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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports

pédagogiques
Belinda Lavieu-Gwozdz, Thierry Pagnier
Dans Le français aujourd'hui 2022/3 (N° 218), pages 57 à 70
Éditions Armand Colin
ISSN 0184-7732
ISBN 9782200934323
DOI 10.3917/lfa.218.0057
© Armand Colin | Téléchargé le 21/11/2023 sur www.cairn.info via Université Hassan II (IP: 105.66.135.142)

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L’IMPLICITE : OBJET DE
FORMATION

Belinda LAVIEU-GWOZDZ &


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Thierry PAGNIER

Graziella DELEUZE

Natacha ESPINOSA &


Cécile VALLÉE

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L’IMPLICITE DES VISÉES


D’APPRENTISSAGE
DANS LES SUPPORTS PÉDAGOGIQUES
Belinda LAVIEU-GWOZDZ
Université de Paris-Est Créteil
INSPÉ de Créteil
Laboratoire CIRCEFT-ESCOL
(UR 4384 - Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis)

Thierry PAGNIER
Université de Paris-Est Créteil
INSPÉ de Créteil
Laboratoire CIRCEFT-ESCOL
(UR 4384 - Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis)
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Sans que cela remette en cause la nécessité de changements importants
dans la conduite de l’apprentissage du déchiffrage, les résultats de l’enquête
PIRLS (2016) montrent, avec d’autres1 , que la compréhension de l’écrit
doit faire l’objet, en France, d’une attention nettement plus soutenue. Alors
qu’au milieu des années 1980, la notion d’implicite dort tranquillement
dans « les plis de ce qui se dit ou s’écrit » (Dispy 2011 : 15) – et son sommeil
est si profond que les enseignants vivent dans l’ignorance du mot/de la
chose –, le ministère de l’Éducation nationale publie en 2020 le guide Pour
enseigner la lecture et l’écriture au CP qui précise comment les apprentissages
doivent être conduits pour assurer la maitrise des fondamentaux du lire et
écrire par tous les élèves. Après consultation de ce guide, nous recensons
douze occurrences du terme implicite 2 qui revêt des acceptions différentes,
puisqu’il est utilisé tantôt comme nom, tantôt comme adjectif. Ceci rejoint
les constats de C. Delarue-Breton (2021) qui souligne la polysémie du terme
explicite dans les programmes de 2015. Désormais, le terme implicite3 n’est
plus passé sous silence sans pour autant qu’il en soit proposé une définition.

1. Selon l’enquête internationale PISA, 150 000 jeunes en France se retrouvent à 15 ans
« en grande difficulté de compréhension de l’écrit. »
2. À titre d’exemples : « les informations implicites », « des textes qui contiennent des
inférences, des implicites », « pour pouvoir saisir des implicites », « l’acquisition implicite du
vocabulaire », « savoir distinguer ce qui est dit (l’explicite) et ce qui est implicite », « le travail
sur l’implicite », « des informations implicites (processus inférentiels) ».
3. Le terme est utilisé avant 2020 dans les textes officiels. On le trouve en 1992 et dans
les programmes de 1995, p. 36, pour le cycle des approfondissements, mais il n’est jamais
explicité.

rticle on line

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

Après un bref inventaire des définitions du mot implicite disponibles


dans la littérature scientifique (linguistes, didacticiens et pédagogues),
dans la lignée des travaux d’É. Bautier (2009, 2012) et plus largement
de l’équipe ESCOL4 du CIRCEFT, notre attention se porte sur le travail
interprétatif que les élèves déploient pour se saisir des situations scolaires et
plus spécifiquement des supports d’apprentissages qui leurs sont proposés.
Nous abordons donc l’analyse de l’implicite dans un support d’apprentissage
en tant qu’il répond aux standards contemporains des manuels scolaires
que l’on peut qualifier de composites5 (voir Bautier, Crinon, Marin et
Delarue-Breton 2012 ; Bonnéry 2015). Nous mettrons en évidence les
contenus présupposés et implicites susceptibles d’être inégalement identifiés
par les élèves et nous montrerons plus spécifiquement l’implicite qui pèse sur
l’identification des contenus et des enjeux d’apprentissage, puis l’implicite
énonciatif qui traverse ce type de support et enfin les savoirs littératiés qui
sont implicitement convoqués.

Quelques apports théoriques sur l’implicite


D’après l’enquête de M. Dispy (2011) menée auprès de cinquante
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enseignants en Belgique, le concept d’implicite ne fait pas l’objet d’une
définition claire, autrement dit : lorsqu’on interroge les enseignants sur
leur manière de définir l’implicite, différents critères sont énumérés sans
qu’il y ait consensus au sein du corps enseignant. Chacun use de mots qui
entremêlent des éléments de réponse : « c’est ce qui n’est pas écrit noir sur
blanc », « c’est le non-dit », « c’est le sous-entendu », « c’est l’interprétation »,
« ce qui est suggéré par certains indices dans un texte », « c’est ce qui est
caché, détourné » (Dispy 2011 : 20).
Dans le Dictionnaire culturel en langue française (2005), l’implicite est
défini ainsi : « Qui est virtuellement contenu dans une proposition, un fait,
sans être formellement exprimé, et peut en être tiré par voie de conséquence,
par déduction ou induction ». Pour P. Charaudeau et D. Maingueneau
(2002), il arrive qu’un énoncé, en contexte communicatif, offre une « autre »
signification :
La plupart des énoncés possèdent [...], en plus de leur contenu explicite, un
ou plusieurs contenus implicites qui viennent se greffer sur le précédent,
et peuvent même le détourner à leur profit, un cas de « trope implicatif »,
c’est-à-dire lorsqu’en contexte le contenu implicite l’emporte sur le contenu
explicite. (2002 : 304)

4. Équipe « Éducation & SCOLarisation » du laboratoire CIRCEFT (Centre


Interdisciplinaire de Recherche « Culture, Éducation, Formation, Travail », UR 4384).
5. L’objet de cette contribution vise à décrire quelques éléments susceptibles de faire
problème sans revenir sur les difficultés effectives des élèves face à ce type de support, qui
ont déjà été largement démontrées par les travaux conduits au sein du CIRCEFT.

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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

L’implicite du texte ou, pour mieux dire, l’implicite du discours6 , c’est,


comme l’indique l’étymologie, ce qui est « enveloppé » (implicitus) dans le
message verbal. Ce qui, si l’on s’autorise à jouer sur les mots, réside dans les
plis de ce message.
Si pendant très longtemps, l’effort d’analyse et de recherche s’est porté du
côté du texte et de sa compréhension, nous notons, depuis une trentaine
d’années, que l’intérêt porté aux lecteurs a déplacé le problème vers
l’interprétation et sa pluralité et vers les stratégies d’interprétation7 .

L’implicite et la compréhension chez les didacticiens et les pédagogues


Les travaux de C. Tauveron (1999) ou encore ceux de J. Giasson
(1990), didacticienne pour la première et psychopédagogue pour la seconde,
s’intéressent aux traitements scolaires et aux difficultés rencontrés par les
élèves en compréhension en lecture. C. Tauveron (2001) s’intéresse aux
difficultés liées tantôt à la compréhension tantôt à l’interprétation ; les unes
comme les autres peuvent être imputables soit au lecteur soit au texte. Les
problèmes d’interprétation liés au lecteur portent sur la possibilité d’accorder
d’autres significations que celle qui est saisie dans un premier temps par le
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lecteur. Parce qu’un texte peut toujours en dire plus, il s’agit ici de la liberté
de dépasser la première compréhension. Les problèmes d’interprétation
programmés par le texte renvoient aux lieux d’imprécision du texte, aux
blancs du texte qu’il faut combler pour le comprendre. Ces difficultés
réclament du lecteur un traitement de l’incertain, un traitement qui repose
sur les droits du lecteur mais qui respecte les droits du texte. Une validation
des interprétations s’impose et repose sur des données textuelles ou des
connaissances culturelles antérieures.
Pour développer les compétences relatives au traitement de l’implicite
d’un texte, C. Tauveron (1999) propose d’offrir en lecture aux apprenants
des textes résistants. D’après elle, un texte « résistant » est : soit « réticent » :
il garde une partie de l’information et pose alors des problèmes de compré-
hension, soit « proliférant » : plusieurs pistes sont esquissées à l’intérieur de
l’œuvre ou à la fin ; ces textes posent alors des problèmes d’interprétation
(1999 : 23).
Les textes « réticents » posent délibérément des problèmes de compréhen-
sion au lecteur. Parmi les effets de réticence programmés, on peut citer
les blancs de toute nature, singulièrement ceux relatifs aux intentions des
personnages et à certains de leurs actes cruciaux, l’adoption de points de vue

6. Cf. entre autres les travaux de J.-M. Adam (1990, 1999) sur les objets textes/discours.
Les deux mots réfèrent au même objet envisagé de manières différentes. Envisager la trace
d’une production verbale en tant que texte, c’est voir ce qui fait, d’une suite de mots, un
tout de sens. Envisager la trace d’une procédure verbale en tant que discours, c’est voir ce
qui, dans ce tout de sens, renvoie à une situation de communication et ce qui peut entrainer
le succès ou l’échec, dans cette situation, de la rencontre humaine au moyen du langage.
7. Cf. entre autres les travaux de D. Bucheton (1999) et de B. Daunay (1999).

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

(insolites, pluriels et contradictoires). Les textes « proliférants », quant à eux,


disent en quelque sorte plus qu’ils ne devraient dire et posent des problèmes
d’interprétation. Ce sont des textes polysémiques, susceptibles d’une lecture
plurielle aboutissant à des compréhensions différentes ou, parce que forte-
ment symboliques, présentant plusieurs niveaux d’interprétation possibles.
L’un et l’autre demandent un traitement des informations non explicites.
Quant aux travaux de J. Giasson, ceux-ci sont davantage situés du côté de
l’apprenant et nous retiendrons que, selon cette autrice, l’inférence repose
sur « la capacité du lecteur à dépasser la compréhension littérale du texte »
(1990 : 60-61). Pour J. Giasson, tout se joue alors entre l’utilisation que
le lecteur fait du texte et l’usage qu’il fait de ses connaissances antérieures.
Quant à la capacité d’inférer, elle rappelle combien le jeune enfant opère
des inférences sur ses expériences du monde qui l’entoure. Le problème du
lecteur débutant serait de l’ordre de la démarche. J. Giasson rappelle que
l’analyse des pratiques d’enseignement montre que le questionnement de
texte porte très souvent sur le littéral au détriment d’un questionnement
portant sur les zones d’implicite.
Plus récemment, les travaux de R. Goigoux dans le cadre de la recherche
Lire et écrire (2016) soulignent que la compréhension en lecture constitue
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un enseignement complexe à mettre en œuvre, encore peu travaillé en
formation et pour lequel les outils didactiques sont récents. R. Goigoux et
alii (2016) dressent le constat suivant : il y a peu de temps globalement
alloué à la compréhension, moins de la moitié de ce temps est consacré à
des tâches individuelles, écrites qui n’ont pas d’incidence sur les progrès des
élèves. Les tâches orales portant sur l’élaboration du sens ne dépassent pas
trente minutes par semaine. Comprendre, c’est élaborer une représentation
mentale à partir de quatre compétences qui interagissent : compréhension
lexicale et linguistique, compétences stratégiques, compétences inférentielles
et référentielles, compétences d’autorégulation et de métacognition. Cette
conception de la lecture-compréhension fait consensus actuellement dans
les recherches sur l’enseignement-apprentissage de la compréhension d’un
texte.

L’implicite chez les linguistes


De nombreux auteurs comme O. Ducrot (1984), C. Kerbrat-Orecchioni
(1986), F. Recanati (2007), D. Maingueneau (1996), D. Sperber et
D. Wilson (1989), spécialistes de la langue, s’accordent à reconnaitre qu’un
énoncé peut avoir plusieurs significations selon son utilisation dans divers
contextes. En pragmatique, les travaux de C. Kerbrat-Orecchioni se sont
préoccupés de la question de l’implicite qu’elle compare à un passager
clandestin du message. Implicite, notion exploitée avant elle par O. Ducrot

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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

(1984) à qui l’on doit la distinction entre le présupposé et le sous-entendu8 .


Pour définir ce qu’est l’implicite, C. Kerbrat-Orecchioni s’appuie sur les
travaux de H.P. Grice (1979), de O. Ducrot (1972) et de R. Martin (1976) :
Les contenus implicites (présupposés et sous-entendus) ont en commun la
propriété de ne pas constituer en principe le véritable objet du dire, tandis
que les contenus explicites correspondent, en principe toujours, à l’objet
essentiel du message à transmettre ou encore sont dotés, selon la formule
de R. Posner (1982 : 2) « de la plus grande pertinence communicative ».
(1986 : 22)
Si l’implicite parait à première vue secondaire par rapport à l’explicite, les
travaux de cette linguiste complètent cette définition en montrant que le
contenu implicite peut s’ajouter comme connotation essentielle au contenu
explicite voire se substituer à ce dernier. Le traitement de l’implicite implique
dès lors un calcul interprétatif qui, tout en étant dépendant de l’énoncé, peut
dépasser celui-ci. Ces définitions sont donc proches de celles d’O. Ducrot
(1984).
Rappelons que, d’après P. Charaudeau et D. Maingueneau, les énoncés
« possèdent »9 en plus de leur contenu explicite au moins un contenu
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implicite qui vient s’ajouter au contenu explicite pouvant aller jusqu’à
le détourner. Ces chercheurs envisagent deux possibilités de traitement
correspondant à deux sortes d’implicite : la greffe et le détournement. La
greffe d’un sens sur celui qui est actualisé10 par le co-énonciateur de même
qu’il s’agit du détournement d’un sens actualisable par le co-énonciateur.

Décoder l’implicite au cœur d’un support d’apprentissage


La double page « Le Charbon, qu’est-ce que c’est ? » est extraite du manuel
Nouveau Parcours Français CE1 (2016). Il s’agit d’un manuel de français
très répandu dans les classes de cycle 2, qui vise à construire des savoirs
en français. Nous avons choisi un texte issu d’un manuel scolaire car, par
définition, le manuel doit être le plus accessible possible et donc le plus
explicite, afin que la plus grande majorité des élèves puisse s’en emparer.
Le choix d’un texte non littéraire est motivé par le fait que le texte de type
informatif vise à être le plus explicite, exhaustif et concis possible (avec le

8. Pour O. Ducrot (1984), le présupposé est de l’ordre de la linguistique ; il est donc


marqué dans la phrase ; il est un « fait de langue » porté par le locuteur. Le sous-entendu
relève de la pragmatique, il n’est donc pas marqué dans la phrase mais est un « fait de parole »
relevant de la responsabilité du destinataire.
9. C’est nous qui soulignons et qui précisons qu’un énoncé ne « contient » rien. Un énoncé
est formé de mots dont l’agencement rend possible une ou plusieurs productions de sens.
Oral ou écrit, un énoncé ne devient significatif qu’à partir du moment où il est pris en charge
par un co-énonciateur.
10. Actualisé, c’est-à-dire qui est rendu actuel. Le sens actualisé, c’est le sens que je produis,
ici et maintenant, en mettant mes ressources linguistiques au service du traitement de
l’énoncé.

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

moins de détours). L’hypothèse sous-jacente à ce choix de support est que


celui-ci vise à construire des savoirs en français, et est donc susceptible de
laisser moins de blanc à combler par son lecteur et à être le plus explicite
possible dans ce qui est attendu de l’élève que ne le serait un texte littéraire.
Cet extrait caractérisé par une forte discontinuité et une triple hétérogénéité
sémiotique, discursive et des savoirs convoqués, correspond à ce que É.
Bautier et alii nomment des « supports composites » qui nécessitent de la
part des élèves des compétences littératiées de « haut niveau » pour en assurer
la gestion (2012), c’est-à-dire pour produire les significations attendues dans
la perspective de l’apprentissage visé.
Il ne s’agit pas ici, faute de place, de proposer une analyse exhaustive de
ce support, mais de relever quelques points (nous les limiterons à trois) qui
méritent qu’on s’y attarde et qui rendent compte d’éléments implicites dans
ce qu’il faut faire avec l’écrit, c’est-à-dire avec cette double page pour des
élèves de CE1 (sans médiation pédagogique).

L’implicite des visées d’apprentissage


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Figure 1. Objectif et titre de la double page Nouveau Parcours Français
CE1, p. 76.

Malgré le titre « Le charbon, qu’est-ce que c’est ? », la fonction informative


est subordonnée à un objectif qui en modifie sensiblement la finalité et
détourne d’une lecture vraiment documentaire. Bien qu’inscrit noir sur
blanc (en l’occurrence blanc sur un bandeau rectangulaire rouge en haut de
la première page), l’enjeu d’apprentissage reste totalement implicite pour les
élèves, pour une partie des enseignants et pour une partie (non négligeable)
des formateurs d’enseignants. Il ne s’agit effectivement pas d’un texte utilisé
pour apprendre des choses sur le charbon, mais d’un texte et de documents
complémentaires (questions, jeu, schéma, dessin, etc.) dont l’enjeu est
d’apprendre aux élèves à « lire et comprendre » un texte documentaire et à
circuler dans la double page. Nous pouvons mettre en regard cet objectif
avec la progression d’ensemble du manuel qui propose pour toute l’unité 7
une réflexion sur les différents types de textes (roman, récit d’aventure,
poésie, théâtre, etc.). Néanmoins, cela n’est pas explicitement indiqué pour
les élèves. Seul l’élève/l’adulte connivent le perçoit en ayant un regard
surplombant sur ce qui fait unité dans cette section.
Sans cette conscience du savoir à construire qu’il faut garder en tête dans
chacune des activités et sans la conscience du fait que l’auteur du manuel

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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

vise à faire comprendre et apprendre quelque chose, le risque est grand pour
les élèves les moins initiés à ces évidences scolaires de passer à côté de ce qui
fait l’essentiel de la leçon et qui sera évalué. D’autant que la multiplication
de documents dans la double page peut faire craindre non seulement le
risque de « surcharge cognitive » (Verdelhan-Bourgade 2002) mais surtout
d’une sélection et d’un traitement différencié.
L’objectif figure en haut de la page de gauche dans un encadré sur
fond rouge11 . Dès le titre, la leçon est annoncée par une question : « Le
charbon, qu’est-ce que c’est ? » C’est là une donnée récurrente dans les
doubles pages de manuels contemporains. C’est par la sollicitation du
questionnement de l’élève que ce dernier est censé réaliser le cheminement
vers l’apprentissage. Le savoir n’est pas donné de façon affirmative, d’emblée,
c’est le questionnement qui prédomine. Ainsi, la double page est structurée
autour des rubriques suivantes : « J’écris pour mieux comprendre », « Je
discute. » La récurrence de ces rubriques dans chaque leçon du manuel
se veut un élément organisateur pour initier à une démarche de réflexion
dont l’acteur serait l’apprenant. Des indices suggèrent ce cheminement
intellectuel. On peut aisément penser que, pour certains élèves, ce qu’il y a
à retenir de cette double page est le petit texte que l’élève est invité à rédiger
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répondant à la question du titre « Le charbon, qu’est-ce que c’est ? » Ainsi,
à la manière des manuels d’histoires ou de sciences, ce qu’il faut retenir
seraient des connaissances sur le charbon. Or l’enjeu (didactique) est ailleurs.
Les relations logiques, « les sauts cognitifs » sont à construire et à opérer
à l’intérieur de la double page, entre les divers documents qui s’y trouvent
présentés le plus souvent de façon éclatée, délinéarisée « à la manière des
hypertextes du multimédia » (Vigier 1997 : 71).

11. Ici dans le bandeau gris « Lire et comprendre ». Il faut noter que nous avons utilisé ce
support dans nos séances de cours aux étudiants de première année se destinant au concours
de professeur des écoles (MEEF1) et du parcours de formation de formateurs (MEEF4). Le
document était contextualisé (cours de français pour le CM1) mais un quart des étudiants du
groupe de MEEF1 n’a pas vu l’objectif, tandis que dans le groupe de MEEF4 (formateurs de
formateurs) plus des trois-quarts ont dit qu’il s’agissait d’apprendre des choses sur le charbon.

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

Figure 2. Double page « Le charbon qu’est-ce que c’est ? »,


Nouveau Parcours Français, CE1, p. 76-77.
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Chacune des portions de la double page, chacune des consignes d’obser-
vation, chacun des documents est supposé être regardé et lu ni de façon
isolée ni pour ce qu’il affirmerait en lui-même, mais pour la recherche de
liens logiques avec les autres portions. Ici, il ne s’agit pas de se contenter
de lire et de regarder des « choses » sur le charbon mais de comprendre
le processus, la stratégie de lecture d’un texte documentaire sans que ce
cheminement intellectuel soit guidé explicitement. Il s’agit là des exigences
d’une « littératie étendue » (Bautier et Rayou 2013 : 79), reposant sur une
culture du document qui doit être analysé. Celui-ci est présenté de façon
délinéarisée afin de solliciter une disposition à « linéariser » – c’est-à-dire
relier et mettre en cohérence des informations disparates – et à construire
un savoir de façon autonome, c’est-à-dire un texte de savoir homogène
correspondant à des systèmes sémiotiques au demeurant hétérogènes.
Le savoir n’est plus donné clés en main par le manuel, c’est à l’élève de
le découvrir ou plutôt de le construire, et ce, malgré l’énonciation finale
qui se veut métacognitive – par exemple pour la question 6 : « Explique
comment tu as retrouvé l’emplacement des photos de Luigi » (p. 77), qui
interroge l’élève sur son parcours de lecture et sur les éléments qu’il a mis en
relation pour s’approprier le support. Il semble justement que les recherches
dans lesquelles les élèves sont engagés, à savoir répondre aux questions
suivantes, ne leur permettent pas automatiquement et à tous de construire
ce savoir :
- Dans quelle région de France Luigi a-t-il travaillé ?
- Cherche dans le texte un mot qui a le même sens que charbon ?

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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

- Explique ce qu’est un mineur, combien de temps un mineur travaillait-il


au fond de la mine ?

L’implicite énonciatif

Figure 3. Petit encadré de début de double page qui introduit le thème


recourant au pronom je.
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Figure 4. La structuration du manuel avec des sous-titres recourt égale-
ment au pronom je.

On observe dans le texte, en figure 312 et dans les titres des parties, la
présence du pronom je avec un énonciateur différent dans les deux cas de
figure. Des attitudes d’énonciation du récit (l’encadré gris de la figure 3
qui se trouve tout en haut de la page de gauche) sont mélangées avec la
présence du narrateur sous le je, mais un narrateur qui reste non identifié.
C’est donc à l’élève de comprendre – sans qu’aucun indice ne soit présent –
qu’il s’agit vraisemblablement de la petite taupe qui accompagne Luigi (et
donc le lecteur dans cette double page). Or ce même pronom je est ensuite
utilisé (figure 4 « J’écris pour mieux comprendre » et « je discute ») pour
identifier l’élève et les activités qu’il est en train de réaliser. On suppose donc
que l’élève (apprenti lecteur, en CE1) est à même de percevoir cette double
énonciation, ce double adressage, sans qu’à aucun moment le manuel n’attire
son attention sur ce point. Ce texte (de genre narratif et non informatif,

12. « En traversant le nord de la France, j’ai compris d’où venait le charbon. J’ai pu visiter
les bâtiments d’une ancienne mine, au pied d’une grande colline toute noire. C’est Luigi, un
ancien mineur, qui m’a guidée. Il a passé 22 ans de sa vie à extraire le charbon de sous la
terre, tout au fond de cette mine ! »

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

alors qu’on se trouve dans une double page d’un écrit fonctionnel) peut
faciliter ou agréablement accompagner la lecture du document pour certains
élèves et brouiller ce qu’il faut faire avec cette double page pour d’autres.
Chacune des questions doit être entendue par l’élève au sens propre,
comme une invitation à réaliser une activité particulière au travers d’une
tâche (observer, comparer, etc.) et qu’il doit simultanément ressaisir sur un
autre plan, c’est-à-dire en « secondarisant » (Bautier et Rochex 1998 : 58).
Ainsi, l’objet du monde évoqué (la lecture de textes documentaires) est à la
fois considéré comme objet d’étude de la discipline et comme permettant la
construction d’un savoir qui permettra ultérieurement de poser un nouveau
regard sur le monde lui-même.
Les connaissances prérequises et les dispositions langagières considérées
comme des évidences et le faible guidage de la façon de se saisir du support
pour enseigner et apprendre participent de la coconstruction des inégalités
sociales et scolaires.
Il revient donc à l’élève de synthétiser le résultat d’une activité intellectuelle
préalable de « mise en relation » qui est à conduire dans l’enchainement des
tâches ou dans l’articulation des documents hétérogènes que la double page
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fournit. C’est à l’élève de formuler ces conclusions en savoirs intermédiaires
et de les avoir en tête (comme des hypertextes numériques) pour donner du
sens à la portion de texte, et relier celui-ci à la notion de texte documentaire.
Là encore, on sollicite des dispositions culturelles, langagières et cognitives
qui ne sont pas données. De fait, il incombe à l’enseignant de prendre en
charge cette construction au cours de la séance, compte tenu du cadrage
distendu du manuel. S’il ne la prend pas en charge, c’est ce que l’élève a
acquis dans son milieu familial qui entre en jeu. Il convient donc, en amont,
de former les enseignants et les futurs enseignants à déceler cet implicite.
Au vu de ce qui précède, on aurait tort de penser que cette brièveté conduit
à des exigences moindres : au contraire, c’est à l’élève et à l’enseignant qui
l’accompagne, sans lui donner les solutions, de rendre présent ce qui n’est
pas écrit. On remarque donc que les sauts cognitifs sont plus difficiles à
faire pour l’élève avec ces manuels contemporains qu’avec des manuels plus
anciens (Bonnéry 2015), dans la mesure où l’on fait davantage appel à son
raisonnement inférentiel et déductif. Cela est potentiellement formateur,
mais ces sauts étant très faiblement guidés (dans l’extrait que nous analysons
comme de manière générale dans les manuels contemporains), il y a un
risque important que tous les élèves ne les réalisent pas.

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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

Les présupposés et les sous-entendus littératiés

Figure 5. Petit encadré « Le sais-tu ? », p. 76.


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De même, s’emparer pleinement de cet encadré nécessite que l’élève
mette en relation la phrase introductive : « La houille est faite de restes de
plantes peu à peu transformés en pierre », et notamment le circonstanciel
de temps « peu à peu » avec l’organisation spatiale de cet encadré. D’abord,
le sens de la lecture a une incidence puisqu’il faut lire le document de
gauche à droite pour comprendre qu’entre les différentes illustrations le
temps s’écoule. Ensuite, il faut que l’élève comprenne que c’est le dépôt
de végétaux fossilisés (notion de temps à prendre de nouveau en compte)
qui a donné la houille (roche noire et dure). Enfin, il s’agit de comprendre
que houille et charbon, c’est la même chose. Cette intégration du spécifique
au générique n’est pas explicitée et c’est à l’élève seul (à qui on pose une
question vague « cherche dans le texte – on ne sait pas lequel, il y en a
plusieurs sur cette double page – un mot qui a le même sens que charbon »)
qu’il revient de l’effectuer. Il revient donc à l’élève de construire ce lien.
Les manuels priorisent le fait de mettre l’élève en activité tout en cadrant
faiblement celle-ci sur les points précis qui permettent d’identifier le savoir
à construire : ils participent activement à mobiliser chez les élèves des
dispositions cognitives différentes. Cette tension entre élévation des exigences
littératiées, cadrage faible et consignes équivoques semble caractériser
beaucoup de supports contemporains ainsi que l’ont montré É. Bautier et
alii (2012) et S. Bonnéry (2015).
L’apprenant présupposé par un certain nombre de manuels contemporains
(Viriot-Goeldel et Delarue-Breton 2014) est principalement celui qui sait
que les indices qui lui sont délivrés dans la double page doivent être rapportés
aux critères précis de la question posée et « filtrés » à partir de la question
tacite qu’il est censé pressentir et découvrir. Les élèves qui ne correspondent

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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

pas à cette question sociale peinent à distinguer l’essentiel de l’accessoire


dans les tâches et leurs finalités en contexte scolaire (Delarue-Breton 2011).

Conclusion
Alors que jusqu’au milieu des années 1980, nous l’avons vu, le terme
implicite était très peu utilisé qu’il s’agisse des documents d’institutionnels,
sur les terrains de recherches didactiques ou encore chez les acteurs de
l’école, son usage, depuis les années 2000, est beaucoup plus massif, avec
des acceptions variables et des contours flous dans la mesure où nous ne
trouvons pas de définitions précises de cette notion, y compris dans les
guides édités par le ministère de l’Éducation nationale à destination des
enseignants qui ont pourtant l’injonction de travailler l’implicite. L’état de
l’art montre que ce terme est effectivement utilisé aussi bien par des linguistes,
des didacticiens ou des pédagogues avec des définitions différentes, d’où la
difficulté à circonscrire la notion qu’il désigne. Après cet inventaire, nous
avons proposé une analyse d’un manuel scolaire contemporain qui révèle
l’importance de l’implicite dans une double page. Plus que de l’implicite
du texte, il est question, comme nous l’avons montré, d’un implicite du
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support tout entier (texte, image, schéma) et de la difficulté pour certains
élèves de s’emparer de ces supports que l’on nomme composites.
Si notre analyse met en évidence la part importante d’implicite qui
traverse les supports contemporains, notre propos ne soutient pas pour
autant l’efficience supposée d’une explicitation maximale dans le modèle
de la direct instruction (Gauthier, Bissonnette et Richard 2007). Nous
nous inscrivons au contraire, à la suite de É. Bautier et P. Rayou (2009)
et C. Delarue-Breton (2021), dans la lignée d’une pédagogie explicite
« susceptible de donner aux élèves eux-mêmes les moyens de la perception
de ce qui est implicite (qui recouvre des objets de portées ou de niveaux
fort différents) et les moyens de la compréhension des enjeux spécifiques
des activités scolaires » (Delarue-Breton 2021 : 12). Nous concluons avec
ces auteurs que « le rôle de l’enseignant est alors un rôle d’accompagnement
d’une démarche d’apprentissage proprio motu (Brousseau 1998) et non celui
d’un modèle qui déplie tout ce qui peut l’être devant les élèves » (Ibid. : 12).

Belinda LAVIEU-GWOZDZ & Thierry PAGNIER

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“FA218” (Col. : Le français aujourd’hui) — 2022/7/25 — 17:15 — page 69 — #67
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L’implicite des visées d’apprentissage dans les supports pédagogiques

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“FA218” (Col. : Le français aujourd’hui) — 2022/7/25 — 17:15 — page 70 — #68
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Le français aujourd’hui, n° 218, « L’implicite et ses lectures »

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• TAUVERON, C. (2001). Comprendre et interpréter le littéraire à l’école et au-delà.
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Enquêtes
• PIRLS 2016 : Évaluation internationale des élèves de CM1 en compréhension de
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l’écrit - Évolution des performances sur quinze ans. Ministère de l’Éducation nationale
de la Jeunesse et des Sports
• PISA : Programme international pour le suivi des acquis des élèves. Ministère de
l’Éducation nationale de la Jeunesse et des Sports.

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