaque pays pour
• Deuxième objectif : accroître la
devenir une stratégie agricole nationale
compétitivité des petits producteurs et
bénéficiant d’une large participation des
faciliter l’entrée sur le marché
parties prenantes.
• Troisième objectif : améliorer les moyens
• Les programmes sont durables. Les
d’existence offerts par l’agriculture de
programmes doivent être écologiquement
subsistance et les emplois ruraux peu
durables de manière à non seulement
qualifiés
réduire l’empreinte écologique de
• Quatrième objectif : accroître le nombre l’agriculture mais aussi promouvoir une
d’emplois dans l’agriculture et dans future expansion agricole.
l’économie rurale non agricole, et relever
les niveaux de compétence. • Les mesures préconisées sont faisables.
Pour pouvoir être mis en œuvre et avoir
Un pays souhaitant mettre l’agriculture un impact sensible, les politiques et les
au service de son développement devra programmes doivent être faisables sur le

Figure 11 Les disparités entre les revenus urbains et ruraux s’accroissent dans la plupart
des pays en mutation
Revenu médian rural/revenu médian urbain
4

Année initiale Année finale


3

0
Guatemala Thaïlande Cambodge Chine Viet Nam Indonésie Bangladesh Inde Pakistan
1989–2002 1990–2002 1997–2004 1985–2001 1992–2001 1993–2002 1991–2000 1989–99 1999–2001
Source : Équipe du Rapport sur le développement dans le monde 2008, à partir d’enquêtes auprès des ménages représentatives sur
le plan national.
22 rapport sur le développement dans le monde 2008

plan politique, réalisables avec les capacités de la formation, de sorte qu’il est important de
administratives existantes et avoir un coût promouvoir l’intégration régionale. La faible
financier abordable. densité de population, qui accroît le coût de la
fourniture de services d’infrastructure, et les
Pour les pays à vocation agricole : assurer la pertes de ressources humaines dues au VIH/
croissance et la sécurité alimentaire. Les SIDA sont également des obstacles.
pays d’Afrique subsaharienne comptent Le programme pour l’Afrique subsaharienne
plus de 80  % des ruraux des pays à vocation consiste à accélerer la croissance en améliorant
agricole. Dans ces pays, qui se caractérisent la compétitivité des petits producteurs dans
par le caractère souvent non échangeable de les zones ayant un potentiel moyen et fort, qui
leurs denrées alimentaires et par l’avantage affichent les rendements à l’investissement
comparatif qu’ils détiennent dans les secteurs les plus élevés, tout en veillant aux moyens
primaires, ce sont les gains de productivité d’existence et à la sécurité alimentaire des
agricole qui doivent servir de base à la croissance agriculteurs de subsistance. Pour mettre
économique nationale et être l’instrument de l’agriculture en marche, il faut améliorer
la réduction de la pauvreté des masses et de l’accès aux marchés et mettre en place des
la sécurité alimentaire. Les pouvoirs publics chaînes de commercialisation modernes. Il
et la communauté internationale ont donc faut révolutionner la productivité surtout des
un défi considérable à relever, mais il n’est cultures de base des petits exploitants, mais
guère d’autre possibilité que de réussir dans aussi des produits d’exportation traditionnels
cette entreprise, et de nouvelles opportunités et non traditionnels. Il faut procéder à des
permettent de se montrer optimiste. investissements à long terme dans la gestion
Dans un contexte défini par l’amélioration des sols et de l’eau pour accroître la capacité
des conditions macroéconomiques et une d’adaptation des systèmes de culture, en
évolution favorable des cours des produits particulier pour les fermiers pratiquant une
de base en Afrique subsaharienne depuis le agriculture de subsistance dans des régions
milieu des années 90 (figure 10, page 20), la isolées et dans des conditions risquées. Et
croissance agricole s’est accélérée pour passer il faut tabler sur la croissance agricole pour
de 2,3 % par an dans les années 80 à 3,8 % entre lancer une économie rurale non agricole
2001 et 2005. La pauvreté rurale a commencé produisant des biens et services pour le marché
à reculer dans les régions en expansion — intérieur. Le programme doit prêter attention
mais la rapide croissance démographique a au rôle souvent prédominant des femmes
absorbé une grande partie des gains réalisés dans les activités agricoles, de transformation
de sorte que le taux de croissance agricole de produits agricoles et de commerce sur les
par habitant n’a augmenté que de 1,5 %. Il est marchés locaux.
maintenant possible d’accélérer la croissance Le plan d’action pour mettre l’agriculture
et de réduire la pauvreté mais il faudra pour au service du développement doit comporter
cela de la détermination, des compétences et quatre éléments distincts dans le contexte
des ressources. subsaharien. Premièrement, il importe de
Étant donné la diversité des conditions qui suivre une démarche plurisectorielle pour
règnent dans la région, l’Afrique subsaharienne exploiter les synergies entre les technologies
compte un grand nombre de systèmes de culture (semences, engrais, races animales), une
et de nombreux types de denrées alimentaires gestion durable des ressources en eau et du
de base, de sorte que l’augmentation de la sol, les services institutionnels (vulgarisation,
productivité devra suivre une trajectoire assurances, services financiers), et la
extrêmement différente de celle observée valorisation des ressources humaines
en Asie7. Bien que cette diversité complique (éducation, santé) — autant d’éléments
la mise au point de nouvelles technologies, qui sont liés au développement du marché.
elle offre de nombreuses opportunités Deuxièmement, les mesures visant à
d’innovation. La dépendance à l’égard de la promouvoir l’expansion agricole doivent être
hauteur des précipitations et de leur calendrier prises sur une base décentralisée de manière
se traduit par une plus grande vulnérabilité à être adaptées aux conditions locales. Des
aux chocs climatiques et limite le recours à approches communautaires, par exemple,
des technologies connues pour améliorer les devront être poursuivies, dans le cadre
rendements. Toutefois, il existe des possibilités desquelles les femmes, qui constituent la
considérables, à ce jour inexploitées, de stocker majorité des agriculteurs de la région, joueront
l’eau et de l’utiliser de manière plus efficace. un rôle prépondérant. Troisièmement, il est
Les pays de petite taille et sans accès à la mer nécessaire de coordonner les programmes entre
ne peuvent pas, seuls, réaliser les économies les pays de manière à élargir la taille du marché
d’échelle nécessaires sur les marchés des et de réaliser des économies d’échelle dans
produits et dans le domaine de la recherche et des services tels que la R&D. Quatrièmement,
Abrégé 23

Figure 12 Les pays à vocation agricole et les pays en mutation affichent de faibles scores
en matière de gouvernance
Score de la gouvernance
2,0

1,5

1,0

0,5

–0,5

–1,0
Voix et Stabilité Efficacité des Qualité du cadre État de droit Lutte contre
responsabilisation politique administrations réglementaire la corruption
publiques
Pays à vocation agricole Pays urbanisés
Pays en mutation Pays développés

Source : Kaufmann, Kraay et Mastruzzi 2006.

les programmes doivent donner la priorité à dans le reste du monde. Le plan d’action
la conservation des ressources naturelles et pour mettre l’agriculture au service du
à l’adaptation aux changements climatiques développement vise essentiellement à réduire
pour soutenir la croissance. les disparités entre les revenus ruraux et les
Pour pouvoir mener à bien ce programme, revenus urbains et à faire reculer la pauvreté
il faut que les pays opèrent dans des conditions rurale tout en évitant de tomber dans le piège
de stabilité macroéconomique, poursuivent des subventions et de la protection, problèmes
des politiques d’amélioration des incitations à face auxquels les réponses restent, à ce jour,
la production et au commerce, et accroissent très insuffisantes (figure 11, page 21). Les
considérablement leurs investissements publics pouvoirs politiques accordant une attention
— en particulier dans les infrastructures, les croissante à l’élargissement des disparités
routes et les télécommunications pour faciliter de revenu, de fortes pressions s’exercent
l’accès au marché, et dans la R&D pour prendre en faveur d’une meilleure utilisation de la
en compte les besoins associés aux cultures et capacité de l’agriculture à promouvoir le
aux agroécologies propres à l’Afrique, ainsi développement8.
que le propose le Nouveau partenariat pour le Dans ces pays, l’agriculture est presque
développement de l’Afrique. exclusivement le fait de petits producteurs.
Le récent essor de l’agriculture La superficie des fermes diminue rapidement
subsaharienne a tenu à l’amélioration des sous l’effet de pressions démographiques
incitations par les prix engendrée par des persistantes, au point que les producteurs qui
réformes macroéconomiques et sectorielles n’ont pas la possibilité de complémenter leurs
et l’augmentation des cours des produits de revenus en exerçant des activités non agricoles
base. Maintenant que les gains immédiats des peuvent ne plus être en mesure d’assurer leur
réformes des prix se sont matérialisés dans bien subsistance. L’accès aux ressources en eau fait
des pays, la croissance devra provenir dans l’objet d’une concurrence intense par suite
une plus large mesure d’une augmentation de l’augmentation des besoins des espaces
de la productivité. Les pouvoirs publics, le urbains et de la dégradation de la qualité des
secteur privé et les bailleurs de fonds sont eaux de ruissellement. Face à l’augmentation
actuellement plus disposés à investir dans des revenus non agricoles, des pressions
l’agriculture subsaharienne : une opportunité sont exercées pour qu’il soit remédié aux
existe qu’il ne faut pas manquer de saisir. disparités entre les revenus urbains et ruraux
par le versement de subventions, ce qui créée
Pour les pays en mutation : réduire les disparités un conflit d’usage des ressources budgétaires
entre les revenus ruraux et les revenus urbains qui a un coût d’opportunité très élevé en
et faire reculer la pauvreté rurale. Dans les termes de fourniture de biens publics et de
pays en mutation, qui comptent 600 millions satisfaction des besoins fondamentaux des
de ruraux pauvres et 2,2 milliards d’habitants populations rurales. D’un autre côté, remédier
dans leurs espaces ruraux, les secteurs non aux disparités des revenus en protégeant les
agricoles affichent une croissance sans égale importations aurait pour effet d’accroître
24 rapport sur le développement dans le monde 2008

le coût des denrées alimentaires des très alimentaires intérieurs modernes et l’essor
nombreux consommateurs pauvres qui sont des sous-secteurs agricoles pour nettement
des acheteurs nets d’aliments. réduire les dernières poches de pauvreté
En raison des pressions démographiques et rurale, qui sont tenaces et profondes. Les
des contraintes de superficies, le programme pays urbanisés, qui comptent 32 millions
établi pour les pays en mutation doit mobiliser de ruraux pauvres — représentant 39 %
simultanément tous les moyens de sortir de la de la population totale pauvre de ces pays
pauvreté : l’exploitation agricole, l’emploi dans — connaissent actuellement la révolution des
l’agriculture et dans l’économie rurale non supermarchés dans le commerce alimentaire
agricole, et la migration. Il existe de réelles de détail. Pour les petits producteurs, il est très
possibilités de conforter les revenus ruraux et difficile de soutenir la concurrence au niveau
d’éviter de tomber dans le piège des mesures de l’approvisionnement des supermarchés
de subvention-protection à condition de car il faut respecter des normes rigoureuses
pouvoir mobiliser l’appui politique nécessaire et réaliser des économies d’échelle au niveau
à cette fin. La rapide expansion de marchés de des livraisons, ce qui exige des associations
produits à forte valeur ajoutée — en particulier de producteurs efficaces9. Les inégalités
l’horticulture, le petit élevage, les poissons et foncières, exceptionnellement importantes en
les produits laitiers — offre une opportunité Amérique latine, font également obstacle à la
de diversifier les systèmes agricoles et de participation des petits producteurs.
développer une petite agriculture compétitive Élargir l’accès des petits producteurs aux
et à forte intensité de main-d’œuvre. Les actifs, et surtout à la terre, et leur permettre
marchés d’exportation des produits non de se faire mieux entendre au sein de sociétés
traditionnels sont également accessibles inégalitaires pourraient permettre d’accroître
parce que les pays en mutation jouissent d’un la taille et la compétitivité du secteur des
avantage comparatif dans les activités à forte petits exploitants. Au-delà de l’agriculture,
intensité de main-d’œuvre et de gestion. De l’aménagement du territoire vise à
nombreux pays affichent des taux de pauvreté promouvoir l’emploi local en établissant
élevés dans leurs régions défavorisées qui ont des liens entre les exploitations agricoles
besoin de meilleures infrastructures et de et l’agroindustrie rurale ; il faudra mieux
technologies adaptées. comprendre les tenants et les aboutissants
Pour lutter contre le chômage rural, des expériences menées avant de les répéter
il importe de poursuivre un objectif sur une plus grande échelle. L’expansion
supplémentaire qui consiste à promouvoir un de l’agriculture contribuera de manière
secteur rural non agricole dynamique dans particulièrement importante à améliorer
les villes secondaires, qui sont à la jonction de le bien-être dans les poches de pauvreté qui
l’économie agricole et de l’économie urbaine. existent dans certaines régions jouissant d’un
La Chine a délocalisé ses industries dans des bon potentiel agricole. Dans les autres régions,
villes rurales et a donc diversifié les sources des il pourra être préférable d’opérer une sortie
revenus ruraux, en suivant une démarche que progressive de l’agriculture et de privilégier
pourraient imiter d’autres pays en mutation. l’offre de services environnementaux. Les
Dans tous les pays de cette catégorie, il faut agriculteurs de subsistance devront néanmoins
accélérer le rythme des transferts de main- continuer de tirer une partie de leurs moyens
d’œuvre vers les secteurs dynamiques de d’existence de l’agriculture pendant encore de
l’économie en effectuant des investissements nombreuses années.
considérables dans les qualifications de la
génération actuelle et de la suivante. Face Mise en œuvre d’un plan d’action
aux profondes transformations qu’implique pour mettre l’agriculture au service
cette restructuration, il est nécessaire que
des programmes assurent une protection du développement
sociale efficace aux ménages pour permettre Le plan d’action pour mettre l’agriculture au
à ces derniers d’assumer les risques posés par service du développement se heurte à deux
la poursuite de meilleures options. L’apport grands problèmes au niveau de l’exécution.
de solutions fructueuses au problème des Le premier consiste à gérer l’économie
disparités dans les pays en mutation pourrait politique des mesures agricoles conçues pour
entraîner une réduction considérable à la remédier aux distorsions engendrées par
pauvreté mondiale. l’action publique, au sous-investissement et
aux investissements injustifiés. Le deuxième
Pour les pays urbanisés : relier les petits consiste à renforcer la gouvernance en vue
producteurs aux marchés alimentaires de l’exécution des politiques agricoles, en
modernes et fournir de bons emplois. particulier dans les pays à vocation agricole et
L’objectif global pour ces pays consiste à en mutation où la gouvernance a un score très
exploiter la rapide expansion des marchés faible (figure 12, page 23).
Abrégé 25

C’est en grande partie parce qu’une attention en fournissant des biens publics essentiels, en
insuffisante a été portée à ces problèmes améliorant le climat de l’investissement pour
d’économie politique et de gouvernance que le secteur privé — ainsi qu’à l’amélioration de
plusieurs des grandes recommandations la gestion des ressources naturelles en offrant
du Rapport sur le développement dans le des incitations et en assignant des droits de
monde 1982 sur l’agriculture n’ont pas été propriété.
intégralement appliquées, notamment la Il importe au plus tôt que l’État renforce
libéralisation du commerce, l’augmentation ses capacités pour assumer ces nouveaux rôles
des investissements dans l’infrastructure et de coordination entre secteurs et travaille en
dans la R&D en Afrique, et l’amélioration de la partenariat avec le secteur privé et la société
prestation des services de santé et d’éducation civile pour pouvoir mettre en œuvre le plan
aux populations rurales. d’action pour une agriculture au service du
développement. Dans la plupart des pays, les
L’avenir est plus propice à une agriculture au ministères de l’Agriculture doivent procéder
service du développement. Les perspectives à de profondes réformes pour redéfinir leur
sont plus souriantes aujourd’hui qu’elles ne rôle et se doter de nouvelles capacités. De
l’étaient en 1982. Les distorsions négatives des nouveaux modèles commencent à apparaître.
politiques macroéconomiques à l’encontre de L’Ouganda a ouvert la voie en sous-traitant les
l’agriculture ont diminué grâce à la poursuite services de conseil agricole et en permettant
de réformes économiques de plus grande aux associations de producteurs d’intervenir
envergure. L’agriculture devrait bénéficier dans l’attribution des marchés.
d’autres réformes générales de la gouvernance
qui ont maintenant une haute priorité, comme Le renforcement de la société civile et de la
la décentralisation et la réforme de la gestion démocratie. Le « tiers secteur » — c’est-
du secteur public. Il est vrai que les réformes à-dire les communautés, les associations
visant spécifiquement à mettre l’agriculture de producteurs et autres organisations de
au service du développement n’ont pas encore parties prenantes, et les organisations non-
été mises en œuvre de manière généralisée. gouvernementales (ONG) — peut accroître
Il semble également que l’économie la représentation des ruraux pauvres et, ce
politique évolue en faveur de l’agriculture et du faisant, la gouvernance. Les associations
développement rural. Les organisations de la de producteurs peuvent donner du poids
société civile rurale et le secteur privé opérant politique aux petits exploitants et tenir les
dans les chaînes de valeur agricoles ont plus décideurs et les organismes d’exécution
de poids politique qu’en 1982. Les processus comptables de leurs actions en participant
de démocratisation et de prise de décision à la formulation des politiques agricoles, en
participatifs offrent aux petits agriculteurs et assurant le suivi du budget et en collaborant
aux ruraux pauvres davantage de possibilités à l’exécution des politiques. Au Sénégal,
de se faire entendre auprès des responsables le Conseil national de concertation et de
politiques. Le secteur privé agroindustriel coopération des ruraux, organisation faîtière
est devenu plus dynamique, en particulier d’associations de producteurs, participe
dans les pays en mutation et urbanisés. De activement à la formulation et à l’exécution
nouveaux et puissants intervenants se sont des politiques et des stratégies agricoles
introduits dans les chaînes de valeur agricoles, nationales. La liberté d’association, la liberté
qui ont un intérêt économique à promouvoir de la presse et les investissements dans
un secteur agricole dynamique et prospère et le capital social des associations rurales,
qui sont en mesure d’influencer les affaires y compris les organisations féminines,
politiques. Il est vrai que, à elle seules, ces revêtent de l’importance pour ces stratégies
conditions plus favorables ne permettent pas d’amélioration de la gouvernance au niveau
de garantir que l’agriculture jouera un rôle de la demande.
plus profitable au service du développement —
il faut aussi que les petits producteurs puissent Un ensemble de services centralisés
se faire entendre au niveau des politiques, et et décentralisés. En rapprochant le
que les responsables de l’action publique et gouvernement des ruraux, la décentralisation
les bailleurs de fonds saisissent les nouvelles offre la possibilité de prendre en compte les
opportunités qui s’offrent. aspects locaux et hétérogènes de l’agriculture,
en particulier pour la vulgarisation. Il ne
De nouveaux rôles pour l’État. Les défaillances faudrait pas, toutefois, que tous les services
de marché sont nombreuses, surtout dans les agricoles soient décentralisés car certains,
pays à vocation agricole, et il est nécessaire comme la recherche scientifique et la
que l’action publique permette d’obtenir les surveillance des maladies animales, peuvent
résultats sociaux souhaitables. L’État doit donner lieu à d’importantes économies
contribuer au développement des marchés — d’échelle. Il importe, au niveau des institutions
26 rapport sur le développement dans le monde 2008

décentralisées, d’empêcher la mainmise par plus importants et de meilleure qualité. Les


les élites locales et l’exclusion sociale souvent objectifs primordiaux pour le XXIe siècle
observées dans les sociétés agraires. En — éliminer la faim et la pauvreté, préserver
Inde, l’attribution systématique de certains l’environnement, assurer la sécurité et gérer
sièges à des femmes dans les conseils locaux la santé mondiale — ne pourront pas être
a permis de mieux cibler les investissements atteints sans l’agriculture. Le programme
publics sur des besoins particuliers de la agricole global comporte une multiplicité de
population féminine. Ailleurs, il a été possible facettes : l’établissement de règles équitables
de réduire la corruption grâce à des systèmes pour le commerce international, la conclusion
de suivi communautaires et des audits des d’accords sur les normes des produits et les
administrations publiques dont les résultats droits de propriété intellectuelle, la fourniture
sont diffusés par les médias, et grâce à de nouvelles technologies qui profitent
l’utilisation des technologies de l’information aux populations pauvres, la lutte contre les
et des communications pour tenir des dossiers externalités négatives comme les maladies
et échanger des informations. animales, la protection de la biodiversité
Le développement piloté par la mondiale, l’atténuation de l’impact des
communauté peut permettre d’exploiter le changements climatiques et l’adaptation à ces
potentiel des communautés rurales — leur changements.
savoir local, leur créativité et leur capital Les institutions mondiales créées au
social. La décentralisation et le développement XXe siècle pour traiter des questions agricoles
piloté par la communauté contribuent ont une mission strictement sectorielle
généralement à promouvoir un plan d’action de sorte que, malgré leurs nombreux
échelonné pour une agriculture au service du accomplissements, elles sont mal équipées
développement, commençant par les services pour faire face aux programmes interconnectés
de base et les biens publics, puis passant aux et plurisectoriels actuels. Il sera nécessaire de
activités génératrices de revenus une fois procéder à des réformes institutionnelles et
que les besoins les plus élémentaires ont été d’innover pour faciliter une coordination
satisfaits. Le développement territorial peut accrue entre les organismes internationaux
faciliter la gestion des projets économiques et entre ceux-ci et les nouveaux acteurs sur la
sur une plus grande échelle que ne le permet scène mondiale, notamment la société civile,
le développement piloté par la communauté. le secteur des entreprises et les organisations
philanthropiques.
L’amélioration de l’efficacité des bailleurs de Pour exécuter le programme mondial, il
fonds. Dans les pays à vocation agricole, faudra avoir recours à tout un ensemble de
les bailleurs de fonds ont une inf luence modalités institutionnelles. Les institutions
extraordinaire. Dans 24 pays d’Afrique spécialisées, comme le Groupe consultatif
subsaharienne, les contributions des bailleurs sur la recherche agricole internationale,
représentent au moins 28 % des dépenses de l’Organisation des Nations Unies pour
développement agricole — elles dépassent l’alimentation et l’agriculture, et le Fonds
même 80 % dans certains pays. Les stratégies international de développement agricole
agricoles pilotées par les pays et les stratégies peuvent prendre des engagements et fournir
de réduction de la pauvreté de plus vaste leur appui à long terme en améliorant leur
portée fournissent un cadre qui permet aux efficacité et en coordonnant mieux leurs
bailleurs de fonds d’aligner leur appui au actions entre elles. Des réseaux intersectoriels
secteur agricole et de coordonner leurs actions spécialisés dans un domaine précis peuvent
entre eux en se fondant sur les systèmes de permettre de répondre rapidement à tous les
dépenses publiques et de passation de marché cas d’urgence, par exemple pour lutter contre
pour assurer l’exécution du programme. Au la grippe aviaire, et de saisir de nouvelles
niveau régional, le Programme détaillé pour opportunités, comme la biofortification des
le développement de l’agriculture africaine aliments par le biais de cultures fortifiées par
établit les priorités pour assurer la coordination des micronutriments. Dans d’autres cas, il peut
des investissements des bailleurs de fonds. être plus efficace de prendre systématiquement
Bien que ces efforts nationaux et régionaux en compte les priorités mondiales, comme
constituent les cadres institutionnels de l’adaptation aux changements climatiques,
l’appui des bailleurs à l’agriculture, les progrès dans le cadre de l’accroissement de l’aide des
sont restés lents au niveau de l’exécution. bailleurs de fonds à l’agriculture. La poursuite
du programme mondial de l’agriculture au
La réforme des institutions mondiales. Le service du développement n’est pas uniquement
plan d’action pour l’agriculture au service du affaire d’intérêt propre, qui est très vaste dans
développement ne pourra pas être poursuivi le contexte de la mondialisation, elle aussi
en l’absence d’engagement internationaux affaire de justice et d’équité entre le monde
Abrégé 27

développé et le monde en développement et ainsi que des technologies permettant une


entre la génération actuelle et les générations utilisation durable des ressources naturelles.
futures. et il exige la mobilisation d’un appui politique,
de compétences et de ressources.
Et maintenant ? Comment passer Les pouvoirs publics et les bailleurs de
à l’action fonds s’accordent de plus en plus à reconnaître
Si le monde est déterminé à réduire la pauvreté que l’agriculture doit avoir une place plus
et à assurer une croissance durable, il lui prépondérante dans le programme de
faut exploiter les capacités de l’agriculture développement, que ce soit pour entraîner la
à promouvoir le développement. Il n’existe croissance dans les pays à vocation agricole
toutefois pas de remède miracle. Mettre ou pour réduire la pauvreté rurale et mener
l’agriculture au service du développement à bien le programme environnemental dans
est un processus complexe. Il exige de vastes les autres pays. Étant donné l’intérêt accru
consultations au niveau national, pour adapter qui est actuellement porté à la réalisation
les programmes et définir les stratégies d’investissements dans l’agriculture et les
d’exécution. Il exige une action concertée nouvelles opportunités de succès il est permis
entre le secteur agricole et les autres secteurs d’espérer que les plans d’action pour une
et avec les intervenants au niveau local, agriculture au service du développement iront
national et mondial. Il exige le renforcement de l’avant. Il ne faudrait pas laisser échapper
des capacités des petits producteurs et de leurs cette occasion car, si ces efforts sont couronnés
associations, des agroentreprises privées et de de succès, d’importants progrès seront faits en
l’État. Il exige des institutions capables d’aider direction des objectifs de développement pour
l’agriculture à promouvoir le développement le Millénaire et au-delà.

notes Kaufmann, Daniel, Aart Kraay, et Massimo Mastruzzi. 2006.


1. Les derniers chiffres sur la pauvreté rurale dans le monde se Governance Matters V: Aggregate and Individual Governance
rapportent à 2002. Indicators for 1996–2005. Washington : Banque mondiale.
2. Banque mondiale 1982. Ligon, ethan, et elisabeth Sadoulet. 2007. « estimating the effects
3. Dans la plupart du monde en développement, la catégorie des of Aggregate Agricultural Growth on the Distribution of expen-
petits producteurs est définie de manière à inclure les agriculteurs ditures. » Document de référence préparé pour le Rapport sur le
exploitant une ferme d’une superficie maximale de 2 hectares. développement dans le monde 2008.
4. Hayami 2005. Pardey, Philip G., Nienke M. Beintema, Steven Dehmer, et Stanley
5. Pardey et al. 2006. Wood. 2006. Agricultural Research: A Growing Global Divide?
6. La meilleure estimation de la contribution aux émissions Food Policy Report 17. Washington : Institut international de
des changements de mode d’occupation des sols (essentiellement recherche sur les politiques alimentaires.
la déforestation) s’établit à 20 %, l’intervalle de variation probable Ravallion, Martin, Shaohua Chen, et Prem Sangraula. 2007. « New
allant de 10 % à 30 % (Watson et al. 2000). evidence on the Urbanization of Global Poverty. » Document
7. Staatz et Dembele 2007. de référence préparé pour le Rapport sur le développement dans
8. Vyas 2007. le monde 2008.
9. Reardon et Berdegué 2006.
Reardon, Thomas, et Julio A. Berdegué. 2006. « The Retail-Led
Transformation of Agrifood Systems and Its Implications for
Bibliographie Development Policies. » Document de référence préparé pour le
Anderson, Kym, directeur de publication. À paraître, Distortions Rapport sur le développement dans le monde 2008.
to Agricultural Incentives: A Global Perspective. Londres Rosegrant, Mark W., Siwa Msangi, Timothy Sulser, et Claudia
et Washington : Palgrave Macmillan et Banque mondiale. Ringler. 2007. « Future Scenarios for Agriculture: Plausible
Banque mondiale. 1982. World Development Report 1982: Futures to 2030 and Key Trends in Agricultural Growth. »
Agriculture and Economic Development. (Rapport sur Document de référence préparé pour le Rapport sur le
le développement dans le monde 1982 : Agriculture développement dans le monde 2008.
et développement économique) New York: Oxford Staatz, John, et Niama Nango Dembele. 2007. « Agriculture
University Press. for Development in Sub-Saharan Africa. » Document de
———. 2006. World Development Indicators. Washington : référence préparé pour le Rapport sur le développement dans le
Banque mondiale. monde 2008.
Fan, Shenggen, directeur de publication. À paraître. Public Vyas, Vijay Shanker. 2007. « Marginalized Sections of Indian Agri-
Expenditures, Growth, and Poverty in Developing Countries: culture: The Forgotten Millions. » Institute of Development
Issues, Methods and Findings. Baltimore : Johns Hopkins Studies, Jaipur, Rajasthan, Inde.
University Press. Watson, Robert T., Ian R. Noble, Bert Bolin, N. H. Ravindranath,
Hayami, Yujiro. 2005. « An emerging Agriculture Problem David J. Verardo, et David J. Dokken. 2000. IPCC Special Report
in High-Performing Asian economies. » Étude présentée on Land Use, Land-Use Change and Forestry. Genève : Groupe
à la cinquième Conférence de Asian Society of Agricultural d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat
economists (Allocution du Président), Zahedan, Iran, (GIeC). Peut être consulté en ligne à http://www.grida.no/
29 août. climate/ipcc/land_use/index.htm.
Abrégé 29

Vous aimerez peut-être aussi