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in Michel, Alain et Paty, Michel (éds.). Analyse et dynamique.

Etudes sur l'œuvre


de d'Alembert, Presses de l'Université Laval, Québec, 2002, p.-.

Les recherches actuelles sur d'Alembert


A propos de l'édition de ses Oeuvres complètes*

Michel PATY**

A la mémoire de Georges Gusdorf 1

INTRODUCTION.
UN NOUVEL INTERET POUR D'ALEMBERT

La concrétisation récente du projet de publication des Oeuvres


complètes de Jean le Rond d'Alembert (1717-1783), Géomètre et Philosophe,
redonne une actualité aux recherches sur cet auteur dont l'importance est
fondamentale dans de nombreux domaines de l'histoire des sciences et des idées.
La pensée et l'oeuvre de d'Alembert intéressent aussi bien les mathématiques, la
physique, la philosophie, où ses travaux ont fait date, que l'histoire intellectuelle,
sociale et politique, par son activité dans la société de son temps, dans une période
particulièrement riche, celle de la France et de l'Europe des Lumières. Son rôle de
co-directeur de l'Encyclopédie, avec Diderot2 , son influence sur les Académies de
Paris et de Berlin notamment, ses rapports avec les grands esprits de son époque,
sont notoires et particulièrement significatifs de la place de la science dans le
mouvement des idées et dans les changements sociaux du siècle.

* Une première rédaction de ce travail avait été préparée en 1993, pour le Congrès International
d’Histoire des Sciences de Saragosse (qui s'est tenu en août de cette année-là), où l'auteur n'avait pu
se rendre, mais où le texte fut distribué. Le texte présent a été considérablement remanié pour tenir
compte des nombreux travaux de recherche réalisés depuis lors. Nous ne pouvions cependant être
exhaustifs et rendre justice à tous. Nous avons surtout voulu rendre compte d'une dynamique et en
montrer l'intérêt.
** Equipe REHSEIS (UMR 7596), CNRS et Université Paris 7-Denis-Diderot.

1 Georges Gusdorf (1912-2000), professeur à l'Université de Strabourg, s'est éteint le 17 octobre


2000, quand je mettais une dernière main à ce travail. Je lui dois de m'avoir orienté, lors de mes
études de philosophie, quand j'ai suivi son enseignement de maîtrise puis de DEA sur le dix-
huitième siècle, vers la pensée de d'Alembert. C'est sous sa direction que j'ai préparé ma thèse de
doctorat en philosophie sur ce sujet, soutenue en 1977.
2 D'Alembert et Diderot [1751-1780]. Voir la bibliographie. En toute rigueur, d’Alembert cessa
d’être co-directeur de l’ouvrage en 1759, tout en continuant d'assurer la responsabilité des textes de
physique et de mathématiques.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 2

On peut estimer cependant que cette oeuvre, dans la diversité de ses


dimensions, n'avait pas reçu jusque récemment, de la part des historiens et des
philosophes, une attention suffisante. Symptomatique était, à cet égard, l'échec des
projets successifs de publication de ses Oeuvres, faute de rencontrer un intérêt
suffisant. Le mauvais sort semble enfin heureusement conjuré, plusieurs
institutions3 ayant décidé de soutenir le projet qui leur a été soumis, et de consacrer
des moyens à sa réalisation. Celle-ci est avant tout possible, bien entendu, parce
qu'un certain nombre de chercheurs en histoire et en philosophie des sciences, mais
aussi d'autres disciplines comme l'histoire, l'histoire littéraire, l'astronomie, la
physique des fluides, ont réussi à conjuguer de manière déterminée leurs efforts
dans cette direction. Si le projet, qui a commencé d'être repris depuis bientôt près
de dix ans, a pris corps, cela est dû en premier lieu à l'enthousiasme de ces
chercheurs et à la coopération des diverses équipes françaises d'histoire des
sciences et d'épistémologie, auxquelles se sont joints plusieurs spécialistes d'autres
pays4 .
L'intérêt pour la pensée et l'oeuvre de d'Alembert s'est soutenu de
manière constante, bien que relativement discrète, depuis plusieurs décennies.
Plusieurs ouvrages, monographies et thèses, et de nombreux articles lui ont été
consacrés, étudiant tantôt ses contributions en mathématiques et en physique, tantôt
son oeuvre philosophique ou «littéraire», et tantôt tentant de tenir ensemble les
deux5 . Par ailleurs, les études faites également sur ses contemporains ou ses
successeurs (parmi ces derniers, en premier lieu, Lagrange, Laplace et Condorcet)
concourent également à faire mieux voir l'importance de ce savant et penseur, pour
l'histoire des sciences, mais également pour celle des idées, philosophiques, et
aussi bien littéraires, morales et politiques, et à mieux le saisir dans son temps,
parmi ses contemporains6 .
De telles études sur d'Alembert et sur des sujets connexes, qui étaient
hier encore exceptionnelles, en comparaison avec les savants ou les philosophes
dont on parle et que l'on enseigne7 , ont commencé de se multiplier dans les
dernières années, en relation, sans doute, aux travaux préparatoires à l'édition de

3 En premier lieu, le CNRS. L'Académie des sciences considère, dans un vœu, le projet actuel
d'édition critique des Oeuvres complètes comme étant d'une importance prioritaire.
4 Je remercie, en particulier, pour leurs informations, pour leurs travaux, et pour de fructueuses
discussions, Umberto Bottazzini, Eric Brian, Michelle Chapront, Anne-Marie Chouillet, Alain
Coste, Pierre Crépel, François de Gandt, Gérard Grimberg, Christian Houzel, Alain Michel, Bruno
Morando (prématurément disparu), Irène Passeron, Jeanne Peiffer, Elisabeth Schwartz, Jean
Souchay, Jean-Luc Verley, Jérôme Viard, Christiane Vilain.
5 Par exemple, parmi les monographies dont j'ai connaissance, sans enquête exhaustive, depuis
une trentaine d'années : Maheu [1967], Hankins [1970], Paty [1977], Le Ru [1994], Paty [1998],
Grimberg [1998] ; et, pour les publications collectives, celles occasionnées par le bi-centenaire de
la mort de d'Alembert, commémoré en 1983 (cf. Paty [1984c]) : Auroux et Chouillet [1984],
Emery et Monzani [1989), auxquelles s'ajoutent le présent ouvrage et un numéro spécial de la
revue Corpus sous la responsabilité de Francine Markovits et Jean-Jacques Szczeciniarz, à paraître
en 2001. Signalons l'édition récente annotée, par Michel Malherbe, du Discours préliminaire de
l'Encyclopédie de d'Alembert (d'Alembert [1751]2000). Une bibliographie complète est ici hors de
question. D'autres travaux seront évoqués dans le cours de l'article, surtout les plus récents.
6 Voir notamment Merleau-Ponty [1983], Rashed [1988], Crépel et Gilain [1989], Galleto [1991],
Passeron [1994], Martin-Viot [1994].
7 Parmi les signes de changement en ce qui concerne l'enseignement en France, d'Alembert a été
«promu» en 1998 au nombre des auteurs au programme du concours d'agrégation en philosophie.
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ses Oeuvres complètes. Mais il faut tenir compte également d'une conjoncture plus
ample, où un intérêt croissant se marque pour la réflexion sur les sciences et pour
une compréhension exigeante de leurs origines ainsi que de celles du monde
moderne. Cet intérêt comprend la prise en compte d'un souci très marqué pour
l'exactitude historique et pour le rejet des reconstitutions simplificatrices effectuées
à partir de la science d'aujourd'hui et des configurations du monde actuel, ou
organisées autour de schémas chronologiques qui ne retiennent que quelques noms
de savants, devenus archétypiques ou paradigmatiques. La science et le monde
actuels ne préexistaient pas à l'époque considérée, et c'est au contraire de cette
dernière qu'ils sont originaires.
L'on oublie, ou l'on ignore, trop aisément que la physique et la
mécanique classique nous viennent en très grande partie des mathématiciens et
«géomètres» du XVIII è siècle, continuateurs de Newton, certes, mais ayant fait
fructifier le legs newtonien en le combinant à d'autres héritages, et en y ajoutant
beaucoup d'éléments qui leur sont dus en propre.
J'ajouterai qu'un nouvel intérêt pour la question de l'invention et de la
découverte scientifiques, qui se fait jour depuis quelque temps, incite à revenir à des
oeuvres qui avaient été, au moins en partie, négligées par les historiens des
sciences, à cause de leur difficulté de lecture dont la raison principale était pourtant,
précisément, qu'y surgissaient des idées neuves en recherche de leur expression.
Négligées ou sous-estimées en temps différé par les analystes, elles n'en avaient
pas moins eu une influence considérable et souvent immédiate, directement ou
indirectement (à travers leur reprise par d'autres), car telle est la vertu de ce qui est
nouveau et produit les élargissements de la connaissance.
Et, en vérité, non seulement les philosophes, mais bien souvent les
historiens des sciences eux-mêmes préféraient les avenues des nouveautés
aménagées de la science, désormais bien acquises et assimilées, aux sentiers
malaisés de sa création : si les premiers ont voulu l'affirmer expressément au cours
du siècle qui s'achève par un choix volontaire de méthode (un choix que l'on peut
estimer trop limitatif)8 , il est plus difficile de le concevoir pour ce qui est des
seconds : sans doute faut-il y voir l'indice d'un changement, d'un
approfondissement, dans la conception de l'historicité des sciences. A coup sûr,
d'Alembert fut la victime de l'illusion rétrospective, en raison d'une certaine
difficulté, voire parfois d'une obscurité, de ses textes, qui se rencontrent surtout
dans les traitements mathématiques. Cette sous-estimation prolongeait, dans un
certain nombre de cas, les difficultés qu'il rencontrait déjà à cet égard de son vivant
même, dans la concurrence qui l'opposait à ses pairs qui étaient souvent ses rivaux,
notamment Alexis Clairaut et Leonhard Euler.
L'originalité de l'œuvre de d'Alembert n'a donc pas toujours été
reconnue comme elle aurait dû l'être, parce que d'autres que lui ont su mieux mettre
en valeur et déployer des idées qu'il fut le premier à émettre, tant en mathématiques
qu'en physique, mais également en philosophie des sciences. Faute d'avoir été
suffisamment étudiés, nombre de ses textes scientifiques, souvent marqués par les

8 Selon une conception qui lie la rationalité à la justification et abandonne la découverte aux jeux
obscurs de la pensée : cette conception, affirmée clairement par la philosophie anglo-saxonne, avec
la distinction entre “contexte de découverte” et “contexte de justification”, était diffuse chez la
plupart des autres philosophes de la connaissance.
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obscurités de la gestation, n'avaient pas encore révélé toute la richesse d'aperçus et


de développements neufs qu'ils récélaient, issus de sa pensée créatrice, et dans
lesquels on peut voir ces contenus s'élaborer.
Les chercheurs qui, de nos jours, ont tenté l'aventure d'examiner de
près tel ou tel de ses travaux ne manquent pas de souligner la remarquable
inventivité - et l'on ne doit pas craindre de dire : la créativité - scientifique dont il y
fait preuve. Elle leur apparait avec évidence quand ils ont réussi à dépasser les
difficultés du premier déchiffrement. Cest là sans doute l'une des plus fortes leçons
des recherches récentes d'histoire et de philosophie des sciences sur l'œuvre de
d'Alembert.
Je m'efforcerai dans ce qui suit de souligner quelques uns des aspects
les plus marquants de son oeuvre et de sa pensée, en mettant l'accent sur ce que ces
études nouvelles ont d'ores et déjà apporté et sur ce qu'elles laissent parfois déjà
entrevoir.

L'ORGANISATION
DES OEUVRES COMPLETES

Les textes de d'Alembert, mis à part les grands ouvrages, sont


dispersés dans des mémoires d'Académies, dans des revues diverses, dans des
volumes publiés par les soins de l'auteur (Opuscules et Mélanges), voire sont
restés, pour certains d'entre eux, sous forme manuscrite9 , et sont parfois difficiles
à trouver. Quelques uns même furent confiés par lui aux ouvrages d'autres auteurs,
comme tels de ses résultats sur le calcul différentiel qu'il ne prit pas lui-même le
soin de publier mais qu'il communiqua à son élève Louis Antoine de Bougainville,
le futur navigateur, lequel publia un Traité de calcul intégral en deux volumes (1754
et 1756) (les contributions, identifiées, de d'Alembert sont reprises dans l'édition
des Oeuvres). De nombreuses et précieuses indications sont recélées dans la
correspondance, dont la publication systématique restait à entreprendre. Il fallait
donc rassembler ces textes et les étudier comme ils méritent de l'être, dans un
premier temps par le travail d'édition critique, puis par les études futures qui en
seront par là facilitées. Telle est la tâche entreprise par l'édition des Oeuvres
complètes dont les premiers volumes verront le jour en 2001.
Il est essentiel, pour saisir véritablement l'importance de cette oeuvre,
riche de résultats féconds et d'idées pionnières souvent audacieuses, d'en disposer
dans une publication d'ensemble, systématique et critique, qui soit une édition de
référence (au même titre que, pour cette époque, celle d'Euler 10 ). Une telle
entreprise ne peut être que de longue haleine : elle est estimée à une vingtaine
d'années environ en conjuguant les efforts de deux ou trois dizaines de chercheurs
qui s'y consacreraient au moins partiellement. Ceux qui préparent actuellement les
premiers volumes, qui commenceront de paraître en 2001, y travaillent depuis 1992
(sans préjuger des recherches antérieures de plusieurs d'entre eux sur notre auteur
ou sur d'autres de la période), réunis pour cela dans un informel “Groupe

9 La bibliographie des écrits de d'Alembert la plus complète à ce jour est celle établie par Anne-
Marie Chouillet pour le présent volume (Chouillet [2001]).
10 Cf. Euler [1911-]. Entreprise depuis 1911, cette édition est cependant encore inachevée.
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d’Alembert”, constitué au total d'une trentaine de chercheurs français et étrangers,


appartenant à des équipes de recherches en sciences, histoire des sciences et
philosophie, ou chercheurs isolés de diverses institutions françaises ou
étrangères11 . Le travail commun est coordonnée sous la responsabilité d'un
“Comité pour l’édition des Œuvres complètes et la recherche sur d’Alembert et son
temps” (plus brièvement, “Comité D’Alembert”)12 .
Bien que la nécessité de publier les Œuvres complètes fût admise d'une
manière générale, il était apparu initialement que le plus urgent était de réunir et de
commenter en édition critique les travaux de la première période, qui est celle de la
plus intense production scientifique de d'Alembert, de ses premiers mémoires de
mathématiques à l'Académie des sciences de Paris à ses grandes oeuvres en
mécanique des solides et des fluides et en astronomie (de 1741 au milieu des années
1750. Ensuite seulement aurait été entreprise la publication des œuvres ultérieures,
tant dans les sciences mathématiques et physico-mathématiques (surtout
rassemblées dans les Opuscules mathématiques), que dans les autres domaines de la
pensée où d'Alembert s'investit de plus en plus à partir de la publication de
l'Encyclopédie et de ses activités aux Académies (surtout à l'Académie Royale des
sciences de Paris et à l'Académie française ; mais d'Alembert fut également
membre de plusieurs autres, dont celle de Berlin dont il déclina la présidence, que
lui avait offerte Frédéric II de Prusse).
C'est à cette première tâche que se sont consacrés d'abord les
chercheurs, et l'édition de la première série des Oeuvres qui y correspond reste
effectivement le premier objectif. Mais la réalité du travail de recherche satisfait
rarement la logique ordonnée - la chronologie et le calendrier - des projets imaginés,
et la réalisation s'annonce moins linéaire. Mais cela est assez naturel.
D'une part, en effet, le projet repose sur l'harmonisation de recherches
individuelles, et non pas sur une planification systématique de la part des
organisations partie prenantes qui auraient consacré pour cela des moyens à la
hauteur de l'objectif, comme cela se fait parfois ailleurs dans de véritables
entreprises d'éditions scientifiques. En outre, l'exigence de compréhension et de
précision historique demande fréquemment de connaître les travaux ultérieurs, tels,

11 Les équipes et institutions françaises parties prenantes du Groupe d'Alembert sont


actuellement : le DANOF, Département d’Astronomie Fondamentale (UMR 8630), du CNRS et
de l'Observatoire de Paris ; l’équipe REHSEIS (Recherches Epistémologiques et Historiques sur
les Sciences Exactes et les Institutions Scientifiques (UMR 7596), du CNRS et de l'Université
Paris 7-Denis Diderot ; le Centre Alexandre Koyré (UMR 48), du CNRS et de l'EHESS, à Paris ;
l’équipe MAPLY (Laboratoire de Mathématiques Appliquées de Lyon (UMR 5585), du CNRS et
de l'Université de Lyon 1 ; le LIRDHIST (Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches en
Didactique et Histoire des Sciences), de l'Université de Lyon 1 ; l’équipe Savoirs et Textes (UMR
8519), du CNRS et des Universités de Lille 1 et 3. L'organisation d'ensemble s'est tout d'abord
effectuée par un GDR (Groupement De Recherches, du CNRS, n°1044) de 1993 à 1997 ; puis il a
été soutenu par le Programme “Archives de la création” du CNRS, de 1997 à 2000. A ce titre, il
est rattaché à l’actuelle ERS 2121, unité mixte de service, du CNRS et de la Fondation pour la
science-Centre International de synthèse, Paris. En outre, le Centre National du Livre et
l’Université de Lyon 1 co-financent six volumes des Opuscules mathématiques.
12 En place depuis 1992, ce Comité a fonctionné de 1992 à 1996 en étant constitué de : Eric
Brian, Anne-Marie Chouillet, François de Gandt, Bruno Morando, Michel Paty, Jeanne Peiffer,
Elisabeth Schwartz. Renouvelé en 1997, il comprend actuellement (fin 2000) : Eric Brian, Anne-
Marie Chouillet, Michelle Chapront, François De Gandt, Christian Gilain, Irène Passeron, Jérome
Viard.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 6

par exemple, que ceux confiés aux neuf volumes des Opuscules mathématiques, qui
permettent un éclairage mutuel entre les premiers traités et les développements qui
leur ont fait suite.
D'autre part, l'apparat critique des premiers volumes (aussi bien
d'ailleurs que celui des autres travaux scientifiques postérieurs) demande, pour être
réellement éclairant, l'étude d'autres documents tels que la correspondance, pour
laquelle un travail de collection s'impose, ou, surtout à partir de 1751, l'étude des
articles de d'Alembert dans l'Encyclopédie et d'autres publications comme le
Journal des Savants ou le Mercure de France, qui souvent accompagnent ses
élaborations scientifiques, contribuent à en rendre explicites certains aspects,
notamment conceptuels, et permettent de les resituer par rapport aux débats et aux
polémiques de l'époque.
C'est ainsi que l'ordre de parution des volumes de la première série
diffèrera de celui de la numérotation des volumes, et que certains tomes des séries
ultérieures paraîtront avant que ceux de la première série ne soient terminés. Cette
entorse à l'organisation chronologique-thématique n'en est pas vraiment une,
puisque cette dernière sera respectée par l'ordre de numérotation des volumes ; elle
est, en fait, conforme à la réalité d'une telle recherche, qui est faite d'imbrications et
dont le parcours ne peut suivre un schéma rectiligne.
Ces aspects du travail collectif des chercheurs sont discutés et
coordonnés au cours de rencontres de travail régulières, ainsi que de séminaires et
de journées sur des sujets particuliers, organisés sous l'égide du “Comité pour
l’édition des Œuvres complètes…”. Une semaine de travail réunit notamment
chaque année, depuis 1997, au Centre International de Recherches Mathématiques
de Luminy (en Provence), les chercheurs du groupe d'édition des Oeuvres de
d’Alembert13 , où sont présentés et discutés les choix éditoriaux sur les volumes en
cours. Des éléments d'analyse y sont soumis à l'appréciation collective, pour
préparer les annotations éditoriales qui requièrent souvent des éclairages
transversaux par des rapprochements avec d'autres parties de l'œuvre. Par
exemple, la reformulation ou l’utilisation du principe de dynamique dans le
traitement de tel problème d’astronomie, ou la présence, dans des travaux
d'astronomie ou d'hydrodynamique, d’une méthode particulière de résolution
d’équation différentielle, rencontrée par ailleurs, précédemment ou en même temps,
dans les mémoires de mathématiques pures.
Au plan de la documentation, les chercheurs ont recueilli des
informations et des matériaux auprès des fonds d’archives en France et à l’étranger,
et une petite équipe a eu à cœur de préparer des intruments de travail pour
l'entreprise dans son ensemble, tels que les inventaires de manuscrits et
d’imprimés, les chronologies, les bibliographies, et les index 14 Un inventaire des
œuvres de d’Alembert (y compris une base de données pour la correspondance) a
été effectué15 .
Le travail de collaboration a permis de définir un apparat critique
commun, et adapté à divers publics (chercheurs et étudiants, scientifiques,

13 Ces semaines sont organisées par Irène Passeron avec le soutien du CNRS.
14 Cette petite équipe inclut Anne-Marie Chouillet, Pierre Crépel et Irène Passeron. Voir Crepel
[1996c, d].
15 Voir la contribution d'Anne-Marie Chouillet dans le présent ouvrage.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 7

philosophes, historiens ou littéraires), et chaque volume est placé sous la


responsabilité d’une ou plusieurs personnes. L’édition est prévue sur papier et
électronique, cette dernière permettant des facilités d'utilisation par la caractère
automatique des renvois d'un article à un autre, ce qui rend particulièrement
indiquée l'édition électronique des articles de l'Encyclopédie, qui semble
directement adaptée, grâce à la richesse de l’«hypertexte», aux mémorables
stratégies des directeurs de l'ouvrage (le caractère subversif des idées assuré par un
usage approprié des renvois).
Ainsi le travail d’édition avance-t-il, autour d'une structure relativement
informelle, animée par des chercheurs qui ne disposent pratiquement pas de moyens
spécifiques pour cette entreprise, et qui poursuivent de leur coté des recherches
propres sur tel ou tel aspect de l'œuvre. Les “Presses du CNRS” assurent la
publication.
L'édition des Œuvres complètes de d’Alembert comportera environ 35
volumes et sera la première édition critique présentant tous les textes publiés
“scientifiques” et “littéraires”, ainsi que des inédits. L'apparat critique pourra
représenter jusqu'au tiers ou à la moitié de chaque volume, qui comprendra, outre
les notes, une introduction historique, des annexes et un index. Le plan de l’édition
suit, comme on l'a indiqué plus haut, un ordre chronologique et thématique, qui
amène à distinguer cinq séries. La première série porte sur Sciences mathématiques
I (avant l’Encyclopédie) ; la seconde, sur les Articles de l'Encyclopédie ; la
troisième, sur : Sciences mathématiques II : Opuscules mathématiques et autres
recherches ; la quatrième, sur : Belles-Lettres: littérature, histoire, philosophie,
musique ; la cinquième sera consacrée à la Correspondance générale (active et
passive)16 . Et voici, maintenant, quelque détail des volumes à l'intérieur de
chacune des séries17 .
La Première série : Sciences mathématiques I, comprendra dix volumes
ou fascicules, correspondant aux contenus suivants : 1. Formation de D'Alembert
et premiers travaux (responsable: J. Peiffer ). - 2. Traité de Dynamique 1743 et
manuscrits connexes (resp. M. Paty et J. Viard).- 3. Traité de l'équilibre et du
mouvement des fluides 1744 (resp. M. Blay, P. Crépel, A. Coste).- 4. Calcul
intégral et cordes vibrantes (resp. C. Gilain et U. Botazzini), qui sera
vraisemblablement le second à paraître, en 2001. - 5. Réflexions sur la cause
générale des vents 1747 (resp. F. De Gandt). - 6 Premiers textes de mécanique
céleste 1747-1749 (resp. M. Chapront et I. Passeron) : ce sera le premier volume
publié en 2001, et il comprendra un manuscrit inédit retrouvé sur la théorie de la
Lune. - 7. Recherches sur la précession des équinoxes 1749 (resp. J. Souchay). -
8. Essai d'une nouvelle théorie de la résistance des fluides 1749-1752 (resp. M.
Paty et G. Grimberg). - 9. Recherches sur différents points importants du système
du monde 1754-1756 (I). - 10. Recherches sur différents points importants du
système du monde 1756 (II)
La Deuxième série : Articles de l'Encyclopédie, sera répartie en 6
volumes (resp. E. Brian), et l’édition en sera, dans un premier temps au moins,

16 A la liste prévue, il faudra, sans doute, ajouter un ou deux volumes de textes dispersés et
d’index général, chronologies, etc.
17 On a mis en italiques les titres qui correspondent à des traités publiés en volumes par
d'Alembert, mais ils pourront aussi inclure des mémoires, ou d'autres documents.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 8

uniquement électronique, selon ce qu'on annonce.


La Troisième série : Sciences mathématiques II, comprendra
essentiellement les Opuscules mathématiques, volumes 1 à 9 (resp. P. Crépel). Ce
sera un choix éditorial de savoir s'il faut «désosser» les Opuscules au contenu
disparate, en combinant une présentation chronologique et thématique. Nous en
reparlerons plus loin.
La Quatrième série : Belles-Lettres (littérature, histoire, philosophie,
musique), comprendra les Eléments de musique, les Mélanges, qui contiennent,
entre autres la traduction de Tacite, l’Essai sur les éléments de philosophie, les
Eclaircissements à cet Essai, la Destruction des Jésuites, et les volumes suivants
porteront sur : Belles-Lettres et écrits personnels, Eloges et textes académiques.
La Cinquième série : Correspondance générale (resp. A.-M. Chouillet
et I. Passeron), comprendra un premier volume d'Inventaire 1746-1783 ; un
second volume pour la première période de la Correspondance 1746-1760 ; les
volumes suivants seront déterminés par une répartition en tranches d'environ 350
lettres, pour un ensemble d'environ 2200 lettres répertoriées.
Certaines volumes des séries suivantes connaissent déjà un degré de
réalisation relativement avancé : il s'agit des premiers volumes d'articles de
l'Encyclopédie et des deux premiers volumes de la Correspondance.
S'il est permis d'émettre une critique, la disposition des écrits de nature
philosophique, noyés sans distinction nette dans la masse des écrits littéraires parait
mal appropriée à une mise en évidence directe de la force et l'originalité de l'apport
philosophique de d'Alembert. Il n'est pas suffisant, à cet égard, d'invoquer le fait
que d'Alembert ait lui-même rassemblé ses écrits non-scientifiques dans cinq
volumes de Mélanges18 , pour récuser toute possibilité d'en faire autrement pour ses
Oeuvres complètes. En effet, la répartition choisie contrevient déjà au classement
fait par d'Alembert, puisque ce dernier a bel et bien republié le Discours
préliminaire de l'Encyclopédie dans les Mélanges, alors que, dans le projet
d'édition, le Discours préliminaire figurera seulement dans la série sur les
contributions à l'Encyclopédie. Il serait autant justifié, à mon sens, de faire sinon
une série entière, du moins des volumes spécifiquement philosophiques, qu'il l'est
de séparer thématiquement les volumes des sciences exactes. Je reviendrai plus loin
sur ce que pourrait être une séquence des œuvres philosophiques de d'Alembert.

LA FORMATION ET L 'HERITAGE

La publication des premiers travaux mathématiques de d'Alembert - qui


figurent dans les premiers volumes -, tout en permettant de réévaluer avec précision
ses contributions fondamentales en algèbre et en analyse (intégration des fonctions
rationnelles, théorème fondamental de l'algèbre, problème des cordes vibrantes et
intégration des équations aux dérivées partielles), fournit l'occasion d'approfondir
la question de son apprentissage. Celui-ci se rattache aux circonstances du
renouveau de la pensée mathématique et physique en France à cette époque,
inaugurant une période extrêmement féconde, qui fut le siècle d'or de la science

18 Le contenu des Mélanges a été repris dans les éditions des Œuvres (non-scientifiques) de 1805 et
de 1821 (d'Alembert [1805, 1821]).
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 9

française - en gros des années 1730-1740 à 1830 -, après une période plus obscure
qui la séparait d'un XVII è siècle dont il est inutile de redire toute la richesse19 .
Les premiers textes publiés et les manuscrits des premières années de la
vie scientifique de d'Alembert témoignent de ses lectures, tant des manuels
(Guisnée, Reyneau, de Gua, qu'il commente et dont il relève des erreurs) que des
grands traités et des grands auteurs (outre Descartes et Fermat, il a lu les Principia
de Newton dans la récente édition de Le Seur et Jacquier, le Traité des fluxions de
MacLaurin ; il saisit toute l'importance de l'oeuvre de Jean Bernoulli sur le calcul
différentiel leibnizien), sans omettre les travaux importants de ses prédécesseurs
français immédiats comme Maupertuis, Clairaut ou Fontaine.
Sa formation a contribué à déterminer ses centres d'intérêt en
mathématiques et dans les «sciences physico-mathématiques», et à façonner son
“style” en ce qui concerne son approche des problèmes scientifiques et son travail
de recherche. Pour les sciences physico-mathématiques, c'est-à-dire la physique, au
sens d'aujourd'hui, mais limitée alors aux domaines susceptibles de traitement
mathématique, ce style se caractérise par une attention aux principes et à la mise en
œuvre, légitimée par le choix critique de ces derniers, de la nouvelle analyse, celle
du calcul différentiel et intégral.
La constitution de sa pensée mathématique et physique et son
soubassement philosophique pose la question de l'héritage intellectuel de
d'Alembert, de sa fliation ou de ses ruptures par rapport aux grandes directions de
pensée qui avaient marqué l'espace intellectuel dans lequel il se trouvait. Cette
question est, en particulier, celle de la manière suivant laquelle d'Alembert, dont la
formation initiale fut en bonne part cartésienne, reçut et développa la science
newtonienne20 .
S'il garda de sa formation une conception très cartésienne de
l'intelligibilité et de la rationalité des principes de la connaissance, sa découverte de
la science newtonienne détermina la direction de son travail dans les voies
désormais ouvertes pour la physique, avec les lois de la dynamique et de l'attraction
gravitationnelle et le traitement physico-mathématique des problèmes de la
mécanique. L'œuvre de d'Alembert n'est pas un simple développement de la
physique newtonienne, mais constitue une véritable réorganisation conceptuelle de
cette dernière, permise par la mise en œuvre systématique du calcul différentiel et
intégral, dans la formulation donnée par Leibniz. Aux deux influences mentionnées,
on peut donc aussi ajouter la tradition leibnizienne, représentée notamment par Jean

19 Sur ces circonstances, on consultera avec intérêt l'étude de John Greenberg [1986], qui insiste
sur les circonstances politiques ayant favorisé tantôt l'isolement et tantôt l'échange dans les
relations scientifiques au niveau européen. Indiquons la parution récente de l’édition critique, par
feu Pierre Costabel et Jeanne Peiffer, de la correspondance de Jean Bernoulli qui éclaire les
circonstances de l'adoption par les mathématiciens français des conceptions de Newton et de Leibniz
en analyse (Bernoulli [1988-1991], ainsi que l'étude de Michel Blay sur l’oeuvre de Pierre Varignon
concernant l’analyse et la mécanique (Blay [1992]]. En particulier, Varignon introduit les notations
dx ddx
différentielles de la vitesse et de l’accélération : v = et y = 2 . Voir également l’édition,
dt dt
traduite en français et commentée par Marc Parmentier, des articles (écrits en latin) de Leibniz sur
le calcul différentiel et ses applications à des problèmes de géométrie et de mécanique parus dans les
Acta Eruditorum, de 1682 à 1713 : Leibniz [1989].
20 Cette analyse est développée dans Paty [à paraître, a].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 10

Bernoulli (autre inspirateur reconnu par d'Alembert21 ), qui établit l'analyse comme
outil de pensée théorique.
D'Alembert fit ainsi fructifier cet héritage diversifié en développant son
style propre dont une première illlustration est la formulation originale qu'il donna
des propositions fondamentales de la dynamique en termes des seules variables
caractéristiques du mouvement, en réinterprétant une partie des énoncés
newtoniens, grâce à la conceptualisation des variables du mouvement comme des
grandeurs différentielles. C'est ainsi qu'il transcrivit les trois lois de Newton en
trois principes du mouvement, et put dès lors rattacher la mécanique tout entière,
avec la dynamique (science des modifications du mouvement) à une intelligibilité de
type cartésien. Le double, et même triple, héritage intellectuel de ce pionnier de la
physique mathématique que fut d'Alembert, marqua et son «style scientifique» (lui
faisant mathématiser la dynamique par l'analyse différentielle sous le signe de ses
principes), et son épistémologie, avec sa réflexion sur la nature des principes, sa
pensée de la mathématisation des grandeurs corrélative d'une critique conceptuelle
et d'une perspective féconde sur les “sciences physico-mathématiques”, et sa
conception de l'intelligibilité rationnelle22 .

LE STYLE DE L 'ANALYSE
ET LES PREMIERS TRAVAUX MATHEMATIQUES

Le premier ensemble des travaux de d'Alembert qui constitueront la


première série (I, volumes 1 à 10) des Oeuvres complètes sont ceux de sa période la
plus productive scientifiquement, consacrée de manière quasiment exclusive à ses
recherches mathématiques et physico-mathématiques. Comme les périodisations ne
sont jamais exactes, surtout concernant l'élaboration d'une pensée et d'une œuvre,
qui est un processus fait d'enchaînements divers et où les changements et même les
ruptures s'effectuent sur fond de continuité, des choix étaient nécessaires. En gros,
la période s'étend des premiers écrits jusqu'à l'année 1751, qui est celle de la
publication du premier volume de l'Encyclopédie. Si les grandes oeuvres en
mathématiques et en physique admettent assez bien ce découpage (bien que l'Essai
d'une nouvelle théorie de la résiatance des fluides ait été publié en 1752, l'essentiel
de son contenu était déjà acquis avec le texte en latin correspondant, de 1749), les
travaux d'astronomie demandent une certaine élasticité, et s'étendront, dans ces
volumes, jusqu'en 1756.
Si les résultats importants de ses travaux sont connus, notamment ceux
de la première période, on sait moins l'originalité des méthodes par lesquelles il y
est parvenu, et assez peu l'attitude de pensée d'ensemble qui les sous-tend. Le
travail d'édition critique exige la prise en compte non seulement des mémoires
publiés (en général peu lus), mais également des textes restés manuscrits, voire de
ceux, perdus, dont on peut partiellement reconstituer le contenu grâce à d'autres
sources. Il permet de mieux comprendre la genèse de la pensée de d'Alembert et de
mettre en lumière des aspects importants sous-estimés ou même ignorés jusque-là

21 D'Alembert [1748].
22 Paty [à paraître, a].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 11

par les travaux historiographiques.


Les deux premiers volumes de la première série consacrés aux
mathématiques seront le tome 1, sur les textes manuscrits de sa période de
formation et les premiers mémoires de mathématiques adressés à l'Académie des
sciences, à l'exception de ceux sur l'hydrodynamique (de 1741 et 1742) que nous
trouverons au début du tome 2 (contenant le Traité de dynamique), pour des raisons
dont nous reparlerons ; et le tome 4, portant de manière dominante sur le calcul
intégral, avec des solutions d'équations différentielles, jusqu'aux cordes vibrantes,
avec le traitement systématique des équations aux dérivées partielles qui deviennent
par là, et également dans les ouvrages sur les vents et sur la résistance des fluides,
un nouveau domaine à part entière de l'analyse.
On doit aux contributions de d'Alembert en mathématiques des
avancées décisives en algèbre et en analyse, ou calcul différentiel et intégral. Elles
sont visibles dès ses premières recherches : rappelons sa démonstration originale
du théorème fondamental de l'algèbre23 , son étude systématique des équations aux
dérivées partielles24 , sa conception du statut et de la signification des nombres
complexes25 .
Dans ses travaux mathématiques, d'Alembert a donné une place
primordiale au domaine du calcul intégral, qu'il a approfondi et élargi. Les textes
étudiés en rapport à l'édition de la première série concernent l'intégration des
différentielles à une variable et celle des équations différentielles ordinaires.
D'Alembert établit l'intégration des différentielles rationnelles sur des bases solides
grâce à sa démonstration du théorème fondamental de l’algèbre, et étudie de manière
systématique des types caractéristiques d'intégrales irrationnelles, introduisant des
méthodes algébriques uniformes et parvenant à des réduction à des intégrales
fondamentales, dans un domaine qui serai plus tard celui des intégrales
elliptiques26 .
Chez d'Alembert, les mathématiques sont directement liées à leur mise
en oeuvre dans des problèmes de physique théorique ou mathématique, de
«mathématiques mixtes» comme l'on disait à l'époque, ou encore de «sciences
physico-mathématiques», telles que la mécanique des solides et des fluides,
l'astronomie, l'acoustique, l'optique. Il a donné des contributions fondamentales
dans ces domaines, en même temps qu'il développait les méthodes de solution de
problèmes mathématiques, souvent conçus en relation à leurs applications en
physique ou en astronomie.
Les textes - articles et traités - contenus dans les volumes 2, 3, 5 et 8 de
la première série, porteront essentiellement sur la mécanique des solides et des
fluides, tandis que les volumes 6, 7, 9 et 10 seront consacrés aux travaux
astronomiques. Tous se rattachent, sans s'y réduire, au Traité de dynamique (objet
principal du tome 2), qui fournit la clé de l'unification et de la rationalisation de
l'ensemble des problèmes de mécanique considérés dans quelque domaine que ce
soit, et d'Alembert ne manque d'ailleurs jamais, à propos de ces problèmes, de

23 Houzel [1989].
24 Demidov [1982, 1989], Grimberg [1998].
25 Verley [1989]. Voir, pour une mise en perspective historique des nombres complexes, cf.
Flament [1996].
26 Gilain [1997, 2001]. Voir aussi Tournès [1997].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 12

rappeler son “principe” fondamental de la dynamique.


Mais nous restons encore pour une part dans les contributions en
mathématiques avec les travaux d'hydrodynamique de d'Alembert, et notamment
l'Essai d'une nouvelle théorie de la résistance des fluides, publié en 1752, et
précédé du manuscrit en latin de 1749, adressé à l'Académie de Berlin. L'analyse
de ces travaux de d'Alembert (réalisée par Gérard Grimberg dans sa thèse), a
permis d'établir qu'ils constituent bien les premiers textes fondateurs de
l'hydrodynamique comme science analytique, par la mise en oeuvre du calcul
différentiel aux dérivées partielles, dont reparlerons plus loin.
Les conditions du traitement analytique des problèmes (physiques) de la
résistance des fluides ont été déterminantes pour l'avènement de cette nouvelle
branche de l'Analyse qu'est la théorie des équations aux dérivées partielles. La
genèse des concepts de base de ce calcul différentiel partiel est un thème qui touche
directement à la naissance de la théorie des fonctions de plusieurs variables, dont
l'origine remonte aux travaux des Bernoulli et d'Euler dans les années 1730 et, à
ceux, indépendants, de Fontaine et Clairaut. Dans la suite du travail de John
Greenberg, celui de Gérard Grimberg, réexaminant la question des origines du
calcul aux dérivées partielles et étudiant, à partir de son hydrodynamique, ce que le
travail de d'Alembert devait à ses prédécesseurs et ce que lui-même y apporta en
propre, a montré comment c'est dans l'œuvre de d'Alembert que les concepts clés
du calcul différentiel des fonctions de deux variables sont pleinement à l'œuvre27 .
Pour en venir maintenant à la mécanique, l'énoncé du théorème
fondamental de la dynamique (le “principe de d'Alembert”)28 a fait date, avec
l'unification, sous l'égide de ce dernier, de la mécanique des corps solides soumis à
des forces quelconques29 , puis celle de l'hydrostatique et de l'hydrodynamique
désormais étudiées de manière analytique et rattachées à la mécanique, par une
extension du traitement des corps constitués de points matériels à ceux définis
comme étant des milieux continus30 . En astronomie physique, ou mécanique
céleste, l'œuvre de d'Allembert comprend le développement de méthodes
nouvelles, comme le traitement du “problème des trois corps”, l'étude du
mouvement de la Lune, l'étude théorique détaillée de la figure de la Terre dans la
théorie newtonienne, celle de la précession des équinoxes, de la nutation de l'axe de
la Terre,…31 Ces travaux font de d'Alembert le successeur, au dix-huitième siècle,
avec Euler et Clairaut, et avant Lagrange et Laplace qui seront leurs continuateurs,
de Newton en mécanique et en astronomie.
Le travail de ces “géomètres”, comme ils se nommaient, correspond à
une nouvelle manière de pratiquer les mathématiques et les sciences “mixtes” ou
“physico-mathématiques”, centrée autour de l'analyse, qu'Euler et Clairaut ont
également développée, sous des formes légèrement différentes, eux-mêmes étant
aussi tributaires d'un “héritage” voisin de celui que nous venons de mentionner.
L'œuvre de Clairaut, notamment son ouvrage sur la figure de la Terre (Traité de la

27 Grimberg [1995, 1998].


28 Cf., en part., Hankins [1970], Grimberg et Paty [à paraître].
29 Viard [à paraître], Viard et Youssouf [1997].
30 Grimberg [1998].
31 Chapront [2000].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 13

forme de la Terre32 ), est révélatrice, pour John Greenberg qui l'analyse ainsi que
les travaux qui l'ont préparé depuis Newton, dans son livre qui fait autorité, Le
problème de la Terre, de Newton à Clairaut33 , comme pour Irène Passeron qui
l'examine dans sa thèse, Clairaut et la figure de la Terre au dix-huitième siècle34 , de
la “cristallisation d’un nouveau style autour d’une pratique physico-
mathématique”35 , celle de l'analyse, qui marque la période.
L'analyse et ses développements constituent aussi bien la marque des
travaux d'autres “géomètres” comme Bouguer et Maupertuis en Astronomie et en
Mécanique, objets également d'études historiques36 , et de ceux d'un mathématicien
pur comme Alexis Fontaine, dont les apports à l'analyse différentielle et intégrale
ont été étudiés de manière détaillée par John Greenberg, qui en a montré toute
l'importance, et a récemment éclairé leur influence décisive sur Clairaut37 . Gérard
Grimberg a établi combien les recherches de d'Alembert sur l'analyse, où la notion
de fonction joue un rôle important, ont également été préparées en partie par les
travaux de Fontaine38 .
Le style de d'Alembert s'est constitué et affirmé tout au long de la
première période de sa carrière - en gros, le premier tiers -, qui va de 1741 à 1756,
de ses premières recherches sur le calcul intégral au dernier volume des Recherches
sur quelques points du système du monde (ouvrages qui correspondent à la
première série de volumes prévue des Oeuvres complètes). Cette première période
de sa vie scientifique fut exceptionnellement riche et novatrice. L'originalité de ses
contributions scientifiques est indéniable, tant en mathématiques qu'en physique et
en astronomie, bien qu'elle ait été quelque peu occultée par les développements
rapides et les remises en forme plus élégantes qui ont suivi, parfois presque
immédiatement, et qui nous sont désormais familières, faites par ses
contemporains, concurrents ou disciples immédiats (Euler, Lagrange, Laplace).
C'est toute la difficulté de la tâche des historiens des sciences de la mettre
pleinement en évidence en s'abstrayant des sédiments postérieurs qui l'ont souvent
estompée.

GENESE DU PRINCIPE DE LA DYNAMIQUE


(OU PRINCIPE DE D'ALEMBERT)

Le Traité de dynamique est - de même que les ouvrages qui le suivront,


en mécanique des fluides et en astronomie -, tout entier ordonné à la mise en
oeuvre, dans les problèmes mécaniques, du calcul différentiel. Le “style” de
d'Alembert se forme à la jonction des méthodes de Newton et de Leibniz - et c'est,
à vrai dire, d'une fusion qu'il s'agit, des concepts newtoniens et du symbolisme
leibnizien. Le “théorème de la dynamique” lui-même - et avec lui, bien sûr, ses

32 Clairaut [1743].
33 Greenberg [1995].
34 Greenberg [1995].
35 Passeron [1994]
36 Passeron [1999, 2000 a et b].
37 Greenberg [1981, 1982, 1995].
38 Grimberg [1998].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 14

applications - est imprégné par l'analyse, les concepts et principes de la mécanique


étant désormais indissociables de leur formulation à l'aide du calcul différentiel et
intégral : il existe un lien direct entre la conceptualisation différentielle des
grandeurs décrivant le mouvement et l'énoncé des principes de la mécanique 39 .
Mais on peut en dire davantage, quant à la genèse du “principe de
d'Alembert” ou “théorème de la dynamique” - un théorème qui, découlant des trois
“principes du mouvement des corps”, peut être vu lui-même comme une synthèse
de ces principes, un “principe général de la dynamique” qui vaut pour les
assemblages ou systèmes quelconques de corps (libres ou liés). Formulé d'abord
pour les solides, l'on considérait généralement qu'il avait été inspiré à d'Alembert
par la considération du pendule composé. Or, de nouveaux aperçus sur la genèse du
principe de d'Alembert ont été rendus possibles par l'examen des premiers
mémoires d'hydrodynamique soumis par le jeune «géomètre» à l'Académie des
sciences en 1741 et 1742, et qui précèdent donc son Traité de dynamique, publié en
1743, et lu à l'Académie en 1742-1743. Ces communications n'ont pas été
publiées, mais leurs transcriptions par le secrétaire sont restées dans les Registres
de l'Académie.
Analysant ces mémoires, qui portent sur le problème dit de la
“réfraction des corps solides dans les fluides”, j'ai trouvé, avec Gérard Grimberg,
qu'ils pourraient bien être à l'origine du «principe de la dynamique», une origine
jusqu'ici non soupçonnée. Abandonnant le traitement traditionnel de l'enfoncement
d'un solide dans un fluide résistant, qui était proposé en analogie avec la réfraction
de la lumière, d'Alembert aborda le problème par le moyen de l'analyse
différentielle appliquée aux éléments de fluide : il y met en oeuvre l'idée d'une
destruction et d'une compensation des mouvements, celle-là même qui sous-tend
par la suite l'énoncé de son «principe général de la dynamique». Il reprit
ultérieurement ces trois mémoires presque à l'identique dans la dernière partie de
son Traité de l'équilibre et du mouvement des fluides, de 1744, la plus difficile, qui
traite de la résistance des fluides (d'une manière encore préliminaire, en attendant
son grand traité de 1749-1752, où il l'abordera par l'analyse seule, étendue aux
différentielles partielles). Il y présente sa solution, reprise des trois mémoires,
comme une conséquence de son principe de la dynamique, alors qu'elle lui est, en
réalité, conceptuellement antérieure. Cela confirme l'hypothèse, étayée par l'examen
précis des textes, que ces premiers problèmes sont à l'origine de la formulation du
principe de dynamique, d'Alembert les ayant ensuite rapprochés d'un cas semblable
pour les corps solides, à savoir la destruction des mouvements virtuels dans le
pendule composé40 .

39 Cette question fait l'objet de l'étude suivante : Paty [à paraître, b]. Le Groupe d'Alembert
annonce la tenue d'un Colloque en 2001 sur le principes de d'Alembert et les principes de la
dynamique, préparé, à partir de la rentrée 2000, par un séminaire. Voir, pour d'autres recherches sur
des principes, Comte [1998], mettant en perspective les travaux de d’Alembert et de Foncenex
(1761) et la relativité du mouvement, Le Ru [1996], sur le principe de simplicité et le mécanisme,
ainsi que Paty [1996], Vilain [1996]) .
40 L'analyse historique et épistémologique qui a conduit à ce résultat est en cours de publication :
Grimberg et Paty [à paraître]. Elle a fait, en attendant, l'objet d'exposés ou de résumés : Michel
Paty, “Le principe du Traité de dynamique et les premiers travaux d'hydrodynamique de
d'Alembert", Exposé au Groupe de travail D'Alembert, Centre International de Rencontres
Mathématiques, Université de Marseille-Luminy, 23-27 février 1998 ; "L'origine hydrodynamique
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 15

Ce résultat a pour conséquence, quant à l'organisation de l'édition des


Oeuvres de d'Alembert, que ces mémoires devront figurer dans le volume du Traité
de dynamique, avant celui-ci, bien que d'Alembert les ait repris pratiquement
inchangés dans le Traité de l'équilibre et du mouvement des fluides...
D'Alembert a abordé les problèmes de dynamique les plus divers grâce
à l'utilisation de son principe de la dynamique et de l'analyse différentielle et
intégrale. Le Traité de dynamique (paru en 1743, re-édité avec d'importantes
modifications en 1758) représente le point de départ de l'ensemble de ses
recherches en dynamique (solides, fluides, astronomie), étant donné l'importance
du “principe général de la dynamique” qu'il expose dans cet ouvrage, qu'il applique
à de nombreux cas classiques41 , et qui gouvernera tous ses travaux ultérieurs. Le
Traité de dynamique et sa suite directe, le Traité de l'équilibre et du mouvement des
fluides (publié en 1744), qui constitueront pour l'essentiel les volumes 2 et 3 de la
première série des Oeuvres, permettent de mettre directement en évidence le lien des
principes et du calcul. On peut, en particulier, reconnaître dans le second ouvrage le
lien étroit qui existe entre l'application du calcul différentiel et l'élaboration des
concepts d'une mécanique des fluides rattachée désormais à la dynamique des corps
solides et par là devenue, elle aussi, objet de l'analyse.

RESISTANCE DES FLUIDES ET DERIVEES PARTIELLES :


VERS LA PHYSIQUE DES MILIEUX CONTINUS

Quant à l'élargissement par d'Alembert du calcul au nouveau domaine


des équations aux dérivées partielles, il a également partie liée à son abord de
problèmes de physique, tant par les cordes vibrantes, que d'autres questions de
dynamique. Le Traité de dynamique y fait déjà appel, sans la résolution42 , à propos
des oscillations d'une corde pesante suspendue par une extrémité, en termes de
fonction de deux variables indépendantes, dépassant déjà ainsi par l'approche
fonctionnelle les limitations des “équations modulaires”, considérées auparavant par
Euler à propos de familles de courbes décrites par un paramètre arbitraire43 .
Ce nouveau domaine du calcul différentiel et intégral trouve en fait son
plein développement avec l'étude des milieux fluides. Telle est déjà la grande
originalité de ses Réflexions sur la cause générale des vents : elles constituent le
premier traité systématique d'utilisation des équations aux dérivées partielles, tout
en étant un travail sur la mécanique des fluides, plus précisément sur les marées
atmosphériques. La première version en latin de l'ouvrage, sous le titre
Meditationes de generali ventorum causa, obtint le prix de l'Académie de Berlin de
174644 ; la deuxième version, enrichie, fut publiée en français en 1747, et
d'Alembert prépara des additions manuscrites pour une seconde édition, restée

du principe de d’Alembert", Séminaire d'Epistémologie et Histoire de la physique, Equipe


REHSEIS, CNRS et Université Paris 7, Paris, 10 novembre 1998.
41 Applications qui font l'objet d'études d'historiens des sciences, en vue de l'édition : Viard et
Youssouf [1997], Viard [à paraître], Vilain [à paraître, a et b].
42 D'Alembert [1743], article 133 dans l'édition de 1758.
43 Engelsman [1984 a et b], Demidov [1989].
44 Taton [1984], Kleinert [1989].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 16

inédite.
Bien qu'il ait été loué pour son intérêt mathématique, cet ouvrage a été
critiqué en ce qui concerne sa pertinence du point de vue physique, les vents ayant
une autre origine que l'attraction du Soleil et de la Lune. Toutefois ces critiques ont
généralement sous-estimé plusieurs aspects totalement novateurs du travail de
d'Alembert, comme son calcul de l'effet de la rotation de la Terre - plus tard
dénommé force de Coriolis -, sur les mouvements des fluides à la surface terrestre,
et dont Laplace reprendra les équations après lui dans sa propre théorie des marées,
se rendant d'ailleurs compte qu'il s'agit là de la cause véritable des vents alizés (ce
que d'Alembert avait méconnu, tout en préparant l'outil théorique)45 .
Le calcul aux dérivées partielles est très vite utilisé en «hydrostatique et
en hydraulique», c'est-à-dire en mécanique des fluides. L'Essai d'une nouvelle
théorie de la résistance des fluides de d'Alembert, paru en 175246 , et les mémoires
d'Euler sur le même sujet qui le suivent, aboutissent à la mise en forme analytique
de tous les problèmes de l'hydrostatique et de l'hydrodynamique, désormais
réunies et devenues ni plus ni moins que l'un des domaines d'une mécanique
élargie.
Le volume (I,8) sur l'Essai d'une nouvelle théorie de la résistance des
fluides) comprendra le traité en latin de 1749, dont le manuscrit a pu être trouvé à
l'Académie de Berlin, d'Alembert l'y ayant envoyé pour le concours, et le texte
français de l'Essai d'une nouvelle théorie de la résistance des fluides publié en
1752, au contenu très sensiblement identique. L'Essai d'une nouvelle théorie de la
résistance des fluides suit donc, en fait, de plus près qu'il n'y paraît aux dates de
publication, l'ouvrage sur les vents de 1747 : d'Alembert en rédigea la première
version en latin dès 1749, Theoria resistenciae quam patitur corpus in fluido
motum47 , et l'adressa à l'Académie de Berlin, avant de le mettre en français et de le
publier lui-même en 1752, sans avoir reçu le prix - qui ne fut pas attribué48 . Ce
travail constitue, quant aux problèmes abordés, une suite du Traité sur les fluides de
1744, avec des modifications importantes du traitement théorique (abandon
d'hypothèses particulières, utilisation du calcul aux dérivées partielles), qui le
rattachent, au point de vue de la méthode, aux Réflexions sur les vents de 1747.
L'ensemble de ces textes sur la mécanique des solides et des fluides présente donc
une unité thématique, dans une suite chronologique directe, de sorte que les quatre
volumes 2, 3, 5 et 8 des Oeuvres, tels qu'ils sont prévus, sont en continuité directe,
et ne sont séparés que par la chronologie des travaux avec lesquels ils s'alternent,
de mathématiques (vol. 4) et d'astronomie (vol. 6, 7, 9 et 10).

45 Laplace [1799-1825].
46 D'Alembert [1752]. Cet ouvrage est la transcription en français d'un travail rédigé en latin et
soumis en décembre 1749 à l'Académie de Berlin pour le prix proposé sur la résistance des fluides.
47 Le titre complet est : Theoria resistenciae quam patitur corpus in fluido motum, ex principiis
omnino novis et simplissimis deducta, habitâ ratione tum velocitatis, figurae et massae corporis
moti, tum densitate et compressionis partium fluidi. Le manuscrit, qui comporte 136 p. et 2
planches de 37 figures, daté du 25 novembre 1949, fut enregistré par l'Académie le 11 décembre
suivant. Il se trouve à l'Académie de Berlin (Zentral Archiv der Akademie der Wissenschaft der
DDR, Preisschiften zur Preissaufgabe "Theorie des Widerstandes, den feste Körper beim Durchgang
durch Flüssigkaiten erfahrenn", K 8, n° 4, selon les indications des éditeurs de la correspondance
d'Euler, R. Taton et A. Youskevitch). Voir Euler, L, Opera omnia, serie 4 A, Correspondance,
Briefwechsel, vol. 5; cf. en part. p. 312 et suiv.
48 Ce qui engendra une polémique de d'Alembert contre Euler. Cf. Taton [1984], p. 61.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 17

On voit, tant par les premiers travaux originaux que par les
développements qui les suivent, en clarifient la formulation et en systématisent les
résultats, combien l'extension du calcul différentiel aux équations aux dérivées
partielles, qui s'accompagne d'un élargissement de la mécanique des points
matériels et des corps solides aux milieux continus et aux corps déformables,
élastiques ou fluides, est appelée par la problématisation physique. Celle-ci est elle-
même pensée en fonction de cet outil mathématique créé, pour ainsi dire, à son
usage. L'invention mathématique est ici directement issue de la considération des
phénomènes physiques ; elle nourrit en retour le traitement théorique de ces
derniers qui s'établit sur cette base comme science. On peut bien parler à cet égard
d'une double et réciproque constitution, de l'analyse aux différences partielles et de
la théorie de l'hydrodynamique, et les recherches créatrices de d'Alembert le font
magnifiquement voir49 .
Etudiant l'introduction par d'Alembert des concepts du calcul
différentiel partiel dans la mécanique, Gérard Grimberg a examiné les deux
ouvrages sur la résistance des fluides, le manuscrit rédigé en latin de 1749 et
l'ouvrage publié en français en 1752. Tous les aspects novateurs de l’Essai
concernant l’hydrodynamique figurent déjà dans le manuscrit de 1749, ce qui met
en évidence l’originalité du travail physico-mathématique de d’Alembert, qui a posé
les bases d’une théorie analytique des fluides tout en développant une théorie
mathématique des équations aux dérivées partielles. En particulier, d'Alembert eut
l'idée de considérer, dans l'écoulement permanent d'un fluide à la rencontre d'un
solide de révolution immobile, les composantes de la vitesse du fluide comme des
fonctions des variables d'espace, et la différentielle de la vitesse comme un système
de formes différentielles 50 .

UN INEDIT SUR LA THEORIE DE LA LUNE


ET LA PRECESSION DES EQUINOXES

Quant aux premiers travaux décisifs de d'Alembert en astronomie,


domaine dans lequel il fut l'un des premiers, avec Euler et Clairaut, à utiliser
l'analyse mathématique pour la détermination des mouvements des corps célestes
appartenant au système solaire (c'est-à-dire des planètes et de leurs satellites et des
comètes), dans l'hypothèse de la gravitation universelle de Newton, ils
n'occuperont pas moins de quatre volumes de la première série (I, 6, 7, 9 et 10) des
Oeuvres complètes. Il s'agit, outre de nombreux manuscrits et articles, des
Recherches sur la précession des équinoxes et sur la nutation de l'axe de la Terre
dans le système newtonien, parues en un volume en 1749, et des Recherches sur
différents points importants du système du monde, dont la publication en trois
volumes s'étage de 1754 à 1756. Un certain nombre d'éléments nouveaux, fort
intéressants pour l'histoire de l'astronomie, ressortent déjà des études qui leur ont
été consacrées dans la perspective de l'édition51 .

49 Paty [1994].
50 Grimberg [1998])
51 Les premières études en vue de l'édition des Oeuvres Complètes de d'Alembert, dues à Michelle
Chapront, François Mignard et Bruno Morando, ont été exposées à la Journée d'Alembert, réalisée
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 18

On sait que c'est à d'Alembert, Euler et Clairaut que l'on doit les
premières approches précises du problème des trois corps par des méthodes
perturbatives. La voie propre de d'Alembert dans cette direction comporte de
nombreuses innovations d'une grande originalité, tant en mathématiques qu'en
physique mathématique, qui seront plus tard reprises ou retrouvées par d'autres
(notamment Laplace et Fourier), selon des méthodes différentes52 . Par exemple,
ayant établi l'équation différentielle de la trajectoire d'un mobile - en coordonnées
polaires - d'Alembert l'étudie en décomposant la force en série. Utilisant les
nombres complexes, il la réduit à une équation différentielle linéaire du deuxième
ordre à coefficients constants et faisant intervenir une série trigonométrique donnée ;
il obtient la solution de l'équation de plusieurs manières, dont l'une correspond à
une relation de récurrence entre les coefficients de la série trigonnométrique, et une
autre fait intervenir des intégrales elliptiques. C'est à lui que l'on doit, semble-t-il,
la première élimination des “arcs de cercle” ou “termes séculaires”, attribuée
ultérieurement à Lindstedt53 .
D'Alembert a appliqué ses méthodes en particulier à la précession des
équinoxes et au mouvement de la Lune. Ses résultats sur la précession des
équinoxes sont en grande partie demeurés valides, le principe de ses calculs restant
exact aujourd'hui encore. Reprenant le problème tel que Newton l'avait posé, il
montra les faiblesses de la solution de ce dernier, qui bénéficiait de compensations
d'erreurs, et reposait sur un modèle peu rigoureux du renflement de la Terre à
l'équateur (en termes d'un anneau de petites lunes), d'ailleurs tributaire d'une
valeur inexacte de ce renflement, dont les expéditions géodésiques en Laponie et au
Pérou avaient fourni depuis une mesure plus juste. La théorie de Newton reposait
aussi sur une estimation du rapport de l'action de la Lune à celle du Soleil basée sur
des observations de marées, trop aléatoires. D'Alembert aborda le problème de
manière analytique, calculant le moment des forces exercées par le Soleil et par la
Lune sur la Terre, et utilisant les résultats du Traité de dynamique. Il réussit à
exprimer ainsi les termes principaux du mouvement de l'axe de rotation de la Terre,
qui sont la précession régulière, connue depuis Hipparque, et la nutation observée
par Bradley, et en déduisit plusieurs propriétés de la Lune (sa masse, 1/80 è de celle
de la Terre) et de la Terre (sur la distribution de sa matière).54
Quant au mouvement de la Lune, d'Alembert en a donné la première
théorie complète dans le premier volume, de 1754, de ses Recherches sur différents
points importants du système du monde55 . Une étape importante y est l'élimination
des arcs de cercle (termes croissant avec le temps, provenant du développement en
série du cosinus d'un angle proportionnel à la longitude de la Lune) : sans cette

au Bureau des Longitudes, à Paris, le 26 mars 1992. Bruno Morando nous a quités peu après, sans
laisser de texte rédigé. Ces études ont largement progressé depuis lors, grâce notamment à Michèle
Chapront, François Mignard, Irène Passeron et Jean Souchay.
52 Et les apports de d'Alembert seront en général oubliés.
53 Voir l'étude de Bruno Morando : cette mention est faite d'après mes propres notes (M.P.) prises
lors de son exposé à l'une des premières journées de travail du groupe d'Alembert. Ces termes
séculaires, bien connus en astronomie, croissant indéfiniment en fonction du temps, conduisaient à
des quantités infinies dans les calculs. Leur élimination peut être vue comme une sorte d'ancêtre des
procédures de renormalisation en théorie des perturbations appliquée aux champs.
54 Voir Souchay [2000].
55 D'Alembert [1754-1756], vol. 1.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 19

émilination la solution se dégraderait au bout de quelques années. D'Alembert


étudie de manière précise le comportement des termes des différents ordres du
calcul, et exprime sa solution en fonction de quatre arguments qui sont identiques à
ceux introduits un siècle plus tard par Charles Delaunay (les «termes séculaires»).
Sa solution est exprimée en termes de certains paramètres significatifs (les
coefficients en sont des polynomes de ces paramètres, possèdant des propriétés
dont il fournit l'expression56 ). Son approche est plus générale que celles d'Euler et
Clairaut, qui traitent pour leur part ces paramètres de manière numérique, sans
s'attacher à leurs relations.
Mais avant ce traitement publié dans les Recherches sur différents
points importants du système du monde de 1754, d'Alembert avait déjà abordé le
problème du mouvement de la Lune dans un travail bien antérieur, resté ignoré, qui
était demeuré inédit, “Théorie de la Lune”. Ce manuscrit a été découvert par Anne-
Marie Chouillet il y a peu de temps, dans un grand désordre des feuillets dont
Michelle Chapront a pu venir à bout, et qu'elle a préparé pour l'édition critique avec
Irène Passeron57 . Le volume (I, 6) dont cette “Théorie de la Lune” inédite
constituera l'essentiel sera le premier de l'ensemble des Oeuvres à paraître (en
2001). Si le manuscrit était inconnu, les circonstances de ce travail ne l'étaient pas,
et la correspondance de d'Alembert de ces années 1747-1749 l'atteste (en particulier
ses lettres au mathématicien génevois Cramer58 ). Le moment était crucial pour
Euler, Clairaut et d’Alembert, qui travaillaient en parallèle sur le problème de la
perturbation par un troisième corps dans le mouvement de l'apogée de la Lune, en
utilisant l’analyse différentielle et intégrale, et se crurent sur le point d'invalider la
loi newtonienne d’attraction universelle59 . L’analyse conjointe de ce travail de
d'Alembert, de sa correspondance, et des recherches parallèles d’Euler et de
Clairaut montre toute l'importance théorique et pratique de ce problème et fait voir
l’originalité des méthodes de résolution mises en œuvre par d’Alembert.

Ces éléments préliminaires sur les travaux scientifiques appartenant à la


Première série laissent voir combien la publication des Oeuvres complètes de
d'Alembert est susceptible d'approfondir et même de renouveler notre connaissance
de cet auteur, l'un des plus considérables de son temps, et cependant trop négligé.

FAUT-IL «DESOSSER » LES OPUSCULES MATHEMATIQUES ?

Ces travaux furent suivis de nombreux autres, dont la richesse


exceptionnelle des premiers ne diminue pas l'importance. Concernant les sciences
pures, les travaux ultérieurs de d'Alembert correspondent surtout aux recherches
qu'il a confiés aux neuf volumes de ses Opuscules mathématiques, dont le

56 Propriété dénommée "de d'Alembert", par Brown à la fin du 19 è siècle (cf. l'exposé de M.
Chaperon).
57 Voir Chapront [2000].
58 Voir d'Alembert [1885].
59 La détermination exacte de ce mouvement était importante pour l'établissement de tables de la
Lune, et la détermination de la longitude en mer. Cf. Paty [1977] chap. 5, p. 280-293 ; Passeron
[2000a].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 20

neuvième volume, resté inédit, se trouve à l'Académie des sciences de Paris sous
forme manuscrite, préparée pour la publication par d'Alembert lui-même avant sa
mort. Ces travaux complètent et prolongent les oeuvres précédentes, voire abordent
des problèmes ou des champs nouveaux.
D'Alembert y traite de nombreuses questions de mécanique,
d'hydrodynamique, d'astronomie, d'optique, utilisant toutes les ressources de
l'analyse, continuant de paver la voie de la mathématisation de la physique. Il y
formule et démontre de nombreux résultats de mathématiques: des théorèmes sur les
séries, ou de l'introduction des fonctions arbitraires dans la résolution des équations
différentielles qui fit faire de grands progrès à la théorie des fonctions, à son
approche particulière de la notion de limite qui aida à clarifier les fondements de
l'analyse.
Ceci sans oublier ses considérations critiques sur la théorie
mathématique des probabilités et ses applications~: l'ensemble des textes de
d'Alembert sur ce dernier thème suffirait à remplir un volume entier des Oeuvres.
L'examen de ces contributions révèle d'ailleurs que la position de d'Alembert sur ce
sujet est beaucoup plus complexe, et en définitive importante, que les interprétations
hâtives d'adeptes d'une conception achevée et triomphante de la science ne l'ont
pendant longtemps considéré. C'est qu'il s'agissait d'un domaine encore très neuf,
aux principes incertains, et aux applications souvent problématiques. Il est en tout
cas significatif que ce soient justement deux disciples de d'Alembert, Laplace et
Condorcet, qui aient fait connaître aux probabilités des avancées considérables,
dans le champ mathématique pour le premier, dans celui des applications aux
phénomènes de société pour le second60 .
Du point de vue éditorial, on peut se demander si l'on doit publier ces
contributions, réparties en articles eux-mêmes divisés en sections et sous-sections,
dans l'ordre que d'Alembert leur a donnés en les rassemblant de manière assez
disparate et hétérogène, mêlant dans un même article des questions totalement
différentes, ou s'il ne vaudrait pas mieux donner à leur arrangement une meilleure
cohérence, quitte, bien entendu, à mentionner dans l'appareil critique leur place
dans les livres originaux. En effet, l'ordre que leur a donnés d'Alembert ne fut
souvent que le résultat de sa hâte à publier ces contributions. Suivre ces dernièree
dans des séquences plus homogènes en faciliterait la saisie d'ensemble. Les
probabilités, en particulier, suggèreraient que l'on en fasse ainsi, et qu'on leur
consacre un volume (qui appartiendrait, comme on s'en convaincrait aisément à le
consulter ainsi, à l'histoire de cette science d'une manière qui ne serait aucunement
marginale, sinon tout juste un peu hérétique…).
Les travaux de d'Alembert en mathématiques peuvent être resitués dans
leur contexte grâce à l'étude des travaux d'autres auteurs contemporains de
d'Alembert comme Clairaut et Fontaine, déjà mentionnés, mais aussi, pour la
période ultérieure, parmi d'autres, Joseph Louis Lagrange, Jean-Henri Lambert ou
Nicolas Caritat de Condorcet…61 .

60 Sur d'Alembert et les probabilités, voir les études suivantes : Daston [19??], Bru [1989], Paty
[1987, 1988].
61 Voir, sur le premier, Gallotti [1991], et sur les deux derniers (Gilain [à paraître, a et b]).
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 21

L'EPISTEMOLOGIE AVANT LA LETTRE


ET LA PENSEE PHILOSOPHIQUE DE D 'ALEMBERT

Les années qui ont suivi cette «période d'or» ont vu l'élargissement des
horizons intellectuels de d'Alembert, et son engagement philosophique. L'intérêt et
la portée de ses contributions littéraires et surtout philosophiques, menées en
parallèle à son travail scientifique ultérieur, n'est pas moins considérable à de
nombreux égards.
L'implication de d'Alembert dans le projet de l'Encyclopédie marque
indéniablement un tournant dans sa carrière et dans son œuvre, ouvrant plus
largement son champ d'activité et disséminant sa production dans des domaines qui
débordent très largement les sciences pures. Le Discours préliminaire de
l'Encyclopédie, paru en 1751 avec le premier volume de l'ouvrage collectif,
constitue sa première grande œuvre philosophique, et inaugure aussi son
engagement public dans une entreprise qui allait bien au-delà de l'activité éditoriale,
et se proposait comme un véritable mouvement d'idées. D'Alembert devait s'y
trouver entraîné - et Voltaire le sacrer “chef du parti philosophique” -, et son
Discours préliminaire fut considéré comme le “Manifeste de la philosophie des
Lumières”62 . Il est intéressant, à cet égard, de remarquer la grande parenté qui lie, à
quarante deux ans de distance, le Discours préliminaire de l'Encyclopédie de
d'Alembert et l'Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain de
Condorcet, qui fut son disciple préféré (et exécuteur testamentaire)63 . Le propos de
fond est assez identique, et les différences, notables notamment quant à la
conception de l'histoire, sont caractéristiques des changements survenus dans les
idées et dans la société au cours de la seconde moitié du XVIII è siècle.
Les contributions de d'Alembert à l'Encyclopédie constituent à elles
seules une série de volumes prévus des Oeuvres. Ces nombreux articles (plus de
500, souvent d'une bonne longueur) publiés dans l'Encyclopédie, concernent
surtout les sciences exactes, des éléments de présentation historique de ces sciences
et de critique (épistémologique avant la lettre) de leurs concepts ; mais certains
d'entre eux, et non les moins importants, portent également sur des sujets plus
généraux de philosophie, d'éducation, de société, qui sont d'importance historique
par rapport aux débats de l'époque : tels les articles “Eléments des sciences”,
“Collège”, ou “Genève”, pour ne citer que ceux-là. Ces articles sont pour la
pluparttdes essais d'explication, pour un public large mais cultivé, des
connaissances en mathématiques, en physique et en astronomie, et des principaux
résultats théoriques aussi bien qu'expérimentaux et observationnels, en même
temps qu'une présentation et discussion critique des concepts et des théories
scientifiques, incluant une part d'exposé historique. La «vulgarisation» s'y fait
«épistémologique» avec pour propos explicite de “donner à comprendre”, de rendre
intelligibles les connaissances décrites. Les articles sur l'attraction, l'application de
l'algèbre à la géométrie, l'arithmétique universelle, le cas irréductible, la cause, le
calcul différentiel, la dynamique, l'expérimental, la Figure de la Terre, la force, la

62 Selon l'expression de R.N. Schwab (Schwab [1961]).


63 Sur l'Esquisse (Condorcet [1793]), dont une nouvelle édition critique est en préparation, voir
Crépel [1996a]. Pour des éléments de comparaison entre le Discours préliminaire de d'Alembert et
l'Esquisse de Condorcet, voir Paty [1990].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 22

gravitation, l'infini et la limite, les mathématiques, la matière, la mécanique, la


méthode, le mouvement, la nature, le newtonianisme, la science physico-
maathématique, la physique, l'idée de système, la Terre, les tourbillons, pour s'en
tenir à quelques uns parmi les plus importants, sont autant d'analyses
épistémologiques avant la lettre qui appartiennent de plein droit à la philosophie des
sciences.
L'œuvre philosophique proprement dite, rassemblée du vivant de
d'Alembert au sein des cinq volumes de ses Mélanges, commença avec le Discours
préliminaire de l'Encyclopédie64 et se poursuivit avec de nombreux textes de
réflexion sur les sciences, articles de l'Encyclopédie, contributions aux publications
de l'époque comme le Journal des Savants, longues préfaces méthodologiques à ses
ouvrages scientifiques. D'Alembert a proposé une sorte de synthèse de ces
réflexions et de ces analyses dans son Essai sur les éléments de philosophie, publié
en 1758, et complété par les Eclaircissements à cet Essai, paru en 1765. L'article
“Elémens des sciences”, paru dans le tome 5 (1755) de l'Encyclopédie, constitue
une sorte d'intermédiaire entre le Discours préliminaire et l'Essai sur les éléments,
et devrait être considéré comme un texte classique de la philosophie de la
connaissance au temps des Lumières, accompagnant sur ce plan l'état le plus récent
des sciences physico-mathématiques, dont l'auteur était aux avant-postes.
La postérité de ces réflexions pour le développement ultérieur de la
philosophie de la connaissance et l'épistémologie des sciences particulières a
certainement été très grande, accompagnant l'ensemble des idées diffusées par
l'Encyclopédie, d'abord par le nombre et la qualité de ses lecteurs (étendus à trois
continents)65 , et par leur influence, décelable chez nombre d'auteurs du XVIII è et
du XIX è siècles, mais sa pleine mesure n'a pas encore été prise. L'édition des
Oeuvres complètes aurait peut-être intérêt à valoriser sous ce rapport les textes
philosophiques les plus significatifs de d'Alembert en les mettant ensemble dans
une série ou sous-série propre de volumes. Ces volumes pourraient d'ailleurs
reprendre les grands articles de l'Encyclopédie à portée philosophique, comme
“Eléments des sciences”, déjà mentionné, ou ses articles d'“épistémologie des
concepts scientifiques” les plus importants66 , mais aussi ceux de portée générale
sur la connaissance ou l'éducation, tels que “Collège”, “Dictionnaire“, “Genève”,
voire certaines de ses préfaces à des volumes, au plus fort de la lutte pour maintenir
le projet contre les assauts des forces contraires.
D'Alembert était depuis lontemps une référence incontournable des
études sur la philosophie des lumières. Il suffit d'évoquer la place fondamentale
qu'il occupe dans les analyses inspiratrices qu'ont consacré aux idées de cette
période un Ernst Cassirer dans sa Philosophie des Lumières67 ou un Georges
Gusdorf dans les volumes sur le XVIII è siècle de sa somme en plusieurs tomes
intitulée Les sciences humaines et la pensée occidentale, en particulier celui sur Les

64 D'Alembert [1751].
65 L'Encyclopédie rayonna surtout en Europe, mais elle fut influente également aux Amériques, du
Nord et du Sud, et parvint jusqu'en Inde.
66 Il est vrai que l'on entrerait ainsi dans des complications, puisque des parties de certains de ces
articles ont été reprises dans les Eléments de phillosophie. A tout le moins l'appareil critique
demandera une mise en rapport des textes philosophiques et de ces articles. Il serait en tout cas
dommage que les plus substantiels de ces derniers dussent être cantonnés à une édition électronique.
67 Cassirer [1932].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 23

principes de la pensée au siècle des Lumières68 . Si d'Alembert est important en


philosophie par les grandes lignes de sa pensée telles que, notamment, l'affirmation
de la rationalité, celle de l'idée d'unité, la place des mathématiques dans la
connaissance de la nature, la formation des idées simples par abstraction à partir de
l'expérience du monde sensible, il l'est aussi par d'autres aspects qui peuvent être
vus, dans ce domaine aussi, comme profondément novateurs.
Il n'est pas excessif de dire que c'est avec lui que l'on voit apparaître
l'analyse critique et historique des concepts des sciences physiques et
mathématiques sans inféodation à une philosophie et à une métaphysique qu'il
s'agirait de vérifier ou d'illustrer, c'est-à-dire l'épistémologie des sciences
particulières dans son sens le plus moderne69 . Sa philosophie de la connaissance
présente cette originalité d'être un rationalisme - hérité de Descartes -, mais qui fait
toute leur place aux sensations comme origine de nos connaissances, dans la lignée
de Locke et de Condillac : une conception génétique de l'organisation des sciences
en résulte, qui fonde les rapports entre les divers domaines de la connaissance, et
rend compte, en particulier, du lien privilégié qui existe entre les mathématiques et
la physique - du moins, les parties rationalisées de celle-ci que sont la mécanique,
l'astronomie, l'acoustique, l'optique géométrique et autres «sciences physico-
mathématiques»70 . La philosophie de la connaissance (et même l'épistémologie au
sens de l'étude critique particulière des sciences) se substitue à la métaphysique,
sous le même vocable (comme d'ailleurs chez Kant), ce qui n'est pas exclusif d'une
pensée plus générale sur la nature et sur le sens, qui, chez d'Alembert se rapproche
du matérialisme, tout en restant toujours teintée de scepticisme71 .
Mais la question centrale des rapports de la science et de la philosophie
du point de vue rationnel est celle de l'intelligibilité, dans la philosophie de
d'Alembert comme dans celle de Descartes. Il n'est pas inutile de rappeler que
l'expression la plus claire en est donnée dans les Règles pour la direction de l'esprit
de ce dernier, qui expriment le mouvement de sa pensée profonde sur les
mathématiques et sur la question de la certitude de la connaissance en relation à la
subjectivité : la “mathesis universalis” y résume, pour ainsi dire, sa philosophie de
la connaissance dans ce qu’elle a d’essentiel72 . Cette conception est reprise au
siècle des Lumières malgré les transformations profondes des sciences et de la
philosophie. On peut, à cet égard, examiner le rapport entre le mode de travail
théorique en ce qui concerne les sciences physico-mathématiques, où le lien entre
les concepts physiques et leur expression mathématique se fait de plus en plus
étroit et devient rapport de constitution (la mathématisation des grandeurs et de leurs
relations par l'analyse différentielle), et la réflexion critique qui l'accompagne. Cette
dernière s'efforce d'établir les conditions rationnelles d'une formulation
mathématique des grandeurs physiques et des lois de la nature, et met en valeur la
préséance des principes physiques. Cette analyse critique des concepts, liée à une
“métaphysique” renouvelée des connaissances, a indéniablement contribué à
instaurer une transformation profonde de la pensée du rapport des sciences à la

68 Gusdorf [1971].
69 Paty [1984a, 1987a, 1998a et b].
70 Paty [1977, 1984a et b, 1994, 1998a et b].
71 Paty [1981].
72 Paty 1997].
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 24

philosophie, en déterminant entre les deux l'espace d'une “épistémologie” avant la


lettre, relativement autonome73 .
D'autres études ont mis en valeur, chez d'Alembert et chez d'autres
savants de l'époque, les principes «métaphysiques», au sens de la théorie de la
connaissance, voire de l'interrogation sur les premiers principes de la connaissance,
qui sous-tendent l'utilisation de l'analyse mathématique74 ou qui, en physique,
justifient le recours, au moins opératoire, à un “principe de simplicité”75 qui
détermine les méthodes et les objets de recherche en fondant l'unité des lois de la
nature, même si ces savants peuvent avoir des conceptions divergentes sur le
mécanisme et le finalisme (selon l'opposition entre la recherche des causes
efficientes et l'invocation des causes finales)76 .

ŒUVRE «LITTERAIRE», CORRESPONDANCE ,


MILIEUX, ACADEMIES ET CONTEMPORAINS …

L'œuvre «littéraire» de d'Alembert touche également à d'autres


domaines, de la théorie de la musique (on connait son essai sur la théorie de
Rameau)77 à la philologie et à la prosodie latine (par ses traductions de Tacite),
voire à la lutte idéologique, avec la Destruction des Jésuites en France, le volet le
plus important en volume étant celui des Eloges académiques. Nous n'en dirons pas
plus pour l'heure, attendant la réalisation de la publication des séries de volumes qui
leur correspondent
A tout cela s'ajoute la correspondance, dont une petite partie seulement
a déjà été publiée, de manière éparse et très disséminée (dans les Oeuvres de
Voltaire, de Lagrange, de Laplace et, pour celles avec ses royaux correspondants,
Frédéric de Prusse et Catherine de Russie, dans les anciennes éditions des Oeuvres
littéraires de notre auteur78 , à quoi s'ajoutent diverses publication épisodiques
d'inédits, comme celles par Charles Henry à la fin du XIX è siècle79 ). Le premier
volume publié de la cinquième série des Œuvres (V, 1) sera l’Inventaire de la
correspondance de D’Alembert, réalisé à partir d’une base de données établie par A.
M. Chouillet et I. Passeron au long de cinq années de travail préalable80 . Les autres
volumes de la série comporteront les 2200 lettres environ, dont le travail de datation
constitue un chantier permanent, aux conclusions pouvant être radicalement remises
en question. Le premier volume de lettres proprement dites (V, 2), très sollicité par
les responsables des autres parties de l’œuvre (et d’autres historiens), suivra
immédiatement cet inventaire, avec un ensemble d'environ deux cents lettres. L'un

73 Paty [1998a et b].


74 Michel [2001], Schwartz [2001].
75 Cf. Paty [1977].
76 Le Ru [1996a et b, 2000, 2001]
77 Voir Bailhache [2001].
78 D'Alembert [1805, 1821].
79 D'Alembert [1885].
80 Chouillet et Passeron [2000]. Un inventaire succinct de le correspondance fait précédemment
par John Pappas, a servi de point de départ à A. M. Chouillet et I. Passeron, qui ont dû parfois en
reconsidérer totalement certaines datations.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 25

des intérêts de l’étude des correspondances est de fournir un outil historique très
utile pour connaître les «réseaux» de relations qui animent les différents milieux
d'une époque donnée, et déterminés par des affinités intellectuelles et des positions
sociales81 .
D'une manière générale, la reconstitution du travail de d'Alembert dans
son contexte, et de ses circonstances, permet en même temps d'éclairer le mode de
fonctionnement de l'Académie Royale des Sciences, où le petit groupe des
«géomètres» et celui des «astronomes» (suivant les répartitions en vigueur à
l'Académie, qui compte aussi la classe des «mécaniciens»)82 orientent une partie
des discussions de l'époque relatives à la «philosophie naturelle». La question du
statut des mathématiques au siècle des Lumières, et du travail en mathématiques
pures, vers lequel des recherches théoriques s'orientent dès cette époque, mais
aussi des rapports entre mathématiques et physique, des mathématiques «mixtes»
qui se transforment alors en “sciences physico-mathématiques” sous le signe de
l'analyse (voir, par exemple, l'article “Mathématiques” de d'Alembert dans
l’Encyclopédie), qui renvoient aux études évoquées précédemment, n'est pas
restreinte à la sphère de la pensée mais renvoie à des aspects institutionnels en
rapport avec l’organisation de l’Académie Royale des sciences de Paris. Ces
approches multiples contribuent à enrichir notablement notre connaissance de
l’histoire des mathématiques au XVIII è siècle et devrait permettre d'en mieux saisir
les particularités et, partant, d'éclairer d'un nouveau jour la nature exacte des
changements qui se produisent dans ce domaine au début du XIX è siècle.
La question de l'invention technique est également liée à ces débats, et
si d'Alembert n'y a été intéressé que de loin (notamment par l'étude publiée avec
Bossut et Condorcet sur des expériences de résistance des fluides83 ), il reste que
les “experts” qui en jugeaient à l'Académie, c'est-à-dire les commissaires,
considéraient les mathématiques (la science des “Géomètres”), comme la science
fondamentale de référence.
Mentionnons encore d'autres interrogations sur les sciences au siècle
des Lumières, par rapport auxquelles la pensée de d'Alembert fournit des
indications privilégiées, mais qui, se rapportant à l'époque dans son ensemble,
permettent de situer les sciences dont il s'occupa par rapport aux autres. La question
des “débats sur la hiérarchie des sciences et leur enjeu dans la pensée et l’action des
Lumières” a été l'objet de contributions au X è Congrès international des Lumières

81 Mentionnons ici les recherches de Jeanne Peiffer sur le statut des échanges épistolaires et de son
évolution de la fin du 17e siècle au 18e siècle, celles d'Yves Gingras sur le “réseau cartésien”, les
études de Christian Gilain sur la correspondance entre Condorcet et Euler dans les années 1775-76
et sur le groupe de savants entourant Euler à Saint-Petersbourg (Gilain [1996, à paraître, a]), et
celles, actuellement en cours, d'Irène Passeron sur l’évaluation des tables de la Lune en confrontant
les cercles respectifs de d’Alembert, Clairaut et Euler (Passeron [1999, 2000a et b]).
82 Voir, en part., Gilain [à paraître, c]. Voir aussi les recherches d'Olivier Courcelle et Irène
Passeron sur la “Société des Arts” (à laquelle appartint Clairaut), concurrente de l’Académie des
Sciences dans les années 1730, prônant l’application des sciences théoriques aux “arts” (de la
fabrication d’instruments de mathématiques à la céramique en passant par le pilotage et la peinture),
et leur enrichissement réciproque, facilité par la réunion de ces compétences dans un même lieu
(Passeron [1994], Courcelle et Passeron [2000]). Sur les recherches historiques aux archives de
l'Académie des sciences, voir, en part., Crépel [1996b, c, d].
83 D'Alembert, Bossut et Condorcet [1777]. Voir aussi, dans le présent volume, l'étude de Jean-
Pierre Séris (Séris [2001]).
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 26

(Dublin, juillet 1999)84 , portant sur les sciences mathématiques, les sciences de la
nature et les sciences sociales. Les hiérarchies en question se manifestent de
diverses façons, lorsqu'une science tient un rôle de référence quant à ses méthodes,
sa forme, ses concepts, son langage, son type de rigueur, ses pratiques, ses
résultats, suscitant transferts et utilisations de certains de ces éléments vers une
autre discipline. Ces hiérarchies peuvent être éventuellement accompagnées ou
suscitées par les institutions, considérant, par exemple, la place des différentes
sciences dans la vie des académies ou dans l’enseignement.
Les recherches sur les milieux scientifiques au XVIII è siècle ont permis
de faire revivre plusieurs personnages, hommes (et femmes, mais il est vrai qu'elles
sont alors l'exception) de science, souvent académiciens, moins connus que les
premiers, mais qui ont contribué à constituer le tissu scientifique de la société de
l'époque. Certains sont «intermédiaires» en quelque sorte entre les grands savants
comme Euler, Clairaut, d'Alembert ou Lagrange, et les milieux d'ingénieurs,
d'admistrateurs et de techniciens, tels Bossut, Borda, Rochon, Marguerie ou
Musschenbroek, dont des extraits d'écrits ont souvent été repris dans
l'Encyclopédie (notamment par d'Alembert lui-même). Leur rôle n'a pas seulement
consisté à appliquer les théories des premiers à des problèmes techniques, ou à en
rectifier des erreurs : on leur doit une véritable pensée expérimentale et technique,
mieux adaptée à des applications de connaissances théoriques et à la conception
d'expériences systématiques, quantitatives et précises. Tel le chevalier de Borda,
officier et savant85 . J'aimerais y ajouter les grands captaines comme Bougainville
ou La Pérouse, qui étaient aussi des savants, formés aux sciences exactes, à la
géométrie et à l'astronomie (et dans le cas de Bougainville, par d'Alembert lui-
même)86 . L'astronome Lalande est un autre cas, dont on sait toute l'importance
concernant les questions d'observation, en contrepoint des calculs théoriques d'un
Clairaut et d'un d'Alembert87 . Un autre encore, du point de vue direct de
l'historiographie, est Montucla, qui fut le premier à se proposer de faire une
Histoire des mathématiques conçue d'une manière systématique ; la première
édition en deux volumes est contemporaine de d'Alembert, puisqu'elle parut en
1758 ; ce dernier y est inclus dans la seconde édition, qui incorpore le XVIII è
siècle, et fut publiée pendant la Révolution, de 1799 à 1801, en 4 volumes88 .

On concluera ici cette évocation des recherches récentes et en projet sur

84 Denis et Gilain [à paraître]. Sur cette période, je dois signaler les travaux réalisés au sein de
l'équipe Rehseis (CNRS et Université Paris 7-Denis Diderot), depuis sa création en 1983 par
Roshdi Rashed, Christian Houzel et moi-même, en particulier les recherches collectives sur Les
sciences à l'époque de la Révolution française (Rashed [1988]), sur Condorcet (Crépel et Gilain
[1989], Chouillet et Crépel [1996]), et plus récemment celles du groupe de travail “Sciences et
Lumières” de cette équipe, animé par Gilles Denis et Christian Gilain, qui ont organisé la table-
ronde de Dublin.
85 Crépel [1999].
86 Il existe, sur Bougainville, une biographie un peu romancée et plutôt désuète, qui décrit ses
actions au Québec avec Montcalm et son voyage autour du monde, mais ne dit pratiquement rien de
sa formation scientifique auprès de d'Alembert (Dorsenne [1930]).
87 Un Colloque “D'Alembert, Lalande et l'astronomie”, organisé par Pierre Crépel avec le CNRS
et l'Université de Lyon 1, s'est tenu à Bourg-en-Bresse les 22-23 septembre 2000.
88 Une journée a été consacrée en 1999 à Montucla pour le bi-centenaire de sa mort en 1799,
autour de la réalisation de son ouvrage historique.
MICHEL P ATY LES RECHERCHES ACTUELLES SUR D'ALEMBERT 27

d'Alembert et sur son époque, sa pensée, ses engagements, ses contemporains, en


soulignant combien ces recherches diverses s'inscrivent dans une perspective sur
l'histoire qui tient compte des différentes dimensions, individuelles et sociales, de la
constitution d'une pensée et d'une œuvre. Une pensée et une œuvre n'auraient pas
été sans une vie, et celle-ci s'inscrit dans un tissu organique qui implique d'autres
pensées, d'autres œuvres, d'autres vies, en interaction et en échanges avec elle,
qu'on ressuscite un peu par la vertu des consultations d'archives. Une pensée, une
œuvre, une vie, qui ont été, qui ont été possibles, en un lieu et en un temps
circonscrits, dans des circonstances historiques données. Et l'on peut comprendre,
par ces études, comment le sens de cette œuvre et de cette pensée s'éclaire de tout
cela, de ces liens et de ce contexte qu'elles appellent, tout en étant conscients que ce
qui fait avant tout l'importance de cette œuvre - et qu'elle est une œuvre - c'est son
contenu de pensée, exprimé dans les textes, par lesquels s'en communique le sens.

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