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Le Malade Imaginaire : Spectacle et Comédie

Lecture Linéaire 1 – 6/20

Acte II Sc. 5 – Molière


 Jean-Baptiste Poquelin, connue par le nom Molière, est un des plus grands dramaturges du
e
XVII siècle, associé au classicisme, né en 1622 et mort en 1673. Il s’est tourné vers le théâtre en
fondant sa troupe « l’illustre Théâtre » et a inventé la comédie-ballet, un genre où l’on retrouve des
intermèdes dansés et chantés et qui porte intérêts majeurs aux costumes, décors, musique on parle
alors d’un art total. Il a vécu sous le règne de Louis XIV à qui l’art est très important pendant sa
monarchie absolue.
 Molière fait la satire de la médecine dans plusieurs de ses pièces en déguisant un valet en
médecin. C’est le même cas dans sa comédie ballet Le Malade Imaginaire en 3 actes et en prose,
écrit en 1673, où ce sont des vrais médecins qu’il fait entrer en scène au chevet d’Argan, tout en
pratiquant tous genres de comédies de la farce à la comédie de caractère.
Cet extrait met en scène Argan, un hypocondriaque qui souhaite marier sa fille à un
médecin dans le but d’avoir un pour pouvoir le surveiller. Pour cela, il choisit Thomas Diafoirus, le
fils de Monsieur Diafoirus et neveu de Monsieur Purgon, son médecin personnel. Dans l’acte II
scène 5, M. Diafoirus et son fils viennent rencontrer Argan et Angélique.
Pb : Comment cet extrait permet-il à Molière de dresser la satire des médecins et de la
médecine en utilisant le comique et le portrait comique de Thomas Diafoirus fait ?
(Lecture)
Nous pouvons distinguer 3 mouvements
- Présentation comique de Thomas Diafoirus au père
- Présentation de Thomas Diafoirus à Angélique
- Le ridicule du Thomas souligné par d’autre personnage

Le nom « Diafoirus » interpelle dès le début, il combine le préfixe grec « dia- » et le suffixe latin
« -us » et le mot français « foire » qui veut dire « diarrhée », est un étrange combiné qui souligne le
ridicule du personnage.
 1e mvt : Présentation comique de Thomas Diafoirus au père
- La scène commence par un comique de geste dès la première réplique : M. Diafoirus infantilise son
fils en lui indiquant tout ce qu’il doit faire par des impératifs « avancez », « Faites » et ses
approbations « oui », « oui, oui » montre son agacement face à l’attitude de son fils placé en
infériorité par rapport à son père.
- Le fils est immédiatement présenté comme un personnage idiot par la didascalie « un grand benêt
[…] qui fait toutes choses des mauvaises grâce » qui permet d’apporter des précisions sur l’attitude
de Thomas.
- L’interrogation directe « N'est-ce pas par le père qu'il convient commencer ? » révèle une
méconnaissance des usages et montre qu’il demande sans cesse l'approbation de son père qui a dû lui
préciser qu’il « conv[enai]t [de] commencer […] par le père », ce qui souligne un manque de
confiance en lui dans cette situation et dresse un portrait caricatural ce qui a pour effet de rendre la
scène comique.
- Comique de parodie du langage précieux avec une hyperbole et une gradation « Monsieur, je viens
saluer, reconnaître, chérir et révérer » qui ont pour but de flatter Argan par ces louages.
- Puis on retrouve des antithèses à répétition lorsqu’il oppose son père à son beau-père pour montrer
la supériorité du second sur le premier « par nécessité/par grâce », « ouvrage de son corps/ouvrage de
Le Malade Imaginaire : Spectacle et Comédie
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votre volonté », « spirituelles/corporelles » + périphrase, il utilise « second père » pour dire « beau-
père »
- Molière joue aussi sur les énumérations, la répétition et les gradations ascendantes « saluer » «
reconnaître » et « chérir » ; « très humble » « très obéissant » et « très fidèle » consacrée au
compliment adressé au père dont Thomas Diafoirus le propose sous la forme d'une parodie.
- Remarques ironiques de Toinette qui parle peu mais souligne quand même le ridicule du
personnage « vive les collèges d'où l'on sort si habile homme » qui souligne le décalage entre les
beaux discours et la prétendue science, et sa situation de prétendant.
- La maladresse de Thomas est ainsi suggérée à travers l'image de l'élève qui a encore besoin de son
père ainsi que la question « Cela a t'-il bien été mon père ? » qui accentue cette maladresse.
 La formule finale conventionnelle vient parachever le manque général d'authenticité de l'éloge
de Thomas. La réplique prononcée d'une traite, sans respiration, sonne comme une mauvaise
récitation apprise par cœur sans être comprise qui manque de spontanéité et de naturel. Cela se répète
encore une fois dans le deuxième mouvement qui semble trop formel pour être sincère et trop
répétitif pour être intelligent.

 2e mvt : Présentation de Thomas Diafoirus à Angélique


- Les présentations s'ouvrent sur un quiproquo car Thomas fait l'éloge de sa future belle-mère «
Madame c'est avec justice que le ciel vous a concédé le nom de belle-mère » qui souligne le peu
d’implications dont Thomas fait part et montre bien qu’il s’agit d’un mariage arrangé.
- Puis l’intervention antithétique d’Argan « Ce n’est pas ma femme, c’est ma fille à qui vous parlez »
est comique car il coupe dans son élan Thomas et remet les choses à leur place.
- La réponse de Thomas « Où donc est-elle ? » se révèle impoli et est comique car malgré que
Angélique sa futur femme soit devant lui il préfère suivre le protocole et voir sa belle-mère. Cette
réponse montre encore une fois le peu d'intérêt qu’il porte à sa future femme c’est une satire du
mariage arrangé.
- La question « Attendrai-je, mon père, qu’elle soit venue ? » de Thomas à son père montre que
Thomas est présent juste parce que son père lui a demandé, on peut le comparer à sa marionnette.
- L’éloge est truffé de clichés de la poésie amoureuse, donc des formules creuses, aucunement
sincères. Pour commencer, on retrouve une référence à l'Antiquité « la statue de Memnon », puis à la
science avec les « naturalistes » « l'héliotrope » qui est le nom savant du tournesol ce qui entraîne un
lyrisme comique
- On retrouve une périphrase « astre du jour » pour soleil. Une métaphore qui compare la femme
avec « un soleil » et « ses yeux » à des « astres ».
- On retrouve aussi le vocabulaire de la religion qui assimile l'aimée à une déesse, « autels de vos
charmes » et « offrande ». Angélique est désignée de manière métonymique par l'expression « vos
beautés ». Son vocabulaire est précieux et son discours rempli d'hyperboles et de superlatifs.
- La fin de sa tirade « votre très humble, très obéissant et très fidèle serviteur, et mari » on est dans le
registre parodique de compliments et maniérisme amoureux précieux.
Le compliment à Angélique est construit sur le même moule que le premier compliment qui
relève de la bévue impardonnable, ce qui décrédibilise définitivement Thomas qui adopte un
comportement caricatural et devient un « fâcheux ». Il est incapable d'agir sans le secours de
quelqu’un et son éloge est une espèce de galimatias pédant, presque incompréhensible et ridicule.
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 3e mvt : Le ridicule du Thomas souligné par d’autres personnages


- Par la réaction de Toinette, la didascalie « en le raillant » et le pronom « on » généraliste, montrent
assez le point de vue de Toinette. Elle feint d'encenser Thomas Diafoirus pour mieux le ridiculiser.
- Dans l’expression prononcé « Voilà ce que c’est que d’étudier ! on apprend à dire de belles choses.
» Toinette souligne le ridicule du personnage. Et A la fin de sa déclaration, Thomas se retrouve de
nouveau assimilé à un élève qui apprend « de belles choses ».
- On note que le bon sens de Toinette porté par la simplicité de son vocabulaire, qui contraste avec le
discours pompeux et creux de Thomas, ne prouve que l'intelligence. Et par la réaction de Cléante, il
se révèle malin. Il fait preuve de déférence mais montre aussi un certain mordant ironique.
- Par contre la réaction d'Argan fait preuve de la naïveté. Il croit Toinette sincère et réagit
positivement à son propos.

Pour conclure dans ce passage Molière utilise Thomas Diafoirus comme exemple pour faire le
satire des médecins en mettant en valeur le peu d'intelligence dont fait preuve Thomas il dresse de lui
un portrait comique et dégradant loin de l’image que l’on se fait d’un médecin. Ce passage montre
aussi que les médecins sont habiles à tromper car le père de Thomas fait passer son fils pour un génie
alors qu’il n’en est pas un.
La scène suivante celle de l’acte II scène 6 poursuit ce travail de satire de la médecine. On peut
s’intéresser aussi à une autre œuvre de Molière, notamment Le Médecin malgré lui, et plus
précisément avec le personnage de Sganarelle, on pourrait penser que n'importe qui pourrait se faire
passer pour un médecin renommé seulement en ayant l'impression de savoir en quoi on parle car les
patients se laissent duper facilement.

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