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Locke, John, Essai philosophique concernant l’entendement humain, Amsterdam : Mortier, 1735.

p. 537. Sur la technique implicitement vue comme facteur d'humanité, et son absence comme
facteur de barbarie/monstruosité :

Et quelle que soit l’idée que nous avons de la beauté de notre génie ou de la perfection
de nos Lumières dans cet endroit de la Terre où la connaissance et l’abondance
semblent se disputer le premier rang, cependant quiconque voudra prendre la peine de
considérer la chose de près, sera convaincu que si l’usage du fer était perdu parmi
nous, nous serions en peu de siècle inévitablement réduits à la nécessité et à
l’ignorance des anciens sauvages de l’Amérique, dont les talents naturels et les
provision nécessaires à la vie ne sont pas moins considérables que parmi les nations
les plus florissantes et les plus polies. De sorte que celui qui a le premier fait connaître
l’usage de ce seul métal dont on fait si peu de cas, peut être justement appelé le Père
des Arts et l’Auteur de l’Abondance.

Rousseau, Jean-Jacques, « Œuvre complète », Genève, Du Peyrou et Moultou, 1789. Citation


issue du site Rousseau Online du projet ARTLF avec l’université de Chicago
(http://artflsrv01.uchicago.edu/philologic/rousseauonline.whizbang.form.html).

Sur l'idéal de liberté de l'Indien dans son « état de nature » :

(...) tous les besoins que le Peuple se donne, sont autant de chaînes dont il se charge.
Alexandre, voulant maintenir les Ichtyophages dans sa dépendance, les contraignit de
renoncer à la pêche & de se nourrir des alimens communs aux autres Peuples ; & les
Sauvages de l’Amérique qui vont tout nuds & qui ne vivent que du produit de leur
chasse, n’ont jamais pu être domptés. En effet, quel joug imposeroit-on à des hommes
qui n’ont besoin de rien ?

- volume 7, p.30.

Sur l'idéal « homme naturel », libre de communier avec l'ensemble de son espèce car
dépourvu des chaînes asservissantes que la société d'abondance impose au monstrueux
« homme civil » :

Il y a dans l’état de nature une égalité de fait réelle & indestructible, parce qu’il est
impossible dans cet état que la seule différence d’homme à homme soit assez grande
pour rendre l’un dépendant de l’autre. Il y a dans l’état civil une égalité de droit
chimérique & vaine, parce que les moyens destinés à la maintenir servent eux-mêmes
à la détruire, & que la force publique ajoutée au plus fort pour opprimer le faible
rompt l’espèce d’équilibre que la nature avoit mis entre eux.

- volume 4, p.409.

Montaigne, Rousseau, Locke et Goethe, notamment sous l'influence du romantisme et du


scientifique Etienne Geoffroy Saint-Hilaire, père de la tératologie, travaillent chacun à récuser l'idée
de natures différentes pour chaque espèce, et dont il pourrait y avoir des déviations monstrueuses –
ou « contre-nature ». Ainsi, les différences et difformités ne peuvent être conçues comme des
atteintes à l'idée de nature ou d'espèce en tant que système structuré – ce ne sont que des
singularités.

- L’Indien, la nature et le monstre : de Montaigne à Goethe, en passant par Locke et Rousseau -


Apport pour une théorie du monstre, par Erwan Moreau

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