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PRÉSENTATION
LES ÉCRITS D’APPROPRIATION EN QUESTION(S)
Martine JACQUES
Université de Bourgogne
& INSPÉ de Bourgogne
Centre pluridisciplinaire Textes et Cultures (CPTC)
Caroline RAULET-MARCEL
Université de Bourgogne
& INSPÉ de Bourgogne
Centre pluridisciplinaire Textes et Cultures (CPTC)
Séverine TAILHANDIER
Université de Polynésie
ÉA « Sociétés traditionnelles et contemporaines en Océanie » (EASTCO)
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2. Dans cette expression tirée des Homélies sur Ezéchiel, « Scriptura » désigne l’écriture
biblique et l’on traduit habituellement le propos par « L’Écriture grandit avec ceux qui la
lisent » ; dans le passage d’une majuscule à une minuscule pour « scriptura » c’est toute la
laïcisation de la tradition herméneutique qui émerge.
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Pour avancer dans cette analyse, il faut d’abord examiner d’où provient
cette notion intégrée dans les programmes. On commencera par indiquer
la définition qui en est donnée par B. Shawky-Milcent, dont les travaux
sont essentiels pour comprendre ce qui se joue dans les préconisations
ministérielles :
L’appropriation littéraire désigne le processus singulier par lequel un lecteur,
puisant dans ses ressources personnelles et mobilisant différentes facultés,
fait sienne une œuvre littéraire, tout en mettant du sien, créant ainsi en
lui une trace susceptible de s’inscrire dans sa mémoire. (Brillant Rannou et
alii 2020 : 221)
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3. Le terme interpréter figure toutefois toujours dans les attendus de fin de cycle en lecture :
« lire, comprendre et interpréter un texte littéraire adapté à son âge et réagir à sa lecture »
(Ministère de l’Éducation nationale 2018 : 12 ; 2020a : 14).
4. Il est question de la « rédaction de textes de différentes natures après avoir étudié
les spécificités des textes littéraires, de presse, des textes scientifiques, etc. » (Ministère de
l’Éducation nationale 2020b : 19).
5. En Cinquième, par exemple, l’entrée dans la séquence « De l’autre côté du miroir »
s’appuie sur une série de jeux d’écriture destinés à introduire le topos littéraire du passage et
à faciliter la compréhension et l’interprétation des textes lus ultérieurement. Les élèves sont
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généraux sur les « activités d’écriture » (Ibid.) à privilégier en lien avec les
textes lus. Ce sont bien les nouveaux programmes de lycée qui viennent
officialiser le fait que l’écriture, sous diverses formes, peut servir à enrichir
la lecture personnelle des élèves. On peut écrire pour mieux lire.
Sans doute peut-on percevoir un lien entre cet infléchissement notable et
le constat de l’inquiétant et persistant désengagement des élèves du collège et
surtout du lycée vis-à-vis des lectures scolaires (Frier et Guernier 2007). Cette
nouvelle pratique parait s’inscrire dans les propositions déjà fournies par
l’institution pour « faire place au sujet lecteur en classe » en « renouvel[ant]
les approches de la lecture analytique » (Vibert 2013) et en rapprochant
lectures scolaires et lectures personnelles. L’importance accordée par les
nouveaux programmes du lycée à la « pratique intensive de toutes les formes,
scolaires et personnelles, de la lecture littéraire » (Ministère de l’Éducation
nationale 2019a : 8) va dans ce sens et sans doute peut-on d’ailleurs envisager
un rapprochement entre écrits d’appropriation scolaires et personnels, à
l’exemple des écrits mobilisés dans le cadre de la fan fiction (Brunel 2018).
Interrogeant de quelle manière l’écriture peut favoriser la « compréhension
approfondie » (Ministère de l’Éducation nationale 2019a : 9) non seulement
des textes mais aussi de ce qui se joue dans leur lecture, la première
partie de notre dossier permet de revenir à plusieurs titres sur ce que
recouvre la notion d’appropriation littéraire à travers l’analyse d’« écrits
d’appropriation » relatifs au récit et au théâtre. Marion Sauvaire et Stéphanie
de St-Onge insistent tout d’abord, dans la ligne des travaux de P. Ricœur,
sur le processus de désappropriation de soi à l’œuvre lorsque le lecteur,
pour se projeter dans les possibles du texte et mieux se comprendre lui-
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ensuite invités à mêler journal de lecteur et journal de personnage en imaginant les pensées
d’Alice au fil de son périple (Ministère de l’Éducation nationale 2016a). En Quatrième, la
séquence théâtrale intitulée « Dois-je croire tout ce que je vois ? » est ponctuée de temps
d’écriture qui prolongent et mettent en perspective l’analyse du lien entre fiction et réalité
chez Calderón, Corneille et Molière. (Ministère de l’Éducation nationale 2016b).
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dans une perspective génétique, les différentes versions d’un même texte pro-
duit par les élèves à partir d’une nouvelle fantastique, les chercheuses notent
l’enrichissement littéraire des productions et l’appropriation grandissante du
genre fantastique qu’elles permettent et traduisent. Conjuguée à la lecture
de textes-ressources auxquels les élèves font des emprunts, la réécriture via
le Grand Brouillon offre un espace – matériel et intellectuel – aux élèves
pour s’approprier les stéréotypes du genre et les faire leur par l’écriture, qui
nourrira en retour leur lecture critique des œuvres fantastiques.
Dans sa réflexion sur les procédés susceptibles d’aider des lycéens à
s’approprier Britannicus de Racine, Claire Augé met elle-même l’accent sur
la réécriture, mais envisagée de façon transmédiatique cette fois, la question
de la forme et du support de l’écrit appropriatif méritant toujours d’être
interrogée. Elle montre par ailleurs – et c’est l’axe retenu pour la troisième
partie de notre dossier – l’intérêt que peut revêtir le travail collaboratif
lorsqu’il s’agit de favoriser le processus d’appropriation. Réunis en « cercles
de personnage », les élèves écrivent le journal des protagonistes de Britannicus
avant de créer leur profil Facebook. La mobilisation des codes du réseau
social oblige à une réorganisation de la matière fictionnelle et conduit aussi
à une plus grande appropriation de la tragédie, qu’il s’agisse du choix plus
précis des étapes du récit que les élèves décident de mettre en valeur, ou de la
langue racinienne qu’ils essayent davantage d’imiter. Bref, l’épaississement
de l’écriture va de pair avec l’épaississement de l’appropriation, tous deux
nourris par les échanges intersubjectifs au sein de la classe. Le dialogue
permet à chacun d’exprimer son point de vue et d’en éprouver la singularité
par comparaison. C’est tout l’intérêt du travail de Laëtitia Obert, qui clôt
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fois plus larges et plus personnelles que celles prioritairement mobilisées par
les écrits académiques traditionnellement travaillés au lycée.
Références bibliographiques
• AHR, S. & JOOLE, P. (éds) (2013). Carnet / journal de lecteur / lecture : quels
usages pour quels enjeux, de l’école à l’université ? Namur : Presses universitaires de
Namur, coll. « Dyptique ».
• BAYARD, P. (2000). Comment améliorer les œuvres ratées ? Paris : Minuit.
• BISHOP, M.-F. & ROUXEL A. (éds) (2007). « Sujet lecteur, sujet scripteur, quels
enjeux pour la didactique ? » Le français aujourd’hui, 157. Paris : Armand Colin.
• BRILLANT RANNOU, N., LE GOFF, F., FOURTANIER, M.-J. & MASSOL
J.-F. (éds) (2020). Un Dictionnaire de didactique de la littérature. Paris : Honoré
Champion.
• BRUNEL, M. (2018). « Les écrits de fanfiction dans la classe ». Le français
aujourd’hui, 200, 31-42.
• BRUNEL, M. & PERETTI, I. de (éds) (2020). « Approches analytiques des textes
littéraires ». Le français aujourd’hui, 210. Paris : Armand Colin.
• BUCHETON, D. (2014). Refonder l’enseignement de l’écriture. Paris : Retz.
• CHABANNE, J.-C. & BUCHETON, D. (2002). Lire et écrire pour penser,
apprendre et se construire : l’écrit et l’oral réflexifs. Paris : Presses universitaires de
France.
• CHARLES, M. (1985). L’Arbre et la source. Paris : Le Seuil.
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