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- Le titre « L’Albatros » (GN ; art. définie + nom) se remarque par son article défini « L’» qui nous
indique un oiseau, certes, mais un oiseau bien identifié dans l’esprit du poète, qui a une valeur
symbolique. Le titre contient une idée de dualité, d'opposition, voire de contradiction dont « alba »
en latin = blanche et « ater » en latin = sombre, noir // triste, malheureux
1e mvt (strophe 1) : La description de l'oiseau dans l’azur
- La première strophe est constituée d'une seule phrase ample, par plusieurs enjambements, pour
mimer la grandeur et la majesté de l'oiseau en vol. L'allitération en [v] et l’assonance en [an] évoque
le vol de l'oiseau, sa beauté et sa grâce dans les airs au-dessus des hommes.
- L'adverbe « souvent » qui ouvre le poème, marque par la répétition, et le présent qui le suit «
prennent » (v.2), donne à la narration une allure de vérité générale.
- Le champ lexical du monde marin avec « hommes d’équipage » (v.1), « albatros » (v.2), « oiseaux
des mers » (v.2), « le navire » (v.4), « les planches » (v.5), « avirons » (v.8), « tempête » (v.14), et
les rimes en « mers » (v.2), « amers » (v.4), nous rappelle d’un milieu maritime.
-Les périphrases mélioratives, « vastes oiseaux des mers » (v.2), « rois de l’azur » (v.6) nous montre
la grandeur et la majesté des albatros. Et l’épithète « vastes » souligne l’envergure exceptionnelle de
cet oiseau, mais, par hypallage « vastes oiseau des mers » (v.2) elle peut aussi suggérer sa symbiose
avec l’immensité des espaces qu’il parcourt.
- Les périphrases « vastes oiseaux des mers » (v.2) « indolents compagnons de voyage » (v.3) ont
toutes une valeur emphatique : c'est tout l'aspect majestueux et souverain de l’albatros qui est
déployé.
- L'expression « indolents compagnons de voyage » (v.3) connote le calme et la complicité de
l'oiseau, et met en évidence l'injustice du sort que lui réservent « les hommes d'équipage ».
- Par l’expression « les hommes d’équipage » (v.1) les marins sont peu décrits, l’accent est mis sur
une communauté et peut renvoyer à la société
Les Fleurs Du Mal - Alchimie poétique : La Boue et L’Or
Lecture Linéaire 3 – 13/20
-Le motif de cette capture, « pour s’amuser », témoigne de la cruauté des marins qui s’exerce
fréquemment » mais le CCB indique le jeu, c'est un jeu pour les marins qui cherchent à passer le
temps.
- Après les 3 premiers alexandrins positifs, le quatrième fait une chute négative avec « gouffres
amers ». Un jeu sur le sens de l'amertume de la mer, concrète et abstraite (lieu de torture d'un
innocent) ; quant au gouffre, il reprend l'image traditionnelle de l'abîme des flots célébré ; au sens
abstrait, la chute morale de ces marins indignes d'agir comme ils le font.
Pourtant cet être sublime présente une image radicalement opposée une fois posé au sol. Il
perd progressivement de sa beauté devant les marins qui représentent la société
2e mvt (strophe 2-3) : La description de l'oiseau tourné en dérision par les hommes sur
terre.
-L’action est dramatisée par le circonstant « A peine » (v.4) qui accent est mis d’abord sur le
caractère soudain de la transformation.
- La métonymie « les planches » évoque le bateau, mais peut aussi évoquer la scène de théâtre ce qui
pousse à penser que l'albatros fait le spectacle et divertit les hommes.
- Les verbes d’actions « agace » (v.11), « mime » (v.12) montre la cruauté des marins lorsqu’il
capturent les albatros. Ces verbes montre que les marins dominent la situation.
- L’adverbe de temps « souvent » (v.1) montre que les marins ont déjà capturer des albatros puisque
ça les amusent, cela montre que c’est une action qu’il répètent.
La transformation des albatros.
- Les antithèses multiples entre leur vol et lorsqu’ils sont sur le sol « rois de l’azur / maladroits et
honteux », « voyageur ailé / gauche et veule », « naguère si beau / comique et laid », marque un
contraste qui s'opère dans un seul être : entre la majesté de l’albatros lorsqu’il est dans les airs et la
description péjorative lorsqu’il est aux sols.
- L’assonance en [eu] prend place, met en valeurs la plainte des albatros et renforcer l'aspect ridicule
de l'oiseau marqué par l'adverbe « piteusement » (v.7).
- L'oxymore « l'infirme qui volait » (v.12) désigne l'albatros pris entre la liberté et la soumission.
- L’opposition entre les qualificatifs mélioratifs « ailé » (v. 9) « beau » (v.10) et dépréciatifs « gauche
et veule » (v.9) « comique et laid » (v.10), voire antithétiques « beau »/« laid » fait sentir le tragique
de la condition de l’oiseau.
- Les adjectifs péjoratifs qui fonctionnent par pairs coordonnées : « maladroits et honteux » (v.6), «
gauche et veule » (v.9), « comique et laid » (v.10) insistent sur la médiocrité des albatros.
Progressivement l'oiseau se rapproche du poète et l'allégorie devient visible. L'albatros est
une figure du poète et de sa condition d'artiste, homme parmi les autres hommes.
- Ainsi que les personnifications « roi » (v.6) « prince » (13) et les sentiments humains « indolents »
(v.3), « maladroit » (v.6), « honteux » (v.6).
L’albatros et le poète sont inadaptés et exclus.
- L'expression « hante la tempête » (v.14) fait référence aux airs où le poète est confronté aux
rudesses de la vie. Mais aussi signifie que le poète connaît une exaltation d’ordre spirituel qui le rend
supérieur au commun des mortels
- L’hyperbole « exilé sur le sol » (v.15) montre l’exclusion du poète.
- La métaphore filée du poète et de l’oiseau « ses ailes de géant l’empêchent de marcher » (v.16)
montre l’inadaptation, le poète est incapable de marcher, de s’adapter à la médiocrité.
- L’antithèse entre la hauteur et le monde réel, le sol « hante la tempête et se rit de l’archer / sur le sol
au milieu des huées » montre la moquerie et l’incompréhension.
- Les termes qui rimes « nuées » (v.13) /« huées » (v.15) dévoile une grande violence des hommes
qui se moquent de lui. Le « Poète » incompris est victime des « huées », terme diamétralement
opposé à l’image poétique des « nuées ».
- Le poème se termine par un verbe négatif « Ses ailes de géant l’empêchent de marcher » le
poète/oiseau n'a pas sa place parmi les hommes.
Pour conclure, dans ce texte Baudelaire nous montre la place du poète dans la société qu’il
compare à un albatros, majestueux dans le ciel qui est son élément (puisque c’est un oiseau), mais
médiocre sur terre, entouré d’hommes. On peut donc voir dans le poème le « Spleen » que cet état de
mélancolie profonde regroupe les souffrances physique et morale. Le poète ne peut pas vivre parmi
les hommes sur la terre il ne brille pas autant que lorsqu'il crée. Il est en relation avec le monde divin,
dans les airs où il est au-dessus des hommes et ne craint plus rien.
Ce poème peut nous faire penser à un autre poème du recueil de poèmes, Les Fleurs du Mal
qui est « le cygne » dans lequel un cygne se retrouve englouti dans la foule des rues de Paris. Ici
aussi on retrouve le poète et le cygne qui sont majestueux mais ridicule et incompris une fois au sol,
parmi les hommes. Alfred de Musset avait lui aussi déjà exploité cette image du poète/oiseau avec
l'allégorie du Pélican, extrait de La Nuit de Mai, qui décrit un pélican qui revenu bredouille de sa
pêche, s'ouvre la poitrine pour nourrir ses petits.