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La Peau de Chagrin, roman publié pour la première fois en 1831, est une
œuvre clé de La Comédie Humaine de Balzac (vaste fresque romanesque
composée de 90 romans), car l’auteur y expose sa philosophie de la vie. Pour
Balzac, chaque homme disposerait en effet d’un capital d’énergie que le désir et
la volonté entament. Dans ce roman, la peau de chagrin incarne ce capital
d’énergie vitale qui diminue à chaque manifestation de la volonté.
I. Raphaël affirme son choix (de « Eh ! bien, oui, je veux vivre avec
excès » à « où mon existence est désormais impossible »).
-L’extrait s’ouvre sur une interjection (« Eh ! » l.1) qui coupe court à la mise en
garde du vieillard.
-L’assertion « je veux vivre avec excès » (l.1) indique que les propos du vieillard
ont été vains puisque Raphaël affirme sa volonté à la première personne (« je
veux » l.1).
-Le jeune homme affirme son choix par sa prise de parole mais aussi par son
geste, comme l’indique le gérondif « en saisissant la Peau de chagrin » (l.1-2). Les
deux personnages sont aux antipodes : le vieillard rappelle une dernière fois le
risque d’un tel choix par l’impératif « prenez garde » (l.3).
-Le complément circonstanciel de manière « avec une incroyable vivacité » (l.4)
tranche d’ailleurs avec son vénérable âge plus que centenaire.
a) Un défi
b) L’enthousiasme de Raphaël
-Les propos de Raphaël matérialisent sa vision d’une vie à l’excès, sans mesure,
comme le laisse transparaître la gradation « jeunes, spirituels et sans préjugés,
joyeux jusqu’à la folie ».(l.13-14)
-L’excès se trouve aussi dans la consommation de vins : l’usage des comparatifs
pour les définir, « plus incisifs, plus pétillants » (l.15), conduit au paroxysme «
nous enivrer pour trois jours !». (l.15-16) Cette orgie imaginée passe par la
présence de femmes « ardentes » (l.16) : l’adjectif est polysémique et peut
désigner la chaleur, le désir, la sensualité de ces femmes et l’intensité de la
soirée.
-Enfin, l’excès se traduit par le recours à une allégorie : la Débauche, elle-même
personnifiée en conducteur de quadrige (« son char à quatre chevaux »), « en
délire et rugissant » (l.17-18).
-L’imagination de Raphaël n’a pas de limite : comme la Débauche, elle conduit vers
« des plages inconnues » (l.19), « par-delà les bornes du monde » (l.18). Ces
indications relèvent de l’hybris grecque, c’est-à-dire ce goût orgueilleux de
l’homme pour la démesure, pour se hisser au niveau des Dieux.
-En effet, comme un Dieu, Raphaël en vient à imaginer le destin des âmes selon
une construction binaire : les unes montent « dans les cieux »(l.19) , les autres «
se plongent dans la boue »(l.20), comme un reflet moral des vies menées.
Certaines « s’élèvent », d’autres « s’abaissent »(l.20).
-Cette suite d’antithèses révèle une vision manichéenne du Paradis ou de
l’Enfer. Surtout, l’exclamation qui suit suggère que Paradis et Enfer se
confondent pour le jeune homme : « peu m’importe ! »(l.21). Les valeurs morales
n’ont plus de sens et s’inversent. Raphaël dévoile par là son cynisme et sa vision
de la vie : le plaisir des sens, la jouissance à tout prix sont les seuls mots
d’ordre, peu importe le prix à payer.
a) L’affirmation de sa volonté