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Blanchet, A. (1989).

L’entretien : la co-construction du
sens

Peu d’études ont été menées sur le dispositif clinique, et ce dernier a souvent été associé au
maintien d’un « secret absolu » auquel on a attribué une fonction thérapeutique.

1. Définitions

L’entretien clinique est issu de l’expérience de la psychologie clinique et de celle de


l’enquête sociale.
La « clinique » est un ensemble de connaissances et de pratiques professionnelles qui
répondent à une demande de savoir et de traitement de la part d’un sujet, sur lui-même.
L’enquête sociale (entretien de recherche) est une activité de recherche et de
production d’information (demande institutionnelle). En effet, l’interviewer favorise la
production d’un discours de l’interviewé pour que ce dernier livre des « informations
biographiques ».
L’entretien clinique est un dispositif par lequel A répond à la demande d’aide de B, et
favorise la production d’information subjectives (sa biographie + ses pensées),
« autoréférentielles », de ce dernier pour agir sur sa problématique. Ce n’est pas seulement
de l’extraction d’information, mais aussi une restitution à B (qui nécessite de poser le cadre
de la prise en charge) de l’interprétation de A pour que B puisse élaborer.

Le processus de prise en charge psychologique dans l’entretien clinique implique 3 actes


distincts (le diagnostic, le soutien, et l’intervention) qui sont « emboités » (le dernier
présuppose le deuxième qui présuppose le premier).
- Entretien clinique de diagnostic = exploration de la problématique subjective du
patient.
- Entretien clinique de soutien = fonctions de diagnostic + de protection du clinicien
qui visent l’expression du problème (relâchement de la tension psychique)
- Entretien clinique d’intervention = fonctions de diagnostic + de soutien qui visent la
levée des symptômes par un remaniement des modes de pensée et des
comportements

2. L’efficacité thérapeutique

On part du principe que la structure du substrat psychique (ce qui est au plus profond de
l’être) est coextensive à celle du discours. Autrement dit, le discours/langage du patient
nous éclaire sur son psychisme. Si les principes du fonctionnement psychique reposent sur
cette hypothèse, tout dysfonctionnement du langage correspondrait à une désorganisation
du psychisme (ex. schizophrénie).
Le dispositif clinique de l’entretien (« cure de discours ») serait efficace en ce sens
qu’il permettrait d’obtenir une cohérence structurelle, de recomposer le substrat
psychique alors fragmenté, désorganisé. Cette idée de recomposition n’est pas seulement
propre à l’entretien clinique d’inspiration psychanalytique, mais à toute idée
psychothérapeutique.
Dans la théorie systémiste de Bateson, « le système logicodiscursif est soumis à des
règles qui, faute d’être respectées par le schizophrène, donnent à sa pensée et à son
expression verbale cet aspect déroulant parfois difficile à comprendre ». Pour Bateson, ces
perturbations du substrat psychique ont une cause externe, notamment constituée par le
fonctionnement pathologique du système de communication de la famille.

Dans la réorganisation du psychisme, la psychanalyse utilise la « libre association » : le


patient donne au clinicien un accès à ses représentations refoulées pour permettre leur
réassociation au monde des connaissances et croyances du patient. Les thérapies
« traditionnelles » semblent fondées sur des principes comparables. La cure chamanistique,
par exemple, consiste à « soigner » par les récits cohérents chantés par le chaman.
L’entretien clinique s’inscrit dans une démarche similaire en ayant pour objectif
d’accéder aux représentations isolées qui échappent au monde des connaissances et
croyances du patient (exploration et compréhension du discours de l’autre) et de
reconstituer les ponts associatifs coupés (lier les représentations entre elles) à l’aide de
l’interprétation, moteur essentiel de l’entretien clinique permettant la déconstruction et
reconstruction du discours du patient. Même si les techniques et théories diffèrent, il
semblerait que l’interprétation soit toujours utilisée.

3. Les actes du clinicien

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