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Les Fleurs Du Mal - Alchimie poétique : La Boue et L’Or

Lecture Linéaire 5 – 15/20

El Desdichado – Gérard de Nerval


 Gerard de Nerval est un écrivain et poète du XIXe siècle, né en 1808 et meurt en 1855. Il
représente une figure majeure du romantisme français.
 Les Chimères est un recueil publié en 1854, la dernière partie des Filles du feu. Ce recueil
a marqué l’histoire de la poésie française par le langage et par ls force poétique. Le sens profond de
ces poèmes reste encore obscur, le poète exprime la nature du mal qui le hante et les tentatives faites
pour l'exorciser.
 Ce poème liminaire exprime le mal d’« el Desdichado », un chevalier errant, anonyme
déshérité, sans nom ni fief, sombre personnage, il ne vit que des traces de ces exploits et amour
perdues, comme le poète égarer dans les dédales de sa mémoire, est condamné à la quête incessante
de son identité.
Donc, comment l’alchimie poétique permet au poète de reconquérir sa vie ?
(Lectures)
Nous pouvons distinguer 2 mouvements :
- Vers 1 à 8 : La mélancolie noir du poète ; un être mystérieux et malheureux
- Vers 9 à 14 : Un nouveau langage poétique par la puissance de l’alchimie poétique et la
victoire du poète

Le titre « El Desdichado » : mot espagnol = déshérité. Tiré d’Ivanhoé de Walter Scott, dans
lequel un roi a dépossédé un chevalier d’un château. Vivant masqué, le chevalier choisit de porter sur
son écusson la devise « déshérité », dont le symbole est un chêne déraciné. Dernière ce titre, il y a
donc l’idée de manque. Un titre énigmatique comme un manque de mot pour exprimer ses émotions
en français, d’un homme à qui l’on a enlevé son nom, son identité.
 1e mvt (vers 1 à 8) : La mélancolie noir du poète ; un être mystérieux et malheureux

 Vers 1 à 4 : L’affirmation au désespoir


- Le pronom personnel « Je » ouvre le poème, et le verbe d’affirmation « suis » marque le sujet du
poème : Le poète.
- L’allégorie du veuvage et de la souffrance « Je suis le Ténébreux, - le Veuf, - l’Inconsolé » (v.1)
pose un décor de désespoir, une idée de la mort qui guette la poète. Ainsi que ces adjectifs
substantivés donne une identité démultipliée du poète  une recherche du soi, il ne sait pas se
définir en 1 seul mot.
- La présence des tirets cadratins pose une idée de dialogue à lui-même, qui rappelle la polyphonie
intérieure de l’esprit romantique qui privilégie l’expression des sentiments.
- La métaphore médiévale « Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie » (v.2) retrouve en lui les
ténèbres : la noblesse d’un « prince » sans sa « tour » qui est « abolie », ainsi que « Aquitaine »
signifie le chevalier noir, ce marque une identité problématique et violente auquel s’assimile le poète.
- Dans la métaphore « Ma seule Etoile est morte, - et mon luth constellé » (v.3) le poète semble
comparer une femme à une étoile ce qui renvoie à la poésie romantique, une image de l’espérance et
de l’amour. Et l’adjectif quantitatif « seule » intensifie le vide la vie du poète.
- La personnification du « luth », instrument de la musique, et l’allitération en [m] donne une
musicalité au texte qui assimile un lien être Nerval et Orphée
Les Fleurs Du Mal - Alchimie poétique : La Boue et L’Or
Lecture Linéaire 5 – 15/20

- L’oxymore « Soleil noir » (v.4) fait une contradiction marquant le chaos total dans l’esprit du poète
qui perd ses repères. La figure mystique de la cartomancie « Soleil » donne une image de l’homme
jamais seul qui s’annule avec l’oxymore.
 Le poète semble un personnage épris dans une quête d’identité, protéiforme et en plein
doute. Les images négatives voire destructrices, et la présence du quelque idées positives étouffées
par l’omniprésence de mélancolie rappelle la figure d’Orphée.
 Vers 5 à 8 : Une quête du bonheur
- Le poète semble parler directement à quelqu’un « Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé »
faisant rappel à la mort mais aussi l’idée de consolation : recherche du mieux.
- L’impératif « Rends-moi » (v.6) marque un ordre tourné vers le souhait et la volonté de « retrouver
» des souvenirs plaisants. La paronomase entre « consolé » / « désolé » appel à la douleur du poète et
sa volonté de guérir.
- Les espaces géographiques « Pausilippe » « mer d’Italie » « Pampre » donne l’idée du poète à faire
revivre la poésie latine comme Virgile. La synecdoque coloré en bleu de « la mer d’Italie » et le vert
du « Pausilippe » ainsi que la périphrase « Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie » (v.6) appel au
locus amoenus, expression latine signifiant « lieu idyllique », comme une source de réconfort.
- L’antithèse « La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé » (v.7) fait une contradiction entre le sens
propre et le sens figuré de la fleur : celle qui rassure le cœur mais aussi celle à connotation
mystérieuse voire négative. Le poète est donc sur deux plans : le réconfort et la folie.
- L’alliance de « la Rose » et du « Pampre » « Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie » (v.8)
permet à imaginer un paysage italien, le locus amoenus, où le poète dépasse son existence habituelle
et cherche à se sublimer.
- Le champ lexical des couleurs crépusculaires « Ténébreux » « noir » « rose » « rouge » renvoient à
un décor mélancolique : lutte du poète.
 Le poète cherche à quitter ses douleurs passées en convoquant les images qui le soulagent.
Nous pouvons nous poser la question : qu’est-ce qui peut l’aider à s’en sortir ? Le mysticisme et la
poésie semblent être une première réponse.

 2e mvt (vers 9 à 14) : Un nouveau langage poétique par la puissance de l’alchimie


poétique et la victoire du poète

 Vers 9 à 11 : Questionnement sur l’identité profonde


- « Suis-je Amour ou Phébus ? … Lusignan ou Biron ? » Présence de forme interrogative.
Suggestion du texte, quête d’identité.
Conjonction de coordination « ou » Souligne la perte d’identité : le poète ne sait plus qui il est.
Dimension moyenâgeuse Renvoie aux valeurs nobles et chevaleresque.
C.L. Mythologie Caractère protéiforme du poète. Il dépasse son existence habituelle et cherche à se
sublimer.
Les Fleurs Du Mal - Alchimie poétique : La Boue et L’Or
Lecture Linéaire 5 – 15/20

v.10 « Mon front est rouge encor du baiser de la Reine » Image religieuse Renvoie à l’épisode de la
crucifixion. Echo avec la trinité du premier quatrain. Recherche de rédemption. Figure de la Reine et
du baiser : positivisme de son passé.
v.9- 11 « Suis-je Amour ou Phébus ? … Lusignan ou Biron ? » « Mon front est rouge encor du baiser
de la Reine » Assonances-en [ou] et [on] Musicalité du texte qui assimile Nerval à la figure d’Orphée
qui sera traitée plus loin.
v.11 « J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène… » Thématique du rêve et de l’eau Idée mystique du
rêve comme figure positive pour le poète (rêve et poésie). Thématique de l’eau qui s’oppose au feu et
aux ténèbres du premier quatrain : image d’expiation chez le poète.
Convocation de la multiplicité des figures mythologiques (grecques et scandinaves) : pluralité pour
un seul but.
Premier tercet : Le poète se cherche et cherche à devenir plus que ce qu’il n’a jamais été. Il se
questionne sur son identité mythologique ou noble et convoque le rêve pour tenter d’atteindre un
statut meilleur à sa condition.
« Et j’ai deux fois vainqueurs traversé l’Achéron » « Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée ».
C.L. Mythologie Caractère protéiforme du poète. Il dépasse son existence habituelle et cherche à se
sublimer.
v.12 « Et j’ai deux fois vainqueurs traversé l’Achéron » Anacoluthe (rupture syntaxique) Volonté de
chercher une nouvelle liberté dans le langage.
v.13 « Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée ». CL de la musique Rappel un lien être Nerval et
Orphée
v.14 « Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée » Métaphore religieuse et mystique convoquée.
Renvoie à l’épisode de la crucifixion : idée cathartique (se purger des maux par la musique).
2 e Tercet Histoire d’Orphée Parallélisme entre Nerval et Orphée (Cf Histoire Orphée) : - Désespoir
amoureux Nerval pleure l’être aimé (Jenny Colon meurt en 1842).
v.12 « Achéron » : allégorie de la folie Cf. Crises de folies de Nerval (1851 et 1853).
v.12 « vainqueur » : adjectif épique Nerval sort vainqueur de ses malheurs et convoque l’esprit
lyrique pour l’accompagner au quotidien. Lyrisme au sens poétique : expression de sentiments
profonds par la poésie.
Deuxième tercet : La poésie se voit ici libératrice des maux de Gérard de Nerval. Il a accepté son
désespoir et utilise le lyrisme pour tenter d’évacuer la douleur qui vit.

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