Vous êtes sur la page 1sur 27

REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ ECONOMIE

REVUE INTERNATIONALE
RIGE : SERIE A - GESTION / NUMERO 13 - VOLUME 1 – Décembre 2022

DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE A - GESTION / NUMERO 13 - VOLUME 1 – Décembre 2022

Henri WAMBA
Bernard FOTSO
Alex Gildas FOMO KENGNI
Les PME camerounaises face aux difficultés de financement : l’apport de la
multibancarité.

Howoanou Adjewoda FANGNON


Changement de l’environnement fiscal et choix de cabinets d’audit : une analyse
taxonomique.

Bocco Bertrand SOGBOSSI


Doman GNOUFOUGOU
Samtou KOUYAKOUDEMA
Attractivité des territoires au service du développement local durable : étude
exploratoire de la perception des parties prenantes dans la Ville de Kara

Bawoubadi AWIZOBA
Fatihoulahi KOUMOÏ
Lébénè GNAGAMAGO
Effet de la valence de l’incongruence perçue des stimuli atmosphériques sur l’attitude
des Consommateurs envers le point de vente : rôle des Inférences des Intentions de
Manipulation (IIM)

Thierry Mahougnon ADANKANHOUNDE


Tiatouka NADJIR-BOMBOME Série A
Amadou Lamine DIA
Influence de la publicité media sur le comportement d’achat des pâtes alimentaires au GESTION
Togo et au Bénin.
N°13
Olatundji Raoul OGOUYOMI OROBI
Ange Wenceslas Vinciale ASSOGBA
Le luxe à la conquête du bas de la pyramide : Etude de la perception des consommateurs
en contexte de précarité.

Saindou KONE
L’impact de la culture de l’anacarde sur le développement socioéconomique des
populations rurales de la Sous-préfecture de Bako (Nord-ouest de la Côte d’Ivoire)

ISSN 2520-3045
Directeur de Publication : Jean-Paul MAMBOUNDOU (Université
Omar BONGO, Libreville – Gabon)
Gérard CLIQUET (Université de Rennes
1 – France) Nadédjo BIGOU-LARE (Université de
Lomé – Togo)
Rédacteur en chef :
Abdoulaye OUATTARA (Université
Augustin Anassé Adja ANASSE (UAO, FHB, Cocody – Côte d’Ivoire)
Bouaké – Côte d’Ivoire)
Roger GANDAHO (UAO, Bouaké –
Rédacteurs associés : Côte d’Ivoire)
Roger GANDAHO (UAO, Bouaké – Serge BAYALA (Université Ouaga II,
Côte d’Ivoire) Ouagadougou – Burkina Faso)
Arsène KAHOU Bi (UJLG, Daloa – Ibrahima DANKOCO (Université
Côte d’Ivoire) Cheick Anta Diop – Sénégal)
Moustapha SYLLA (UAO, Bouaké – Fatou SALL-DIOP (Université Cheick
Côte d’Ivoire) Anta Diop – Sénégal)
Secrétaires de rédaction : Maurice FOUDA (Université de Douala
Salimata DIABATE (dsalifr@yahoo.fr) – Cameroun)

Adèle KORE (koreadele2002@yahoo.fr) Bassirou TIDJANI (Université Cheick


Anta Diop – Sénégal)
Julia N’ZO (julia_nzo@yahoo.fr)
Marie-Thérèse UM-NGOUEM
Comité Scientifique : (Université de Douala – Cameroun)

Gérard CLIQUET (Université rennes 1 – Emmanuel C. HOUNKOU (Université


France) d’Abomey-Calavi – Bénin)

Augustin ANASSE (UAO, Bouaké – Judith GLIDJA (Université d’Abomey-


Côte d’Ivoire) Calavi – Bénin)

Dwight MERUNKA (Université Aix- Boubacar BAIDARI (CESAG –


Marseille – France) Sénégal)

Jean NIZET (Université de Namur – Albéric TELLIER (Université de Caen –


Belgique) France)

Jean-Michel PLANE (Université de El Bachir WADE (Université Cheick


Montpellier – France) Anta Diop – Sénégal

Ababacar MBENGUE (Université de


Reims – France)

Bertrand SOGBOSSI (Université


d’Abomey-Calavi – Bénin)

1
EDITORIAL

La politique éditoriale de la Revue Internationale de Gestion et d’Economie (RIGE) se


définit par rapport à la nature des articles publiés et au lectorat visé.

La RIGE se veut le support d’un domaine scientifique mixte : Economie et Gestion. Dès
lors, une série est dédiée aux travaux abordant les Sciences de Gestion (« Série A ») et une
autre dédiée aux travaux traitant des Sciences Economiques (« Série B »). Cette mixité est
recherchée aussi bien dans les approches théoriques que dans les démarches
méthodologiques des articles qui y sont publiés. Ainsi, la RIGE cherche à encourager la
production de connaissances pluridisciplinaires et offre une plateforme pour faire émerger
des synergies entre les Sciences de Gestion, les Sciences Economiques et les autres
Sciences.

La RIGE positionne sa ligne éditoriale sur les articles ayant une réelle contribution à la
connaissance scientifique. Pour sa Série A, la RIGE privilégie les soumissions qui
présentent les implications managériales de la recherche réalisée et ayant recours à des
approches qualitatives et/ou quantitatives. Pour sa Série B, sont privilégiées les soumissions
qui présentent les implications de politique économique après l’application des méthodes
d’analyse quantitatives.

En outre, la RIGE vise un lectorat au-delà du cercle étroit des experts des questions traitées
par les auteurs. De ce fait, les enseignants en Sciences Economiques, Sociales ou Politiques,
en Sciences de Gestion, les managers d’organisations publiques, privées ou de l’Economie
Sociale et Solidaire, les « chief economist » en poste dans l’administration, l’industrie ou
le secteur financier etc., ainsi que les étudiants de ces différentes orientations demeurent
des cibles privilégiées. La RIGE impose donc aux auteurs de rédiger leurs articles afin
qu’ils puissent être lus et compris par l’ensemble de ce lectorat visé.

La RIGE tire sa légitimité dans la fréquence de ses parutions (deux numéros par an avec
des numéros spéciaux entièrement thématiques), dans la pertinence du processus
d’évaluation et de sélection des articles publiés.

Son ouverture et son implantation internationale se traduisent par la diversité des pays
d’origine des auteurs et par la qualité des membres des comités scientifiques. Ainsi, environ
une cinquantaine d’éminents chercheurs d’une dizaine de pays sont impliqués dans le
processus d’évaluation des articles soumis à la RIGE.

Professeur Augustin Anassé Adja ANASSE

3
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE A - GESTION / NUMERO 13 – VOLUME 1 – Décembre 2022 / pp.124-145

Le luxe à la conquête du bas de la pyramide : Etude de la perception des consommateurs en


contexte de précarité

Olatundji Raoul OGOUYOMI OROBI

Université Nationale d’Agriculture (Bénin)


Laboratoire de Recherche Marketing et Bien-être du Consommateur (LAREM-BEC)
dearraoul@gmail.com

Ange Wenceslas Vinciale ASSOGBA

Université d’Abomey-Calavi (Bénin)


Laboratoire de Recherche Marketing et Bien-être du Consommateur (LAREM-BEC)
angevinciale@yahoo.fr

RÉSUMÉ

Comme tous, des populations des PVD aspirent, de plus en plus, au bien- être que procure la
consommation des produits de luxe. L’industrie du luxe s’intéresse désormais aux
consommateurs dans les PVD. Ces consommateurs, dans un contexte de précarité, font face à
de fortes pressions (psychologique, social et financier) pouvant engendrer une autre perception
du luxe. Il devient donc important de comprendre leur perception des produits de luxe. La
présente étude empirique porte sur les déterminants de la perception des produits de luxe par
579 béninois. Les résultats montrent que la perception des produits de luxe est influencée par
les motivations externes, l’utilité et le caractère pratique perçus et par les prix élevés de ces
produits.

Mots clés : La perception du luxe, Les motivations, le caractère utile et pratique perçu, les prix
élevés.

124
ABSTRACT

The luxury industry is now interested in wealthy consumers in developing countries. These
consumers, in a context of precariousness, face strong pressures (psychological, social and
financial) which can generate a different perception of luxury. It therefore becomes important
to understand their perception of luxury products. The present empirical study which focuses
on the determinants of the perception of luxury products by 579 Beninese. The results show
that the perception of luxury products is influenced by external motivations, perceived
usefulness and practicality, and by the high prices of these products.

Keywords: Luxury products, perception, Personal and external motivation, Useful and practical
character, raised price.

125
INTRODUCTION

Depuis un certain nombre d’années, le luxe suscite un intérêt particulier pour la recherche en
marketing (Vigneron et Johnson, 2004, Amatulli et al. 2018; Bachmann, Walsh, et Hammes
2019). Ce regain d’intérêt est la conséquence de sa remarquable croissance ces dernières
années, des perspectives très favorables en la matière (Fiske et Silverstein, 2004). La nécessité
de maitriser davantage le management du luxe, a rendu la notion de perception de la valeur du
luxe, importante. Pour Zeithaml (1988), la valeur perçue est liée à l’évaluation globale du
consommateur de l’utilité basée sur la perception par rapport à ce qui est reçu et ce qui est
donné. Le choix du consommateur de tout produit dépend de l’évaluation qu’il fait du bien et
du bien-être que cela est susceptible de lui procurer. Pour Benjelloun et Mehdi (2020), « le luxe
est un mode de vie caractérisé par de grandes dépenses consacrées à l'acquisition de bien
superflus, par goût de l'ostentation et du plus grand bien-être ».

En effet, pour les produits de luxe, l’influence de la perception de la valeur est plus
importante pour tenir compte de la subjectivité qu’ils portent. Dew et Kwon (2010), Sheth,
Newman, et Gross, (1991)1 corroborent ce point de vue, car selon eux le concept de perception
de la valeur du luxe est un sujet important pour les chercheurs en marketing du luxe parce que
le choix du consommateur dépend de son évaluation du bien. Le domaine du luxe est donc
incontestablement dépendant de la perception qu’ont les consommateurs des produits de luxe
(De Barnier, Falcy et Valette-Florence, 2011). De nombreuses études ont permis de cerner
davantage le concept de perception du luxe. S’inspirant des travaux de Dubois, Laurent et
Czellar (2001), Vigneron et Johnson (2004) identifient ainsi deux groupes de facteurs
déterminant le processus de choix d’un produit de luxe par un consommateur : les perceptions
personnelles (perception liée à l’affirmation de soi et celle liée aux sensations émotionnelles)
et les perceptions non personnelles (perceptions relatives au goût de l’ostentatoire et à la qualité
à l’unicité du produit). Cette étude a été affinée par Wiedmann, Hennigs et Siebels (2007) qui,
à travers un modèle, mettent en relief quatre autres dimensions explicatives de la perception de
la valeur du luxe : la dimension financière, la dimension fonctionnelle, la dimension
individuelle et la dimension sociale. Plus récemment, Berthon, Pitt, Parent et Berthon (2009)
conceptualisent le luxe par trois valeurs essentielles à savoir : la dimension objective
(matérielle), la dimension subjective (individuelle) et la dimension collective (sociale). Shukla
et Purani (2012) se basant sur les travaux de Tynan, McKechnie et Chhuon (2010) et de Smith,

1
Cité par Chun, Youn et Lee, (2014)
126
Colgate et Colgate (2007) mettent en relief les variables suivantes comme facteurs influençant
la perception globale du luxe : les motivations personnelles (Paurav, Shukla et Keyoor Purani,
2012; Vigneron et Johnson, 2004), les motivations externes (Paurav, Shukla, Keyoor et Purani,
2012) la valeur hédonique perçue ( Shukla, 2010), la valeur utilitaire et fonctionnelle perçue
(Shukla, 2010; Vigneron et Johnson, 2004) et les prix élevés (Wiedmann et al., 2007, Parguel,
Delécolle, et Valette-Florence 2016).

En outre, le souci de gagner des nouveaux marchés par les managers du luxe, conditionné par
l’adaptation des politiques marketing à de différents segments a fait de la compréhension de la
perception de la valeur des produits de luxe dans d’autres contextes culturels, un préalable
(Shukla, 2012). Elle l’est d’autant plus que la perception du luxe dépend des individus, de leur
milieu social ainsi qu’aux valeurs et aux symboles qu’ils associent à la marque ou au produit
de luxe. Kemp, (1998) corrobore cet argument en affirmant que la perception du degré de luxe
d’une marque dépend à la fois des personnes interrogées et du contexte. Ainsi plusieurs appels
liés à la réalisation d’études sur le sujet dans d’autres contextes pour permettre une
généralisation des résultats ont été lancés (Wiedmann, Hennigs et Siebels, 2009; Shukla et
Purani, 2012). Ces études ont été réalisées sur des individus instruits et qui ont un niveau
d’aisance financière et habitués au luxe. La réalisation d’étude portant sur le luxe dans un
contexte qui ne lui est pas favorable, pourrait éclairer davantage. En effet, le contexte dans
lequel cette étude se réalise est marqué par une population majoritairement pauvre et
analphabète, avec une classe de nouveaux riches mais aussi entourée par des frères et sœurs,
des voisins pauvres. Au plan religieux on note une forte croyance aux forces occultes, une
solidarité et une convivialité extrême qui conduisent à l’écrasement systématique de l’individu
au profit de la communauté (Ponson, 1993 ; D’Iribarne, 1993)2. Cette solidarité pourrait
empêcher l’individu de penser à s’offrir le luxe car son surplus de revenu est absorbé par les
œuvres sociales. En outre les africains ont en général une activité spirituelle très intense
(Eboussi Boulaga 1990)2 qui peut malgré les disponibilités financières, affecter sa perception
des produits de luxe. En résumé, les Africains font face à une triple pression : financière,
sociale, et psychologique. Au regard de ces contrastes en Afrique, nous retenons d’étudier les
déterminants de la perception des produits de luxe par les consommateurs dans un contexte de
précarité.

Cet article pose ainsi la question de recherche suivante : Quelles sont les variables qui

2
Cité par Hounkou (2008)
127
influencent la perception globale du luxe par les consommateurs dans un contexte caractérisé
par une forte pression sur les individus aux plans financier, social et psychologique ? En effet,
la perception du luxe dépend des motivations de l’individu, qui peuvent être d’ordre personnel
ou externe. Dans le contexte de l’étude, les individus font face à une pression psychologique
très forte, qui provient de normes et valeurs du groupe social d’appartenance, et subissent
l’emprise de la religion sur l’esprit. Ces considérations nous amènent à formuler la première
question spécifique de la manière suivante : La perception des produits de luxe est-elle
influencée par les motivations d’ordre personnel dans un contexte de sous-développement ? et
la deuxième comme suit : les motivations externes influencent-elles la perception des produits
de luxe dans un contexte de sous-développement ? Par ailleurs, la valeur utilitaire perçue est un
paramètre important de la perception du luxe dans les pays du nord. Mais, face à cette triple
pression, l’Africain peut avoir une autre appréciation de l’utilité des produits de luxe. Ainsi la
troisième préoccupation de cette recherche vise à vérifier cette relation dans le contexte de sous-
développement à travers la question qui suit : L’utilité et le caractère pratique perçus
influencent-ils la perception du luxe dans un contexte de sous-développement ? Enfin, le rôle
du prix dans la perception de la valeur d’un produit n’est pas à négliger. Plusieurs auteurs ont
établi et démontré le rôle positif des prix élevés des produits de luxe sur la perception de leur
qualité (Thomas, 2007). Ces études pour la plupart ont eu lieu dans les pays du Nord ou les
individus n’ont pas les mêmes difficultés financières et de subsistance qu’en Afrique. Mais dans
un contexte de pauvreté au quotidien, l’individu peut considérer les prix élevés des produits de
luxe autrement. Ainsi, la quatrième préoccupation de cette recherche porte sur la question
suivante : Les prix élevés des produits de luxe influencent-ils la perception globale des produits
de luxe dans un contexte de sous-développement ? A travers ces questions, nous envisageons
de comprendre la perception des consommateurs du luxe dans un contexte spécial. Cet article
est présenté en quatre parties : la revue de littérature, la méthodologie, les résultats et la
discussion des résultats.

128
1. Cadre théorique de la recherche

Cette partie est consacrée aux développements théoriques qui fondent nos hypothèses.

1.1. Le concept de luxe et les comportements des consommateurs de produit de luxe

Le luxe est « de l’art qui s’applique à des objets fonctionnels. Telle la lumière, le luxe éclaire
[…]. Les objets de luxe offrent davantage que les simples objets : ils représentent la référence
du bon goût. C’est pourquoi le management du luxe ne doit pas dépendre uniquement des
attentes du consommateur : les marques de luxe sont animées par leur programme interne, leur
vision globale, le goût particulier qu’elles mettent en valeur, ainsi que la poursuite de leur
propre standard. Les objets de luxe procurent un plaisir supplémentaire et flattent tous les sens
à la fois » (Kapferer, 1997). La détention de produits de luxe procure donc une satisfaction
supplémentaire. Vigneron et Johnson (2004) renchérissent et définissent les biens de luxe
comme étant des biens dont la consommation satisfait à la fois des besoins fonctionnels et
psychologiques.

Le comportement des consommateurs de ces produits spécifiques ont fait l’objet de plusieurs
recherches en microéconomie et surtout en marketing. Le domaine du luxe n’en fait pas
exception (Dubois et al., 2001). Dans la théorie du consommateur en microéconomie, la
consommation des produits luxueux, pris en compte à un niveau individuel fait appel à deux
types de comportement : le conformisme et le snobisme (Leibenstein, 1950). Le conformisme
(bandwagon) survient lorsqu’un consommateur demande un produit de luxe juste parce que
d’autres consommateurs l’achètent. Le snobisme est le comportement contraire. Il se réalise
dans deux circonstances : (1) Lorsqu’un nouveau produit luxueux est lancé, le snob l’adoptera
en premier pour prendre un avantage sur les autres consommateurs et (2) il rejettera les produits
luxueux que les consommateurs achètent en masse (Mason, 1981). Ces deux types de
comportement s’inscrivent dans la logique de ce qui est qualifié « d’effet Veblen » c’est-à-dire
que la consommation de produits de luxe est motivée par le désire de signaler sa richesse et
donc de se distinguer de la classe des pauvres. Les comportements du consommateur face à un
même produit, face à des produits différents varient en fonction du contexte culturel et les
produits de luxe n’en font pas exception (Phau et Prendergast, 1998). Ils varient donc d’une
population à une autre en fonction de sa sensibilité aux influences interpersonnelles (Mason,
1981). L’analyse des variables qui influencent la perception du luxe en Afrique constitue un
début de compréhension du comportement de l’africain face à l’égard du luxe.

129
1.2. Les dimensions de la perception du luxe et définition des variables

La perception de la valeur d’un produit de luxe explique pourquoi les consommateurs


choisissent ou évitent d’acheter un produit particulier (Sheth et Gross, 1991), d’où l’intérêt
qu’elle suscite au niveau de la recherche en marketing. Inspiré par les travaux de Dubois et
Laurent (1994), et de Phau et Prendergast (2000), Vigneron et Johnson (2004) identifient deux
catégories de facteurs explicatifs du processus d’achat du consommateur de luxe : les
perceptions personnelles qui se déclinent en perception ou l’estime de soi (perceived extended
self), l’hédonisme perçue (perceived hedonism) et les perceptions non personnelles en terme de
visibilité perçu (perceived conspicuous), d’unicité perçue (perceived uniqueness) et la qualité
perçue (perceived quality). Ces travaux sur la perception du luxe de Vigneron et Johnson (2004)
ont été approfondis par Wiedmann et al. (2007), qui développent un modèle explicatif à quatre
dimensions de la perception du luxe par les consommateurs : la dimension financière, la
dimension fonctionnelle, la dimension individuelle et la dimension sociale. Elles peuvent être
détaillées comme suit :

- la dimension financière : elle est liée aux aspects monétaires comme le prix, le coût de revente.
Elle se réfère à la valeur du produit et au sacrifice que le consommateur consent pour l’obtenir ;

- la dimension fonctionnelle : elle prend en compte les bénéfices liés aux caractéristiques du
produit comme la qualité, l’unicité, la durabilité et la fiabilité (Sheth & Gross, 1991) ;

- la dimension individuelle : elle est basée sur l’orientation personnelle du consommateur par
rapport au luxe et prend en compte le matérialisme, l’hédonisme, et l’identité personnelle
(Hirschman et Holbrook, 1982; Vigneron et Johnson, 2004) ;

- la dimension sociale : pour Vigneron et Johnson (1999), et Bearden et Etzel (1982), cette
dimension est liée à la perception de l’individu en rapport avec son groupe de référence, elle
prend en compte les valeurs visibilité et prestige.

A la suite de Wiedmann et al. (2007), Berthon et al. (2009) identifie trois dimensions de la
perception des produits de luxe : la dimension objective liée au matériel, la dimension
subjective liée au bien-être de l’individu et la dimension collective liée à l’environnement social
du consommateur des produits luxueux. Enfin, adaptant les travaux de Smith et Colgate (2007)
sur le modèle de la valeur générique, Tynan et al. (2010) suggèrent un modèle conceptuel
incluant les valeurs utilitaire ou fonctionnelle, symbolique ou expressive qui est scindée en
motivation personnelle et puis celles liées aux expériences, émotionnelle ou hédonique, et au
130
coût ou au sacrifice nécessaire pour obtenir le produit de luxe. Au regard des pressions
financières, psychologique et sociale auxquelles les Africains font face, nous retenons les
variables motivations (personnelles et externes), l’utilité et le caractère pratique, l’hédonisme
perçu et enfin les prix élevés comme variables explicatives de la perception du luxe.

1.3. Définition des variables et hypothèses de l’étude

Le sens multiple que peuvent revêtir les variables de l’étude en marketing nous impose de les
clarifier au préalable avant de préciser nos hypothèses de recherche. Ces options théoriques
conditionnent aussi bien la mise en œuvre des construits que la modélisation des liens qui les
unissent.

1.3.1. Les motivations et la perception des produits de luxe

Les motivations sont les raisons profondes et essentielles de l’achat d’un bien. Elles sont de
deux ordres :

- les motivations personnelles : Cette variable est importante dans la perception du luxe.
Plusieurs travaux ont établi la relation entre cette variable et la perception des produits (Belk,
1988). Pour Smith et Colgate (2007), cette valeur est liée aux significations psychologiques
associées que le consommateur associe aux produits de luxe. Il est généralement admis dans la
théorie du comportement du consommateur que l’image de soi modère la perception des
produits et services (Belk, 1988)3. Les consommateurs de produits luxueux se sentent bien car
ils expriment leurs images et leurs personnalités à travers ces produits. L’influence de ce facteur
sur la perception a été établie pour la plus part dans les pays du nord caractérisés par un encrage
culturel moins dense. Dans le contexte de l’étude, les individus subissent un poids lourds de la
tradition, matérialisé par des autels, temples et sanctuaires de divinités, et par conséquent une
forte emprise religieuse sur les esprits (Agossou, 2008). Dans ces conditions, il s’agit pour nous
de vérifier si influence des motivations personnelles sur la perception des produits de luxe est
vérifié dans ce contexte. Nous formulons ainsi l’hypothèse suivante : H1 : les motivations
personnelles influencent positivement la perception globale des produits de luxe dans un
contexte de sous-développement.

3
cités par Wiedmann et al. (2007)
131
- les motivations externes : De plus, de nombreuses études ont prouvé que les individus
consomment les produits de luxe pour signaler leur statut, leur niveau de richesse et leur
appartenance ou non à un groupe social donné (Veblen, 1899 ; de Bearden et al., 1989). La
perception du luxe peut être influencée par les normes sociales et par les personnes avec qui le
consommateur est en relation. Les normes sociales occidentales sont marquées par un niveau
élevé d’individualisme, et l’individu considère les produits de luxe comme un moyen d’affirmer
son statut. Or dans le contexte de l’étude la vie en communauté est la règle, et l’individu s’écrase
au profit du groupe. On a donc un système de contribution des plus nantis au bien-être des plus
démunis. De plus on note une permanente peur des ancêtres, et une importance accordée à la
religion et à la famille (Hounkou, 2006). L’imprégnation des individus dans la culture animiste,
laisse la place à un certain fatalisme et même à la sorcellerie (Devauge, 1977) qui peut amener
l’individu à considérer le luxe comme un danger pour lui, car pouvant attiser la flamme de la
convoitise et favoriser son envoutement. Ce contexte peut potentiellement agir sur la relation
établie entre les motivations externes et la perception du luxe. Il s’agit pour nous d’analyser
l’influence des motivations externes sur la perception du luxe dans ce contexte. Au regard de
ce développement nous postulons l’hypothèse suivante H2 : Les motivations externes
influencent positivement la perception globale des produits de luxe dans un contexte de sous-
développement.

1.3.2. L’utilité et le caractère pratique perçus et la perception globale des produits de luxe.

L’utilité est liée à la capacité de produit à satisfaire un besoin. Le consommateur de produits de


luxe recherche la qualité, l’esthétique, et l’unicité suffisante pour satisfaire son besoin de
différenciation (Wiedmann et al., 2007). Pour Han et al. (2000)4, l’utilité est considérée comme
le facteur d’achat le plus important. Dans une situation de pauvreté accrue au niveau personnel
ou dans son groupe social d’appartenance, l’individu dans le contexte de l’étude peut avoir une
autre appréciation de l’utilité des produits de luxe. La question est de savoir si la perception
globale des produits de luxe est influencée par le caractère utile du produit dans ce type de
contexte. Nous déduisons la troisième hypothèse H3 : L’utilité et caractère pratique perçus
influence positivement la perception globale des produits de luxe dans un contexte de sous-
développement.

4
Cités par Purani et Shukla, (2012)
132
1.3.3. Les prix élevés et la perception globale des produits de luxe

Plusieurs travaux ont montré l’importance du prix dans la perception de la qualité du produit.
Il est souvent utilisé comme un indicateur de qualité et de prestige (Lichtenstein et al., 1988)5.
De plus, le prix prestigieux peut rendre, selon certains produits, plus désirables car les
consommateurs perçoivent leur prix élevé comme une preuve de leur grande qualité. Ces
travaux prouvent bien le rôle déterminant du prix dans la perception du produit. Les
consommateurs dans le cadre de l’étude font face à un niveau de pauvreté non négligeable soit
personnellement ou soit au niveau des membres de la famille. Ce niveau de pauvreté peut les
amener à percevoir autrement les prix élevés des produits. Même les plus nantis, considérant la
pauvreté des proches et les charges rendues obligatoires par la contrainte de solidarité peuvent
percevoir les prix élevé des produits de luxe autrement. Ainsi nous émettons l’hypothèse H4 :
Les prix élevés des produits de luxe ont une influence positive sur la perception globale des
produits de luxe par les consommateurs dans un contexte de sous-développement.

L’objectif de la recherche étant d’étudier de la perception des produits de luxe, dans


un contexte spécial nous présentons notre modèle de la manière suivante.

Figure 1 : Le modèle de la recherche

Source : Nos recherches

5
Cités par Wiedmann et al (2007)
133
2. Méthodologie de la recherche

La phase qualitative s’est appuyée sur des entretiens exploratoires. Les discussions menées sur
la base d’un guide d’entretien ont permis de mieux comprendre leurs perceptions des produits
de luxe et de confirmer l’importance des variables les motivations personnelles, les motivations
externes, l’utilité et le caractère pratique perçus, les prix élevés et d’éliminer la variable
hédonisme perçue qui s’est avérée moins pertinente au regard de la faiblesse des occurrences
des thèmes liés à cette variable. La saturation sémantique a été constatée dès le 11ème interview.
Toutefois, la collecte a été arrêtée après le 15ème interview.

Pour la phase quantitative, les échelles de mesure sont tirées de la littérature. La variable
motivations personnelles a été mesurée par l’échelle de Tsai (2005), motivations externes par
celle de O'cass et McEwen (2004), l’utilité et le caractère pratique perçu et les prix élevés par
celle de Spangenberg, Voss, et Crowley (1997) et Tsai (2005). Quant à la variable dépendante,
perception globale des produits de luxe, elle a été mesurée par l’échelle de O’cass et McEven
(2004). Une fois le questionnaire rédigé, un pré-test a été réalisé sur 10 consommateurs ayant
une expérience en matière de luxe, ce qui a conduit à la reformulation de deux items. Les items
de chaque échelle de mesure sont évalués sur une échelle de Likert à 3 points pas d’accord
« 1 », neutre « 2 », d’accord « 3 » pour éviter la confusion au niveau des répondants (Sogbossi
Bocco, 2009) chez les individus peu alphabétisés.

Pour la vérification de ces échelles, des analyses en Composantes Principales (ACP) avec
rotation Varimax ont été faites, sous SPSS, afin de les tester. Un pré-test a été d’abord réalisé
dans ce cadre sur un échantillon de 145 consommateurs de produits de luxe, pour vérifier si les
mesures des variables sont factorisables, avant l’ACP. Cette étape a été complétée par une
analyse de la cohérence interne des items de mesure des variables grâce au coefficient rhô de
Jöreskog. Cet indicateur est significatif s’il est supérieur à 0,7. Nous avons ensuite évalué la
validité convergente en examinant la force et la significativité des contributions factorielles et
en s’appuyant la valeur du Rhôvc (> 0,5) Fornell et Larcker (1981). Pour démontrer la validité
discriminante nous avons utilisé le critère de (Fornell et Larcker, 1981) en comparant la valeur
du Rhôvc et les corrélations au carré entre les construits. Pour ces auteurs la validité
discriminante d’une variable est confirmée si elle partage plus de variance avec ses propres
indicateurs qu’avec d’autres variables latentes (Rhôvc> r2 entre construits). Après ces
134
différentes analyses le questionnaire retenu a été administré à échantillon de convenance de 579
consommateurs de produits de luxe.

3. Résultats

Nous présenterons ici les résultats des analyses exploratoires, confirmatoires et du test
d’hypothèse.

3.1. Fiabilité, validité convergente et discriminante des construits

L’indice de KMO affiche une valeur satisfaisante de 0,62 ce qui témoigne de la présence d’une
solution factorisable et le test de sphéricité de Bartlett est significatif au risque de 5% (Tableau
1). De plus le pourcentage total de variance totale expliquée de ces variables est de 75,156%.

La rotation orthogonale (Varimax) qui minimise le nombre de variables ayant de fortes


projections sur chaque facteur a donné une structure claire après deux rotations. L’ensemble
final des 13 items reflète après une première analyse (sans un nombre de facteurs fixés à priori)
une solution à cinq facteurs avec 12 items sur les 13 tirés de la littérature qui font apparaitre
une structure factorielle claire. L’item en question a été retiré, et une seconde ACP a été réalisée
pour cette fois faire apparaitre une structure factorielle claire à 12 items et 5 dimensions à savoir
les motivations personnelles, les motivations externes, l’utilité et le caractère pratique perçus,
les prix élevés et la perception globale du luxe.

135
Tableau 1 : Résultats des analyses exploratoires

Matrice des composantes après rotation

Composantes

Perception
ITEMES
Prix Utilité et Globale
Motivations caractère Motivations
élevés externs pratique personnelles

Motivations Personnelles1 0,708

Motivations Personnelles2 0,851

Motivations Externes1 0,760

Motivations Externes2 0,799

Motivations Externes3 0,738

Utilité et caractère pratique1 0,849

Utilité et caractère pratique2 0,836

Prix élevés 1 ,991

Prix élevés 2 ,991

Perception Globale 1 0,685

Perception Globale 2 0,643

Perception Globale 3 0,742

Alpha de Crombach 0,961 0,681 0,735 0,78 0,79

Mesure de précision de l'échantillonnage de Kaiser-Meyer-Olkin= 0, 625


Signification de Bartlett = 0,000

Pourcentage cumulé de la variance expliquée = 75,156%.

Source : Nos résultats

En ce qui concerne l’analyse confirmatoire les valeurs du rhô de Jöreskog dépassent le seuil
minimal de 0,7 alors que le rhô de la validité convergente est supérieur au seuil de 0,5 pour
chacune des 5 dimensions obtenues. De même les résultats indiquent une validité discriminante
satisfaisante des construits car la variance moyenne extraite est supérieure au carré de la

136
corrélation entre les variables latentes du modèle de mesure (Tableau 2).

Tableau 2 : Résultats de l’analyse confirmatoire

Variables Items Loading Fiabilité Validité Validité


Stand. (Rhô de convergente discriminante
Jöreskog)
Motivations Personnelles 0,83 0,73 0,73> 0,21*
Mot Per1 0,86
Mot Per 2 0,54
Motivations Externes (Mot 0,83 0,62 0,62> 0,26*
Ext)
Mot Ext 1 0,80
Mot Ext 2 0,63
Mot Ext 3 0,61
Utilité pratique (Ucar) 0,89 0,81 0,81>0,27*
UCar1 0,98
UCar2 0,54
Prix élevés (Pel) 0,90 0,81 0,81>0,27*
Pel 1 0,79
Pel 2 0,90
Perception Globale 0,89 0,73 0,73 >0,34*
Per Glo1 0,74
Per Glo2 0,90
Per Glo3 0,53
Source : Nos résultats
*Plus forte corrélation au carré entre le construit en question et les autres construits (Voir
Fornell et Larcker, 1981)
Nous avons ensuite procédé à l’estimation le modèle de mesure globale ce qui indique un
ajustement correct aux données. En effet les mesures d’ajustement se trouvent dans les limites
d’acceptation (RMSEA < 0,1 Steiger (1990), GFI et AGFI > 0,90, Kelloway, (1998) ; NFI >
0,90, Bentler et Bonett, (1980) ; et CFI > 0,90, Bentler, (1990) (Tableau3).

Tableau 3: Estimation du modèle

Model RMSEA AGFI GFI CFI NFI

Default model 0,074 0,912 0,951 0,928 0,908

Source : Nos résultats

137
3.2. Test d’hypothèses

La régression réalisée sur équation structurelle effectuée entre les motivations personnelles et
la perception globale du luxe affiche un coefficient de régression de -0,02 jugé non significatif
au seuil de 5%. . L’hypothèse H1 qui stipule que les motivations personnelles influencent
positivement la perception globale des produits de luxe est donc non validée. En ce qui concerne
l’influence des motivations externes sur la perception globale du luxe, le coefficient est positif
et s’élève à 0,28 et significatif au seuil de 5%. Les motivations externes influence donc
positivement la perception globale des produits de luxe. L’hypothèse H2 est validée. La relation
entre l’utilité et le caractère pratique perçus et la perception globale du luxe met et relief un
coefficient de 0,14 et significatif au seuil de 5%. L’hypothèse H3 est validée. Les prix élevés
influencent positivement la perception globale du luxe car le coefficient 0,34 et de façon
significative au seuil de 5%. L’hypothèse H4 est donc validée.

Tableau 4 : Coefficients de régression (MODEL DE RECHERCHE)

Estimate C.R. P Label


S.E.

-
Perception Globale <--- Motivations Personnelles -0,21 0,072
0,443 0,658

Perception Globale <--- Prix élevés 0,340 0,041 6,317 ***

Perception Globale <--- Utilité Caractère pratique 0,135 0,069 2,936 0,003

Perception Globale <--- Motivations Externes 0,275 0,071 4,966 ***

Source : Nos résultats


4. Discussions

Cette étude contribue à déterminer les différents facteurs qui influencent la perception des
produits de luxe dans un contexte de précarité. Nous avons analysé le lien entre la perception
globale des produits de luxe et chacune des variables explicatives qui sont « les motivations
personnelles et externes », « le caractère utile et pratique des produits de luxe » et « le prix
élevé ». Dans la littérature en la matière, plusieurs auteurs ont mené des études allant dans le
même sens mais dans divers contextes de recherche.

De façon générale, les résultats de cette étude viennent confirmer ceux de Vigneron et Johnson
(2004), de Wiedmann et al. (2007) et de Shukla et Purani (2012). En effet, à l’instar de ces
études, la perception des produits de luxe en contexte de précarité est un concept
138
multidimensionnel qui implique des variables individuelles, financières, fonctionnelles, et
sociales. Elle est influencée par les motivations personnelles et externes, le caractère utile et
pratique des produits de luxe et les prix élevés. Par rapport au lien entre les motivations
personnelles et la perception globale du luxe, mis en relief par l’hypothèse H1, nous avons
obtenu coefficient de régression négatif mais non significative entre ces deux variables. Ces
résultats confirment celui de Shukla et Purani (2012) qui ont étudié les différences dans la
perception du luxe entre l’Angleterre et l’Inde. Les résultats auxquels ils sont parvenus font état
d’un lien négatif entre les motivations personnelles et la perception globale des produits de luxe
en Angleterre, de plus cette relation n’est pas significatve en Inde. Ces auteurs ont trouvé des
coeficients de correlation de -0,09 et -0,05 des les deux pays respectivement. Ils expliquent ces
différences par le fait que les habitants des pays à fort taux de collectivisme utilisent des critères
d’évluation des produits de luxe, plus simples que ceux des pays à fort taux individualisme. La
forte pression sociale dans le contexte de l’étude pourrait expliquée le lien négatif et non
significatif mis en relief par notre étude. Cependant ils sont en contradiction avec ceux de
Vigneron et Johnson (2004), qui ont analysé les déterminants de la perception des marques
luxueuses (Levis, Rolex, Ray Ban et Porsche) dans le contexte australien. Ils ont obtenu des
coefficients de corrélation auxiliant entre 0.78 et 0,88 entre ces deux variables. De plus
Wiedmann et al. (2007) ont noté une corrélation forte et significative de 0,84 entre la perception
du luxe et ce facteur.. Ces résultats nous amène à conlure que quelque soit le contexte
(developpement ou sous developpement) les motivations personnelles ont une influence sur la
perception globale du luxe.

En ce qui concerne notre hypothèse H2 qui lie les motivations externes à la perception globale
du luxe, nos résultats font état d’une corrélation positive et significative (0,28 et p< 5%),
confirmant ainsi ceux de Shukla et Purani (2012) qui ont trouvé un coefficient de correlation
de 0,61 en Angleterre et de 0,75 en Inde avec une P-value inférieur à 0,001 dans chacun des
deux contextes. De plus Wiedmann et al. (2007) ont noté une corrélation forte et significative
de 0,78 entre la perception du luxe et le prestige lié à l’appartenance à un réseau social. Ainsi
les motivations externes influencent positivement la perception globale des produits de luxe
même si c’est à des degrés différents en fonction du contexte.

Une analyse combinée des résultats de l’influence des motivations (personnelles et externes)
sur la perception globale du luxe permet de noter la prédominance de des motivations externes
face à celles personnelles, ce qui ce justifie par le poids de la dimension communautaire, et
l’effacement de l’individu au profit des valeurs du groupe dans le contexte de l’étude. Ces
139
résultats s’inscribvent bien dans la logique de la théorie du management de l’impression selon
laquelle les consommateurs utilisent les marques (produits de luxe) comme symbole pour créer
une image sociale favorable. L’influence du réseau social, sur l’individu est important ce qui
prédit un coefficient de régression plus élevé.

La relation entre l’utilité et le caractère pratique perçus met et relief un coefficient de 0,14
significativité au seuil de 5%. Nos résultats ici sont conformes à ceux des travaux de Shukla et
Purani (2012) dans le contexte britanique qui ont obtenu une corrélation forte et significative
de 0,44 entre ces deux variables. Ils sont également en harmonie avec les résultats de (Levis,
Rolex, Ray Ban et Porsche) en Australie, ils ont obtenu des coefficients de corrélation oscillant
entre 0,73 et 0,88 pour ces variables. Cependant, ils infirment les résultats des mêmes auteurs
dans le contexte indien. En effet, ils ont noté une correlation non significative entre ces deux
variables. Enfin, pour le lien entre les prix élevés et la perception globale des produits de luxe
mis en relief par notre hypothèse H4, nous avons noté une correlation significative (coefficient
de régression de 0,348, p <5%). Ces résultats confirment ceux de Shukla et Purani (2012) qui
ont obtenu une corrélation positive et significative. Dans les contextes britanique et indien, ils
ont obtenu des coefficients de corréltion possitifs et significatifs respectivement de 0,17 et
0,15 entre ces deux variables. La variable Prix élevés est celle qui a le coefficient de regression
le plus élevé, ce qui est normal vu le contexte de précarité de l’etude. Le prix constitue la
varitable qui mérite le plus d’intérêt de la part des managers du luxe à l’attention des
consommateurs au bas de la pyramide. La seconde variable explicative la plus importante est
« motivations externes » qui doit etre aussi prise en compte par les spécialites des prosuits de
luxe. Il faut enfin préciser que les valeurs plus ou moins moyennes et les coefficients de
corrélation obtenus dans cette étude, qui ne sont pas toujours proches de ceux obtenus dans la
littérature, peuvent être expliqués par la faible taille de l’échantillon d’étude et/ou par les
différences méthodologiques et contextuelles des études.

Par rapport à ces résultats, notre recherche présente des implications à la fois théoriques et
managériales.

CONCLUSION ET IMPLICATIONS DE LA RECHERCHE

Les implications de notre étude sont relevées sur deux plans. Au plan théorique, l'étude propose
un modèle d'intégration qui présente une relation directe entre les motivations (personnelles et
externes) et la perception globale du luxe, ensuite entre le caractère utile et pratique des produits
de luxe et la perception globale du luxe et enfin entre les prix élevés des produits de luxe et la
140
perception globale du luxe. Nous avons donc effectué une réplication d’un modèle testé dans
les pays du nord, sur un nouveau type de consommateur de luxe, celui contexte de précarité.
Au plan managérial, la recherche vise donc à fournir aux managers des indicateurs sur lesquels
ils peuvent agir en fonction de leurs objectifs, dans le domaine du luxe. Les résultats de cette
étude peuvent permettre, aux multinationales dans le domaine du luxe, d’élaborer un politique
marketing adapté aux consommateurs en contexte de précarité, en mettant l’accent sur les
variables déterminantes de la perception globale du luxe dans un contexte de précarité. Les
facteurs explicatifs de la perception du luxe mis en relief dans cette étude peuvent être utilisés
par les entreprises du domaine du luxe pour créer des marques de luxe appréciées par les
consommateurs au bas de la pyramide. Dans une logique concurrentielle, les résultats de notre
étude peuvent être utilisés pour élaborer des messages publicitaires axés sur des variables
précises auxquelles le potentiel acheteur est sensible. Ils peuvent être aussi utilisés pour la
formation de la force de vente pour améliorer le discours à tenir devant le consommateur.

Comme toute étude empirique, cette recherche n’est pas exempte de limites. Les limites de
l’étude sont essentiellement inhérentes à la taille de l’échantillon. Cette étude a été réalisée dans
la ville de Cotonou, capitale économique du Bénin, et donc, les résultats de cette étude ne
peuvent être généralisés à tous les pays en voie de développement. Nous avons retenu quatre
variables indépendantes dans notre étude pour mesure de simplicité or la perception peut être
liée à d’autres variables. Des études couvrant un échantillon plus large peuvent être réalisées
pour vérifier les résultats de cette étude. La perception pouvant être liée à d’autres variables, il
est important d’identifier et d’analyser la relation entre d’autres variables indépendantes
sélectionnées en fonction du contexte culturel, et la perception globale du luxe. Il serait
intéressant d’analyser, à travers d’autres études ces différences de perceptions et même celles
liées au genre en contexte de précarité. En dehors de ces pistes de recherche liée aux limites, on
peut aussi analyser dans le cadre d’études antérieures, l’impact de la perception globale du luxe
sur l’intention d’achat du consommateur avec comme modération la pression sociale, ou la
religion. Enfin on peut dans le cadre d’une étude internationale analyser les différences de
perception des produits de luxe au niveau des consommateurs en situations de précarité dans
les pays du nord et ceux dans la même situation dans les pays en voie de développement.

L’objectif de notre étude est de déterminer les variables qui impactent la perception
globale des produits de luxe par les habitants dans un contexte de précarité. Les résultats
révèlent que les motivations externes, l’utilité et le caractère pratique perçus, et les prix élevés
des produits influencent positivement la perception globale des produits de luxe par des
141
béninois. Nonobstant ces limites, cette étude a tout de même le mérite de mettre en relief les
facteurs qui influencent la perception du luxe chez un nouveau type de consommateurs des
produits de luxe.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

AGOSSOU N. (2008). «Les villes du Bénin méridional : entre nature et culture? Géographie et
culture.

AMATULLI C., MATTEO DE A., DANIEL K., SIMONA R. (2018), « Consumers’


Perceptions of Luxury Brands’ CSR Initiatives: An Investigation of the Role of Status and
Conspicuous Consumption ». Journal of Cleaner Production 194 (septembre): pp: 277-87.
https://doi.org/10.1016/j.jclepro.2018.05.111.

BACHMANN F., GIANFRANCO W., EVA K. (2019), « Consumer Perceptions of Luxury


Brands: An Owner-Based Perspective ». European Management Journal 37 (3): 287-98.
https://doi.org/10.1016/j.emj.2018.06.010.

BEARDEN W. O., Etzel, M. J. (1982). «Reference group influence on product and brand
purchase decisions». Journal of Consumer Research, 9(2), pp.183-194.

BELK R. W. (1988). «Possessions and the Extended Self». Journal of Consumer Research,
15(2), pp. 139-168.

BENJELLOUN A., MEHDI T. A. Z. I. (2020). Le marketing de luxe dans les établissements


d’hébergements de luxe, cas des Riads dans la médina de Fès. Revue Internationale des
Sciences de Gestion, 3(1).

BERG, M. (2007). «Luxury and pleasure in eighteenth-century Britain USA»: Oxford


University Press.

BERTHON, P., PITT L., PARENT M., BERTHON J.-P. (2009). «Aesthetics and ephemerality:
observing and preserving the luxury brand». California Management Review 52(1), pp. 45-66.

CHUNG K., YOUN C., LEE Y. (2014). «The Influence of Luxury Brands’ Cross-Border
Acquisition on Consumer Brand Perception». Clothing and Textiles Research Journal, 32(4),
pp. 219-234.

142
DE BARNIER V., FALCY S. VALETTE-FLORENCE P. (2011). «Do consumers perceive
three levels of luxury ? A comparison of accessible, intermediate and inaccessible luxury
brands». Journal of Brand Management, 19(7), pp. 623-636.

DEW L., KWON W. (2010). «Exploration of apparel brand knowledge: Brand awareness,
brand association, and brand category structure». Clothing and Textiles Research Journal, pp.
28, 3-18.

DUBOIS B., LAURENT G. CZELLAR S. (2001), «Consumer Rapport to Luxury: Analyzing


Complex and Ambivalent Attitudes». Consumer Research Working Article 736(HEC, Jouy-
en-Josas, France).

FISKE N., SILVERSTEIN M. (2004), «Trading up: Trends, brands, and practices research
update». Retrieved 7 November 2006.

FORNELL C., LARCKER D. (1981), «Evaluating structural equation models with


unobservable variable and measurement error». Journal of Marketing Research, 18(1), pp. 39-
50.

HAN SH, HWAN YUN M, KIM KJ, J. K. (2000), «Evaluation of product usability:
development and validation of usability dimensions and design elements based on empirical
models». International Journal of Industrial Ergonomics, 26(4), pp. 477-488.

HOUNKOU E. (2006), «Les pratiques de gestion des ressources humaines des entreprises
béninoises les plus performantes sont-elles plus ou moins congruentes au contexte culturel
béninois ? » XVIIe Congrès de l’AGRH – Le travail au coeur de la GRH IAE de Lille et Reims
Management School.

KAPFERER J.-N. (1997), «Managing luxury brands. Journal of Brand Management, 4(4), pp.
251-260.

LEIBENSTEIN H. (1950), «Bandwagon, snob and Veblen effects in the theory of consumers'
demand». Quarterly Journal of Economics, 64, pp. 183-207.

LICHTENSTEIN H., DONALD R., PETER H. BLOCH, BLACK. W. C. (1988), «Correlates


of Price Acceptability. Journal of Consumer Research, 15(2), pp. 243-252.

BERG M. (2007). «Luxury and pleasure in eighteenth-century Britain USA:. Oxford


University Press.
143
MASON. (1981), « Conspicuous consumption». In N. Y. St Martin's Press (Ed.).

O'CASS A., MCEWEN H. (2004), «Exploring consumer status and conspicuous


consumption». Journal of Consumer Behaviour, 4(1), pp. 25-39.

PARGUEL B., DELECOLLE T., VALETTE-FLORENCE P. (2016), « How Price Display


Influences Consumer Luxury Perceptions ». Journal of Business Research 69 (1): p: 341-48.
https://doi.org/10.1016/j.jbusres.2015.08.006.

PHAU I., PRENDERGAST G. (1998), «Conceptualizing the country of origin of brand». Hong
Kong Baptist University.

SHETH J. N. GROSS B. L. (1991), «Why we buy what we buy: A theory of consumption


values». Journal of Business Research, 22, pp. 159-170.

SHUKLA P. (2010), «Statut consumption in cross-national context: socio-psychological, brand


and situational antecedents». International Marketing Revew, 27(1), pp. 108-129.

SHUKLA P. (2012), «The influence of value perceptions on luxury purchase intentions in


developed and emerging markets» International Marketing Review, 29(6).

SHUKLA P., PURANI K. (2012). «Comparing the importance of luxury value perceptions in
cross-national contexts». Jounral of Business Research 65, pp. 1417-1424.

SMITH J. B., COLGATE M. (2007), «Customer value creation: a practical framework». The
Journal of Marketing Theory and Practice, 15(1), pp. 7-23.

SOGBOSSI BOCCO, B. (2009), «La vulnérabilité des petites entreprises face à la non lisibilité
de l'environnement: entre un comportement planifié et opportuniste». Communication au
Collogue International, 11ème journée scientifique du Réseau Entreprenariat, INRPME- AUF-
AIREPME, 27 au 29 mai 2009.

SPANGENBERG E., VOSS K., CROWLEY A. (1997), «Measuring the hedonic and utilitarian
dimensions of attitudes: a generally applicable scale». Advances in Consumer Research, 24, pp.
235-241.

THOMAS D., DELUXE. (2007), « how luxury lost its luster». New York: Penguin Group USA.

TSAI S. (2005). «Impact of personal orientation on luxury-brand purchase value». International


Journal of Market Research, 47(4), pp. 177-206.
144
TYNAN C., MCKECHNIE S., CHHUON C. (2010), «Co-creating value for luxury brands».
Journal of Business Research, 63(11), pp. 1156-1163.

VIGNERON F., JOHNSON L. (2004), «Measuring perceptions of brand luxury» Journal of


Brand Management, 11, pp. 484-506.

WIEDMANN K-P., HENNIGS N., SIEBELS A., (2009), «Value-based segmentation of luxury
consumption behavior». Psychology & Marketing, 26(7), pp. 625-651.

WIEDMANN K-P., HENNIGS N., SIEBELS A. (2007), «Measuring consumer' luxury value
perception: A cross-cultural framwork». Academy of marketing science, 11, pp. 1-21.

ZEITHAML V.,A. (1988), «Consumer perceptions of price, quality, and value: A means-end
model and synthesis of evidence». The Journal of Marketing, 52, pp. 2-22.

145
Achevé d’imprimé en Côte d’Ivoire par AKAMA GROUPE, Abidjan Cocody rue des
goyaviers, 08 BP 2890 Abidjan 08 (Côte d’Ivoire).

N° d’imprimeur : RCCM : CI-ABJ-2016-B-7774

Dépôt légal : Décembre 2022- imprimé en Côte d’Ivoire

170
SERIE A - GESTION / NUMERO 13 - VOLUME 1 – Décembre 2022

Vous aimerez peut-être aussi