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HORTELAN MASTER2MED

Neurochirurgie
Pr. D. Martin
2019-2020

Chapitre 9
Traumatismes
crânio-encéphaliques
1
HORTELAN MASTER2MED

0. Le coma traumatique
Introduction
Avant d’aborder les différentes lésions de la traumatologie crânienne, il est nécessaire de revoir une
chose correctement : l’évaluation du coma traumatique.
Le terme « coma » fait référence à l’altération de deux fonctions élémentaires :

Conscience Vigilance
Fonctions cognitives
connaissance de soi, du monde
Fonction d'éveil
extérieur, dans le temps et dans l'espace

La vigilance réside dans le tronc


La conscience réside dans le cérébral, plus particulièrement
cortex cérébral dans la substance réticulée
activatrice ascnedante (SRAA)
Un état de coma peut donc résulter d’une atteinte diffuse du cortex cérébral (conscience)1, d’une
atteinte isolée ou diffuse du tronc cérébral (éveil), ou des deux simultanément.

Bien qu’il soit probable que le dessinateur de


cet œuvre soit quelque peu perturbé, ce
dessin résume à merveille l’objectif de ce
début de chapitre : évaluer l’état de
conscience d’un patient qui ne dit strictement
rien.
Pour se faire, il existe toute une série
d’algorithmes qui vont être brièvement
décrits. Ils ne sont absolument pas à savoir, ils
sont simplement là pour introduire la
méthode d’évaluation rapide qui les surpasse
tous : la seule et l’unique échelle de Glasgow

1
Pour ne pas être en contradiction avec le Pr. Maquet, je tiens à préciser qu’une atteinte isolée de la
conscience donne un état végétatif et non un coma. Le coma sensu stricto est une atteinte de des deux
fonctions à la fois. En fait, cette partie du chapitre devrait s’intituler « altération de l’état de conscience ».

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Voici un algorithme figurant certains livres de références.


L’objectif est celui-ci : au terme de l’interrogatoire du
blessé, quantifier l’état de conscience du patient ou la
profondeur du coma selon 4 stades. Premièrement, il
faut interroger le blessé pour voir s’il répond ou non.
S’il répond, il convient d’évaluer son attention, sa
mémoire, son affectivité et son jugement (super facile au
bord de la route hum…). S’il ne répond pas, il faut lui
donner des ordres simples et évaluer si la réponse est
adaptée ou non. Si la réponse est adaptée, on dira que le
patient est obnubilé. Si la réponse n’est pas adaptée, il
convient alors d’utiliser des stimuli tactiles, sonores et
visuels pour obtenir une réaction motrice. Si le patient à
une réaction motrice, on dira qu’il est obnubilé (parfait
ça, il n’y a aucune différence avec l’obnubilé précédent).
Si le patient ne réagit pas aux stimuli, il faut alors
employer un stimulus douloureux. En fonction du type de
réponse végétative/orientée, les 4 stades de comas
seront attribués, le stade 4 étant le coma le plus profond.
Réaliser un tel algorithme au bord de la route, ce n’est pas simple. Grossomodo, cet algorithme
devrait s’utiliser comme ceci : patient agité et/ou obnubilé : stade 1, patient est subclaquant : stade 4
Les autres stades ne servent strictement à rien. Ça ne sert à rien de faire un algorithme aussi long
pour obtenir une information aussi pauvre que « coma stade 2,3 ».

Les français ont inventé une méthode d’évaluation du coma tenant compte de la localisation de la
lésion intitulée « niveau d’extension du dysfonctionnement encéphalique » - (Grenoble 1977).
Ainsi, ils distinguent le dysfonctionnement cortico-sous-cortical, diencéphalique, diencéphalo-
mésencéphalique, mésencéphalique et protubérantiel. Primo, il faut déjà bien se souvenir de sa
neuroanatomie. Deuxio, pour arriver à une telle précision dans la localisation lésionnelle il faut faire
un paquet de manœuvres et de réflexes. Tout ça pour rien en plus ! En effet, si l’on veut obtenir
rapidement la réponse à la question du « où » on fait une imagerie et basta.

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Enfin, d’autres (Jouvet) ont essayé de quantifier (+/-/0) l’examen clinique d’un trouble de la
conscience en se basant sur ces paramètres : perceptivité, réactivité aspécifique, réactivité à la
douleur, réactivité végétative. Le problème c’est que c’est encore trop subjectif. Quelle est la
différence entre un + et un - ? Toutefois, il faut reconnaitre que cette méthode a du bon puisqu’elle a
le mérite d’essayer de quantifier la profondeur d’un trouble de la conscience.

Mais ceux qui ont véritablement gagner le gros-lot, ce sont les neurochirurgiens Teasdale et Jennet de
l’institut de neurologie de Glasgow en Ecosse…

Glasgow coma scale (GCS)


L’échelle de Glasgow ou Glasgow Coma Scale, est une échelle quantifiant l’état de conscience selon
trois éléments : l’ouverture des yeux (Eye), la réponse verbale (Verb) et la réponse motrice (Motor).
Ces trois paramètres (E – V – M) ont été évalué selon 2 stimuli extrêmement simples :
1. Le bruit
2. La douleur

Glasgow
coma score

Ouverture Réponse Réponse


des yeux verbale motrice

4
Bruit
Douleur
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Au terme de la réalisation de l’échelle de Glasgow (ci-dessous), le patient obtient un score global : le


GCS, résultant de l’association des trois sous-scores : E, V et M.
Sachant que :
 La réponse oculaire donne 1 à 4 points
 La réponse verbale donne 1 à 5 points
 La réponse motrice donne 1 à 6 points
…il est aisé de conclure que le score minimal est 3/15 et que le score maximal est de 15/15.
« Soyons clairs, celui qui me dit ou qui m’écrit que l’on peut avoir un 0 dans un des sous-scores ou au
carrément au score de Glasgow, je reporte ce chiffre sur sa cotation ».
C’est ce qui est résumé sur la figure ci-dessous :

E V M GSC
1à4 1à5 1à6 3 à 15

Avant de voir en détails l’évaluation des trois paramètres d’observation, voici le résumé de l’échelle
de Glasgow. C’est une petite mise-en bouche avant de se lancer tête baissée dans son analyse…

Eye Verb Motor


Ouverture Réponse Réponse
des yeux Verbale motrice
5 6
4 obeit
spontanée orientée
5
orientée
4
3 confuse 4
au bruit évitement
3 3
inapropriée stéréotypée en
2 flexion
à la douleur 2 2
incompréhensible stéréotypée en
extension
1 1
absente 1
absente absente

En rose foncé : réponses spontanées 5


En rose intermédiaire : réponses obtenues à l’aide d’un stimulus sonore
En rose clair : réponses obtenues à l’aide d’un stimulus nociceptif (douloureux)
En noir : aucun stimulus (sonore ou douloureux) ne permet d’obtenir une réponse.
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L’ouverture des yeux – Eye


L’ouverture des yeux est le premier paramètre analysé par l’échelle de Glasgow.
Puisqu’il y a 4 scénarios envisageables selon l’échelle de Jennet et Teasdale :
 Le score maximal qu’un patient puisse obtenir est de 4 points
 Le score minimal qu’un patient puisse obtenir est de 1 point.

4 POINTS
Le patient a les yeux ouvert spontanément, en dehors de toutes stimulation
Ouverture des yeux spontanée
Le patient n’a pas les yeux ouverts spontanément mais il ouvre les yeux à la
stimulation sonore, lorsqu’on l’appelle/lui demande de les ouvrir
Il ne faut vraiment pas hésiter à lui hurler dessu. Le but est d’obtenir une
3 POINTS réponse, il faut être absolument sûr que le stimulus sonore soit perçu, ce n’est
Ouverture des yeux au bruit pas en chuchotant des mots d’amour dans l’oreille d’un polytraumatisé qu’il
ouvrira les yeux
Le patient n’a pas les yeux ouverts spontanément et ne réagit pas lorsqu’on
l’appelle (même en lui hurlant dessus) mais il ouvre les yeux suite à un
stimulus douloureux.
Ce n’est pas du sadisme, le but est simplement d’obtenir une réaction de la
2 POINTS part du patient. Il faut savoir que la perception douloureuse est différente chez
une personne dans le coma.
Ouverture des yeux à la douleur Pour réaliser un stimulus nociceptif, plusieurs méthodes sont possibles :
o Pousser sur l’arcade orbitaire
o Pousser sur l’articulation temporomendibullaire
o Pousser derrière la branche montante de la mandibule, juste en avant
de la mastoïde
o Pincer le bord du trapèze
o Pincer les mamelons : ce n’est plus fait de nos jours car ça les abimes
o …
Exercer une pression sur le lit de l’ongle à l’aide d’un stylo est la méthode
validée par Jennet et Teasdale, les auteurs de l’échelle de Glasgow.

1 POINT
PAS DE « 0 » DANS L’ECHELLE DE GLASGOW
Ouverture des yeux absente

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La réponse verbale – Verb


La réponse verbale est le second paramètre analysé par l’échelle de Glasgow.
Puisqu’il y a 5 scénarios envisageables selon l’échelle de Jennet et Teasdale :
 Le score maximal qu’un patient puisse obtenir est de 5 points
 Le score minimal qu’un patient puisse obtenir est de 1 point.

5 POINTS Le patient répond correctement aux questions qui lui sont posées : « Quel
est votre nom ? En quelle année sommes-nous ? Quel âge avez-vous ? »
Réponse verbale orientée
4 POINTS Le patient répond à la question mais il est un peu « à côté de la plaque ».
Par exemple : il est désorienté dans le temps et dans l’espace : « Quelle est
Réponse verbale confuse la date exacte ? Le 8 décembre 2012 docteur… »
Le patient sait néanmoins s’exprimer par des phrases construites.

3 POINTS La réponse n’a absolument rien à voir avec la question. Le patient s’exprime
par quelques mots inappropriés à la question initiale, il ne fait pas de
Réponse verbale inappropriée phrases construites. Par exemple : « hier, maman, ta gueule ».

2 POINTS Le patient s’exprime par des grognements, des gémissements.


Le patient s’exprime par des sons, sans réel contenu langagier.
Réponse verbale incompréhensible NB : Cette réponse peut être obtenue par interrogatoire (stimulus sonore) ou
par un stimulus nociceptif – Pr. Garraux – neurohoméostasie (BAC3MED)

1 POINT
PAS DE « 0 » DANS L’ECHELLE DE GLASGOW
Réponse verbale absente

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La réponse motrice – Motor


La réponse motrice est le troisième et dernier paramètre analysé par l’échelle de Glasgow.
Puisqu’il y a 5 scénarios envisageables selon l’échelle de Jennet et Teasdale :
 Le score maximal qu’un patient puisse obtenir est de 6 points
 Le score minimal qu’un patient puisse obtenir est de 1 point.

6 POINTS La réponse motrice est parfaitement adaptée, le patient obéit parfaitement


aux injonctions du médecin : « levez les bras, montrez trois doigts… »
Réponse motrice normale - obéit

5 POINTS Le patient n’obéit pas aux commandes vocales (stimuli sonores) mais il réagit
de manière orientée au stimuli nociceptif.
Réponse motrice orientée Concrètement cela signifie qu’il va localiser la douleur et qu’il va réaliser un
mouvement en direction de l’origine du stimulus pour tenter d’y mettre fin.

4 POINTS Le patient tente de se soustraire au stimulus nociceptif mais de manière peu


adaptée. Le patient ressent la douleur et essaie d’y mettre un terme mais de
Réponse motrice d’évitement manière moins élaborée qu’une réponse motrice orientée : il n‘essaie pas
d’attraper le stimulus, mais de le chasser, de s’en dégager vaguement…
Une autre différence entre réponse motrice orientée – réponse motrice
d’évitement, c’est que le patient à réponse motrice orientée parviendra à
croiser la ligne médiane pour chasser le stimulus nociceptif tandis que le
patient à réponse motrice d’évitement n’y parviendra pas.
Autrement dit : s’il on applique un stimulus nociceptif du côté droit et que l’on
immobilise le bras droit d’un patient ayant une réponse motrice orientée, il
utilisera son bras gauche pour chasser la douleur. Ce sera moins volontiers le
cas chez un patient ayant une réponse motrice d’évitement

3 POINTS Pourquoi « stéréotypée » ? Parce que c’est toujours la même réponse chez
tout le monde : à la stimulation douloureuse le patient fléchit les membres
Réponse motrice en flexion supérieurs : l’avant-bras sur le bras et la main sur l’avant-bras.
stéréotypée /!\ Réponse en flexion stéréotypée du membre supérieur

2 POINTS C’est simplement l’inverse de la flexion stéréotypée : le patient fait une


extension des membres supérieurs lorsqu’il ressent un stimulus douloureux
Réponse motrice en extension
/!\ Réponse en extension stéréotypée du membre supérieur
stéréotypée
1 POINT
PAS DE « 0 » DANS L’ECHELLE DE GLASGOW
Réponse motrice absente

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Réponse motrice M4 Réponse motrice M5

Réponse motrice M2 Réponse motrice M3

Le patient ci-contre répond à la douleur


d’une façon particulière : réponse motrice
stéréotypée en flexion du côté droit,
réponse motrice stéréotypée en extension
du côté gauche…
Que choisir ? 2 ? 3 ? 2,5 ?
La bonne réponse c’est 3.
Ce n’est pas une question d’optimisme ou
de pessimisme. Simplement, il est
probable que sa réponse en extension
stéréotypée soit le résultat d’une fracture
du bras, d’une tumeur cérébrale de la
M2 ? M3 ? M2,5 ? région rolandique etc.

En réalité il faut bien concentrer sur la mission de l’échelle de Glasgow : l’échelle de Glasgow n’a pas pour but d’évaluer
l’ampleur des déficits neurologiques, elle existe pour quantifier l’état de conscience du patient, la profondeur de son coma.
Par conséquent, l’échelle de Glasgow doit faire part de la meilleure réponse obtenue.
C’est pour ça qu’il ne faut pas hésiter à gueuler sur le patient, il faut vraiment être sûr qu’il ne réagit pas à un stimulus sonore
avant de passer à l’échelon suivant, la douleur.
Pour reprendre le cas discuté ci-dessus, puisqu’un des deux membres supérieurs réagit à la douleur de manière stéréotypée
en flexion, c’est
Dansunleniveau 3. médical,
dossier En revanche, il est évident
il ne suffit qu’il faudra
pas simplement consigner
d’écrire 15/15,le5/15,
déficitil moteur du toutes
faut écrire bras gauche
les dans le dossier
médical du patient.
lettres

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Le score de Glasgow

3 ≤ Score de Glasgow ≤ 15

Eye (1-4) Verb (1-5) Motor (1-6)


Lorsque le score de Glasgow a été établis, il ne s’agit pas d’écrire simplement « 8/15 » dans le dossier
médical. Il faut l’inscrire de manière « développée » pour que les autres médecins qui le liront
ultérieurement puissent se faire une idée de l’état du patient : E4, V5, M6 ou E1, V1, M3…
Parfois, l’évaluation de l’un ou l’autre des paramètres est rendu impossible par les circonstances.
L’exemple le plus évident est celui de l’intubation endotrachéale, car comment peut-on évaluer la
réponse verbale d’une personne qui ne sait pas parler ? La réponse est simple, c’est impossible : V1.
Il est néanmoins possible d’un peu raffiner les choses en inscrivant un « T » en indice à V1 : V1T.
Cela permet de signaler que l’évaluation verbale est rendue impossible par un Tube endotrachéal.

Avantages de l’échelle de Glasgow


L’échelle de Glasgow est très facile à appliquer, elle fait partie de l’évaluation immédiate du patient
avec un traumatisme crânien (même au bord de la route !). Pour rappel, au chapitre précédent –
traumatismes rachido-médullaires - nous avions vu qu’un des moyens les plus simples pour se faire
une idée de l’état global de la moelle du patient était de lui demander de bouger les mains et les
pieds. Ces mêmes injonctions peuvent être inclues dans le GCS (M)…Bref : un GCS ça va vite !
L’échelle de Glasgow est accessible à tous : médecins, infirmier, pompiers, ambulanciers…
L’échelle de Glasgow est internationale :
Cette fiche est peut-être incompréhensible
parce qu’elle est écrite en chinois, mais le
Score de Glasgow étant international, il est
possible de conclure que l’état de ce
patient s’est significativement amélioré au
cours de son hospitalisation…

L’échelle de Glasgow présente un très grand intérêt dans le suivi des patients.
En effet, pouvant être appliquée autant de fois que nécessaire (toutes les heures, tous les jours…),
elle permet d’objectiver une amélioration ou une régression.
À ce propos, le mot « échelle » n’a pas été choisi par hasard : l’évolution, qu’elle soit bonne
(ascendante) ou mauvaise (descendante) se fait généralement échelons par échelons (ce n’est pas un
truc qui passe de 8 à 15 puis à 4).
Enfin, l’échelle de Glasgow à une valeur pronostic pour les traumatismes crâniens.

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Histogramme : devenir des patients de
selon leur score de Glasgow à
l’admission. HORTELAN MASTER2MED
Ce graphique met en lumière un score
tout particulièrement : 5. Il s’agit d’une
valeur charnière à laquelle :
- 1/3 des patients s’en sortiront
sans séquelle
- 1/3 des patients s’en sortiront
avec des séquelles graves
- 1/3 des patients décèderont

Bref tout ça pour dire que le score de Glasgow à l’admission est capital puisqu’il conditionne la prise
en charge du patient compte tenu de sa valeur pronostic.
Lorsqu’un patient arrive avec un traumatisme crânien, il est dans le box des soins intensifs avec le
médecin. Derrière la porte, toute la famille est là. Les proches n’ont que deux questions en tête :
1. Va-t-il s’en sortir ?
2. Aura-t-il des séquelles ?
Le reste, ça leur passe complètement au-dessus de la tête. Grâce au score de Glasgow, il est possible
de leur faire donner une estimation des chances qu’a le patient de s’en sortir avec et sans séquelles.
Remarque : bien que l’échelle de Glasgow soit actuellement utilisée pour évaluer l’état de conscience
des patients dans une multitude de pathologies, il est bon de rappeler qu’elle fut initialement créée
pour évaluer l’état des patient porteurs d’un traumatisme crânien. Ainsi, sa valeur pronostic n’est
validée QUE pour les traumatismes crâniens. Concrètement, cela signifie qu’un patient à 5/15 suite
à un traumatisme crânien n’a pas du tout le même pronostic qu’un patient à 5/15 ayant fait une
hémorragie méningée.

Inconvénients de l’échelle de Glasgow (non-vu)


• Peu discriminante pour les grades sévères
o GCS < 7 = E1 V1 M5
o Évaluation par M
• Nécessité d’une échelle particulière pour enfant

La mort cérébrale
La mort cérébrale est un diagnostic reposant sur des critères cliniques et paracliniques :

Critères cliniques
• GCS = 3/15 : pas d’ouverture des yeux, pas de réponse verbale et motrice.
Outre ses nombreux avantages, le score de Glasgow intervient également dans le diagnostic
de mort cérébral, c’est donc un élément majeur dans l’évaluation des patients.
Ainsi, écrire GCS = 3/15 dans le dossier médical d’un patient sans en être absolument certain
a de graves conséquences car cela signifie littéralement que le patient est cliniquement mort.
Or, s’il est mort, il ne sert plus à rien de s’en occuper.
« Il ne disait rien, il avait les yeux fermés et ne bougeait pas » ≠ 3/15, pigé ?

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• Absence des réflexes du tronc cérébral : échelle de Liège = 0.


Remarque préalable : couramment fusionnée à l’échelle de Glasgow, l’échelle de Liège n’est
pas à retenir dans le cadre du cours de neurochirurgie MASTER2, contrairement au GCS qui
est un tuyau aussi énorme que le pénis d’Anthony.
Pourquoi ? l’échelle de Glasgow est destinée à tous tandis que l’échelle de Liège est réservée
aux neurochirurgiens. « Je n’ai pas dis que vous ne pouviez pas la connaitre, mais ce n’est pas
la peine de me la sortir à l’examen écrit ou oral en croyant gagner des points si vous ne
connaissez pas l’échelle de Glasgow sur le bout des doigts. ». A bon entendeur…
L’échelle de Liège a été rajoutée pour plusieurs raisons, et notamment parce que l’échelle de
Glasgow n’est pas toujours réalisable. Par exemple : un patient ayant fait un violent accident
de la route arrive aux urgences. Il présente un énorme œdème facial (E1), est intubé (V1T) et
tétraplégique (M1). Sur base de ces paramètres, on est forcé de constater que le GCS = 3,
mais le patient est-il mort pour autant ?
Conclusion : certes l’échelle de Glasgow est utile, mais elle présente tout de même
certaines limites, raison pour laquelle (entre autres) l’échelle de Liège fut inventée.
L’échelle de Liège évalue l’intégrité du tronc cérébral grâce aux réflexes du tronc. Elle est
organisée de manière sens rostrocaudale, du mésencéphale vers le bulbe :
o 5 points : réflexe cornéen2 : le patient cligne des yeux (bilatéralement) à la
stimulation tactile de la cornée.
o 4 points : réflexe oculocéphalique vertical : les yeux du patient se déplacent dans le
sens opposé à la mobilisation verticale de sa tête (flexion-extension). Autrement dit
les yeux du patient s’élèvent si l’on place sa tête en flexion, et inversement.
/!\ Faut-il le faire chez monsieur tout le monde après un accident de voiture, au bord
de la route, comme l’échelle de Glasgow ? SURTOUT PAS. Comme nous l’avons vu au
chapitre 8 – Traumatismes rachido-médullaires, tout patient polytraumatisé est à
priori porteur d’une lésion rachidiennes (voire même plusieurs dans 15% des cas)
o 3 points : réflexe photomoteur : myosis bilatéral à l’illumination d’un œil
o 2 points : réflexe oculocéphalique horizontal : les yeux du patient se déplacent dans
le sens opposé à la mobilisation horizontale (G/D) de sa tête. Autrement dit les yeux
du patient vont à droite si l’on tourne sa tête à gauche, et inversement.
A nouveau, il convient de rappeler qu’il ne faut pas mobiliser le rachis d’une
personne suspecte d’avoir une lésion rachidienne. Conclusion : ne pas réaliser soi-
même l’échelle de Liège
o 1 point : réflexe oculocardiaque : bradycardie à la compression du globe oculaire. Il
est aisé de comprendre que la réalisation d’une telle manœuvre n’est pas vraiment
recommandée si le patient est en état de choc.
o 0 : aucun de ces réflexes n’est présent.

2 Dans l’échelle de Liège enseignée par le Pr. Garraux en BAC3, le premier niveau était le réflexe fronto-orbiculaire,
c’est-à-dire le réflexe de la glabelle. Alors de deux choses l’une, soit il s’agit d’une erreur de l’un ou de l’autre, soit les
deux réflexes ont une intégration mésencéphalique haute et sont équivalents. Cette discordance est d’autant plus
troublante que lorsque le Pr. Martin mentionne le réflexe cornéen, il décrit le réflexe glabellaire. Enfin, les rares
illustrations de l’échelle de Liège trouvées sur internet mentionne également le réflexe fronto-orbiculaire comme le
premier niveau. Ce réflexe se caractérise par un clignement palpébral bilatéral à la percussion de la glabelle.

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• Absence de tachycardie à l’atropine


• Absence de mouvements respiratoires spontanés pendant le test d’apnée : le patient
n’effectue aucun mouvement inspiratoire spontanée lorsqu’il est débranché du respirateur

Critères paracliniques
• EEG (électroencéphalogramme) plat
Remarque : parfois on cherche à obtenir un EEG plat pharmacologiquement.
Rappel chapitre 1 – PIC : certaines drogues sont administrées dans le but d’abaisser l’activité
cérébral à 0 (EEG plat) pour réduire secondairement le débit sanguin cérébral et donc, la PIC
• Absence de réponse au potentiels évoqués somesthésique : concrètement l’examen
recherche une activité cérébrale quelconque à la stimulation des membres. S’il n’y a plus n’y
a plus de cerveau, aucune activité ne sera enregistrée.
Les potentiels évoqués moteurs ne donneront rien non plus : puisqu’il n’y a plus de cerveau,
il n’y a plus d’activité générée à la stimulation transcrânienne : aucun mouvement ne sera
objectivé.
Remarque : les potentiels évoqués auditifs ne seront pas réalisés car ils peuvent être plats en
l’absence d’une mort cérébrale. Par exemple : une personne faisant un arrêt cardio-
respiratoire pendant un certain temps peu perdre sa cochlée suite à l’ischémie prolongée.
Or s’il n’y a plus d’organe de l’audition, il n’y a plus de transduction de l’énergie son en
potentiels d’action : les potentiels évoqués auditifs (PEA) seront plats.
3

• Absence de flux sanguin dans la boite crânienne : à nouveau, il s’agit d’une simple
application du chapitre 1 – PIC. Lorsqu’il y a une hypertension intracrânienne, la pression de
perfusion cérébrale diminue progressivement jusqu’à 0mmHg. Sachant que le débit sanguin
cérébral (DSC) est égal à la pression de perfusion cérébrale (PPC) divisée par les résistances
vasculaire (R) - DSC = PPC/R – si la pression de perfusion vaut 0, le DSC vaut 0.
Cette arrêt circulatoire cérébral peut être mis en évidence par doppler transcrânien ou à
l’angiographie des vaisseaux à destinée céphalique

Conditions :
Enfin, avant de conclure au diagnostic de mort cérébrale, il convient d’exclure toute une série de
situation qui peuvent imiter une situation de mort cérébrale et donner un coma :
• Hypothermie : c’est typiquement l’histoire du gars mort bourré qui s’éclate la tronche dans
l’escalier devant chez lui en rentrant et qui passe la nuit dehors un 2 décembre.
• Intoxication éthylique
• Imprégnation médicamenteuse
• Hypotension artérielle
• Causes métaboliques (hypoglycémie, hypocalcémie…)
• Causes endocrines (hypothyroïdie, insuffisance surrénalienne…)
Le score de Glasgow peut être utilisé dans toutes ces situations, mais il est important de rappeler que
sa valeur pronostic n’est valable QUE pour les traumatisé crânien.

Le mot de la fin : si vous ne l’aviez pas encore compris, l’échelle de Glasgow est un tuyau. Pas un petit
tuyau pour arroser ses jonquilles, un tuyau aussi gros que notre anus après l’examen de DT
#youknowwhatImean. Je cite : « je ne veux pas que vous ayez le moindre doute/questionnement au
sujet de cette échelle » Sincèrement, je pense que c’est la décapitation si on se plante dessus…
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1. Généralités à propos des


traumatismes crâniens
Avant-propos
Il existe une multitude de lésions crâniennes traumatiques différentes. Ces dernières peuvent
intéresser le scalp, les os du crâne, les méninges, les nerfs, les artères et l’encéphale lui-même.
Par facilité, chacune de ces régions sera vue individuellement au cours de ce chapitre, toutefois il
faut garder à l’esprit qu’une telle séparation est artificielle car les lésions intéressent souvent
plusieurs de ces éléments simultanément.
Par exemple : quelqu’un qui prend un coup de bat de base-ball à l’arrière de la tête présentera
certainement des lésions du scalp, du crâne, des méninges et du cerveau…
➔ Les lésions sont vues séparément par facilité mais elles sont souvent associées dans la réalité
Ainsi, ce chapitre est structuré selon la topographie des lésions et évolue couche après couche, de
l’extérieur vers l’intérieur. Les prochains points aborderont donc successivement :
2) Le scalp
3) Le crâne
4) Les méninges
5) Les nerfs crâniens
6) Les artères
7) L’encéphale
Enfin pour chaque couche, les traumatismes primaires/secondaires seront distingués (s’ils sont vus)
Lorsque l’on parle de traumatisme primaire, la lésion est directement la conséquence du choc.
Lorsque l’on parle de traumatisme secondaire, la lésion est secondaire à un autre phénomène

Physiopathologie
Les traumatismes crâniens peuvent résulter de deux mécanismes :
1. Impact direct :
 L’impact direct donne essentiellement des lésions du scalp et du crâne, même s’il peut
aussi donner des lésions focales des méninges et du cerveau
 Néanmoins, un impact direct peut également générer des lésions focales à distance par
transfert de l’énergie cinétique, c’est ce que l’on appelle les phénomènes de cavitation.
Par exemple : lors d’un traumatisme par arme à feu, la balle donne des lésions focales
(elle perce le scalp et le crâne et fait un trou dans les méninges et le cerveau) mais elle
peut également générer des lésions à distance du point de pénétration par dissipation de
l’énergie cinétique.
Fracture du crâne
Lésions focales des méninges et du cerveau
Impact direct
Transfert de l'énergie cinétique 15
Lésions focales à distance
(phénomènes de cavitation) Lésion de contrecoup
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2. Phénomènes d’accélération/décélération (linéaire et rotatoires) : à l’intérieur du crâne, le


cerveau est maintenu en suspension à par un coussin de liquide céphalorachidien.
Lors d’une accélération/décélération brutale et intense, il y a un déplacement relatif du
cerveau par rapport au crâne. Les conséquences sont doubles :
 Impact du cerveau sur les reliefs osseux interne : contusions cérébrales multiples
 Étirement/rupture/cisaillement des petits vaisseaux et axones un peu partout dans le
parenchyme cérébral, aboutissant à des lésions axonales multiples.

Impact de l'encéphale sur les


Contusions multiples
reliefs osseux
Impact direct Déplacement du cerveau
Étirement, déchirure,
cisaillement des axones et Lésions axonales diffuse
petites vaisseaux

2. Lésions du scalp
Primaires Secondaires
➢ Plaies ➢ Infections
Scalp ➢ Contusions ➢ Nécrose
➢ Ecchymoses

Plaies
 Attentions : pertes hémorragiques parfois abondantes. Les plaies du scalp saignent
abondamment compte tenu de l’importante vascularisation de ce dernier. Ainsi, il n’est pas
impossible qu’une personne meurent d’un choc hypovolémique d’une « simple » plaie du
scalp.
Face à une telle plaie, il ne s’agit pas de faire
tranquillement la causette avec le blessé : il faut
agir vite pour arrêter le saignement.
1. Rabattre le flap.
2. Placer une grosse compresse sur la plaie
3. Réaliser un bonnet d’Hippocrate
C’est vraiment important, cela peut sauver des vies.

Pour la petite histoire, autrefois dans le Far-West les indiens scalpaient les
cowboys en guise de trophée. En réalité, il est relativement facile de
scalper une personne. À l’aide d’un couteau bien affuté, il suffit d’inciser la
peau. Ensuite, le scalp se décollera facilement (en tirant légèrement) en
raison du plan de séparation anatomique entre le crâne et le scalp.

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 Attention : danger infectieux. A nouveau, pour minimiser le risque infectieux d’une plaie du
scalp il vaut mieux recourir rapidement à des moyens de parages (compresse/bandage).
 Attention : perte de substance. Parfois il peut littéralement manquer un morceau de peau.
Cela peut poser quelques problèmes de reconstructions car la peau du scalp n’est pas très
extensible. Autrement dit, lorsqu’il manque un morceau de peau au niveau du crâne, il en
manque vraiment un ; il n’y a pas moyen de tirer sur les bords de la plaie pour combler le
vide. Que faire dès lors ? Couvrir la plaie
 Attention : lésions nerveuses. Le scalp est non seulement très irrigué mais il est également
très innervé. Lors d’une lésion du scalp, des nerfs peuvent être abîmer, ce qui peut
provoquer des troubles sensitifs : hypoesthésies, dysesthésie, céphalées persistantes…
Les nerfs particulièrement visés sont
 Le nerf supraorbitaire (1) : issu de la branche ophtalmique du nerf trijumeau (V), il part
vers l’arrière pour innerver le crâne lorsqu’il émerge du trou sus-orbitaire
 Le nerf grand occipital/d’Arnold (8) il provient de C2 et remonte vers l’orbite

Photo :
Fracture ouverte du crâne
Face à une plaie pareille, il
n’est pas nécessaire de
commencer à trifouiller
dedans pour savoir s’il y a
d’autres lésions plus
profondes… Il vaut mieux
rabattre le flap, mettre une
bonne compresse et serrer
un bandage autour de la tête
(bonnet d’Hippocrate) en 17
attendant le neurochirurgien
HORTELAN MASTER2MED

Hématomes
Aucun commentaire au cours oral de 2019. Dans les diapositives annotées de P. Yves (autre année) je
lis que ces hématomes peuvent être importants, notamment chez les enfants et entrainer une anémie
ou une hypovolémie. Ce serait d’ailleurs une complication importante de la neurochirurgie chez les
enfants en bas-âges et nouveau-nés.
• Sous-cutané
• Sous-galéal : l’hémorragie sous-galéale est potentiellement mortelle car l’espace sous-galéal
est un espace non-limité suffisamment grand pour accueillir une partie importante de la
masse sanguine de l’enfant (Rigo Q7) : choc hypovolémique

Contusions et ecchymoses
Définitions (< cours de Médecine Légale) :
 Les ecchymoses sont des infiltrations hémorragiques du tissu sous-cutané.
 Les hématomes sont des collections hémorragiques qui peuvent aussi bien se trouver en
sous-cutané qu’ailleurs dans l’organisme.
Certaines ecchymoses sont révélatrices de phénomènes plus graves. Ainsi, il faudra être
particulièrement attentif aux ecchymoses palpébrales bilatérales (en lunette) et mastoïdiennes.
En effet, ces dernières sont respectivement révélatrices de fractures de l’étage antérieur et moyen
de la base du crâne (cfr point 3).

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2. Lésions du crâne
Primaires Secondaires
Crâne Fractures Ostéomyélite

Généralités
Avant d’entrer dans le vif du sujet il est bon de préciser deux choses :
 La présence d’une fracture du crâne n’est pas le facteur pronostic du traumatisme crânien.
En d’autres termes, ce n’est pas parce qu’un patient présente une fracture du crâne qu’il va
nécessairement mal évoluer. Que du contraire en réalité : les fractures du crâne évoluent
souvent favorablement car les os du crâne se resoudent facilement, surtout chez les plus
jeunes.
 Les fractures du crâne témoignent de l’intensité du traumatisme crânien
Bien que les fractures du crâne ne reflètent pas le pronostic du patient traumatisé crânien,
elles témoignent de l’existence d’un choc important. Autrement dit, la présence d’une
fracture du crâne sous-entend qu’il y a eu un bon gros traumatisme crânien.
Pourquoi ? Le crâne est une enceinte très solide qui ne casse pas suite à de banals chocs.
Quelle importance ? Si le crâne est cassé, le traumatisme était important. Dès lors, il faudra
rechercher d’éventuelles lésions au niveau des structures plus fragiles sous-jacentes.
Parmi les fractures du crâne, on distingue les fractures de la voute des fractures de la base.
Dans un premier temps, seules les fractures de la voute seront abordées, les fractures de la base
seront vues ultérieurement par soucis de cohérence (point 4 – méninge - brèches méningées).

Fractures de la voute
Les fractures de la voute sont de deux types :
1. Linéaires : trait de fracture dans un/plusieurs os du crâne. Les fractures linéaires
peuvent être
 Simple (unique)
 Multiples (fracture en étoile – fracture comminutive - crâne en mosaïque)
Les fractures linéaires résultent souvent d’un choc distribué « à plat » sur le crâne.
2. Déplacées = embarrures : les morceaux d’os sont déplacés les uns par rapport aux autres.
Les embarrures résultent le plus souvent de la rencontre du crâne avec un objet contondant
Ce dernier va casser et enfoncer les os du crâne dans la profondeur, les déplaçant les uns par
rapport aux autres.

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Sachant cela, il est aisé de comprendre que le pronostic et le traitement sera très différent selon qu’il
s’agisse d’une fracture linéaire de la voute ou d’une embarrure de la voute.

Fractures linéaires de la voute


• Les fractures linéaires sont de simples ruptures de la continuité des os du crâne sans
déplacement. Comme dit ci-dessus, les fractures linéaires peuvent être simple ou multiples.
• Les fractures linéaires résultent généralement d’un choc distribué à plat sur le crâne
• La clinique est relativement simple à comprendre :
o Parfois le patient ne se plaint de rien
o Parfois le patient se plaint simplement d’une douleur locale
o Parfois le patient présente en plus de la douleur, des signes neurologiques en
fonction des lésions cérébrales associées (commotion, contusion)
• La fracture de la voute en elle-même n’est donc pas nécessairement quelque chose de grave.
Il faudra cependant faire attention à la localisation car certaines fractures du voute sont plus
dangereuses que d’autres, même si elles ne sont pas déplacées :
o Si la # croise le trajet d’une artère méningée : risque d’hématome extradural
o Si la # croise le trajet d’un sinus duremérien : risque d’hématome extradural
o Si la # irradie dans un sinus frontal : risque de rhinorrhée cérébrospinale
o Si la # irradie dans un orifice de la base du crâne : risque de lésions de nerfs crâniens

Multiples fractures linéaires de la voute.


C’est homme s’est pratiquement fait un
volet crânien tout seul

Reconstructions 3D : fractures linéaires multiples de la voûte du crâne, fracture du rebord et du plancher de l’orbite

• Traitement : sans traitement la plupart du temps. Elles consolident bien toutes seules

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Fractures de la voute déplacées – les embarrures


• Les embarrures sont des enfoncements d’une partie de la voûte crânienne. Contrairement
aux fractures linéaires, il y a ici une notion de déplacement.
• Les embarrures résultent le plus souvent d’un choc entre le crâne et un objet contondant.
• Les embarrures sont catégorisées en deux types selon l’état du revêtement cutané :
o Sans plaie cutanée = embarrure fermée
o Avec plaie cutanée = embarrure ouverte (fracture ouverte).
• Les embarrures sont souvent bien plus problématiques que les fractures linéaires car :
o Elles exercent une compression sur le contenu de la boîte crânienne.
Il s’agit d’une simple application de la loi de Monro-Kellie : « l’enceinte crânio-
rachidienne ostéodurale est rigide et remplie à pleine capacité d’un contenu
inextensible ». Si le volume du contenant diminue, cela revient au même qu’une
augmentation de volume du contenu : violation de Monro-Kellie → HTIC aigue
o Elles peuvent abîmer la dure-mère : cfr brèches méningées.
o Elles peuvent abîmer le parenchyme cérébral (contusion)exposant ce dernier à une
éventuelle cicatrice gliale qui, si elle est au niveau du cortex, est très épileptogène.
o Les embarrures ouvertes exposent le patient à un risque infectieux très important
(d’autant plus si la méninge est déchirée). Leur traitement doit être rapide.
CT-Scan – coupe axiale – fenêtre osseuse : les points noirs
représentent de l’air qui est rentré à l’intérieur du crâne à
travers la plaie. Autrement dit, la présence de ces petites
cavités aériques (pneumatocèles) est la preuve radiologique
qu’il s’agit d’une embarrure ouverte. Étant donné que le
risque infectieux est très important, le traitement est urgent !

Photo : ne pas aller pousser son


doigt pour voir s’il s’agit d’une
embarrure. Le risque de pousser
un fragment osseux et de rompre
une artère méningée ou d'infecter
la plaie. Mettre une compresse
avec de l’isobétadine et bander
crâne

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• Traitement : il est chirurgical : levée d’embarrure. Concrètement le chirurgien va inciser pour


exposer toute la région cassée. Il va ensuite mobiliser les fragments d’os pour mettre fin à la
compression cérébrale et réparer les dégâts sous-jacents (méningés et cérébraux).
NB : le traitement est une urgence s’il s’agit d’une embarrure ouverte.

La fracture en balle de ping-pong du nouveau-né


Il existe une embarrure un peu particulière qui survient chez le nouveau-né.
La fracture dite « en balle de ping-pong » est une dépression circulaire de la voûte du crâne.
Chez le nouveau-né, les os du crâne ne sont pas tout à fait calcifiés. Dès lors, c’est un peu comme
lorsque l’on souhaite casser du bois encore vers : ça casse, mais pas totalement.
Le traitement de la fracture en balle de ping-pong du nouveau-né est le même est, à l’instar d’une
embarrure, chirurgical. Le chirurgien va réaliser un trou de trépan en périphérie de l’embarrure et y
introduire un instrument pour soulever l’enfoncement de l’intérieur.

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3. Lésions des méninges


Primaires Secondaires
Méninges Hémorragies sous-arachnoïdiennes Hématome extra-dural
Brèche méningée Hématome sous dural
NB : par « hémorragie sous-arachnoïdiennes » on sous-entend hémorragies sous-arachnoïdiennes
traumatiques. Pour rappel le chapitre 4 traite uniquement des hémorragies spontanées.

Hémorragie méningée traumatique


Ci-joint, une pièce d’autopsie (encéphale)
d’une personne décédée d’une hémorragie
sous-arachnoïdienne traumatique.
Tout comme dans l’hémorragie méningée
spontanée, le sang a envahi l’espace sous-
arachnoïdien (diffusément dans ce cas-ci).

L’hémorragie méningée traumatique n’a pas


du tout le même pronostic et la même gravité
que l’hémorragie méningée traumatique
compte tenu de leurs étiologies tout à fait
différentes.
Pour rappel, les hémorragies méningées spontanées proviennent dans la toute grande majorité des
cas de la rupture d’un anévrysme (congénital) artériel. Les hémorragies méningées traumatiques
quant à elles, proviennent de la rupture d’un vaisseau (le plus souvent veineux) circulant à la
surface du cerveau, dans l’espace sous-arachnoïdien. Parfois même, le saignement provient
directement du parenchyme cérébral. Puisqu’il s’agit de sang veineux, le risque de vasospasme est
beaucoup plus faible.
Parfois il n’est pas toujours facile de connaitre la nature de l’hémorragie sous-arachnoïdienne.
Par exemple : un homme est retrouvé inconscient dans sa voiture après avoir fait un accident.
Les examens (scan) révèlent la présence d’une hémorragie méningée. A-t-il fait une hémorragie
méningée suite à l’accident, ou a-t-il fait un accident suite à une hémorragie méningée spontanées
par rupture d’anévrysme ?

Brèches méningées
La brèche méningée est la seconde lésion primaire des méninges. Comme son nom l’indique, il s’agit
d’une ouverture au sein des méninges, plus précisément il s’agit d’une déchirure de la dure-mère.
En réalité, il serait totalement juste d’employer le terme « brèches ostéo-dure-mériennes », car les
déchirures de la dure-mère sont fortement associées à certaines fractures…

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Quelles fractures ?
• Les embarrures
• Les fractures de la base du crâne. La dure mère est très adhérente à la base du crâne compte
tenu de l’existence d’une multitude d’aspérités et foraminal. Ainsi, un traumatisme une
fracture de la base du crâne s’accompagne généralement d’une déchirure de la dure-mère.
C’est la raison pour laquelle les fractures de la base du crâne n’ont pas été vues au point 2.
Parmi les fractures de la base, il convient pour des raisons cliniques, de distinguer :
o Fractures de l’étage antérieur
o Fracture de l’étage moyen
Avant d’aller plus loin il est nécessaire de faire un petit rappel sur la base du crâne.
La base du crâne désigne le plancher osseux sur lequel repose l’encéphale. Divisées en trois étages
(antérieur/moyen/postérieur) la base du crâne repose/contient des cavités aériques :
 Au niveau de l’étage antérieur : sinus frontaux, cellules ethmoïdales et sinus sphénoïdaux
Tous ces sinus se drainent au niveau des fosses nasales.
 Au niveau de l’étage moyen : dans le rocher de l’os temporal se trouve l’oreille moyenne.
L’oreille moyenne se draine dans le rhinopharynx par le biais de la trompe d’Eustache.

Quelle importance ?
Lors d’une brèche ostéo-dure-mérienne, deux phénomènes se produisent :
1. De l’air rentre dans les espaces sous-arachnoïdiens = pneumatocèle3
2. Le liquide céphalorachidien contenu dans les espaces sous-arachnoïdiens passe à travers la
brèche et s’écoule vers l’extérieur = fistule de LCR.
Mais où va se liquide ? C’est là que le rappel prend tout son sens…
 Lors d’une fracture de l’étage antérieur : le liquide céphalorachidien s’écoule des
espaces sous-arachnoïdiens vers les cavités sinusales et fini dans les fosses nasales
Ainsi, le signe clinique le plus évident d’une fracture de l’étage antérieur de la base
crâne est une rhinorrhée cérébrospinale.
 Lors d’une fracture de l’étage moyen : deux situations sont envisageables
- Le tympan est perforé : le liquide céphalorachidien passe à travers l’orifice tympanique et
s’écoule par le conduit auditif externe.
Ainsi, une fracture de l’étage moyen de la base crâne AVEC perforation du tympan est une
otorrhée cérébrospinale.

3
Pneumato- = air / -cèle = cavité.

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- Le tympan est intact : dans ce cas, le liquide céphalorachidien est drainé hors de l’oreille
moyenne par la trompe d’Eustache vers le rhinopharynx
(l’arrière-nez). Il s’écoulera donc également par les fosses nasales.
Ainsi, une fracture de l’étage moyen de la base crâne SANS perforation du tympan est une
rhinorrhée cérébrospinale paradoxale.
Tout ceci est résumé sur ce schéma…

La rhinorrhée cérébrospinale
La rhinorrhée cérébrospinale se définit comme un « écoulement nasal de liquide céphalorachidien »
Dans la réalité des faits, il sera seulement possible dans un premier temps de constater un
écoulement de liquide clair, translucide, eau de roche, par une ou deux narines.
Dès lors comment faire la différence avec des sécrétions nasales banales ?
Le liquide céphalorachidien contient du glucose, ce qui n’est pas le cas des sécrétions nasales.
En effet, la teneur en glucose du liquide céphalorachidien (glycorachie) est approximativement égale
aux 2/3 de la glycémie, soit ± 0,6g/L. Par conséquent, la mise en évidence de glucose dans le liquide
clair s’écoulant par les narines du patient grâce à une tigette permettra de faire cette différence.
D’autre part, cet écoulement peut être accentué/provoqué par des gestes simples augmentant la
pression intracrânienne à savoir la compression des jugulaires et la position tête en bas.

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Outre un antécédent traumatique et la symptomatologie liée à la fracture en elle-même, la


rhinorrhée cérébrospinale s’accompagnera parfois d’une hypotension intracrânienne.
Pour rappel ce qui est vraiment typique dans l’hypotension intracrânienne, c’est le caractère postural
des plaintes, ces dernières étant largement dominées par des céphalées holocrâniennes. Ainsi, le
patient relatera une augmentation des symptômes (céphalées, nausées, acouphènes…) au passage
de la position couchée à la position debout – Chapitre 1 – PIC.
Enfin, il est judicieux que la fuite de liquide céphalorachidien :
 Peut survenir très précocement après l’accident. Dans ce cas elle sera souvent
accompagnée d’un pneumatocèle à l’imagerie de mise au point.
 Peut survenir tardivement après l’accident, des mois voire des années plus tard.
C’est la raison pour laquelle une fracture de l’étage antérieure du crâne correspond à un
pourcentage d’incapacité de 66% (% d’incapacité justifiant de ne pas aller au travail)
Il faudra vraiment faire attention de ne pas confondre une rhinite allergique ou
vasogénique avec une rhinorrhée cérébrospinale tardive. Pour se faire il ne faut jamais
hésiter à faire une tigette pour ôter le doute qu’il peut exister chez un patient ayant une
fracture de la base du crâne et qui mouche un liquide clair…
Pourquoi est-ce si important ? Car il y a risque de méningite ++++

Fractures et brèches méningées de l’étage antérieur


Les fractures de l’étage antérieures de la base du crâne peuvent s’accompagner :
• D’un hématome en lunette. Ce dernier provient du saignement de la fracture qui s’infiltre
aisément sous le revêtement cutané palpébral, très lâche.
• D’une épistaxis, surtout présent au début, l’épistaxis se mêle à la rhinorrhée cérébrospinale
et lui donne un aspect rouge sang.
• D’une anosmie par atteinte des bulbes olfactifs/radicelles de la lame criblée (cfr point 5)
• D’une cécité monoculaire par atteinte d’un nerf optique (cfr point 5)
• D’une rhinorrhée cérébrospinale provenant d’une brèche dure-mérienne.
Le véritable problème des fractures antérieures de la base du crâne, c’est qu’elles s’accompagnent
d’une brèche de la dure-mère. Ces fractures mettent donc en rapport des cavités en contact avec
l’air extérieur et remplies de germes (sinus frontaux, cellules éthmoïdales…) avec les espaces sous-
arachnoïdiens, ce qui expose le patient à un risque de méningite excessivement important.

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Pneumatocèles

Les ventricules
sont plein d’air

Outre l’évaluation du risque infectieux, savoir s’il y a une brèche ostéoméningée au


niveau de l’étage antérieur peut être utile pour réaliser certains actes techniques…
Vieilles radiographies de face : il est possible de voir deux clartés triangulaires. Ce
sont en réalité les ventricules latéraux qui sont remplis d’air = pneumatocèle.
Il est également possible de voir quelque chose d’autre, une sorte de tige radio-
opaque sur la ligne médiane…Qu’est-ce que c’est ? Une sonde gastrique.
En fait, il s’agit d’un patient traumatisé crânien chez qui l’on a voulu mettre une
sonde nasogastrique. Malheureusement le médecin qui a fait ça ignorait l’existence
d’une brèche ostéoméningée et lors de son passage par le nez, la sonde est passée
au travers de la brèche ostéodurale. Ainsi, au lieu d’aller dans l’estomac, la sonde
est passée au travers de la base du crâne et de la dure-mère dans les espaces sous
arachnoïdiens et a ramené un liquide eau de roche (le liquide céphalorachidien) …
Moralité : lorsqu’un patient présente une fracture antérieure de la base du crâne, il
ne faut jamais mettre une sonde gastrique par le nez, il faut l’introduire par la
bouche
Comment reconnaitre une fracture de l’étage antérieur ? : Hématome en lunette.
L’hématome en lunette c’est LE signe clinique d’une fracture de l’étage antérieur.

Un patient qui présente un hématome en


lunette a une fracture de l’étage antérieur de la
base du crâne jusqu’à preuve du contraire.
Il faudra donc :
- Être particulièrement vigilant s’il
présente une rhinorrhée claire
(positionnelle ou spontanée)
- Lui mettre une sonde gastrique par la
bouche si c’est nécessaire

Lors d’une fracture de l’étage antérieur avec brèche méningée, ce n’est pas tant la perte de LCR qui
pose problème, mais ce qui peut potentiellement rentrer dans les espaces sous-arachnoïdiens.
En effet : le LCR étant produit en permanence et renouvelé en totalité approximativement trois fois
par jours, sa perte excessive n’est pas un gros problème. En revanche, la brèche méningée met en
communication les espace-sous arachnoïdiens et les cavités sinusales, pleines de germes.
➔ Les patients présentant une brèches dure-mérienne sur fracture de l’étage antérieur ont un
risque très élever de faire une méningite.

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Un tarissement de la rhinorrhée par fermeture spontanée de la brèche est-il envisageable ?


Le tarissement spontané est rare.
Compte tenu de ce risque infectieux important et de la rareté des tarissements spontanés, il convient
de réparer la brèche ostéodurale par une intervention chirurgicale.

Risque
infectieux
élevé
Indication
opératoire
formelle
Tarissement
spontané
rare
Ainsi, les brèches ostéoméningées de l’étage antérieure sont pratiquement toujours opérées.
Concrètement il va falloir identifier
précisément la localisation de la déchirure et
y accéder en soulevant délicatement le
cerveau pour aller colmater la brèche
méningée par un patch.
Ce patch peut provenir :
 De substituts dénaturés d’animaux
(péricarde de cheval, aponévrose de
cochon)
 Du patient lui-même : aponévrose
du tenseur du fascia latta, galéa.
Généralement ces deux dernières options
sont préférées
Enfin, il est à noter que les fractures de l’étage antérieure sont souvent associées aux fractures de
Lefort (et autres fractures faciales), ce qui nécessitant des chirurgies crânio-faciales complexes.

28
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Fractures et brèches méningées de l’étage antérieur


Les brèches ostéoméningées des l’étage moyen se manifestent :
 Soit une otorrhée cérébrospinale
 Soit par une rhinorrhée cérébrospinale paradoxale.
Elles sont également associées à la présence d’une ecchymose de la région mastoïdienne résultant
de la collection sous cutanées du saignement de la fracture du rocher de l’os temporal.
Il n’est pas rare que les fractures de l‘étage moyen lèsent le nerf facial (VII). En effet, pour rappel ces
deux nerfs sortent du tronc et rentrent dans le conduit auditif externe au sein du rocher. Au fond de
ce conduit le nerf facial pénètre dans le canal de Fallope et effectue deux angulations avant de
ressortir en surface par le foramen stylomastoïdien pour gagner la parotide.
Une lésion du nerf facial se traduira donnera une paralysie faciale périphérique (cfr point 6)

Contrairement aux brèches de l’étage antérieur, les brèches ostéo-dure-mériennes de l’étage moyen
de la base du crâne ont un risque septique moindre et se tarissent volontiers spontanément.
Par conséquent, l’indication opératoire est rare.

Risque
infectieux
moindre
Indication
opératoire
relative
Tarissement
spontané
fréquent
Ce n’est pas parce que l’indication opératoire est rare qu’il n’y a aucun traitement…
Dans le cas d’une brèche méningée sans indication chirurgicale formelle, il convient de mettre en
place une stratégie thérapeutique visant à limiter l’écoulement de LCR au travers de la brèche.
✓ Repos au lit en position
 Semi-assise s’il y a une rhinorrhée
 Décubitus latéral s’il y a une otorrhée (l’oreille qui coule vers le haut)
✓ Acétazolamide (Diamox®)
✓ Ponctions lombaires d’évacuation

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Traitement des brèches méningées - synthèse


Moyens Effet souhaité
Position semi-assise (rhinorrhée) Réduire la PLCR
Traitement Acétazolamide (DIAMOX) – Réduire la production de LCR
3x500mg/J
médical
Ponctions lombaires évacuatrices Réduire la PLCR
Réparation chirurgicale de la brèche. Colmater la brèche
La réparation chirurgicale est
Traitement pratiquement toujours réalisée pour
chirurgical les brèches de l’étage antérieur alors
qu’elle est exceptionnelle pour les
brèches de l’étage moyen de la base.
Remarque : il ne faut pas obstruer les orifices en mettant des tampons/bouchons…si ça doit
s’écouler ça s’écoulera. Par contre, une telle attitude accroît le risque infectieux par macération.

Maintenant que nous avons vus les lésions méningées primaires, nous allons nous attaquer aux
lésions secondaires : l’hématome extradural et l’hématome sous dural (aigu/chronique/nourrisson).
Comme toutes les autres, ces lésions sont dites « secondaires » car elles ne surviennent pas
directement après le traumatisme, mais progressivement.

Hématome extradural (épidural)


L’hématome extradural ou épidural désigne une collection de sang située entre l’os et la dure-mère.
En temps normal, il n’existe aucun espace entre le feuillet externe de la dure-mère (feuillet périosté)
et la thèque interne4 des os du crane. Toutefois, la dure-mère peut parfois être décollée de l’os à la
faveur d’un saignement (HED), c’est pourquoi l’espace extradural est un espace dit « virtuel ».
Comme dit ci-dessus, l’hématome extra-dural est une lésion secondaire des méninges.
Ceci sous-entend donc qu’il provient d’une lésion primaire :
➢ Saignement provenant d’une fracture de la voute
➢ Déchirure d’un sinus dural (sinus sagittal ou sinus transverse)
➢ Déchirure de l’artère méningée moyenne : il s’agit de la lésion primaire la plus fréquemment
responsable d’un hématome extradural
Rappels de neuroanatomie : vascularisations des méninges
La dure-mère crânienne, comme l’os du crâne à sa face interne, est vascularisée par les artères
méningées. Ces vaisseaux participent aussi à la vascularisation des nerfs crâniens.
1. L’artère méningée antérieure provient du système carotidien via l’artère ophtalmique.
2. L’artère méningée moyenne, la plus importante, provient de la carotide externe, par
l’intermédiaire de l’artère maxillaire interne. Elle pénètre dans le crâne par le trou de l’épine
(trou petit rond – foramen spinosum) et donne deux branches principales qui se dirigent en

4
Je suppose qu’il s’agit du périoste ?

30
HORTELAN MASTER2MED

haut et en arrière. Leurs gouttières osseuses, les nervures en « feuille de figuier » peuvent
être en partie fermées.
Cette particularité anatomique favorise sa déchirure dans les fractures de la voute du crâne aux endroits
de son passage. Le sang, quittant les vaisseaux sous pression, peut décoller la dure-mère (zone
décollable de Marchand, former un hématome « extradural » et ainsi comprimer le cerveau.
3. Les artères méningées postérieures proviennent des artères vertébrales et des branches
occipitale et pharyngienne ascendante de la carotide externe.

L’artère méningée moyenne est la principale contributrice de la vascularisation dure-mérienne.


Issues de l’artère maxillaire interne (une branche de la carotide externe), elle pénètre dans le crâne
par un trou latéro-basal : le trou petit rond - trou de l’épine – foramen spinosum.
Elle court ensuite à la face interne de la convexité osseuse fronto-temporo-pariétale, dans laquelle
elle imprime son relief dit « en feuille de figuier ».
Ainsi, l’artère méningée moyenne est maintenue dans des petites gouttières osseuses
(formant parfois un véritable canal) ce qui favorise sa déchirure lors d’un traumatisme crânien

Le saignement se répandra alors dans l’espace extradural, décollant progressivement la dure-mère


de l’os au niveau de la zone fronto-temporo-pariétale, constitutionnellement moins bien attachée à
l’os : la célèbre « zone décollable de Marchand ».

31
HORTELAN MASTER2MED

Aspects cliniques
La chronologie des évènements d’un hématome extradural est tout à fait typique.
Pour bien comprendre cette succession d’événements, un exemple s’impose : Mr X prend un choc
violent sur le crâne et perd instantanément connaissance (commotion cérébrale). Après être revenu à
lui, il décide de rentrer se reposer à la maison. Quelques heures plus tard, il est admis à l’hôpital dans
un état comateux.
Il y a donc trois temps successifs :
1. Commotion cérébrale – première perte de connaissance
2. Intervalle libre – le patient revient à lui pendant un laps de temps pouvant durer quelques
heures à 24h. C’est pendant cet intervalle que se constitue l’hématome extradural.
3. Nouvelle altération de l’état de conscience (coma) : le saignement qui s’accumule dans
l’espace extradural comprime le parenchyme cérébral (HTIC aigue) à l’origine d’un engagement
transtentoriel. Si le patient n’est pas pris en charge, la mort est inévitable.

Cette notion d’intervalle libre est fondamentale à retenir, puisqu’elle conditionne la prise en charge
médicales des commotions cérébrales : tout patient ayant eu un traumatisme crânien avec perte de
connaissance est garder en observation à l’hôpital pendant 24h.
On ne veut pas laisser le patient rentrer chez lui et prendre le risque qu’il revienne un état de coma
trois heures plus tard dans. C’est plus avantageux de le garder en observation pendant l’intervalle lire
pour pouvoir réagir rapidement avant qu’il ne tombe dans le coma.
Mais justement pourquoi y a-t-il un coma ?
Chapitre 1 – conséquences mécaniques de l’hypertension intracrânienne : l’accumulation de sang
dans l’espace extradural provoque une hypertension intracompartimentale et refoule le parenchyme
cérébral dans le compartiment voisin, provoquant in fine un engagement transtentoriel.

Mydriase paralytique homolatéral


Triade symptomatique de l’engagement transtentoriel : Coma
Signes pyramidaux controlatéraux32
HORTELAN MASTER2MED

En résumé…
Aggravation secondaire
Commotion cérébrale Intervalle libre de Céphalées (HTIC)
symptômes, de durée Coma
Impact direct sur le crâne
variable selon la vitesse de Mydriase homolatérale
Souvent perte de constitution de l’hématome Signes pyramidaux
connaissance (quelques heures à 24 h) controlatéraux
Engagement temporal

Aspects radiologiques
• Aspect : l’hématome extradural a un aspect tout à fait typique en lentille biconvexe.
Le sang est séquestré entre la courbure des os du crâne et la dure-mère qui se fait refouler
• Localisations :
o Fronto-temporo-pariétale : l’hématome extradural se constitue le plus souvent en
regard de la convexité fronto-temporo-pariétale, et ceci pour deux raisons :
◊ La déchirure de l’artère méningée moyenne est la lésion primaire la plus fréquente
◊ La dure-mère est moins adhérente à l’os au niveau de la zone décollable de Marchand.
o Région frontale, occipitale, fosse postérieure : localisations plus rares…

33
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CT-Scan – coupe coronale


+
Pièce d’anapath
Superbe exemple de ce qui
arrive lorsqu’un patient n’est pas
pris en charge suffisamment
vite : ça fini à la morge.
Lorsque l’on voit un scanner
pareil, il faut courir en salle
d’opération car on est en phase
de décompensation sur la
courbe de Langfitt.

Traitement
L’hématome extradural est une urgence neurochirurgicale absolue. En d’autres termes, tout patient
faisant un hématome extradural doit immédiatement être transféré en salle d’opération pour qu’on
lui fasse un volet de trépanation (= craniotomie) pour évacuer les caillots.
Comme le sous-entend le traitement l’hématome extradural n’est pas une collection liquide.
En réalité l’hématome extradural est semi-compact, un peu comme de la gelée de groseille.
Le volet de trépanation est donc nécessaire, un simple trou de trépan ne suffirait pas à évacuer
l’hématome extradural « il n’y aurait pas un gros pchiiit qui sortirait du crâne du patient »

34
HORTELAN MASTER2MED

Anthony pétant le feu après sa craniotomie

Le traitement en urgence par volet de trépanation est extrêmement efficace : le pronostic du patient
est excellent s’il est pratiqué suffisamment tôt. Typiquement ce sont des patients qui arrivent à
l’hôpital avec un pied dans le cercueil et qui en ressortent le lendemain en pétant le fuego.
Si le traitement est réalisé tardivement, après l’engagement tentoriel, le pronostic est exécrable :
séquelles neurologiques lourdes/mort.

Hématome sous-dural
L’hématome sous-dural se décline en deux grandes entités :
1. Hématome sous-dural aigu
2. Hématome sous-dural chronique
Enfin, une petite variante sera abordée : l’hématome sous-dural du nourrisson.
Quelle que soit sa sorte, l’hématome sous-dural se développe dans l’espace sous-dural, entre le
dure-mère et l’arachnoïde. Contrairement à la solide liaison existante entre la dure-mère et l’os, la
dure-mère et l’arachnoïdes ne sont pas fermement collée l’une à l’autre.
Ainsi, l’espace sous-dural peut largement s’ouvrir à la faveur d’un saignement.
Cette différence anatomique permet d’expliquer la différence radiologique fondamentale entre un
hématome sous-dural et un hématome extradural :
 L’hématome est une lentille biconvexe
 L’hématome sous dural est une lentille convexe à l’extérieur, concave à l’intérieur.
Étant donné que l’espace sous-dural s’ouvre volontiers, l’hématome se répand à la surface de
l’encéphale plutôt que de le repousser comme le ferait un hématome extradural.

HSD HED

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Hématome sous-dural aigu


Les hématomes extraduraux et les hématomes sous duraux aigus sont certes, des lésions méningées
secondaires, mais ils sont issus des lésions primaires assez différentes.
Pour rappel, l’hématome extradural provient la plupart du temps d’une déchirure de l’artère
méningée moyenne même s’il peut occasionnellement provenir d’une rupture d’un sinus dural ou d’un
saignement d’une fracture de la voute.
L’hématome sous-dural aigu a d’autres origines :

Hématome sous-dural

Déchirure d'une veine pont Rupture d'un foyer de


Déchirure d'un sinus dure-mérien contusion cérébrale dans
l'espace sous dural

HSD pur HSD associé à une contusion

L’hématome sous-dural aigu est une urgence neurochirurgicale : il doit être pris en charge très
rapidement, encore plus rapidement que l’hématome extradural, sans quoi c’est la mort assurée.
Pourquoi ?
Pace qu’il n’y a (presque) pas d’intervalle libre entre la commotion et l’état comateux.
Pourquoi n’y a-t-il pas d’intervalle libre ?
Parce que l’espace sous-dural est potentiellement très grand. Par conséquent, lorsqu’il se remplit,
l’effet de masse est énorme : le cerveau est brutalement comprimé de toute part, ce qui provoque
une hypertension intracrânienne aigue majeure presque instantanément après le traumatisme.

36
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Cette clinique foudroyante est la raison pour laquelle un article paru en 1990 portant sur les
hématomes sous-duraux aigu se nommait « these patients who talk and die », ce qui signifie
littéralement « ces patients qui parlent et qui meurent ».
Ce titre illustre à la perfection le caractère brutal de l’hématome sous-dural aigu.

Le traitement de l’hématome sous-dural chronique est une crâniotomie par grand volet de
trépanation, permettant l’évacuation des caillots et la réalisation d’une hémostase.
Le pronostic est fort dépendant du type d’hématome sous-dural (pure VS associé à une contusion) :
 S’il s’agit d’un hématome sous-dural aigu pur, le pronostic est bon car il n’y a pas de lésions
cérébrales associées
 S’il s’agit d’un hématome sous-dural aigu associé à une contusion cérébrale, l’évacuation de
l’hématome est certes nécessaire, mais le pronostic du patient restera fort dépendant de
l’évolution de la contusion cérébrale en elle même

Hématome sous-dural chronique


L’hématome sous-dural chronique se situe au même endroit que son homologue l’hématome sous-
dural aigu c’est-à-dire : dans l’espace sous dural, entre la dure-mère et l’arachnoïde.
À l’instar de l’espace extradural, l’espace sous-dural est un espace virtuel. Autrement dit, en temps
normal il n’existe aucun espace entre la dure-mère et l’arachnoïde. Toutefois, la liaison entre ces
deux feuillets méningés étant particulièrement lâche, l’espace sous-dural s’ouvre volontiers à la
faveur d’un saignement.
Contrairement à l’espace extradural qui se décolle sur des surfaces relativement petites, l’espace
sous-dural est très vaste : il concerne toute la zone située entre la pachyméninge (dure-mère) et
l’une des leptoméninge (l’arachnoïde).
Ces différences anatomiques permettent d’expliquer les aspects tomodensitométriques très
différents qu’il existe entre les hématomes sous-duraux et les hématomes extraduraux :

Hématome sous-dural Hématome extra-dural


Lentille convexe en dedans – concave en dehors Lentille biconvexe
Étendu Plus localisé

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La lésion primaire de l’hématome sous-dural chronique est une déchirure d’une veine-pont.
Pour information, ces veines sont appelées ainsi car elles réalisent de véritables « ponts » entre les
veines cérébrales et les sinus duraux, notamment le sinus longitudinal supérieur

Cette déchirure survient soit spontanément soit consécutivement à un traumatisme d’apparence


bénigne à causes de facteurs prédisposants :
✓ L’atrophie cérébrale : le cerveau étant de plus petite taille, les veines ponts sont mises
sous-tension, ce qui accroît le risque de déchirure au moindre traumatisme.
L’atrophie cérébrale peut être la conséquence :
 De l’âge
Remarque : dire (à l’oral) que l’hématome sous-dural survient davantage chez la
personne âge parce qu’elle est plus fragile est une erreur. L’hématome sous-dural
chronique se développe souvent chez la personne âgée car elle est susceptible d’avoir
une atrophie cérébrale mettant les veines ponts sous tension.
 D’une démence
 De l’alcool
✓ Les médicaments agissants sur l’hémostases
 Anticoagulants
 Antiagrégants

Compte tenu de la banalité du choc et de la lenteur de développement de l’hématome sous-dural


chronique (quelques semaines à quelques mois), il n’est pas rare que les patients ne se souviennent
pas du traumatisme initial.
Suite à cette déchirure, un saignement va se déverser petit à petit dans l’espace sous-dural, parfois
bilatéralement, en prenant l’aspect typique convexe/concave des hématomes sous duraux.
Ce saignement de faible intensité va progressivement s’entourer d’une néomembrane qui
participera secondairement à l’aggravation de l’effet de masse. Comment ?
• D’une part les néovaisseaux contenus dans cette membrane peuvent saigner suite à la
croissance de l’hématome sous-dural.
• D’autre part, cette néomembrane se comporte comme une membrane semi-perméable.
Le contenu de l’hématome extradural ayant une forte pression osmotique suite à la
dégradation de l’hémoglobine, le liquide céphalorachidien va littéralement se faire attirer
dans la poche.
Augmentation du volume de l’hématome sous-dural chronique
Puisque l’évolution est progressive, la clinique sera d’apparition progressive également :
✓ HTIC chronique
✓ Démence d’installation progressive (penser à HDS-C si démence d’installation rapide !)
✓ Détérioration progressive et souvent fluctuante de l’état de conscience

38
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L’aspect du liquide s’accumulant dans l’espace sous-dural dépend du délai écoulé depuis le trauma
En effet, autant le liquide est rouge sang au début compte tenu de sa haute teneur en hémoglobine,
autant il va progressivement évoluer vers un aspect xanthochromique (jaunâtre) avec le temps.
Cette métamorphose est le reflet de la dégradation de l’hémoglobine au sein de l’hématome.
Petit à petit, les produits de dégradations de l’hémoglobine vont devenir majoritaires et feront virer
la coloration de l’hématome du rouge au jaune.

L’aspect macroscopique n’est pas le seul à changer au cours du temps…


En effet, l’aspect TDM de l’hématome sous-dural dépend aussi du délai écoulé depuis le trauma

En effet, la collection sanguine va


progressivement perdre en
densité avec le temps.
Ainsi, l’hématome qui était
initialement hyperdense par
rapport au parenchyme cérébral
deviendra successivement :
- Isodense càd : de même
densité que le
parenchyme cérébral
- Hypodense càd, de densité
moindre que le
parenchyme cérébral
39

Isodense si délai > 3 semaines Hypodense si délai > 3 semaines


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Remarque : la densité n’est pas toujours homogène au sein d’un hématome sous-dural. Pourquoi ?
 Les globules rouges sédimentent dans les zones déclives
 Un hématome sous-dural peut résulter de plusieurs saignements successifs.
Ainsi, la dégradation du sang ne sera pas homogène au sein de l’hématome sous-dural.
 Parfois, des cloisons fibreuses sont observables.

TDM : Hématomes sous-duraux chroniques bilatéraux hétérogènes avec des cloisonnements fibreux
Ce sont des hématomes sous-duraux qui saignent à répétitions.
Évidemment, chaque saignement tend à augmenter un peu plus la symptomatologie du patient…

Traitement : évacuer
 Lorsque l’hématome est hétérogène ou relativement récent, il faudra réaliser une
crâniotomie pour permettre l’évacuation des caillots. Ce cas de figure est relativement rare.
 Le plus souvent le traitement est un drainage/rinçage :
1) Mise en place d’un drain dans l’espace sous-dural
2) Drainage de l’hématome sous-dural
3) Rinçage abondant l’espace sous-dural par du liquide physiologique. Ce liquide étant
dépourvu de propriétés osmotiques (>< HSDC), il sera alors résorbé en quelques jours,
permettant au cerveau de reprendre gentiment sa place dans la boîte crânienne.

Lorsque le liquide drainé n’est pas tout à fait


jaune mais que le sang est déjà partiellement
dégradé on qualifie la couleur de l’hématome
sous-dural chronique de « vieux porto »

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Hématome sous-dural du nourrisson


 Causes :
o Traumatisme néonatal : un bébé accidentellement tombé de la table à langer…
o Syndrome de l’enfant battu (Battered Child Syndrome)
o Syndrome de l’enfant secoué (Shaken Child Syndrome)
Le syndrome de l’enfant secoué a été décrit en Angleterre dans les années 1950.
Ce nom provient d’une enquête qui fut menée dans un orphelinat où la quasi-totalité
des petits pensionnaires présentaient des troubles neurologiques et de l’hypertension
intracrânienne. En fait, une vieille nonne qui travaillait dans cet orphelinat avait pour
habitude de secouer les enfants lorsqu’ils pleuraient trop afin de les calmer un bon
coup. Cette méthode horrible a eu des conséquences dramatiques sur ces enfants
puisqu’elle provoque l’apparition d’hématomes sous-duraux bilatéraux…
Bref : lorsqu’un hématome sous-dural est découvert chez un enfant, a fortiori s’ils sont plusieurs
et bilatéraux, il faut penser aux syndromes de l’enfant battu/secoué

 Clinique :
o HTIC chronique
o Macrocrânie : pour rappel l’enceinte crânienne n’est pas rigide et inextensible chez
le nouveau-né en raison de la non-fermeture des sutures et de l’existence de
fontanelles, le volume de l’enceinte peut augmenter
o Ecchymoses multiples d’âge différents
o Fractures des membres et des côtes
o …
 Imagerie
o Disjonctions des sutures
o Collections péricérébrales bilatérales

 Traitement :
o Drainage externe
o Éventuellement s’il s’agit de collection plus importante et à drainer de manière
prolongée, on fera une dérivation sous-duro-péritonéale

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4. Lésions des nerfs crâniens


Primaires Secondaires
Nerfs ➢ Contusions, sections

Les lésions des nerfs crâniens (contusions/sections) s’observent la plupart du temps lors des
fractures de la base du crâne. Cette association vient du fait que la plupart des nerfs crâniens
entrent et sortent du tronc cérébral en passant par les orifices de la base du crâne. D’autres encore
entretiennent des rapports très étroits avec les structures osseuses de la base du crâne (I, II).

Nerfs olfactifs (I)


Rappel de neuroanatomie – les nerfs olfactifs (I)
Les neurones sensitifs olfactifs sont des cellules bipolaires situées dans la muqueuse olfactive au
niveau de la voute des fosses nasales et sur les cornets supérieurs.
o Leurs prolongements périphériques, très courts, constituent des organes récepteurs.
o Leurs prolongements centraux traversent la lame criblée de l’ethmoïde pour faire synapse
dans le bulbe olfactif avec le deuxième neurone.
Les bulbes olfactifs reposent sur la lame criblée de l’ethmoïde, de part et d’autre de la crista galli.
Ils se prolongent par les bandelettes olfactives qui cheminent à la base du lobe frontal avant de se
diviser en stries olfactives médiales et latérales.

Compte tenu de leur localisation anatomique, les nerfs olfactifs sont les plus fréquemment atteint
dans les fractures de l’étage antérieur de la base du crâne. Ainsi, lors d’une grosse fracture de
l’étage antérieur, les nerfs olfactifs peuvent être sectionnés ou avulsés : anosmie – cacosmie.
Parfois, il n’y a pas de fracture mais les prolongements proximaux qui émanent de l’épithélium
olfactif se font sectionner par la lame criblée de l’ethmoïde suite à un mouvement de décélération
trop brutal. Qu’importe, les conséquences sont identiques : anosmie – cacosmie.
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Nerf optique (II)


Le nerf II pénètre dans le crâne par un canal par le canal optique. Une fracture du canal optique se
soldera par une lésion du nerf optique donnant le plus souvent une cécité monoculaire définitive.
Notons que très exceptionnellement un traumatisme crânien peut entrainer une rupture du chiasma

Nerfs vestibulo-cochléaire et facial


Les fractures du rocher peuvent léser le nerf facial (VII) et le nerf vestibulo-cochléaire (VIII).
✓ Atteinte du VII : paralysie faciale centrale
 Signe de Bell (ou signe des cils de Souques dans les formes frustres)
 Disparition du pli nasogénien
 Bouche qui tombe
 Absence des plis frontaux
 Hypoesthésie cutanée dans la zone de Ramsay-Hunt
 Hyperacousie douloureuse par atteinte du muscle stapédien
 Agueusie des deux tiers antérieurs de l’hémilangue
 Tarissement des sécrétions lacrymales
 Réflexe cornéen aboli (atteinte du muscle orbiculaire innervé par le VII)
 Élocution labiale gênée et mastication imparfaite
→Traitement : corticoïdes, décompression d nerf facial
✓ Atteinte du VIII : vertige et surdité unilatérale
→ Traitement : aucun
Toujours rechercher
une éventuelle
paralysie faciale
périphérique lorsqu'il y
a une otorrhée claire.

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5. Lésions des artères


Primaires Secondaires
Artères Plaies de paroi Fistules carotido-veineuses

La clinique sera différente selon que la lésion se forme à la base du crâne où au niveau de la voute

Fractures de la base
Les fractures de la base du crâne donneront essentiellement des lésions carotidiennes :
 Rupture
 Anévrysmes artériels traumatiques
 Fistules carotido-caverneuses
Pour rappel, l’artère carotide interne pénètre dans le crâne par le rocher (portion intrapétreuse).
Elle rentre ensuite dans le sinus caverneux (portion caverneuse) dans lequel elle effectue une boucle
appelée « siphon carotidien ». Enfin, la carotide sort du sinus caverneux et pénètre dans l’espace
sous-arachnoïdien (portion cérébrale) où elle se divisera en artère cérébrale antérieure et moyenne.

Rupture :
Une fracture de la base du crâne intéressant le sphénoïde peut
provoquer une déchirure de l’artère carotide interne.
Le débit artériel carotidien se déversera alors dans le sinus
sphénoïdal, donnant une épistaxis cataclysmique pouvant
entrainer la mort.
Le seul moyen de sauver le patient c’est de sacrifier la carotide en
catastrophe

Anévrysmes artériels traumatiques


Une fracture de la base peut également
déchirer partiellement la paroi carotidienne,
conduisant à la formation d’un anévrysme ou
d’un pseudoanévrysme artériel.
Ce dernier pourra se rompre secondairement,
exactement comme un anévrysme congénital
(Cfr. Chapitre 4)

Fistules carotido-caverneuses
Parmi les lésions secondaires figurent la fistule carotido-caverneuses. Une rupture de la carotide
interne dans sa portion caverneuse provoque un engorgement du territoire drainé par le sinus
caverneux homolatéral, ce qui donne un tableau clinique typique déjà évoqué au chapitre 4.

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✓ Exophtalmie pulsatile
✓ Souffle intracrânien audible par le patient et par auscultation,
atténué par la compression de la carotide cervicale homolatérale. Ce
souffle reflète le passage du sang de la carotide interne vers le sinus
caverneux
✓ Injection conjonctivale
✓ Chémosis
✓ Troubles oculomoteurs
✓ …

Fractures de la voûte
Les fractures de la voute crâne donnent des
 Plaies artérielles (risque d’hématome extradural)
 Anévrysmes divers
▪ Artères méningées
▪ Artères corticales
 Fistules artérioveineuses

Fistule artérioveineuse entre une Fistule artérioveineuse entre une


Anévrysmes artériels d’une branche de branche de l’artère méningée moyenne branche de l’artère méningée
l’artère méningée moyenne et une veine du diploé moyenne et une veine

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6. Lésions de l’encéphale
Primaires Secondaires
✓ Commotion ✓ Hématome intracérébral
✓ Contusions ✓ Œdème
Encéphale ✓ Lésions axonales diffuses ✓ Ischémie
✓ Plaies ✓ Abcès

Commotion cérébrale
La commotion cérébrale est une lésion relativement fréquente qui se définit comme étant une
perte de conscience immédiate provoquée par un choc direct ou indirect sur le crâne :

Perte de
Traumatisme Commotion
connaissance
crânien cérébrale
immédiate

Le traumatisme crânien à l’origine d’une commotion cérébrale peut être :


• Direct : tomber sur la tête, se prendre un objet lourd sur le crâne…
• Indirect : par exemple, faire une embardée violente avec des mouvements de la tête tels que
la masse cérébrale est bousculée dans tous les sens…
Bref la commotion cérébrale n’a absolument rien à voir avec les pertes des connaissances non-
traumatiques (une syncope par exemple), il faut nécessairement un traumatisme crânien.

À cette perte de connaissance s’associe généralement une amnésie :


• Lacunaire : le patient à oublier ce qu’il s’est passé au moment du traumatisme
Et/ou • Rétrograde : le patient à oublier ce qu’il s’est passé avant le traumatisme (heures, jours)
• Antérograde : le patient ne parvient pas à stocker de la nouvelle mémoire dans les
minutes/heure/jours suivant le traumatisme. Il n’est pas rare que certains patients soient
persuadés d’être resté plusieurs jours dans le coma alors que c’est totalement faux : ils ne se
souviennent pas de ce qui a suivi l’accident car leurs cerveaux étaient sidérés, incapables de
produire de la nouvelle mémoire…

Amnésie Amnésie
rétrograde antérograde

Amnésie 46
lacunaire
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Autrefois il était généralement admis que la commotion cérébrale ne donnait pas de lésions
anatomopathologiques car elle s’accompagnait d’un scanner normal…Cette théorie est aujourd’hui
révolue !
Actuellement, on estime que la commotion cérébrale s’accompagne de lésions axonales peu
nombreuses et diffuses dans l’encéphale, ce qui explique l’état de sidération transitoire dans lequel
est plongé le cerveau du patient. Sachant cela, il serait intéressant de réaliser une résonance
magnétique chez tous ces patients… malheureusement ce n’est guère possible en Belgique compte
tenu de la faible disponibilité de l’IRM.
Depuis que cette théorie est admise et que les examens complémentaires sont davantage pratiqués,
on se rend compte également que beaucoup de patients ayant une commotion cérébrale présentent
quand même des lésions associées visibles, ce qui infirme une seconde fois l’ancienne théorie :
- Hémorragie méningée
- Petite contusion cérébrale
- Hématome sous dural chronique de petite taille
- Hématome extradural en formation (intervalle libre).

Clinique :
La commotion cérébrale ne s’accompagne pas de gros déficits neurologiques, les patients vont se
plaindre de symptômes assez mal systématisés :
✓ Céphalées
✓ Vertiges
✓ Fatigue
✓ Troubles de l’attention
✓ Troubles de la concentration
✓ Troubles de la mémoire

Surveillance :
Attention à l’intervalle libre, surtout s’il y a une fracture du crâne ou des facteurs de risques telles
que des troubles de coagulation, un éthylisme…
Pour rappel l’intervalle libre de l’hématome extradural est la raison pour laquelle tout patient
ayant fait une commotion cérébrale est gardé en observation à l’hôpital pendant 24h.

Traitement :
✓ Repos pendant quelques jours : actuellement, on n’est plus à l’époque où l’on demandait
aux patients de rester couché sans bouger dans une pièce obscure, sans bruits. La
commotion cérébrale nécessite un repos relatif.
✓ Analgésiques : pour éviter que les céphalées ne se chronicisent

Pronostic :
Le pronostic est habituellement favorable : évolution spontanément bonne dans la majorité des cas
Dans certains cas (moyennant un terrain favorable) il se développe un syndrome postcommotionnel,
càd une persistance et exacerbation des symptômes initiaux (cfr ci-dessus), plus particulièrement
des céphalées et troubles de la concentration.

47
HORTELAN MASTER2MED

Cette persistance des symptômes provoque l’apparition de manifestations psychiatriques


importantes : anxiété, asthénie physique et psychique, troubles de l’humeur, irritabilité, insomnie...
Il faut prendre ces patients en charge rapidement. La meilleure façon de faire est de reconnaitre
l’authenticité de leur problème et de les soutenir en leur garantissant que leur problème va évoluer
favorablement.

Lésions encéphaliques diffuses


Les lésions encéphaliques diffuses se définissent comme des lésions des axones et des petits
vaisseaux de la substance blanche. Ces lésions en rapport avec la dissipation de l’énergie d’un
traumatisme dans le parenchyme cérébral sont :
• Nombreuses (il y en a parfois des centaines)
• Disséminées dans la substance blanche
• Invisible au CT-scan, d’où l’intérêt de faire une IRM5

Il est aisé de comprendre que de si nombreuses lésions peuvent altérer le fonctionnement de


l’encéphale de manière globale au point de donner un tableau clinique de coma.
C’est pour typiquement pour ce genre de lésions que l’échelle de Glasgow fut inventée.
Retournons quelques instants dans le passé : le patient arrivait à l’hôpital
dans en coma et pourtant le scan ne montrait absolument aucune lésion.
Dans de telles situation, l’échelle de Glasgow était particulièrement utile
puisqu’elle permettait d’évaluer la profondeur du coma ainsi que
l’évolution clinique du patient.
Pour rappel, le mot « échelle » n’a pas été choisi par hasard : quelle que
soit l’évolution (positive = restructuration ou négative = déstructuration),
le patient monte/descend échelon par échelon.
Enfin, l’échelle de Glasgow a un intérêt pronostic pour les traumatismes crâniens

5
L’IRM à un pouvoir de résolution supérieur à la tomodensitométrie.

48
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Contusions cérébrales

Les contusions cérébrales sont les « coups bleus du cerveaux ».


Souvent multiples et bilatérales, leurs localisations préférentielles aux pôles des lobes cérébraux :
 À la pointe des lobes temporaux
 À la face antérieur et basale des lobes frontaux
Ces localisations sont la conséquence du mécanisme lésionnel principal : la décélération brutale.
Le cerveau ayant une certaine inertie par rapport à la boîte crânienne, lorsque cette dernière s’arrête
brutalement, le cerveau continue sa course et heurte la face interne des os du crane.
NB : des lésions directes peuvent également donner des contusions cérébrales à d’autres endroits.
Le tableau clinique de la contusion cérébrale est un coma
associé à des signes neurologiques déficitaires en fonction
de la localisation de la/des contusions. La contusion
cérébrale peut se comporter comme un processus expansif
intracrânien, l’engagement transtentoriel est à craindre
surtout s’il y a une grosse contusion du lobe temporal.

Ces contusions sont parfois localisées à des endroits encore plus problématiques : le tronc cérébral

CT – Coupes axiales + pièces d’anatomopathologie : une telle lésion donnera un coma profond par
compression de la substance réticulée activatrice ascendante (SRAA).
Ce genre de lésion n’est pas compatible avec la vie…les images centrales en témoignent.

Contusions cérébrales
Les plaies cérébrales sont des lésions encéphaliques très localisées. Habituellement consécutives à
un choc direct par un objet contondant ou à la pénétration d’un projectile, elles se manifestent
cliniquement par des signes neurologiques de localisation et/ou un coma

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Les plaies cérébrales peuvent avoir des conséquences dévastatrices, sombre est leur pronostic :
 Séquelles neurologiques lourdes
 Épilepsie
 Mort
CT-scan – coupe axiale : tentative de suicide qui n’a pas porté ses fruits.
La balle est rentrée par la tempe et à traverser le lobe frontal de part en
part, donnant une hémorragie ventriculaire au passage.
Pour information : se suicider en plaçant le révolver sur sa tempe, ça ne
fonctionne pas. Le projectile traversera le lobe frontal et sectionnera
éventuellement les nerfs optiques au passage mais il ne tuera pas.
Pour se suicider au révolver, il faut tirer dans le fond de la gorge pour
toucher le tronc cérébral.
NB : ceci n’est pas un mode d’emploi pour se suicider, c’est une simple
réflexion anatomique sur le trajet du projectile.

C’est un homme qui faisait de la pêche sous-marine en Australie. Son ami


assez maladroit lui a tiré un harpon en pleine gueule. Cet homme a eu une
chance inouïe : le harpon est rentré dans l’œil et puis dans le crâne en
épargnant la carotide et ses branches, il a survécu et sans séquelles neuro.

CT-scan : tentative de suicide. Le projectile est


passé par le bas cette fois, il a traversé l’étage
antérieur du crâne et s’est logé dans le
cerveau : séquelles neurologiques + épilepsie.
Il n’y a pas nécessairement besoin d’aller
chercher tous les projectiles, c’est parfois
compliquer car il peut y en avoir beaucoup.
En revanche, il faudra toujours réparer
consciencieusement l’orifice d’entrée et
l’orifice de sortie.

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Lésions secondaires de l’encéphale


1. Œdème cérébral
2. Ischémie cérébrale
3. Hématome intracérébral
4. Abcès cérébral

Œdème cérébral
Pour rappel l’œdème des neurochirurgiens est l’œdème vasogénique (cfr- Chapitre 1)

Hématome intracérébral traumatique


• Se constitue à partir d’un foyer de contusion primaire
• Constitué de parenchyme nécrotique et hémorragique
• Souvent rompu dans les espaces méningé (HSA traumatique)
• Évacuation par crâniotomie : autant les contusions ne sont généralement pas drainées car le
parenchyme et sang sont mélangés, autant l’hématome sera souvent drainé puisqu’il s’agit
d’une collection de sang

Pièces d’anapath :
.
Hématome intracérébral
traumatique du lobe
temporal droit avec
engagement transtentoriel
comprimant le tronc cérébral.
Il y a également une lésion
hémorragique du tronc
cérébral

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