Vous êtes sur la page 1sur 5

Faculté des lettres et des sciences humaines Chouaîb Doukkali

Département de langue et littérature française

Master : culture et littérature francophone moderne

Module : la littérature antillaise

Analyse du conte « La Mare aux guenons »

du recueil « Il n’a y a pas de petite querelle » d’Amadou Hampâté Bâ

Encadré par : Monsieur Mostafa Mostadi Réalisé par : Razzouki Aziza

Année universitaire : 2023 – 2024


Introduction :

Étant un continent de l’oralité, la parole en Afrique est sacrée, la parole fait l’homme, et
permet la transmission des valeurs et des codes qui garantissent le maintien de la communauté
en harmonie et en équilibre. Ayant conscient de la richesse de sa culture orale l’écrivain
malien Hampâté Bâ se donne pour mission la transmission de ce savoir ancestral oral dans
une langue écrite étrangère. Parmi ses créations littéraires se range le conte un genre littéraire
qui était purement oral pendant la période précoloniale. « Il n’a pas de petites querelles » un
recueil de contes à visée didactique ayant pour intérêt la critique des mœurs et des vices de la
société d’une manière symbolique, le texte qui nous est soumis à l’étude est un extrait du
conte « la Mare aux guenons » nous allons voir comment ce conte est structuré et nous allons
essayer d’interpréter sa portée symbolique.

 Introduction du cadre du conte :

Le passage de l’oral à l’écrit dans tout genre littéraire laisse des marques d’oralité. En
effet, le conte qui était jadis conté par les griots continu de garder même en écrit les traces de
l’oralité. L’ouverture de ce conte qui débute en présentant un ancien royaume peul avec une
forêt et un lac mystérieux en est la preuve. Ainsi il capte l’attention du lecteur et
contextualise les propos du conteur. La narration donc suit un cheminement bien structuré du
général au particulier (royaume, forêt puis, lac) ce qui fait allusion à la forme orale du conte
qui, sans un fil conducteur dans les événements un conteur perd l’attention de son auditoire.

D’autre part les adverbes d’intensité fort présent dans ce premier paragraphe « très-
extrêmement- assez » permet de créer une atmosphère visuelle et sensorielle dans le conte
tout en ajoutant une nuance de mystère et d’importance aux éléments évoqués « royaume, lac,
liane) pour ainsi conquérir l’imaginaire du lecteur.

 Le lac mystérieux symbole de vérité :

Quoi que situé au fond d’une forêt dense, les eaux du lac préservent toujours leur
pureté, et leur clarté, mêmes les débris jetés par le vent ne parviennent pas à les polluer tout
comme la vérité qui a tendance à être toujours cachée, mais elle ne perd en rien de son éclat
et de sa clarté et aucun mensonge ou dérision ne peut la modifier. L’impossibilité d’atteindre
le fond du lac symbolise le caractère insaisissable de la vérité qui ne peut se prêtre à une
compréhension totale, elle reste toujours mystérieuse et évasive.
Ce caractère insaisissable de la vérité est aussi met en avant par le fait que les eaux du
lac transforment tous ce qui tombe en elles. Cela laisse dire que la vérité à tendance à changer
et à évoluer en fonction des conditions et des aspects multiples de la vie. La vérité peut être
plurielle et peut être aussi subjective, mais elle reste toujours mystérieuse et inaccessible
pour les individus.

 La querelle des singes ou conflit autour de la vérité :

Les querelles entre les guenons et les singes sur l’origine du lac et la nature de ses eaux
renvoient aux conflits des hommes qui génèrent de leurs différentes interprétations de la
vérité. Celle-ci revêt un caractère relatif puisque chacun possède sa propre vision et sa propre
perception des choses. Ceci renvoie aussi à ces esprits fermés, à ces individus intolérants et
dogmatiques qui refusent la divergence d’opinions dans la quête de la vérité. Ces singes qui se
battent dans la forêt renvoient aussi au manque de compréhension entre les individus, et entre
les groupes sociaux chacun se croit avoir raison au détriment de l’autre. Ce sont ces
personnes psychorigides qui souhaitent tout contrôler et n’arrivent pas à s’ouvrir sur l’autre.

L’angoisse et la rage engendrés par ces querelles les empêchent à vivre sereinement et
à voir la vérité, parce que cette dernière ne peut être perceptible qu’à ceux qui sont sages et
vivant en harmonie.

 Le pélican symbole d’harmonie, et de tolérance :

À l’encontre de la folie, l’aveuglement, et l’intolérance des singes et des guenons, on


trouve l’harmonie, et la tolérance du pélican qui en nageant paisiblement sur la surface du lac
représente les bon-vivants qui sont capables de vivre en harmonie au sein de la société.
Étant capable de vivre « dans les aires, à la surface de la terre, sur les eaux et dans les
profondeurs marines » on peut dire que le pélican incarne la diversité et la capacité de
s’adapter à des milieux différents. Sa présence suggère que la vérité nécessite la capacité
d’apprécier la diversité d’opinions. Dans le conte il symbolise la tolérance et la
compréhension mutuelle au sein de la communauté. Comme chez Musset le pélican peut être
aussi la métaphore de l’artiste souvent un être, serein, tolèrent et tranquille symbole de
l’amour et de la paix même dans les lieux les plus tumultueux.

Le pélican comme chez Baudelaire dans l’Albatros peut être la métaphore du poète, un
homme éclairé, mal compris et jugé par une société qui ne saisit pas toujours la profondeur
de sa créativité, tout comme le pélican qui une fois sur terre est moqué et ridiculisé par les
singes et les guenons .

 La sagesse et l’éloquence de la grue -trompette :

Ayant le dernier à prendre la parole, ce personnage animalier est central et influent dans
le développement du récit puisque c’est lui qui délivre les enseignements moraux, les valeurs
et les principes que le conte cherche à transmettre. Pour attirer l’attention des autres
personnages, cet oiseau chanteur introduit son discours par un chant mélodieux afin de les
inviter à écouter attentivement. Le chant peut être aussi un moyen qui encourage la diversité
et la compréhension mutuelle entre différentes ethnies et groupes sociaux, puisque la musique
est une langue universelle qui transcende les barrières linguistiques .Cela souligne aussi
l’importance et l’universalité du discours qui s’apprête à tenir. Sa description physique ne fait
qu’accentuer sa différence et son importance par rapport aux autres personnages puisque c’est
lui le guide qui va élever et éclairer les consciences des guenons et des singes tout en les
invitant à adopter une attitude plus ouverte et tolérante vis-à-vis des autres.

Comme les personnes qui guident les autres sont dotées d’une sagesse et une
connaissance étendue la gue-trompette n’en manque point. En effet son expérience du voyage
montre une accumulation des connaissances qui provient d’exploration et d’observation des
monts, vallées et rivières du monde. Sa référence aux tribus d’Israël suggère aussi une
connaissance de différentes cultures. La mention de ces tribus qui sont souvent associées à la
sagesse et à la connaissance dans la tradition biblique ne fait que renforcer la sagesse et le
savoir étendu de la grue trompette qui se présente comme un membre de cette race.

Au langage poétique qui rend le discours plus mémorable et expressif s’ajoute


l’éloquence du oiseau dont le discours est conçu de manière à convaincre et à enseigner. Elle
critique l’intolérance des singes et des guenons tout en offrant des arguments persuasifs en
faveur de la diversité.

En effet, la vérité réside dans la diversité, les eaux du lac ne reflètent pas uniquement
une seule image (une seule vérité) mais elles sont le reflet des images infinies et variés en
effet ; le conte nous enseigne que l’idéale de chacun ne peut prétendre être le seule où le plus
parfait. La profondeur du lac suggère que Chacun doit trouver son harmonie intérieure et
celle-ci réside dans l’acceptation de la diversité et dans la coexistence pacifique. En d’autres
termes la véritable profondeur et la paix résident dans l’acceptation des différences plutôt que
dans les conflits superficielles. Donc la grue trompette est un personnage qui promeut la paix
et l’harmonie en persuadant les singes et les guenons à cesser leurs querelles et à embrasser la
diversité.

Conclusion :

D’après ce conte didactique, l’auteur met en avant l’importance de la tolérance face


aux différences, l’acceptation de la diversité, la compréhension mutuelle, ainsi que la
recherche de la vérité au- delà des querelles superficielles .c’est cette ensemble qui mène vers
la paix et la coexistence harmonieuse et pacifique entre les groupes sociaux. Le conte nous
enseigne que la véritable compréhension de la vie émerge de la tolérance, de l’ouverture
d’esprits et la reconnaissance de la richesse qui en découle de la diversité.

Vous aimerez peut-être aussi