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Le formalisme russe

deux centres

le Cercle linguistique de Moscou


• 1915, e.a. Roman Jakobson

l’Opoïaz
• la Société d’étude du langage poétique, 1916
• membres e.a. : Victor Chklovski, Boris Tomachevski, Boris
Eikhenbaum et Iouri Tynianov
• située à Pétrograd (l’actuel Saint-Pétersbourg)

les chercheurs formalistes appartiennent à la génération


« révolutionnaire » née dans les années 1890
le Cercle linguistique de Moscou
(1915, e.a. Roman Jakobson)

• son inspiration provient surtout de la linguistique


• influencé par
• Saussure (la linguistique structuraliste)
• Husserl (la phénoménologie)
• Peirce (la sémiotique)
le Cercle linguistique de Moscou
(1915, e.a. Roman Jakobson)

• la littérature est un phénomène de langage


• elle doit donc être étudié scientifiquement au moyen des outils
de la linguistique

• Jakobson et les siens partagent ce souci de scientificité avec les


positivistes
• MAIS ils rejettent la conception positiviste de l’œuvre comme le
produit de causes extérieures
le Cercle linguistique de Moscou

• se base sur la distinction entre langage littéraire et langage


quotidien
• le langage littéraire est autoréférentiel
• attire l’attention sur sa propre forme
• affaiblit la relation signe – référent
l’Opoïaz

• ses membres sont pour la plupart des historiens de la littérature

• avance que l’œuvre littéraire


• n’est pas un simple reflet de la réalité (n’est donc pas
mimétique)
• ni l’effet d’une volonté de communication
• mais un phénomène particulier, spécifique

• son objectif est dès lors la recherche scientifique de cette


spécificité
• les études menées à cette fin se concentrent sur la forme du texte
le contexte

le formalisme russe est à considérer comme une réaction contre


• les dérives du positivisme
• rejet du déterminisme positiviste et de son attention
exagérée pour la biographie et la personnalité de l’auteur
• rejet de sa tendance à expliquer l’œuvre au moyen
d’éléments historiques, psychologiques et sociologiques
censés déterminer l’auteur
• la tendance à réduire l’œuvre à une illustration de positions
philosophiques
le contexte

• l’étude formaliste est axée sur la forme du texte


• elle s’inspire en ceci de la pratique artistique des poètes avant-
gardistes de l’époque (Maïakovski, Khlebnikov,...)
• découvrent la forme du texte, ce qui les amène à effectuer
des expérimentations avec le matériau langagier
• refusent tout emploi utilitaire de la littérature
• font abstraction de la personnalité de l’auteur
• tendent vers l’abstraction, l’antiréalisme (cf. les arts
plastiques : Kandinsky, Malevitch,...)
le contexte historique général

les années 1910 en Russie


• une floraison inouïe de la vie intellectuelle et culturelle

la période de la Révolution (1917)


• les formalistes conquièrent des positions de premier plan dans la
vie académique russe
• ils déploient alors une activité très intense : de nombreuses
publications formalistes voient le jour
• les idées avancées par les adeptes du formalisme subissent une
évolution rapide
• le formalisme est une « unité d’action », un mouvement plutôt
qu’un paradigme, une méthode
le contexte historique général

les années 1920


• la position des formalistes devient de plus en plus difficile suite à la
montée au pouvoir d’une doctrine bolchevique anti-formaliste
• des voix influentes et puissantes comme Trotski, Lunacharski et
Boukharine lancent des attaques virulentes contre les formalistes,
leur reprochant
• de rompre avec le passé de façon trop radicale et
• d’escamoter les aspects historiques, sociaux et cognitifs de
la littérature
• le climat autour du formalisme devient hostile et ses représentants
sont obligés d’opter pour l’adaptation ou pour l’exil interne ou
externe
le contexte historique général

1934 : imposition du réalisme socialiste comme doctrine officielle


dans les arts
• la littérature et la critique littérature doivent
• fournir une représentation réaliste de l’histoire dans son
développement révolutionnaire
• contribuer à la transformation et à l’éducation idéologiques
des travailleurs dans l’esprit du socialisme
• ceci est une négation complète des idées formalistes
les grandes figures

Roman Jakobson (1896-1982)


• travaille
• à Moscou (1915-1920)
• à Prague (1920-1939, Cercle linguistique de Prague)
• aux États-Unis (1941-1967, maître de Chomsky et de Lévi-
Strauss)
• linguiste, mais également spécialiste de la poésie
les grandes figures

Victor Chklovski (1893-1984)


• co-fondateur de l’Opoïaz
• théoricien de la littérature (spécialiste de la prose narrative) et du
cinéma

Iouri Tynianov (1894-1943)


• co-fondateur de l’Opoïaz
• théoricien de la littérature (spécialiste de la poésie et de l’histoire
de la littérature) et du cinéma
l’influence du formalisme russe

• constitue le véritable point de départ de la théorie littéraire


scientifique
• a exercé une influence sur
• le structuralisme tchèque
• le structuralisme français
• le New Criticism
• la narratologie
• la sémiotique
• par l’intermédiaire de Jakobson, Todorov, Kristeva, Wellek,...
les concepts

• la littérarité (literaturnost’) : les qualités immanentes de la


littérature qui la distinguent des autres formes de discours

• étudier la littérarité présuppose la mise entre parenthèses de


l’œuvre : le formalisme russe (initial) ne tient pas compte de
l’auteur, ni du lecteur ou du contexte
le modèle de la communication verbale (Jakobson)

six facteurs

CONTACT
CODE 

DESTINATEUR  MESSAGE  DESTINATAIRE

CONTEXTE
à chaque facteur correspond une fonction du langage

• émotive (destinateur, expression)


• conative (destinataire, appel)
• phatique (contact)
• référentielle (contexte, transmission d’informations)
• métalinguistique (compréhension du code)
• poétique (la manière dont le message est mis en forme)
les concepts

selon Jakobson, un texte est littéraire


• lorsque la fonction poétique y est dominante
• quand il est autoréférentiel : le langage y est gouverné par des
lois immanentes (en non par les lois de la communication)
Jakobson

• se concentre sur l’étude de la poésie


• les aspects phonétiques (la rime, le rythme, l’intonation,...) y
créent une musicalité absente du langage quotidien
• en poésie, le langage est hautement autoréférentiel, i.e. ne vise
pas à communiquer un message de façon simple et directe
les concepts

la défamiliarisation (ostranenye, Chklovski)

1. la prose littéraire défamiliarise le processus normal de perception


• se sert à cette fin de nouveaux moyens de représentation, d’un
langage délibérément difficile qui rend la réalité perçue étrangère
et nouvelle
• le texte offre ainsi une vision alternative et inattendue
• cette « représentation insolite » revitalise la perception : la chose
devient chose vue en non pas chose reconnue
les concepts

la défamiliarisation (ostranenye, Chklovski)

2. la défamiliarisation remet en cause les relations habituelles signe –


référent en déformant les moyens langagiers habituels
• rompt avec les clichés et conventions du langage quotidien et de
la littérature antérieure
• met l’accent sur l’innovation du langage et de la littérature, et
donc sur la rupture et l’originalité
• l‘importance accordée par Chklovski à la défamiliarisation est un
nouvel indice de la complicité du formalisme avec les avant-gardes
les concepts

• la défamiliarisation (ostranenye, Chklovski) est un concept ambigu


• il peut porter sur
1. la perception de la réalité, du monde extérieur
2. les moyens langagiers

1. une question référentielle


2. une question immanente au langage et à la littérature
forme = contenu

l’objet de l’analyse formaliste est la forme, la facture du texte, i.e. les


procédés (les techniques) mis en œuvre, ainsi que les effets qu’ils
cherchent à atteindre

Chklovski, L’art comme procédé (article, 1917):


• définit le texte littéraire comme la somme de ses procédés
• le formalisme ultérieur affine cette définition : le texte littéraire est
un ensemble fonctionnel, un système cohérent de procédés
forme = contenu

le contenu du texte littéraire ne peut être dissocié de sa forme


• la forme même du texte est porteuse de sens
• chaque modification de la forme comporte dès lors une
modification du sens

ce phénomène se retrouve aussi en dehors de la littérature


proprement dite : des textes « non-littéraires » peuvent avoir des
qualités littéraires (lorsque leur forme contribue à leur contenu)
forme = contenu

• la poésie joue avec la forme, le côté « signifiant » du mot (le son,


le rythme,...)
• ce jeu enrichit le sens, le signifié par la création d’interactions
inattendues et de significations secondaires
forme = contenu

• la poésie joue avec la forme, le côté « signifiant » du mot (le son,


le rythme,...)
• ce jeu enrichit le sens, le signifié par la création d’interactions
inattendues et de significations secondaires

• le mot poétique (étudié surtout par Jakobson)


• est hautement autonome, i.e. indépendant de la réalité
extérieure (de toute forme d’expression ou de description)
• cette autonomie, ce caractère autoréférentiel constitue sa
« poéticité »
forme = contenu

• dans la prose narrative, la littérarité dépend de la mise en forme


de la matière et des effets qu’elle produit
• pour cette raison, Tomachevski introduit la distinction fabula /
sujet
forme = contenu

• la distinction fabula / sujet


• la fabula : l’histoire, les événements présents dans le texte
• le sujet : la façon dont ces événements y sont présentés,
agencés

• narrer consiste à transformer fabula en sujet


• la littérarité réside dans l’ensemble des choix formels – techniques
et stylistiques – opérés à cette fin
• la distinction fabula / sujet sera reprise dans la narratologie
forme = contenu

l’étude de la prose narrative : Vladimir Propp


• un linguiste-folkloriste, dont les recherches portaient sur les contes
fantastiques russes traditionnels
• dans sa Morphologie du conte (1928), Propp réduit les contes
concrets dans son corpus à un nombre restreint de structures
abstraites et invariantes
• ces structures sont supposées générer les contes individuels
(comme une grammaire)
• Propp vise à dévoiler ainsi le système abstrait sous-tendant les
contes concrets
forme = contenu

l’étude de la prose narrative : Vladimir Propp


• chaque conte est une séquence de « fonctions »
• une fonction est
• une action d’un personnage, définie du point de vue de sa
signification dans le déroulement de l’intrigue
• l’unité minimale du conte (cf. les phonèmes dans une
langue)
• il y a 31 fonctions en tout
• les personnages peuvent être réduits à sept types de base (le
héros, l’adversaire,...)

Propp : une figure de transition entre formalisme et structuralisme


forme = contenu

l’étude de la prose narrative


• l’attention portée à l’organisation formelle et aux aspects
techniques explique la préférence du formalisme pour des textes
narratifs antiréalistes, parodiques, c’est-à-dire des textes qui ne
cachent pas leur propre facticité
• cela rime une fois de plus avec la poétique anti-mimétique de
l’avant-garde littéraire de l’époque
le formalisme et l’histoire littéraire : Tynianov

1. le formalisme initial

• conformément aux idées de Saussure, le formalisme privilégie au


début l’étude synchronique de la littérature
• étudie les textes en isolation de leur contexte historique
• mais ce refoulement de la diachronie s’avère intenable
le formalisme et l’histoire littéraire : Tynianov

1. le formalisme initial

ce refoulement de la diachronie s’avère intenable : l’évolution dans


le temps est implicite dans certaines notions clé du FR

par ex. la défamilarisation :


la rupture délibérée avec des procédés devenus trop stéréotypés et
l’introduction de procédés initialement ressentis comme étranges
le formalisme et l’histoire littéraire : Tynianov

2. le stade ultérieur du formalisme russe

aspire (dans un premier temps) à créer une histoire littéraire


immanente : une histoire des formes et des procédés, faisant
abstraction du contexte extralittéraire
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, Le fait littéraire (1924) s’efforce de rendre compte de


l’évolution des genres littéraires
1. l’apparition de « faits littéraires », de textes « aberrants »,
qui ne correspondent que partiellement aux règles du genre et
constituent donc des alternatives aux pratiques existantes
2. les forces établies de l’ordre littéraire tendent à rejeter ces
alternatives – et réussissent le plus souvent à les étouffer
3. certaines alternatives persistent et parviennent ainsi à
modifier les règles du genre
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, Le fait littéraire (1924)

• avance une nouvelle vision de l’histoire littéraire, qui n’est plus


vue comme un processus d’accumulation ou de progrès et de
perfectionnement
• conçoit la littérature comme un système ouvert et dynamique, en
évolution perpétuelle et ayant comme principes le déséquilibre,
l’innovation, le conflit et la rupture
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

« Toute succession littéraire est d’abord un combat, la destruction


de valeurs anciennes et une reconstruction d’éléments anciens. »
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

dans un texte littéraire, trois fonctions sont à l’œuvre


• la fonction constructive
• la fonction littéraire
• la fonction sociale
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

étude de la fonction constructive


• étude du texte comme un système [comme un ensemble de
variables interdépendantes] en lui-même, i.e. des éléments
formels et de leurs relations
• ces relations sont généralement conflictuelles : un élément /
niveau formel (par ex. l’intonation) s’efforce de subordonner les
autres et de devenir le « principe de construction » du texte
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

étude de la fonction littéraire


• étude de ces mêmes éléments formels dans leurs relations au
système littéraire contemporain (aux genres, écoles, courants,
groupes, styles,... d’une époque)
• l’identité même d’une œuvre dépend de ces relations
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

étude de la fonction sociale


• étude des éléments du texte dans leurs relations aux « faits
sociaux » (la réalité extralittéraire)
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

• dans un texte littéraire, trois fonctions sont à l’œuvre


• la fonction constructive
• la fonction littéraire
• la fonction sociale
• l’étude de l’évolution littéraire implique l’étude des évolutions
dans les faits littéraires à ces trois niveaux ainsi que de leurs
corrélations
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

• la littérature (tout comme les systèmes dans lesquels elle est


imbriquée) est un système différentiel éminemment dynamique,
en évolution permanente
• un texte est littéraire parce que le système littéraire à un point
donné de son évolution le considère comme tel
• ceci revient à
• un rejet de la « littérarité » comme qualité inhérente
(intrinsèque, essentielle, anhistorique)
• une revalorisation de la dimension historique et du contexte
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

• une prise en compte de l’historicité des normes et des valeurs en


littérature
• un texte qui est littéraire dans une époque ne le sera pas
nécessairement dans une autre (par ex. le roman)
• chaque époque a sa propre ustanovka (orientation et attitude)
• mise en garde contre le « péché anachronique » (l’application
des normes et des valeurs d’une époque à une autre)
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

• prend en compte les contextes littéraire et extralittéraire de


l’œuvre
• rejette l’autonomisme strict du formalisme initial
• reconnaît que la littérature fait partie du système culturel global,
conçu comme un « système de systèmes »
• selon Tynianov, il y a des corrélations et des interactions entre les
deux systèmes
• la nature précise de ces corrélations : reste à élaborer
le formalisme et l’histoire littéraire

Tynianov, De l’évolution littéraire (1927)

• sa conception de l’histoire littéraire ne fera pas école en Russie,


mais sera partiellement reprise et élaborée par les structuralistes
tchèques (cf. Chapitre 2.)
• Tynianov : une figure de transition entre le formalisme et le
structuralisme
cf. Tynianov et Jakobson, Problèmes des études littéraires et
linguistiques (1928)
le formalisme et l’histoire littéraire

• Tynianov établit une distinction entre


• la synfonction : la relation d’un élément aux autres éléments
de la même œuvre
• l’autofonction : la relation de cet élément aux systèmes
littéraire et social
• c’est surtout l’autofonction qui déterminera la signification à
attribuer à l’élément concerné
défauts du formalisme

• l’autonomisme excessif du formalisme initial : ne tient pas


compte du contexte (littéraire, extralittéraire) ni de l’évolution
historique
• les adaptations nécessaires seront effectuées assez rapidement,
notamment par Tynianov
défauts du formalisme

• l’autonomisme excessif du formalisme initial

• son essentialisme : il croit pouvoir mettre le doigt sur la


« littérarité »
• Tynianov apportera une correction « relativiste » : la littérature
est le produit de l’histoire littéraire, c’est-à-dire des relations du
texte avec le contexte littéraire et extralittéraire
• mais il reste une trace d’essentialisme chez Tynianov également : il
conçoit l’histoire littéraire comme un processus d’innovation, de
rupture et de conflit (ce qui trahit sa complicité avec les avant-
gardes)
défauts du formalisme

• l’autonomisme excessif du formalisme initial


• son essentialisme

• se focalise excessivement sur le côté formel et technique au


détriment des autres aspects d’un texte (ses significations sociale,
émotionnelle, cognitive, idéologique,...)
défauts du formalisme

• l’autonomisme excessif du formalisme initial


• son essentialisme
• se focalise trop sur le côté formel et technique

• ses prétentions scientifiques doivent être relativisées : sa


méthode ne s’avère en réalité pas objective : ses résultats ne sont
ni prévisibles ni constants
mérites du formalisme

• est à l’origine de la théorie littéraire moderne


• mène une réflexion stimulante et novatrice, qui devient au cours
de son élaboration nettement plus rigoureuse
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• Bakhtine appartient à un cercle de théoriciens parmi lesquels il


faut citer aussi P.N. Medvedev et V.N. Voloshinov et dont l’apogée
des travaux doit être située dans l’entre-deux-guerres
• dans les années 1930 : l’hostilité croissante du régime bolchevique
à leur égard mit fin à leur démarche théorique collective
• Bakhtine parvint à poursuivre ses recherches et à publier une
œuvre conséquente, qui sera découverte en Occident à partir des
années 1960 et y exerce une influence durable
• Bakhtine : un nom canonique de la théorie littéraire ; son œuvre
constitue une source importante d’inspiration théorique
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• Bakhtine se focalise sur l’étude du langage en général et du


langage littéraire en particulier
• à l’opposé des formalistes, il ne s’intéresse pas au
fonctionnement du système langagier en soi, mais au langage en
tant que véhicule des batailles idéologiques d’une société
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• le langage est dialogique : il n’est pas un système unifié, mais


s’éclate en une multitude de discours en compétition idéologique
• chaque société est caractérisée par une situation d’hétéroglossie,
c’est-à-dire de coexistence (le plus souvent tendue) de plusieurs
formes de langage
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• le langage est dialogique : il n’est pas un système unifié, mais


s’éclate en une multitude de discours en compétition idéologique
• chaque société est caractérisée par une situation d’hétéroglossie,
c’est-à-dire de coexistence de plusieurs formes de langage
• ces différents discours réagissent à la multitude d’énoncés
présents dans l’espace social, participant ainsi à un dialogue
idéologique perpétuel, dans lequel chaque discours visera à
renforcer sa position
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• le langage littéraire est dialogique lui aussi : chaque texte


« répond » à des textes antérieurs
• mais le roman est le genre dialogique par excellence : la
polyphonie (la présence de plusieurs « voix » idéologiques
irréconciliables) d’une société donnée parvient à s’y exprimer,
sans qu’une seule des voix présentes dans le texte (p.ex. celle du
narrateur) ne finisse par s’imposer et réduise ainsi le dialogue
(tendu, mais ouvert et démocratique) à un monologue
(autoritaire, tyrannique)
• cette conception rompt avec une vision du roman (ou du texte
littéraire en général) comme étant le produit de la subjectivité
unifiée (homogène, cohérente) d’un auteur
un critique russe des formalistes russes : Mikhaïl Bakhtine

• cette théorie du roman trahit une sympathie profonde pour les


classes populaires, dont la voix est habituellement étouffée par
l’ordre établi et les élites
• cette même sympathie sous-tend les idées de Bakhtine par
rapport au carnaval, qu’il conçoit comme un renversement
momentané des hiérarchies en place
• Bakhtine croit pouvoir identifier cet esprit carnavalesque et
subversif dans une tradition littéraire qui voit le jour avec la
modernité et qui se distingue par une préférence pour la parodie
et le grotesque (p.ex. Rabelais, Cervantes)

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