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/ UNIVERSITÉ LITTÉRATURE
ATHAN INFORMATION FRANÇAISE
FORMATION
Num: Cogtwsco F.x Parte
TRENT UI I MN Il \V/ rE Rn s I T Y
PRESENTED BY
EVA FRANKLIN
M. PAVILLON
Agrégé des Lettres
Professeur
de classes préparatoires
au lycée du Mans
Précis d'analyse
littéraire
1. structures
et techniques
de la fiction
UNIVERSITÉ
NATHAN INFORMATION
FORMATION
NATHAN-UNIVERSITÉ
dirigé par Henri MITTERAND, professeur à V Université de Paris
LATIN A LEGUAI :
• La guerre de Cent ans.
Pierre MONTEIL : Antoine OLIVESI et André NOUSCHI :
• La France de 1848 à 1914.
• Eléments de phonétique et de morpho¬ Maurice AGULHON
logie du latin.
et André NOUSCHI :
FRANÇAIS • Tome I : La France de 1914 à 1940.
• Tome II : La France de 1940 à nos
Pierre BRUNEL, L.-Robert PLAZOLLES
et Philippe SELLIER : Pierre GUILLEN :
jours.
• Le commentaire composé (2 volumes). • L’Allemagne de 1848 à nos jours.
Jean MOREAU : Peter TEED :
• La contraction de texte aux examens • La Grande-Bretagne de 1848 à nos jours.
et concours. Nora PIROVANO-WANG :
Christian BAYLON et Paul FABRE : • L’Asie orientale de 1840 à nos jours.
• Grammaire systématique de la langue René GIRAULT et Marc FERRO :
française. • De la Russie à PU.R.S.S. Histoire de la
Russie depuis 1850.
LANGUES VIVANTES
GEOGRAPHIE
Jacques TEYSSIER :
• Anglais moderne et anglais ancien. Georges VIERS :
Jacques CHAUVIN, Claude LACOTTE, • Eléments de géomorphologie.
Fiona MACPHAIL :
Georges VIERS :
• Britain observed (XXth Century). • Eléments de climatologie.
Jean-Louis CHEVALIER, Alain LACOSTE et Robert SALANON :
Bernard LOING :
• Eléments de biogéographie.
• Britain observed (XXth Century).
Tome 2 : A choice of texts... Georges VIERS :
R. PELLEN et E. MARTIN : • Géographie zonale des régions froides
et tempérées.
• La littérature espagnole d’aujourd’hui.
M. BENCHETRIT, Jean CABOT et
HISTOIRE F. DURANDDASTES :
• Géographie zonale des régions chaudes.
André NOUSCHI : Etienne DALMASSO, Raymond GU-
• Initiation aux sciences historiques. GLIELMO et Michel ROCHEFORT :
• Le commentaire de textes et de docu¬ • Eléments de science économique à l’usage
ments historiques. des géographes.
Jacques H ARM AND : Tome I : Les mécanismes économiques.
• Les Celtes.
Claude MOSSE : SCIENCES ECONOMIQUES
• La colonisation dans l’antiquité.
Yvon GARLAN : Jean RINAUDO et Roger COSTE :
• La guerre dans l’antiquité. • Initiation
volumes). aux sciences économiques (2
Marcel PACAUT :
• Les ordres monastiques et religieux au Jean RINAUDO et Roger COSTE :
Moyen Age. • L’épreuve d’économie aux examens et
Etienne FOURNIAL : concours.
• Histoire monétaire de l’occident médié¬ Nicole CAMPION, Roger COSTE et
val. Jean RINAUDO :
Guy FOURQUIN : • Initiation aux termes et documents éco¬
• Le paysan d’Occident au Moyen Age. nomiques.
Bien qu’il existe depuis plus de cinquante ans une façon nouvelle
d’appréhender les textes, fondée sur les travaux linguistiques et illustrée
par F. de Saussure et ses continuateurs, il ne semble pas que l’enseignement
en ait bénéficié autant qu’il le pouvait, surtout dans le second degré. La
principale raison paraît en être qu’on ne s’est pas donné la peine de
forger les outils d’introduction à ces nouvelles techniques. Ce livre veut
être un de ces outils. Il en faut beaucoup d’autres.
Si l’on a choisi de lui donner la forme d’un manuel, c’est que cette
forme apparaît, dans les circonstances actuelles, comme le seul moyen
efficace de permettre une concertation et de donner des instruments aisé¬
ment accessibles aux étudiants, qui sont de futurs maîtres.
• Nécessité de la concertation.
PRINCIPES DIRECTEURS.
4
La première, simple corollaire, c’est qu’aucune réalité ne peut s’insi¬
nuer dans un texte sans être informée par lui, non pas même comme dans
une médiation nécessaire, mais pour s’y fixer dans sa forme définitive et
se communiquer comme telle, inaliénablement textuelle. Voilà pourquoi,
à proprement parler, on ne saisit pas le xixe siècle quand on ne saisit
qu’un texte de cette époque, et pourquoi aussi on ne psychanalyse pas
un individu quand on ne saisit qu’un texte dont cet individu est l’auteur
et tant que l’individu lui-même ne passe pas sur le divan du psychanalyste.
CONTENU ET DESTINATION
étudiants
® Une synthèse systématique et progressive pour les
et les enseignants.
des élé¬
Ce traité propose, sous une forme systématique et progressive,
trouvent aujour¬
ments pour l’observation des textes littéraires, qui ne se
ations de recher che fondamentale.
d’hui que dispersés dans diverses public
tées à la littérature
Bien que les illustrations soient presque toutes emprun
pour tous ceux,
française, son caractère théorique en fait un outil de travail
littéra ires, dans quelque
étudiants et enseignants, qui travaillent sur les textes
aux étudiants du
langue qu’ils soient écrits. Il est destiné plus spécialement
soucieux de s informer
premier cycle et aux professeurs du second degré
temps en outre den
sur les techniques modernes de l’analyse. Il est
des lycées.
monnayer l’essentiel dans les classes du second cycle
5
• Quatre leçons fondamentales.
6
Sommaire
31
53
DEUXIÈME PARTIE : QUI VOIT? 36
65
55
2. 1. Foyers et regards
2. 2. Structures de la représentation
83
S
QUATRIÈME PARTIE : CONSTRUCTION 117 90
4. 1. Réunion et enchaînement
La nouvelle-cadre 123
4. 2. Réunion et enchaînement
Le héros. Le voyage. Juxtapositions
4. 3. Compositions 131
https://archive.org/details/precisdanalyseli0001pati
Première partie
gUI PARLE ?
i.i. L’ÉNONCIATION HISTORIQUE. 1
Observation de textes-types.
11
• Quelqu’un parle-t-il ?
Par rapport à la présence avouée d’un sujet qui parle, les textes
A et B sont à l’opposé l’un de l’autre : la lettre n’est ici, pour le sujet
qui parle, qu’une longue confidence sur lui-même, tandis que l’auteur de
l’énoncé historique veut disparaître au profit des faits, qui doivent exister
par eux-mêmes. Ce dernier mode, qu’on peut caractériser comme le récit
d’événements passés avec intention historique, et que nous appellerons
l’énonciation historique, appartient par excellence au langage écrit. Tout
mode d’énoncé qui s’en éloigne tend vers le discours, qu’il soit oral, comme
lorsque nous communiquons avec les autres par la parole, ou écrit, comme
dans la lettre citée ci-dessus.
12
• Temps de l’indicatif :
aoriste (passé simple ou défini) :
imparfait :
fondaient ; se trouvait.
plus-que-parfait :
avaient débarqué.
prospectif :
allait trouver.
Sous le nom de temps, les formes verbales jouent en fait deux rôles ;
elles marquent :
1° le temps, qui situe les faits sur l’axe du temps comme passés, présents
ou futurs ;
2° l’aspect, qui présente les faits comme s’étalant ou non dans la durée,
comme se répétant ou non, comme achevés ou non...
• Aspect duratif.
• Aspect ponctuel.
• Aspect résultats.
• Le prospectif.
14
1.1.5. TEMPS ET LIEUX FIXES. TEMPS ET LIEUX RELATIFS.
• Repères fixes.
Dans notre texte, les noms propres de lieu sont fixés par la géogra¬
phie. On a cependant une localisation relative dans les séquences suivantes :
n’ont qu’une valeur relative : alors, ce peut être aussi bien hier qu’à l’âge
de pierre.
15
La langue dispose ainsi d’une série de mots pour l’expression du
lieu et du temps relatifs. L’énonciation historique évite nécessairement
ceux où le locuteur (celui qui énonce) se prend lui-même en train d’énoncer
comme point de référence. Elle emploiera la veille ou le lendemain, mais
non pas hier ou demain.
16
• L’événement sur le vif.
Conclusions.
Descriptions de textes.
18
jeu de la pensée, Perrette, dont l’imagination est déjà lancée (voir les
vers précédents), anticipe sur un avenir qu’elle croit déjà tenir. On a ainsi
comme points de référence successifs, le présent des poulets qu’elle élève,
le présent implicite du porc à l’engrais, d’où le récit au passé d’un événe¬
ment à venir : Il était, quand je l’eus... (noter l’opposition dans l’aspect
de ces deux temps) ; enfin, le présent du porc bon à vendre. Divers futurs
se situent par rapport à ces présents, et l’on peut représenter l’ensemble
de la façon suivante :
v<D 3
O
O
OUt WD
O<D <u3
X X
a
verrai
empêchera
”3
il est
J.j’aurai
<3
sera (laisse)
il m’est facile
Y
19
Le fait que certains énoncés comme il m’est facile d’élever des
poulets autour de ma maison s’appuient sur une situation réelle au moment
du récit renforce l’illusion créée notamment par l’emploi du pronom
de la première personne : Perrette est à la fois celle qui va porter son lait
à la ville (personnage supposé réel dans la fiction du récit), et celle qui
fait fortune en imagination, comme le souligne la reprise du verbe sauter
(v. 21 et 22).
AUBE
Il s’agit d’un récit au passé mais non pas ici, sauf pour
le passage
entre [ ], d’une énonciation historique au sens strict,
première personne et le passé composé. Cependant, à lapuisqu ’on
lumière
emploie la
des notions
établies plus haut, on peut faire sur ce texte quelques observations capitales :
20
— Sur l’opposition entre les emplois de passé composé et d’aoriste
à la première personne. Parce que le passé composé est propre au discours,
il est plus proche de celui qui parle, du procès de l’énonciation, tandis
que l’aoriste est plus proche des faits pris en eux-mêmes, du procès de
l’énoncé. Lorsqu’il est dit : J’ai embrassé l’aube d’été, Je l’ai entourée avec
ses voiles amassés, et j’ai senti un peu son immense corps, cette étreinte
merveilleuse reste attachée à la personne de celui qui la vécut autrefois.
le héros
Ainsi apparaît le mouvement du texte : progressivement,
ur se projette dans le
suscite et saisit l’aube ; au fur et à mesure, le narrate
que.
récit. D’où, à la fin, l’emploi de l’énonciation histori
21
i.2. LES EMBRAYEURS.
23
En disant ici, le renard donne à ce mot un sens déterminé. En revanche,
lorsque Agrippa d’Aubigné décrit la résurrection de la chair :
a — La machine à calculer.
b — Une machine à calculer.
c — Ma machine à calculer.
d — La machine à calculer de Biaise Pascal.
• L’embrayeur suffit.
• L’idée générale.
25
La lecture des embrayeurs (entre [ ]) met en évidence le fonctionne¬
ment de ce texte : une opposition entre le général et le particulier qui
correspond aux deux parties de la comparaison (comme ... ainsi...). Les
deux quatrains posent une règle générale à quoi les faits particuliers
énoncés dans les tercets viennent se conformer.
Dans les deux quatrains, par l’emploi de l’article défini, les noms,
branche, mois, rose, jardins, arbres sont portés au même degré de généralité
que ceux de ciel, aube, jour. Les présents ont valeur générale, ainsi que
l’indéfini on.
Dans les tercets, l’emploi des embrayeurs situe par rapport à l’énon¬
ciation du texte un je, un tu, leur ici et leur maintenant.
La Grâce et l’Amour sont deux idées assez générales et donc indé¬
pendantes pour se personnifier en deux allégories. La Parque est dans la
mythologie une personnification de la mort.
1.2.5. LE JE ÉCRIT.
Parce que notre texte C est tiré d’un sermon, qu’il a été conçu
d’abord pour être prononcé, il est normal que je voie derrière le je la
personne qui le prononce, c’est-à-dire Bossuet lui-même. Mais souvent
l’emploi de je par écrit pose un problème. La comparaison avec le nom
propre le fait bien comprendre. Si j’entends dire Frédéric II ou si je le lis
écrit, le sens est le même et ne fait pas de difficulté. Si j’entends dire je
et si je le lis écrit, il n’en va pas de même. Il me suffit d’identifier celui
que j’entends parler pour qu’il se désigne à moi comme je. Mais par écrit ?
26
• Qui écrit ?
© Le je-\ ariable.
L’auteur dit je, c’est-à-dire pose une personne, sans donner aucune
indication permettant de l’identifier ni à lui-même expressément ni à aucun
autre personnage réel ou fictif. C’est le cas, par exemple de notre texte B.
La tentation dans ce cas est toujours d’identifier je et l’auteur. Bien
des raisons y poussent dont la principale est la présence très réelle dans
le texte d’un style qui marque son originalité.
• Le /e-introduit.
27
Conclusions.
L’embrayeur est un mot tel qu’il lui suffit d’être dans la bouche
de quelqu’un pour prendre un sens déterminé, et tel qu’il ne peut avoir
de sens déterminé sans être dans la bouche de quelqu’un.
Descriptions de textes.
29
Tous les matins, je me raisonne, je me dis : « Va [au bureau],
Badin ; voilà plus de huit jours que tu n’y es allé ! » Je
m’habille alors, et je pars ; je me dirige vers le bureau. Mais
ouitche ! j’entre à [la brasserie] ; je prends un bock..., deux
bocks..., trois bocks ! Je regarde marcher [l’horloge], pensant :
« Quand elle marquera [l’heure], je me rendrai à mon minis¬
tère. » Malheureusement, quand elle a marqué l’heure, j’attends
qu’elle marque [le quart] ; quand
tends quelle marque [la demie] !...elle a marqué le quart, j’at¬
G. Courteline, Monsieur Badin,
Flammarion, p. 12 (1897).
30
1.3. LE temps de la narration.
32
•a*
Conclusions.
34
Description de texte.
Ce texte est plus une réflexion sur les événements que le récit de
ces événements. Ainsi, le texte souligne le caractère exceptionnel d un fait :
n’était encore que chef de bataillon, ce qui appelle la théorie qui suit sur
l’avancement dans l’artillerie : on organise l’explication : D abord... puis...,
on nuance la pensée : presque républicaines, on justifie : ainsi que plusieurs
aux
autres fils de généraux morts sur le champ de bataille / contrairement
du
lois ordinaires, etc. L’exemple est intéressant en ceci que l’apparition
que la manifestati on
discours (entre [ ]) dans cet énoncé historique n’est
puis...
des intrusions du narrateur. En effet, le balancement par d’abord...
présent répond à la même intention explicative
montre que la phrase au
considération
que la suivante qui reste au passé. Seulement, cette première
fait apparaître
est toujours actuelle au moment de la narration, et le présent
le narrateur en train de parler.
35
i.4. LA PERSONNE.
36
C — Nuit de juin ! Dix-sept ans ! On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête...
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête...
• Il impersonnel :
pas qui neige ? : l’expression traduit un pur phénomène que l’on constate
sans lui reconnaître d’agent. C’est aussi par impuissance à nommer les
désigne souvent par ils : Avec
agents responsables que l’homme de la rue les
détraquent le temps.
leurs bombes atomiques et leurs fusées, ils nous
• Emploi du pronom il :
Conclusions.
38
réalité qui m’est intérieure, alors que le tu pose une réalité qui m’est
extérieure.
Description de texte.
texte en tant
La phrase entre [ ] tranche nettement sur le reste du
qu’elle emploie
que discours dans une énonciation historique et en tant
cé intervient au
la personne en face de la non-personne. Ce mode d’énon avec opposition
moment où un person nage se pose avec force comme sujet,
s y oppose
de la personne subjective à la personne non subjective. Le je
droit à être elle-même.
au tu : une personne affirme en face d’une autre son
toute la signifi¬
Il n’est pas difficile de retrouver dans ce bref extrait
entre son rêve de
cation du récit du bal à la Vaubyessard. Emma est prise
e, et le quotidien
vie mondaine, présent ici par la toilette et la musiqu
quitter celui-ci pour
médiocre incarné par Charles. Son instinct la porte à
celui-là.
39
i.j. LES RELAIS DE PAROLE.
40
On dit qu’un locuteur X qui a énoncé P est relayé par Y dans
l’énoncé de P, si Y cite l’énoncé P. Et l’on appelle relais de parole la
citation d’un énoncé par un autre. L’énoncé cité peut être un texte parlé
ou un texte écrit, un texte préexistant ou nouvellement élaboré ; il peut ou non
être cité avec introduction du locuteur, donner lieu ou non à un changement
de locuteur.
Dans nos exemples, nous avons mis les relais entre [ ]. Dans le
texte A, ils sont en outre numérotés de 1 à 5. Les énoncés 1, 3, 5, ont été
prononcés par le narrateur qui se relaie lui-même ; les énoncés 2 et 4 par
son chauffeur de taxi. On voit donc que le je du premier relais est différent
de celui du second. Les incises, je lui dis, il dit, permettent d’attribuer chaque
texte à son auteur. Une fois le dialogue amorcé, un simple tiret par écrit, un
• Citation intégrée.
e Citation oratoire.
41
1.5.2. NIVEAU DU RELAIS.
Dorante je pense ?
— Tu pourrais bien te passer de m’en faire
sentir toi.
42
De même, dans le texte D, il n’y a de relais dans le dialogue de Mme de
La Pommeraye et du marquis des Arcis, que si on le considère comme un
énoncé continu. Mais ce dialogue est relayé par l’énoncé de l’Hôtesse qui
le rapporte, lui-même relayé par l’énoncé du narrateur de Jacques le Fataliste
et son Maître. Le texte ne cesse pas pourtant d’être inventé par Diderot, et
l’intérêt du passage est dans la malice des répliques qu’il prête à Mme de
La Pommeraye et dans la façon dont il conduit l’entretien.
discours
On distingue traditionnellement trois modes de citation : le
direct, le discours indirect et le discours indirect libre.
• Le discours direct.
dans la
Le discours direct (exemple a) restitue les paroles citees
texte écrit par
forme même où elles ont été dites. Il est signalé dans un
ment d’interlocuteur
l’emploi de guillemets. Dans un dialogue écrit, le change
peut être marqué par un simple tiret. 45
• Le discours indirect.
Mais au passé :
osition d un récit
Dans sa partie proprement narrative, la comp
aire et la s^ene-
repose généralement sur une alternance entre le somm
énements detail e a
C’est-à-dire que le texte nous conduit d’un récit d’év
^ sont brièvement indi¬
un autre en passant par un récit où les événements ive, voire meme en
itérat
qués, ou condensés, ou regroupés sous une forme
une part importante
partie éludés par une ellipse. Le discours cité fournit
une exacte restitution de 1 évé¬
des scènes ; avec le discours direct, onla aparol
nement, puisque celui-ci consi ste dans e même.
[], la scène
Notre texte G présente deux scènes comprises entre
scène avec la supéri eure. Elles sont surtout
avec la sœur cuisinière et la
affronter les autres reli¬
remplies par les dialogues où l’on voit l’héroïne
drent, elles n ont
gieuses. Par rapport au sommaire dans lequel elles s’enca ire est la description
pas le même statut. Dans sa presque totalit é, ce somma
comme le marqu ent les imparf aits itératifs (de
d’une situation durable :
Or, la première
répétition), les vexations se répètent, toujours les mêmes.
série itérative, la
scène, bien que singulative en elle-même, s’inscrit dans une
à manger ,
démarche chaque jour répétée d’aller dans la cuisine demander
efois. .. quelqu efois. ..) et
elle inaugure la série (la première fois... quelqu
suiven t imméd iatem ent. La
continue d’éclairer les énoncés itératifs qui
de secouer
seconde scène au contraire est une péripétie, une tentative isolée
es ponctuels qui
le joug (je sentis... je me déterminai...). Des deux aorist
fus, le secon d a comme valeur d. aspect de
suivent cette scène, donna et
décrite dans
noter le commencement : c’est le point de départ de la durée
le sommaire qui suit.
fois que se reproduit la situation décrite. C’est donc un discours faite type qui
des paroles, abstracti on des
indique de façon générale le sens et le ton
différences possibles d’une fois à l’autre.
48
Conclusions.
Descriptions de textes.
LE COCHE ET LA MOUCHE
49
Dame mouçhe s’en va chanter à leurs oreilles,
Et fait cent sottises pareilles.
25 Après bien du travail le coche arrive au haut.
[« Respirons maintenant], dit la mouche aussitôt :
[J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Çà, Messieurs les chevaux, payez-moi de ma peine. »]
La Fontaine, Fables, VII, 9.
Tous les discours cités dans ce texte sont tenus par la mouche, avec
changement de locuteur par rapport au récit du narrateur. Le narrateur
utilise successivement les trois modes de discours cité, le discours indirect
(v. 9 et 18-19), le discours indirect libre (v. 21 et 22) et le discours
direct (v. 26-28). La remarque qui s’impose est celle de la progression
dans l’emploi du discours. Il a d’abord, comme on le voit par le numéro
des vers où il est employé, une place de plus en plus grande dans le texte.
Il a ensuite une intensité dramatique toujours plus grande : le discours
indirect libre marque un progrès sur le discours indirect, en ceci qu’on
croit déjà entendre les paroles ; le ton y est indiqué par la ponctuation
(ici un point d’exclamation) comme dans le discours direct. Cependant,
entre les deux emplois de discours indirect, il y avait déjà une progression,
en ce sens que le premier n’est qu’un discours en pensée (une pensée dont
le contenu est peut-être indiqué plutôt que formulé), tandis que le second
est en paroles, avec toute la verve d’un discours : elle agit seule, elle a tout
le soin, aucun n’aide aux chevaux... A quoi s’oppose en ce commun besoin,
où il faut voir une trace de discours. Quand enfin intervient le discours
50
(Dans un salon mondain. La duchesse de Langeais vient de
lancer à M. de Montriveau une invitation à venir chez elle.)
— Quand il se rejeta dans les groupes d’hommes qui se tenaient
à quelque distance des femmes, plusieurs de ses amis le
félicitèrent, moitié sérieusement, moitié plaisamment, sur l’ac¬
cueil [extraordinaire] que lui avait fait la duchesse de Lan¬
geais. [Cette difficile, cette illustre conquête, était décidément
faite, et la gloire en avait été réservée à l’artillerie de la
Garde.] <11 est facile d’imaginer les bonnes et mauvaises plai¬
santeries que ce thème, une fois admis, suggéra dans un de ces
salons parisiens où l’on aime tant à s’amuser, et où les raille¬
toute ont
ries si peu de durée que chacun s’empresse d’en tirer
la fleur.)
Bien qu’on doive considérer que ce texte fait partie d’une -scène,
son fonctionnement par rapport au récit où elle s’insère et qui constitue
le fond (background) de la représentation, appelle quelques remarques.
Des hommes parlent à un autre à la suite d’un événement ; ce
sont des félicitations, mais aussi de bonnes et mauvaises plaisanteries, des
railleries.
OUI VOIT P
2.i. FOYERS ET REGARDS
Foyer et regard.
56
Contre le mur de la gare, se projetait l’ombre étroite du bâti¬
ment ; un rideau de perles de bambou, pour les mouches, pen¬
dait devant la porte ouverte du café. L’Américain et la jeune
femme étaient installés à une table, dehors à l’ombre.
Il faisait étouffant. L’express de Barcelone arriverait dans qua¬
rante minutes. Il s’arrêtait deux minutes à cet embranchement
et continuait vers Madrid.
— Qu’est-ce qu’on pourrait boire ? demanda la jeune femme.
Elle avait enlevé son chapeau et l’avait posé sur la table.
— On crève de chaud, dit l’homme.
— Prenons de la bière.
— Dos cervezas, dit l’homme à travers le rideau.
— Des grands ? demanda une femme à la porte.
— Oui, deux grands.
La femme apporta deux verres de bière et deux tampons de
feutre.
Elle posa les tampons de feutre et les verres sur la table et
regarda le couple. La jeune femme contemplait la ligne des
montagnes. Elles étaient blanches sous le soleil et la campagne
était brune et desséchée.
— On dirait des éléphants blancs, dit-elle.
— Je n’en ai jamais vu. L’homme avala sa bière.
— Je l’aurais parié.
— J’aurais pu, dit l’homme. Dire que tu l’aurais parié ne
prouve rien.
Hemingway, Paradis perdu (au début),
trad. Henri Robillot et Marcel Duhamel
(1921-1938). Ed. Gallimard.
• Perception humaine.
• Objectivité.
purement
Pourtant, ce regard est parfaitement objectif, enregistrant
le sentiment d un sujet
et simplement les apparences. Ainsi, on n’a jamais
que, le texte est dit sans
devant l’objet. Comme dans l’énonciation histori
est vu sans que personne ne
que personne ne parle ; de même, ici, l’objet
au récepteur de l’énonce.
regarde. Tout le travail d’interprétation est laissé
57
• Règle du jeu.
• Le behaviourisme.
• Sujet témoin.
59
• Relais de foyer.
du point de vue d’un sujet témoin sans que celui-ci apparaisse jamais.
Il existe pourtant, comme la lecture de la suite du texte le montre, puisque,
sans qu’on le voie ni qu’on l’entende jamais, il occupe un fauteuil et
prend part aux conversations. La conscience du sujet témoin ne connaît
des choses et des êtres que ce qui s’en découvre du foyer où elle est
placée. Mais elle ne manque pas d’être active et d’interpréter le plus possible
les apparences quelle saisit : A..., sans y penser, regarde ; afin d’en mieux
voir le fond, (elle) tire un peu plus le casier ; tenant sans aucun doute
une feuille de papier entre les mains.
• Singularisation.
Conclusions.
61
Descriptions de textes.
62
Ces premières observations font apparaître les séquences où l’énoncé
abandonne le plan initial d’énonciation historique ou de focalisation zéro
pour passer au plan des personnages en discours cité ou en focalisation
interne. Les textes en relais se répartissent ainsi aisément en trois masses
sucessives : d’abord Mme de Rénal attentive à Julien, puis Julien
attentif à Mme de Rénal, puis en deux phrases parallèles coiffées par
l’énoncé : ils étaient fort près l’un de l’autre à se regarder, les deux héros
attentifs l’un à l’autre. Tel est le dessein (et le dessin) du texte, puisqu’il
estompe le plus possible, dans la deuxième masse centrée sur Julien, l’atten¬
tion que continue de lui porter Mme de Rénal : sa première parole, en
discours direct (Que voulez-vous ici, mon enfant ?) est absorbée par la
focalisation sur Julien ; d’où : une voix dit et non pas : Mme de Rénal dit :
ces paroles sont d’abord quelque chose, la première chose, remarquable
par sa douceur, que Julien apprend à connaître d’elle. Sa seconde parole
est seulement indiquée : Mme de Rénal avait répété sa question. Ainsi le texte
réalise une rencontre (3° masse) préparée par deux démarches individuelles
(lre et 2 * masses).
cette
Non seulement le texte au plan initial souligne comment
il oublia, tout
scène est vécue et ressentie par les héros (distraite de,
regard (celui de
honteux de, interdite...), mais lorsque lui-même porte son
te le même
l’auteur de l’énoncé) sur les personnages, ce regard manifes
Avec la vivacité et la
intérêt qui se retrouvera en focalisation interne :
était si blanc,
grâce qui lui étaient naturelles... Le teint de ce petit paysan
grande souplesse
ses yeux si doux... En vérité, tout le texte témoigne d’une
63
:
dans le passage d’un plan à l’autre, d’un relais à l’autre. Dans l’énoncé
Elle eut pitié de cette pauvre créature arrêtée à la porte d’entrée, et qui
évidemment n’osait pas lever la main jusqu’à la sonnette, le mot évidemment
paraît être une trace de discours prêté à Mme de Rénaldu dont l’esprit
romanesque interprète les apparences. Le mot pauvre relève même genre
d’interprétation. Dès lors, le relais de parole est fondu dans le relais de
foyer : c’est ainsi qu’elle voit l’objet parce que c’est ainsi qu’elle le pense.
Et lorsque le texte énonce étonné de sa beauté, bien qu’il présente cette
beauté en focalisation interne, il ne la pose pas comme relative au regard
de Julien, il l’affirme aussi au plan initial comme un fait objectif.
Cette technique narrative appelle ainsi tout du long la participation
affective du lecteur qui vit la scène de l’intérieur, tout en lui gardant, par
la position initiale en focalisation zéro, une distance critique.
64
2.2. STRUCTURES
DE LA REPRÉSENTATION.
65
• Structure primaire et structure secondaire.
primaire qui relie les éléments du texte à l’intérieur des segments. Une
structure secondaire qui relie la suite des segments.
66
• Succession.
texte D (entre [ ]), c’est qu’il donne à la scène qu’il clôture une fin
illusoire, le moyen d’interrompre le récit d’une façon qui ne paraisse pas
abrupte : le temps y reste comme suspendu. Ce n’est qu’après cela qu’on
peut se demander si l’auteur de l’énoncé recherche en même temps et
de façon opportuniste un effet, par exemple de contraste, entre l’action des
hommes pour faire l’histoire et la répétition sereine des rythmes cos¬
miques.
67
2.2.3. L’ITÉRATIF.
• Répétition et succession.
68
Dans le texte E, nous avons marqué en caractères gras les termes
qui font apparaître l’itération et la succession. Le couple déjeuner-goûter,
les mots s’achève, ensuite, enfin marquent le progrès de l’action, tandis
que l’expression chaque dimanche indique que les mêmes événements se
répètent chaque fois à la manière d’un rituel. L’objet est donc présenté
selon deux axes, un axe de la succession et un axe de la répétition. Ceci
appelle trois observations.
• Abstraction.
69
2.2.4. STRUCTURES DESCRIPTIVES.
70
20 Superbe, gouvernant du côté de l’azur,
Il choisit, pour fêter sa blancheur qu’il admire,
La place éblouissante où le soleil se mire. /
Puis, quand les bords de l’eau ne se distinguent plus,
A l’heure où toute forme (est) un spectre confus,
25 Où l’horizon brunit rayé d’un long trait rouge,
Alors que pas un jonc, pas un glaïeul ne bouge,
Que les rainettes font dans l’air serein leur bruit,
Et que la luciole au clair de lune luit,
L’oiseau, dans le lac sombre où sous lui se reflète
30 La splendeur d’une nuit lactée et violette,
Comme un vase d’argent parmi les diamants,
Dort, la tête sous l’aile, entre deux firmaments. /
Sully Prudhomme, Les Solitudes (1869).
• Description/narration. Le mouvement.
71
• Objet fixe, foyer fixe et regard mobile. Qualité du regard.
• Le regard-peintre.
Pour la description détaillée, une dernière structure (entre < >) est
donnée par le déplacement du regard qui parcourt ou anime l’objet. Un
mouvement d’abord de l’avant vers l’arrière, puis vers l’est, rend compte
des deux masses contrastées (tandis que ) de la prairie et de la plaine ; puis
le regard revient à l’eau qui les sépare. De plus, par l’emploi des verbes
d’action (en caractères gras), la description introduit du mouvement dans
l’objet, des relations entre ses parties. Ce mouvement est celui du regard,
qui est censé accompagner les formes de l’objet mais qui, en réalité, en
construit la représentation en termes de langage : une expression comme
étale à perte de vue est de ce point de vue significative. On a donc des
mouvements glissés entre lesquels le regard saute d’un point à un autre,
un peu comme le peintre qui lève sa brosse.
• Description itérative.
Le texte H est une description isolée. Son objet est en partie fixe,
en partie mouvant ; surtout, il est changeant : c’est une succession de
tableaux avec un même sujet central, le cygne. Il ne semble pas pertinent
de chercher à préciser la focalisation ; en revanche, on doit considérer
cette description comme itérative : elle propose un exemplaire-type d’un
spectacle indéfiniment multiplié et répété.
72
est alors défini par la présence d’un verbe itératif. Imaginons de réécrire le
texte, par une transposition toute formelle, en singulatif et au passé :
73
2.2.5. CALLIGRAMMES.
°C
R
E Œ
M V
M R
A P
L A
F R
E E
N !
V L DOU
à LOU
REUSE
QUE TU
PORTES
ET QUI T
ORNE O Ci
VÎLISÉ
OTE- TU VEUX
LA BIEN
SI RESPI
RER
74
Conclusions.
Le récit itératif présente en une seule fois une action qui s’est
répétée plusieurs fois. Un tel récit détaillé n’est possible que s’il fait
abstraction des différences que l’action répétée a pu présenter d’une occur¬
rence à l’autre. C’est donc un récit typé. L’énoncé itératif ne distingue pas
formellement l’aspect itératif de l’aspect duratif. En outre, la durée peut
être prise sur l’axe de la succession ou sur celui de la répétition.
75
Descriptions de textes.
76
Or, ces deux segments descriptifs sont un modèle de description
intégrée dans le récit. La succession des segments narratifs propose deux
séries d’événements parallèles : la progression du coupé qui parcourt les
kilomètres, et l’activité du personnage central, le texte délaissant souvent
celle-là au profit de celle-ci. Mais la progression du Coupé reste présente
dans cette forme d’activité du personnage central que sont la contemplation
et la rêverie ; contemplation et rêverie sont reliées à la progression du coupé
de deux façons :
relais de
Si l’on tient compte enfin du jeu des relais en lui-même,
avec le personnage
foyer ou relais de parole2, par lesquels le texte voit
ion d’un tel récit ; sans
ou parle avec lui, on comprend la puissance d’illus
ique et la foca¬
préjudice
lisatio du recul critique assuré par l’énonciatio histor
n zéro.
n
de
re narrative. Elle est en outre itérative à partir
1. Cette partie de la description admet une structu
kilomètres, tout au plus! » et « dans combien de
2 Refaf de parole : « On n’avait fait que cinq
-
S
77
/ Tout à coup elle se souvint de l’homme écrasé le jour de sa
première rencontre avec Vronski, / et elle comprit ce qu’il
lui restait à faire. / D’un pas rapide et léger elle descendit
les marches / et, postée près de la voie, elle scruta [les œuvres
basses du train qui la frôlait, les chaînes, les essieux, les
grandes roues de fonte,] cherchant à mesurer de l’œil [la
distance qui séparait les roues de devant de celles de derrière.]/
(« Là,) se dit-elle en fixant [dans ce trou noir les traverses
recouvertes de sable et de poussière,] (là, au beau milieu ; il
sera puni et je serai délivrée de tout et de moi-même. »)/
78
Quels éléments rendent cette page saisissante ? les relais de pa¬
role (entre ( )) et de foyers (entre [ ]), les effets de réel (en caractères gras),
la structure narrative (marquée par des //), le tout de façon étroitement
conjointe. Dans les relais, la parole avec et la vision avec sont remarquables
d’intensité ; la parole par la répétition, l’interrogation, l’exclamation ; la
vision par la présence de l’objet, les chaînes, les essieux, les grandes roues
de fonte, jusqu’au sable et à la poussière qui recouvrent les traverses dans
le trou noir. Mais ces discours directs ou ces visions en focalisation interne
ne sont que l’affleurement, comme par une poussée dramatique plus grande,
d’un événement restitué aussi avec force par le reste de l’énoncé. Ainsi,
les effets de réel. Les énoncés en caractères gras sur le sac rouge et sur le
petit homme marmottant et tapotant (quatre segments narratifs et un
segment descriptif) paraissent inessentiels au regard de l’action centrale.
C’est-à-dire que la même présence des objets, remarquable en focalisation
interne, se retrouve en focalisation zéro. On peut élargir la remarque et
considérer que la narration s’oblige à ne présenter de l’événement que ce
qui est censé avoir été vécu par le personnage central. D’où le silence sur
tout le reste, en particulier sur les témoins de la scène. De plus, en conden¬
sant le récit sur un trait inessentiel, on déforme les proportions habituelles,
ce qui est un moyen de faire voir l’objet, d’en imposer la présence. L’inten¬
sité dramatique se retrouve enfin dans la multiplicité des segments narratifs
primaires. Certains s’écoulent plus lentement, d’autres plus vite, mais de
toute façon l’événement paraît très dense lorsqu’on songe qu’il est limité
dans le temps à la succession de deux wagons. Ceci est conforme à l’idée
que pour la conscience le temps s’étire ou se restreint selon l’intensité avec
laquelle on le vit.
79
Troisième partie
ILLUSIONS
3-i. LA MOTIVATION RÉALISTE.
lois générales sous lesquelles viennent justement se ranger les faits parti¬
culiers qui suivent ou qui précèdent.
Ces articulations logiques sont autant de motivations réalistes. Elles
ont ici une forme caractéristique, mais elles peuvent parfois se ramener
des
à un mot, comme dans le texte E, ou rester diffuses dans 1 énoncé
d’expres¬
faits. On voit par ces exemples que le présent s’accompagne souvent
le plus souvent, on, l’homme,
défini...santes : toujours, ordinairement,
articlegénérali
sions
83
3.1.2. LE VRAISEMBLABLE.
• Argumentation et opinion.
• Présomptions générales.
84
vraisemblance. Mais aussi longtemps qu’un public a besoin, pour s’entretenir
dans l’illusion, de retrouver dans la fiction une copie de ce qu’il connaît
comme normal, alors le contenu de l’œuvre doit rester dans les limites
du vraisemblable, ou s’en donner l’apparence. Il lui faut respecter les
présomptions implicites de l’auditoire ou construire sa propre théorie du
normal en introduisant des maximes qui rejoignent ces présomptions et
rendent compte des faits fictifs. Parmi les présomptions le plus généralement
admises touchant le contenu de l’œuvre, les plus importantes sont celles
que toute action humaine est sensée et que la qualité de l’acte manifeste
celle de la personne.
Le normal.
• Le groupe de référence.
85
3.1.3. MAXIMES REMARQUABLES.
86
On admet que l’acte manifeste la qualité de la personne et que 1 un
s’explique par l’autre et réciproquement. Ainsi, lorsque l’auteur d’une fiction
littéraire veut faire exécuter tel acte par tel personnage, il doit veiller à
respecter cette relation et donc définir la qualité du personnage en vue
de rendre ses agissements vraisemblables.
88
Q — ... les yeux du jeune homme s’étaient habitués à la nuit.
D’ailleurs, les yeux des Gascons ont, à ce qu’on assure, comme
ceux des chats, la propriété de voir pendant la nuit.
Id., ibid., XI.
Conclusions.
89
3.2. LA MOTIVATION RÉALISTE (suite).
• Inversion du rapport.
90
3.2.2. INTRODUCTIONS.
92
3.2.4. TENDANCE AU DISCOURS.
nous
j — [il est dans les extrêmes plaisirs un aiguillon qui
de profite r de ce monde
éveille, comme pour nous avertir
sais quoi
rapide ; dans les grandes douleurs, au contraire, je ne
larmes cher¬
de pesant nous endort : des yeux fatigués par les Providence
chent naturellement à se fermer, (et la bonté de la
Je cédai
se fait ainsi remarquer jusque dans nos infortunes.)]
sommei l que goûtent quelque fois les
malgré moi à ce lourd
misérables.
Conclusions.
95
Description de texte.
96
Notre texte est tiré d'un ensemble de six pages (pp. 10-15 de
l’édition
son héros.Garnier) dans lesquelles le narrateur expose ce que fut la vie de
La motivation y fonctionne à deux niveaux.
L’ensemble de ces pages est d’abord une vaste motivation, par la
caractérisation de l’agent principal, le cousin Pons, des événements du
roman, et plus spécialement des vingt-cinq premiers chapitres (sur 77),
où est raconté le parasitisme de Pons. Pendant qu’il concevait son roman,
Balzac avait songé à l’intituler Le Parasite : obligé de satisfaire deux passions
également coûteuses, l’amour des collections d’art et l’amour de la bonne
chère, Pons alimente l’une en lui consacrant tous ses revenus et l’autre en
vivant de la table d’autrui. C’est donc l’action conjuguée de cette double
détermination qui explique son parasitisme, sa déchéance progressive et,
jointe à un dernier trait de caractère, le manque de hauteur dans l’esprit
et dans les manières (ici 1. 14-16), son néant final.
C’est ensuite l’occasion pour Balzac de conduire une de ces études
qu’il affectionne du destin d’un homme. Les étapes en sont les suivantes :
1) 1810-16. Sous l’Empire ; l’artiste cajolé.
2) 1816-26. Période transitoire ; la décadence de l’artiste.
3) 1826-36. L’automne pluvieux ; le pique-assiette.
4) 1836-43. L’hiver au nez rouge, aux joues hâves ; le parasite.
Notre texte correspond à cette dernière étape. Nous y avons signalé
les segments narratifs primaires (entre //), les motivations qui font appel
à des lois générales (entre [ ]), à la caractérisation de l’agent ou au groupe
de référence (entre ( >).
Pourquoi Pons était-il reçu ? C’est que sous l’Empire, on eut bien
plus que de nos jours un culte pour les gens célèbres, peut-être à cause de
leur petit nombre et de leur peu de prétentions politiques. On devenait poète,
écrivain et musicien à si peu de frais !
97
Pourquoi est-il maintenant mal supporté ? C’est que les familles en
question toutes sans respect pour les arts, en adoration devant les résultats,
ne prisaient, etc.
Balzac a le goût des cas et des situations singulières, goût qu’il révèle
lui-même quand il remarque, un peu plus haut, on n’a jamais peint les
exigences de la gueule..., ou quand il s’exclame : Qui peindra jamais les
malheurs de la timidité! Il est à la recherche d’un de ces personnages
typés dont se repaît son imagination. Dès lors, dans le fonctionnement du
texte, la motivation réaliste est seconde par rapport à l’invention des fictions,
et l’on aurait tort de concevoir ici quelque mépris pour l’homme, personnage
de comédie, jouet de sa nature et de son milieu ; lue trop naïvement,
l’œuvre de Balzac risquerait d’entretenir avec le réel une ambiguïté perni¬
cieuse.
En revanche, la puissance des fictions est telle qu’à son tour le fait
particulier paraît appeler une réflexion morale, et que la motivation paraît
vérifiée par les faits. Tout se passe dès lors comme s’il s’agissait d’établir
sur des faits la vérité des lois morales, et comme si le récit donnait à penser.
L’intérêt de Balzac serait donc d’abord dans la force de ses ima¬
ginations.
98
3.3. CONNIVENCE
ET FONCTIONNEMENT
SILENCIEUX.
99
B — (Sa marâtre) la chargea des plus viles occupations de la
maison : c’était elle qui nettoyait la vaisselle et les montées 1,
qui frottait la chambre de madame et celle de mesdemoiselles
ses filles ; elle couchait tout au haut de la maison, dans un
grenier, sur une méchante paillasse, pendant que ses sœurs
étaient dans des chambres parquetées, où elles avaient des
lits des plus à la mode, et des miroirs où elles se voyaient depuis
les pieds jusqu’à la tête. La pauvre fille souffrait tout avec
patience et n’osait s’en plaindre à son père, qui l’aurait gron¬
dée, [parce que sa femme le gouvernait entièrement.]
Lorsqu’elle avait fait son ouvrage, elle s’allait mettre au coin
de la cheminée, et s’asseoir dans les cendres, ce qui faisait qu’on
l’appelait communément dans le logis Cucendron. La cadette,
[qui n’était pas si malhonnête que son aînée,] l’appelait Cen-
drillon.
Ch. Perrault, Cendrillon, §§ 2 et 3 (1691-1694).
100
3.3.2. CONVENTIONS DE GENRE ET CONNIVENCE.
mblable une
Les conventions de genre retirent au domaine du vraise
et qui peut
part de l’œuvre plus ou moins importante selon les genres
accept ée comme telle
aller jusqu’à la totalité. C’est la part de la fiction
songe à trouver invrai¬
par l’auditoire qui entre dans le jeu. Personne ne
tire toujours des pires
semblable que le héros d’un roman d’aventure se
liblement le coupable,
situations, que le fameux détective démasque infail
même côté, etc. Cela
que dans les batailles les tués soient toujours du
de tragédie parler en vers
n’est pas plus surprenant que de voir les héros
airs lyriques.
et ceux de l’opéra se dire leur amour sur des
101
Nos deux textes C et D, qui relèvent tous deux du genre fantastique,
présentent des objets parfaitement invraisemblables tout en fonctionnant
sans motivation réaliste. Simplement, celui de M. Aymé, pour lui permettre
d’entrer dans le jeu, donne à son lecteur la règle à laquelle obéit ce monde
nouveau : le temps ne passe et les gens ne vieillissent que dans la mesure où
il se passe quelque chose : à partir de là tout est logique.
102
deux berges du fleuve ; puis je crus qu’un être ou qu’une
force invisible l’attirait doucement au fond de l’eau et la sou¬
levait ensuite pour la laisser retomber. J’étais ballotté comme
au milieu d’une tempête ; j’entendis des bruits autour de moi ;
je me dressai d’un bond ; l’eau brillait. Tout était calme.
Je compris que j’avais les nerfs un peu ébranlés et je résolus
de m’en aller. Je tirai sur ma chaîne ; le canot, se mit en mou¬
vement, puis je sentis une résistance, je tirai plus fort, l’ancre
ne vint pas : elle avait accroché quelque chose au fond de
l’eau et je ne pouvais la soulever ; je recommençai à tirer, mais
inutilement. Alors, avec mes avirons, je fis tourner mon
bateau et je le portai en amont pour changer la position de
l’ancre. Ce fut en vain, elle tenait toujours ; je fus pris de
colère et je secouai la chaîne rageusement. Rien ne remua. Je
m’assis découragé et je me mis à réfléchir sur ma position.
Je ne pouvais songer à casser cette chaîne ni à la séparer de
l’embarcation, car elle était énorme et rivée à l’avant dans un
morceau de bois plus gros que mon bras ; mais comme le temps
demeurait fort beau, je pensai que je ne tarderais point sans
doute à rencontrer quelque pêcheur qui viendrait à mon
secours. Ma mésaventure m’avait calmé ; je m’assis et je pus
enfin fumer ma pipe. Je possédais une bouteille de rhum, j’en
bus deux ou trois verres, et ma situation me fit rire. Il faisait
très chaud, de sorte qu’à la rigueur je pouvais, sans grand
mal, passer la nuit à la belle étoile.
me raidis
et jerassis dans un effort désespéré. L’ancre tint bon. Je
me épuisé.
104
3.3.4. LA LOI DU PLAISIR.
Ces raisons peuvent bien être vraies en théorie, elles sont balayées
en pratique par une raison supérieure, qui est celle du plaisir de l’auditoire.
105
a aimé Le Cid, ainsi qu’il le souligne lui-même
Le public
dans son examen de le
de Corneil 1660 :
Conclusions.
106
3-4- CONNIVENCE ET MISE A NU
DE LA FICTION.
108
D’une manière générale, un récit se donne pour ce qu’il est chaque
fois qu’apparaît le narrateur, soit en lui-même, soit par la présence du
monde auquel il appartient. Les deux conditions sont réalisées dans les
passages en italiques de notre texte C où l’Hôtesse apparaît comme telle
dans son hôtellerie, et donc son histoire comme une histoire racontée par
quelqu’un à quelqu’un dans un certain lieu.
Comme nous l’avons indiqué pour la manifestation de l’auteur, le
narrateur peut intervenir en tant que tel dans son récit. On peut imaginer
ici un dialogue où l’Hôtesse prierait Mme de La Pommeraye de faire
la paix avec le marquis des Arcis, le temps qu’elle vaque elle-même à
quelque occupation urgente.
109
La pièce de Corneille utilise de façon exemplaire le procédé du
théâtre dans le théâtre. Notre texte D révèle le procédé. Le magicien a mis
sous les yeux de Pridamant deux tranches de la vie de Clindor ; mais, dans
le deuxième, Clindor était un acteur de théâtre en train de jouer un per¬
sonnage qui n’était pas le sien. Et Pridamant, qui ne le savait pas, s’y est
laissé prendre, tout comme le spectateur sans doute car dans cette deuxième
action les héros ne sont jamais désignés sous leur nom de scène.
Corneille manifeste ainsi la puissance d’illusion de la fiction théâ¬
trale. D’autant mieux qu’ainsi détrompé on est tenté de reporter l’illusion
sur le niveau précédent et de croire à Pridamant et à son magicien en se
disant que ceux-là au moins sont réels, ou du moins plus réels. La mani¬
festation des deux niveaux de la fiction les rend seulement plus illusoires.
Conclusions.
Descriptions de textes.
110
Julien était parti pour Verrières. Dans cette route rapide, il
ne put écrire à Mathilde comme il en avait le projet, sa main
ne formait sur le papier que des traits illisibles. /
Il arriva à Verrières un dimanche matin. / Il entra chez l’armu¬
rier du pays, / qui l’accabla de compliments sur sa récente
fortune. C’était la nouvelle du pays. /
Julien eut beaucoup de peine à lui faire comprendre qu’il vou¬
lait une paire de pistolets. / L’armurier sur sa demande char¬
gea les pistolets.
Les trois coups sonnaient ; c’est un signal bien connu dans les
villages de France, et qui, après les diverses sonneries de la
matinée, annonce le commencement immédiat de la messe. /
Julien entra dans l’église neuve de Verrières. [Toutes les fenê¬
tres hautes de l’édifice étaient voilées avec des rideaux cramoi¬
sis.] / Julien se trouva à quelques pas derrière le banc de
Mme de Rénal. / Il lui sembla [qu’elle priait avec ferveur]. /
La vue de [cette femme qui l’avait tant aimé] fit trembler le
bras de Julien d’une telle façon, / qu’il ne put d’abord exécu¬
ter son dessein. (Je ne le puis), se disait-il à lui:même ; (physi¬
quement, je ne le puis.) /
En ce moment, le jeune clerc qui servait la messe sonna pour
Yélévation. / Mme de Rénal baissa la tête / qui un instant
se trouva [presque entièrement cachée par les plis de son
châle]. / Julien ne la reconnaissait plus aussi bien ; il tira sur
elle un coup de pistolet / et la manqua ; / il tira un second
coup, / elle tomba. /
Stendhal, Le Rouge et le noir, II, 35 (1830).
Dès lors, ce qui est remarquable, c’est le silence du texte sur les
motifs du meurtre. Le segment qui précède l’exécution, le premier de
notre texte, représente comment la lecture de la lettre est ressentie : le
premier paragraphe est à la fois une parole-pensée avec (au moins à l’état
de traces) en discours indirect libre et un regard avec ; le second est une
parole avec en discours direct. Ce ne sont que deux constats : la lettre est
bien de Mme de Rénal et la réaction de M. de La Mole est justifiée.
Tout s’enchaîne ensuite sans que l’exécution du meurtrev soit jamais mise
en question. Tout se passe comme si Julien ne s’était jamais formulé de
raisons, mais obéissait à un réflexe de sa nature. Exactement ce qu’on
appelle un crime passionnel. L’exécution pourtant a pris du temps, le
voyage surtout. Certains traits du récit montrent qu’il est nerveusement
tendu ; la multiplication des paragraphes et l’interruption du récit, puisque
la fin de notre texte est aussi la fin d’un chapitre, donnent à l’événement
quelque chose d’abrupt. L’enchaînement du texte, au début du chapitre
suivant, confirme cette lecture : Julien resta immobile, il ne voyait plus.
Quand il revint un peu à lui, il aperçut tous les fidèles... C’est comme un
réveil où les objets recommencent à exister largement.
112
(Une troupe théâtrale et son directeur voient arriver sur la
scène où ils répètent, six personnages qui prétendent leur faire
jouer leur propre vie et qui la jouent devant eux pour qu’ils
en apprennent les rôles. Ils ont vécu un drame terrible. Ici,
trois de ces personnages, le père, la mère et sa fille, qui n’est
que la belle-fille du père ; le père et la belle-fille se connais¬
sent à peine. La belle-fille se prostituait pour faire vivre sa mère
et les enfants plus jeunes. Or, un jour, l’homme qu’elle a reçu
n’était autre que son beau-père, et tandis qu’il la tenait dans ses
bras, la mère est arrivée et les a surpris. La belle-fille s’adresse
au directeur de la troupe.)
113
Par rapport au spectateur, nous avons ici trois niveaux d illusion.
Le monde de la troupe et de son directeur ; ils sont sur la scène en
tant qu’hommes du métier. Le monde de l’illusion théâtrale, lorsque les
personnages jouent leur drame. Le monde de ce drame passé et qui n existe
plus que ressuscité par la fiction. Or, contrairement à ce qu on pourrait
croire, dans toute la pièce et particulièrement ici, l’intensité dramatique
et le degré de présence de ces mondes est inverse à leur degré de réalité :
en tant qu’ils se prennent au jeu, les personnages ont plus de relief que les
acteurs qui les doublent, et le maximum d’intens ité est atteint lorsqu’ils
« revivent » leur drame, comme ici dans le cri de la mère, qui est le
sommet dramatique du passage.
114
Quatrième partie
CONSTRUCTIONS
4-i. RÉUNION ET ENCHAINEMENT.
LA NOUVELLE-CADRE.
d’admirer la
Le sultan des Indes ne pouvait s’empêcher
, qui lui fournis¬
mémoire prodigieuse de la sultane son épousé
sait toutes
toires différe nuits de nouveaux divertissements par tant d’his¬
lesntes.
amuse¬
Mille et une nuits s’étaient écoulées dans ces innocents
même beauco up aide à diminu er les pré¬
ments ; elles avaient son
ventions fâcheuses du sultan contre la fidélité des femmes ;
117
esprit était adouci ; il était convaincu du mérite et de la grande
sagesse de Schéhérazade ; il se souvenait du courage avec lequel
elle s’était exposée volontairement à devenir son épouse, sans
appréhender la mort à laquelle elle savait qu’elle était destinée
le lendemain, comme les autres qui l’avaient précédée.
Ces considérations et les autres belles qualités qu’il connaissait
en elle le portèrent enfin à lui faire grâce...
118
4.1.2. INTRODUCTION A PRIORI ET PROJET CLOS.
Conclusions.
Description de texte.
Parmi les douze filles qui étaient enchaînées six à six par le
milieu du corps, il y en avait une dont l’air et la figure
étaient si peu conformes à sa condition qu’en tout autre état
je l’eusse prise pour une personne du premier rang. Sa tristesse
et la saleté de son linge et de ses habits l’enlaidissaient si
peu que sa vue m’inspira du respect et de la pitié. Elle
tâchait néanmoins de se tourner, autant que sa chaîne pouvait
le permettre, pour dérober son visage aux yeux des spectateurs.
L’effort qu’elle faisait pour se cacher était si naturel, qu’il
paraissait venir d’un sentiment de modestie.
(...) Mais figurez-vous ma pauvre maîtresse enchaînée par le
milieu du corps, assise sur quelques poignées de paille, la
tête appuyée languissamment sur un côté de la voiture, le
121
faisaient
visage pâle et mouillé d’un ruisseau de larmes qui se
un passage au travers de ses paupières, quoiqu’elle^ eut conti¬
eu la
nuellement les yeux fermés. Elle n’avait pas mêmebruit de
curiosité de les ouvrir lorsqu’elle avait entendu le
ses gardes, qui craignaient d’être attaques. Son linge était
e de
sale et dérangé, ses mains délicates exposées à l’injur
l’air ; enfin, tout ce composé charmant, cette figure capable
de ramener l’univers à l’idolâtrie, paraissait dans un désordre
et un abattement inexprimables.
122
4-2. RÉUNION ET ENCHAINEMENT.
LE HÉROS. LE VOYAGE.
JUXTAPOSITIONS.
123
Le récit de ces Voyages comprend une suite de sept aventures mari¬
times, comme celle de l’île du cheval marin, celle de l’île de la vallée aux
diamants, etc.
• Création et unification.
• Séries discontinues.
124
• Textes suivis.
126
Conclusions.
Description de texte.
0 Structure.
Depuis les fléaux naturels jusqu’à tous ceux qu’entraîne la folie des
hommes, le conte de Candide entasse les malheurs pour constituer une
sorte de dossier noir du pessimisme. Les diverses pièces du dossier sont
rattachées au héros principal, soit qu’il fasse lui-même ses propres expé¬
riences, soit qu’il s’informe de celles des autres. Le récit de ses aventures
se prolonge ainsi de celui de divers personnages secondaires, dont l’histoire
vient s’encadrer dans l’intrigue principale. C’est le cas de l’histoire de Cuné-
gonde au chapitre 8, de celle de la vieille aux chapitres 11 et 12, et, plus
brièvement, de l’histoire du baron, frère de Cunégonde, du nègre de Surinam,
de Pâquette, des six rois déchus, du baron à nouveau, enfin de Pangloss.
127
♦ Caractérisation et détermination.
Pour relier et enchaîner un tel entassement de faits, le héros est
sommairement mais fortement caractérisé au début de l’ouvrage, par un trait
de nature et par une double détermination, à la fois interne et externe,
puisqu’elle s’incarne dans les deux personnages de Pangloss et de Cuné-
gonde. Pour lui, c’était un jeune garçon à qui la nature avait donné les
mœurs les plus douces. Sa physionomie annonçait son âme. Il avait le
jugement droit, avec l’esprit le plus simple ; c’est, je crois, pour cette
raison qu’on le nommait Candide. C’est aussi la raison pour laquelle il
adopta d’abord sans réserve les thèses optimistes de son précepteur Pan¬
gloss, oracle de la maison dont le petit Candide écoutait (les) leçons avec
toute la bonne foi de son âge et de son caractère. Quant à la fille du château
où il était élevé, Mlle Cunégonde, âgée de dix-sept ans, haute en
couleurs, fraîche, grasse, appétissante, il la trouvait extrêmement belle
quoiqu’il ne prît jamais la hardiesse de le lui dire.
128
reprendre Mlle Cunégonde » . Ainsi, riche et sûr de lui, Candide est transporté
d’amour au point d’écrire le nom de Cunégonde sur les arbres. A partir
du chapitre 19, son chemin tend vers Venise où il doit retrouver Cunégonde
et, quand il apprend qu’elle est esclave en Turquie, il n’est plus occupé
que d’aller trouver sa chère Cunégonde à Constantinople (chap. 26).
• Effets secondaires.
jamais de juger de tout ce qu’il lui arrive d’après ses croyances. Deux
recruteurs sont-ils en train d’abuser de sa naïveté en se jouant de lui,
assurant que les hommes ne sont faits que pour se secourir les uns les
autres. Vous avez raison, dit Candide : c’est ce que M. Pangloss m’a tou¬
jours dit, et je vois bien que tout est au mieux (chap. 2). Ainsi, le thème
est toujours présent et le texte peut s’organiser comme une démonstration.
Car, avec son jugement droit et malgré son préjugé qui reparaît dès que les
choses paraissent s’arranger pour lui : M8 Pangloss me l’avait bien dit que
tout est au mieux en ce monde (chap. 3), Candide tire les leçons de l’adver¬
sité. Il conçoit ses premiers doutes à la fausse nouvelle de la mort de
Cunégonde (chap. 4) ; au chapitre 13, il commence à affirmer de nouvelles
convictions : C’est bien dommage, disait Candide , que le sage Pangloss ait
choses
été pendu contre la coutume dans un auto-da-fé ; il nous dirait des
le mal moral qui couvrent la terre
admirables sur le mal physique et sur
et la mer, et je me sentirais assez de force pour lui faire respectueusement
nègre,
quelques objections. Au chapitre 19, après la rencontre de 1 esclave
sa conversion est achevée : O Pangloss ! s’écria Candide, tu n avais pas deviné
à ton
cette abomination ; c’en est fait, il faudra qu à la fin je renonce
Hélas, dit
optimisme. — Qu’est-ce qu’ optimisme , disait Cacambo ? —
est mal.
Candide, c’est la rage de soutenir que tout est bien quand on
129
• Sagesse et juste milieu. Candide, Pangloss et Martin.
130
4.3. COMPOSITIONS.
4.3.1. FINALITÉ.
là?
Robinson (regardant la tenture ) — Qu’est-ce que vous avez
131
4.3.2. HARMONIE.
« J’aichamps.
des passé comme une fleur : j’ai séché comme l’herbe
« Pourquoi la lumière a-t-elle été donnée à un misé¬
rable,
cœur ? et» la vie à ceux qui sont dans l’amerture du
Chateaubriand, Atala (1801).
— L’aveugle, s’écria-t-elle.
Et Emma se mit à rire, d’un rire atroce,
croyant voir la face hideuse du misérable,frénétiqu e, désespéré,
qui se dressait dans
les ténèbres éternelles comme un épouvantement.
132
« Il souffla bien fort ce jour-là,
Et le jupon court s’envola ! »
Une convulsion la rabattit sur le matelas. Tous s’approchèrent.
Elle n’existait plus.
Flaubert, Madame Bovary, III, 8 (1856).
4.3.3. DESSINS.
Conclusions.
134
Descriptions de textes.
(...)
dire...— ? Mais, enfin, monsieur, fit Emma, vous aviez à me
—
— Justin
Montons ! cria l’apothicaire, qui s’impatientait.
!
Et il la suivit.
La clef tourna dans la serrure, et elle alla droit vers
la troi¬
sième tablette, tant son souvenir la guidait bien, saisit
le bocal
bleu, en arracha le bouchon, y fourra sa main, et, la retirant
pleine d une poudre blanche, elle se mit à manger à même.
— Arrêtez ! s’écria-t-il en se jetant sur elle.
— Tais-toi ! on viendrait...
Il se désespérait, voulait appeler.
— N’en dis rien, tout retomberait sur ton maître!
Puis elle s’en retourna subitement apaisée, et presque dans la
sérénité d’un devoir accompli.
138
- Pourquoi ne voulez-vous donc pas que je songe aux miens ?
lui dit la dame. — C’est, dit le philosophe, parce qu’il n’y
faut pas songer, et que, tant de grandes dames ayant été si
infortunées, il vous sied mal de vous désespérer. Songez à
Hécube, songez à Niobé. — Ah ! dit la dame, si j’avais vécu
de leur temps, ou de celui de tant de belles princesses, et si
pour les consoler vous leur aviez conté mes malheurs, pensez-
vous qu’elles eussent écouté ?
Le lendemain, le philosophe perdit son fils unique, et fut sur
le point d’en mourir de douleur. La dame fit dresser une liste
de tous les rois qui avaient perdu leurs enfants, et la porta au
philosophe ; il la lut, la trouva fort exacte, et n’en pleura
pas moins. Trois mois après ils se revirent et furent étonnés
de se retrouver d’une humeur très gaie. Ils firent ériger une
belle statue au Temps, avec cette inscription : A CELUI
QUI CONSOLE.
Voltaire (1756).
139
PRINCIPAUX TEXTES OBSERVÉS.
(les textes précédés d’un * font l’objet d’une description)
140
FRANCE A. Abeille. 101
(GALLAND) Les Mille et Une Nuits 86-117-118
—
Les Voyages de Sindbad le Marin. 123
GAUTIER TH. Le Capitaine Fracasse.
GIDE 107
68
La Symphonie pastorale, 10 mai.
HEMINGWAY Paradis perdu. 56-57
HOMERE Iliade III, 355-382.
HUGO Notre-Dame de Paris II, 6. 65-88
99
— Les Misérables, II, 1, 10.
ISAIE 55-83
32
11, 6-11.
LAFAYETTE Mme de La Princesse de Clèves, Pléiade, pp. 1124-
1125. 56
* LA
* _ FONTAINE Fables VII, 9 - Le Coche et la Mouche. 49-50
Fables VII, 10 - La Laitière et le Pot au
lait. 18
119
LE SAGE Le Diable boiteux.
MALRAUX L’Espoir I, I, II, 3. 67
42
—
L’Espoir II, I, I, 2. 65
MARIVAUX Le Jeu de l’amour et du hasard, I, 7.
MAUPASSANT Sur l’eau 10 avril. 43-44
102-103-104
_
Sur l’eau, 10 avril.
_ Le Gueux.
- - Le Petit fût.
92
MICHELET Histoire de la révolution VII, 8. 92
OSTROSVSKI La Fille sans dot. 131
16
PERRAULT Ch. Cendrillon.
100
* PIRANDELLO Six personnages en quête d’auteur. 113
POULET dom Histoire de l’église I, p. 352. 11-16
PROUST Du côté de chez Swann I, 1. 68
PRUDHOMME Sully Les Solitudes. Le Cygne.
70-71
PREVOST abbé Histoire du chevalier Des Grieux et de
Manon Lescaut I, Poche, pp. 19-26, 20-21, 120-
* _ 121-122, 212-213.
Histoire du chevalier Des Grieux et de
Manon Lescaut II, Poche, pp. 121-122, 212-213
RIMBAUD Poésies XVIII - Roman.
37
* _ 20
Illuminations XXII - Aube.
ROBBE-GRILLET Les Gommes I, 6.
—
La Jalousie, Minuit, pp. 13 et 14. 59
32
RONSARD Amours de Marie II, 4 - « Comme on voit
* _
sur la branche... » ; « Je vous envoie des
bouquet... » - Pièce retranchée un
Amours de Marie. 33
ROUSSEAU J.-J. La Nouvelle Héloïse 4, lettre 17. 40
SARRAUTE N. Martereau, Poche, p. 99.
SCARRON 28
Le roman comique, Pléiade, pp. 522-523. 93
STENDHAL Le Rouge et le Noir I, 1. 125-126
* _ 62
* _ Le Rouge et le Noir I, 6.
Le Rouge et le Noir II, 35. 111
—
La Chartreuse de Parme III. 58-59
* TOLSTOÏ Anna Karénine VII, 21. 78
* VOLTAIRE Les Deux Consolés. 138-139
* _ Candide. 127
141
LECTURES COMPLÉMENTAIRES.
1.1.
* E. Benveniste. Problèmes de linguistique générale, V, 19. Gallimard (1966).
Renée Balibar.
Littérature Le passé composé fictif dans « L’Etranger » d’Albert Camus,
7 (1972).
U. Weinrich. Le Temps. Ed. du Seuil, 1973.
1.2.
* Roman Jakobson. Essais de linguistique générale, coll. Points, Ed. de Minuit
(1963), pp. 176-196.
Oswald Ducrot. Dire et ne pas dire. Principes de sémantique linguistique,
Hermann (1972).
1.3.
* Gérard Genette. Figures III, coll. Poétique, Seuil (1972), pp. 225-238.
Jacques Favier. Les jeux de la temporalité en science-fiction, Littérature 8 (1972).
Edouard Dujardin. Le monologue intérieur, Messein (1931).
Fitch.
Bryan T. des
Archives Narrateur
Lettres et narration
modernes dans « L’Etranger » d’Albert Camus,
(1960) ; 1968.
du « monologue intérieur » : lecture d’une théorie,
5 (1972). A propos
Danièle Sallenave.
Littérature
Jean Ricardou. Problèmes du nouveau roman, coll. Tel Quel, Seuil (1967).
1.4.
* E. Benveniste. Problèmes de linguistique générale, V, 18, 20, 21, Gallimard
(1966).
1.5.
* Roman Jakobson. Essais de linguistique générale, coll. Points, éd. de Minuit
(1963), p. 177.
Id. Questions de poétique, coll. Poétique, Seuil (1973), pp. 205-208.
* Gérard Genette. Figures III, coll. Poétique, Seuil (1972), pp. 122-144 et
238-266.
Marie-Julie Hanoulle. Quelques manifestations du discours dans « Trois
Contes », Poétique 9 (1972).
Jean Rousset. Comment insérer le présent dans le récit : l’exemple de Marivaux,
Littérature 5 (1972).
Marguerite Lips. Le style indirect libre, Payot (1926).
Tsvetan Todorov. « Les registres de la parole ». Journal de Psychologie, 64
(1967), 3, pp. 265-278.
2.1.
* Gérard Genette. Figures III, coll. Poétique, Seuil (1972), pp. 206-223.
Boris Uspenski. Poétika Kompozicii, Moscou (1970). Point de vue : le problème
de la dénomination, pp. 31-40 et 46, in Poétique 9 (1972).
Wayne C. Booth. Distance et point de vue, Poétique 4 (1970).
Françoise van Rossum-Guyon. Point de vue ou perspective narrative, Poéti¬
que 4 (1970).
Raymonde Debray-Genette. Du mode narratif dans les « Trois Contes »,
142
Littérature 2 (1971).
143
Table des matières
Avant-propos D
2. 1. Foyers et regards 55
2. 2. Structures de la représentation 65
1.1. L’énonciation hi
TROISIÈME PARTIE :s tor
ILL iqONS
USI
ue
81
1^
3. 1. La motivation réaliste 83
3. 2. La motivation réaliste (suite) 90
3. 3. Connivence et fonctionnement silencieux 99
3. 4. Connivence et mise à nu de la fiction 107
64 05 7598 9
0 1
date due
N • LITTÉRATURE FRANÇAISE
Michel PATILLO
Né en 1932, agrégé *
docteur de IIIe cycle,)
2ST • LINGUISTIQUE FRANÇAISE préparatoires du lycée fi •» 'J O
qui s'efforcent de mo,
de la littérature française en tenant compte
de l'apport des sciences humaines.
N • LINGUISTIQUE GÉNÉRALE
\ Q t r\ h -
• LANGUES ET LITTÉRATURES
N ANCIENNES
• PHILOSOPHIE
• PSYCHOLOGIE, SOCIOLOGIE
• HISTOIRE
• GÉOGRAPHIE
N • SCIENCES ÉCONOMIQUES
ET POLITIQUES
N • DROIT ET ADMINISTRATION