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Chronique 2020
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Chronique d’ Orient
Chronique 2020
Responsables
Guy Labarre
Université de Bourgogne Franche-Comté – ISTA (EA 4011)
guy.labarre@univ-fcomte.fr
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surprenant puisqu’ on attendait un mur d’ époque classique, bien attesté par les sources3
et correspondant à la période d’ extension maximale de la ville (dont témoignait, entre
autres, le développement des nécropoles). Or, la fouille de Kathari n’ a pas pu montrer
que ce rempart a continué d’ exister après le xie siècle4. Certes, on pouvait supposer que
la muraille classique passait au même endroit (mais il en manquait la preuve5).
Le tracé de la muraille du Bronze récent dessinait, par ailleurs, les contours
irréguliers d’ une ville d’ une superficie sans parallèle, dans l’ île, à cette période6. Le tracé
sud du rempart était d’ autant plus étonnant que les trouvailles archéologiques sont peu
nombreuses sur le plateau méridional, au sud d’ une ligne allant approximativement du
lieu-dit Tourapi, à l’ ouest, au Lycée, à l’ est, et qu’ aucune ne date du Bronze récent7. On
manque de points de comparaison pour l’ époque des royaumes, mais le rapprochement
avec Néa Paphos, capitale de l’ île à l’ époque hellénistique, est éclairant : les remparts
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Les prospections
Les prospections ont permis de relever deux types de marqueurs, susceptibles
d’ indiquer le tracé de la muraille : des ruptures de niveau (naturelles et/ou accentuées)
et des affleurements de blocs (fig. 1b). Il s’ agit systématiquement, dans ce dernier
cas, de gros blocs de conglomérat semblables à ceux qui, à Kathari, appartiennent
au rempart du xiie siècle avant J.-C.10 On remarquera que cet appareil est proche de
celui de l’ enceinte d’ autres sites du Bronze récent11, et qu’ il se distingue nettement de
celui du seul tronçon de fortification dégagé à Kition et sûrement daté d’ une période
postérieure12. À Enkomi comme à Kition, ces énormes blocs affleuraient d’ ailleurs sur
une partie du tracé et ils ont orienté les premières opérations de fouille13.
Tracé ouest
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l’ ouest15. Aucun bloc de conglomérat n’ a été repéré mais le rocher avait été aménagé,
peut-être pour soutenir une courtine : les gros blocs découverts lors de l’ agrandissement
du boulevard (ci-dessus, n° 2) en proviennent peut-être. Le dénivelé est régulièrement
indiqué dans les cadastres contemporains (depuis la période britannique) (fig. 3-4).
4. Dernier marqueur du tracé des murailles dans la zone, le site du Mound
a été exploré en 2019 (voir le compte rendu des résultats de la fouille, ci-dessous).
On perd toute trace (dénivelé ou blocs affleurant) plus au sud. Au nord du tronçon
n° 1-4, la topographie est marquée par un fort dénivelé dont le premier jalon est bien
repérable en bordure nord de l’ école primaire Sotiros, en direction de la rue Franklin
Roosevelt (n° 26). Il se poursuit de façon accentuée avec la rue Teukros (n° 5), invitant
à restituer une inclinaison du tracé vers le nord-est, jusqu’ au secteur de l’ église de la
Chrysopolitissa. Il est certain qu’ immédiatement à l’ est de ce dernier point se trouvait
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15
Un mur de terrasse moderne, aujourd’ hui en partie effondré, a été bâti contre la paroi rocheuse, et
un escalier y a été taillé. Nous avons pu nettoyer et relever ce secteur en octobre 2019, grâce à l’ aimable
autorisation des services de la municipalité de Larnaca.
16
Karageorghis 1960 ; Karageorghis, Demas 1985, p. 5-23.
17
Nous remercions vivement A. Satraki des informations qu’ elle nous a généreusement transmises.
18
Myres 1897, p. 164-169. La localisation du sanctuaire (du moins de ses dépôts votifs) a pu être établie
grâce aux fouilles d’ urgence menées par le Département des Antiquités dans le cadre de l’ installation du
tout-à-l’ égout. Il était situé à l’ extrémité nord-est de la rue Teucros, près de l’ église de la Chrysopolitissa,
et non pas à l’ autre extrémité de la rue, comme le suggère Nicolaou 1976, p. 113, n° 6 et p. 103, fig. 25. Je
remercie P. Christophi de cette information.
Tracé est
Plus au sud, on ne dispose plus d’ aucun repère et le tracé est entièrement
hypothétique, sinon faux : les points que l’ on reporte sur la carte fig. 1b sont destinés
à orienter le lecteur dans le parcours topographique, ils ne correspondent pas à des
vestiges avérés du rempart.
15. Au nord du site de Bamboula, de l’ autre côté de la rue Gjerstad dont la
construction a profondément modifié la topographie ancienne, une petite colline
artificielle, localement dénommée Bamboulos, fait pendant à celle de Bamboula. Il ne
fait aucun doute qu’ elle renferme des vestiges archéologiques, mais rien n’ indique qu’ il
s’ agit des restes du rempart, sinon un alignement approximatif dans l’ axe de l’ angle
repéré dans l’ Area IV (et dont on a vu ci-dessus la fragilité).
16. Un peu plus au sud, dans le même axe, un sondage implanté en 1976-
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révise l’ interprétation proposée dans le rapport de fouille : rempart flanqué d’ une tour, en fonction, avec
plusieurs phases, du Bronze récent jusqu’ à l’ époque classique (Karageorghis 1977, p. 757-759).
24
Yon, Caubet 1985, p. 5-6.
25
Yon, Caubet 1985, p. 41-45.
26
Calvet 1980.
27
Des rapports succincts sont consultables sur le site de la « Chronique » en ligne, notices
n° 6169 (https://chronique.efa.gr/?kroute=report&id=6169), 6409 (https://chronique.efa.
gr/?kroute=report&id=6409) et 6780 (https://chronique.efa.gr/?kroute=report&id=6780).
de 1977, avait, de fait, un aspect très rectiligne, a été retrouvé : la couche se poursuit
vers l’ ouest, et elle scelle les niveaux d’ occupation antérieurs au xiie siècle. Elle marque
donc une étape dans une occupation continue et non pas un dépôt, à date plus récente,
de matériel ancien déplacé : on a proposé d’ y reconnaître les traces d’ un rite d’ abandon,
connu par ailleurs à Chypre28.
17. L’ autre tronçon, supposément repéré un peu plus au sud en 1981, n’ a pas
plus d’ existence archéologique29. Si l’ on ne peut donc pas exclure que la muraille du
Bronze récent englobait le site de Bamboula, on n’ en a aucune preuve, et la courtine ne
passait en tout cas pas là où on l’ a précisément restituée.
20-22. Les archives du Département des Antiquités conservent mention de la
découverte, à l’ occasion de travaux, de blocs dont la description correspond à l’ appareil
de la muraille du Bronze récent30 : en 1947, lors de la construction d’ une maison
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pour les périodes plus récentes : à l’ époque classique, le site abritait un arsenal militaire
(que documentent des hangars à trières dégagés par la mission française) ; il ne fait
guère de doute qu’ un endroit aussi stratégique était protégé de murailles, dont on n’ a
pourtant retrouvé pour le moment aucune trace.
La fouille
Pour compléter et préciser les résultats de la prospection, une campagne de
fouille a porté, en octobre 2019, sur le site du Mound, justement situé dans la partie
sud de la ville, bien loin du noyau urbain du Bronze récent (fig. 1b, n° 4). Il s’ agit d’ une
petite éminence, cernée d’ une profonde dépression du côté ouest, et généralement
interprétée comme abritant un fortin qui protégeait l’ une des portes de la ville32. La
présence d’ un bunker, probablement construit dans les années 1964-1974, donne du
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32
C’ était, par exemple, l’ opinion de R. Hamilton Lang, reproduite dans Nicolaou 1976, p. 55. Voir les
photographies anciennes du site, ibid., pl. VII et p. 8, fig. 1 (point marqué « Mound: Gate? »). Le site
est désormais clos et géré par le département des Antiquités, qui a apporté un généreux soutien logistique
pour le désherbage. La fouille a bénéficié de la participation d’ A. Cannavò, N. Denninger, R. Hédan,
Ch. Peverelli et A. Savvas, que nous remercions de leur aide.
33
K. Nicolaou (1976, p. 61) mentionne d’ autres vestiges, aujourd’ hui disparus (« Well-dressed blocks
of gypsum and fragments of marble columns are still in situ or scattered about »).
34
Une même couche a été repérée lors de la fouille de la courtine de Kathari (ci-dessus, n° 8-19, avec
références) : elle y a été interprétée comme les restes d’ un rempart plus ancien. On peut désormais en
douter.
bronze d’ Alexandre probable35 (fig. 16). Le rempart peut donc être daté, à cet endroit,
du début de la période hellénistique (fin du ive siècle avant J.-C.). Quant au bâtiment
démonté sur lequel il est érigé, les matériaux dont il était fait (dalles de gypse et usage
abondant du plâtre) invitent à le dater de la période classique au plus tôt.
Voilà les éléments assurés que livre la fouille. Pour le reste, on doit se contenter
d’ observations, et d’ hypothèses. On est tout d’ abord frappé par la ressemblance
entre les blocs de conglomérat du rempart de Kathari (daté du Bronze récent) et du
Mound (daté de l’ époque hellénistique). Il paraît peu probable que des blocs de telles
dimensions aient été transportés depuis la partie nord de la ville : étaient-ils en place
dans une muraille plus ancienne, située à proximité et démontée ? Rien ne permet
de l’ assurer et les quelques tessons du Bronze récent constituent un témoignage bien
fragile. Par ailleurs, la quantité très réduite de matériel livré par la fouille tend à suggérer
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Conclusion
L’ enquête menée sur le terrain confirme en large part (en le précisant) le tracé
restitué proposé par K. Nicolaou en 1976, du moins pour les côtés ouest et nord. Du
côté est, en revanche, aucune trace indiscutable d’ une muraille n’ a été dégagée et la
question du tracé reste ouverte. On peut même se demander si la ville de Kition était
ceinte de remparts continus.
La fouille effectuée sur le site du Mound a, par ailleurs, montré que le tronçon de
muraille y datait de la fin du ive siècle avant J.-C. : remployant des blocs de l’ enceinte
du Bronze récent, la courtine qui passait sur le Mound a été édifiée à la hâte, dans un
35
Tous nos remerciements à Constantina Hadjivasili, qui a restauré ces monnaies, et à Joël Françoise,
pour l’ identification effectuée à partir de photographies : au droit, tête d’ Héraklès ; au revers, massue et
carquois.
36
Par exemple lors du siège de Kition par Ptolémée Sôter en 315 : Diodore, XIX, 62, 3-6 (= Yon 2004,
n° 79).
Figures
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Figure 1b : Extrait du SIG de Kition (A. Rabot). Restitution de la topographie et de la ligne de côte antiques.
Les numéros correspondent à des tronçons (avérés ou supposés) du rempart du Bronze récent, listés dans le texte.
Figure 3 : Le substrat rocheux taillé en bordure est de l’ ancien Agricultural nursery (point n° 3), vue vers le sud
(Mission de Kition, 2019).
Figure 4 : Modèle numérique du terrain de l’ ancien Agricultural nursery (point n° 3), le rocher taillé est indiqué en ligne
pleine continue (SIG de Kition, A. Rabot).
Figure 6 : Point n° 5, vue aérienne du mur mis au jour par le département des Antiquités rue Teukros (SIG de Kition,
A. Rabot et A. Satraki, avec l’ aimable autorisation du département des Antiquités, Chypre).
Figure 7 : Le rempart de Kathari (points n° 8-9) vers l’ est (Mission de Kition, 2009).
Figure 9 : Mound (point n° 4), modèle numérique de terrain avec localisation des sondages (SIG de Kition, A. Rabot, 2019).
Figure 11 : Mound (point n° 4), sondage 20, vue vers le sud : la couche d’ effondrement du rempart
(Mission de Kition, 2019).
Figure 13 : Mound (point n° 4), sondage 20, flanc ouest de la courtine : le substrat rocheux aménagé, vers le nord
(Mission de Kition, 2019).
Figure 15 : Mound (point n° 4), coupe sud sur le rempart (Mission de Kition, A. Rabot).
Kissir Mikhail Tepe (Mapité 1), large de 38,3 m pour une hauteur de 6 m, fouillé en
1904 par le consul Alexandre Degrand et dont le mobilier est partagé aujourd’ hui
entre le musée du Louvre et le musée national d’ archéologie de Sofia. Se pourrait-il dès
lors que la cité, à l’ image d’ autres colonies comme Épidamne43, ait connu une histoire
plus tourmentée, rythmée par une opposition incessante entre clans aristocratiques et
partisans d’ un régime démocratique, qui aurait vu au terme d’ une situation de stasis le
retour victorieux des anciennes familles ? À moins que ces dernières au contraire n’ aient
pas totalement disparu du paysage social au prix certes de quelques concessions, comme
ce fut le cas par exemple à Athènes.
Afin de saisir l’ identité, à la fois sociale et ethnique, de ces individus qui bénéficient
d’ un traitement différencié par rapport à la masse des citoyens, la mission archéologique
franco-bulgare à Apollonia du Pont a développé un axe d’ étude consacré à ces contextes
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43
Thucydide, I, 24-26.
44
Bogdanova, Nedev, Baralis, Krumova 2018.
45
Bogdanova, Nedev, Baralis 2019. Un soutien particulier a été accordé par l’ Institut français de
Sofia, ainsi que par le musée archéologique de Sozopol qui a assuré le co-financement des opérations. La
mission a opéré pour sa part sur un co-financement alloué par la commission des fouilles du Ministère des
affaires étrangères et par le musée du Louvre dans le cadre du programme de recherche sur la mer Noire
(resp. A. Baralis).
46
Shkorpil, Shkorpil 1891. Seure 1924, p. 328-330.
47
Alexandrov 2007 ; Bozkova, Petrova 2007 ; Katsarova 2007 ; Mikov 2007.
2- Le monument funéraire
Quelle que soit sa fonction, la structure orientale accorde au tertre sa forme
allongée si singulière. Elle borde elle-même un tombeau maçonné qui occupe la
moitié occidentale du remblai. De forme quadrangulaire, ce monument est doté d’ une
longueur de 7,78 m (nord-sud) pour une largeur de 6 m (est-ouest), couvrant une
superficie globale de 46,68 m2 (fig. 2 et 4). Ses quatre murs disposent de deux à trois
assises construites en blocs de grès dunaires placés le plus souvent en carreau, de champ,
et plus rarement en boutisse, suivant un appareil pseudo-orthogonal. Elles reposent à
leur tour sur une semelle de fondation de dalles de gneiss qui s’ appuie elle-même sur
un radier de moellons. L’ élévation de la façade méridionale est ainsi de 0,67 m ; celle
de la façade orientale de 0,70 m. Le monument doit cependant composer à l’ ouest et
à l’ est avec le dénivelé du terrain. Pour ce faire, une nouvelle assise est ajoutée à 4,67 m
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Ce dispositif est complété par une couche de sable pur de couleur jaune orangé qui
recouvre les dalles de couverture avant d’ être scellée à son tour par une nouvelle couche
d’ argile. Une monnaie en bronze d’ Apollonia (avers : ancre ; revers : tête d’ Apollon) a
été découverte à proximité de l’ angle nord-ouest de la tombe, dans le remblai. La cuve
de la tombe est construite au moyen de deux assises de blocs de grès dunaires suivant
un appareil isodome. Le parement interne des blocs, très soigneusement équarris, à
la jointure soignée, est recouvert d’ une peinture rouge, directement appliquée, sans
mortier, sur la surface de la pierre (fig. 6).
Le défunt, un homme mature (40-60 ans), repose en décubitus dorsal, membres
en extension, tête à l’ est. Si le sujet est en position anatomique, il ne présente pas moins
quelques particularités : le crâne, disposé contre la paroi nord, sur le côté gauche, n’ est
en effet pas posé sur la mandibule ; les côtes, en désordre, outrepassent le crâne vers l’ est ;
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longueur oscillant entre 1,03 et 1,59 m pour une largeur de 0,39 à 0,56 m et une
hauteur de 0,46 m, lesquelles composent une couverture longue de 2,45 m. La cuve est
construite en blocs de grès dunaire dont le débitage s’ avère moins soigné que ceux de
la tombe SP 4. Ils conservent en effet de façon ostentatoire les traces de gradine. Les
parois internes réunissent deux à trois assises, sans trace de peinture. Bien que de l’ argile
ait été utilisée ici aussi pour étanchéiser la tombe, celle-ci n’ a pas empêché le remblai
de la couverture tumulaire de s’ infiltrer depuis l’ extrémité occidentale et de remplir la
sépulture aux trois quarts.
Le sujet, un homme mature (65-70 ans), repose en décubitus dorsal, tête à l’ est.
Le corps présente des perturbations similaires à celles identifiées sur SP 4 : le crâne
repose à 0,25 m de la mandibule, elle-même placée de façon énigmatique à l’ angle
nord-est de la tombe ; une côte s’ intercale entre les deux, tandis que d’ autres côtes sont
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défunt, lequel semble n’ avoir pas joui du même statut social que les deux premiers sujets
auxquels pourtant cet aménagement le rattache. Il est permis, au regard du traitement
différencié dont il a fait l’ objet, de se demander s’ il s’ agit d’ un membre direct de la
famille ou d’ une personne occupant un autre statut – serviteur ? esclave ?
5- La sépulture secondaire
Les trois tombes protégées par le tombeau ne sont pas les seules à occuper la
parcelle funéraire. À 0,74 m du mur méridional, une troisième ciste, elle aussi de
grandes dimensions, a été installée de façon strictement parallèle au monument. D’ une
longueur de 2,46 m pour une largeur de 1,05 m, elle ne garde de sa couverture que
la dalle occidentale, elle-même préservée de façon très fragmentaire, expliquant que
la tombe soit entièrement colmatée par un remplissage issu du remblai tumulaire.
Aucun fragment des dalles manquantes n’ a été découvert à proximité, éclairant leur
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Au sud du tombeau, un second foyer (F2), plus modeste, a également été mis au
jour. Il repose à 1,17 m du mur sud et à 1,85 m à l’ est de la ciste SP 1. Tout comme le
foyer F1, il couvre une zone de forme rectangulaire de 0,32x0,32 m ; 5 vases composent
cet ensemble : un pot à pâte grise, une lopas, une salière et un bol à vernis noir, ce dernier
orné d’ un décor estampé de palmettes. Enfin, un dernier vase (pot ?) à pâte orangée,
très fragmentaire, complète ce service. Quelques amandes grillées ont été récoltées. Si le
feu ne semble pas avoir été ici très intense, on note néanmoins l’ état de fragmentation
très poussé de certains vases.
La façade orientale du tombeau abrite à son tour deux autres foyers, soulignant
l’ importance accordée à cette dernière pour le visiteur. Le premier ensemble (F3), de loin
le plus imposant, repose à 1,94 m de l’ angle sud-est du tombeau, directement contre le
parement du mur. Il couvre une zone large de 1,15 m (nord-sud) sur 0,56 m (est-ouest).
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Par ailleurs, plusieurs noisettes grillées sont posées dans un bol, non loin d’ un ossement
de capriné, tandis que les sédiments ont également livré des fragments de cornouilles
et d’ autres susceptibles d’ appartenir à une galette funéraire. Outre la déposition de 34
vases répondant à une large typologie de forme (lopas, canthares à vernis noir, coupes
et bols à vernis noir, plats et gril à poisson, askos), F3 contient également un strigile en
bronze, placé volontairement entre deux blocs de la première assise du mur. La poignée
repose solidement dans la jointure, la lame en exergue, expliquant que cette dernière se
soit brisée et que des fragments aient été retrouvés le long du parement, sur une zone
large de 4,69 m. La chronologie du mobilier situe ce contexte dans le second quart du
ive siècle avant J.-C.
Le dernier foyer (F4) est pour sa part installé à 2,62 m de l’ angle nord-est du
tombeau et à 5,41 m de l’ angle sud-est. Il se développe également le long du mur
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Illustrations
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52
Baralis 2010, p. 139-164; Baralis 2017, p. 40-44; Baralis, Panayotova 2015, p. 993-995.
Figure 5 : La coupe commune placée à l’ envers, au sommet du remplissage tumulaire (cliché : A. Baralis).
Alexandre Baralis – Musée du Louvre, Département des antiquités grecques, étrusques et romaines
Teodora Bogdanova – Musée archéologique de Sozopol
Nicolas Morand – Museum d’ histoire naturelle
Dimitar Nedev – Musée archéologique de Sozopol
Tsvetana Popova – Institut national d’ archéologie et musée, Académie des sciences de Bulgarie
Victoria Ruseva – Institut d’ anthropologie de Sofia, Académie des sciences de Bulgarie
This specimen has an almost flat round shape, a diameter of 29-30 mm and
a weight of 11,11 grams. One side has no image and is a blank field, while the other
bears an image of Athena standing frontally facing. Athena holds a spear in her right
hand, and her left hand is turned palm up. To right and to left of Athena is the legend:
ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΔΗΜΗΤΡΙΟΥ ΦΙΛΑΔΕΛΦΟΥ ΝΙΚΑΤΟΡΟΣ, in the exergue
is control H. An impact of hammering is clearly visible on the surface of the blank
side, which has caused a slight deformation of the circle. According to the available
information, this specimen was acquired as a commercial lot at a Swiss auction in
May 2020,53 but its initial origin remains enigmatic. The accompanying documentation
for the lot specifies that it originates from the territory of Turkey.
53
Leu Numismatik, Web Auction 12, 30 May 2020, lot 598.
should be excluded due to technical inconsistencies. Despite the fact that rare examples
of impressions of seals on lead are actually known, the surface of the flan does not have
any signs of holes and channels through which the thread that binds the document
would be passed. Moreover, the published specimen is a flat coin circle, without the
typical hollows on the contour around the circle.
The second option (a weight) should also be excluded from the possible ones,
since the weight of this item (11 grams) does not correspond to any of the denominations
of the attic weight system adopted by the Seleukids. In addition, this item does not have
typical weight designation, which also excludes the version about the identification of
this object as a weight. In all probability, the possibility of using this item as a coin
should also be excluded. As mentioned earlier, lead coins of the Hellenistic period are
well known, but they are distinguished by one significant—the existence of an image
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only an assumption, primarily due to the lack of the available material, and therefore,
for responding to questions about the purpose of this object, it remains to rely only on
future finds.
Svyatoslav V. Smirnov – Institute of World History, Russian Academy of Sciences
Commagène/Cappadoce
N° 1 – Territoire de Kaisareia Germanikeia/Germanicia (Kahramanmaraş) ou
région environnante. Stèle funéraire de marbre à acrotères dont le fronton est orné
d’ un umbo ; la base de la stèle est plus large à son extrémité inférieure. Dimensions :
H. 143,2 cm ; larg. 34,1 cm ; ép. 11,3 cm. Sous le fronton, quatre lignes de grec aux
caractères réglés et soignés, avec alpha à barre brisée, sigma non lunaire, kappa dont la
haste se détache, èta dont la barre est détachée des deux hastes, trois iotas adscrits (l. 3-4)
et apices légèrement marqués. Plusieurs lettres gravées sont endommagées, mais lisibles.
Κιλαμωας Ἀσ̣κλη-
πιάδ̣ου Ἀσκληπι-
άδει τῶι ἰδίωι
ἀδε̣λφ̣ῶι.
60
Nous remercions Alexandru Avram et Claude Brixhe pour leurs remarques.
61
Laroche 1966, p. 93, n° 575 ; Halpern 2016, p. 21-22 ; Bru 2017, p. 168-169 ; Binetti 2017, p. 182-
184.
62
Alkım, Bean 1950, p. 563, n° 7 et pl. LXXXV, fig. 43 (photographie), d’ où SEG 12, 507, que suivent
Zgusta 1964, p. 230, § 607-8 (malgré la note 115 : « Andere Lesungen sind nicht ausgeschlossen; am
Ende der Zeile fehlt vielleicht ein Buchstabe [sic]. »), et LGPN VC, p. 218, s. u. « Κιλαλοας » n° 1. Cela
dans un milieu socio-culturel indigène anatolien, local, puisque le patronyme en question est celui de Ινδης
(LGPN VC, p. 195, s. u. « Ινδης » n° 1 ; Zgusta 1964, p. 201, § 473-3).
63
Les jambages/branches écarté(e)s des M du texte de Karatepe confirment la confusion de lecture que
l’ on peut faire avec Λ, car les angles intérieurs des caractères sont identiques.
64
LGPN VC, p. 68, s. u. « Ἀσκληπιάδης » n° 22-33.
L. 3-4 : trois iotas adscrits sont à signaler pour les trois derniers mots τῶι ἰδίωι
ἀδε̣λφ̣ῶι.
Ce court texte funéraire et cette stèle de belle qualité révèlent une mixité
culturelle, à propos d’ une famille où le père porte un anthroponyme très hellénique,
mais l’ un de ses fils un vieux nom anatolien remontant à l’ époque des Hittites. À titre
hypothétique, ce nom, Κιλαμωας, pourrait avoir été choisi par la mère d’ origine indigène
(hélas non citée dans l’ épitaphe), à moins qu’ il ne s’ agisse d’ un enfant d’ origine indigène
adopté par une famille grecque. La graphie de l’ inscription invite à la dater du début de
l’ époque impériale (ier siècle apr. J.-C.–début iie siècle).
N° 2 – Territoire de Kaisareia Germanikeia/Germanicia (Kahramanmaraş) ou
région environnante. Autel quadrangulaire de calcaire dédié à la Tychè. Dimensions :
H. 71,6 cm ; larg. 23,3 cm ; ép. 21,9 cm. Quatre lignes de grec y sont gravées en grandes
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Μ̣ουνια
Ἀρσινόη
τῇ Τύχῃ
ἀνέθηκε.
Traduction : « Mounia Arsinoé a dédié
(l’ autel) à la Fortune. »
L. 3 : on distingue deux discrets iotas souscrits sous le èta à la fin de chacun des
deux mots.
Cet autel dédié aux iie-iiie siècles de notre ère le fut manifestement dans le
cadre civique grec qui est en général celui de la sublimation de la figure de la Fortune
hellénique, spécialement depuis la fin de l’ époque hellénistique. Le double nom que
porte Μουνια Ἀρσινόη témoigne concomitamment de l’ hellénisation d’ un milieu
culturel mixte.
65
Zgusta 1964, p. 336, § 983-1, à corriger grâce à Avram 2019, p. 335 ; LGPN VC, p. 303-304,
s. u. « Μουνα » n° 1-30.
66
Zgusta 1964, p. 336, § 983-4 ; LGPN VC, p. 304, s. u. « Μουνις » n° 1.
67
LGPN VC, p. 57, s. u. « Ἀρσινόη » n° 2-7.
68
Zgusta 1964, p. 219, § 559 ; Jerphanion, Jalabert 1911, p. 307 ; pour des formes onomastiques
relatives à « Kaki », cf. notamment Justi 1895, p. 152 ; pour d’ autres noms à la morphologie analogue en
Anatolie, voir Zgusta 1964, p. 210.
69
Voir Robert 1963, p. 494.
iota semble avoir été ajouté entre le thêta et le èta, puis le début de la ligne 3 montre
clairement ΟΑ; pour cette dernière séquence avec un net sigma carré, on pense bien
sûr à l’ anthroponyme féminin anatolien Οα70, mais qui n’ est bien attesté qu’ en Pisidie
et Isaurie, plus à l’ Ouest, sachant que cette lecture supposerait d’ une part que le nom
de la mère fût Αθη (non attesté)71, d’ autre part que sa fille défunte eût porté le double
nom (ici au datif ) de Οα Πακυια, ce qui paraît improbable ; l’ anthroponyme féminin
Ἀθηνᾶ étant attesté dans un autre texte funéraire de la région (voir infra notre n° 5), et
le nom féminin Ἀθηνώ étant par ailleurs connu à deux reprises en Cappadoce à Tyane
et Komana à l’ époque impériale72, on pourrait suggérer une nouvelle erreur du lapicide
ayant confondu le N avec un omicron carré (une anomalie dans la mesure où il s’ agit de
la seule lettre carrée du texte), et lire Ἀθηνᾶ pour le nom de la mère de la défunte. Cet
anthroponyme lié à l’ assimilation de la grande déesse Ma dans la région pouvant être un
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70
Zgusta 1964, p. 386, § 1129-2.
71
En dépit de Zgusta 1964, p. 48, § 21.
72
LGPN VC, p. 9, s. u. « Ἀθηνώ » n° 1-2.
73
Justi 1895, p. 240 ; Schmitt 2011, p. 289, n° 254 ; rapide mention dans Robert 1963, p. 6, 321 ; voir
aussi Zgusta 1964, p. 403-404, § 1193 ; LGPN VA, p. 353, s. u. « Πακτύες ».
74
IG I3 260 A, col. I, l. 16.
75
Pour une erreur semblable à Lystra (Lycaonie) dans un texte funéraire mentionnant une onomastique
indigène, voir MAMA VIII, 90.
76
Pour la Cappadoce, cf. LGPN VC, p. 238, s. u.« Κύριλλα » n° 18-27.
77
LGPN VC, p. 230, s. u. « Κόττας » n° 1 ; voir par ailleurs Robert 1963, p. 283, 310.
78
Zgusta 1964, p. 251, § 710 ; Munro 1897, p. 269, n° 4.
79
I.Aph2007 8.4 ; BÉ 1983, p. 156, n° 386 suit les éditeurs et accentue Κότας ; LGPN VB, p. 244,
s. u. « Κοτᾶς » n° 1.
L. 5 : sur sa cassure inférieure, la pierre montre les traces des parties supérieures
des quatre premières lettres de ἀ̣θ̣ά̣ν̣[ατος](la pointe des alphas, la partie supérieure du
thêta et la partie supérieure des deux hastes du nu). L’ expression finale est courante,
particulièrement en Syrie et au Proche-Orient.
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Bibliographie
Abréviations
Études