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"Le contrôle de gestion pour tous" "Le CDG et le pilotage des coûts" David

Doriol, expert-comptable et commissaire aux comptes.


-Bonjour à tous.
Seconde séquence.
Là, on va reprendre le petit schéma avec lequel j'avais terminé la séquence
précédente.
Et on va prendre un autre axe, du moins un des premiers axes.
On va montrer les problématiques qu'il va falloir qu'on...
On va les soulever, déjà, ces problématiques, et on va y répondre par les
autres vidéos, c'est-à-dire toutes les problématiques qui sont liées aux
coûts, à la détermination des coûts dans l'entreprise, des coûts qu'on
appelle par activité, c'est-à-dire, on reverra ce concept d'activités,
c'est les coûts des métiers, ceux qui façonnent, je dirais, l'ensemble des
processus nécessaires à une entreprise pour mener à bien sa mission.
Les problématiques coûts.
Eh bien, les coûts, c'est aussi simple d'en parler ensemble que compliqué à
définir dans l'entreprise.
Premièrement, les coûts doivent être pertinents.
Vous ne m'entendrez jamais dire : "Un coût est exact."
L'exactitude, dans le contrôle de gestion, très franchement, c'est
inatteignable.
Le contrôle de gestion, c'est fait d'opinions, c'est fait de la manière
dont, comment dirais-je, celui qui calcule perçoit l'entreprise.
Et cette perception est parfois assez subjective, même si on demande à ce
qu'elle ne le soit pas.
On approche une certaine pertinence dans les coûts, mais jamais
l'exactitude, même si aux examens, on vous demande quand même un chiffre
précis, globalement, les coûts sont pertinents, mais jamais exacts.
Deuxièmement, il faut être sûr d'avoir bien intégré la totalité des coûts,
c'est-à-dire qu'il faut être exhaustif, ni trop ni trop peu.
Ensuite, il ne faut pas calculer des coûts avec l'objectif que le contrôle
de gestion doit mener uniquement des politiques de réduction de coûts.
Je vous l'ai montré, il peut y avoir une volonté d'augmenter la valeur ou
de baisser les coûts.
C'est soit l'un, soit l'autre, mais augmenter la valeur peut nécessiter
d'augmenter les coûts.
Première problématique qu'on peut soulever, il faut que le contrôle de
gestion anticipe le plus en amont possible les coûts.
Au fond, on s'aperçoit que les coûts sont déjà fixés dès la vision
stratégique.
Dès que vous avez défini votre vision stratégique, vous avez déjà engagé de
facto 85 % des coûts futurs de revient de votre produit.
C'est-à-dire que c'est dès l'idée, dès la vision stratégique, que vous
commencez à façonner ce que va être votre produit ou votre service.
Et, bien sûr, vous commencez à penser à tous les investissements qu'il va y
avoir, les recrutements, le montage des usines, l'implantation d'un site,
d'un entrepôt, etc.
Ça, ce sont les idées qui se construisent autour de la vision, sauf que,
pour l'instant, ça ne produit pas de dépenses.
L'idée ne produit aucune dépense, il n'y a pas de charges.
Les premières charges, on les détecte uniquement...
Bien sûr, il y en a quelques-unes, 15 %, sur l'idée, le fait de faire un
prototype, de faire des études, ça coûte de l'argent, mais pas tant que ça.
Par contre, c'est dès qu'on met en industrie qu'on commence à s'apercevoir
de ce que les choses coûtent.
Et si l'idée a été mal perçue, eh bien, c'est trop tard.
Vous n'avez quasiment plus, dès que vous vous mettez à fabriquer, aucun
espoir de franchement faire des réductions de coûts.
Les réductions de coûts doivent se penser dès l'idée.
Quand j'avais commencé à faire ma carrière dans le contrôle de gestion,
c'était dans l'aérospatiale.
Globalement, c'était le lancement du futur avion gros porteur, l'A380.
Il n'avait même pas encore son nom de baptême.
Il s'appelait l'A3XX.
Et globalement, il était tellement énorme que se posait un problème de
savoir où le façonner.
D'habitude, les avions, les fuselages sont façonnés en Allemagne, les ailes
en Espagne, la case de train d'atterrissage en France, etc.
C'est un vrai Meccano qui se montait à Toulouse.
Sauf que le fuselage était porté par un avion qu'on appelait le Beluga, qui
était fait pour porter des bouts d'avion.
Sauf que là, vous avez un avion encore plus gros que le Beluga.
Donc, concrètement, la grande question était : "Est-ce qu'il ne serait pas
opportun de monter l'avion autour du fuselage, comme le fait Boeing,
directement en Allemagne puisqu'on ne peut pas transporter le fuselage ?"
Après, la politique s'en est mêlée, la finalité, c'était qu'il fallait
quand même le transporter.
La grande question a été : "Attention, on se met un surcoût potentiel dont
on n'imagine pas la portée."
Il a fallu fabriquer des bateaux pour transporter le fuselage, puis il a
fallu rentrer dans l'estuaire de la Garonne, surélever les ponts, parce que
le bateau ne pouvait pas passer avec le fuselage, il a fallu inventer des
essieux pour que les camions puissent...
Il a même fallu monter une nouvelle usine parce qu'une fois déplié, l'avion
était trop grand pour l'ancienne.
Vous imaginez.
Ça, c'était du délire.
La finalité de l'histoire, c'est quoi ?
C'est que le projet a échoué parce qu'on s'est rendu compte que c'était
tout un pataquès pour que le fuselage atteigne l'usine, et au fond, c'est
un programme qui a été abandonné, d'autant que plein de compagnies
aériennes devaient faire des modifications tellement il était grand.
Dès que vous avez l'idée, vous avez le coût, et ça, il faut que le contrôle
de gestion anticipe le plus en amont possible le coût de l'idée pour voir
si le produit est rentable.
Deuxième problème qu'on rencontre maintenant, d'habitude, on avait le gros
des coûts qui était en interne, dans l'entreprise.
C'est-à-dire que 90 % des coûts, c'était à la maison.
Maintenant, les coûts naissent à l'extérieur quand le client possède le
produit, des coûts de maintenance, les coûts des risques sanitaires,
écologiques, le recyclage, et puis l'amiante, et les batteries, et qu'est-
ce qu'on en fait ?
Tous ces coûts-là...
Alors attention, je n'en connais peut-être même pas encore le dixième.
Ça, l'avenir va le dire.
Ces coûts-là, le contrôle de gestion doit essayer de les anticiper le plus
possible parce qu'ils re-rentrent directement dans le coût de l'idée.
C'est bien beau d'inventer un produit, si on met 10 ans à le recycler, si
ensuite, il y a des problèmes sanitaires qui vont revenir par boomerang
dans les coûts, autant le savoir tout de suite pour savoir quel prix de
vente fixer.
Autre problématique, l'organigramme est fait de branches et beaucoup de ces
branches ne forment pas ce qu'on va appeler des coûts directs, c'est-à-dire
qui sont liés au produit.
Il y a énormément de fonctions dans l'entreprise qui sont des fonctions
dites support.
Happiness manager, les achats, l'informatique, la logistique, les
ressources humaines, le marketing, la pub, la direction, les DAF, les
contrôleurs de gestion, les comptables, qui maintenant forment quasiment 70
% des coûts.
Question : comment est-ce qu'on va arriver à facturer ça directement dans
les produits ou services sans faire trop d'erreurs.
Ensuite, eh bien, depuis les années 1990, on a vu la baisse de
l'industrialisation en France versus la sous-traitance à l'étranger.
Il faut comprendre que maintenant, 60 % des coûts de revient d'un produit
s'achètent et ne se fabriquent plus.
Donc, pour piloter les coûts, il faut piloter les achats et la logistique.
En plus, le contrôle de gestion n'est pas pour l'instant si bon que cela
pour aller chercher les coûts.
On connaît les coûts officiels.
Sur cette table, il y a un plateau, c'est objectif, je peux le toucher,
mais il y a énormément de coûts dans l'entreprise, des coûts cachés,
larvés, d'opportunités, qui sont faits de stocks, de gaspillage, et il faut
savoir les identifier pour ne pas demander de faire des efforts à tous
bêtement.
Car qui dit coûts un peu bêtes dit efforts sur des gens qui en ont déjà
fait beaucoup.
Voilà pour l'essentiel de toutes les problématiques qu'il va falloir lever
sur les coûts.
Il faut maintenant qu'on s'attarde à parler de la valeur.
À tout de suite.

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