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chez l’antiquaire
commentairecompose.fr/la-peau-de-chagrin-balzac-decouverte-de-la-peau
Après un échec aux jeux, le personnage principal Raphaël de Valentin erre dans Paris,
tenté par le suicide. Il entre dans un magasin d’antiquités, véritable cabinet de curiosités
hors du temps.
Le vieux marchand lui en fait découvrir les étages et les œuvres. Soudain, face à un portrait
du Christ, Raphaël découvre une peau de chagrin qui va bouleverser sa vie.
Problématique
Comment la peau de chagrin, élément perturbateur du roman, est-elle mise en scène dans
ce passage ?
Plan linéaire
La première partie de cet extrait met en scène une phase de découverte intrigante de la
peau de chagrin.
Dans un deuxième temps, naît un dialogue entre deux connaisseurs aux caractères
opposés, Raphaël de Valentin et l’antiquaire.
Enfin, dans un troisième temps, les signes mystérieux de la peau sont lus et traduits.
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L’extrait s’ouvre par la prise de parole du vieux marchand.
La typographie différente, en lettres capitales, met l’accent sur la découverte d’un objet et
sa place centrale dans le roman.
Nombreuses sont les discussions au sujet de l’expression: le chagrin étant déjà une peau
tannée, Balzac a-t-il commis une erreur de vocabulaire ? Qu’il s’agisse d’une matière (le
cuir) ou d’une émotion (la tristesse), le choix de l’expression «peau de chagrin» est
emplie de mystère et annonciatrice des enjeux du roman.
Après un effet de surprise, le personnage tente de décrire la place et la taille d’un objet
banal par des expansions du nom (épithète + proposition subordonnée relative) : «“un
morceau de chagrin accroché sur le mur, et dont la dimension n’excédait pas celle d’une
peau de renard”».
Mais l’accent est aussitôt mis sur une aura mystérieuse, de l’ordre de l’irrationnel(«“par un
phénomène inexplicable au premier abord”»). La raison de Raphaël échoue donc pour
expliquer le rayonnement de la peau.
La mise en scène est théâtrale, par les jeux de clair-obsur et par les jeux sur des
sonorités envoûtantes avec l’assonance en « o » et l’allitération en « p » («“cette peau
projetait au sein de la profonde obscurité”»).
Auparavant «“jeune homme”», Raphaël est désigné par «“jeune incrédule”»: il s’agit d’une
marque de jugement du narrateur sur son personnage.
Ce dernier est en effet méfiant, comme le confirme la phrase: « “ce prétendu talisman qui
devait le préserver du malheur”». L’adjectif « prétendu » souligne la distance ironique que
prend Raphaël face à l’objet.
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À ce moment du texte, Raphaël est attiré, happé par la peau de chagrin. Mais sa réaction
est moqueuse. Il veut surtout trouver une explication rationnelle au phénomène lumineux.
En effet, le rayonnement de la peau serait selon lui le résultat des caractéristiques de cette
dernière (grains noirs, rayures propres…) comme l’indique la proposition subordonnée de
conséquence qui vise à établir un lien logique entre les particularités physiques de l’objet
et sa luminosité : « “si…si…si…si…que que les aspérités de ce cuir oriental formaient autant
de petits foyers”« .
La description de la peau est très précise : la vue des couleurs et des contours (« grains
noirs », « brunis », « propres et nettes »), le toucher de la matière (« polis », « aspérités »,
« rayures » ) sont évoqués.
Mais malgré une observation scientifique, la peau reste difficile à saisir comme en
témoignent les 4 adverbes intensifs «si» qui restituent l’intensité extraordinaire de la
peau.
La comparaison «“pareilles à des facettes de grenat”» montre que la peau échappe au réel,
et se rapproche davantage d’un joyau scintillant, d’un objet merveilleux : « “autant de petits
foyers qui réfléchissaient vivement la lumière.”»
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Le long adverbe « mathématiquement » et le terme « phénomène » soulignent l’approche
logique et scientifique du jeune homme face à la peau.
Mais le vieillard «“sourit avec malice”». A ce stade, le terme «malice» est ambivalent pour
le lecteur: à la fois synonyme d’ingéniosité et étymologiquement proche du radical
du«mal»…
Le choix des verbes de parole («s’écria» pour le jeune homme» et «demanda» et «reprit»
pour le vieillard) oppose d’emblée l’exaltation de Raphaël et la mesure du marchand.
Il connaît donc cet anneau magique qui confère la puissance absolue à son possesseur, ce
qui surprend le marchand toujours maître de ses propos.
Face au vieillard, il est même «“piqué d’entendre ce rire muet et plein d’amères dérisions”».
La râpeuse allitération en « r » restitue la raillerie du jeune homme face à l’antiquaire.
La position de Raphaël est claire: il met à distance «“les superstitions de l’Orient», «la
forme mystique», «les caractères mensongers de cet emblème», «la puissance fabuleuse”».
Ce champ lexical de l’invention est mis au même rang que les Sphinx et Griffons.
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III – Lecture et traduction de signes mystérieux
Au moment où Raphaël avoue les limites de ses connaissances, il cherche un outil et montre
aussitôt sa soif de compréhension et de maîtrise «“afin de voir si les lettres y sont
empreintes ou incrustées”». Malgré l’utilisation du stylet, la tentative mécanique de grattage
s’avère infructueuse: les lettres réapparaissent.
Malgré tout, Raphaël semble inquiet alors que le vieillard répond par une sorte de maxime
exclamative, elle aussi énoncée au présent de vérité générale “il vaut mieux s’en prendre
aux hommes qu’à Dieu!”» Cette réponse fonctionne comme une mise en garde.
Les lettres sont rapportées dans leur langue originelle (dont on découvrira après l’extrait
qu’il s’agit de sanscrit), en 10 lignes esthétiques. Sous la plume de Balzac, le lecteur a
l’impression d’une réelle découverte archéologique, retranscrite avec la plus grande
fidélité.
Le prix de l’accomplissement immédiat des désirs est clair: cette peau se rétracte et
symbolise la vie du possesseur qui s’étiole.
5/6
La découverte de la peau de chagrin chez l’antiquaire, conclusion
La découverte de la Peau de Chagrin dans la boutique du vieillard constitue l’élément
perturbateur du roman au point que la première partie est intitulée «Le Talisman».
Il ne s’agit pas d’un simple cuir décoratif mais d’un objet magique dont les propriétés
dépassent la logique humaine: il rayonne sans que Raphaël ne puisse trouver d’explication
rationnelle, ses caractères ne s’effacent pas, son écriture orientale intrigue, ses signes
proposent un pacte maléfique: le plaisir éphémère au prix de la vie.
6/6