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Question 79 : Les puissances intellectuelles

Il faut étudier ensuite les puissances intellectuelles. On y pose treize questions. 1. L’intellect est-il une puissance de l’âme ou
bien l’essence de l’âme ? 2. S’il est une puissance, est-il une puissance passive ? 3. S’il est une puissance passive, doit-on
poser un intellect agent ? 4. Ce dernier fait-il partie de l’âme ? 5. Y a-t-il un seul intellect agent pour tous ? 6. Y a-t-il une
mémoire dans l’intellect ? 7. Est-elle une puissance autre que l’intellect ? 8. La raison est-elle une puissance autre que
l’intellect ? 9. La raison supérieure et la raison inférieure sont-elles des puissances différentes ? 10. L’intelligence est-elle une
autre puissance, en plus de l’intellect ? 11. L’intellect spéculatif et l’intellect pratique sont-ils des puissances différentes ? 12.
Le sens moral est-il une puissance de la partie intellective ? 13. La conscience est-elle une puissance de la partie
intellective ?

Q 79 A 2 : L’intellect est-il une puissance passive ?


ARGUMENTS (textes de la ST traduit du latin par FXP)
1. Il semble que l’intellect ne soit pas une puissance passive. En effet, quelque chose pâtit en raison
de la matière, mais agit en raison de la forme. Or le pouvoir intellectif est consécutif à l’immatérialité
de la substance intelligente. Il semble donc que l’intellect ne soit pas un pouvoir passif.

SOLUTIONS
1. Cette objection procède des deux premiers modes de passion, qui sont propres à la matière
première. Or le troisième mode de la passion se trouve en tout ce qui existe en puissance et passe en
acte.

2. La puissance intellective est incorruptible, comme on l’a dit plus haut. Or « l’intellect, s’il est passif,
est corruptible » comme dit le troisième livre De l’âme. La puissance intellective n’est donc pas
passive.

SOLUTIONS
2. L’intellect passif, certains l’appellent « appétit sensitif », en lequel se trouvent les passions de
l’âme, et qui, au premier livre de l’Ethique, est aussi appelé « rationnel par participation », parce qu’il
obéit à la raison. Pour d’autres, l’intellect passif est dit « vertu cogitative », qu’on appelle aussi «
raison particulière ». En l’un et l’autre sens, « passif » peut s’entendre selon les deux premiers modes
de la passion, dans la mesure où on l’appelle « intellect » est l’acte d’un organe corporel. Mais
l’intellect qui est en puissance à l’égard des intelligibles, et que pour cette raison Aristote dénomme «
intellect possible », n’est passif que selon le troisième mode,

3. « L’agent est plus noble que le patient », comme le disent Augustin au douzième livre du
Commentaire littéral de la Genèse et Aristote au troisième livre De l’âme. Or toutes les puissances de
la partie végétative sont actives, alors qu’elles sont les plus infimes puissances de l’âme. A plus forte
raison, les puissances intellectives, qui sont les plus hautes, sont-elles toutes actives.

SOLUTIONS
3. L’agent est plus noble que le patient à condition que l’action ou la passion se rapportent au même
fait ; mais ce n’est pas toujours le cas, lorsqu’il s’agit de faits différents. Or l’intellect est une faculté
passive par rapport à tout l’étant universel, alors que le végétatif est actif par rapport à un étant
particulier, à savoir le corps même qui est conjoint. Par suite, rien n’empêche qu’un principe passif
comme celui-là soit plus noble qu’un principe actif comme celui-ci.

EN SENS CONTRAIRE
Le philosophe dit au 3è livre De l’âme qu’« intelliger est une certaine manière de pâtir ».

REPONSE
« Pâtir 1» s’entend de trois manières.

1. Au sens le plus propre, quand quelque chose perd ce qui lui convient, ou par nature ou par
inclination propre ; par exemple quand l’eau perd sa froidure lorsqu’on la chauffe, ou quand un
homme tombe malade ou devient triste.

2. En un sens moins propre, on dit que quelqu’un pâtit quand lui est enlevé quelque chose, qui lui
convient ou qui ne lui convient pas. Dans ce sens, on dit que non seulement de celui qui tombe
malade qu’il pâtit, mais également de celui qui revient à la santé, non seulement de celui qui devient
triste, mais aussi de celui qui devient joyeux, ou de quelque manière dont on est modifié ou changé.

3. De manière large, on dit pâtir simplement quand ce qui est en puissance à l’égard de quelque
chose reçoit ce à l’égard de quoi il était en puissance, sans que rien ne lui soit enlevé. Dans ce sens,
tout ce qui passe de la puissance à l’acte peut être dit « pâtir », même lorsqu’il en acquiert une
perfection. Et c’est de cette manière que, chez nous, intelliger c’est pâtir. En voici la raison. Comme on
l’a dit plus haut, l’intellect pose une opération qui porte sur l’étant dans son universalité. Pour savoir
si l’intellect est en acte ou en puissance, on peut donc observer le rapport de l’intellect à l’étant
universel. Il y a en effet un intellect qui, par rapport à l’étant universel, est comme l’acte de tout
l’étant : c’est l’intellect divin, qui est l’essence de Dieu, en laquelle tout étant préexiste en origine et
virtuellement, comme en sa cause première. C’est pourquoi l’intellect divin n’est pas en puissance,
mais il est acte pur. Or aucun intellect créé ne peut être l’acte de tout l’étant universel, car il faudrait
alors qu’il fût un étant infini. C’est pourquoi tout intellect créé, du seul fait qu’il est, n’est pas l’acte de
tous les intelligibles, mais il est avec eux dans le rapport de la puissance à l’acte. Or il y a deux
manières pour la puissance de se rapporter à l’acte. Il y a en effet une puissance qui est toujours
perfectionnée par l’acte, comme nous l’avons dit de la matière des corps célestes. Or Et il y a une
puissance qui n’est pas toujours en acte, mais qui progresse de la puissance à l’acte, comme dans
les réalités soumises à la génération et à la corruption. Par suite, l’intellect angélique est toujours en
acte ses intelligibles, en raison de sa proximité à l’intellect premier qui est acte pur, comme on vient
de le dire. Mais l’intellect humain, infime dans la hiérarchie des intellects et le plus éloigné de la
perfection de l’intellect divin, est en puissance à l’égard des intelligibles ; au commencement il est «
comme une tablette sur laquelle rien n’est écrit », comme le dit le philosophe au troisième livre De
l’âme. Cela apparaît manifestement dans le fait que, au commencement, nous intelligeons seulement
en puissance, après quoi nous intelligeons en acte. Il apparaît ainsi que, pour nous, intelliger est une
certaine manière de pâtir, dans le troisième sens du terme « passion ». Par conséquent, l’intellect est
une puissance passive.

1
En philosophie, le mot "pâtir" signifie subir ou recevoir passivement une impression, une sensation ou une
influence de l'extérieur. Cela fait référence au fait d'être affecté ou d'éprouver quelque chose sans
nécessairement agir activement. C'est un concept souvent utilisé pour discuter des processus cognitifs, des
émotions et des expériences sensorielles, notamment dans le contexte de la philosophie de l'esprit et de la
perception.
Analyse extraordinaire d’Enza Donatsch la star de la compréhension de la philo mais en puissance
uniquement.

Article 2 : L’intellect est-il une puissance passive ?

Réponse à l’article 2 en gros résumé : L'intellect est considéré comme une puissance passive parce qu'il passe de la potentialité (En
puissance) à l’action (l’acte) lorsqu'il comprend les concepts universels.

Réponse : Il faut distinguer les 3 sens de « Pâtir », car seulement un se réfère à notre intellect :
1) perd ce qui convenait : l’eau qu’on chauffe, la femme qui devient triste ou malade.
2) ôte qqch qui convient ou ne convient pas : la femme devient triste, puis heureuse ou guérie.
3) De manière large : Cela se produit lorsque quelque chose qui avait le potentiel de devenir réel acquiert cette
réalité, sans que rien ne lui soit enlevé. Par exemple, lorsque quelque chose passe d’un potentiel de…. à l’action
de…. Pour l’intellect cela se traduit par le passage de l’incompréhension à la compréhension. Ce qui ne change
rien l’état qui convient
Il explique ensuite que l'intellect humain, au départ, est comme une "tablette vide". Vous ne comprenez pas tout
immédiatement. On passe de la possibilité de comprendre à la réalité de la compréhension. En résumé, l'intellect
humain passe de ne rien comprendre à tout comprendre, et c'est ce passage qui est considéré comme une sorte
de "pâtir», numéro 3.
L’intellect Divin est en act pur. Il est l’essence de Dieu en quoi tout préexiste. Donc il est la cause première
universelle et infinie. Il lui est impossible de ne pas faire. (Donc d’être en puissance de..) Comme l’étant n’est pas
universel et infini, et qu’il EST (exister) il ne peut être en rapport avec les autres intellects que en passant de la
puissance à l’acte. L’ange par sa proximité avec Dieu est lui aussi act pur. Nous par cet éloignement d’avec Dieu,
sommes moindre, n’avons pas la science infuse et devons apprendre. A la naissance, notre intellect est donc
uniquement en puissance, la tablette vide. Donc l’intellect est une puissance passive.
Article 3 : Faut-il poser un intellect agent ?

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