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Chapitre 12

Les beurres et produits


gras allégés
L’IDF (International Dairy Federation) a introduit une norme concernant les beurres et
produits gras allégés, à savoir la norme IDF 166:1993, “Recommandations relatives aux
produits tartinables gras”. Ces recommandations sont destinées à servir de cadre
général en vue de l’élaboration de normes individuelles ou groupées plus spécifiques
en fonction des exigences de chaque pays.

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 263


Définitions
Produit tartinable gras : un “produit tartinable gras” est un aliment qui se présente
sous la forme d’une émulsion principalement de type eau-dans-huile, comprenant
surtout une phase aqueuse et des matières grasses et huiles comestibles.
Matières grasses et huiles comestibles : aliments composés principalement de
triglycérides d’acides gras. Elles sont d’origine végétale, animale, laitière ou marine.
Les tableaux suivants (12.1 et 12.2) sont extraits de cette norme.

Tableau 12.1
Composition essentielle des produits à base de matière
grasse du lait et de margarine
Produits à base Produits à base Produits à base
de MG du lait de MG mélangées de margarine

100 % MG de lait 15 % MG mini. de lait, MG max. de lait.


du total MG 80 % max. du total MG 3 % du total MG

Remarque : une ou plusieurs réglementations concernant la teneur en matière


grasse et la proportion de matière grasse du lait par rapport aux autres types de
matière grasse sont susceptibles d’être promulguées dans le cadre des législations
nationales ou autres.
Les matières premières principales doivent être l’eau et/ou les produits laitiers, les
matières grasses et/ou huiles comestibles, ou leurs mélanges. Pour ce qui concerne
la teneur en matière grasse, la norme stipule que les produits tartinables devront être
classés en trois groupes, en fonction de l’origine de la matière grasse. La teneur
maximale en matière grasse devra être de 95 %.
Le nom de l’aliment devra être indiqué conformément à la législation nationale.
Toutefois, les produits devront se conformer aux exigences générales indiquées
dans le tableau 12.2, destinées à s’appliquer systématiquement aux produits des
trois catégories.

Tableau 12.2
Nom des produits à base de MG du lait et de margarine
Teneur en MG Produits à base Produits à base Produits à base
% de MG de lait de MG mélangées de margarine

80 – 95 Beurre* Produits mixes Margarine*


>62 – <80 Produits laitiers Pâte à tartiner de Produit
gras allégés MG composée margarinier gras
60 – 62 Beurre 75 % MG Pâte à tartiner Margarine 75 %
ou à teneur 75 % MG ou à teneur MG ou à teneur
réduite en MG réduite en MG réduite en MG
>41 – <60 Beurre allégé Pâte à tartiner de Produit
mélange à teneur margarinier à teneur
réduite en MG réduite en MG
39 – 41 “Demi-beurre” Pâte à tartiner à Margarine ou
50 % MG ou à minarine* 50 % MG ou
faible teneur en MG à faible teneur en MG
<39 Spécialité Pâte à tartiner Produit margarinier
laitière à teneur à faible teneur
allégées lipidique réduite en MG

* Les normes individuelles suivantes de la FAO/OMS s’appliquent actuellement


aux produits du commerce international et spécifient les désignations autorisées:
A1 - norme pour le beurre et le beurre de sérum.
(A16 - norme pour les produits gras allégés à faible teneur en MG - projet)
Norme du Codex 32-1981 pour la margarine
Norme du Codex 13-1981 pour la minarine

264 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


Tableau 12.3
Exemples de produits à base de matière grasse (Suède)
Produit/ Beurre Margarine Produit gras Produit gras M-cocos Saindoux
composition allégé Bregott allégé à
(margarine) faible teneur
en MG Lätt &
Lagom (minarine)

Matière Crème Huiles vég. et Crème maturée MGLA* + Huile Saindoux


de base maturée mat. grasses et huile huile vég. + de coco
végétale conc. de beurre,
lait préf.
MG (%) 80 80 80 40 100 100
Humidité (%) 16 – 18 ** ≈18 17 – 18** 48 0 0
Sel (%) 0–2 1,5 – 2,0 1,4 – 2,0 1,2 0 0
Protéine (%) 0,7 0,2 – 0,4 0,6 7,5 0 0
Valeur énergitique
kJ/100 g 3 140 3 100 – 3 150 3 140 1 710 3 900 3 900
Vitamines A 2 500 A 3 000 A 3 000 A 3 000 0 0
I.U./100 g D 55 D 300 D 300 D 300 0 0
Conservabilité 2–3 3 2–3 1,5 6 – 12 6
à 6–7°C mois mois mois mois mois mois
Usage Table Table Table Table Cuisine Fritures
Cuisine Cuisine Cuisine Confiserie Boulangerie

* MGLA = matière grasse anhydre


** Varie avec la teneur en sel
Table du Livsmedelsbranschens Utbildningsorgan, Brevskolan, Suède

Le tableau 12.3, qui indique le nom, la désignation approuvée et la composition de


certains produits commerciaux à base de matière grasse, vendus en Suède, est
donné à titre d’exemple.
Pendant des années, il n’existait que quelques types reconnus de graisses de
cuisine, à savoir, le beurre, la margarine, le saindoux et l’huile de coco.
Le beurre et la margarine sont les deux produits qui retiennent le plus l’attention.
Ils sont utilisés comme produits tartinables, pour la cuisine et la boulangerie. Mais les
deux ont l’inconvénient de ne pas être facilement tartinables à une température de
réfrigération habituelle (+5°C) lorsqu’ils sont produits de façon traditionnelle. Ils ont
conduit à la mise au point, pendant les années soixante et soixante-dix, de divers
produits facilement tartinables, notamment les mélanges à faible teneur en matière
grasse (40%), également appelés minarines, et plus tard les produits à teneur
réduite en matière grasse (60%), appelés mellarines.

Le beurre
Les beurres sont généralement classés en deux catégories principales :
• le beurre de crème douce
• le beurre de crème acide ou maturé, fabriquée à partir de crème acidifiée
bactériologiquement.
Il est également possible de classer le beurre suivant sa teneur en sel : non salé, salé
et extra salé.
Jusqu’au milieu du 19e siècle, le beurre était encore fabriqué à partir de crème que
l’on laissait acidifier naturellement. On écrémait ensuite le lait et on versait la crème
dans un cuveau de bois, appelé baratte, où l’on faisait le beurre à la main. Le
processus d’acidification naturelle est très sensible et l’infection par les micro-
organismes altérait souvent le résultat.
Quand les techniques du froid furent mieux connues, il devint possible de séparer
la crème avant qu’elle ne fût acide et de fabriquer le beurre à partir de crème douce.

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Les méthodes de fabrication se sont améliorées progressivement, ainsi que la qualité
du produit et le rendement. On finit par découvrir qu’il était possible d’acidifier la
crème douce en ajoutant du lait acidifié naturellement ou du babeurre acide. Il était
alors devenu possible de fabriquer du beurre de crème maturée dans des conditions
maîtrisées.
Grâce à l’invention du séparateur (1878), il était devenu possible d’écrémer
rapidement et facilement. Ce fut également le point de départ de la fabrication
industrielle du beurre. L’introduction de la pasteurisation dans les années 1880,
l’utilisation de ferments purs dans les années 1890 et l’introduction de machines à
la fin du 19e contribuèrent à la qualité du produit et au rendement.
La fabrication commerciale du beurre, telle qu’elle existe aujourd’hui, est basée
sur les connaissances et l’expérience acquises au fil des années concernant des
questions telles que l’hygiène, l’acidification bactérienne et le traitement thermique,
ainsi que le développement technique rapide qui aboutit aux machines évoluées
actuelles.

Le beurre de crème maturée (acide)


douce
Les variations dans la composition du beurre sont dues aux différences dans la
production.
Comme on peut le voir dans le tableau 12.3, le beurre contient 80% de matière
grasse et 16 à 18% d’eau, selon qu’il est salé ou non. Le beurre contient également
les vitamines A et D.
La couleur du beurre varie en fonction de la teneur en caroténoïdes, qui
représente de 11 à 50% du total de l’activité de la vitamine A du lait. Comme la teneur
en caroténoïdes du lait varie entre l’hiver et l’été, le beurre fabriqué l’hiver est plus
clair. (A ce propos, il est intéressant de signaler que le beurre fabriqué à partir du lait
de bufflonne est blanc car il ne contient pas de caroténoïdes.) Le beurre doit être
également dense et avoir un goût frais. L’eau qu’il contient doit être dispersée en fines
Fig. 12.1 Baratte manuelle gouttelettes pour que le beurre ait l’air sec. La consistance doit être lisse pour que
traditionnelle, utilisée anciennement
le beurre ait une meilleure tartinabilité et fonde mieux dans la bouche.
pour la fabrication domestique du
Le beurre de crème acide doit sentir le diacétyle, alors que le beurre doux doit
beurre.
avoir un goût de crème; un léger goût de “brûlé” est acceptable dans le cas du beurre
doux.
Le beurre fabriqué à partir de crème acide présente certains avantages par
rapport à la crème douce. L’arôme est plus riche, le rendement meilleur et le risque
d’infection après traitement thermique limité car les ferments suppriment les micro-
organismes indésirables.
Le beurre de crème acide a lui aussi ses inconvénients. Le babeurre sera
également acidifié. Le babeurre de beurre de crème acide (maturée) a un pH
beaucoup plus faible que celui de crème douce, ce qui le rend parfois plus difficile à
vendre que le babeurre de crème douce. L’autre inconvénient du beurre de crème
maturée est qu’il est plus sensible aux défauts d’oxydation, ce qui lui donne un goût
métalique. Cette tendance est accentuée par la présence de la moindre trace de
cuivre ou d’autres métaux lourds, et cela réduit considérablement la conservation
chimique du beurre.

La fabrication du beurre
A l’origine, le beurre était fabriqué à la ferme pour la consommation domestique. Puis
on utilisa une baratte manuelle (figure 12.1). Une fois le barattage terminé et le
babeurre récupéré, les grains de beurre étaient recueillis dans une auge creuse, puis
on les malaxait manuellement jusqu’à obtenir une siccité et une structure acceptables.
Les procédés industriels de fabrication du beurre incluent généralement de
Le beurre peut être fabriqué en nombreuses étapes. La figure 12.2 présente un schéma de la production discontinue
baratte dans un procédé discontinu avec barattage et production continue dans des butyrateurs. Les barattes sont
ou continu à l’aide de machines toujours utilisées, mais on les remplace de plus en plus par des machines de
modernes. production continue.
La crème peut provenir d’une laiterie fournissant du lait de consommation
(surplus de crème); elle peut être également séparée du lait entier à la crémerie.
Dans le premier cas, la crème doit avoir été pasteurisée par le fournisseur. Le
stockage et la livraison à la crémerie doivent être effectués de manière à éviter la

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2 3 4

9
7

13

11

12 13

6
10

Babeurre
Lait Ferments
Lait écrémé Fluide de refroidissement
Crème Fluide de chauffage
Beurre Module optionnel
Fig. 12.2 Etapes d’un procédé général
dans la production discontinue et
réinfection, l’incorporation d’air ou la formation de mousse. Après les procédures de continue du beurre de culture.
réception, le pesage et l’analyse, la crème est stockée en cuves.
Si la crème est produite à la crémerie, le lait entier est préchauffé à 63°C dans le 1 Réception du lait
pasteurisateur avant d’être séparé. On achemine ensuite la crème chaude vers une 2 Préchauffage et pasteurisation du
cuve de stockage intermédiaire avant de la pomper dans le pasteurisateur de crème. lait écrémé
3 Séparation de la matière grasse
Pour un traitement délicat de la crème, se reporter à la description de la méthode 4 Pasteurisation de la crème
Scania, dans le chapitre 8. 5 Dégazage sous vide (selon le cas)
Le lait écrémé du séparateur est ensuite pasteurisé et refroidi, puis dirigé vers la 6 Préparation des ferments (selon le
cuve de stockage. Si le beurre que l’on doit fabriquer est du beurre de crème maturée, cas)
une partie du lait écrémé doit être utilisée à la préparation du levain. 7 Maturation de la crème et
Ensuite, à partir de la/les cuve(s) de stockage intermédiaire, la crème est acidification (selon le cas)
8 Traitement thermique
pasteurisée à une température de 95°C ou plus. Une haute température est
9 Barattage/malaxage, procédé
nécessaire pour détruire les enzymes et micro-organismes qui risqueraient d’altérer discontinu
la conservation du beurre. 10 Barattage/malaxage, procédé
La destruction des micro-organismes indésirables est également bénéfique dans continu
le cas du beurre de crème acide car elle permet de créer de parfaites conditions de 11 Collecte du babeurre
développement pour les ferments. Le traitement thermique libère des composés 12 Silo à beurre avec convoyeur à vis
sulfhydriques fortement antioxygénés, qui réduisent le risque d’oxydation. 13 Machines d’emballage
On peut également inclure le dégazage sous vide dans la chaîne de fabrication
si la crème a un goût ou un arôme indésirable, un goût d’oignon par exemple. Tout Le dégazage sous vide par
aromatisant est lié dans la matière grasse et, à moins de le supprimer, il se transmet dépression est recommandée
au beurre. Le traitement au vide avant la pasteurisation nécessite le préchauffage de lorsque la crème possède un goût
la crème à la température requise, puis son refroidissement rapide pour dégager le très fort ou un défaut d’arôme, un
gaz et les substances volatiles inclus. Ensuite, la crème est réacheminée vers le goût d’oignon, par exemple. Le
pasteurisateur pour subir un traitement complémentaire (chauffage, séjour et traitement au vide peut avoir un effet
refroidissement) avant de passer à la cuve de maturation. défavorable sur le rendement et la
Dans la cuve de maturation, d’un volume maximum recommandé de 30000 litres, consistance du beurre.

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la crème est soumise à un cycle de température qui conférera à la matière grasse la
structure cristalline requise lorsqu’elle se solidifiera en refroidissant. Le cycle choisi
doit correspondre à des facteurs tels que la composition de la matière grasse du
beurre, exprimée, par exemple, en terme d’indice d’iode, valeur qui permet de
connaître la teneur en graisse non saturée. Il est également possible de modifier le
traitement pour fabriquer du beurre ayant une bonne consistance, malgré un indice
d’iode peu élevé, par exemple, lorsque la proportion insaturée de la matière grasse
est faible.
La maturation dure généralement de 12 à 15 heures. Lorsque c’est possible, on
ajoute les ferments acidifiants avant le traitement thermique. La quantité de ferments
ajoutée dépend du cycle de température choisi par rapport à l’indice d’iode (tableau
12.4).
A partir de la cuve de maturation, la crème est pompée vers le butyrateur ou la
baratte. La crème doit parfois passer par un échangeur de chaleur à plaques pour
atteindre la température requise. Le barattage agite violemment la crème, ce qui
décompose les globules gras et provoque la coalescence de la matière grasse en
grains de beurre. La teneur en matière grasse du liquide restant, c’est-à-dire le
babeurre, diminue.
La crème se sépare en deux fractions : les grains du beurre et le babeurre. Dans
le barattage traditionnel, on arrête la machine lorsque les grains ont atteint une
certaine taille, puis on évacue le babeurre. Dans les butyrateurs, l’évacuation du
babeurre s’effectue en continue.
Une fois le babeurre retiré, on malaxait le beurre jusqu’à obtenir une phase grasse
contenant une phase aqueuse finement dispersée. Il était courant de laver le beurre
à l’eau après le barattage pour éliminer le babeurre résiduel et les matières sèches
du lait, mais cette pratique est devenue rare de nos jours. Si le beurre doit être salé,
le sel est répandu à la surface dans la fabrication discontinue, ou ajouté en solution
concentrée pendant l’étape de malaxage dans la fabrication continue.
Après le salage, il est nécessaire de malaxer davantage le beurre pour répartir
uniformément le sel. Le malaxage du beurre affecte également les caractéristiques
à partir desquelles on juge le produit : arôme, goût, conservation, aspect et couleur.
Le beurre fini est transféré vers l’unité d’emballage, puis vers la chambre frigorifique.

La matière première
La crème doit être de bonne qualité bactériologique, sans défaut d’arôme ni de goût.
L’indice d’iode est le facteur décisif dans la sélection des paramètres de fabrication.
A moins d’y remédier, la matière grasse avec indice d’iode élevé (teneur élevée en
graisse insaturée) produit du beurre graisseux. On peut obtenir du beurre de
consistance acceptable à partir de matière grasse dure (indice d’iode réduit à 28) et
de matière grasse molle (indice d’iode jusqu’à 42) en ajustant la maturation en
fonction de l’indice d’iode.
La crème contenant des antibiotiques ou des désinfectants est impropre à la
fabrication du beurre acidifié. Si des micro-organismes nuisibles ont eu l’occasion de
se développer, la crème est inutilisable même si l’on a inactivé les micro-organismes
au moyen d’un traitement thermique. Par conséquent, une hygiène stricte est
essentielle à toutes les étapes du procédé de fabrication.
Dans les pays où il existe une chaîne du froid pour le lait cru, le stockage
frigorifique provoque des modifications dans la composition micro-organique. Là où
il y avait autrefois des bactéries lactiques, il existe maintenant des souches
bactériennes extrêmement résistantes au froid, les bactéries psychrotrophes. Elles
sont généralement détruites au cours de la pasteurisation et n’ont par conséquent
aucun effet sur la qualité du beurre. Toutefois, certaines souches de bactéries
psychrotrophes produisent des enzymes lipolytiques qui décomposent la matière
grasse; ces enzymes peuvent supporter des températures supérieures à 100°C.
C’est pourquoi il est indispensable d’éviter le développement des bactéries
psychrotrophes. Une solution consiste à réfrigérer la matière première entre 2 et 4°C
dès son arrivée à la laiterie et la stocker à cette température jusqu’à sa pasteurisation
La crème contenant des ou, mieux encore, de thermiser le lait à 63-65°C pendant 15 secondes et de le refroidir
antibiotiques ou des désinfectants entre 2 et 4°C. La pasteurisation doit avoir lieu rapidement, dans tous les cas dans
est impropre à la fabrication du les 24 heures après l’arrivée.
beurre de crème maturée.
La pasteurisation
La crème est pasteurisée à haute température, généralement à 95°C ou plus,

268 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


normalement sans temps de séjour. Le traitement thermique doit être suffisamment
intense pour obtenir un résultat négatif au test à la peroxydase.
Le traitement intense tue non seulement les bactéries pathogènes mais également
d’autres bactéries et enzymes qui pourraient affecter la conservation. Cependant,
l’intensité du traitement ne doit pas aller jusqu’à provoquer des défauts, tels qu’un
goût de cuit.

Le dégazage sous vide


Si nécessaire, il est possible d’éliminer par un traitement au vide toute substance
aromatique indésirable de nature volatile. Il faut d’abord chauffer la crème à 78°C
puis la pomper dans une chambre à vide où la pression correspond à une
température d’ébullition de 62°C. Cette pression réduite libère les substances
aromatiques sous la forme de gaz au moment du refroidissement rapide de la crème.
Après ce traitement, la crème retourne à l’échangeur de chaleur pour être pasteurisée
et refroidie, puis continue vers la cuve de maturation.
Le goût atypique d’oignon est un défaut très courant l’été, lorsque différentes
plantes de ce type poussent dans les pâturages. Le tri de la crème est parfois
nécessaire pour éviter les flaveurs fortes.
Le traitement thermique doit être
suffisamment intense pour obtenir
L’acidification bactérienne un résultat négatif au test à la
peroxydase, mais pas au point de
La préparation des ferments provoquer des défauts tels qu’un goût
Les cultures bactériennes pour la fabrication du beurre de crème acide ou maturée de cuit.
sont décrites dans le chapitre 10, “Fabrication des ferments et levains”. Les bactéries
acidifiantes donnent un fort arôme au beurre. Elles améliorent également le rendement
en matière grasse.
Les levains sont des cultures de type LD ou L, ce qui signifie qu’ils contiennent les
bactéries aromatiques Str. diacetylactis (Cit+ Lactococci) et Leuc. citrovorum
(Leuconostoc mesenteroides ssp. cremoris), ou seulement celles du dernier type.
Dans les cultures de type LD, la proportion de Str. diacetylactis peut varier entre
0,6 et 13%, alors que la teneur en Leuc. citrovorum varie entre 0,3 et 5,9% du
nombre total de bactéries. Les relations proportionnelles entre bactéries aromatiques
sont dictées par les conditions de développement existantes.
L’acide lactique, le diacétyle et l’acide acétique sont les substances aromatiques
les plus importantes que produisent les bactéries. La production de la principale
substance aromatique dans le beurre, le diacétyle, dépend de l’oxygène utilisable.
Pour que le développement bactérien et la production d’acide soient rapides, les
ferments doivent être actifs. On obtient alors un nombre élevé de bactéries (environ
1 000 millions/ml de levains maturés). L’addition de 1% d’inoculum et une températur e
de croissance de 20°C devraient produire une acidité de 12°SH après 7 heures, et
de 18 à 20 SH° après 10 heures. Les ferments doivent être équilibrés. Il est important
d’avoir une relation proportionnelle correcte entre la
production d’acide et aromatique et la réduction consécutive Acide citrique % 0SH Diacétyle mg/l
0,20 40 20
de diacétyle.
Le lait écrémé est utilisé principalement comme milieu 18
de culture pour les levains car il est plus facile de détecter 32 Acide citrique 16
les défauts de goût dans ce type de culture. Le lait doit être
pasteurisé à 90-95°C pendant 15 à 30 minutes. La figure Acidité 14
12.3 présente le développement du processus de production 24 12
d’acide et aromatique dans une culture de type LD. 0,10 10
La production lente d’acide est caractéristique de la
16 8
première étape du développement. Au cours de cette phase,
la fermentation citrique et le rendement en diacétyle sont Diacétyle 6
relativement insignifiants. La production d’acide s’accélère 8 4
rapidement dans la phase suivante à mesure que la
2
fermentation de l’acide citrique forme le diacétyle. La plus
grosse partie du diacétyle est réduite par les bactéries
4 10 16 22 26
aromatiques.
Fig. 12.3. Le développement
aromatique et d’acide dans le lait
écrémé à 20°C et une dose de ferment
LD de 1%.
+ Abréviation de citrate, qui est métabolisé en composés aromatiques.
ssp = espèce (Tableau 10.1 - Ancien et nouveau nom des différents levains et leur usage, chapitre 10)

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 269


Une fois que la production d’acide a ralenti, la réduction du diacétyle diminue et
la teneur se stabilise pratiquement. Le milieu entre dans la phase de maturation dès
que se termine la phase d’acidification. Les caractéristiques de cette phase entraîne
l’augmentation progressive de l’acidité et la réduction du diacétyle, par les bactéries
aromatiques, en une substance insipide.

L’acidification de la crème
L’acidification de la crème, et le traitement thermique qui donne à la matière grasse
la structure cristalline dont le beurre a besoin pour avoir une consistance optimale,
ont lieu simultanément dans les cuves de maturation. Ce sont généralement des
cuves d’acier inoxydable, munies de trois parois entre lesquelles circule les fluides
de chauffage et de refroidissement. Elles sont équipées d’un agitateur-racleur
pouvant tourner dans les deux sens pour une agitation efficace, même lorsque la
crème a épaissi. Le chauffage comme le refroidissement sont très progressifs, avec
un écart faible de température, avantageuse du point de vue consistance.
Avant de pomper le levain industriel vers la cuve de maturation, il faut d’abord bien
le mélanger. Le levain est souvent pompé avant la crème, même si certains fabricants
La quantité de levain ajouté à la crème préfèrent ajouter le levain dans la conduite de crème. Quelle que soit la méthode
varie entre 1 et 7%, en fonction, utilisée, il est indispensable de mélanger intimement le levain dans la crème.
essentiellement, de la température Pour que le beurre ait la consistance recherchée, la crème a besoin d’un
d’incubation. traitement thermique. Le programme de traitement dépend de l’indice d’iode de la
crème. La température d’acidification est également déterminée par ce programme,
car la maturation a lieu en même temps. Il est possible de modifier le programme de
température, établi en fonction de la consistance, pour l’adapter au levain.
La quantité de levain qu’il faut ajouter à la crème doit être déterminée en fonction
du programme de température du procédé (tableau 12.4). Le levain doit être dosé
pour correspondre à la température d’acidification et de maturation ainsi qu’à la
durée des différentes phases. La dose de levain peut varier entre 1 et 7% de la
quantité de crème. Le taux inférieur s’applique à la température de 21°C, température
à laquelle la crème avec matière grasse dure (faible indice d’iode) est maintenue de
façon intermédiaire; le taux supérieur s’applique à la crème avec matière grasse
molle, maintenue à une température de 15-16°C. Le processus d’acidification doit
être terminé lorsque le traitement thermique est fini et que la crème avance vers la
baratte. A cet instant, l’acidité de la partie non grasse de la crème devrait être de
36°SH environ.

Le traitement thermique
Avant le barattage, la crème est soumise à un programme de traitement thermique
qui contrôle la cristallisation de la matière grasse pour que le beurre ait la consistance
recherchée. La consistance du beurre est l’une de ses caractéristiques qualitatives
les plus importantes, aussi bien directement qu’indirectement, car elle affecte les
autres caractéristiques, principalement le goût et l’arôme. La consistance est un
concept compliqué qui fait intervenir des propriétés telles la dureté, la viscosité, la
plasticité et la tartinabilité.
Les acides gras de la matière grasse du lait sont décrits dans le chapitre 2, “La
chimie du lait”. Les quantités relatives d’acides gras à point de fusion élevé
déterminent si la matière grasse sera molle ou dure. La matière grasse molle a une
forte teneur en acides gras à faible point de fusion, et possède, à température
ambiante, une grande phase de corps gras liquide, c’est-à-dire, un rapport liquide/
solide élevé. A l’inverse, la matière grasse dure a un faible rapport liquide/solide.
Dans la fabrication du beurre, si l’on soumet constamment la crème au même
traitement thermique, c’est la composition chimique du lait qui déterminera la
consistance du beurre. La matière grasse molle du lait donnera du beurre mou et
graisseux, alors que le beurre de la matière grasse dure donnera du beurre mou et
ferme. Il est possible d’optimiser la consistance du beurre en modifiant le traitement
thermique pour l’adapter à l’indice d’iode de la matière grasse. Dans une certaine
mesure, le traitement thermique régit la quantité de matière grasse solide, qui est le
principal facteur qui détermine la consistance du beurre.

La cristallisation du beurre
Après la pasteurisation, la matière grasse des globules gras est sous forme liquide.
Lorsque l’on refroidit la crème à une température inférieure à 40°C, la matière grasse
se cristallise. Si le refroidissement est progressif, les différentes graisses se cristallisent

270 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


à différentes températures, selon leur point de fusion respectif. Cela pourrait être
intéressant, car ce type de refroidissement produirait un minimum de matière grasse
solide; il serait alors possible de fabriquer un beurre mou à partir de crème contenant
de la matière grasse dure du lait avec de faibles indices d’iode. Le déroulement de
la cristallisation dans la crème à 40% est décrite dans le chapitre 8, Production de
crème.
Avec un refroidissement progressif, la cristallisation peut durer plusieurs jours, ce
qui peut être dangereux du point de vue bactériologique car la matière grasse est
alors conservée à des températures sensibles aux attaques bactériennes.
L’inconvénient de cette méthode est que les triglycérides à faible point de fusion sont
“piégés” dans les mêmes cristaux, et des cristaux mixtes se forment. Une grande Le refroidissement rapide de la crème
partie de la matière grasse serait cristallisée si aucune mesure n’était prise. Le à une basse température accélère le
rapport matière grasse liquide/solide serait faible et le beurre fabriqué à partir de cette processus de cristallisation
crème serait dur.
On peut éviter ce problème en chauffant avec précaution la crème à une
température supérieure pour séparer par fusion les triglycérides des cristaux. La
matière grasse fondue se recristallise ensuite à une température légèrement
inférieure, ce qui donne une grande proportion de cristaux “purs” et une faible
proportion de cristaux mixtes. On obtient ainsi un rapport liquide/solide plus élevé et
par conséquent une matière grasse plus molle.
De tout évidence, on peut déterminer dans une certaine mesure la quantité de
cristaux mixtes, et partant le rapport matière grasse liquide/solide en choisissant la
température de chauffage à laquelle fondent les cristaux après refroidissement et
cristallisation, ainsi que la température de recristallisation. On choisit les températures
en fonction de la dureté (indice d’iode) de la matière grasse.
Il existe maintenant plusieurs méthodes pour mesurer le rapport matière grasse
liquide/solide dans un échantillon. Le test au spectromètre d’impulsions à résonance
magnétique nucléaire (RMN) est une méthode rapide et précise. Cette technique est
basée sur le fait que les protons (noyaux hydrogène) dans la matière grasse ont
différentes propriétés magnétiques selon que la matière grasse est à l’état liquide ou
solide.
Le tableau 12.4 donne des exemples de programmes pour différents indices
d’iode. La première température est la valeur à laquelle la crème est refroidie après
la pasteurisation, la seconde la valeur de chauffage/d’acidification et la troisième la
valeur de maturation.

Le traitement de la matière grasse dure


Pour obtenir une consistance optimale lorsque l’indice d’iode est faible, c’est-à-dire
une matière grasse dure, il est nécessaire de minimiser la quantité de cristaux mixtes
et de maximiser la quantité de matière grasse “pure” pour augmenter le rapport
matière grasse liquide/solide dans la crème. On maximisera ensuite la phase matière
grasse liquide des globules gras afin d’en extraire la majeure partie par pression au
cours du barattage et du malaxage, pour obtenir un beurre qui aura une phase
continue de matière grasse liquide relativement grande et une phase solide minimisée.
Le traitement nécessaire pour obtenir ce résultat comprend :
• le refroidissement rapide à environ 8°C et le stockage pendant environ 2 heures
à cette température.
• le chauffage modéré à 20-21°C et le stockage à cette température pendant au
moins 2 heures. On utilise pour le chauffage une eau à 27°C maximum.
• le refroidissement à environ 16°C puis à la température du barattage.
Le refroidissement à environ 8°C démarre la formation de cristaux mixtes qui lient la
matière grasse de la phase continue liquide.
Si l’on chauffe la crème modérément à 20-21°C, la plus grosse partie des cristaux
mixtes fond, ce qui laisse seulement des cristaux purs à point de fusion élevé. Au
cours de la période de stockage à 20-21°C, les cristaux de matière grasse fondue
commencent à se recristalliser, et à former des cristaux purs.
Après 1 à 2 heures, la matière grasse dont le point de fusion est plus élevé
commence à se recristalliser. Lorsque la température est descendue à environ 16°C,
la matière grasse fondue continue à se cristalliser et former des cristaux purs. Au
cours de la période de séjour à environ 16°C, toute la matière grasse dont le point
de fusion est de 16°C ou plus se cristallise. Le traitement a conduit la matière grasse
avec haut point de fusion à former des cristaux purs, et partant à réduire la quantité
de cristaux mixtes. Cela augmente le rapport matière grasse liquide/solide et le
beurre fabriqué à partir de la crème est par conséquent plus mou.

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 271


Tableau 12.4.
Programmes de température principaux ajustés en
fonction de l’indice d’iode, et volumes recommandés
du levain éventuellement utilisé.
Indice Programme de % approx. de levain
d’iode température (°C) dans la crème

<28 8 – 21 – 20 1
28 – 29 8 – 21 – 16 2–3
30 – 31 8 – 20 – 13 5
32 – 24 6 – 19 – 12 5
35 – 37 6 – 17 – 11 6
38 – 39 6 – 15 – 10 7
>40 20 – 8 – 11 5

Le traitement de matière grasse demi-dure


En augmentant l’indice d’iode, il est possible de stopper le chauffage modéré à une
température inférieure. Une plus grande quantité de cristaux mixtes se forme, qui
absorbent plus de matière grasse liquide que dans le cas du programme de la matière
grasse dure. Pour les indices d’iode jusqu’à 39, la température de chauffage peut être
de seulement 15°C.
Le temps de maturation est plus long aux températures inférieures.

Le traitement de la matière grasse extra molle


La “méthode d’été” du traitement est utilisée lorsque l’indice d’iode est supérieur à
39-40. Après la pasteurisation, la crème est refroidie à 20°C et acidifiée pendant
environ 5 heures à cette température. On la refroidit lorsque l’acidité est d’environ
22°SH. On refroidit la crème à environ 8°C lorsque l’indice d’iode est d’environ 39-
40, et à 6°C s’il est de 41 ou plus. On estime généralement qu’une température
d’acidification inférieure à 20°C donne du beurre mou. Cela est également valable
après l’acidification pour les températures de refroidissement supérieures.

Le barattage
La production discontinue
La crème est barattée après le traitement thermique, et après l’acidification le cas
échéant. Le beurre est traditionnellement fabriqué en barattes cylindriques, coniques,
cubiques ou tétraédriques à vitesse variable. La baratte est équipée à l’intérieur de
lamelles axiales et de battes. La forme, le réglage et la taille des battes par rapport
à la vitesse de la baratte sont des facteurs qui ont une grande incidence sur le produit
fini. Les barattes modernes ont une plage de vitesse qui permet de choisir une vitesse
de malaxage adaptée aux paramètres du beurre que l’on désire obtenir.
Depuis ces dernières années, la capacité des barattes s’est accrue
considérablement. Les grandes crémeries centrales sont équipées de barattes de
8000 ou 12000 litr es ou plus. Avant d’être transférée dans la baratte, la crème est
agitée et la température ajustée. On remplit généralement la baratte à 40-50% pour
laisser de la place à l’écumage.

La formation du beurre
Les globules gras dans la crème contiennent de la matière grasse liquide et de la
matière grasse cristallisée (huile de beurre). Dans une certaine mesure, les cristaux
de matière grasse se sont structurés, si bien qu’ils forment une mince couche près
de la membrane du globule gras.

272 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


Une mousse de grosses bulles de protéine se forme lorsque l’on agite la
crème. Tensioactive, la membrane des globules gras est tirée vers l’interface 2
air/eau et les globules gras se concentrent dans la mousse.
Lorsque l’agitation continue, les bulles deviennent plus petites à
mesure que la protéine libère de l’eau. La mousse devient alors plus
compacte et une pression s’exerce sur les globules gras. Cela provoque
la séparation d’une partie de la matière grasse liquide des globules gras 3
et la désintégration des membranes.
La matière grasse liquide, qui contient également des cristaux gras, se 1
répand en une fine couche à la surface des bulles et sur les globules gras.
A mesure que les bulles deviennent de plus en plus denses, une plus
grande quantité de matière grasse liquide est extraite, et la mousse est
si vite instable qu’elle finit par s’effondrer. Les globules gras s’agglomèrent
en grains de beurre. D’abord invisibles à l’œil nu, ils deviennent
progressivement plus gros à mesure que continue le malaxage.

Le rendement du barattage
Le rendement du barattage est la quantité de matière grasse de la crème
que l’on a transformée en beurre. Le rendement est le coefficient de
matière grasse restant dans le babeurre par rapport au total matière
grasse de la crème. Par exemple, un rendement de 0,50 signifie que 0,5 %
de la matière grasse de la crème est resté dans le babeurre et 99,5% ont été Fig. 12.4 Baratte à beurre pour la
transformés en beurre. Un rendement de barattage est considéré comme acceptable production discontinue.
si la valeur est inférieure à 0,7.
La courbe dans la figure 12.5 montre comment le rendement du barattage peut 1 Tableau de commande
varier sur l’année. La teneur en matière grasse du babeurre est supérieure en été. 2 Arrêt d’urgence
3 Chicanes inclinées
Le malaxage
Le malaxage a lieu lorsque le babeurre a été évacué. Les grains de beurre sont
pressés et écrasés pour ôter l’eau qui existe entre eux. Les globules gras sont soumis
à une haute pression et la matière grasse liquide et les cristaux gras sont expulsés.
Dans la masse résultante de matière grasse (en définitive la phase continue), le
malaxage disperse finement l’eau jusqu’à ce que l’on ait obtenu la teneur en eau
recherchée. Le beurre fini doit être sec, autrement dit la phase aqueuse très finement
dispersée. Aucune goutte d’eau ne doit être visible à l’œil nu.
Il convient de vérifier régulièrement la teneur en eau pendant le malaxage et Rendement du barattage
0,70
l’ajuster pour qu’elle corresponde aux exigences du beurre fini.
0,65

Le malaxage sous vide 0,60

Le malaxage à pression réduite est une méthode utilisée fréquemment. Le résultat 0,55
est un beurre qui contient moins d’air; il est par conséquent plus dur que la normale.
0,50
Dans le beurre malaxé sous vide, l’air représente environ 1% en volume, par rapport
0,45
aux 5 à 7% pour le beurre normal.
0,40
J F M A M J J A S O N D

La production continue Fig. 12.5 Variation du rendement du


Mois

Des méthodes de fabrication continue du beurre furent introduites à la fin du


barattage sur l’année (Suède).
19esiècle, mais leur application fut très limitée. Des travaux reprirent au 20 e siècle,
dans les années 40, et aboutirent à trois procédés différents, tous basés sur les
méthodes traditionnelles : barattage, centrifugation et concentration ou émulsification.
L’un de ces procédés, inspiré du barattage traditionnel, était la méthode Fritz. Cette
méthode est actuellement la plus répandue en Europe de l’ouest. Les machines
basées sur cette méthode fabriquent le beurre plus ou moins comme le font les
méthodes traditionnelles. Le beurre est essentiellement le même, mais il est quelque
peu mat et plus dense du fait de la dispersion uniforme et fine de l’eau.

Le procédé de fabrication
La crème est préparée de la même manière que dans le barattage traditionnel. Elle
est ensuite alimentée en continu entre les cuves de maturation et le butyrateur.

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 273


Crème

2 3

4
Beurre

Babeurre

Fig. 12.6 Butyrateur.


1 Cylindre de barattage Les figures 12.6 et 12.7 présentent une vue en coupe d’un butyrateur. La crème
2 Section de séparation est d’abord introduite dans un cylindre de barattage (1) à double refroidissement,
3 Section de compression-séchage équipé de battes commandées par un moteur à vitesse variable.
4 Seconde section de malaxage La transformation rapide a lieu dans le cylindre. Une fois la transformation
terminée, les grains de beurre et le babeurre sont acheminés vers une section de
séparation (2), également appelée première section de malaxage, qui sépare le
beurre du babeurre. Le premier lavage des grains de beurre intervient en même
temps que la recirculation du babeurre refroidi. La section de séparation est équipée
d’une vis qui démarre le malaxage du beurre tout en le transportant vers l’étape
suivante.
A sa sortie de la section de séparation, le beurre traverse un canal conique et une
plaque perforée, la section de compression-séchage (3), qui élimine le babeurre
restant. Les grains de beurre passent ensuite à la seconde section de malaxage (4).
Chaque section de malaxage possède son propre moteur, si bien qu’elles peuvent
fonctionner à différentes vitesses pour optimiser les résultats. Habituellement, la
première vis tourne deux fois plus vite que celle de la seconde section. Après la
dernière étape de malaxage, un injecteur haute pression peut éventuellement
ajouter du sel dans la chambre d’injection (5).
La section suivante, la section de malaxage sous vide (6), est raccordée à une
pompe à vide. Dans cette section, il est possible de réduire la teneur en air du beurre
au même niveau que celui du beurre fabriquée de manière traditionnelle.
La dernière étape du malaxage (7) est composée de quatre petites sections,
séparées entre elles par une plaque perforée. Des perforations de différentes tailles
et des roues à palettes de différentes formes optimisent le traitement du beurre. Dans
la première de ces petites sections, un injecteur ajuste la teneur en eau définitive.
Une fois ajustée, la teneur en eau du beurre varie de moins de 0,1% environ, à la
condition que les caractéristiques de la crème restent inchangées.

7
6

Fig. 12.7 Section de malaxage sous


vide.
5 Section d’injection
6 Section de malaxage sous vide
7 Etape finale du malaxage
8 Contrôle du taux d’humidité

274 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


Il est possible d’équiper la sortie de la machine de capteurs (8) d’humidité, de
teneur en eau, de teneur en sel, de densité et de température. Les signaux transmis
peuvent servir au contrôle automatique de ces paramètres.
Le beurre fini sort de la buse d’extrémité sous la forme d’un ruban continu qui
passe dans le silo à beurre pour être acheminé vers les machines d’emballage.
Les butyrateurs continus ont une capacité de production comprise entre 200 et
5000 kg/h de beurre de crème acide, et de 200 à 10000 kg/h de beurre de crème
douce.

Les nouvelles tendances et


possibilités des produits gras “jaunes”
Depuis le début du siècle, les habitudes de consommation de matière grasse sont
passées du beurre à la margarine. Les années 80 ont également connu une tendance
très claire vers des produits à faible teneur en matière grasse ou à teneur réduite.
Ces changements dans les habitudes de consommation peuvent s’expliquer par
l’augmentation de la consommation d’aliments préparés et d’une sensibilisation
accrue aux questions de santé.
Comme nous l’avons vu au début du chapitre, de nouveaux produits gras “jaunes” La tendance est indiscutablement
sont apparus sur le marché dès les années 70. Ils offraient une meilleure tartinabilité vers des produits à faible teneur en
à la température du réfrigérateur, et certains furent créés spécialement pour matière grasse ou à teneur réduite.
répondre à la demande croissante en produits à faible teneur en matière grasse sans
sacrifier le goût du beurre. Le Bregott et Lätt & Lagom sont deux exemples de produits
suédois, maintenant fermement établis sur le marché.

Bregott
Le Bregott est un produit à tartiner à 80% de matière grasse, dont 70 à 80% sont
constitués de matière grasse du lait et 20 à 30% d’huile végétale liquide, telle que
de l’huile de soja ou de colza.
La technique de fabrication est la même que pour le beurre.
Comme le Bregott contient de l’huile végétale, on le classe parmi les margarines.
On peut également l’utiliser pour la cuisine.

Lätt & Lagom


En Suède, le Lätt & Lagom est classé légalement parmi les margarines “douces” (la
norme IDF suggère la désignation mélange à faible teneur en matière grasse), ce qui
signifie que la teneur en matière grasse doit être comprise entre 39 et 41 g pour 100g
de produit. Ce type de tartinable est également appelé minarine.
Ce produit est destiné à être utilisé exclusivement comme tartinable. Il ne doit pas
être utilisé pour la cuisine ni dans la boulangerie, et certainement pas pour la friture,
du fait de sa forte teneur en protéine. Le procédé de fabrication de ce produit est
essentiellement le même que celui de la margarine.
L’huile de beurre, ou plus exactement la matière grasse anhydre du lait (MGLA),
et l’huile de soja ou de colza sont mélangées suivant des proportions qui dépendent
des caractéristiques exigées pour obtenir une bonne tartinabilité à la température du
réfrigérateur. Après le mélange, on ajoute une quantité appropriée de phase
aqueuse, contenant également des protéines récoltées dans un babeurre acide
ordinaire. L’ensemble du mélange est pasteurisé dans un échangeur de chaleur à
plaques et finalement refroidi tout en étant malaxé dans des refroidisseurs à surfaces
raclées et au moyen de rotors à picots, spéciaux.
La présence de MGLA et de protéines de babeurre donne au produit un arôme
similaire au beurre.
Le procédé TetraBlend est une nouvelle méthode de fabrication de ces produits.

Le procédé TetraBlend TM

Ce procédé est une combinaison de deux étapes de fabrication connues : la


concentration de la crème, et la cristallisation associée à l’inversion de phase.
La crème est généralement concentrée à 75-82% de matière grasse dans un
séparateur hermétique, où la phase lourde est le lait écrémé, également appelé

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 275


Procédé “laiterie” Procédé “margarine”

6 7

1
9 10
4 8
2

11
M M M

3
M M M

M M
14
M
13
M

Crème, 35 – 40 % Arôme
Crème, ≈80 % Sel 12
Babeurre Fluide de chauffage
Huile végétale Fluide de refroidissement
Option

Fig. 12.8 La chaîne de production babeurre, qui contient moins de matière grasse que le babeurre du barattage
TetraBlend pour la fabrication du beurre traditionnel. Dans la plupart des cas, le lait écrémé a une valeur de produit dérivé plus
et de produits à tartiner. élevée que le babeurre.
Pour la production de produits à tartiner de 40 à 60% de matière grasse, la crème
Procédé “laiterie” concentrée à 75-80% environ de matière grasse est diluée avec de l’eau avant d’être
1 Cuve de crème traitée, ce qui réduit la teneur en protéine et lactose. Lorsque la crème que l’on traite
2 Echangeur de chaleur à plaques a la même teneur en matière grasse que le produit fini, la teneur plus élevée en
3 Concentrateur de crème protéine et lactose altère le goût du produit à tartiner.
4 Standardisation de la crème Autre avantage, lorsque l’on utilise la crème concentrée comme base pour les
5 Cuves de précristallisation produits à faible teneur en matière grasse, il n’est pas nécessaire d’utiliser d’émulsifiant
supplémentaire, car les émulsifiants naturels du lait sont présents dans la crème.
Bloc “margarine”
6 Dosage du sel (optionnel)
7 Cuves d’huile végétale La chaîne de production
8 Dosage aromatique La chaîne de fabrication est construite autour de deux blocs :
9 Mélange 1. Un bloc “lait” type avec concentration de la crème, pasteurisation et refroidissement.
10 Cuve tampon 2. Un bloc “margarine” avec préparation du mélange et inversion de phase, ainsi que
11 Pompe haute pression malaxage et refroidissement.
12 Refroidisseur à surfaces raclées La chaîne de production est présentée dans la figure 12.8.
13 Rotors à picots
14 Silo avec convoyeur à vis au fond Le procédé “laiterie” (à gauche de la ligne discontinue, figure 12.8)
Le procédé commence par la crème pasteurisée à 35-40% de matière grasse.
Comme la crème peut provenir d’une autre crémerie ou d’une cuve de stockage de
crème sur place, il faut la chauffer à 60-70°C avant de l’introduire dans le concentrateur
à crème, une centrifuge hermétique. Le degré de concentration, c’est-à-dire la teneur
en matière grasse de la crème, est contrôlé automatiquement par le dispositif de
standardisation continue décrit dans le chapitre 6.2. Il est possible d’atteindre une
teneur en matière grasse de 82% (même de 84%, sur demande spéciale, mais
ensuite au dépens d’une forte teneur en matière grasse (plus de 10%) dans la phase
d’écrémage). Après la standardisation de la matière grasse, on refroidit la crème à
18-20°C avant de l’acheminer vers une cuve de séjour/précristallisation.

276 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12


Le procédé “margarine” (à droite de la ligne discontinue)
Cette partie de la chaîne de fabrication commence par une station de préparation du
mélange. Les ingrédients sont mélangés suivant la recette du produit en question.
La crème ainsi concentrée est mélangée avec les volumes appropriés d’huile
végétale, de sel et de phase aqueuse, dans cet ordre. Après un mélange intime, la
préparation est pompée vers une cuve tampon (10). Il est ensuite possible de
préparer le mélange suivant.
Ce processus est continu à partir de la cuve tampon. La pompe haute pression
(11) pompe le produit vers les refroidisseurs à surface raclées (12), où a lieu
l’inversion de phase. Avant le refroidissement final, le produit à tartiner est retenu et
malaxé par des rotors à picots (13). Après le refroidissement final, le produit entre
dans le silo de stockage (14), d’où il est pompé dans la machine de remplissage; la
plupart du temps, il s’agit d’une machine de remplissage de bacs.
L’ensemble du procédé et de la formulation est piloté par un automate.

L’emballage
Il existe essentiellement trois méthodes de transport du beurre ou des beurres
allégés entre la machine et l’emballage :
1. Le déchargement du produit dans un silo équipé d’un convoyeur à vis au fond. Le
convoyeur achemine le produit vers la machine d’emballage.
2. Le pompage du produit directement vers la machine d’emballage.
3. Le transfert au moyen de chariots remplis de produit. Les chariots sont souvent
équipés d’un convoyeur à vis. Une combinaison de ces méthodes est également
possible.
Le beurre peut être emballé en blocs de 5 kg et plus et en paquets de 10 g à 5 kg.
Le type de machine utilisée dépend du type d’emballage. Les machines sont
généralement entièrement automatiques, et il est souvent possible de reparamétrer
les machines à doser et à emballer pour différentes tailles, par exemple, 250 et 500g,
ou 10 et 15 g.
Le matériau d’emballage doit être étanche aux produits gras et imperméable à la
lumière et aux substances aromatiques. Il doit être également imperméable à l’eau,
sinon la surface du beurre devient sèche et les couches supérieures jaunissent
davantage que le reste du beurre.
Le beurre est généralement emballé dans une feuille d’aluminium. Le parchemin
végétal, autrefois le matériau d’emballage le plus courant, est toujours utilisé, mais
il est maintenant largement remplacé par la feuille d’aluminium, qui est beaucoup
moins perméable.
Après l’emballage, les paquets de plaquettes ou de barres de beurre continuent
vers la machine d’encartonnage. De là, les cartons sont chargés sur palettes et
transportés vers la chambre frigorifique.
La figure 12.2 présente le transport du beurre entre l’équipement de barattage et
les machines d’emballage.
Les mélanges laitiers et les produits tartinables sont emballés le plus souvent en
bacs de 250-600 g.

Le stockage frigorifique
Pour des raisons de consistance et d’aspect, le beurre, les mélanges laitiers et les
tartinables doivent être stockés en chambre frigorifique à 5°C après l’emballage.

Les méthodes expérimentales de


fabrication du beurre
Plusieurs nouvelles méthodes de fabrication ont été tentées, qui ont pour but de
produire du beurre sans propriétés indésirables. L’une de ces méthodes, la méthode
NIZO (hollandais) utilise de la crème douce comme matière première.
Cette méthode évacue le plus de babeurre possible après la formation du beurre.
Ce babeurre doux contient par conséquent la plupart des ions cuivre. On ajoute

Manuel de transformation du lait/Chapitre 12 277


ensuite de l’acide lactique produit à l’extérieur, ainsi qu’un levain spécial pour
produire l’acidification bactérienne qui confère au beurre l’arôme recherché. Cette
méthode a un rendement relativement bon et le babeurre est doux. Le beurre a une
bonne conservabilité et une haute résistance à l’oxydation et son goût est agréable.
Il est probable que plusieurs méthodes similaires seront adoptées dans le futur
si les test actuels tiennent leur promesse. Il existe toutefois encore des obstacles.
Ces méthodes ne peuvent pas être utilisées dans les pays qui interdisent l’addition
de substances étrangères (acide lactique) aux produits laitiers.

278 Manuel de transformation du lait/Chapitre 12

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