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FRAGILITÉ DES DÉMOCRATIES, TOTALITARISMES (1929-1939)

Rassemblement nazi à Nuremberg (1935)

Si le terme "totalitarisme" apparaît dans les années 1920 en Italie sous la plume d’opposants à
Mussolini, c'est principalement la philosophe Hannah Arendt ("les origines du totalitarisme", 1951)
qui lui donne son caractère scientifique. A partir de l'étude des régimes fasciste, nazi et stalinien, elle
définit le totalitarisme comme un régime politique à parti unique, n'admettant aucune opposition
organisée et dans lequel l'État tend à confisquer la totalité des activités de la société.

=> Quelles sont les caractéristiques des régimes totalitaires? Quels sont les points communs et les
différences entre les régimes allemand, italien et soviétique?

=> Quelles sont les conséquences de la mise en place des régimes totalitaires sur l'ordre européen?

I - GENÈSE ET AFFIRMATION DES RÉGIMES TOTALITAIRES

=> Comment les régimes totalitaires se sont-ils mis en place?

A - Un terreau commun : le traumatisme de la Première Guerre mondiale

La 1ère Guerre mondiale est un facteur essentiel dans l'apparition des régimes totalitaires en Europe.
En plus de voir persister la « culture de guerre » (violence, glorification de la nation et du sacrifice...),
le 1er conflit mondial entraîne une crise multiforme dans de nombreux pays.

1. La Révolution de février en Russie.

En Russie, la guerre est directement à l'origine de la prise de pouvoir par les bolcheviks de Lénine et
Trotsky.

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- Début 1917, les conditions de vie des civils sont désastreuses (hiver très dure, augmentation des prix,
rationnement, pénurie...) alors que sur le front l'armée russe, désorganisée et mal équipée subit des
défaites et voit l'Allemagne progresser sur son territoire. Les mutineries et les désertions se
multiplient sur le front ainsi que des grèves et des manifestations (pour du pain et la paix) à l'arrière.
- Le 23 février 1917, 200 000 personnes manifestent à Petrograd (Saint-Pétersbourg). Le tsar Nicolas II
veut faire cesser les désordres et ordonne aux troupes de tirer sur la foule. Les « 5 jours » de la
Révolution de février font ainsi chuter le tsar et l'empire, de manière spontanée et populaire.
- En décembre 1922, Lénine crée l’URSS, Union des républiques socialistes soviétiques, comprenant
alors la Russie, la Transcaucasie (Arménie, Géorgie, Azerbaïdjan), l ́ Ukraine et la Biélorussie.

2. L'Italie et la "victoire mutilée".

En Italie, les traités qui réorganisent l'Europe après la guerre sont mal acceptés par une partie de
l'opinion et le pays connaît une forte crise économique et sociale.

-L'Italie rejoint l'Entente en 1915 dans l'espoir de récupérer les terres dites "irrédentes" à l'Autriche. La
France et la Grande-Bretagne avaient en effet promis par le traité secret de Londres d’avril 1915, que
l'Italie bénéficierait de larges compensations territoriales ainsi qu'une zone d’influence en Asie
Mineure et en Afrique.
- Mais une fois la guerre achevée, ces promesses ne sont pas tenues et donnent l’impression d’une «
victoire mutilée ». Cela contribue à fragiliser la démocratie naissante et entretient une agitation
nationaliste (d'autant plus que le pays souffre d'un sentiment d'infériorité par rapport à ces voisins du
nord en raison de l'absence d'empire colonial et du faible développement industriel...).
- L'Italie d'après-guerre est enfin marquée par une grave crise économique et des mouvements sociaux
qui laissent craindre une révolution communiste.

L'Italie en 1920 : crise économique et terres irrédentes

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3. La crise allemande et le "coup de poignard dans le dos”.

Après sa défaite dans le premier conflit mondial, l'Allemagne connaît une crise profonde qui alimente
les mouvements extrémistes.

- Dés la fin du conflit, les mouvements nationalistes (dont le NSDAP) véhiculent l'idée fausse d'un «
coup de poignard dans le dos » pour déconsidérer la République de Weimar dont les responsables ont
signé l'armistice et accepté les conditions extrêmement dures du traité de Versailles. Le nouveau
régime est ainsi désigné comme un régime de « traîtres » et de « faibles ».
- Le traité de Versailles (1919), qui règle le sort de l'Allemagne vaincu, est largement vécu comme une
humiliation par les allemands (on parle à l'époque de "diktat" de Versailles), ce qui alimente un
sentiment de revanche et de nationalisme dont profitera largement le NSDAP dans les années 1930.
- La guerre provoque enfin une crise multiforme entre 1918 et 1923 : à la crise économique
(hyperinflation, chômage) s'ajoute une crise sociale (misère, grèves et agitations ouvrières) qui
débouche sur des mouvements révolutionnaires socialistes (comme avec les Spartakistes à Berlin à
1919) réprimés notamment par les corps-francs.

"Le coup de poignard dans le dos", carte postale antisémite de 1919

=> Ainsi, au sortir de la guerre, l'Allemagne, l'Italie et la Russie sont dans une situation de crise
économique, sociale, politique et identitaire.

B - L'arrivée au pouvoir : entre violence et légalité.

Si Lénine et les bolchéviques prennent le pouvoir à l'occasion d'une nouvelle révolution, les fascistes
italiens et les nazis allemands y accèdent grâce à une stratégie mêlant violence et légalité
démocratique.

1. La Révolution d'octobre et la guerre civile en Russie. Les bolcheviks de Lénine et Trotski


s'emparent du pouvoir en organisant une nouvelle révolution en octobre 1917.

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- A la suite de la Révolution de février, un double pouvoir se met en place : un gouvernement
provisoire constitué de députés libéraux (plutôt favorables à la poursuite de la guerre) et le soviet
("assemblée") des soldats et des ouvriers qui regroupe des socialistes toute les tendances (dont les
bolchéviques), plutôt favorable à la paix immédiate.

- Les bolcheviks s'emparent du pouvoir octobre 1917 en prenant d'assaut le Palais d'Hiver, siège du
gouvernement provisoire. A l'inverse de celle de février, la Révolution d'octobre est donc un coup
d’État préparé par Lénine et Trotski.

- De 1918 à 1921 environ, une guerre civile ravage le pays. L'armée rouge, fondée par Trotski en février
1918, en sort victorieuse.

2. Le coup de force des fascistes italiens.

En Italie, Benito Mussolini le parti fasciste s'empare du pouvoir rapidement après la Première Guerre
mondiale.

- En 1919, Benito Mussolini fonde les faisceaux de combats, mouvement politique nationalisme doté
d'un organe paramilitaire, les « chemises noires » (squadristi) composé d'anciens combattants. Le
parti compte déjà 17 000 membres en 1919.

- Les fascistes prétendent rétablir la grandeur de l'Italie et lutter contre les désordres sociaux. En 1920
par exemple, avec le soutien financier des grands propriétaires et industriels italiens, ils se chargent de
réprimer les grèves et de combattre les syndicats et partis de gauche.

- Cette stratégie de violence, largement héritée de la guerre, se double d'un apparent respect de la
légalité : en 1921, Mussolini fonde le Parti National Fasciste et participe aux élections (35 députés du
PNF sont élus). Le 28 octobre 1922, fort de ses 700 000 membres, Mussolini organise la « marche sur
Rome », véritable démonstration de force pour forcer le roi Emmanuel II à faire entrer le PNF au
gouvernement. Le 30 octobre 1922, Mussolini est ainsi officiellement et légalement nommé chef du
gouvernement.

La marche sur Rome, le 22 octobre 1922. Au centre, B. Mussolini.

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3. L'arrivée au pouvoir du parti nazi : entre violence et succès électoraux.

En Allemagne, le NSDAP fondé par Adolf Hitler s'empare du pouvoir à la faveur de la crise économique
des années 1930.

- Hitler fonde le NSDAP (Parti national-socialiste des travailleurs allemands) en 1919. Marqué par une
idéologie d'extrême droite, nationaliste, antisémite/raciste et anticommuniste, le parti nazi dispose
également d'un organe para-militaire, les SA (Sturm Abteilung), instrument de conquête du pouvoir. .
- Hitler tente tout d'abord un coup d’État militaire en novembre 1923 (putsch de la brasserie de
Munich) qui échoue. Il est arrêté et condamné à 5 ans de prison. Il n'y reste que 13 mois durant
lesquels il rédige « Mein kampf ». Il s'engage dès lors dans la conquête légale du pouvoir.
- Parti marginal, il profite de la crise économique des années 1930 pour accroître son audience. En
1932, le NSDAP devient le 1er parti d'Allemagne avec plus de 37% des suffrages, grâce notamment au
soutien de la bourgeoisie allemande et à la violence des SA. Le 30 janvier 1933, le président
Hindenburg le nomme chancelier.

Evolution comparée du chômage et des suffrages en faveurs du NSDAP

C - Vers la concentration des pouvoirs

Très rapidement les leaders politiques vont confisquer l'essentiel des pouvoirs et mettre en place des
régimes autoritaires.

1. La mise en place du stalinisme.

En Russie, le nouveau pouvoir est confronté à de nombreux troubles. La "dictature du prolétariat


" se met alors rapidement en place et le régime devient de plus en plus autoritaire et personnel.

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- Une police politique, la Tchéka (novembre 1917) et des tribunaux d'exception (janvier 1918) sont mis
en place. Ils sont chargés d'arrêter et de juger les « ennemis du régime » tels les "blancs", les
anarchistes, les mencheviques, les sionistes, les libéraux... Progressivement, le Parti bolchevique
devient le parti unique.
- Après la mort de Lénine en janvier 1924, Josef Staline et Léon Trotski se font face pour la direction du
parti et de l’État. Staline elimine alors ses opposants par une série de purges et impose son pouvoir
(Trotski est par exemple contraint à l'exil au Mexique où il sera assassiné en 1940). Staline impose
ensuite la pratique du candidat unique, désigné au préalable par le Parti communiste.

2. La mise en place de la dictature fasciste en Italie.

Après son arrivée au pouvoir, Mussolini va progressivement éliminer toutes formes d'opposition et
concentrer tous les pouvoirs.

- Mussolini dirige en 1922 un gouvernement de coalition o le PNF est minoritaire. Les élections de
1924 sont truquées à son avantage. Il profite de ce succès électoral et de sa popularité (il reconnaît
même être à l'origine de l'assassinat d'un opposant politique, Matteotti, en 1924) pour concentrer les
pouvoirs
- Entre 1925 et 1926, Mussolini fait voter les « lois fascistissimes » qui établissent la dictature fasciste :
censure et contrôle de la presse, interdiction des grèves et des syndicats, seul le PNF est autorisé,
création de la police politique (Organisation de Vigilance et de Répression de l'Antifascisme, OVRA).
- Mussolini se fait nommer le « duce » (le guide) et voit ses pouvoirs considerablement élargis. L'Italie
devient une dictature fasciste.

Mussolini assis sur le cercueil de Matteotti (caricature italienne de 1925)

3. Hitler, maitre du Reich.

En Allemagne, la confiscation du pouvoir au profit du NSDAP et d'Adolf Hitler est très rapide.

-Le 27 février 1933, l'incendie du Reichstag (parlement) permet à Hitler de faire interdire le parti
communiste qu'il tient pour responsable, éliminant ainsi son principal opposant politique. Le 24 mars,
les pleins pouvoirs sont confiés à Hitler et, dès juillet 1933, le NSDAP devient le seul parti officiel. En
1934, à la mort d'Hindenburg, Hitler réunit toutes les fonctions : il est le Führer (le guide) et le
Reichskanzler (chancelier). C'est le début du 3ème Reich et de la dictature nazi.

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Hitler et Hindenburg en mars 1933 à Potsdam.

4. Le parti et l’État.

Ainsi, dans les trois régimes, le système du parti unique est mis en place. Toutefois, le parti ne se
substitue pas à l’État : les structures étatiques sont systématiquement redoublées par le parti.

- Mussolini fonde le grand conseil fasciste en 1924, c'est à dire un “gouvernement bis”. Les fascistes
noyautent ainsi les structures de l’État et de l'administration.
- En URSS, le parti communiste, bien que séparé de l’État le domine totalement ; l'administration n'est
plus qu'un outil de pouvoir aux mains du parti communiste.
- En Allemagne enfin, Hitler répartit les compétences entre l’État et le NSDAP, provoquant rivalités et
concurrences (comme entre les SA/SS et l'armée).
=>Les régimes totalitaires se caractérisent ainsi par une organisation duale du pouvoir et un contrôle
du parti sur l’État.

Le Reichstag en feu, le 27 février 1933

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II - LE FONCTIONNEMENT DES RÉGIMES TOTALITAIRES

A - La nation, la race, la classe : trois fondements idéologiques spécifiques

Les régimes totalitaires se fondent sur une idéologie omniprésente qui vise à créer un homme nouveau
et à régénérer la nation, justifiant le contrôle total de la société.

1. Lutte des classes et dictature du prolétariat en URSS.

- Les soviétiques cherchent à créer une société sans classe, égalitaire, sans propriété privée et où l’État
est l'instrument de domination du prolétariat. Ils s'opposent à l'ordre bourgeois, libéral et capitaliste.
- Les bolcheviks abolissent ainsi la propriété privée et l’État prend le contrôle intégral de l'économie. Le «
grand tournant » des années 1928-29 amène ainsi à une collectivisation brutale des campagnes
(création des Kolkhozes et des Sovkhozes) et à une industrialisation massive (80% des investissements de
l’État).
- Tous ceux qui s'opposent à ce projet sont considérés comme dangereux pour le régime ; les koulaks,
paysans propriétaires opposés à la collectivisation, sont désignés comme des « ennemis de classe » et
largement persécutés ( 5 millions d'entre eux sont envoyés au goulag ou exécutés)

2. Le nationalisme italien et la troisième Rome

En Italie, le fascisme est avant tout une idéologie nationaliste. Elle insiste sur la grandeur de la Nation
italienne, se référant et glorifiant constamment l'époque de l'antiquité romaine.

- Mussolini veut avant tout restaurer la puissance et le prestige passée de l’Italie en fondant une
nouvelle Rome. Il cherche pour cela à « viriliser » l'homme italien, pour en faire un guerrier, un
conquérant (la mémoire de la 1ère Guerre mondiale est ici essentielle)
- L'architecture moderniste, les symboles du régime comme le "faisceau de licteur" (à l'origine du terme
fasciste) ou le slogan SPQR ainsi que les tentatives de conquête coloniale témoignent de ces références
constantes à l'antiquité romaine.
- Le racisme et l'antisémitisme sont peu présents dans le fascisme (et en Italie en générale) ; ils
apparaissent vers la fin des années 30.

Le faisceau de licteur, symbole du PNF et de l'Italie fasciste.

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3. L'idéologie raciste au cœur du régime nazi.

En Allemagne, les nazis estiment que les lois de la nature conditionnent les sociétés humaines. Leur
idéologie est ainsi avant tout marquée par le racisme et l'antisémitisme.

- Hitler « théorise » sa vision raciale du monde en distinguant les aryens (race des seigneurs vouée à
dominer le monde), des serviteurs (slave, latins...), des esclaves (africains, asiatiques sauf japonais...) et
des sous-hommes (untermenschen) : juifs, tsiganes, handicapés, homosexuels...
- Hitler cherche à "protéger"la race aryenne pour éviter sa décadence et sa "dégénérescence". Cette
vision justifie la répression et la violence contre les groupes jugés inférieurs : lois eugénistes de 1933,
stérilisation, euthanasie, arrestations des marginaux (asociaux)... Le nouvel homme nazi doit répondre à
des critères raciaux spécifiques, témoignant de sa pureté, de sa supériorité (force, virilité...) et de son
dévouement au "Volk"
- C'est également au nom de cette idéologie qu'une politique antisémite est rapidement mise en place :
dès 1933, les commerces juifs sont boycottés et à partir septembre 1935 les juifs sont exclus de la
société allemande par les lois de Nuremberg. Les violences à leur encontre se multiplient, comme lors du
pogrom de la "nuit de cristal" les 9 et 10 novembre 1938 (des synagogues sont incendiées, des
commerces détruits, des juifs assassinés et environ 30 000 sont arrêtés).
- C'est enfin au nom de cette idéologie qu'est menée la politique d'expansion de l'Allemagne. Pour Hitler,
tous les aryens doivent être réunis dans un même empire (le "Reich") et ont besoin d'un espace vital (le
"Lebensraum") pour assurer leur développement.
- En outre, le nazisme se veut radicalement anti-communiste. Selon lui, la lutte des classes va à
l'encontre des "lois de la nature" (fondées sur une vision darwinienne simpliste de la "lutte des races") et
empêche l'unité raciale du "volk".

Commerce juif saccagé lors de la nuit de cristal

=> Si ces trois régimes reposent donc sur des fondements idéologiques indépassables, ces idéologies
différent et parfois même s'opposent : la classe en URSS, la nation en Italie, la race en Allemagne

=> Ils se veulent cependant tous les trois en rupture avec le présent (démocratie, libéralisme,
individualisme...) qu'ils jugent décadent et se présentent comme révolutionnaires.

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B - Des sociétés encadrées, soumises et terrorisées.

Les régimes totalitaires se caractérisent par un contrôle absolu de la société et par l'usage de la terreur
de masse.

1. Le dirigisme économique des régimes totalitaires.

Arrivée au pouvoir en période de crise, la politique économique est essentielle au succès des régimes.
En URSS évidemment mais aussi en Italie et en Allemagne, les économies sont donc largement
contrôlées par l’État.

- Dans l'économie étatisée de l'URSS, les autorités mettent en place des plans quinquennaux qui fixent
des objectifs de production.
- En Italie, l'interventionnisme se renforce à partir des années 1930 avec la création de l'IRI (institut pour
la reconstruction industrielle) qui contrôle les secteurs les plus importants (sidérurgie, industrie
chimique...). Une politique de grands travaux est lancée pour lutter contre le chômage, comme par
exemple l'assèchement et la bonification des terres des marais Pontins en 1931.
- En Allemagne, la politique économique est confiée à H. Schacht qui lance des opérations de grands
travaux (développement du réseau autoroutier) et un plan quinquennal de réarmement en 1936. Ces
mesures permettent de réduire le chômage même si les inégalités sociales persistent (la croissance
profitant surtout aux milieux d'affaires).

Hitler montant dans la fameuse Coccinelle de la marque Volkswagen ("la voiture du peuple") créée à son
initiative

=> Il s'agit donc de systèmes extrêmement dirigistes qui doivent permettre la croissance économiques
autarcique mais aussi et surtout l'indépendance des États par la modernisation de leurs structures
productives et par le développement d'une industrie militaire.

2. Des populations sous surveillance.

Les régimes totalitaires se caractérisent par un contrôle absolu de la population, les autorités se
devant d'empêcher toute forme d'opposition.

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- Des organisations de masse assurent l'encadrement et l'endoctrinement des populations. Les jeunes
sont particulièrement visés : les “fils de la Louve” (4-8 ans) ou les “balillas” (8-14 ans) créés en 1926 en
Italie, le Komsomol (jeunesse communiste, pour les 15-18 ans) en URSS, les jeunesses hitlériennes
rendues obligatoires en 1936... Ces organisations dispensent ainsi une éducation idéologique et forment
« l'homme nouveau » voulu par les régimes en diffusant les valeurs du parti. L’État se substitue de fait
progressivement à la famille.

- De même dans le monde du travail, les salariés sont étroitement contrôlés. Les seuls syndicats tolérés
sont ceux du parti au pouvoir, comme en Italie où ils sont remplacés par un système de corporation sous
le contrôle de l’État dés 1934. Les loisirs des travailleurs sont également encadrés, comme en Italie avec
le Dopolavoro (L’œuvre nationale du temps libre) créée en 1925 et qui occupe 4,5 millions d'italiens en
1939 ou la « force par la joie » créée en 1933 en Allemagne.

Les Balillas italiens

Jeunesses Hitlériennes, exercices militaires.

3. La terreur de masse.

Cet encadrement passe par l'usage de la surveillance et de la violence pour empêcher la contestation.
Cette terreur d’État vise des catégories ciblées (comme les juifs en Allemagne) mais touche aussi
l'ensemble de la population qui se doit d'être en accord avec l'idéologie dominante.

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- Les régimes totalitaires utilisent des forces militaires et/ou policières spécifiques : le GPU puis le NKVD
en URSS, l'OVNA et les chemises noires en Italie, la Gestapo (police secrète créée par Göring en 1933) et
les SS (forces spéciales dirigé par Himmler) en Allemagne. Les « opposants » sont ainsi pourchassés,
arrêtés et condamnés ou parfois assassinés. La terreur de masse est surtout présente en Allemagne et
en URSS où au moins 700 000 personnes sont exécutées par le pouvoir stalinien lors de la "Grande
Terreur" entre août 1937 et novembre 1938.
- Des systèmes concentrationnaires sont aussi mis en place. En URSS, les goulags sont instaurés en 1934
(près de 500 000 personnes y auraient été envoyées à l'époque des purges staliniennes et des grands
procès de Moscou entre 1936 et 1938). En Allemagne, le 1er camp de concentration ouvre en 1933 à
Dachau pour accueillir les opposants politiques puis les éléments définis comme dangereux pour la
nation (juifs, homosexuels, tsiganes...).
- Staline et Hitler ont par ailleurs éliminé leurs rivaux par des "purges" comme lors de la de la nuit des
longs couteaux en 1934 (assassinat des responsables SA par les SS).

Carte de la grande terreur stalinienne.

Goulag en Sibérie.

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4. La difficile résistance au pouvoir totalitaire.

Cette surveillance généralisée et cette terreur de masse contribuent à la mise en place d'un climat de
peur, de suspicion et de délation qui rend difficile la résistance et l'opposition au régime.

- En Allemagne par exemple, l'Eglise (catholiques notamment) condamne certaines mesures du régime
comme l'eugénisme et l'euthanasie ; l'armée (en concurrence avec les SS) est également une des
principales forces d'opposition (en 1938 par exemple, le général Ludwig Beck s'oppose publiquement à
la guerre en Tchécoslovaquie. Il est renvoyé par Hitler). Enfin, des étudiants munichois forment « la rose
blanche » en 1942. Il s'agit d'un groupe de résistance et d'opposition au nazisme qui distribue des tracts
(le 1er : « Tout peut être sacrifié au plus grand bien de l'État, tout, sauf ce que l'État doit servir »). Ils sont
arrêtés en 1943 par la Gestapo et exécutés.
- La résistance se fait de l'extérieur. En Allemagne et en Autriche, de nombreux intellectuels, savants et
artistes choisissent l'exil et dénoncent le régime nazi depuis l'étranger (les États-Unis souvent). Ce fut par
exemple le cas des écrivains Berthold Brecht et Thomas Mann, d'Albert Einstein (qui partent tous au USA
en 1933) ou encore du réalisateur Fritz Lang (qui poursuit sa carrière à Hollywood à partir de 1934)

C - La propagande au service du régime et du "guide".

Le contrôle des médias et l'usage de la propagande sont caractéristiques des régimes totalitaires et
participent de l'embrigadement de la population.

1. L'exaltation des valeurs du régime et la dénonciation des ennemis.

Organisée par l’État, la propagande permet de conditionner les esprits par l'exaltation des valeurs
propres à chaque régime et par la dénonciation des opposants.

- Des ministères de la propagande sont mis en place, comme en Allemagne en 1933 par Goebbels. Ils
sont chargés de contrôler les médias et la création artistique. En URSS par exemple, les auteurs sont
obligés d'adhérer à l'Union des Écrivains (1932) pour être publié et la Pravda est le journal officiel du
parti communiste.
- La propagande diffuse les valeurs du régime en mettant en place un art officiel : le "réalisme
socialisme" en URSS, les films de Leni Riefensthal en Allemagne (Le triomphe de la volonté, Les dieux du
stade) ou de la Cinecitta en Italie, l'architecture fasciste (le quartier EUR à Rome) ou encore le projet de
rénovation de Berlin d'Albert Speer.
- La propagande officielle définit aussi un art anti-régime. En Allemagne par exemple, sont organisés des
autodafés et des expositions d'art dégénéré" comme à Munich en 1937.

2. Le culte du chef.

Dans les trois régimes, la propagande organise un véritable culte du chef afin de légitimer le pouvoir
de celui-ci.

- Les chefs sont présentés comme personnages charismatiques, des surhommes infaillibles et dévoués,
garants de la grandeur du régime. Les trois dirigeants sont ainsi considérés comme des modèles et des
"guides" ("Führer", "Duce" et "Vodj") qu'il faut suivre aveuglément et à qui faut rendre un culte

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- Des slogans et des surnoms sont créés pour renforcer l'autorité et la légitimité du chef : « Mussolini a
toujours raison » en Italie, « ein Volk, ein Reich, ein Führer » en Allemagne, "le petit père des peuples"
pour Staline.
- De véritables cérémonies de masse sont également organisées pour célébrer la grandeur du guide,
notamment en Allemagne avec les "grandes messes nazies". Lors des Jeux Olympiques de 1936, les
spectateurs allemands prononcent ainsi la phrase adressée à Adolf Hitler : ”Wir gehören Dir” (nous
t’appartenons).

La Pravda en 1937 : Staline, le grand timonier.

Mussolini par le peintre futuriste Ambrosi (1930). En fond, la Rome antique.

Affiche nazi de 1935

=> Ainsi, dans les trois régime, l'individu doit s'effacer devant la masse. Cette négation de l'individu
justifie la privation des libertés et la disparition de la démocratie. L'individu n'existe plus que par son
appartenance à une communauté et à un ordre social hiérarchisé.

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