Vous êtes sur la page 1sur 49

Corticothérapie au long

cours
Dr I.GOUICHICHE
Introduction
• Depuis leur introduction au milieu du XXème siècle, les corticoides sont
devenus l’une des classes les plus utilisées en médecine, comme anti-
inflammatoire, anti-oedémateux et immunosuppresseurs.
• Toutefois, leur mécanisme reste imparfaitement connu.
• Ils sont aussi bien utilisés en cure courte comme traitement d’appoint qu’au
long cours comme traitement de fond de nombreuses maladies systémiques.
• Effets bénéfiques indiscutables.
• Cependant, leur effets secondaires peuvent être responsable d’une morbi-
mortalité importante.
• Leur prescription doit reposer sur un choix raisonné, entre les risques de la
maladie elle-même et les risques du traitement.
Rappel physiologique
Prescription des corticoïdes
• Type de corticoides
• Voie d’administration
• Durée du traitement
• Posologie
• Observance thérapeutique
• Débuter le traitement
• Situation des 3 R : Résistance, Rebond, Rechute
• Sevrage
Prescription des corticoïdes
1-Type de corticoïde
Malgré la diversité des corticoïdes disponible sur le marché, LA
PREDNISONE reste le corticoïde de référence pour:
 Calculer la dose
Apprécier l’efficacité
Prescription des corticoïdes
2-Voie d’administration
• Voie orale
• Voie injectable
• Les bolus : Place importante
dans le traitement de certaines
maladies systémiques
• Les doses des bolus sont généralement bien tolérées, mais parfois on décrit:
Incidents mineurs :
1. Céphalée aigue
2. Nausée
3. Troubles visuels transitoires
4. Arthralgies, Myalgies
5. OMI
Accidents majeurs : Hospitalisation
1. Infections graves Normalisation de la kaliémie pré-
2. Choc anaphylactiques bolus
3. Troubles du rythme cardiaque Surveillance 04h après le bolus
4. Accidents neuropsychiatriques Durée de perfusion : 90min à 3h
5. Nérose aseptique des os
Mort subite :
Les cas rapportés semblent etre dus à:
*Un passage trop rapide de la perfusion
*Trouble ionique pré-existant ou non corrigés
Prescription des corticoïdes
3-Durée du traitement
• Non défini dans les maladies auto-immunes et inflammatoires
• Dépend de :
• L’efficacité thérapeutique
• La survenue d’une cortico-dépendance ou cortico-résistance
• L’efficacité des traitement immunosuppresseurs associés

Education thérapeutique du patient


++++++++++
Prescription des corticoïdes
4-Posologie
La dose choisie dépend essentiellement de la sévérité de la maladie :
Dose forte : 1mg/kg/jour -> Dose immunosuppressive
Dose moyenne : 0.5mg/kg/jour
Dose faible : 0.1mg/kg/jour
En pratique :
• Il est préférable de débuter par de forte dose ensuite diminuer
progressivement après contrôle de l’inflammation plutôt que de sous
estimer la posologie initiale.
• La répartition sur le nycthémère peut se discuter dans certaine maladies
inflammatoires, exp: Maladie de Still, Polychondrite atrophiante….
Prescription des corticoïdes
5-Observance
Les corticoïdes ont certains effets biologiques qui ne sont pas
considérés comme des effets indésirables mais permettent de vérifier la
prise effective des corticoides :
Polynucléose neutrophile : par démargination des PNN
Basopénie
Eosinopénie
Prescription des corticoïdes
6-Débuter le traitement
• Décision réfléchie et expliquée au patient
 A court terme :
Terrain du patient
 A moyen terme :
Efficacité
Tolérance
 A long terme :
Décision d’arreter ou non le traitement
Prescription des corticoïdes
7-Les trois R
 Résistance
L’inefficacité est inhabituelle. On ne parle de résistance que si :
Dose d’attaque suffisante
Observance parfaite
Pas d’interaction médicamenteuse
Pas de changement intempestif du corticoïde prescrit
Si inefficacité avérée:
Rediscuter le diagnostic (pathologie infectieuse+++)
Prescription des corticoïdes
7-Les trois R
 Rebond
La reprise de la symptomatologie clinique et biologique lors de la baisse
des corticoides liée à la réduction rapide.
Prévenue en baissant la posologie par palier
Prescription des corticoïdes
7-Les trois R
 Rechute
La reprise de la symptomatologie après arrêt du traitement
Ou, reprise d’une symptomatologie insidieuse malgré la prolongation
de la durée des paliers ou la remontée d’un ou deux paliers.
La survenue de cette rechute sous corticoïde -> CORTICODEPENDANCE
En fonction de la dose de corticoïde se posera la question du
traitement d’épargne.
Prescription des corticoïdes
8-Sevrage
Si sevrage mal fait -> Rechute avec nécessité de reprendre la corticothérapie à forte dose !!

 Insuffisance surrénalienne
 Syndrome de sevrage : Possible alors que la fonction corticotrope est
normale: associe à des degrés divers :
Fatigue musculaire, arthralgie, anorexie, nausées, desquamation digitale,
hypotension orthostatique, fièvre, malaise, dyspnée, hypoglycémie, état
anxiodépressif, agitation

 Mécanisme exact non élucidé


 Evité par la baisse progressive des corticoïdes
Prescription des corticoïdes
8-Sevrage
L’insuffisance surrénalienne
• Systématiquement redoutée
• Théoriquement à craindre dès 10 jours de traitement
• Dépend de :
• La nature du corticoïde
• La puissance du freinage (variant dans le même sens que l’activité anti
inflammatoire)
• L’axe peut être touché à deux étages :
• Surrénalien : par atrophie surrénale
• Hypthalamo-hypophysaire : Non reprise de la sécrétion d’ACTH
Prescription des corticoïdes
8-Sevrage
L’insuffisance surrénalienne
• Patient exposé au risque d’IS à 5mg de Prednisone = dose de
sécrétion hormonale physiologique.
• La reprise d’une sécrétion normale est rapide pour une
corticothérapie < 15 jours
• La reprise de la fonction hypophysaire précède celle de la surrénale :
• A l’arret d’une corticothérapie prolongée : on administre de l’hydrocortisone
au lieu de donner de l’ACTH exogène
Prescription des corticoïdes
8-Sevrage
L’insuffisance surrénalienne
• Consensus 2015 :
• CTC < 3 semaines : Pas de surveillance
• CTC : 3s -> 3 mois : si pas de symptômes, pas de dosage
• CTC > 3 mois : Le risque d’IS dépend de la dose cumulée, de la durée, des
signes de surdosage :
• A 5mg de traitement: substituer par une molécule qui a une fonction glucoCTC mais qui
n’ihibe pas l’ACTH, soit systématiquement soit en cas de stress uniquement
• Dosage du cortisole à 8h du matin :
-> Si inférieur à la limite basse de la normale : poursuivre la substitution et réévaluer à 6 mois
-> Si supérieure à la limite haute de la normale : arrêt de la substitution
-> Si normal -> Test au synachtène :
* positif : arrêt de le substitution
*Négatif : Poursuivre la substitution et réévaluer à 3-6 mois
Complications et mesures de prévention
1-Nutritionnelles
• Les corticoïdes sont oréxigènes et induisent des anomalies du métabolisme
protéique, lipidique et glucidique.
 Régime normocalorique ou légèrement hypocalorique : 1800-2000kcal/jour
 Apport protidique important : 2-3mg/kg/j pour les doses élevées de
corticoïdes
 A cause de leur activité minéralcorticoïde (même faible) qui provoque une
rétention hydrosodée, il faut:
Régime peu salé
Surveillance de la kaliémie
 Exclusion des sucres d’absorption rapide et diminuer les sucres d’absorption
lente (Pain, Pomme de terre, Pate, Semoule, Riz)
Complications et mesures de prévention
2-Cardiovasculaire
Le risque cardiovasculaire globale est augmenté sous la forme d’un athérome
accéléré :
Dose-Effet de la corticothérapie
Favorisé aussi par la maladie inflammatoire sous jacente
Complications et mesures de prévention
3-Ostéoporose
• L’ostéoporose corticoinduite est la cause la plus fréquente d’ostéoporose
secondaire
• Risque fracturaire maximal durant les 3 premiers mois de traitement.
• FDR d’ostéoporose :
1. Age > 60 ans
2. Maladie sous jacente à risque : PR, PPR, MICI, Maladie pulmonaire chronique,
Transplantation d’organe solide
3. ATCDs de fractures, ATCDs familiaux de fractures de hanche
4. Chutes à répétition
5. Tabac, consommation excessive d’alcool
6. Une densité minérale osseuse basse
7. Dose de CTC cumulée ou actuelle élevée ou traitement prolongé
Complications et mesures de prévention
3-Ostéoporose
• Tout patient recevant une CTC > 7.5mg/j pendant > 3 mois :
• DMO avant traitement puis annuellement
• Supplémentation vitamino-calcique :
• Calcium: 1200-1500mg/j
• Vitamine D : 800-2000 UI/J
• Biphosphonate recommandé si ostéoporose confirmée

• Autres complications osseuses :


• Ostéonécrose aseptique (tête fémorale, genou)
Complications et mesures de prévention
4-Ulcération digestive
• Longtemps considérés comme pro ulcérogène
• Une étude récente confirme l’absence d’association statistiquement
significative et conclue que l’UGD était rare
• Pas de prescription systématique d’un protecteur gastrique;
néanmoins il serait raisonnable de le faire si co-prescription d’un AINS
ou ATCDs d’UGD.
Complications et mesures de prévention
5-Infection
• Pas de prophylaxie anti infectieuse systématique
• Sauf pour l’anguillulose : si séjour en zone d’endémie
• l’hépatite B : si VHB +
• la pneumocystose: si forte immunodepression

• Pas de vaccins vivants atténués (fièvre jaune, rougeole, rubéole,


oreillon)
Complications et mesures de prévention
6-Troubles trophiques
• Myopathie cortisonique : diminution de synthèse et augmentation du
catabolisme protidique
• Préconiser un régime hyperprotidique
• La lipodystrophie corticoinduite : modification de la répartition du
tissu graisseux
• Effets secondaires cutanés : acnés, vergetures, purpura, hirsutisme…
Complications et mesures de prévention
7-Troubles oculaires
• Cataracte cortisonique : souvent bilatérale
• Glaucome à angle ouvert : GRAVE
• Atteinte infectieuse : Kératite herpétique, endophtalmie purulente
• Autres: œdème papillaire, ptosis, choroidite, décoloration sclérotique
Complications et mesures de prévention
8-Troubles psychiatriques
• Les plus fréquents (banaux) : excitation, logorrhée, sensation de
facilitation intellectuelle, insomnie.
• Autres troubles, rares mais graves : troubles de l’humeur (manie,
hypomanie, épisodes depressifs) ; troubles cognitifs (amnésie++) ;
troubles du rythme circadien ; psychose.
• Décompensation de toutes pathologies psychiatriques préexistantes
• L’évolution est souvent favorable sous neuroleptiques et baisse de la
dose des ctc
• La rechute n’est pas constante
Complications et mesures de prévention
9-Anaphylaxie
• Rash, urticaire, hyper éosinophilie et choc anaphylactique
• Surtout chez l’asthmatique
• Susceptibilité individuelle pour un stéroïde donné
Conclusion
• La corticothérapie est une arme indispensable pour de nombreuses
pathologies auto-immunes et inflammatoires.
• Leurs complications sont importantes à connaitre car nombreuses
peuvent être prévenues.
Cas clinique 1
• C’est un jeune patient de 25 ans sans antécédents connus, qui
consulte pour une douleur abdominale depuis 8 heures
avec diarrhée, vomissements, myalgie et une fatigue importante.
L’examen clinique trouve une tachycardie à 110/min, une
hypotension et signes de déshydratation. Abdomen souple et ECG
normal. Le patient rapporte la cause à un sandwich qu’il a mangé la
veille.
Le bilan biologique montre une natrémie à 128 mmol/L, une kaliémie
à 5,4 mmol/L et une glycémie à 0,65 g/L.
• Quel est votre diagnostic et sur quels arguments cliniques et
biologiques ?
• Quel examens complémentaires à demander ?
• Quelle est votre conduite thérapeutique en urgence ?
• 1/ LE DIAGNOSTIC À ÉVOQUER EST UNE INSUFFISANCE SURRÉNALIENNE AIGUË.

Arguments cliniques :
• Douleur abdominale récente
• Nausées, vomissements
• Diarrhée
• Douleur musculaire et fatigue intense [l’hypotonie musculaire est un signe très important et peut
confiner le patient au lit]
• Déshydratation extracellulaire et hypotension artérielle [peut varier d’une simple hypotension
orthostatique à un état de choc hypovolémique dans les formes graves]
• Dans certains cas on peut observer des convulsions ou coma en cas d’hypoglycémie sévère.
• Demandez au patient s'il est sous corticoïdes et s'il a arrêté son traitement de façon brutale.

Arguments biologiques :
• Hyponatrémie < 130 mmol/L +++ [avec une natriurèse >20 mmol/L]
• Hyperkaliémie > 5 mmol/L +++
• Hypoglycémie < 0,7 g/L ou < 4 mmol/L
• On peut trouver également une insuffisance rénale fonctionnelle.
2. Quel sont les bilans à demander ?
• AUCUN
• Evoquer l’IS c’est la traiter !
• Les autres bilan à visée diagnostic et étiologique seront fait à distance
• 3/ CONDUITE THÉRAPEUTIQUE AUX URGENCES :
• À domicile : Administration de 100 mg d'hydrocortisone IV ou IM ou à défaut en
SC puis transport médicalisé à l’hôpital.
• En milieu hospitalier : Patient en salle de soins intensifs avec surveillance en
permanence des paramètres vitaux;
• * Remplissage par NaCl 0,9% 500 ml en 15 minutes, à renouveler si besoin [et
drogues vasopressives immédiatement si hypotension engageant le pronostic
vital];
– Perfusion NaCl 0,9 % 1 litre IV la première heure, puis adapter en fonction de
l'état d'hydratation, de la glycémie, de la kaliémie et de la reprise ou non des
apports oraux;
– Si hypoglycémie : Glucose 30%
• * Hydrocortisone :
– Une dose initiale de 100 mg en IV ou IM (ou, à défaut, en SC)
– 100 mg par 24 heures en perfusion IV continue par seringue électrique
auto-pousseuse PSE (à défaut 50 mg en IV ou IM toutes les 6 heures)
– après correction de l'état clinique, hémodynamique et des troubles
électrolytiques, retour au traitement par hydrocortisone per os en triplant
la dose habituelle (au minimum 60 mg/24 heures) et en répartissant le
traitement en trois ou quatre prises (dont une prise vespérale), puis
diminution progressive en quelques jours pour revenir aux doses
habituelles.
• POINTS CLÉS À RETENIR :

L’ISA peut être inaugurale ou survenir chez un patient ayant déjà


une insuffisance surrénalienne lente. Les facteurs déclenchant les
plus fréquents sont n'importe quelle pathologie
intercurrente (vomissements, diarrhées, infections, fracture, infarctus
du myocarde, intervention chirurgicale, anesthésie, acte diagnostique
invasif, effort physique important, stress psychologique intense, etc.).
Ou l’arret de la corticothérapie au long cours.
Cas clinique 2
Mme S, 58ans, vous consulte pour des douleurs musculaires des épaules
qui la gênent dans ses activités quotidiennes depuis plus de 3 semaines.
Elle a pour seul antécédent un BAV de haut degré pour lequel elle porte un
pacemaker.
Initialement soulagées par la prise de paracétamol, ces douleurs s’avèrent
désormais résistantes aux antalgiques de palier 1 et empêchent la patiente
de dormir.
Mme S se sent fatiguée et a perdu 2 kg en 1 mois.
Elle décrit d’autres part l’apparition de douleurs au niveau des deux
hanches apparues récemment, sans notion de chutes ou de traumatisme.
1. Quelle est votre hypothèse diagnostique ?
2. Quel est votre traitement ?
• Le diagnostic : Pseudo-polyarthrite rhizomélique :
• Terrain : femme > 50ans
• Argument de fréquence
• Arthromyalgie des ceintures
• D’horaire inflammatoire
• Résistantes aux antalgiques de palier 1
• Avec une Altération de l’état général
• Absence de notion de traumatisme
• Le traitement : Corticothérapie per os : 0.2 à 0.3 mg/kg/j
• Mesures associées :
• RHD
• Limiter l’apport en sel
• En sucre
• Supplémentation vitamino-calcique
• Surveillance de l’efficacité et de la tolérance :
• Disparition des symptomes den moins de 72h
• Pression artérielle
• Ionogramme
• VS, CRP
Le traitement s’avère efficace et l’EG de la patiente s’améliore
rapidement, lui permettant de reprendre ses activités quotidiennes.
Six mois plus tard, Mme S revient vous voir dans le cadre du suivi de sa
pathologie. Son état s’est à nouveau dégradé et elle souffre à présent de
céphalées temporales hémicraniennes droites. La patiente vous précise
qu’elle n’a jamais été migraineuse.

Quel diagnostic suspectez vous ?


• Le diagnostic est l’artérite à cellules géantes ou Maladie de Horton
Une corticothérapie est débutée per os à 0.7mg/kg/j est débutée pour une
durée de 18mois et les symptomes de la patiente s’amendent.
Un an plus tard, Mme S vous appelle en urgence car depuis ce matin elle
ressent une vive douleur, apparue brutalment au niveau du pli de l’aine
gauche irradiant dans la face antérieure de la cuisse. Elle vous précise
qu’elle n’a pas fait d’effort inhabituel et qu’il n’y a pas de notion de
traumatisme. À L’examen vous notez une boiterie à la marche. Le membre
inférieur gauche n’est pas raccourci, et la mobilisation passive de la hanche
est normale.
Interprétez la radiographie ?
Réalisez vous un autre examen complémentaire ?
Quel diagnostic suspectez vous ?
1.La radiographie de face de la hanche est normale
2.OUI, Une STG osseuse. Car la radiographie est normale et l’IRM
est contre indiquée (Pacemaker) à la recherche d’une hypofixation
de la tête fémorale.
3.Le diagnostic suspecté est l’ostéonécrose de la tête fémorale
Imene.gouichiche@gmail.com

Vous aimerez peut-être aussi