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Chapitre 22 Médias et opinion publique dans les grandes crises politiques en France
depuis l’affaire Dreyfus (chapitre 4 du livre p.118-149)
S’interroger sur le rôle des médias à l’occasion de grandes crises politiques en France depuis la fin
du XIXème pour comprendre quelles relations s’établissent entre les médias de masse et l’opinion
publique.
Que nous apprennent les grandes crises politiques françaises des rapports
entre les médias et l’opinion publique ?
8 grandes crises françaises à mettre en relation avec les médias pour comprendre le rôle qu’ils y
ont joué : à partir de l’analyse de ces crises vous compléterez le cours : vous verrez quel a été le
rôle de l’opinion publique et ce que ces crises ont eu comme répercussions sur la politique en
France
- Grands quotidiens populaires dominent (Le Petit Journal) = s’adaptent aux attentes des lecteurs
+ qu’ils ne cherchent à les influencer ; prudente neutralité politique, faits divers et divertissements
privilégiés
- presse d’opinion moins diffusée mais très influente, dépend de mouvements politiques et possède
un lectorat militant ; de l’extrême gauche socialiste (L’Humanité, 1904) à l’extrême droite
nationaliste (l’Action française) en passant par les radicaux (L’Aurore, 1897) et la droite (Le
Figaro).
- La 1ère Guerre mondiale établit la censure étatique et une grande partie de la presse est le principal
support du « bourrage de crâne » qui exalte le patriotisme et dénigre l’ennemi
> en 1918, près de la ½ des titres de presse disparaît par défiance de l’information véhiculée
- Années 1920 = diffusion de la radio sous monopole de l’Etat (ainsi Radio Mondial diffuse
depuis les colonies) car permet grâce au direct une plus grande réactivité dans la diffusion des
nouvelles (accords de Munich de 1938 annoncés 1h après signature, bien avant les quotidiens !)
Engouement réel pour la radio dans les années 30 : postes et auditeurs X10 entre 1930 et 1939 !
- Crise du 6 février 1934 (contexte de forte politisation de la presse et d’utilisation de la radio par
l’Etat) : p.124-125
Voir le reportage (muet !) de l’époque :
https://enseignants.lumni.fr/videos/liste?search=6%20f%C3%A9vrier%201934&fiche-
media=00000000900
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BILAN > crise politique avec démission du gouvernement Daladier dès le 7 février !
II - Radio puis télévision à la conquête des masses... sous contrôle de l’Etat (1940 – 1968)
En quoi les médias audiovisuels influencent-ils encore davantage l’opinion en lui permettant de
réagir aux crises politiques voire d’y interférer ?
- essor de la radio se poursuit après 1945 (10 millions de postes émetteurs en 1958, X2 depuis
1939) et confirme son rôle de légitimer les gouvernants (cf de Gaulle, doc 1 p136).
- cependant la télévision concurrence rapidement la radio et la presse surtout à partir des années
1960 (de 13% de foyers équipés en 1960, on passe à 52% en 1967 puis 71% en 1970 !) avec
notamment le journal télévisé (le 1er le 30 juin 1949) qui peu à peu devient 1 des 1ères sources
d’informations des Français. Les hommes politiques comprennent rapidement l’importance de
l’image et Charles de Gaulle puis ses adversaires le comprennent dès la 1 ère campagne présidentielle
de 1965.
Alors que les journaux qui ont servi Vichy ou l’occupant sont interdits, certains issus de la
Résistance continuent parfois (Combat d’Albert Camus), d’autres sont recréés (Le Figaro avec
François Mauriac) ou naissent (Le Monde d’Hubert Beuve-Méry avec le soutien de De Gaulle).
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Voir le reportage sur la création du Monde et sa crise en 1985 :
https://enseignants.lumni.fr/videos/liste?search=%C3%A9t%C3%A9%201985&fiche-
media=00000000529
La presse se renouvelle aussi dans son approche adoptant une approche type news magazines
américains où les reporters et la photo prennent + de place : ainsi Paris-Match, L’Express ou
France Observateur séduise un lectorat + jeune et + urbain. Cependant hausse prix journal +
concurrence télé causent une baisse significative des ventes dès fin années 40.
- A part les radios périphériques (RTL, RMC, Europe n°1), diffusées depuis l’étranger, la radio
comme la télévision sont sous le contrôle de régies (établissements publics) permettant à l’Etat de
contrôler l’information.
- Crise de mai 1958 : contexte marqué par poids grandissant des médias audiovisuels lors de
l’agonie de la IVème République en grande partie due à la guerre d’Algérie commencée depuis 4 ans
https://enseignants.lumni.fr/fiche-media/00000000068/le-13-mai-1958-et-ses-consequences-a-
paris-et-alger.html
regardez la vidéo et lisez bien la notice pour comprendre
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> crise de mai 1958 reflète clairement l’influence croissante des médias audiovisuels mais aussi
l’emprise renouvelée du pouvoir politique sur ces derniers ! Naissance Vème République et
retour au pouvoir de de Gaulle.
- Putsch du 22 avril 1961 : contexte de nouveau marqué par la guerre d’Algérie mais cette fois au
cœur de la Vème République et sous la présidence de de Gaulle, fervent utilisateur des médias
audiovisuels… Voir livre p.130-131
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BILAN > rôle primordial de la radio via le « transistor » qui accompagne heure après heure les
soldats, captant radio Alger mais surtout les ondes venues de métropole qui les convainquent de
rester fidèles à de Gaulle et à la république = « victoire du transistor » !
Voir allocution du général de Gaulle le 23 avril 1961 :
https://enseignants.lumni.fr/videos/liste?search=avril%201961&fiche-media=00000000089
De Gaulle renforce donc le contrôle de l’Etat sur l’audiovisuel, il préfère télévision et radio à la
presse écrite qu’il estime hostile à son égard : ORTF créé en 1964 qui a en charge le service
public de l’audiovisuel placé sous contrôle du ministre de l’Information, Alain Peyrefitte.
- Crise de mai 1968 : contexte de lassitude et de révolte de la nouvelle génération contre une
société jugée trop conformiste, trop consumériste et soumise à un pouvoir analysé comme usé et
trop conservateur, livre p.132-133, pour en savoir plus, vidéo à regarder :
https://enseignants.lumni.fr/videos/liste?search=mai%201968&fiche-media=00000000105
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BILAN > refus de l’ordre établi et soif de pluralisme et de liberté des médias pour une
expression plus libre et directe ; crise de mai 1968 montre les limites du contrôle des médias !
En quoi les nouveaux modes de communication liés aux écrans modifient-ils les rapports entre
l’opinion, les médias et la vie politique ?
- fin de l’ORTF en 1974 avec autonomie aux 3 chaînes de télévision ainsi qu’au groupe Radio
France, bien que l’audiovisuel reste un monopole de l’Etat, ce que conteste de plus en plus les
« radios libres » (cf p142).
- avec l’arrivée de la gauche au pouvoir pour la 1ère fois depuis la naissance de la Vème République,
fin du monopole d’Etat par la loi du 29 juillet 1982 : des centaines de stations sont libéralisées et
reçoivent en 1984 l’autorisation de vivre de la publicité = logique commerciale s’impose
désormais...
- le PAF (Paysage Audiovisuel Français) est gagné par la privatisation puisqu’après Canal+, 1 ère
chaîne privée (payante) autorisée en 1984, c’est au tour de La Cinq (1985) puis de TV6 (1986,
groupe Gaumont et NRJ) de devenir les 1ères chaînes privées gratuites en 1985. Quant à la 1 ère
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chaîne publique à plus forte audience, TF1, elle est privatisée au profit de l’entreprise de BTP
Bouygues en 1987 > concurrence féroce entre les chaînes où l’audimat, dont dépendent les recettes
publicitaires, devient les seuls réels arbitres aux dépens de la création culturelle...
- apogée de la télévision dans le système médiatique : en 1989, 96% des foyers ont un téléviseur,
75% des Français l’utilisent tous les jours et chaque Français passe environ 20h/semaine devant son
poste !
Le journal télévisé s’impose comme la principale source d’information des Français... bien que la
presse garde la primauté du journalisme d’investigation.
→ l’affaire du Rainbow Warrior (été 1985) : affaire d’Etat d’ampleur nationale et internationale
dans un contexte où les médias audiovisuels sont libéralisés et d’âge d’or du journalisme
d’investigation (années 1970-1980, avant la naissance d’Internet), livre p.138-139
Révélations sur la responsabilité des services secrets français dans l’attentat grâce au
journalisme d’investigation exercé par la presse écrite, Le Monde et la revue l’Express, les
journaux télévisés quant à eux diffusent en boucle quant à eux les images du sabotage...
Le Monde met en cause l’implication même du ministre des Armées Charles Hernu !
La presse française d’investigation est, pour une fois, saluée à l’étranger...
Ce sont les agents de la DGSE qui ont saboté le navire de l’ONG Greenpeace jugée trop
entreprenante dans sa campagne contre les essais nucléaires français dans le Pacifique...
Après avoir nié toute responsabilité, les révélations de la presse contraignent le Premier
ministre Laurent Fabius à renvoyer le directeur de la DGSE et le ministre des Armées
Charles Hernu démissionne
> journalisme d’investigation à l’origine d’une crise dans laquelle le gouvernement s’est largement
discrédité (tentative de dissimulation de la vérité) et à l’origine de relations diplomatiques très
tendues pour longtemps entre la France, Greenpeace et la Nouvelle-Zélande...
- les cibles des médias évoluent, la presse spécialisée comme les chaînes de télévision thématiques
(grâce au câble, au satellite ou à la TNT) concurrencent leurs consœurs généralistes.
→ crise du 21 avril 2002 : contexte du 1er tour des élections présidentielles de 2002 à l’issue du
septennat de Jacques Chirac et de la cohabitation menée avec Lionel Jospin (PS)... à l’heure où
jamais la couverture médiatique n’a été aussi plurielle (presse, radio, télévision mais aussi internet)
et marquée par une inflation des sondages d’opinion... Livre p.140-141
Le choc ressenti par les téléspectateurs s’explique par l’énorme surprise qu’est la présence du
candidat Front National au 2ème tour et l’éviction du candidat socialiste
Les Unes utilisent un vocabulaire très fort (« séisme », « bombe »...) et d’autres appellent
déjà à la résistance civique à l’aide d’un « NON »)
Les médias, et avant tout la télévision, sont jugés responsables de la victoire du FN en
n’ayant pas averti de ce danger et en accordant une trop grande place à l’insécurité et aux
sondages d’opinion qui se seraient focalisés sur un duel Chirac/Jospin et sans saisir la réalité
Une partie de la presse écrite semble pourtant avoir été beaucoup plus lucide dès janvier...
L’usage d’internet, alors en plein essor, permet de mobiliser rapidement entre les deux tours
en relayant les appels à faire barrage au FN, mais aussi fax et téléphones + quelques journaux
Bilan > Une crise politique de 1er plan qui souligne une opinion publique difficile à saisir et une
évolution des rapports, plus critiques et complexes, entre elle, les médias et la vie politique,
l’immense mobilisation orchestrée sur internet montre une réactivité nouvelle et explique aussi en
partie le score écrasant de Jacques Chirac au 2ème tour (82,2%).
On peut conclure sur des affaires plus récentes révélées par la presse comme celle de François
Fillon… qui montre que la presse a encore un rôle à jouer dans nos sociétés et qu’Internet ne
supplante pas toujours la presse écrite !