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Le masochisme érotique
féminin
Auteur(s) : Jacqueline Schaeffer
Mots clés : masochisme – masochisme (érotique féminin) –
masochisme érogène primaire – masochisme féminin

Le masochisme a toujours eu et a toujours mauvaise presse. Il en


émane un parfum de scandale. Comment peut-on jouir et souffrir
dans le même lieu, à l’intérieur d’une même instance psychique, à
savoir le moi ?

Freud l’a d’abord considéré comme une « énigme », un danger


pour notre vie psychique, dans la mesure où il met en échec,
paralyse le « tout puissant principe de plaisir », qui régit notre
fonctionnement mental.

Le masochisme érogène primaire


Après le tournant théorique de 1920, dans « Le problème
économique du masochisme », Freud va non seulement accepter
le paradoxe du masochisme mais en faire la pierre angulaire de sa
dernière dualité pulsionnelle. Il théorise un « masochisme érogène
primaire », qu’il considère comme une défense vitale contre la
destructivité interne, une première intrication de la pulsion de
mort par la pulsion de vie. Il est, dit Freud, « cette partie de la
pulsion de mort qui ne participe pas au déplacement vers
l’extérieur (sous la forme de pulsion de destruction, d’emprise, de
volonté de puissance), mais demeure dans l’organisme où elle se

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trouve liée libidinalement par la coexcitation sexuelle ». Pour


Benno Rosenberg, cette liaison se confond avec l’intrication
pulsionnelle primaire, toute intrication pulsionnelle en tant que
telle est donc d’essence masochique. Les augmentations de
tension d’excitation qui sont de l’ordre de la douleur et du
déplaisir, peuvent alors être vécues en même temps comme
plaisir, ou, davantage encore, comme jouissance.

Ce qui importe : non seulement cette dernière théorie destitue le


règne du principe de plaisir, mais elle modifie la nature de la
pulsion sexuelle et la définition de la liaison. La liaison avait
d’abord comme sens la maîtrise de l’énergie libre, celle de la
libido qui, disait Freud, « n’en fait qu’à sa tête », « est
inéducable », d’où l’angoisse qu’elle suscite. Le moi avait pour
tâche de la maîtriser, de la dompter. Après 1920, la libido, alliée à
l’autoconservation, au lieu d’en être antagoniste, n’est plus définie
que comme une force de liaison, opposée à la force de déliaison de
la pulsion de mort. Son énergie libre est devenue énergie
conservatrice. Il s’agit alors de l’intrication de la pulsion de vie,
unificatrice et des pulsions de destruction. La libido a perdu son
caractère effracteur.

Pour théoriser le féminin et le « refus du féminin », j’estime


néanmoins essentiel de raccorder à la théorie de l’intrication
pulsionnelle une première définition de libido comme « poussée
constante », faisant violence au moi mais pouvant aussi l’enrichir.
Il s’agit de retrouver la « sorcière métapsychologique », pour
rejoindre ce que Freud désignait comme son « obsession de
l’économique ».

La poussée constante libidinale, inévitable, oblige au masochisme.


Le masochisme érogène primaire rend possible au petit humain de

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supporter la détresse primaire. Un nourrisson, soumis à la libido,


n’a pas de fuite possible. Il ne peut la lier qu’en érotisant la
souffrance ou en s’abandonnant à une « passivité plaisante ».
Dans son livre remarquable, tout récemment publié, et dans une
intervention, Marilia Aisenstein précise que si des conditions
surexcitantes ont empêché la passivité plaisante de s’établir, il ne
s’inscrit dans le psychisme que le manque de cette expérience. Un
manque qui infiltrera, je suppose, toute relation sexuelle de
l’adulte. Elle cite Michel Fain, qui définit cet état de « masochisme
inachevé ».

Le masochisme érogène primaire permet d’investir érotiquement


la tension douloureuse, de soutenir l’insatisfaction d’une pulsion
par nature impossible à satisfaire, de survivre, et de résister aux
traumatismes et aux barbaries les plus inhumaines. Il sert de point
de fixation et de butée à la désorganisation mortifère. Il ne
s’appréhende en clinique que par défaut.

Ce masochisme érogène primaire participe aux premières assises


de la construction du moi, à l’instar du narcissisme primaire. Il
rend possible la coexcitation libidinale, sans laquelle « rien
d’important n’adviendrait peut-être dans l’organisme sans avoir à
fournir sa composante à l’excitation de la pulsion sexuelle ». Il
serait un premier noyau masochique du moi, garant de sa survie,
qui nécessite la fonction d’un objet suffisamment fiable. Il est
alors gardien de la vie, et de la vie psychique.

Le masochisme dit « féminin »


Bien que Freud précise que ce masochisme féminin est
« l’expression de l’être de la femme », il ne l’envisage que sous un

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aspect pervers chez certains hommes qui utilisent, pour obtenir


un plaisir orgastique, certains fantasmes concernant le
féminin érotique et maternel, et les souffrances qui peuvent lui
être infligées.

Freud en décline divers fantasmes : « subir le coït ou accoucher »,


« être castré », « être bâillonné, attaché, battu douloureusement,
fouetté, forcé à une obéissance inconditionnelle », comme un
enfant maltraité, « être souillé, abaissé », donc « fécalisé ». Ces
fantasmes qui sont érotisés chez ces hommes peuvent
s’apparenter au masochisme moral de certaines femmes.

On peut en inférer : soit que la théorie sexuelle adulte de la


femme « châtrée » est nécessaire à la constitution sexuelle
défensive de certains hommes, soit que le couple phallique-châtré,
renforcé par le modèle anal du contrôle, ne cède pas aisément
place au couple masculin-féminin.

Le masochisme moral
Selon Freud, le masochisme moral est dû à la resexualisation des
relations objectales oedipiennes, à la resexualisation du surmoi
qui, chez une femme, ne parvient jamais à être tout à fait
impersonnalisé, du fait de sa dépendance à l’objet oedipien. Ce
masochisme est donc très souvent à l’œuvre chez les femmes.

La mise en avant d’un sentiment de culpabilité n’est que le


masque d’une réalité de jouissance masochique de la punition.
Benno Rosenberg a particulièrement différencié le masochisme
moral du moi, du sadisme du surmoi.

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Le masochisme érotique féminin


Le masochisme, « gardien du secret », selon Karl Abraham,
participe à la mise en forme du dedans, de l’intériorité, du retour
sur soi. Il est pour la cure un indispensable auxiliaire. Le phallique
investit le visible et l’extérieur, le masochisme investit l’intérieur,
l’intériorisation.

Le masochisme érotique féminin est l’agent moteur de ce que j’ai


conceptualisé en son temps sous le terme de « travail de
féminin ». Cette notion (qui avait suscité l’intérêt de Benno
Rosenberg), trouve toute sa pertinence dans le débat actuel.

Ce masochisme demande à être bien différencié du masochisme


féminin de Freud, et du masochisme pervers. Et ce n’est pas un
hasard si on retrouve un lien chez Freud entre « l’énigme du
féminin » et cette autre énigme : « les mystérieuses tendances
masochistes ».

J’ai sollicité, à propos de la transmission de mère à fille, le conte


de La Belle au Bois dormant. Si la mère, messagère de la
castration, selon Freud, dit au petit garçon qui fonce, tout pénis
en avant : « Fais bien attention, sinon il va t’arriver des ennuis ! »,
à une fille elle dira : « Attends, tu verras, un jour ton Prince
viendra ! ».

La mère est donc messagère de l’attente, et du masochisme


érotique féminin, gardien de la jouissance. Ce qui consiste à
mettre l’érogénéité du vagin d’une petite fille à l’abri de la
couverture d’un « refoulement primaire du vagin ». Son corps
développera ainsi des capacités érotiques diffuses.

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Un garçon, destiné à une sexualité de conquête, c’est-à-dire à la


pénétration, s’organisera le plus souvent, bien appuyé sur son
analité et son angoisse de castration, dans l’activité et la maîtrise
de l’attente. Une fille, elle, est vouée à l’attente : elle attend
d’abord un pénis, puis ses seins, ses « règles », la première fois,
puis tous les mois, elle attend la pénétration, puis un enfant, puis
l’accouchement, puis le sevrage, etc. Elle n’en finit pas d’attendre.

La coexcitation libidinale est pour une fille une nécessité


permanente de réappropriation de son corps, dont les successives
modifications sexuelles féminines, prémisses de la fonction de
procréation, sont liées au féminin maternel, donc au danger de
confusion avec le corps maternel. Cette relation de la même à la
même constitue l’essence du narcissisme féminin.

Freud perçoit, en 1919, le caractère érotique œdipien du désir


masochiste de la fille dans son article « Un enfant est battu » qu’il
décline longuement. C’est la culpabilité de ce désir œdipien qui
amène une fille à l’exprimer, sur le mode régressif, dans le
deuxième temps particulièrement refoulé du fantasme : « Papa
bats-moi ! Papa, viole-moi ! ». Mais rapidement Freud renonce à
cette formulation de l’œdipe féminin, et revient à sa théorie
phallique. En 1926, il écrit que c’est son clitoris que bat la petite
fille. Avoir sa fille Anna sur son divan, avec ses fantasmes de
fustigation, n’était pas pour faciliter les choses !

Il faudra donc un retournement de l’activité à la passivité active,


un infléchissement vers le père du mouvement masochique, pour
faire de ce masochisme nécessaire à la différenciation du corps
maternel, un masochisme érotique secondaire qui conduira une
fille au désir d’être pénétrée fantasmatiquement par le pénis du
père.

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Toute attente est une excitation douloureuse. Les attentes d’une


femme étant pour la plupart liées à des expériences non
maîtrisables de pertes réelles de parties d’elle-même ou de ses
objets – qu’elle ne peut symboliser, comme le garçon, en angoisse
de perte d’un organe, jamais perdu dans la réalité – ainsi qu’à des
bouleversements de son économie narcissique, il lui faut donc
l’ancrage d’un solide masochisme érogène primaire. Celui-ci peut
lui permettre de supporter le plaisir-douleur de la jouissance
sexuelle, ainsi que tous les événements de sa vie de femme et de
mère.

Une femme attend, avant tout, l’amour. Winnicott affirme que la


pire des choses qui puisse arriver à un petit d’homme n’est pas
tant la déficience de l’environnement que l’espoir suscité et
toujours déçu. Il existe un lien fort probable entre l’attente déçue
et la dépression chez la femme.

« L’amour est l’histoire de la vie des femmes, c’est un épisode


dans la vie des hommes », écrit Mme de Staël.

Le masochisme érotique féminin


dans la relation sexuelle
Freud n’a nié ni la blessure du moi ni la blessure sexuelle. Il a
théorisé des événements tels que le fantasme de mutilation du
sexe féminin, le sentiment de préjudice, l’envie du pénis, la
blessure de la défloration, tous sous l’angle de l’angoisse et du
complexe de castration. Mais il n’a pas envisagé le masochisme
érotique féminin, dans l’expérience de la relation sexuelle et dans
la jouissance.

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Au premier changement d’objet de l’investissement de l’attente et


du masochisme, opéré sur le père, va pouvoir succéder un
deuxième changement d’objet, vers celui que j’ai nommé « l’amant
de jouissance ». C’est ainsi que la Belle peut véritablement être
réveillée par le Prince, dans le plaisir-douleur de la jouissance
féminine. S’il advient…

Je m’éloigne donc de la conception d’un féminin assimilé à


« châtré » ou à « infantile », pour définir un masochisme érotique
féminin, génital, qui contribue à la relation sexuelle de jouissance
d’un couple masculin et féminin adultes.

Il s’agit d’un masochisme érotique psychique, ni pervers ni agi. Il


est renforcé par le masochisme érogène primaire, et contre-
investit le masochisme moral. Au sein de la déliaison, il assure
paradoxalement une liaison nécessaire à la cohésion du moi pour
qu’il puisse se défaire et admettre de très fortes quantités
d’excitation non liées, c’est-à-dire libidinales.

Ce masochisme érotique, chez une femme, est soumis à l’objet


sexuel. Il n’est nullement un appel à un sadisme agi, dans une
relation sado-masochiste, ni un rituel préliminaire, mais une
capacité d’ouverture et d’abandon à de fortes quantités libidinales
et à la possession par l’objet sexuel. Il fait dire une femme
amoureuse à son amant : « Emmène-moi où tu veux aller, je
t’appartiens, possède-moi, vainc-moi, n’aie pas peur ! » Ce qui
suppose une profonde confiance en un objet, fiable et investi d’un
sentiment amoureux. Le véritable but du masochisme érotique,
c’est la jouissance sexuelle, et il en est donc le gardien.

Le moi d’une femme peut ainsi, grâce à l’abandon à un amant de


jouissance s’approprier un sexe féminin érotique, qui pouvait

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jusque-là, selon Lou Andréas Salomé, être « loué à l’anus ». C’est


ce qui lie définitivement, via la coexcitation libidinale, irriguée par
le fantasme originaire d’effraction séductrice de l’enfant par
l’adulte, la révélation du vagin et la jouissance féminine au
fantasme masochique d’être l’objet d’une effraction, d’une
possession, d’un abus de pouvoir par l’amant. Et ceci se reproduit
lors de chaque relation sexuelle de jouissance car, dans
l’intervalle, le refoulement primaire du vagin réitère ses effets, du
fait de la culpabilité de ce masochisme érotique héritier des désirs
incestueux infantiles.

Je cite Marguerite Duras :

« Il y a une sorte de gloire du subissement chez la femme, mais


que beaucoup de femmes nient. C’est le règne du subissement. Je
regrette que beaucoup de femmes ignorent tout de ça… Je crois
que là, il y a une amplitude de la féminité qui est atteinte, encore
de nos jours, par le truchement de cette violence-là subie de
l’homme par la femme. Je crois que s’il n’y a pas ça, il y a une
sexualité infirme chez les femmes, incomplète. C’est comme si on
portait son propre moyen-âge, comme si on portait en soi sa
barbarie première, intacte, qui était ensablée avec le temps,
depuis des siècles »

Tout ce qui est insupportable pour le moi est précisément ce qui


peut contribuer à la jouissance sexuelle : à savoir l’effraction,
l’abus de pouvoir, la perte du contrôle, l’effacement des limites, la
possession, la soumission, bref, la « défaite », dans toute la
polysémie du terme. La défaite féminine c’est la puissance de la
femme.

Dans la passivité il s’agit de récupérer la part nourricière de la

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pulsion sexuelle. La passivité de la femme devient réceptivité


d’accueil à l’effraction. Freud estime, à juste titre, qu’il faut
beaucoup d’activité pour intégrer cette passivité-là.

Ce masochisme érotique permet à la femme de jouir de


l’effraction, sans désorganisation traumatique. Il ne s’agit alors ni
d’attaquer la pulsion, ni de la réprimer, ni de la contrôler mais de
la prendre en soi. Le moi, dans certaines expériences, à conditions
qu’elles soient limitées, peut se défaire, et admettre l’entrée en lui
de grandes quantités d’excitations non liées, c’est à dire
libidinales. Cela lui permet de s’abandonner à des expériences de
possession, d’extase, de perte et d’effacement des limites, de
passivité, et donc de jouissance sexuelle.

Ceci à condition que le moi ait la capacité de se ressaisir,


d’inhiber ces trop grandes quantités d’excitations pour éviter le
débordement traumatique, et de retrouver une économie de
croisière. S’il y parvient, le moi élargit alors considérablement son
territoire de représentations affectées.

Une nouvelle définition du


féminin
Le féminin peut se définir en différentiel avec la féminité. La
féminité, c’est le corps, l’apparence, le leurre, la mascarade, les
charmants accessoires de la séduction. Le féminin, c’est la chair,
c’est l’intérieur, invisible et inquiétant, porteur des « angoisses de
féminin » pour les deux sexes.

Je m’autorise aujourd’hui une nouvelle définition du féminin, dans


son investissement et son intégration sur le plan psychique. C’est

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une définition en termes métapsychologiques, celle que Freud a


laissé en suspens.

J’ai désigné par « travail du féminin », le processus dynamique qui


vise à traiter le trop d’excitations, qui permet d’élaborer les
angoisses d’intrusion prégénitales en angoisses de pénétration
génitale et d’érotiser l’effraction de la pénétration. Il se situe en-
deçà ou au-delà du principe de plaisir, dans le couplage douleur-
jouissance.

Le féminin serait alors défini comme la résultante, sur un plan


économique, de ce travail du féminin, engendré par le
masochisme érotique féminin, lui-même renforcé par le
masochisme érogène primaire.

Il serait la mise à l’épreuve de la capacité du moi d’une femme à


admettre et à se laisser pénétrer par de grandes quantités
d’excitations non liées, libidinales, sans désorganisation
traumatique. Le moi aurait alors la capacité de s’en nourrir, s’en
trouver enrichi et amplifié, ainsi s’accroître et aller vers plus de
maturité. Ce peut également être le cas du féminin d’un homme, si
son moi a pu intégrer cette capacité, par le lâchage de ses
défenses anales et phalliques.

Plus les excitations non liées sont fortes, comme dans la


jouissance sexuelle, plus elles mettent en œuvre l’exigence d’un
travail de psychisation pulsionnelle et de représentations
affectées. Plus ce travail du féminin s’intensifie, et plus le moi de
la femme s’enrichit et s’accroit en retour. C’est donc une réponse
du moi qui aboutit à sa mutation, plus résistante.

Il semble donc que ce masochisme érotique féminin vienne bien

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confirmer, dans sa composante économique, l’importance de ce


« témoin et vestige » de la première intrication pulsionnelle qu’est
le masochisme érogène primaire, avec sa vertu de résistance et de
« résilience ».

Certaines femmes actuelles, celles qui ont vécu la libération de


leur corps et la maîtrise de la procréation, savent et ont la
capacité de ressentir que leurs « angoisses de féminin » ne
peuvent s’apaiser ni se résoudre de manière satisfaisante par une
réalisation de type « phallique ». Plus exactement, le fait de ne pas
être désirées ou de ne plus l’être par un homme les renvoie à un
douloureux éprouvé d’absence de sexe, ou de sexe féminin nié, et
ravive leur blessure de petite fille forcée à s’organiser sur un
mode phallique face à l’épreuve de la perception de la différence
des sexes. C’est là que se situe leur « angoisse de castration ».

L’autre, qu’on soit homme ou femme, c’est toujours le féminin. Au-


delà du phallique, donc, le féminin.

Masculin et féminin entre


activité et passivité
Auteur(s) : Bianca Lechevalier
Mots clés : activité-passivité – angoisse (d’anéantissement) –
bisexualité (psychique) – envie du pénis – jeu – Klein (Melanie) –
masculin-féminin – masochisme féminin – roc biologique – roc
d’origine – sexualité (féminine) – sexualité (masculine)

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Je voudrais commencer cette conférence en partant de la patience


du féminin active dans la passivité et permettant pour les deux
sexes l’élaboration de la pensée symbolique à la place de l’agi
pulsionnel immédiat.

Je vais vous raconter un conte du bassin méditerranéen


concernant une femme emmurée que l’on peut voir représentée
par une fontaine dans un lieu-dit Thérapia sur les rives du
Bosphore. Seuls émergent la tête et les seins de la femme
emmurée. Celle-ci avait été accusée par ses sœurs envieuses
d’avoir mis au monde un chien et un chat. Elle avait pourtant
annoncé à son mari le sultan, avant son départ en guerre, qu’elle
lui donnerait un fils aussi beau que le soleil et une fille aussi belle
que la lune. Elle avait été emmurée en punition de cette annonce
mensongère. Par la suite, ses enfants sauvés par un berger et
nourris du lait qui coulait de la fontaine apprirent à l’âge adulte
son identité et la réhabilitèrent. D’autres versions existent de ce
conte, qui sont des variantes de la thématique de Grisélidis dans
l’ancien italien de Boccace.

Marguerite Yourcenar, dans les Nouvelles Orientales a repris ce


thème d’un conte albanais. Il s’agit de l’histoire de la tour érigée
pour se protéger de l’envahisseur turc. Une femme y est emmurée
et permet ainsi à la tour de ne pas s’écrouler sous les assauts.
Seuls les seins de cette femme restent à l’extérieur et permettent
l’allaitement de ses petits. Nous pouvons entendre dans ces
histoires la patience du féminin, féminin caché, actif dans la
passivité, réhabilité et réparé par les enfants issus de sa fécondité.
Dans l’allégorie de M. Yourcenar, la tour phallique narcissique
n’acquiert ses qualités masculines de force contre la destructivité
que grâce à la présence vivante du féminin à l’intérieur. Sinon,

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elle risquerait de s’effondrer sous les assauts de la pulsionnalité


destructrice. Nous avions, lors d’un colloque à Cerisy-la-Salle en
2000, sur les contes et la psychanalyse, discuté de cette
thématique avec N. Belmont, Directeur à l’École des Hautes
Études. Nous relevions la mise en scène dans la bisexualité des
contes, du masculin et du féminin entre l’activité et la passivité. N.
Belmont faisait remarquer que, à l’inverse de ce que dit Freud en
1932 dans « La féminité » (dans « Les Nouvelles Conférences »),
on pourrait ajouter « il est quelquefois nécessaire de déployer une
grande passivité pour atteindre des buts actifs ». (Freud parlait de
grande activité pour des buts passifs).

Dans les récits des contes, la patience dans le silence comme dans
la longue gestation portant l’enfant qui peut mûrir comme un fruit
caché, témoigne de l’élaboration qui maîtrise le temps, file et tisse
le tissu de l’identité qui se transforme. Les héros, en enfilant une
chemise offerte et tissée par une femme deviennent des « preux »
dans les contes. Le tissu devient un lien, une liaison s’opposant à
la discontinuité. On parle de dentelle de la muqueuse utérine. La
patience du féminin chez Schéhérazade, dans les Contes de Mille
et Une Nuits, a joué aussi son rôle pour faire advenir le féminin du
sultan. Vous connaissez l’histoire de ce sultan dont le frère avait
été trompé par sa femme. Devenu vengeur, il tuait ses maîtresses
à la fin de la nuit passée avec elles. Schéhérazade expérimenta
l’intérêt de ses contes avec sa sœur Dinrazade à qui elle les
racontait en premier. L’écoute du couple homosexuel par le sultan
la sauva de la mort en faisant différer la suite du récit à la nuit
suivante. Le nom du frère du sultan est « Zaman » qui signifie le
temps en arabe, et en hébreu : « Zman ; un ajouté à mille devient
l’Éternité. Le rôle de Schéhérazade pour y accéder a été un rôle
actif dans la passivité de l’attente.

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Ainsi ont pu être tissés les liens des images fantasmatiques des
récits qui se déroulent dans les contes mettant en scène la
bisexualité des personnages, comme dans un tapis aux coloris
multiples et chatoyants. Ce rôle reprend et modifie avec le temps
les motifs qui se répètent. Ce travail de liaison dans l’attente
patiente du féminin en alliance avec le masculin entre activité et
passivité est une lutte par la narration. C’est une lutte en alliance
avec le temps contre la mort, la destructivité pulsionnelle qui
cherche la satisfaction immédiate chez le personnage représenté
par le sultan. Celui-ci, dans son écoute pourra se laisser aller à sa
passivité et s’identifier à la fois aux deux femmes et aux héros des
récits dans leur bisexualité où activité et passivité ne sont pas
l’apanage exclusif d’un sexe particulier.

Christian David en 1992, dans son livre « La bisexualité


psychique » , reprend en le commentant un passage des Mille et
Une Nuits dans la traduction du Dr Mardrus. Il concerne l’épopée
de Kamaralzaman (notez à nouveau Zaman : temps), fils de roi
d’une beauté parfaite et de la princesse Boudour, d’une indicible
beauté. Tous les deux se refusaient à l’autre sexe, mais furent
conquis ultérieurement dans leur ressemblance et leur différence.
La question, posée par un génie, est de savoir qui l’emportera sur
l’autre. Dans les péripéties de leurs aventures, à travers les
travestissements et les modalités de désir qu’ils suscitent, ils
assument des rôles masculins et féminins, dans des positions
actives ou passives qui jouent des scènes dans des variantes et des
compositions multiples, dans l’homo- et l’hétérosexualité et dans
les fluctuations entre investissements narcissiques et modalités
différentes de leurs relations à l’objet.

C. David remarque que « si les jeunes gens ont pu passer de leur

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isolement auto-érotique à la poursuite délibérée de l’objet,


aussitôt perdu que trouvé, c’est bien grâce à la fulgurance du
désir de l’autre, mais c’est aussi parce que cette altérité est l’objet
d’une reconnaissance, d’une réminiscence… parce que la muette
et occulte présence interne et intériorisée de l’autre se trouve de
nouveau extériorisée, et dans une large mesure protégée. »
Bisexualité psychique, activité et passivité entrent en jeu dans les
compositions multiples de ce théâtre intérieur. Il faut reconnaître
également l’intrication des niveaux entre la génitalité et l’oralité
et l’analité. Dans ce jeu nous devons aussi penser à la lutte contre
la perte dépressive à tous les niveaux, œdipien, narcissique, et
aussi les angoisses d’anéantissement suscitées par la dépendance
passive au début de la vie et dans les circonstances traumatiques
où l’impensable fait effraction dans la passivité.

Je voudrais, dans ce sujet si vaste concernant masculin et féminin,


activité et passivité aborder :

1. Quelques points de l’approche freudienne et leurs


développements par des acteurs contemporains

2. La position féminine commune aux deux sexes de M. Klein.


Celle-ci n’a pas introduit toutefois la notion de patience qui a été
envisagée ultérieurement par Bion.

3. La passivité du début de la vie et les angoisses


d’anéantissement de la dépression primaire et des situations
traumatiques, ce qui permettra de reprendre avec des exemples
cliniques la lutte contre cette dépression à l’aide de défenses
phalliques actives évitant l’hémorragie narcissique de la passivité.

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I. Freud
« Une approche positive de la féminité fait défaut à Freud », écrit
C. David dans « La bisexualité psychique »

En 1923, Freud écrit dans « L’organisation génitale infantile »


qu’au stade de l’organisation prégénitale sadique anale, il n’est
pas encore question de masculin et de féminin ; l’opposition entre
actif et passif est celle qui domine. Il l’a déjà écrit dans « Les trois
essais » en 1905. Suivant celui de l’organisation génitale infantile,
il y a bien un masculin mais pas de féminin ; l’opposition s’énonce
ici : organe génital masculin ou châtré. Le féminin n’apparaît pour
lui qu’à la puberté avec la connaissance du vagin.

En 1915, dans « Les Pulsions et leurs destins » dans


« Métapsychologie », il écrivait de même que l’opposition activité-
passivité ne se fond que tardivement avec masculin et féminin.
Mais il indiquait aussi que « la soudure de l’activité avec la
masculinité, celle de la passivité avec la féminité existent bien
comme fait biologique mais que ce fait n’est en aucune manière
aussi régulièrement impératif et exclusif que nous sommes enclins
à l’admettre. »

Enfin, en 1919, dans « Un enfant est battu » (in Névrose, Psychose


et Perversion, Puf, 1973) apparaît le lien entre masochisme et
passivité dans le phantasme masochique œdipien.

Mais dans « La Féminité » (1932, dans les Nouvelles


Conférences), Freud, en posant les problèmes de la bisexualité,
s’élève contre les notions conventionnelles associant actif et viril
d’une part et féminité et passif d’autre part. Il écrit : « peut-être
pourrait-on dire que la féminité se caractérise au sens

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psychologique par un penchant vers des buts passifs, ce qui n’est


pas la même chose que de parler de passivité ? En effet, il est
quelquefois nécessaire de déployer une grande activité pour
atteindre des buts passifs. »

Avec le conte de M. Yourcenar, j’avais montré que l’on pouvait


renverser ce constat. Freud évoque l’organisation sociale de son
époque privilégiant les situations passives pour les femmes. Le
refoulement de l’agressivité et la formation de tendances
destructives dirigées vers le dedans contribuent ainsi à un
masochisme essentiellement féminin. Nous pourrions dire que les
mêmes préjugés sociaux idéalisent pour l’homme les positions
actives, dévalorisant la passivité. Pourtant, la petite fille comme le
garçon traversent de la même façon les premiers stades du
développement. Les impulsions orales ou annales peuvent revêtir
les mêmes caractères agressifs pour les deux sexes.

En 1931, dans « De la sexualité féminine », Freud avait écrit que


les buts sexuels de la fille vis-à-vis de sa mère sont de nature
active et passive. Freud y montre comment, dès le début de la vie,
l’enfant tend dans l’identification à faire activement à son objet ce
qu’il a vécu passivement de sa part. Cela peut être structurant
pour la maîtrise du monde extérieur et interne. Cela peut
conduire, comme l’a développé Freud après 1920, à la répétition
d’expériences traumatiques vécues dans la passivité. Freud a
évoqué dans « Au-delà du Principe de Plaisir » l’activité du jeu et
son rôle antitraumatique avec l’expérience de la bobine : jeu actif
pour lutter contre la passivité de la séparation subie. Winnicott,
vous le savez, a merveilleusement développé ce que Freud a
introduit concernant le jeu et l’activité-passivité, avec toute sa
théorisation de l’espace du jeu entre play et game, et le

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développement de l’activité créatrice entre soi et non soi.

En tant que psychanalyste d’enfants dans l’expérience du jeu lors


des thérapies, j’ai pu m’émerveiller de toute l’activité
identificatoire créative de l’enfant permise par l’attention
réceptrice du thérapeute qui reçoit passivement les injonctions
pulsionnelles et favorise dans la patience, l’activité de perception
et de figuration identificatoire dans une création commune avec
l’enfant, ou à trois avec la mère si elle participe aux séances. Dans
les cures d’adultes, ces mêmes mouvements ludiques sont en
action dans la régression et la co-création de fantasmes. Je reviens
au Freud de 1931 montrant comment téter se substituera à être
nourri, l’enfant devenant sujet qui pourra dans le jeu renverser les
rôles. Il évoque ainsi le jeu de la poupée. Il écrit que c’est l’activité
de la féminité qui se manifeste ici.

Souvent les motions pulsionnelles obscures concernant la mère


dans l’activité et la passivité n’apparaissent, dit Freud, dans
l’analyse que « sous forme de transferts sur l’objet père ultérieur,
ce passage s’étant accompli avec l’aide des tendances passives ».
Il n’existe, dit-il, qu’une seule libido qui connaît des buts actifs ou
passifs.

Pendant la phase phallique, Freud détache une motion passive


concernant les sensations génitales ressenties lors de la toilette.
Les garçons comme les filles peuvent accuser la mère de
séduction. Dans les fantasmes ultérieurs le père apparaîtra pour la
fille comme le séducteur sexuel.

Dans la phase phallique se réalisent pour les deux sexes


d’intenses motions de désir actives concernant la mère qui
prennent toute leur intensité avec l’impulsion donnée par une

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nouvelle naissance.

La frustration des tendances actives chez la fille va aider à


l’établissement des tendances passives avant le début de
l’établissement de la relation œdipienne positive avec le père. Si
celles-ci sont elles-mêmes trop frustrées, la sexualité de la petite
fille peut s’en trouver inhibée.

Chez le garçon, Freud montre comment l’Œdipe inversé conduit à


la position passive homosexuelle dans le but de recevoir
analement le pénis du père ou un enfant de lui.

La peur de castration et la blessure narcissique liée à la


soumission passive peut entraîner l’organisation de défenses qui
pourront empêcher de recevoir et introjecter le pénis paternel et
accéder à des identifications masculines structurantes. Cette
problématique est illustrée avec le cas de l’Homme aux Loups
(1918) et l’Homme aux Rats.

En 1937, dans « Analyse terminée et analyse interminable »,


Freud souligne avec l’envie du pénis chez la femme et le refus de
la passivité chez l’homme vis-à-vis d’autres hommes, « quelque
chose de commun aux deux sexes : le refus de la féminité qui
renvoie à la peur de la castration. Il parle de roc biologique, roc
d’origine. J. Schaeffer (1997, 1999) différencie un roc dépassable
défensif contre l’angoisse de pénétration génitale d’un vagin
pénétré et à pénétrer, roc qui cède et permet d’accéder à la
jouissance et un roc indépassable, fermeture au pulsionnel qui
conduit à la frigidité dans les deux sexes.

Enfin, pour F. Guignard (1999)) le féminin refusé ne concerne pas


seulement le fantasme de castration mais également celui de

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retour in utero, désir de temporalité et de la mort.

En ce qui concerne la problématique anale, Freud insiste (en


1931, « Sur la sexualité féminine », in : La vie sexuelle, Paris, Puf)
sur les éclats de rage provoqués par les lavements effectués par
leur mère chez les femmes ayant une forte fixation à celle-ci. La
frustration des tendances actives favorise la primauté des
tendances passives. Jean Favreau (communication orale dans son
séminaire, 1976) soulignait le rôle de ces lavements dans
l’organisation des défenses contre une passivité terrifiante chez
les hommes qui ne pouvaient de ce fait accéder à une position
passive structurante par rapport au père et pouvoir ainsi recevoir
et introjecter sa force phallique. Plus que l’angoisse de castration,
l’angoisse sous-jacente concernait la terreur d’être vidé de
l’intérieur par un personnage tout puissant anéantissant toute
identité dans la passivité. Il citait des passages à l’acte suicidaires
figurant la scène comme se jeter sous un camion (la Bête humaine
de Zola).

Maria Torok (1964) dans « La signification de l’“envie du pénis”


chez la femme » montre comment peut s’organiser le refoulement
précoce du vagin chez la fillette du fait du contrôle omnipotent de
sa mère sur l’intérieur de son corps dans la relation anale. Il peut
en résulter une inhibition de la masturbation, de l’orgasme et de
l’activité fantasmatique qui les accompagnent.

M. Torok montre comment l’alternative de l’ « envie du pénis-


appendice » l’identification à l’avoir, à une mère vide, dangereuse
empêche le désir du pénis complément qui figure, dit-elle, « le
droit d’agir et de devenir » et l’accès au frère. Chez le garçon, elle
montre comment l’identification au « frère porteur du phallus »
permet le dégagement de la Mère anale et de la maîtrise

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maternelle. En cas d’échec dans ses élaborations identificatoires,


il se trouve dans le leurre illusoire comme la fille, de la possession
ou non possession du pénis-chose ». Un camouflage en résulte
derrière la fascination active et passive au moyen du fétiche qui
suscite l’envie et ainsi confirme sa valeur. Il continue ainsi
d’ignorer son désir redoutable de prendre la place de la Mère
dans la Scène primitive anale. « La femme envieuse et coupable
sera un support tout désigné à la projection de ce désir ». Elle
sera cette « partie féminine non assumée de l’homme que par tous
les moyens il aura à maîtriser et à contrôler. » Il peut en être
réduit à préférer « une femme mutilée, dépendante et envieuse à
une partenaire épanouie dans la plénitude de sa créativité ».
Toute la théorie de M. Torok, à la différence de Freud pour qui le
vagin n’est découvert qu’à la puberté, repose sur la perception
précoce du vagin chez la fille par ses sensations et l’exploration de
son sexe de fille. Elle reprend ainsi les théories de K. Horney,
Jones et M. Klein

II. Melanie Klein


Melanie Klein (1927) trouve que le « complexe de féminité des
hommes semble tellement plus obscur que celui des femmes ! À
l’aide de son expérience d’analyste de jeunes enfants, elle montre
dans « La psychanalyse des enfants » le parallélisme des premiers
stades du développement sexuel, masculin et féminin. Enfin, elle
commence son chapitre concernant la phase féminine commune
aux deux sexes en écrivant qu’elle « est caractérisée par une
fixation orale de succion au pénis du père ». J. Kristeva (2000)
écrit que chez Mélanie Klein « le célèbre sein n’est jamais tout
seul : le pénis lui est toujours fantasmatiquement associé » (p.

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190).

Il faut se garder d’une vision trop schématique de sa pensée. La


transmission orale qui m’en a été faite par mes superviseurs J.
Gammill et S. Resnik, qui ont été eux-mêmes supervisés par M.
Klein la montre à l’œuvre donnant une grande importance à la
relation au père, et dès le début de la vie. C’est l’importance de
l’angoisse et de ses modifications au cours du développement
dans les relations primitives aux objets qui la conduira à décrire
« les premiers stades du conflit œdipien ». Dès 1928, elle montre
comment la frustration orale éprouvée de la part de la mère
amène « à se détourner et à retenir comme objet de satisfaction le
pénis du père ». Ceci est pour elle commun pour la fille comme
pour le garçon. Avant d’être un objet de satisfaction, le pénis du
père a représenté un tiers qui empêche la satisfaction orale et qui
lui-même est comblé de nourritures.

1) Mélanie Klein développe la


conception d’un Œdipe précoce chez la
fille et chez le garçon
Pour la fille : La frustration orale par rapport au sein et ses
exigences de succion, la font se détourner de la mère pour se
tourner vers le père possesseur du pénis dont bénéficie sa mère. Il
en résulte le souhait « d’incorporation du pénis paternel sur un
mode de satisfaction orale plutôt que possession d’un pénis ayant
la valeur d’un attribut viril. » (1932, Psychanalyse des enfants). La
convoitise orale s’accompagne déjà de pulsions orales passives et
actives. L’Œdipe féminin s’installe donc directement sous l’action
d’éléments féminins, et dans une dynamique de réceptivité qui
articule passivité et activité. La haine de la mère est issue des

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frustrations du sevrage et de cette problématique œdipienne


précoce. À cette période du développement, le pénis acquiert des
qualités fantasmatiques de vertus magiques d’assouvissement
oral, un pouvoir prodigieux. Toutes les zones érogènes sont
excitées, dont les zones génitales, par la frustration orale. Dans
une évolution où la position féminine domine, la fille admirera le
père, et lui sera soumise, sauf en cas de haine du fait de la
frustration. Si les premières relations avec la mère ont été très
conflictuelles, et si l’agressivité du nourrisson a été projetée sur le
sein, cette image fantasmatique du « mauvais sein » sera déplacée
sur le pénis. Il peut s’en suivre une introjection de mauvaise
image de pénis paternel et des relations ultérieures difficiles avec
les hommes. La recherche de partenaires sadiques peut en être un
exemple.

M. Klein considère le masochisme féminin lié à la crainte des


objets dangereux introjectés et en particulier le pénis paternel
fantasmatique recherché dans des objets extérieurs. Enfin du fait,
de l’ambivalence la petite fille puis la femme combattra dans sa
vie sexuelle sa crainte du « mauvais pénis » introjecté, par la
recherche continue de « bonnes » expériences sexuelles. Dans les
fantasmes concernant la scène primitive, les projections sadiques
transforment les relations sexuelles des parents en situations
pleines de danger de destruction réciproque, ou la part des
fonctions excrémentielles est très importante. Au lieu de la
réceptivité maternelle alliant passivité et activité, permettant
d’accueillir un bon pénis, nous assistons à un combat bec, dents,
excréments, et ongles réunis. Les images des contes en découlent
(ogre, sorcière, loup, etc.) La pensée a un pouvoir tout-puissant
dans un contexte où l’analité comme tout l’intérieur secret du
corps a une si grande importance pour la fille.

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Mais contrairement au garçon la fille doit privilégier la patience et


l’attente pour être rassurée sur l’intégrité de l’intérieur de son
corps. Elle doute de son aptitude à pouvoir porter des enfants.
Elle ne peut aplatir le temps dans l’illusion. J. Chasseguet (1986)
écrit : « Mais c’est surtout l’essence même du développement de
la fille qui me paraît dominée par l’attente » (p.84). M. Klein dans
le développement de son œuvre liera la perception de
l’inconscient à celle de l’intérieur du corps et de ses contenus,
avec les bons aspects et les aspects terrifiants dans l’ombre.
L’analyste ne doit-il pas avoir la même attitude d’attente et
d’ajournement de ses interprétations comme la petite fille
incertaine de ses capacités. Plutôt qu’une compréhension brillante
et rapide, il s’agit d’un long travail de tissage qui favorise le lien
et l’émergence féconde de sens.

Pour le garçon, les premiers stades de développement pour M.


Klein, sont parallèles. La fixation orale de succion au pénis du
père née de la frustration venue du sein maternel peut être à
l’origine d’une vraie homosexualité (comme le souligna Freud
dans « Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci », 1910), à
différencier des positions défensives par rapport à l’angoisse de
castration. Le garçon n’atteindra plus tard une position
hétérosexuelle définitive, qu’à condition d’avoir vécu et dépassé la
phase féminine primaire. Quand l’homme a pu grâce à cette phase
féminine primaire réussir une bonne identification maternelle, il
peut dans sa vie sexuelle tenir compte du désir féminin de sa
compagne. Il peut aboutir à des réalisations artistiques
sublimatoires, enfin plus directement s’identifier à ses enfants
dans leurs aspirations orales. Mais au début de son
développement, le garçon dans ses fantasmes est en rivalité avec
sa mère pour s’emparer du pénis paternel contenu à l’intérieur du

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corps maternel. Il craint alors en imagination de terribles


représailles. Comme pour la fille, s’effectue chez le garçon un
déplacement des conflits précoces avec la mère, empreints de
sadisme et de la haine qui la concerne sur le pénis paternel. Ses
angoisses et la poussée des pulsions génitales lui feront changer
sa position de féminine en position hétérosexuelle. L’angoisse de
castration sera alors dominante.

Importance de la pulsion épistémophilique. La phase féminine


commune est basée sur cette curiosité qui concerne l’intérieur du
corps maternel qui contient le pénis paternel, les enfants, les
richesses des fèces (à ce stade où les autres composantes de la
prégénitalité sont développées et où les frustrations anales
renforcent les frustrations orales). Dans le complexe de féminité
des filles comme des garçons il y a le désir frustré d’un organe
particulier ( de conception, parturition, fontaines de lait, etc.) qui
sont convoités comme organes de réceptivité et de libéralité,
depuis le temps où la position libidinale était orale. Le désir
féminin lié au désir de connaissance, favorise la constitution d’une
intériorité psychique chez les deux sexes, et permet leur
rencontre. Le désir féminin direct et sublimé a un rôle capital
pour la créativité et une pensée au contact de l’émotion. Freud n’a
pas établi de différenciation précise entre la curiosité et le besoin
de connaissance. Il en parle à propos des théories sexuelles
infantiles, et les préoccupations autour de l’âge de 3 ans
concernant la venue d’un nouvel enfant. Ce sont ces
préoccupations qui pour lui conduisent l’enfant à développer son
besoin de comprendre les relations sexuelles de ses parents et de
développer des fantasmes concernant la scène primitive.

Pour Mélanie Klein les pulsions épistémophiliques sont beaucoup

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plus précoces et sont en relation avec les fantasmes concernant


l’intérieur du corps de sa mère et ses contenus, dès la période où
pour elle la mère est la totalité du monde de l’enfant Cette
curiosité va s’étendre sur le corps propre de l’enfant et va jouer
un rôle capital pour la formation du monde interne et la création
(développement ultérieur par Bion des processus de pensée à
l’intérieur d’un espace psychique et de sa théorie sur la
Connaissance – K).

Le désir féminin entremêle l’activité et la passivité. La passivité


peut entraîner des angoisses de mort que les post-kleiniens ont
exploré.

2) Connaissance précoce inconsciente


du vagin
Pour M. Klein, comme pour H. Deutsch, l’achèvement du
développement génital de la fille se fait « dans l’heureux
déplacement de la libido orale sur la libido génitale ». La
découverte de l’absence de pénis ne fait que renforcer dans ce
sens. La fille retient le pénis paternel comme un objet de
satisfaction d’abord oral ensuite génital, dans sa réceptivité. Elle
conclue à la connaissance inconsciente du vagin et à l’éveil
précoce de ses sensations internes, contrairement à Freud pour
qui la révélation se fait à la puberté. Le refoulement sera
ultérieur.

La phase phallique n’est pas déniée par M. Klein, avec les


remaniements identificatoires et le rôle de l’introjection du pénis
paternel grâce à sa réceptivité active. Il s’agit d’un processus
graduel, avec un temps agressif, dans sa rage face à la scène

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primitive et au complexe de castration, ou elle veut dérober le


pénis paternel. La poussée œdipienne s’installe sous l’action des
éléments pulsionnels féminins et masculins. Ce n’est que dans un
deuxième temps avec l’élaboration de la position dépressive, au
début de la période de latence, qu’elle choisira ou non sa position
féminine et sa réceptivité corporelle et psychique. Le désir
phallique serait défensif pour M. Klein.

Chez le garçon le renoncement œdipien à la mère n’est pas


seulement lié à l’angoisse de castration mais aussi à l’amour pour
son père, pour le conserver comme un bon objet interne qui lui
permettra de s’identifier à lui dans sa force active, apportant
plaisir et fécondité à la mère.

3) La position dépressive va jouer un


rôle nodal dans l’évolution des
conceptions de Melanir Klein et
l’élaboration de la position féminine
Les auteurs post-kleiniens comme Meltzer et Gammill nous
montrent que la position dépressive n’est pas un stade précis de
développement. Il s’agit d’une constellation d’angoisses, de
défenses, de pulsions, avec passage d’une attitude à une autre,
parfois avant six mois, et se remaniant lors des crises de
développement : crise œdipienne génitale de trois à six ans,
puberté et son deuil œdipien et deuil de ne pas être les deux sexes
à la fois, deuil narcissique des idéaux. A chaque fois la position
féminine est remise sur le tapis. Il s’agit d’un patient tissage dans
l’attente et la réceptivité féminine, qui permet d’intégrer la lente
maturation de la sexualité, des acquisitions dans les limites de la

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réalité. Toutes les crises de la vie, dans la vie amoureuse, la


procréation, la ménopause, feront osciller entre des attitudes de
déni et projection, et l’acceptation de la douleur, la
reconnaissance de la douleur, et des torts ou dégâts vis à vis
d’autrui, impliquant réparation. Chaque fois la position féminine
dans sa composante et corporelle dans les changements de l’âge,
et psychique avec les couleurs renouvelées des affects acceptée
ou refusée pourra être source de créativité, et ceci face à la
maladie et à l’approche de la mort.

J. Chasseguet dit que « la forme développée du complexe d’Œdipe


et son intégration doivent présenter des points communs avec le
dépassement de la position dépressive. »

Je voudrais insister sur le fait que masculin et féminin, activité et


passivité n’est pas une donnée organisée de façon figée, mais qu’il
s’agit des modalités conflictuelles concernant les forces
pulsionnelles. Il y a une incomplétude de chacun des sexes, une
attente, un manque de l’autre. La bisexualité psychique s’organise
de ce fait dans les relations intra- et intersubjectives, dans les
investissements et les fantasmes qui circulent. Comme je l’ai dit
au début de la patience du féminin à l’intérieur de la position
active phallique peut protéger de l’effondrement. L’activité
attentive est partie prenante de la réceptivité féminine, de son
pouvoir de séduction, de l’accouchement, l’allaitement. Chez
l’homme, la pénétration, l’éjaculation, la paternité impliquent dans
la complexité qui s’y joue la conflictualité intrapsychique de la
bisexualité. C’est l’intégration de cette bisexualité qui permet la
réussite dans les processus créateurs sublimés par les deux sexes.

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Passivité et détresse primaire


La lutte contre la passivité par les défenses phalliques protège de
l’effondrement dépressif dans la passivité et le débordement
émotionnel.

Des angoisses d’anéantissement datant du début de la vie risquent


d’être mobilisées dans la passivité. Ces angoisses ont été décrites
notamment par F. Tustin. Elles se caractérisent par des éprouvés
corporels de chute sans fin et dans certains rêves de perception
de chute de précipices, de chute dans un trou noir. Ces angoisses
risquent d’être réactualisées dans des situations traumatiques où
se produit une effraction du parexcitation. Le risque est
l’effondrement dans la dépression dite primaire du début de la vie.

La position d’hyperactivité phallique narcissique, position qui peut


exister chez les deux sexes est une modalité de protection contre
cette dépression et l’envahissement par un afflux d’affect non
élaboré. L’activité défensive protégeant de la passivité peut
entraîner la projection chez un partenaire passif des vécus de
séparation et de dépression. Cela peut se voir dans des conduites
de donjuanisme. Enfin, certaines organisations hystériques
peuvent être comprises comme une lutte contre la passivité et la
dépression, dans la défense phallique maniaque.

Je voudrais terminer en soulignant les enjeux de la passivité


mobilisés dans le contre-transfert. La passivité, avec son risque
hémorragique peut être une possibilité d’ouverture féconde qui
laisse germer et mûrir l’imprévisible de la vie dans l’altérité. C.
Chabert dans son rapport au Congrès des Psychanalystes de
Langue Française sur les Enjeux de la passivité parle des « forces

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extrêmes dans le combat entre la vie et la mort ». Les enjeux de la


passivité dans le contre-transfert nous mettent au cours du
processus analytique face au risque de l’irruption incontrôlée d’un
tourbillon vertigineux. Hémorragie émotionnelle indicible, agis
transférentiels et contre-transférentiels, nous confrontent au
danger de l’effondrement. Le plaisir et la douleur partagés dans la
surprise même du développement de la créativité du processus,
dans la reconnaissance des perceptions externes et internes et des
traces de mémoire, permettront-ils que l’écharde mortifère
comme dans le conte de La Belle au Bois Dormant, soit extraite
par les processus de vie désenclavés ?

Le Masculin et le Féminin
chez Freud, Winnicott et les
autres
Auteur(s) : Litza Guttieres-Green
Mots clés : angoisse de castration – bisexualité (psychique) –
castration – identité sexuée – masculin-féminin – masochisme
féminin – phallocentrisme – phallus – psychosexualité – sexualité
(féminine) – sexualité (masculine) – sexualité humaine

« …l’observation de la différence des sexes […] est


au fondement de toute pensée, aussi bien

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traditionnelle que scientifique. […] Il s’agit du


butoir ultime de la pensée sur lequel se fonde une
opposition conceptuelle essentielle : celle qui
oppose l’identique au différent, un de
ces themata archaïques que l’on retrouve dans
toute pensée scientifique, ancienne comme
moderne, et dans tous les systèmes de
représentation. »

Françoise Héritier, Masculin/féminin. Éd. Odile


Jacob, 1996, pp.19-20.

Sigmund Freud a posé en termes clairs le problème de la


différence des sexes et de l’identité sexuée, mais sa théorisation,
pourtant revue et remaniée à plusieurs reprises, en dépit de sa
remarquable cohérence, a soulevé dès le début de nombreuses
contestations et continue de diviser les psychanalystes.

La sexualité humaine est une psychosexualité où le féminin et le


masculin se succèdent, s’opposent, s’intriquent, constituant la
bisexualité psychique, qui atteint son apogée avec l’organisation
œdipienne.

La conflictualité générale et, plus encore, celle inhérente au


thème de la différence des sexes se répète, dans le débat entre
psychanalystes sur les similitudes, les oppositions et la
complémentarité des hommes et des femmes. Débat qui n’a pas
fini de nous occuper et auquel participent biologistes, sociologues,
ethnologues, historiens, politiques et médias. Ce champ est
tellement infiltré de préjugés, de passion et d’intérêts divers qu’il
devient difficile d’en parler avec sérénité. Nous allons cependant
tenter d’en faire l’expérience.

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Au cours de l’histoire de la psychanalyse, deux tendances se sont


rapidement dessinées au sein des théories sur la sexualité
féminine : d’un côté ceux qui soutiennent la méconnaissance du
vagin jusqu’à une époque tardive (aux côtés de Freud, Ruth Mack
Brunswick, Jeanne Lampl de Groot, Hélène Deutsch, Marie
Bonaparte), de l’autre ceux qui en croient en sa connaissance
précoce et pour lesquels l’enfant de sexe féminin est fille dès le
début (Josine Muller, Karen Horney, Karl Abraham, Mélanie Klein,
Ernest Jones).

Par la suite le sexuel, peut-être sous l’influence des kleiniens mais


aussi sous le prétexte de l’évolution des mœurs, en est venu à
perdre de son intérêt, comme s’il fallait lui réserver un refuge qui
en préserve l’interdit et le mystère, au profit de l’accent mis sur
les relations d’objet avec les rivalités et l’envie que suscite la
différence des sexes et qui amènent hommes et femmes à
imaginer « sur le corps de l’autre » (M. et J. Cournut) des
avantages dont ils sont privés. L’importance de plus en plus
grande donnée à la relation d’objet me paraît marquer la
prédominance accordée au féminin et surtout au maternel, en
raison de la précocité de ce lien primaire, au détriment du
masculin – phallique, secondaire. Nous verrons par ailleurs que
les théories sur le féminin souffrent du double destin de ce
dernier, féminin érotique et féminin maternel, qui en augmente la
complexité.

Les difficultés sont aggravées par la confusion entre les


conceptualisations qui s’appuient sur des facteurs occasionnels,
sociologiques ou historiques par exemple, et celles dont les
références sont somatiques, pulsionnelles, dérivées de
l’organisation psychique d’origine infantile, elle-même soumise à

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des références culturelles.

Comme on le sait, Freud est parti d’une vision uniquement


masculine/phallique de la sexualité, ce qu’on n’a cessé de lui
reprocher. Il a décrit l’avènement du féminin à la suite des stades
prégénitaux, oral, anal et phallique : « Au stade de l’organisation
prégénitale sadique‑anale – écrit-il – il n’est pas encore question
de masculin et de féminin, l’opposition entre actif et passif est
celle qui domine. Au stade suivant, celui de l’organisation génitale
infantile, il y a bien un masculin, mais pas de féminin ; l’opposition
s’énonce ici : organe génital masculin ou châtré. C’est seulement
quand le développement, à l’époque de la puberté, s’achève, que
la polarité sexuelle coïncide avec masculin et féminin. Le masculin
rassemble le sujet, l’activité et la possession du pénis ; le féminin
perpétue l’objet et la passivité. Le vagin prend maintenant valeur
comme logis du pénis, il recueille l’héritage du sein maternel
(1923). Il fait allusion à une psychosexualité toujours d’essence
mâle, qu’elle soit « active » ou « à buts passifs », à distinguer des
différences sexuelles d’ordre anatomique ou hormonal, liées au
corps et aux organes génitaux masculins ou féminins. Il va asseoir
sa théorie sexuelle sur trois hypothèses majeures :

1) L’existence, dans les deux sexes, d’un stade phallique


caractérisé par la présence ou l’absence de pénis : masculin-
phallique par opposition à féminin-châtré. Le clitoris, assimilé à un
pénis « rabougri » et dévalorisé, serait le seul organe sexuel
connu des fillettes. Le vagin en revanche et, à plus forte raison
l’utérus, « restent longtemps ignorés » . Le vagin ne prendra sa
réalité que comme « logis du pénis » au cours du coït ; quant à
l’utérus il sera révélé par les menstrues et l’accouchement.

Au stade sadique-anal, « ….les impulsions agressives des petites

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filles ne laissent rien à désirer en richesse et en violence. Avec


l’entrée dans la phase phallique, les différences des sexes
s’effacent complètement derrière leurs concordances. […] Nous
pouvons poser que dans la phase phallique de la petite fille, c’est
le clitoris qui est la zone érogène directrice. » (1933)

Dès 1924 pourtant, Karl Abraham a mis en doute


l’hypothèse freudienne : « …je me suis pris à me demander
récemment s’il n’y aurait pas déjà, au moment de la prime
enfance, une première éclosion vaginale de la libido féminine, qui
serait destinée au refoulement, et à laquelle succèderait ensuite la
prédominance du clitoris comme expression de la phase
phallique. » De cette vision découle tout naturellement l’existence,
chez la fillette, d’une réaction vaginale précoce au pénis du père
qui devient ainsi le premier objet, en contradiction avec la
primauté de l’objet-mère.

Freud, tout en avouant que le problème du féminin lui paraît


« obscur » et la féminité un « continent noir », maintient
fermement son point de vue et théorise, malgré les difficultés, la
nécessité du changement d’objet et du changement de zone
érogène. À la suite de Lou Andreas-Salomé, il assimile les
sensations vaginales à des sensations anales. Celle-ci en effet, dès
1916, dans Anal und sexual, faisait dériver le vagin du cloaque et
rapprochait les sensations génitales des femmes (adultes) des
sensations anales, évoquant à ce propos la passivité devant la
pulsion à laquelle les femmes, faute d’une agressivité
suffisamment tournée vers l’extérieur, seraient livrées plus
violemment que les hommes.

Prétendre que « seuls les organes génitaux mâles (le phallus)


jouent alors [à la phase phallique] un rôle, [et que] les organes

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génitaux féminins […] restent longtemps ignorés » paraît en


contradiction avec l’ancrage de la sexualité dans le somatique et
l’infantile, et l’on n’a pas manqué de se poser des questions sur le
silence de ces organes : est-il de l’ordre du refoulement ce qui
supposerait obligatoirement une connaissance antérieure qui
serait levé par la suite ? Est-il possible que la connaissance, sans
intuition de ce qui existe même s’il est caché, soit sous l’unique
dépendance de la perception ? Depuis, presque tous les auteurs
ont contesté la radicalité des affirmations de Freud qui, jusqu’à la
fin de sa vie, n’a pourtant cessé de soutenir ce qui lui paraissait
faire la cohérence de sa théorie.

Il confirmait ainsi une vision phallique de la sexualité et de la


libido : « Il n’y a qu’une seule libido, écrivait-il, qui est mise aussi
bien au service de la fonction sexuelle masculine que féminine.
Nous ne pouvons pas lui donner, à elle‑même, de sexe ; si, suivant
l’assimilation conventionnelle de l’activité à la masculinité, nous
voulons l’appeler masculine, nous ne devons pas oublier qu’elle
représente aussi des aspirations aux buts passifs. » (1933).
Remarquons que l’introduction d’une aspiration à la passivité
nuance la notion d’ « activité » masculine.

2) La confrontation avec la différence des sexes et l’absence


de pénis chez la mère déclenchent chez le garçon, avec la
surestimation du pénis qui pourrait venir à manquer, l’angoisse de
castration que Freud compare à « la chute du trône et de l’autel »,
avec son cortège de mépris du féminin et de peur de la
dévirilisation. La fille, en revanche, comprend qu’elle n’aura
jamais ce sexe qu’elle admire et désire, « elle se sent gravement
lésée, déclare qu’elle voudrait « aussi avoir quelque chose comme
ça » et succombe à l’envie du pénis qui laisse des traces

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indélébiles dans son développement et la formation de son


caractère et qui, même dans le cas le plus favorable, n’est pas
surmontée sans une lourde dépense psychique ». Le complexe de
castration va la détourner donc de sa mère, elle se réfugiera
auprès de son père, beatus possidens [heureux propriétaire], dont
elle espère un enfant.

Pour Freud, dans les deux sexes, le premier objet est donc la
mère. C’est l’angoisse de castration qui oblige le garçon à se
détacher d’elle, le faisant ainsi sortir du complexe d’Œdipe, tandis
que sous l’emprise de l’envie du pénis, la fille se détache
également de celle à laquelle elle reproche son « incomplétude »,
pour se rapprocher de son père, entrant ainsi dans le complexe
d’Œdipe. Ici s’inscrivent les sentiments ambivalents réciproques
entre la mère et sa fille, chaîne d’hostilité se perpétuant de mère
en fille, le père représentant à la fois le séparateur et le refuge.

Il faut attendre 1933 pour que Freud, reprenant les travaux de ses
élèves féminines, relie les aspects positifs de la relation mère-fille
précisément à l’importance des couches préœdipiennes de la
sexualité féminine : « L’identification à la mère, chez la femme,
permet de reconnaître deux couches : la couche préœdipienne qui
repose sur le tendre attachement à la mère et la prend comme
modèle, et celle, plus tardive, issue du complexe d’Œdipe, qui veut
éliminer la mère et la remplacer auprès du père ». Mais c’est la
phase du tendre attachement préœdipien qui est décisive pour
l’avenir de la femme ; c’est en elle que se prépare l’acquisition des
qualités avec lesquelles elle satisfera plus tard à son rôle dans la
fonction sexuelle et accomplira ses inestimables réalisations
sociales. »

N’oublions pas cependant que ce lien préœdipien à la mère recèle

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aussi, à côté d’aspects positifs, le germe de la paranoïa.

3) La vision phallocentrique de la sexualité dans le cadre de


la bisexualité psychique « d’origine corporelle » mais aussi
consécutive à une identification aux deux parents : « [la science]
attire votre attention sur le fait que des parties de l’appareil
génital masculin se trouvent dans le corps de la femme, bien qu’à
l’état atrophié, et vice versa. Elle voit dans cette occurrence
l’indice d’une double sexualité, d’une bisexualité […] Vous êtes
enfin invités à vous familiariser avec l’idée que les proportions
dans lesquelles masculin et féminin se mêlent dans un individu
sont soumises à des variations considérables. […] Vous ne pouvez
donner aucun nouveau contenu aux notions de masculin et de
féminin. Cette distinction n’est pas psychologique ; quand vous
dites masculin, vous pensez en général “actif”, et quand vous dites
féminin, vous pensez “passif” » .

Bien que l’envie des hommes à l’égard des femmes et de leurs


capacités créatrices idéalisées, soit généralement admise, le roc
inanalysable de la théorie freudienne repose sur la répudiation du
féminin dans les deux sexes (1937). Dans les deux cas, les rôles de
l’imaginaire et de la représentation sont au premier plan. À ce
propos, soulignons les différences entre le féminin de l’homme et
le masculin de la femme. Le premier est une réaction d’opposition
au masculin par envie du féminin, tandis que le masculin chez la
femme coïncide avec l’envie du pénis et le refus de renoncer au
phallicisme du passé.

Notons également que Freud a mis en relation d’un côté une


intrication des pulsions de vie et de mort, de l’autre une
intrication du féminin et du masculin dans la bisexualité. Toute
idée de pureté est donc exclue.

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Quelles sont les conséquences du complexe de castration pour le


caractère de la femme ?

– Faute d’organe phallique visible à investir, le narcissisme de la


fillette se reporte sur son corps tout entier : « Nous attribuons à la
féminité un degré plus élevé de narcissisme, qui influence encore
son choix d’objet, si bien qu’être aimée est pour la femme un
besoin plus fort que d’aimer […] [le choix d’objet de la femme] se
produit souvent conformément à l’idéal narcissique de l’homme
que la petite fille aurait souhaité devenir. »

– L’équivalence masculin-actif, féminin-passif expliquerait que la


sexualité féminine, exigeant la passivité, soit un terrain favorable
au masochisme par retournement de l’agressivité vers l’intérieur.

Le masochisme féminin érogène reposerait sur le masochisme


primaire, le plaisir de la douleur, pur pour ainsi dire. Freud veut-il
dire, sans composante sadique ou sans culpabilité ? Il s’agirait
d’un masochisme « originaire », précédant la formation du surmoi,
lié au narcissisme primaire absolu et formant le noyau de la
pulsion de mort originaire. Le masochisme originaire offrirait une
solution susceptible d’expliquer le détournement du principe de
plaisir. Il serait à l’origine de la formation du moi.

Freud a incriminé d’une part la répression de l’agressivité


« socialement imposée à la femme », ce qui nous choque à une
époque où ce n’est plus le cas. D’autre part le rôle joué par les
motions masochistes qui lient les tendances destructrices
davantage tournées vers le dedans, faute de pénis visible qui
pourrait la rassurer sur son intégrité. Si l’homme est également
concerné ici, son agressivité tournée vers l’extérieur, lui
permettrait de mieux lutter pour élaborer la poussée de passivité

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qui le met en danger. Freud conclut que : « toute l’énergie


disponible de l’Éros, que nous appelons désormais libido, se
trouve dans le moi-ça encore indifférencié et sert à neutraliser les
tendances destructrices qui y sont également présentes […] Une
fraction d’autodestruction demeure en tous cas à l’intérieur de
l’individu jusqu’au moment où elle réussit enfin à le tuer… ».

Le masochisme « gardien de vie » est nécessaire à l’homme


comme à la femme pour intriquer sa destructivité interne, mais s’il
est plus important chez la femme, comment expliquer que sa
longévité soit supérieure à celle de l’homme ?

Bien sûr nous voyons chez nos patientes, nos collègues et amies,
une gestion de l’agressivité différente de celle des hommes et il
est clair que la dépendance des femmes par rapport à leurs objets
prend souvent des accents masochistes.

Pour A. Green l’agressivité tournée vers l’intérieur chez les


femmes rend son intégration plus problématique puisqu’elle
risque de mettre leur psychisme en danger. Le lien à la mère est
un tel mélange inextricable de haine et d’amour, qu’il peut aboutir
à un refus d’identification ou à une identification aliénante.

– L’angoisse de castration étant à l’origine de la formation du


surmoi, son absence expliquerait la faiblesse du surmoi chez les
femmes : « On hésite à le dire, mais on ne peut se défendre de
l’idée que le niveau de ce qui est moralement normal chez la
femme est autre. Son surmoi ne sera jamais si inexorable, si
impersonnel, si indépendant de ses origines affectives que ce que
nous exigeons de l’homme. Ces traits de caractère que l’on a de
tout temps critiqués et reprochés à la femme : le fait qu’elle fait
preuve d’un moindre sentiment de la justice que l’homme, d’un

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penchant moindre à se soumettre aux grandes nécessités de


l’existence, qu’elle se laisse plus souvent que lui guider dans ses
décisions par ses sentiments de tendresse et d’hostilité, la
modification de la formation du surmoi, dont nous venons de
montrer d’où elle dérive, en est une raison suffisante. Nous ne
nous laisserons pas détourner de telles conclusions par les
arguments des féministes qui veulent nous imposer une parfaite
égalité de position et d’appréciation des deux sexes ; mais nous
accorderons volontiers que la plupart des hommes demeurent
bien en deçà de l’idéal masculin et que tous les individus humains,
par suite de leur hérédité croisée, possèdent à la fois des traits
masculins et des traits féminins, si bien que le contenu des
constructions théoriques de la masculinité pure et de la féminité
pure reste incertain ». Nous verrons que Melanie Klein adopte la
position diamétralement opposée.

Mais les femmes sont-elles vraiment à l’abri de l’angoisse


de castration ? Bien sûr leurs organes génitaux cachés peuvent
leurs donner l’impression d’échapper à ce risque. L’association
vagin-anus leur procure plus souvent un dégoût qu’une fierté : ils
sentent mauvais, ils suintent, etc. En revanche elles ont peur de
perdre leur beauté, leurs cheveux, de grossir, de vieillir. L’atteinte
des seins, lors d’un cancer par exemple ou par suite de
l’allaitement, est vécue comme une castration ; ainsi que la
ménopause et l’hystérectomie qui peuvent provoquer dépression
et frigidité. Tandis que les garçons « roulent des mécaniques », les
fillettes jouent à la poupée. L’identification à la mère, qui ne va
pas sans un certain masochisme, les sauve en leur procurant un
plaisir qu’elles investissent comme le but principal de leur vie.

On a critiqué l’association du masochisme érogène avec le

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féminin. Bien sûr Freud parlait du masochisme féminin chez


l’homme. Mais qu’en est-il du masochisme érogène de la femme
pour laquelle le coït et l’accouchement, loin d’être « subis », sont
source de jouissance et de gratifications narcissiques ? André
Green répond que, chez la femme existe « …un masochisme de
base qui ne serait pas le produit d’un retournement, mais la
conséquence d’un traumatisme imaginaire. » Soit, mais ce
masochisme, en particulier celui qui en fait une mère, nécessite
un puissant investissement d’objet. L’enfant, il est vrai, est à la
fois son œuvre vivante et une partie d’elle-même. La différence
avec l’œuvre sublimée est justement l’investissement objectal plus
que narcissique qu’elle implique. Il est vrai que le glissement vers
un masochisme moral qui ferait préférer la souffrance à l’objet est
fréquent sinon obligatoire comme nous le montrent toutes les
« mater dolorosa ».

Ce qu’André Green décrit comme une « déqualification


objectale qui accompagne le masochisme féminin-masochisme
moral [et] donne une prévalence au but, la souffrance, plutôt qu’à
la recherche de l’objet nécessaire à l’accomplissement de ce but
[ce qui] semble aller dans le sens d’une narcissisation de la
souffrance ». Désobjectalisation donc et repli narcissique qui
accompagnent le masochisme « mortifère ».

Les différences psychiques entre les hommes et les femmes


dépendraient, selon Freud et là-dessus je ne peux que le suivre,
des différences anatomiques qui orientent différemment leur
évolution, « L’anatomie, c’est le destin » disait-il parodiant
Napoléon. Ce que certains auteurs, Laplanche en particulier,
donnant priorité au fantasme, ont contesté comme un
« fourvoiement » biologique.

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Tel est le bilan forcément schématique de la sexualité féminine,


selon Freud.

Depuis, de nombreux psychanalystes, dont des femmes, se sont


attelés à la question, la faisant évoluer sans la clore.

H. Deutsch, par exemple, associe : féminin – oralité, vagin –


bouche, sein – pénis. Le vagin n’a aucun rôle érogène. Le clitoris
ne joue un rôle qu’à la phase phallique. C’est l’enfant qui est
l’instigateur de la sublimation chez la mère. La triade masochiste,
par « soumission masochique au pénis », comprend : castration –
viol – accouchement. Le vagin devient le réceptacle de l’enfant, le
souhait de retour au sein maternel étant réalisé par identification
à ce dernier. L’acmé du plaisir sexuel est atteinte lors de
l’accouchement. On peut lui reprocher de ne pas faire la part des
désirs érotiques féminins. Tout est sous la dépendance au pénis.

Reste à préciser ce qu’est la « femme féminine ». Pour H.


Deutsch, c’est celle qui « a réussi à établir la fonction maternelle
du vagin et à abandonner les revendications du clitoris ». Pour
d’autres c’est la femme érotique et séductrice, mais notons que la
féminité prend souvent dans ce cas une connotation phallique.

Freud corrige ce point de vue lorsqu’il affirme que le féminin pur


et le masculin pur sont des mythes du fait de la bisexualité.

Lacan va plus loin que Freud et élabore une thèse structurale


partant du primat du phallus, pour aboutir à des considérations
inattendues. Le père de la structure soutient l’existence du
système signifiant dont la fonction est symbolique. Le vagin serait
un morceau de réel, non marqué par le signifiant. « C’est ce que le
discours analytique démontre, en ceci que, pour un de ces êtres

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comme sexués, pour l’homme en tant qu’il est pourvu de l’organe


dit phallique – j’ai dit –, le sexe corporel, le sexe de la femme – j’ai
dit de la femme, alors que, justement, il n’y a pas la femme, la
femme n’est pas-toute, le sexe de la femme ne lui dit rien, si ce
n’est par l’intermédiaire de la jouissance du corps ». Dans la
mouvance lacanienne, pour V.Granoff, une partie du sexuel
féminin, tout le courant de l’instinct maternel, tomberait hors de
la médiation phallique et de l’analyse : « Enceinte, elle [la femme]
a ses évidences. Elle a « dedans » un corps étranger. C’est du
« dehors », et qui sera dehors. Un dehors qui est dedans ».

De nouveau ces points de vue choquent par leur théorisation


abstraite qui élimine le féminin de l’organisation psychique pour
en faire un domaine à part.

Les femmes cependant ont souvent le sentiment d’être trop


accrochées au réel, « au ras de pâquerettes » disait l’une de mes
patientes, leur ventre dominant leur esprit.

Pour mieux situer l’apport spécifique de Winnicott il est important


de le cadrer en revenant sur les conceptions d’un certain nombre
d’auteurs qui ont exprimé leurs opinions soit du vivant de Freud
soit après sa mort.

Le changement, amorcé par K. Abraham, a été repris par Karen


Horney (1922-1955). L’enfant de sexe féminin est d’emblée
femme ; c’est la crainte de l’effraction et des atteintes dont serait
l’objet à l’intérieur du corps qui pousseraient la fillette à refouler
la connaissance du vagin et à transférer ses pulsions vaginales sur
le clitoris, organe externe et accessible.

Quant à M. Klein (1928-32), elle va avancer des conceptions bien à

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elle centrées sur la prééminence du sein maternel. Elle ouvre ainsi


une controverse entre Vienne et Londres sur la précocité de ce qui
fait la spécificité de la femme. Pour elle, la fillette désire le pénis,
sous l’action de désirs instinctuels féminins, sous l’empire de
l’oralité, et non de l’analité. C’est la frustration orale engendrée
par le mauvais sein qui lui fait désirer le pénis contenu par la
mère. L’envie du pénis est à la fois secondaire à une frustration
orale, et liée au désir d’un organe visible dont elle pourra
constater l’intégrité lors des angoisses de castration qui
n’épargnent pas les femmes. Le désir oral du pénis paternel
devient le prototype du désir génital, vaginal. L’introjection du
pénis paternel, objet œdipien, constituera le noyau du surmoi
féminin. La fille sera plus soumise au père que le garçon et son
surmoi, contrairement à l’opinion de Freud, sera plus sévère. Le
masochisme féminin dérive du retournement du sadisme contre
les mauvais objets intérieurs. M. Klein oppose le bon au mauvais,
en lieu et place de l’opposition phallique – châtré ou « avoir » –
« manque ». Son mérite est d’avoir renversé l’ordre phallique pour
ériger un ordre maternel féminin.

À Melanie Klein se joindra Ernest Jones (1932), pour lequel la


fillette est d’emblée féminine, « par nature », le clitoris est un
organe féminin et non un pénis atrophié, le désir d’enfant est un
désir féminin et non une compensation pour le manque de pénis.
Bref, la femme n’est pas un homme manqué mais être différent.

Plus près de nous, Janine Chasseguet-Smirgel continue dans la


ligne de Freud. Pour elle, la mère et son sein sont investis
entièrement négativement tandis que le père et son pénis sont
idéalisés. Pour maintenir cette désintrication la fillette doit
refouler ses pulsions agressives dans la relation au père. D’où

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« une culpabilité spécifiquement féminine dans la composante


sadique-anale de la sexualité ». La sublimation dont parlait H.
Deutsch serait plutôt une formation réactionnelle expliquant
l’inhibition : « en ce qui concerne toute une série d’activités
intellectuelles, professionnelles, créatrices, la culpabilité
œdipienne de la femme, liée au dépassement de la mère, se
double […] d’une culpabilité à l’égard du père […], le bon
fonctionnement intellectuel est équivalent, dans l’inconscient, à la
possession du pénis. Or cette possession signifie pour la femme
qu’elle détient le pénis du père dont elle a ainsi dépossédé la mère
– ce qui est conforme au schéma œdipien – mais dont elle a, de
surcroît, châtré le père. De plus, l’utilisation adéquate de ce pénis
signifie, pour l’inconscient, sa fécalisation et finalement la
détention d’un pénis anal ».

Joyce Mac Dougall exprime des vues personnelles qui font le lien
entre Freud et Klein. Elle remarque que les garçons souffrent
autant que les filles de l’envie du pénis du père. La pensée que
son pénis est trop petit provoque chez l’homme les mêmes
angoisses que celle de la fille « lorsqu’elle s’accroche
inconsciemment au fantasme redoutable qu’elle est un garçon
castré […] l’envie et l’admiration qu’éprouve le garçon pour le
corps et la sexualité de la mère sont semblables à celle de la fille
pour le pénis et les prouesses sexuelles de son père. » S’opposant
à Lacan, elle distingue le symbole (phallus) de l’objet partiel
(pénis) : « Le phallus n’est pas le symbole de l’organe sexuel
masculin, mais celui de la fertilité, de la complémentarité et du
désir érotique ». C’est que « …la monosexualité masculine ou
féminine reste une blessure narcissique majeure. Atteindre la
représentation symbolique de la complémentarité entre les deux
sexes demande … de renoncer au plaisir enfantin d’être et

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d’avoir les deux sexes. »

Peu à peu sous l’influence des vues contrastées de différents


auteurs, une approche développementale a remplacé les
oppositions d’ordre sexuel mises en place par Freud. Une
tendance vers le féminin maternel se dessine : envie de la
puissance de procréation des femmes, tandis que l’ « orgueil
phallique » dissimule mal, dans son mépris des femmes, l’envie
que suscite la jouissance féminine. Si l’on s’appuie sur une théorie
mettant en avant le relation mère – enfant, la tentation de
l’observation directe impose sa séduction. Mais on néglige alors le
rôle des fantasmes inconscients et la présence, dans la pensée de
la mère, du père amant et géniteur.

Signalons qu’un concept de complémentarité entre pénis et vagin,


hommes et femmes, se retrouve chez Mac Dougall et chez Bion.

Nous avons tenu à faire le point de la question pour préciser d’où


Winnicott est parti. Il est temps d’arriver à sa contribution.

La contribution de Winnicott prend un chemin tout à fait


original. Winnicott a imaginé une transmission, de la mère à
l’enfant, de la « vitalité » dont il aura besoin pour vivre. Cette
transmission, de nature quasi existentielle, a lieu avant la
séparation, avant la constitution du moi, et donc d’un objet
étranger. Ce qui est transmis est la faculté d’ « être ». Le
« féminin pur », sans trace de masculin, ignore l’autre et, à plus
forte raison la différence des sexes, il est féminin parce que la
mère est femme. C’est de la transmission de l’essence de mère et
de son omnipotence, non d’une mère réelle qu’il s’agit. On peut le
rapprocher du narcissisme primaire, décrit par Freud en ces
termes : « …le moi où s’accumule, dès le début, toute la part

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disponible de libido. C’est à cet état que nous donnons le nom de


narcissisme primaire absolu. Il persiste jusqu’au moment où le
moi commence à investir libidinalement ses représentations
objectales » (

Le féminin pur précède la libido dont Freud dit qu’elle est


d’essence masculine. Pour Winnicott, il n’y a pas de pulsion avant
la constitution du moi et, par féminin pur, il n’entend pas une
entité d’ordre sexuel enracinée dans le pulsionnel. C’est la fusion
avec le sein de la mère qui fonde le « féminin pur ». L’enfant,
garçon ou fille, « est » le sein, avant de pouvoir le prendre. Il
faudra qu’il le reconnaisse comme « autre », pour pouvoir le
désirer et accéder au masculin dans les deux sexes. Le virage vers
le masculin dépendrait, chez le bébé garçon, d’une rêverie de la
mère qui reconnaîtrait le sexe de son fils alors que lui-même n’en
a pas encore conscience. Ce lien primaire, primordial, à la mère
permettrait l’acquisition d’une matrice psychique grâce à laquelle
l’enfant serait ensuite en mesure de se séparer d’elle et de
supporter la perte d’objet consécutive.

On peut dire, pour suivre Winnicott, que le féminin pur survient à


un moment où le narcissisme primaire est roi (un concept qu’il
ignore) et où les pulsions ne sont pas encore dirigées vers un objet
différencié extérieur. A ce stade d’omnipotence, sujet et objet ne
font qu’un, d’où la notion d’objet subjectif. Pourvu que
l’environnement soit « suffisamment bon », l’enfant peut créer une
zone d’illusion qui le rendra capable de supporter la désillusion
lorsqu’il sortira de l’omnipotence et comprendra que l’objet ne lui
appartient pas (objet objectivement perçu). C’est alors qu’il devra
acquérir le « masculin pur » afin de s’approprier ce qu’il n’a pas,
par une action. Il sera contraint de « faire ». Ce masculin de

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Winnicott, est donc actif (« faire ») et susceptible de se renverser


en passivité (« être fait »), pour les filles comme pour les garçons.
Tandis que le féminin pur n’a rien à faire, il n’a qu’à être, pourvu
que la mère réussisse à entretenir l’illusion de la fusion. Cet état
d’omnipotence illusoire est ce que l’enfant masculin, qu’il soit fille
ou garçon, enviera à sa mère censée le posséder.

Si le féminin pur, par défaillance de la mère ou de son substitut,


ne réussit pas à s’installer, l’enfant ne pourra pas acquérir cette
base de sécurité qui lui permettra d’affronter la séparation.

C’est seulement après la coupure de ce qu’André Green appelle


« un cordon ombilical psychique », que l’élément masculin pourra
se constituer. Le « masculin pur » serait donc secondaire. On peut
imaginer que le garçon aura plus de difficultés à se constituer une
identité sexuée séparée et qu’il gardera la cicatrice prête à se
rouvrir de cet arrachement, tandis que la fille dont l’identité
sexuelle, la même que celle de la mère, serait plus anciennement
constituée, pourra toujours conserver la trace du premier lien. En
revanche, elle devra changer d’objet de désir lors de l’Œdipe,
alors que le garçon pourra revenir à un objet du même sexe que
son premier amour. Pour Freud, la masculinité étant première,
c’est la fille qui aurait du mal à y renoncer et aura plus de facilités
pour la bisexualité. La discussion n’est pas close de savoir si le
détachement est plus facile pour la fille ou pour le garçon.

Qu’est-ce qui pousse l’enfant vers le sein, la bouche vers le


mamelon ? Cette quête vient du dedans, elle est ancrée dans le
corps. Pour Freud, les pulsions sont des forces qui « agissent à
l’arrière-plan des besoins impérieux du ça et qui représentent
dans le psychisme les exigences d’ordre somatique », pour
Winnicott les pulsions sont secondaires à cette pression.

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Dans la Nature humaine, ouvrage posthume, écrit de 1954 à sa


mort en 1971, et dont, malheureusement les articles n’ont pas été
datés, Winnicott a fait une place importante aux pulsions : Freud
« mit en relation […] l’importance de la pulsion et la signification
de la sexualité infantile. Une théorie qui court-circuite ces
questions est une théorie qui ne sert à rien. » Il assimile la pulsion
à l’instinct animal : « l’exigence pulsionnelle est […] la même que
chez l’animal », alors que Freud la définit comme un concept
limite entre le psychisme et le somatique, liée à la notion de
représentant.

Décrivant l’évolution du prégénital au phallique puis au génital, il


montre que l’enfant dispose de toutes les voies de l’excitation, y
compris peut-être la génitale, « mais encore dépourvue de
fantasmes génitaux ». Il n’y a pas encore de différence entre les
sexes. Puis vient la phase phallique, dans les deux sexes avec la
référence à l’organe génital masculin, son érection, sa
sensibilisation périodique. L’état féminin est alors une affaire
négative. Les chemins vont alors diverger. Ce fantasme est enrichi
jusqu’à réapparaître à l’adolescence sous forme masculine ou
féminine : pénétrer, être pénétré etc.

Reprenant la théorisation de Lou Andreas Salomé, Winnicott


conclut que « le côté féminin de la nature humaine sonne à la
porte du prégénital ». Dans la phase phallique, la performance de
l’enfant est fantasmatique c’est pourquoi elle concerne également
le garçon dans la fille, alors que dans la phase génitale, l’enfant
doit attendre « la possibilité de mettre le rêve en acte ». Pour cela
il faut que son moi puisse se débrouiller avec une
« impressionnante quantité de frustration ». La peur de la
castration par le père rival vient à point pour montrer au garçon

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un autre chemin que celui de l’agonie impuissante. Leur


vulnérabilité phallique les protège donc d’angoisses de non
existence plus graves.

La divergence entre l’évolution de la fille et celle du garçon a donc


deux racines :

– Avant l’individuation, la fusion-identification avec la mère


permet la constitution d’un féminin pur, sorte de paradis primitif
où il suffit d’être mais qui fondera les bases d’une capacité
ultérieure de mieux supporter la frustration et la perte. Si la mère
a su laisser à l’enfant la possibilité de s’illusionner il pourra
ensuite supporter la désillusion pour acquérir le masculin pur,
sous tendu par la volonté de s’approprier l’objet du désir (le sein).
L’accès à un masculin secondaire sur une base mal consolidée de
« féminin pur » va donner un faux-semblant d’équilibre.

– Les filles ne peuvent s’organiser que par rapport à ce qui leur


manque (par rapport au négatif). Elles doivent donc se procurer à
tout prix l’équivalent du pénis, investissement du corps entier,
d’un amant ou d’un enfant. Leur intégrité en dépend. Ceci rend
leur position plus précaire et leur narcissisme plus fragile. Elles
sont plus dépendantes de leurs objets, alors que les garçons,
rassurés par la présence de leur pénis, se sentent plus entiers. On
voit qu’ici, les vues de Winnicott sont proches de celles de Freud.

Winnicott fait remarquer qu’il n’y a pas de mot pour vagin dans la
nurserie. Si les mères modernes en ont inventé plusieurs, ils n’ont
pas encore de sens universel.

Il reste un fait indépassable, le vagin et l’utérus ne se voient pas ;


la place est à la représentation. Tant et si bien que certaines

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femmes, mères de famille, n’ont aucune représentation de leur


« matrice », tandis que des femmes, après une hystérectomie,
peuvent imaginer la posséder encore.

Les garçons, soutient Winnicott, auraient une représentation du


vagin, basée sur des désirs et des sensations orales et anales, mais
aussi vaginales alors que l’organe leur fait défaut ! Cela me
semble pour le moins énigmatique. Les filles seraient-elles gênées
par l’existence du clitoris et des sensations qu’il leur procure,
pour se représenter les sensations phalliques ? Rappelons que
c’est ce que soutenait H. Deutsch, lorsqu’elle décrivait le clitoris
« faisant barrage » à l’avènement du vagin à la phase phallique.
Le clitoris, sans fonction reproductrice, donc inutile, serait un
pénis pour rire (à la manière des seins des hommes pourrait-on
dire). Il ne ferait que blesser leur narcissisme et ajouter à leur
déception.

Il est évident que Winnicott comme Freud et les autres


psychanalystes ont du mal à trouver leur chemin entre d’une part
la réalité de la bisexualité psychique, les identifications aux
parents des deux sexes et, d’autre part, la nécessité d’assumer
une identité sexuelle conforme à l’anatomie. Jusqu’où peut-on
aller pour que le fantasme ne devienne pas inadapté et conduise à
un déni de la réalité ? Il faut cependant remarquer que chez les
êtres humains, les rôles sexuels ne sont pas toujours liés au sexe
anatomique. Dans son livre Masculin/féminin, l’ethnologue
Françoise Héritier montre comment chez les Inuit (une société
d’Esquimaux au Canada), l’identité et le genre sont fonction du
genre de l’âme-nom réincarnée.

Le débat reste ouvert s’il est plus facile pour les filles de réussir le
féminin que pour les garçons, le masculin. On l’a dit, les hommes

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le croient.

Les exemples cliniques ne semblent pas toujours le confirmer. Les


femmes, comme les hommes, ont parfois tendance à « faire »
plutôt qu’à « être ». Elles ont eu, comme eux, mais plus
difficilement comme le montre la clinique, à se dégager de
l’identification primaire à la mère. Est-il plus laborieux ensuite de
se constituer une identité féminine secondaire ? Ce qui est certain
c’est qu’il y a conflit entre le féminin – érotique et le maternel
comme D. Braunschweig et M. Fain l’ont joliment résumé en
appelant la « censure de l’amante » le désir qui pousse la mère à
s’éloigner de l’enfant pour rejoindre l’amant.

Les femmes ont des échanges érotiques avec leur


partenaire et leur enfant. Il n’est pas étonnant qu’elles soient
tiraillées entre les deux. Le féminin doit intégrer cette
conflictualité, tandis que pour les hommes, il n’y a pas de conflit
entre le masculin et la paternité.

Winnicott cependant a soutenu que l’expérience féminine n’exige


qu’une structure mentale « minime », puisqu’elle s’appuie sur
l’identification première à la mère. L’identité féminine serait plus
économique et demanderait moins d’effort psychique que
l’acquisition du masculin qui exige d’abord un dégagement.
Pourtant, dans La nature humaine, Winnicott est obligé de
constater que nombreux sont les écueils que les filles rencontrent
pour l’acquisition de leur identité de femme adulte. Au stade du
féminin pur, il n’y aurait pas de différence entre les sexes, sauf
dans le regard de la mère, trahissant les fantasmes qui voient la
fille comme semblable à elle (et loin d’être toute puissante), et le
garçon comme possédant le sexe qu’elle envie et idéalise mais
dont elle doit accepter l’altérité.

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Stoller (1975) discute l’affirmation de Freud que le garçon


commence sa vie comme hétérosexuel. D’accord avec Winnicott, il
insiste sur la fusion première avec la mère, « femme avec une
identité sexuelle féminine », qu’il lui faudra surmonter. Il souligne
l’importance du désir maternel pour le passage de son fils à une
identité sexuée masculine : « Je ne pense pas, écrit-il, que le
sentiment de ne faire qu’un avec la mère encourage un sentiment
même primordial de masculinité au cours des premiers mois de la
vie ; au contraire il doit être neutralisé. Il ne sera pour l’essentiel
surmonté, à mesure que le moi se développe, que si la mère
encourage le développement de la masculinité. Elle le fera en
premier lieu parce qu’elle désire un fils masculin. Stoller, comme
Winnicott, accorde toute son importance à l’influence de
l’environnement. Un bébé seul n’existe pas, en tous cas il ne se
développe pas, à la limite il ne survit pas. Pour aller plus loin, les
cas des enfants de sexe ambigu et des transsexuels confirment
que l’enfant, s’il naît avec un sexe anatomique défini, ne va
acquérir son identité de genre qu’à la suite d’une longue
élaboration. Le biologiste Jean-Didier Vincent confirme l’influence
de la mère, dès les premiers instants, sur l’orientation sexuelle de
l’enfant.

Après Winnicott. Nous allons maintenant examiner les


conceptions des auteurs modernes qui ont abordé le thème de la
différence des sexes en tenant compte des apports de Winnicott.

Pour A. Green, le féminin pur occulterait une destructivité


primordiale, née de la relation négative mère – enfant, que la
mère essaye de faire taire et qui est liée par le masochisme
érogène. Chez l’enfant-fille cette destructivité serait moins
violente, peut-être par identification plus profonde à la mère.

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Green se démarque de l’hypothèse qu’il n’y a pas de différence


avant le stade phallique entre les filles et les garçons. La
répudiation du féminin serait, selon lui, plutôt un rejet du
maternel découlant de la nécessité de se désengager de la mère
vécue comme dangereuse pour la virilité du garçon et pour la
féminité de la fille.

Pour Jean Laplanche, l’angoisse naîtrait lorsque le moi de l’enfant


est débordé par l’attaque interne de son objet source (la mère) qui
ne trouve plus à symboliser. Le traumatisme vient de la
réactualisation après-coup de l’irruption de sexualité adulte dans
une scène à laquelle l’enfant n’est pas préparé du fait de son
immaturité (théorie de la séduction généralisée).

J. André, à la suite de Laplanche, reprend l’idée d’Abraham d’une


féminité primitive, qui serait refoulée par la suite. Le
rapprochement de la féminité avec la situation de l’enfant
« effracté » et passif, expliquerait le refus du féminin dans les
deux sexes. L’angoisse féminine serait en rapport avec la
destructivité plus qu’avec la perte d’objet. Pour Benno Rosenberg,
l’angoisse signale la menace de déliaison qui risque de déchaîner
la pulsion de destruction.

C’est à tort parfois, remarque Winnicott, que certains hommes


envient les femmes croyant que chez elles l’élément féminin va de
soi. Dans La nature humaine, il souligne le caractère secret de la
sexualité féminine : « Le fonctionnement génital féminin véritable
est caché, quand il n’est pas secret […] d’habitude le fantasme
joue avec le recueillement en soi, le caché et le secret […] les
représentations génitales trouvent leur expression la plus
complète dans l’identification avec la mère [les rendant capables
d’agir et de concevoir un enfant ».

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Nombre d’hommes se plaignent qu’elles sont énigmatiques,


imprévisibles et qu’elles ont un « esprit tortueux ».

Je suppose que l’envie des femmes, se portant sur le pénis


« visible », est plus facile à concrétiser que celle des hommes, plus
floue, plus anxiogène, reposant sur quelque chose
d’irreprésentable et d’inquiétant qui sous-tend les fantasmes de
sorcières : « …la nature de l’orgasme vaginal garde sa ténèbre
inviolée », écrit Lacan. Il associe la jouissance féminine à un
rapport avec Dieu : « Cette jouissance qu’on éprouve et dont on ne
sait rien, n’est-ce pas ce qui nous met sur la voie de l’ex-sistence ?
Et pourquoi pas interpréter une face de l’Autre, la face de Dieu,
comme supportée par la jouissance féminine ? ».

Freud, en revanche, liait le mystère féminin à l’importance de la


bisexualité des femmes. L’acquisition du féminin étant postérieure
à une phase phallique, celui-ci en garderait la trace et la nostalgie
: « Partant de la préhistoire, je veux seulement souligner ici que
l’épanouissement de la féminité reste exposé à la perturbation
résultant des séquelles de la période masculine antérieure. Des
régressions aux fixations de ces phases préœdipiennes ont lieu
très fréquemment ; dans bon nombre d’existences il se produit
une alternance répétée de périodes dans lesquelles la masculinité
ou la féminité a pris le dessus. Une part de ce que nous, hommes,
appelons « l’énigme de la femme » dérive peut‑être de cette
expression de la bisexualité dans la vie féminine »..

Lacan a radicalisé la théorie du primat du phallus énoncée par


Freud. Il s’agit de phallus et non de pénis, c’est à dire d’une
représentation symbolique de la puissance phallique. Cependant
pour lui, au contraire de ce que souligne Mac Dougall, le phallus
est lié au masculin, à la présence du pénis. La femme est

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incomplète, « pas toute », mais dotée d’un mystère qu’elle


protège. Dans Encore, il harangue avec hargne les analystes
femmes : « Nos collègues les dames analystes, sur la sexualité
féminine elles ne nous disent […] pas tout ! Elles n’ont pas fait
avancer d’un bout la question de la sexualité féminine. Il doit y
avoir à ça une raison interne liée à la structure de l’appareil de la
jouissance […] Il y a une jouissance à elles à cette elle qui n’existe
pas et ne signifie rien. Il y a une jouissance à elle dont peut-être
elle-même ne sait rien, sinon qu’elle l’éprouve – ça, elle le sait.
Elle le sait, bien sûr, quand ça arrive […] depuis le temps qu’on les
supplie, qu’on les supplie à genoux – je parlais la dernière fois des
psychanalystes femmes – d’essayer de nous le dire, eh bien,
motus ! On n’a jamais rien pu en tirer. Alors on l’appelle comme
on peut, cette jouissance, vaginale… ».

Le moins qu’on puisse répondre est que devant un désir d’emprise


si agressif, une telle rage d’avoir le dernier mot, les femmes ne
peuvent rien faire d’autre que de se tenir à l’abri à l’écart de la
compétition phallique. « Che mi fa ! » disait l’héroïne de la
nouvelle de Maupassant, Les sours Rondoli.

Les plaintes des hommes et des femmes sont donc à la fois


semblables et différentes. Ils se plaignent tous deux d’un manque,
la plus grande blessure narcissique étant le renoncement à l’un ou
l’autre sexe. Mais l’angoisse de castration (la peur de la castration
par le père rival), en indiquant un autre chemin que celui de
l’agonie impuissante, structure les névroses masculines et
concentre les inquiétudes masculines sur un organe visible et très
investi, elle leur donne ainsi aux hommes un aspect de moindre
vulnérabilité narcissique, alors que chez les femmes elle devient
angoisse de perdre l’objet. On pourrait ajouter que l’angoisse de

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castration féminine anticipe un dommage touchant à la fois sa


féminité, son amant et son enfant. Si bien qu’elle paraît plus
dépendante des objets extérieurs, l’inquiétude naissant à chaque
séparation. Est-elle moins narcissique que l’homme puisque
l’amour est vital pour elle alors qu’il valorise surtout ses
performances phalliques ? Ou, comme le pense Freud, plus
narcissique puisque ses objets d’amour ne visent qu’à combler un
déficit, que l’amant est « l’homme qu’elle aurait voulu être » et
l’enfant mâle, celui qu’elle a créé ? Le masochisme féminin
découle de cette situation où, les objets qui complètent la femme
étant indépendants d’elle, elle doit prendre le risque de les perdre
ou accepter une incomplétude sans espoir. Ce sont ses capacités
d’identification au partenaire sexuel ou à l’enfant qui vont lui
permettre de récupérer ce qui, sinon, est perdu pour elle
définitivement, l’amour maternel.

Il y a bien sûr des femmes « masculines » qui tentent la solution


masculine, plus narcissique, censée les protéger des chagrins et
malheurs féminins. Inutile de dire qu’elles risquent de rencontrer
d’autres difficultés et de venir alors sur nos divans pleurer sur la
vanité des succès obtenus, si elles les ont obtenus.

Pour Catherine Parat, « le phallique n’est pas mâle, le phallique


est narcissique ». La satisfaction d’ordre phallique se trouverait
dans le domaine des sublimations. Les sublimations, originaires
d’identifications féminines mais aussi d’identifications viriles de la
période anale et de la période de latence, constituent ce qu’elle
désigne comme phallique féminin. Celles que les hommes
désignent négativement comme « femmes phalliques » sont les
femmes qui, « en imposant leur analité possessive, s’opposent à
leur besoin de maintenir une valeur phallique (narcissique) à leur

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pénis »

Florence Guignard, dont la réflexion s’appuie à la fois sur Freud et


sur Mélanie Klein, postule deux temps du féminin : le « maternel
primaire », premier espace qui se dessine chez l’infans, à partir de
la représentation de sa relation première au monde. Elle y
introduit « la capacité de rêverie maternelle » dont Bion fait la
condition de l’apparition de la vie psychique. le « féminin
primaire » au cours duquel s’organisent les premières
identifications féminines chez les enfants des deux sexes et qui se
développe en relation avec la première triangulation. Le deuxième
temps serait la combinatoire de la position dépressive et de
l’Œdipe précoce (théorisés par M. Klein). Winnicott a également
fait l’hypothèse que le fantasme de la mère qui reconnaît l’enfant
dans son sexe, joue un rôle primordial pour la capacité future de
l’enfant, en s’identifiant à cette rêverie maternelle, à prendre
conscience de son identité sexuée. Nous avons vu que Stoller a
une opinion approchante.

M. Cournut-Janin fait aboutir le lien entre la mère et la mort d’une


part, la fille/femme d’autre part, à la formation d’un noyau
mélancolique que l’on voit apparaître au cours de certaines
analyses. Le défi féminin pourrait, je crois, montrer là son revers
de culpabilité.

J. Schaeffer souligné la proximité de l’expérience de la jouissance


féminine avec l’angoisse et donc avec le masochisme : « La
défaite, dans tous les sens du mot, est la condition de la jouissance
féminine. » Encore la référence au masochisme érogène qu’il faut
bien intégrer pour blessant qu’il soit.

J. Kristeva insiste sur l’universalité de la référence phallique pour

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l’avènement du sujet, dans les deux sexes. Le pénis à la phase


phallique est le bienvenu, le « point de rencontre entre le désir et
le sens ». Le phallicisme succombera à la découverte de l’autre
sexe pour donner naissance à la sexualité adulte. Le monisme
phallique ne serait donc qu’une illusion infantile de la phase
phallique. L’envie du pénis une fixation « phallacieuse ». Elle se
réfère à Winnicott pour théoriser l’oedipe biface de la fille, biface
parce que négatif ( désir pour la mère), puis positif, lorsqu’elle se
tourne vers le père. Mais dès la phase phallique, des différences la
séparent du garçon . Invisible ou presque, le clitoris dissocie le
sujet femme du phallus. La déception de ne le percevoir qu’à
peine et de sa dévaluation, installe, avec la dissociation
sensible/signifiant, la croyance que l’ordre phallique est illusoire,
indice de bisexualité, non d’un faux self. Au phallique illusoire,
succède la passivation puis l’investissement maternel de l’enfant
qui apparaît comme la seule « chose sérieuse » à côté d’un ordre
phallique dérisoire.

Bisexualité et maternité donc, au centre du devenir de la femme.

Raquel Zak Goldstein aborde le passage de l’enfance à la maturité


sexuelle et à la maternité qui fonde chez la femme son identité
comme être humain sexué. La présence du père ne suffit pas à
inhiber complètement les aspects persécutoires dérivés des
images œdipiennes de la mère sorcière. Il s ‘ensuit une « tempête
psychique » avec des fantasmes de viol qui découlent des
fantasmes infantiles d’attaques contre le sein/corps maternel. Ces
processus constituent le « carnal body », corps somatique,
érogène, habité par le désir. La réalité psychique féminine,
habitant son corps charnel, est proche de l’expérience de la
temporalité et de la finitude.

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De nos jours, parité oblige, les femmes veulent un homme, des


enfants, des gratifications phalliques faisant jouer à plein leur
bisexualité. Elles en paient le prix avec la culpabilité, fières et
épuisées, elle en arrivent quand même à des renoncements plus
ou moins douloureux, mais au moins ce sont elles qui choisissent.

Conclusion

Winnicott a apporté des vues nouvelles sur l’avènement du


féminin et du masculin. On lui a reproché d’avoir négligé le rôle
des pulsions de vie et des pulsions de mort et leur ancrage dans le
corps. Mais dans La nature humaine, il insiste sur le rôle
prédominant des pulsions.

À la fin de sa vie, Freud s’est trouvé devant une énigme non


résolue : « un problème posé par un fait biologique, celui de
l’existence des deux sexes » et de la bisexualité biologique.

Pour Winnicott, le fantasme d’activité orale n’est pas forcément


« érotique » au début. L’ambivalence serait due aux changements
du moi plutôt qu’au développement du ça, lorsque l’enfant passe
de « l’amour impitoyable » (ruthless love) au « souci »
( concern) de l’autre. Après le stade anal et uréthral qui
dépendent des caractères bon ou mauvais des matières excrétées,
vient le stade phallique qui intéresse le garçon et « le garçon »
dans la fille. Le stade génital se développe ensuite sur le pré
génital dont il gardera les traces. D’abord lié à l’érection chez le
garçon et suscitant l’angoisse de castration en relation avec la
mère aimée et le père rival, il tend vers des désirs de pénétration
et de fécondation avec la représentation d’un « objet d’amour
réel ». Nous avons vu que pour le garçon, l’angoisse de castration
est un havre par rapport à des angoisses plus impensables,

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« disséquantes ».

Les filles, en l’absence d’organe « castrable » et d’angoisse de


castration, auraient un chemin précaire à parcourir qui « offre des
chances d’un développement homosexuel ». Winnicott reconnaît là
que, contrairement à ce qu’il soutient dans Jeux et réalité, « la
place ne manque pas pour du malheur et de la détresse chez la
fillette ». Il insiste sur l’aspect positif de l’envie du pénis et sur
l’importance de sa complète reconnaissance dans les analyses de
femmes pour le renforcement de leur relation avec l’homme de
leur choix. Beaucoup de femmes de nos jours peinent à y arriver.
Cependant écrit Winnicott et nous conclurons avec cette citation :
« Il serait faux de penser qu’il ne s’agit de rien d’autre que d’une
névrose culturelle. Une culture dans laquelle la petite fille est
autorisée à connaître très tôt la fonction féminine n’est pas de ce
fait nécessairement la meilleure amie de cette petite fille ».

Nous ne sommes donc pas arrivés au port et les problèmes


soulevés par la différence des sexes et « l’énigme » de la
bisexualité continuent de nous faire penser, heureusement ! Mais
la voie tracée par Freud continue d’éclairer notre chemin : c’est
l’intégration de la bisexualité psychique qui, si difficile qu’elle soit,
offre aux hommes comme aux femmes une issue pour des
relations possibles.

Conférences d’introduction

à la psychanalyse de l’adulte

février 2003

Notes

[1] Cournut-Janin M. et Cournut J., « La castration et le féminin dans les deux sexes » in

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: Rev. Franç. Psychanal., tome 57, numéro spécial congrès, 1993, pp. 1335-1557.

[2] « L’organisation sexuelle infantile », in La vie sexuelle, Puf, 1970, p. 116.

[3] Freud S. (1938), Abrégé de psychanalyse, Puf, 1949, p. 65.

[4] « Développement de la fonction sexuelle », in Abrégé de psychanalyse (1938), Puf,

1970.

[5] Freud S. (1933), La Féminité, in : Nouvelles conférences d’introduction à la

psychanalyse (1933), pp. 150-181. Gallimard, 1984.

[6] Lettre à Freud du 3/12/1924, in : Œuvres complètes, tome II, Payot, 1966.

[7] Abrégé de psychanalyse, p. 15.

[8] La Féminité, op. cit., p. 176.

[9] La Féminité, op. cit., p. 166.

[10] La Féminité, op. cit., p.179.

[11] Sur la sexualité féminine, op. cit., p. 141.

[12] La Féminité, op. cit., p. 152-153.

[13] « Analyse avec fin et analyse sans fin », in Résultats, idées, problèmes, tome II, Puf,

1985.

[14] op.cit., pp. 177-178.

[15] Abrégé de psychanalyse (1938). Puf, 1970, p. 9.

[16] Green, A. (1972). Aggression, Femininity, Paranoia and Reality. Int. J. Psycho-Anal.,

53 : 205-211.

[17] Freud S. (1925), Différence anatomique entre les sexes, in : La vie sexuelle, pp.

131-132.

[18] Op.cit., p. 147.

[19] Deutsch H. (1945), La psychologie des femmes, Puf, 1959.

[20] Lacan J., Séminaire 1972‑73, Encore, Paris, Seuil, 1975, p. 13.

[21] Granoff V., La pensée au féminin, Minuit, 1976.

[22] Horney K. (1967), La psychologie de la femme, Paris, Payot, 1969.

[23] Klein M., Le retentissement des premières situations anxiogènes sur le

développement sexuel de la fille, in : La Psychanalyse des enfants, 1932, Puf.

[24] Jones E., Le stade phallique, in : Théorie et pratique de la psychanalyse, Payot, 1969.

[25] Chasseguet-Smirgel J., « La culpabilité féminine » in : Recherches psychanalytiques

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© Société Psychanalytique de Paris

nouvelles sur la sexualité féminine, Payot, 1964, p. 132.

[26] Mac Dougall J., Éros aux mille visages, Paris, Gallimard, 1996, p. 28.

[27] Winiccott, D. W., La Créativité et ses origines. Clivage des éléments masculins et

féminins chez l’homme et chez la femme, in : Jeu et Réalité, Gallimard 1975, pp. 91-119.

[28] Abrégé (1938), op. cit., p. 10.

[29] Abrégé (1938), op.cit., p. 7.

[30] Winnicott D. W. (1988), La Nature humaine, Gallimard, 1990, pp. 54, 58.

[31] Op.cit., p. 59.

[32] Op. cit., p. 62, 63.

[33] Héritier Fr. (1996), Masculin/féminin, Odile Jacob.

[34] Braunschweig D., Fain M. (1971), Éros et Antéros. Réflexions psychanalytiques sur la

sexualité, Paris, Payot.

[35] Stoller R. (1975), Angoisse de symbiose et développement érotique de la masculinité,

in : La perversion, forme érotique de la haine, pp.140-165. Paris, Payot, 1978.

[36] Green A. (1986), Féminité et masculinité, in Bulletin de la SPP, 9.

[37] Green A. (1997), Les chaînes d’Éros, Paris, Odile Jacob, p. 54.

[38] Laplanche J. (1987), Nouveaux fondements de la psychanalyse, Paris, Puf.

[39] Rosenberg B. (1997), Le moi et son angoisse, Monographie de la Revue Française de

Psychanalyse, Puf.

[40] Op. cit. p. 65.

[41] Lacan J. (1960), Propos directifs pour un congrès sur la sexualité féminine,

in Psychanalyse 7, Paris, Puf, 1964, p. 5.

[42] Encore, op. cit, p. 71.

[43] La féminité, op. cit, p. 175.

[44] Encore, op. cit., p.66-69.

[45] Parat C. (1995), Le phallique féminin, Rev. franç. Psychanal. (59 (4) : 1239-1257.

[46] Guignard Fl. (1997), Épître à l’objet, Puf.

[47] Cournut-Janin M. (1998), Féminin et féminité, Puf (Épîtres).

[48] Schaeffer J. (1997), Le refus du féminin, Puf (Épîtres).

[49] Kristeva J. (1995), De l’étrangeté du phallus ou le féminin entre illusion et

désillusion. In : Sens et non-sens de la révolte, Pouvoirs et limites de la psychanalyse, pp.

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198-223, Paris, Fayard, 1996.

[50] Goldstein R. Z. « Women’s Destinies », 39th IPAC, San Francisco, 1995.

[51] « Un exemple de travail psychanalytique », Abrégé, op. cit.

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