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Fiche 27.

L’ouverture de l’instruction
Céline Laronde-Clérac
Dans Plein Droit 2019 (2e éd.), pages 185 à 190
Éditions Ellipses
ISBN 9782340035126
© Ellipses | Téléchargé le 02/06/2023 sur www.cairn.info via Université de Strasbourg (IP: 130.79.14.140)

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https://www.cairn.info/les-indispensables-de-la-procedure-penale--9782340035126-page-185.htm

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Fiche 27
L’ouverture
de l’instruction

▶▶ Les objectifs de la fiche


• Connaître les modes de saisine du juge d’instruction
• Connaître l’étendue de la saisine du juge d’instruction
• Connaître les conditions de recevabilité de la constitution de partie civile
devant le juge d’instruction
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Références jurisprudentielles
–– Cass. crim., 10 mai 2012, n° 12-81.197 (obligation d’informer)
–– Cass. crim., 30 mai 2012, n° 12-90.020 (réquisitoire contre personne non dénommée :
non-renvoi de la QPC)
–– Cass. crim., 19 déc. 2012, n° 12-81.043 (saisine in rem)

I. Les modes de saisine du juge d’instruction


Le principe de séparation des fonctions de poursuite et d’instruction (V. fiche 5)
interdit au juge d’instruction de mettre en mouvement l’action publique ; il ne peut
se saisir d’office. Le CPP prévoit alors deux modes de saisine du juge d’instruction :
il ne peut informer qu’après avoir été saisi par un réquisitoire du procureur de la
République ou par une plainte avec constitution de partie civile (CPP, art. 51).
Pour les affaires graves ou complexes, le CPP organise une cosaisine (V. fiche 25).
À partir du moment où le juge d’instruction est saisi, il a l’obligation d’informer. Il ne
peut refuser d’informer qu’au moyen d’une ordonnance motivée dans des cas précis
tels l’impossibilité de qualifier pénalement les faits, la présence d’un obstacle aux
poursuites comme la prescription de l’action publique (V. fiche 16).

II. L’étendue de la saisine du juge d’instruction


Le juge d’instruction est saisi in rem, c’est-à-dire des faits expressément visés
dans le réquisitoire introductif ou dans la plainte avec constitution de partie civile. S’il
peut requalifier ces faits, il ne peut étendre sa saisine à d’autres faits. Lorsque des faits,
non visés au réquisitoire, sont portés à sa connaissance, l’article 80 du CPP prévoit
qu’il doit immédiatement communiquer au procureur de la République les plaintes
ou les PV qui les constatent. Le procureur de la République peut alors soit requérir du
juge d’instruction qu’il informe sur ces nouveaux faits en le saisissant d’un réquisitoire
supplétif, soit requérir l’ouverture d’une information distincte au moyen d’un réquisitoire
introductif. Il peut également saisir la juridiction de jugement, ordonner une enquête,
décider d’un classement sans suite ou mettre en œuvre une mesure alternative aux
poursuites. Ces dispositions s’appliquent lorsque c’est la partie civile qui dénonce de
nouveaux faits au juge d’instruction durant l’information.
En revanche, le juge d’instruction n’est pas saisi in personam, c’est-à-dire qu’il
peut étendre sa saisine à toutes les personnes susceptibles d’avoir participé aux faits
dont il est saisi même si ces personnes ne sont pas nommément désignées dans le
réquisitoire introductif ou la plainte avec constitution de partie civile. D’ailleurs, le
réquisitoire peut être pris contre personne dénommée ou non dénommée.

Saisine in rem Pas de saisine in personam


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Saisine des seuls faits visés par le Extension de la saisine à toute
réquisitoire introductif ou la plainte personne susceptible
avec constitution de partie civile d’avoir participé aux faits

Même si elle n’est pas nommément


Nouveaux faits : nécessité d’un
visée dans le réquisitoire introductif
réquisitoire supplétif du procureur
ou la plainte avec constitution
de la République
de partie civile

III. La plainte avec constitution de partie civile


devant le juge d’instruction
La plainte avec constitution de partie civile est ouverte à toute personne qui se prétend
lésée par un crime ou un délit (CPP, art. 85). Cependant, le CPP conditionne la recevabilité
de cette plainte : la personne doit avoir déposé une plainte préalable restée sans suite ou
un délai de trois mois s’est écoulé depuis qu’elle a déposé plainte. Cette condition n’est
pas requise pour certaines infractions : crimes, délits prévus par la loi du 29 juillet 1881
sur la liberté de la presse, certaines infractions prévues par le Code électoral.
Le juge d’instruction saisi de la plainte constate par ordonnance son dépôt et,
en fonction des ressources de la partie civile, fixe le montant de la consignation qui
garantit le paiement de l’amende civile susceptible d’être prononcée si la constitution
de partie civile est jugée abusive ou dilatoire (CPP, art. 88, 177-2). Ensuite, il commu-
nique la plainte au procureur de la République pour qu’il prenne ses réquisitions aux
fins d’informer (CPP, art. 86).
La constitution de partie civile peut également avoir lieu à tout moment au cours
de l’instruction par voie d’intervention (CPP, art. 87).

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Fiche 27
Les indispensables
• Le juge d’instruction ne peut se saisir d’office (principe de séparation
des fonctions de poursuite et d’instruction).
• Les deux modes de saisine du juge d’instruction : le réquisitoire
introductif du procureur de la République et la plainte avec consti-
tution de partie civile devant le juge d’instruction.
• Le juge d’instruction a en principe l’obligation d’informer.
• Le juge d’instruction est saisi in rem.
• En présence de faits nouveaux, il ne peut instruire qu’après un
réquisitoire supplétif du procureur de la République.
• Le juge d’instruction n’est pas saisi in personam.
• La plainte avec constitution de partie civile est ouverte à toute
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personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit.
• La recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile est
conditionnée par le dépôt d’une plainte préalable restée sans suite.
• La partie civile doit verser une consignation.
• La constitution de partie civile peut avoir lieu par voie d’intervention.

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Cas pratique

Juridictions d’instruction, caractéristiques


générales et ouverture de l’instruction

Une femme est admise à l’hôpital. Le lendemain, elle est retrouvée noyée dans un
lac non loin de l’établissement. Son époux reprochant au personnel de l’hôpital de ne
pas avoir pris en compte les tendances suicidaires de son épouse, porte plainte auprès
des services de police. Une enquête préliminaire est ouverte sur ce décès et classée
sans suite. L’époux, qui bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle, se constitue partie
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civile devant le juge d’instruction du chef de non-assistance à personne en danger.
Le juge d’instruction constate le dépôt de plainte, fixe le montant de la consignation et
communique la plainte au procureur de la République. Ce dernier prend des réquisitions
de non-informer sur la base desquelles le juge d’instruction rend une ordonnance de
refus d’informer.

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Corrigé

Fiche 27
▶▶ Ce cas pratique invite à s’interroger sur la recevabilité d’une plainte avec consti-
tution de partie civile (1), la légalité de la consignation (2) et la possibilité pour le
juge d’instruction de rendre une ordonnance de refus d’informer conformément
aux réquisitions du procureur de la République (3).

▶▶ 1. La recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile

Problème juridique : les conditions de recevabilité de la plainte avec consti-


tution de partie civile posées par l’article 85 du CPP sont-elles réunies ?

Le juge d’instruction ne peut se saisir d’office. Il doit être saisi par réquisitoire
introductif du procureur de la République ou par une plainte avec constitution
de partie civile.
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Selon l’article 85 du CPP, toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un
délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d’instruction.
Toutefois, la plainte avec constitution de partie civile n’est recevable qu’à la
condition que la personne justifie soit que le procureur de la République lui a
fait connaître, à la suite d’une plainte déposée devant lui ou un service de police
judiciaire, qu’il n’engagera pas lui-même les poursuites, soit qu’un délai de trois
mois s’est écoulé depuis qu’elle a déposé plainte devant ce magistrat. Cette
condition n’est pas exigée dans trois cas : en matière criminelle, en matière de
délits de presse et pour certains délits prévus par le Code électoral.
En l’espèce, la plainte avec constitution de partie civile est déposée du chef de
non-assistance à personne en danger, délit réprimé par l’article 223-6 du CP.
L’époux a préalablement porté plainte auprès des services de police à la suite
du décès de son épouse. Une enquête préliminaire a été ouverte sur ce décès
et a été classée sans suite. Les conditions de recevabilité de la plainte avec
constitution de partie civile sont donc réunies.

▶▶ 2. La légalité de la consignation

Problème juridique : la consignation est-elle légale lorsque la partie civile


bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle ?

Selon l’article 88 du CPP, le juge d’instruction constate, par ordonnance, le dépôt


de la plainte. En fonction des ressources de la partie civile, il fixe le montant de
la consignation que celle-ci doit, si elle n’a pas obtenu l’aide juridictionnelle,
déposer au greffe. Cette consignation garantit le paiement de l’amende civile
susceptible d’être prononcée en cas de constitution de partie civile abusive
(CPP, art. 177-2). La jurisprudence a précisé que lorsque l’aide juridictionnelle
même partielle a été accordée à la partie civile, celle-ci doit être dispensée de

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toute consignation en application de l’article 88 du CPP (Cass. crim., 30 nov. 1999,
n° 99-84.100). En l’espèce, il est indiqué que l’époux qui s’est constitué partie civile
bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle. Il devait donc être dispensé de toute
consignation.

▶▶ 3. L’ordonnance de refus d’informer

Problème juridique : le juge d’instruction pouvait-il refuser d’informer ?

L’article 86 du CPP prévoit que le juge d’instruction ordonne communication de


la plainte au procureur de la République pour que ce magistrat prenne ses réqui-
sitions. L’alinéa 4 de ce texte précise que le procureur de la République ne peut
saisir le juge d’instruction de réquisitions de non-informer que dans certains cas,
notamment si, pour des causes affectant l’action publique elle-même, les faits ne
peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits démontrés,
ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale.
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Selon la chambre criminelle de la Cour de cassation, la juridiction d’instruction
régulièrement saisie d’une plainte avec constitution de partie civile a le devoir
d’instruire, quelles que soient les réquisitions du ministère public et cette obligation
ne cesse, suivant les dispositions de l’alinéa 4 de l’article 86, que si, pour des
causes affectant l’action publique elle-même, les faits ne peuvent comporter
légalement une poursuite ou si, à supposer les faits démontrés, ils ne peuvent
admettre aucune qualification pénale (Cass. crim., 20 juin 2006, n° 05-86.611, 10 mai
2012, n° 12-81.197, 19 déc. 2012, n° 12-81.043). En l’espèce, l’énoncé ne fait pas
apparaître une cause affectant l’action publique et les faits peuvent être qualifiés
de non-assistance à personne en danger. Le juge d’instruction devait donc vérifier
par une information préalable la réalité des faits dénoncés dans la plainte. Il ne
pouvait refuser d’informer. L’époux peut donc faire appel de l’ordonnance de refus
d’informer devant la chambre de l’instruction.

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