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EXEMPLE DE SYNTHESE CORRIGE 1

LA DETTE PUBLIQUE EN FRANCE

Pourquoi faut-il s’inquiéter de la dette publique française ?

Données chiffrées

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Texte 1 : Il y a un vrai problème d’endettement français

(Éric Chaney, 4 mars 2021, Telos)

La dette publique de la France atteindrait 120% du PIB à la fin de cette année selon le FMI, contre «
seulement » 98% avant la pandémie. Comme elle était restée stable au cours des années précédentes, il est
légitime d’attribuer son augmentation de 22 points de PIB à la crise sanitaire, ce qui semble justifier son
surnom de « dette Covid ».

Observons que la dette publique française est passée de 20,7% du PIB en 1980 – elle était alors 10 points de
PIB moins élevée qu’en Allemagne – à 98,1% du PIB en 2019 – près de 30 points au-dessus de la dette de la
République fédérale qui avait dû entre temps financer au prix fort l’absorption de l’ex RDA. Comment
faudrait-il qualifier cette augmentation de près de 60 points de PIB en 40 ans ? Dette « des crises à répétition
» (pétrolières, politiques, financières…), « dette de mauvaise gestion économique » ?

La première nécessité est de reconnaître le problème. Or, lorsqu’il s’agit de dette publique, l’école de pensée
qui devient dominante, représentée par Olivier Blanchard par exemple, tend à relativiser la montée de la
dette, mettant en avant la baisse structurelle des taux d’intérêts réels, qui réduit la charge de la dette et
autorise une marge de manœuvre plus grande que celle qu’on estimait nécessaire il y a vingt ans. C’est bien
sûr une possibilité aujourd’hui, mais certainement pas une certitude demain.

La deuxième nécessité est de ne pas se laisser berner par les solutions miracles comme celle de l’annulation
de la dette détenue par la BCE, en réalité par les banques centrales des pays de la zone euro. Pour
commencer, cette solution est illusoire, puisque l’annulation de la dette (à l’actif de la Banque de France en
ce qui concerne la France) se traduirait par une réduction équivalente de son passif (sa valeur pour ses «
actionnaires » que sont les citoyens français), et donc des revenus futurs que l’État aurait reçu de la banque
centrale. Ensuite, elle est totalement impraticable, même en supposant que tous les pays de la zone euro
s’accordent sur le sujet –ce qui, excusez du peu, reviendrait à déchirer les Traités fondateurs de la zone euro.

À défaut d’être une bonne solution, le cantonnement, est plus réaliste. L’intérêt du cantonnement, selon ses
promoteurs, est de rassurer les marchés sur le sérieux de l’État français quant au remboursement de la dette.
En réalité, les marchés ne sont pas plus ou moins rassurés par le cantonnement, l’appréciation de la qualité
de crédit de la France dépendant du dynamisme de son économie, de la gestion de la dette et du soutien
politique de l’Allemagne, mais aucunement des subdivisions de sa dette publique.

Pour alléger la dette, il faut agir sur la dépense et la croissance. La meilleure assurance contre le risque de
hausse des taux est de s’assurer que le ratio dette/PIB diminue au cours du temps. Rechercher une
diminution rapide, comme le demande un Pacte de stabilité et de croissance aujourd’hui déconnecté de la
réalité, serait contreproductif, car la politique budgétaire restrictive que cela nécessiterait réduirait l’activité
et donc les recettes fiscales. Pour autant, une réduction du ratio de dette, progressive et continue est possible.
Avec une croissance tendancielle de 3%, un déficit public inférieur à 1,8% du PIB inverserait la dynamique
de la dette. Voilà un objectif réaliste à moyen terme, on s’attache à réduire une dépense publique, qui, avant
même la pandémie, culminait encore à 56% du PIB et qu’on favorise avant tout la croissance, meilleur gage
de la solvabilité. Tenter de contrôler la dette par la réduction des dépenses publiques rencontrera de sérieux
obstacles : il va bien falloir dépenser plus pour la recherche, la décarbonation de l’économie, le système de
santé ou l’adaptation du tissu économique au choc d’offre causé par la pandémie. La voie la plus
prometteuse et la plus vertueuse consiste à produire plus, ce qui veut dire travailler plus dans l’année et plus
d’années dans la vie, mais aussi augmenter la productivité de l’économie.

Texte 2 : Pourquoi la dette publique restera notre talon d'Achille


(Jean-Marc Vittori, Les Echos, 15 décembre 2021)
Un problème avec la dette publique ? Quel problème ? Depuis l'arrivée du coronavirus il y a deux ans, le
sujet a pratiquement disparu. Il émerge rarement à la une des journaux. On en parle à peine quand le
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gouvernement confine la population « quoi qu'il en coûte » . Ou alors il en est question pour envisager
d'annuler la part détenue par la banque centrale, qui a bondi depuis la crise sanitaire. Les Français ne
peuvent que se réjouir de cette disparition, eux dont les gouvernants considèrent l'équilibrage des finances
publiques comme une tâche subalterne depuis un demi-siècle. Mais si cette disparition n'est pas définitive, et
il y a de bonnes raisons de le penser, alors la donne pourrait se compliquer.

Il faut donc d'abord décrypter cette étrange disparition. Depuis 2020, l'explication est claire : les banques
centrales ont fabriqué la monnaie qui a permis de financer l'essentiel de la dette émise par les Etats pendant
la crise sanitaire. Les taux d'intérêt sont restés très bas, voire négatifs. Mais le loyer de l'argent était déjà très
bas avant, inférieur à la croissance. Quand le prêteur ne demande pratiquement plus de rémunération pour
l'argent qu'il avance, il y a moins de raison de s'inquiéter des montagnes de dettes. Les économistes ont
pratiquement arrêté de s'inquiéter de leur niveau. Ils regardent désormais ce que coûte la dette à l'Etat
chaque année en intérêts à verser, pour évaluer sa soutenabilité. Ici, le tableau est plus rassurant - et plus
réaliste. En France, le poids de la dette a doublé en vingt ans, de 59 % à 115 % du PIB : alerte rouge ! Mais
les intérêts de la dette ont fondu de plus de moitié, glissant de 3 % du PIB à moins de 1,5 % : feu vert ! Si le
pays acceptait de verser la même part de sa richesse nationale à ses créanciers qu'au début des années 2000,
sa dette pourrait doubler...

Il serait pourtant périlleux de croire que la dette publique sera toujours soutenable. D’abord, parce que les
taux d'intérêt vont toujours finir par remonter. Ensuite et surtout, les Etats vont devoir trouver de nouvelles
ressources dans les prochaines années. Les créanciers vont alors scruter les comptes publics. Et ici, la France
a deux faiblesses majeures. La France a en la matière un problème d'efficacité. Comme le mentionne
pudiquement l'agence de notation Scope dans son dernier examen de la situation française, « les programmes
d'investissement public n'ont pas eu par le passé les résultats promis ». Elle va de plus se lancer dans des
investissements peu porteurs de croissance et donc peu générateurs de revenus supplémentaires permettant
de rembourser des emprunts, pour s'engager dans la transition écologique. Pour la première fois de l'histoire,
nous allons investir non pour faire plus mais pour faire moins. Ensuite, le poids des dépenses publiques
courantes va augmenter à long terme si on ne fait rien pour l'en empêcher. Deux économistes de l'OCDE,
Yvan Guillemette et David Turner, ont récemment évalué cette dérive, qui vient notamment du
vieillissement de la population et d'une augmentation du prix des services de santé plus rapide que la
moyenne des prix (« effet Baumol »). A horizon 2060, cette dérive se traduirait par ce que les chercheurs
appellent une « pression budgétaire », c'est-à-dire de l'argent qu'il faudra trouver en augmentant les impôts
ou en taillant dans d'autres dépenses pour ne pas alourdir le poids de la dette (ramené au PIB potentiel).
Cette pression sera forte. Pour l'ensemble des pays de l'OCDE, elle ferait 8 % du PIB. Et pour la France...
elle dépasserait les 12 % !

Ce qui nous amène au second problème de la France : son passé mine sa crédibilité. Son dernier excédent
budgétaire remonte à 1974. En 2019, elle avait le déficit public le plus élevé de la zone euro. La baisse de la
dépense publique y est taboue, la hausse d'impôt le devient. Dans la décennie qui a précédé la Covid, sa
dette publique a augmenté de 15 points de PIB alors qu'elle a été en moyenne stabilisée dans les autres pays
de l'euro. Sorti par la porte lors de l'épidémie, le problème de la dette risque de nous revenir par la fenêtre.
Voire de nous sauter à la figure.

Texte 3 : Le risque de la dette française


(Jean Pierre Robin, Le Figaro, mardi 17 mai 2022)
Il faut se rendre à l'évidence : la dette publique n'est pas la première préoccupation des Français On préfère
se voiler la face, ignorer qu'elle représente désormais 2 813,1 milliards d'euros au total, soit 41 491 euros
pour chacun des 67,8 millions de Français, ou encore 113 % du PIB annuel du pays. Autre signe d'alerte,
pour moitié, la facture est financée par des prêteurs étrangers.

Que l'endettement soit devenu l'angle mort de nos débats politiques et que nous cherchions à l'oublier
exprime à tout le moins « notre préférence pour le présent » , comme disent les économistes. Mais personne
ne saurait échapper à l'adage populaire : « Les créanciers ont meilleure mémoire que les débiteurs. » Ces
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créanciers espèrent bien qu'ils seront remboursés sinon ils ne nous feraient pas crédit. Et d'ailleurs l'histoire
plaide en notre faveur. Contrairement à l'Allemagne qui a fait cinq ou six fois défaut au cours des deux
derniers siècles, la France n'a-t-elle pas toujours payé rubis sur l'ongle depuis 1797 et « la banqueroute des
deux tiers » ? Il y a 225 ans, Dominique Ramel, ministre des Finances du Directoire, avait alors fermé le
marché des titres publics et fait voter une loi annulant de facto les deux tiers de la dette publique. « J'efface
les conséquences des erreurs du passé pour donner à l'État les moyens de son avenir » , s'était excusé le
grand argentier. Du passé faisons table rase. À Bercy, l'Agence France Trésor, chargée de gérer la dette de
l'État, aime à rappeler l'absence de défaut français depuis la fin du XVIIIe siècle. Voilà qui engage. Un gage
historique de nature à rassurer les gestionnaires de capitaux qui nous prêtent. Car la France en appelle
massivement à l’épargne mondiale. L'État ne se finance plus directement auprès de ses épargnants citoyens.
Il est en effet plus avantageux d'aller piocher sur le marché mondial des capitaux dont la profondeur est
abyssale. Les encours des seuls titres de dette publique émis par l'ensemble des États sur les marchés ne
s'élèvent-ils pas (fin 2020) à 58 507 milliards de dollars selon la Banque des règlements internationaux ?

L'événement quasi révolutionnaire ces dix dernières années a été bien sûr l'entrée en lice des banques
centrales. À partir de 2015, la Banque centrale européenne et les banques centrales nationales de la zone
euro se sont autorisées à acheter des titres d'État sur les marchés. Autrement dit à financer les déficits
publics en émettant de la monnaie, en faisant tourner « la planche à billets », comme on dit. Ce qui était
tabou jusqu'alors. Selon les chiffres communiqués par l'Eurosystème, la Banque de France en détient à ce
jour pour 671 milliards, et la BCE elle-même, ainsi que les autres banques centrales européennes, 70
milliards, soit au total 26,3 % de la dette publique française actuelle. Sauf que la BCE est amené à s'effacer.

Et les taux remontent. Or, chaque hausse de 1 % des taux entraînera au bout de dix ans une augmentation de
la charge d'intérêt de 1 point de PIB par an, et une augmentation de la dette de 5,5 points de PIB, par rapport
à une situation sans hausse de taux » , a calculé le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de
Galhau. Ainsi, chaque 1 % de hausse des taux d'intérêt représente donc, à terme, un coût supplémentaire de
près de 40 milliards d'euros chaque année, presque le montant actuel du budget de la Défense. De quoi
redouter un orage financier et alimenter le désespoir des citoyens, des contribuables et des épargnants
français, indissociable trinité ?

Texte 4 : Dette et solutions magiques


(Victor Fouquet, 4 février 2021, IREF)
L’annulation des dettes est une idée qui revient régulièrement dans le débat agitant experts, économistes et
politiques. L’accroissement vertigineux de la dette contractée par l’État pour contrer la propagation de la
pandémie et les conséquences des mesures de confinement n’y est pas étranger. Le manquement à
l’engagement qui le lie à ses créanciers affaiblit également la capacité future du débiteur à emprunter ou, s’il
y parvient, l’expose à une remontée des taux d’intérêts. Si elle ne remboursait pas sa dette, à cause par
exemple d’une économie atone ou de l’absence de toute réforme structurelle (telle celle des retraites,
maintes fois différée, et qui s’apprête à l’être encore), la France serait rapidement sanctionnée par les
marchés financiers. Sa prime de crédit et sa charge de la dette s’envoleraient.

Autre vieille lune à avoir refait surface : l’instauration d’une contribution exceptionnelle des grandes
fortunes. En l’espèce, il faudrait aller très au-delà d’un simple rétablissement de l’ISF (lequel rapportait «
seulement » 2,1 milliards d’euros de plus que l’actuel IFI, bien loin des 300 milliards d’endettement
supplémentaire), et manifestement dépasser le niveau d’imposition optimal au-delà duquel le rendement de
l’impôt diminuerait. Cela est tout particulièrement vrai pour la France qui, avec un ratio de recettes fiscales
de 4,0 % du PIB s’agissant des prélèvements sur le patrimoine, se classe au deuxième rang mondial. Creuser
encore davantage l’écart avec les grands pays industrialisés concurrents ne pourrait que porter préjudice à
notre pays, à ses investissements, à l’emploi et, au bout du compte, à ses finances publiques.

Plus fondamentalement, postuler qu’il suffit d’augmenter les impôts pour assainir durablement les comptes
publics revient à ignorer d’une part la complexité des liens qui unissent fiscalité et dépenses publiques et
d’autre part le risque des effets négatifs sur la croissance d’une hausse excessive des prélèvements
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obligatoires. Avec un niveau de prélèvements qui atteint déjà environ 35 % du PIB en moyenne dans la
zone OCDE (et jusqu’à 50 % environ dans certains pays), de nombreux régimes fiscaux réduisent le PIB en
émoussant les incitations au travail, à l’épargne et à l’investissement. Les dépenses publiques sont élevées
dans la plupart des pays de l’OCDE fortement endettés. Devant la hausse imminente des coûts liés au
vieillissement, la voie la plus prometteuse de la viabilité budgétaire passe par des réductions de dépenses qui
améliorent l’efficience allocative (meilleure utilisation générale des ressources) ou productive (moindre coût
des ressources par unité de service produit) . » Ces lignes s’appliquent plus que jamais à la France de 2021.

Texte 5 : Les marges de manœuvre budgétaires particulièrement limitées


(Éric Pichet,Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business
School , 27 avril 2022, The conversation)
Face à l’irruption de la pandémie en mars 2020, le plan de soutien massif à l’économie avec le fameux «
quoi qu’il coûte » s’est traduit par une augmentation des dépenses publiques de 140 milliards d’euros entre
mars 2020 et juin 2022. Conséquence de cette envolée des dépenses, la France a atteint un déficit nominal de
8,9 % du PIB en 2020 et de 6,5 % en 2021. Mais la dérive du déficit structurel, c’est-à-dire l’estimation du
déficit qui écarte les effets de la conjoncture économique, apparaît beaucoup plus préoccupante.
L’accumulation des déficits et la récession sanitaire de 2020 (avec un recul de 7,9 % du PIB) ont
logiquement déclenché une hausse spectaculaire de la dette publique à 112,9 % du PIB, ce qui situe la
France dans le groupe des 4 pays les plus éloignés des critères de Maastricht.

Dette publique et déficit structurel des huit principaux pays de la zone euro en 2022 (en % du PIB). Cour des comptes (2022)

L’indicateur clé de la solvabilité d’un État est la charge des intérêts de la charge rapportée au PIB, qui est
actuellement très faible de l’ordre de 1,4 % du PIB. Or, la hausse des taux qui s’est matérialisée en 2021
s’est accélérée en 2022. L’Agence France Trésor (AFT), en charge de la dette et de la trésorerie de l’État,
estime ainsi qu’une hausse d’un point des taux d’intérêt renchérirait la charge d’intérêts de 2,5 milliards
d’euros la première année, 6,1 milliards d’euros la deuxième année et 29,5 milliards d’euros à l’horizon de
10 ans.
Il est toutefois indéniable que l’inflation allégera temporairement le coût de la hausse des taux. Au cours des
prochaines années, avec un taux nominal moyen du coût de la dette publique de 1,5 %, une croissance
théorique de 1 %, et une inflation de 4,5 %, le déficit primaire stabilisant la dette serait de 4 %, ce qui
accordera un répit – temporaire – aux finances publiques – au moins au début du prochain quinquennat.
Devant la dégradation de leurs comptes publics les pays les plus laxistes emmenés par la France et l’Italie
ont entamé une campagne de dénigrement du Traité de Maastricht et demandé une refonte du pacte en
allégeant les contraintes sur le déficit et la dette publics qui nécessité l’unanimité des pays européens. Cette
initiative n’a pourtant que très peu de chances d’aboutir face au refus des pays dits « frugaux », constitués
initialement d’un petit club autour de l’Allemagne, des Pays-Bas, de l’Autriche de la Finlande dans la zone
euro, accompagnés par la Suède et le Danemark rejoints par la Lettonie, la Slovaquie et la République
tchèque. Ces pays « vertueux » ont d’ailleurs publié une lettre en septembre 2021 exigeant le respect pur et
simple du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.

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ANALYSE DES DOCUMENTS

Documents chiffrés
D1 : Progression de la dette publique française avec envolée liée à la pandémie
D2 : Niveau de dette bien au-dessus des critères de Maastricht (plus de 110% du PIB)
D3 : Liée à un déficit structurel de l’Etat français avec record de dépenses publiques et malgré record de PO
D4 : Grande partie de la dette détenue par créanciers étrangers
Texte 1

P1 : Une partie de la dette actuelle liée au Covid


P2 : Un problème d’endettement français masqué jusqu’alors par des taux bas
P3 : Pas de solutions miracles comme l’annulation de la dette détenue par la BCE (impossible au vu des
traités),
P4 : ou le cantonnement (qui ne peut rassurer les marchés)
P6 : Nécessité de limiter les dépenses et de relancer la croissance (pour faire diminuer ration dette/PIB) :
mais des obstacles à réduction des dépenses avec impératifs de décarbonation de l’économie, dépenses pour
la santé… d’où solution de produire plus par plus de travail et de productivité
Texte 2

P1 : Quasi disparition du sujet de la dette des débats publics aujourd’hui


P2 : ….avec taux d’intérêt bas et l’émission monétaire des BC- Doublement du poids de la dette en 20 ans
mais dette actuellement soutenable car charge de la dette réduite
P3 : Pourtant, deux faiblesses : des investissements à venir dans la transition écologique peu porteurs de
croissance, et augmentation inévitable des dépenses publiques à long terme avec vieillissement
P4 : Incapacité de l’Etat français sur le LT à réduire sa dépense, à équilibrer le budget et plus récemment à
augmenter l’impôt.
Texte 3

P1 : Déni français de la dette pourtant financée par l’étranger


P2 : Dette française toujours honorée depuis banqueroute de 1797 = gage historique rassurant créanciers
internationaux (appel conséquent au marché mondial des capitaux)
P3 : Si la BCE a racheté de la dette d’Etat durant crise, cela va s’achever.
P4 : Et remontée des taux, donc à terme des charges de remboursement
Texte 4

P1 : Pas possible d’annuler la dette sans sanction immédiate des marchés et envolée de la charge de la dette
P2 : Impossible de faire payer les grandes fortunes, car ce serait un impôt confiscatoire vu le montant requis,
et cela entamerait l’investissement et la croissance
P3 : Pas possible d’augmenter les impôts, déjà élevés sans entamer la croissance- Seule voie possible, la
réduction des dépenses
Texte 5

P1 : Un quoi qu’il en coute durant à la pandémie, conduisant à explosion des dépenses et du déficit.
Accumulation de déficits conduit à croissance de la dette
P2 : Solvabilité liée au ration charge des intérêts/ PIB : faible jusqu’alors, il augmente avec hausse des taux
depuis 2021
P3 : Rôle positif de l’inflation pour alléger la dette

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P4 : Ne pas espérer que l’UE allège le pacte de Maastricht malgré demandes françaises et italiennes avec
pays frugaux

SYNTHESE

I Un niveau d’endettement inquiétant


1) La croissance de l’endettement public
2) …. A été masqué par le niveau bas des taux
d’intérêt

II … Et peu de solutions faciles pour réduire cet


endettement
1) Il n’y a pas de solutions miracles
2) Et la solution de la réduction des dépenses est
difficile à mettre en oeuvre

A la faveur de la crise sanitaire, et du programme gouvernemental du « quoi qu’il en coute », la question de


la dette publique a disparu du débat public. Pourtant, de nombreux économistes s’en inquiètent.
La progression de la dette publique française qui a doublé en 20 ans, s’est envolée avec la pandémie pour
atteindre des niveaux records, bien au-delà des critères de Maastricht (plus de 110% du PIB). Elle résulte de
l’accumulation de déficits structurels de l’Etat français depuis les années 70 car si la France est championne
des prélèvements obligatoires, elle l’est aussi des dépenses publiques en pourcentage du PIB, et s’est
montrée incapable de réduire ses dépenses et d’atteindre des excédents budgétaires.
Si le problème de l’endettement de l’Etat français a disparu des préoccupations politiques, c’est qu’il est
masqué depuis 2010 par la baisse des taux liée à l’émission monétaire considérable des Banques Centrales.
La soutenabilité de la dette a été préservée car les taux d’intérêt bas réduisent notablement la charge de la
dette. Cependant si la BCE a racheté de la dette d’Etat durant la crise, cela va s’achever et la remontée des
taux depuis 2021, pourrait accroitre les charges de remboursement. Certes, la France conserve encore un
crédit auprès de ses créanciers, majoritairement étrangers (puisque la France emprunte sur le marché
mondial des capitaux), puisqu’elle a toujours honorée sa dette depuis la banqueroute de 1797, mais il lui
faudrait s’engager dans une vraie politique de désendettement, ce qui est délicat au regard du déni français
de la dette.

Et pour réduire la dette publique, il n’y a pas aujourd’hui de solutions miracles. L’annulation de la dette
détenue par la BCE est impossible au vu des traités européens, et l’annulation de la dette privée impossible
sans risquer l’exclusion des marchés. Le cantonnement de la dette Covid ne peut rassurer les marchés, faute
de mesures complémentaires structurelles dynamisant l’économie. Il n’est pas possible d’augmenter les
impôts déjà élevés sans entamer la croissance et donc à terme les capacités de remboursement de l’Etat.
Faire payer les grandes fortunes serait insuffisant face à l’ampleur de la dette. Espérer que les critères
européens du pacte de stabilité soient durablement levés est illusoire face à l’intransigeance des pays
frugaux.
C’est donc à la réduction des dépenses, qu’il faut s’atteler mais les obstacles sont nombreux : les dépenses
publiques risquent de croitre naturellement à l’avenir avec le vieillissement et le financement de la transition
énergétique, sans même que ces dépenses stimulent la croissance. Pour relancer la croissance et diminuer le
ratio dette/PIB, il faudra alors se résoudre à produire plus par plus de travail et de productivité.

Il serait temps d’ouvrir les yeux sur une dette publique française qui risque de devenir, avec l’inévitable
hausse des taux à venir, une bombe économique dévastatrice.

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EXEMPLE 2 SYNTHESE CORRIGEE
LE GRAND DEBAT SUR LES RETRAITES

Pourquoi et comment réformer le système de retraite en France ?

Données chiffrées

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Texte 1 : Le système de retraite doit être adapté à l’augmentation de l’espérance de vie
(Olivier Blanchard, professeur émérite au Massachusetts Institute of Technology et chercheur au Peterson
Institute for International Economics ; Jean Tirole, Prix Nobel d’économie 2014, président honoraire de
l’Ecole d’économie de Toulouse et membre fondateur de l’Institut d’études avancées de Toulouse, 24 juin
2021, Le Monde)
Faut-il reprendre la réforme des retraites, et si oui comment ? En France, les évolutions démographiques
sont marquées par l’augmentation de l’espérance de vie plus que par la diminution de la fertilité.
L’augmentation de l’espérance et de la qualité de vie est une très bonne nouvelle. Mais elle nécessite des
ajustements, en particulier de trouver le bon équilibre entre travail et retraite.
Nous plaidons pour l’adaptation du système de retraite et pour une série de mesures aidant les seniors à
travailler plus longtemps et incitant les entreprises à aménager leurs conditions de travail et à les employer
plus longtemps s’ils le veulent : par exemple, par un traitement des maladies chroniques en prévention et en
réparation, par une formation continue adaptée et par un aménagement des rythmes de travail et de transition
vie professionnelle-retraite.
Par rapport aux autres pays développés, la France a un taux d’emploi des seniors beaucoup plus faible
(moins de 50 % à 60 ans) et un âge de départ à la retraite plus précoce. En conséquence, le temps passé à la
retraite par les Français est, par exemple, 20 % plus long (quatre ans) que celui des Allemands. Cela pose le
problème de l’équilibre du système de retraite, et des réformes à répétition pour y mettre des rustines.
S’il y aura toujours des imprévus nécessitant des ajustements, il faut d’une part faire en sorte que le
financement du système soit pérenne afin d’éviter des réformes continuelles, et d’autre part fournir une
visibilité sur la façon dont ces ajustements auront lieu.
Nous proposons un système plus transparent, un système à points que tous puissent comprendre.
L’acquisition des points est d’une simplicité presque biblique : un an au salaire moyen rapporte disons 100
points, un an à deux fois le salaire moyen 200 points, etc. A la liquidation des droits, le travailleur
additionne ses points acquis, qui sont convertis chaque année en une pension calculée en fonction de la
valeur du point. La valeur du point est égale pour tous, nouveaux ou anciens retraités. Elle augmente chaque
année avec le salaire moyen, moyennant un ajustement démographique si nécessaire : si le rapport du
nombre de bénéficiaires au nombre de cotisants reste le même, les retraites augmentent aussi vite que les
salaires ; si les retraités deviennent plus nombreux par rapport aux cotisants, les retraites augmentent moins
vite que les salaires.
Ce rapport dépend bien sûr de l’âge de la retraite. A taux de cotisation donné – et nous pensons que, déjà
très élevé en France, il ne devrait pas augmenter –, une augmentation de l’espérance de vie implique qu’il
faut choisir entre augmenter l’âge minimal de la retraite et diminuer la valeur du point. Ce choix essentiel,
qui a des implications pour les travailleurs, les retraités et les futurs retraités, doit être fait de façon à la fois
explicite et démocratique. Il doit être mis en œuvre par un organisme indépendant, qui aura aussi pour
mission de lisser les chocs (de type Covid-19) en gérant un fonds de réserve.
Enfin, le système de retraite doit avoir un aspect redistributif. Nous préconisons l’attribution de points
supplémentaires en bas de l’échelle des salaires, financés par l’Etat et sans remise en cause de l’allocation de
solidarité aux personnes âgées, prestation non issue des cotisations mais financée par le Fonds de solidarité
vieillesse. Ce minimum vieillesse est en effet crucial pour ceux qui n’ont que très peu ou pas cotisé.
Par ailleurs, certaines activités professionnelles sont éprouvantes et justifient une retraite avant l’âge
minimum légal. Mais il est important que le surcoût occasionné par le versement anticipé d’une pension soit
supporté par la branche ou l’entreprise.
Ces éléments de pérennité, transparence, flexibilité et équité rendraient la nécessaire réforme des retraites
plus largement acceptable.
Texte 2 : Réformer au nom de l'équité intergénérationnelle
(Maxime Sbaihi, 21 juillet 2021, Les Echos)
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Le système en déficit chronique ressort encore plus fragilisé de la crise du Covid. En arrière-fond, la botte
souveraine de la démographie continue d'emmener la France sur la terre inconnue du vieillissement
démographique. Peu évoqué dans les débats sur les retraites, il est pourtant le facteur déterminant, surtout en
France où prime la logique de répartition, c'est-à-dire la conversion en temps réel des cotisations des actifs
en pensions des retraités. Le vieillissement inédit de notre population déséquilibre comme jamais le modèle
social français, et encore plus visiblement notre système de retraite. En 1975, la France comptait 4 millions
de retraités. Depuis 2005, l'arrivée massive des baby-boomers à la retraite a fait grossir leurs rangs et nous
comptons aujourd'hui 17 millions de retraités de droit direct, tous régimes confondus, qui devraient dépasser
les 20 millions d'ici à 2050. Il y a toujours plus de retraités pour toujours moins d'actifs. Le rapport entre les
deux s'est tellement détérioré qu' « en moyenne, chaque actif finance la pension d'un retraité », comme
l'explique la Cour des comptes dans son dernier rapport. C'est du jamais-vu.
Les actifs en ressentent les conséquences par des taux de cotisation record qui grèvent leurs revenus et
renchérissent le coût du travail. Les évolutions mal anticipées de la démographie remettent même en cause
l'équité intergénérationnelle de notre système de retraite puisque le rendement des contributions au régime se
détériore cohorte après cohorte. Il s'obtient en calculant, pour chacune d'elles, un taux de récupération qui
rapporte le flux actualisé des pensions reçues pendant la retraite au flux actualisé des cotisations payées
pendant la vie active. Il est supérieur à 200 % pour les cohortes nées avant 1960, reste supérieur à 150 %
pour celles nées avant 1975, mais tombe en dessous pour toutes celles d'après. En moyenne, la première
vague des baby-boomers (1945-1955) touche en pensions deux fois plus que ce qu'elle a contribué au
système de retraite. Quand eux cotisaient, les retraités étaient peu nombreux, vivaient moins longtemps et
dans des conditions (beaucoup) moins enviables qu'aujourd'hui. C'est un fait, les générations actuelles de
retraités n'ont pas cotisé durant leur vie active à la hauteur de leurs besoins de retraite présents. Ni préparés
ni budgétés à l'avance, leur financement nous rattrape à présent et ne peut être lâchement déchargé sur les
épaules des jeunes générations d'actifs d'aujourd'hui et de demain. Repousser au plus vite et au plus loin
l'âge de départ à la retraite est une mesure indispensable, mais pas suffisante, pour faire partager les efforts
par tous, y compris les nombreux baby-boomers encore en activité, soit tous ceux nés après 1961.
Personne n'est responsable des caprices de la démographie, c'est pourquoi ses coûts collectifs en termes de
retraite doivent être partagés en réformant sans plus attendre et en respectant l'impératif d'équité
intergénérationnelle inscrit dans la loi. La procrastination a tellement duré que cela implique aussi de mettre
davantage à contribution nos chers retraités après la crise sanitaire.
Texte 3 : Les seniors, clé de la réforme des retraites
(Bertrand Bissuel, Le Monde, mercredi 11 mai 2022)
En voulant porter à 65 ans l'âge légal de départ à la retraite, Emmanuel Macron relève un redoutable défi :
celui de l'emploi des seniors. La France représente un contre-exemple ou un antimodèle en la matière, avec
un pourcentage de sexagénaires en activité qui s'avère parmi les plus faibles des pays de l'Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE). Une situation identifiée de longue date mais que les
gouvernements successifs, malgré de vibrantes professions de foi, n'ont pas vraiment pris à bras le corps.
Les chiffres donnent un aperçu de l'ampleur de la tâche. Certes, la proportion de seniors en emploi s'est
accrue au cours des deux décennies écoulées. Au dernier trimestre 2021, 56,1 % des personnes de 55 à 64
ans occupaient un poste, soit 18,4 points de plus par rapport aux trois premiers mois de 2003, selon une note
de la Dares la direction chargée des études au ministère du travail. Cette augmentation est imputable, en
grande partie, aux mesures prises depuis deux à trois décennies pour retarder l'âge d'ouverture des droits à la
retraite et pour restreindre les dispositifs de cessation anticipée d'activité (les préretraites, en particulier).
Mais la situation est très disparate, si on examine plus finement les statistiques. Ainsi, seuls 35,5 % des
femmes et des hommes de 60 à 64 ans exerçaient un métier en 2021, d'après la Dares. Ce pourcentage est en
hausse depuis le début du XXIe siècle, mais les données les plus récentes permettant de faire des
comparaisons internationales montrent que la France se trouve en queue de peloton : en 2019, le taux
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d'emploi pour cette tranche d'âge (les 60-64 ans, donc) était de 32,7 %, contre 70 % en Suède, 61,8 % en
Allemagne et 52,4 %, en moyenne, à l'échelon des Etats membres de l'OCDE.
Autre gros point noir : bon nombre d'individus en fin de carrière passent par des périodes plus ou moins
longues de chômage ou d'inactivité avant de pouvoir réclamer le versement de leur pension. Ainsi, sur la
période 2018-2020, la part des femmes et des hommes de 61 ans qui ne sont ni en emploi ni à la retraite était
de 27,67 % en moyenne, contre 15,2 % sur la période 2013-2015, d'après des statistiques fournies par le
Conseil d'orientation des retraites (COR). Il y a une déconnexion entre l'âge auquel les personnes quittent le
marché de l'emploi et l'âge auquel elles demandent le versement ou la liquidation de leur pension : le
premier dépasse à peine 60 ans en moyenne, tandis que le second est un peu supérieur à 62 ans. Un tel
hiatus, tient au fait que de nombreux salariés arrêtent définitivement de travailler, une fois franchi le cap de
la soixantaine, mais doivent attendre un certain temps avant de faire valoir leur droit à la retraite, parce qu'ils
ne remplissent pas les conditions requises. Dans certains cas, ils sont au chômage depuis une ou plusieurs
années; dans d'autres, ils sont en situation d'invalidité ou allocataires d'un minimum social...
L'une des origines du problème tient aux « discriminations à l'embauche » dont pâtissent les travailleurs
situés en haut de la pyramide des âges. Se pose aussi la question de la soutenabilité du travail pour des
femmes et des hommes qui se sont usés à la tâche et suspendent leur activité, voire l'interrompent pour
toujours. Enfin, il y a une sorte de consensus entre employeurs et syndicats sur les départs précoces de
salariés à la retraite: tout se passe comme si un pacte tacite avait été conclu, à l'échelon de la collectivité, de
manière à faciliter les départs anticipés.
Les pays qui ont réussi à garder sur le marché de l'emploi leurs travailleurs âgés ont développé des stratégies
sociétales globales, autour du vieillissement de la population . C’est l’exemple des nations d'Europe du
Nord qui ont promu la retraite progressive : dans ces mécanismes, le salarié reçoit une fraction de sa pension
tout en continuant de travailler à temps partiel, avec de moindres responsabilités hiérarchiques et une
rémunération plus faible. Au-delà des solutions techniques, le locataire de l'Elysée sait que, pour mener à
bien ce chantier, il faut décréter la mobilisation générale : formation, requalification, gestion des fins de
parcours professionnels, il convient d'embrasser toutes ces dimensions.
Texte 4 : Retraites, trente ans de débats et de réformes
(Didier Blanchet, Revue d'histoire de la protection sociale 2020/1)
Les bases du système de retraite que nous connaissons aujourd’hui ont été définies dans l’immédiat après-
guerre, mais sa montée en charge a été très progressive. Les premiers chiffres que donnent les comptes de la
protection sociale remontent à 1959. À cette date, les dépenses du poste vieillesse-survie ne représentaient
encore que 5,2 % du PIB, l’âge de départ en retraite était de 65 ans, et ce système assurait aux retraités un
niveau de vie ne représentait encore qu’environ 70 % de celui des actifs. C’est dans la décennie 1970 et la
première moitié des années 1980 que le système a pris les dimensions qu’on lui connaît, avec l’adoption de
règles plus favorables dans les régimes de base et l’extension de la couverture par les régimes
complémentaires. Ce double mouvement a progressivement aligné le niveau de vie moyen des ménages de
retraités sur celui de l’ensemble de la population. Il lui est même aujourd’hui supérieur. Il s’y est ajouté
l’abaissement de l’âge effectif de cessation d’activité, avec d’abord le développement des préretraites, puis
le passage à 60 ans de l’âge de la retraite à taux plein, en 1984, pour la partie de la population qui pouvait
totaliser 37,5 ans de cotisation à cet âge, ce qui était le cas d’une large majorité de la population masculine –
beaucoup moins pour la population féminine. Des retraites donc bien plus élevées et d’autant plus longues
que, entre-temps, l’espérance de vie était repartie à la hausse, après avoir marqué le pas dans les années
1960. Tout cela n’a été possible que par un accroissement conséquent de la part de la production nationale
allouée aux dépenses vieillesse-survie, passée à 11 % au milieu des années 1980.
C’est dans ce contexte qu’ont commencé à émerger les doutes sur la soutenabilité du système, avec des
projections démographiques qui avaient commencé à explorer les perspectives pour l’après 2000. L’avenir
qu’elles dessinaient pour 2040 était celui d’un doublement du rapport du nombre d’individus âgés de 60 ans
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et plus à celui des 20 à 59 ans, avec des conséquences faciles à styliser : accepter un quasi-doublement de la
part des retraites dans le PIB à droits inchangés, ou évoluer vers une division par deux de ces droits. Ou bien
encore, troisième option, une hausse très forte de l’âge de liquidation revenant à diviser par deux le ratio
entre durée de la retraite et durée de la vie active, un âge de la retraite qui aurait donc dû être porté à près de
70 ans. Vu l’ampleur de ces chiffres, il paraissait impossible de prétendre résoudre le problème en
n’actionnant qu’un seul des trois leviers. Le panachage était bien plus probable. C’est ce vers quoi nous ont
effectivement amené les réformes passées, non sans débats ni tâtonnements.
Texte 5 : La réforme du système de retraites, ou l’histoire d’un nouveau hold-up des
papy-boomers
(Arnaud Chéron, Directeur EDHEC Economics, EDHEC Business School,12 décembre 2019, The
Conversation France)
La logique financière semble implacable face au défi posé par la démographie : le ratio des 20-59 ans sur
celui des 60 ans et plus diminue continuellement, et poursuivra sa chute : d’environ 1,8 actuellement il
passera à 1,3 à l’horizon 2070 (alors qu’il équivalait 2,76 en 1990). Le retour à l’équilibre financier passe
donc au moins pour partie par des mesures d’âge.
Sur l’équité, il semble pourtant qu’il y ait un grand oublié dans la réforme : les actuels retraités. Il est en
effet envisagé de faire peser sur les seuls actifs le poids de la réforme, alors qu’aujourd’hui on est déjà
confronté à une très grande iniquité intergénérationnelle, à deux niveaux. D’une part, les papy-boomers
(génération du baby-boom qui vient de partir en retraite) ont relativement moins contribué, via leurs
cotisations, au système de répartition pour financer les pensions de leurs aînés (moins nombreux), que ne
cotisent actuellement les actifs. D’autre part, ils ont bénéficié d’un âge de départ en retraite
substantiellement plus faible que celui que connaîtront leurs descendants.
Le choix actuel est celui de la réduction des inégalités entre les actifs, futurs retraités, sans mettre à
contribution les actuels, au moins les plus aisés d’entre eux. C’est probablement pour éviter que ne s’ouvre
une fronde sociale supplémentaire, mais cela n’en reste pas moins très contestable. La mise à contribution
des retraités les plus aisés pourrait faciliter cette transition : l’allongement des carrières doit pouvoir se faire
dans des conditions propices à l’emploi et, qui plus est, pas sur des emplois au rabais.
Depuis le début des années 2000, on a observé une augmentation de l’emploi des seniors, consécutive au
relèvement de l’âge minimum légal de départ en retraite, du nombre d’annuités de cotisations, ainsi qu’à la
suppression des cessations anticipées d’activité et des dispenses de recherche d’emploi. L’allongement de
l’horizon des travailleurs sur le marché du travail a en effet profité à leur employabilité, bien avant 60 ans :
le taux moyen d’emploi entre 50 et 59 ans a ainsi progressé d’environ 10 points sur cette période, malgré
une conjoncture peu porteuse.
Pour autant, se pose la question de la nature, ou de la « qualité » des emplois occupés. La problématique de
la polarisation est aujourd’hui un phénomène économique particulièrement étudié, caractérisant la
disparition d’emplois dits routiniers (en référence typiquement aux tâches réalisées par les employés et
ouvriers), au profit, d’une part de postes dits complexes, bien rémunérés, renvoyant à l’exécution de
fonctions managériales et à fortes dominantes cognitives, et d’autre part (dans une moindre mesure) de
postes manuels à faibles salaires (typiquement en lien avec les services aux particuliers). Et c’est là que le
bât blesse : alors que pour les 30-49 ans la part des emplois complexes dans l’emploi non agricole a
progressé de 8 points depuis le début des années 2000 pour atteindre près de 32 %, contrepartie de la
diminution observée de la part des emplois routiniers, on n’a pas observé cette même « montée en gamme »
chez les 50-59 ans : la part des postes complexes, tout comme celle des emplois routiniers et manuels, est
restée stable les concernant. La formation professionnelle doit donc être au cœur des mesures
d’accompagnement de la réforme du système des retraites, avec un véritable soutien financier offert aux
entreprises qui proposent de former leurs salariés en deuxième partie de carrière. Comment financer cette
politique ? Précisément via une mise à contribution fiscale des retraités les plus aisés, juste retour des
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choses, de nature à restaurer une certaine équité intergénérationnelle. Évidemment, cela nécessitera un peu
(beaucoup) de pédagogie auprès des personnes concernées pour faire entendre la légitimité d’une telle
mesure.
Texte 6 : Régimes spéciaux, quel coût pour l’État ?
(Éric Pichet, Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business
School , 12 décembre 2019,The Conversation France)
Aujourd’hui, si 80 % des actifs dépendent du régime général des salariés du privé, il existe encore d’autres
grands types de régimes des retraites : le régime de la fonction publique subdivisé en fonction publique
d’État, fonction publique territoriale et hospitalière ; les 11 régimes des indépendants ; et enfin une vingtaine
de régimes spéciaux propres à un métier ou à un secteur d’activité qui ne relève ni de la fonction publique ni
des indépendants.
Les pensions des régimes spéciaux sont aujourd’hui plus élevées que dans la fonction publique, elles-mêmes
supérieures au secteur privé. Ainsi pour les nouveaux retraités de 2017, la pension brute moyenne en
équivalent carrière complète s’élève à 3 592 euros pour les IEG, à 2 636 euros à la SNCF et à 3 705 euros à
la RATP contre 2 206 euros pour les fonctionnaires civils de l’État. Autre différence majeure, l’âge
conjoncturel moyen de départ à la retraite est toujours plus bas : en 2017 il est de 57,7 ans pour les IEG, 56,9
ans pour la SNCF et 55,7 ans pour la RATP, contre 61 ans dans la fonction publique civile d’État et la
fonction publique territoriale, et 63 ans dans le régime général.
Pour les trois régimes, l’équilibre du système est toujours assuré in fine sur fonds publics. Selon les
dernières données concernant l’année 2017, ces financements publics s’élevaient au total à 5,5 milliards
d’euros, soit 28 % des retraites dans le cas des IEG, 62 % à la SNCF et 59 % à la RATP, en hausse au cours
de la dernière décennie (+8 points pour le régime de la RATP, +5 points pour le régime de la SNCF et +2
points pour celui des IEG). `Pour les IEG, le financement public passe par la contribution tarifaire
d’acheminement (CTA) une taxe affectée payée par tous les consommateurs (à l’exception des personnels et
des retraités des IEG), représentant plus d’1,5 milliard d’euros en 2017. Pour la SNCF et la RATP il s’agit
d’une dotation annuelle de l’État, respectivement de 3 280 et 681 millions d’euros, pour ce total de
financement public d’équilibre de 5,5 milliards d’euros.

ANALYSE DES DOCUMENTS


Documents chiffrés
D1 : Déficit croissant du système de retraite ..
D2 : avec forte espérance de vie et vieillissement
D3 : Réduction inquiétante du ratio cotisants/ retraités
D4-5 : Des retraites généreuses en France avec fort taux de remplacement et niveau de vie supérieur aux
actifs, D6-7 : Au prix de cotisations lourdes sur les actifs et surtout les entreprises, un poids important des
retraites dans le PIB
Texte 1
P1 : Réforme des retraites indispensable/ augmentation de l’espérance de vie
P2 : Avec mesures pour prolonger travail des séniors (prévention des maladies chroniques, formation
continue, adaptation des emplois et transition emploi-retraite)
P3 : Taux d’emploi des séniors trop faible et âge de départ en retraite trop précoce (temps de retraite trop
long)/OCDE
P4 : Nécessité d’une réforme pérenne avec système à points transparent, incluant aspect redistributif (points
pour ceux qui sont en bas de l’échelle des revenus financés par l’Etat) et prise en compte de la pénibilité (à
charge des entreprises)
Texte 2

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P1 : Fragilisation supplémentaire du déficit des retraites avec crise sanitaire (déjà délicat avec vieillissement
de la population dans le cadre d’un système par répartition et de l’arrivée en retraités des baby-boomers)
P2-3 : Des taux de cotisation élevés pour les actifs diminant revenus et augmentant coût du travail, avec
problème d’équité intergénérationnelle d’où nécessité de repousser l’âge de la retraite pour partager les
efforts
Texte 3
P1 : Augmenter l’âge de la retraite pose le défi de l’emploi des séniors. Un vrai problème français. Des taux
d’emplois faibles/OCDE,
P2 : …et des fins de carrières marquées par chomage, et inactivité
P3 : Causes : discrimination à l’embauche, soutenabilité de certains travaux, consensus sur départs précoses
à la retraite entre syndicats et employeurs lors de plans sociaux (accentué durant pandémie)
P4 : Nécessité de stratégies globales : retraite progressive, formation, gesyion des carrières
Texte 4
P1 : Un système de retraite conçu après guerre qui a commencé à devenir très avantageux pour les retraités à
partir des années 70 en alignant le niveau de vie des pensionnés sur les actifs, en baissant l’âge de la
retraite : des retraites longues, et généreuses d’où croissance continue de la part de la richesse consacrée aux
retraites.
P2 : Des intérrogations sur la soutenabilité du système de retraite d’où une succession de réformes jouant sur
plusieurs paramètres du système (durée de cotisation, âge de la retraite, niveau des cotisations et des
pensions)
Texte 5
P1 : Défi démographique illustré par déclin du ratio cotisants/retraités d’où la nécessité de mesures d’âge
pour retrouver équilibre financier
P2 : ….mais aussi de traiter iniquité générationnelle (des papy boomers ayant moins cotisés que les actifs
pour des retraites plus longues)
P3 : …par une contribution des retraités les plus aisés
P4 : d’allonger les carrières avec des emplois qualitatifs : polarisation de l’emploi aujourd’hui avec emplois
routiniers et des emplois complexes, mais peu de montée en gamme au sein des séniors avec part constante
des emplois routiniers. Nécessité de formation financée par retraités aisés.
Texte 6
P1 : De nombreux régimes de retraites spéciaux
P2 : Avec pensions plus élevées, un départ à la retraite plus précoce
P3 : Des cotisations très insuffisantes pour couvrir les pensions (financement public)
SYNTHESE

I Un système de retraites confronté à de nombreux défis


1) Le défi financier
2) Le défi démographique
3) Le défi de l’équité générationnelle
II … Qui exige des réformes globales pour sa survie à
terme
1) La nécessité de mesures d’âge
2) La viabilité par un système à points
3) L’accompagnement par des mesures sociales sur la
santé et l’emploi

Le système de retraite français est un acquis social majeur mais aujourd'hui il est confronté à un ensemble de
défis et c'est pourquoi des réformes doivent être envisagées d’urgence.
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Le défi est d’abord financier : le déficit du régime de retraite perdure et devrait s’accentuer durablement à
l’avenir. Cela est lié à des retraites généreuses en France avec un fort taux de remplacement et un niveau de
vie des retraités supérieur aux actifs, un taux de pauvreté faible, une retraite très précoce par rapport aux
autres pays de l’OCDE, et des régimes spéciaux encore plus généreux et couteux aux finances publiques.
Avec le vieillissement important de la population lié à la croissance quasi continue de l’espérance de vie, et
l’arrivée des papy boomers, c’est un vrai défi démographique qui se pose pour un système par répartition
avec la réduction inquiétante du ratio cotisant/cotisé. Les conséquences sont déjà perceptibles avec des
cotisations lourdes sur les actifs et surtout les entreprises limitant les revenus et augmentant le coût du
travail, et un poids important des retraites dans le PIB. A terme se pose la question de l’iniquité
générationnelle avec des générations du baby boom qui auront moins cotisées que les actifs actuels et
bénéficieront de retraites plus longues car plus précoces.

Repousser l’âge de départ en retraire parait inévitable de façon à mieux partager les efforts entre
générations, tenir compte de l’augmentation de l’espérance de vie très forte en France et tenter de retrouver
un équilibre financier du système. Mais cela est insuffisant en soi. Si de nombreux économistes dont le prix
Nobel français Jean Tirole pour un système à points plus transparent associant la prise en compte des plus
bas salaires et de la pénibilité, et assurant la pérennité de la répartition, il faut l’associer à une réforme
globale avec des mesures pour prolonger l’emploi des séniors. Car c’est là un vrai mal français : le taux
d’emploi est très faible et les fins de carrières sont trop souvent marquées par le chômage, et l’inactivité.
S’il y des discriminations à l’embauche, ou des questions de soutenabilité de certains travaux, le sous-
emploi des séniors relève aussi d’un consensus sur les départs précoces à la retraite entre syndicats et
employeurs lors de plans sociaux. Il convient donc de penser des stratégies globales de formation, de
retraite progressive, d’adaptation des emplois, de santé au travail. Ces politiques pourraient être financées
par des contributions des retraités les plus aisés pour rétablir un peu d’équité générationnelle.

Réformer les retraites en France est une urgence politique, longtemps repoussée car conflictuelle, et cela
implique une stratégie sociale globale bien loin des mesurettes paramétriques qui ne résolvent rien.

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