« Droit des entreprises en difficultés »

Professeur Mayatta Ndiaye MBAYE,

Agrégé des facultés de droit
FSJP/UCAD
 Prélude

• Le degré de gravité de la maladie justifie

toujours la consistance et la substance du
remède administré.
• Respecter le dosage pour que la solution ne
devienne pas, elle-même, source de
difficultés, parfois plus pressantes.
 Prélude (suite)
• Y. GUYON a pu estimer que le droit des
entreprises en difficultés n’est rien d’autre que
le droit de la maladie et de la mort des
entreprises.
• ce droit prévoit plusieurs mécanismes tendant
à remédier à la maladie des entreprises et
s’appliquant à des degrés différents de
difficultés.
 Prélude (suite)
• Certaines sont d’origine purement
conventionnelle : il en est ainsi de l’audit
interne et externe rigoureusement encouragés
par les principes de bonne gouvernance des
entreprises (voir notamment Code de
gouvernance des entreprises du Sénégal)
 Prélude (suite)
• D’autres sont d’origine légale et peuvent être
retrouvés dans deux corps de règles
différents :
• D’une part les procédures organisées par
l’AUSC-GIE : il s’agit de la procédure d’alerte et
de l’expertise de gestion.
 Prélude (suite)
• D’autre part, les procédures organisées par
l’AUPCAP encore appelées procédures
collectives. Elles sont au nombre de trois :
• Le règlement préventif, avant la cessation des
paiements, avant la cessation d’activité, qui
peut être analysé comme une mise en
quarantaine de l’entreprise ;
 Prélude (suite)
• Le redressement judiciaire, après cessation
des paiements mais avec possibilité de
redressement et qui peut être analysé comme
une hospitalisation de l’entreprise avec soins,
parfois intensifs ;
• La liquidation des biens, après cessation des
paiements et sans possibilité de redressement
qui peut être analysée comme une euthanasie
des entreprises.
 Prélude (suite)
• Parmi tous ces mécanismes, participent à la
prévention des difficultés des entreprises ceux
prévus par l’AUSC-GIE et le règlement
préventif. Mais, notre étendue sera axée sur le
règlement préventif en raison de l’objet de
cette formation d’aujourd’hui.
 Prélude (suite)
• Le règlement préventif est une procédure
destinée à éviter la cessation des paiements
ou la cessation d’activité d’une entreprise, et à
permettre l’apurement de son passif au
moyen d’un concordat préventif (article 2
AUPCAP).
• A des similitudes avec la procédure de
conciliation
 Plan
• Pour mieux tracer les contours des problèmes
rencontrés dans la pratique du règlement
préventif, il convient d’appréhender de
manière chronologique ladite procédure en
étudiant d’une part les préalables à
l’ouverture du règlement préventif (I) et,
d’autre part, l’ouverture et au déroulement
du règlement préventif (II).
I- Les préalables à l’ouverture du règlement préventif

• Réunion de certaines conditions requises par

la loi
• Une décision provisoire du juge
A- Les conditions d’ouverture du règlement préventif

• Deux types de conditions pour l’ouverture du

règlement préventif :
• - des conditions de fond;
• - des conditions de forme.
 1- Des conditions de fond

• Elles sont relatives à la situation juridique et à

celle économique et financière du débiteur.
a- La condition liée de la situation juridique du débiteur

• La procédure de règlement préventif est

ouverte au débiteur personne physique ou
morale commerçante, personne morale de
droit privé non commerçante ou entreprise
publique ayant la forme d’une personne
morale de droit privé (article 2-1 AUPCAP).
• Commerçant de fait?
• Entreprenant? (TC Caen, 12 janv. 2011)
 b- La condition relative à la situation économique et financière du
débiteur

• Ne peut bénéficier du règlement préventif que

le débiteur qui connaît une situation
économique et financière difficile mais non
irrémédiablement compromise (article 2-1
alinéa 2 AUPCAP).
• Qu’est-ce qu’une situation irrémédiablement
compromise ou non ?
 b- (suite)
• La situation difficile qui justifie l’ouverture du
règlement préventif doit-elle nécessairement
être à la fois économique et financière ? Ou
l’une des deux seulement peut-elle suffire ?
• Une entreprise qui a cessé ses activités, même
temporairement peut-elle bénéficier du
règlement préventif ?
 2- Des conditions de forme

• Le règlement préventif est ouvert sur

l’initiative du débiteur par la juridiction
compétente. La demande d’ouverture
s’effectue sur requête du seul débiteur
accompagnée ou suivie d’une offre de
concordat.
 a- La requête du débiteur

• adressée au président de la juridiction

compétente et déposée au greffe
• indique les créances pour lesquelles le
débiteur demande la suspension les
poursuites individuelles
• Discrimination
• accompagnée d’un certain nombre de
documents
 b- L’offre concordataire du débiteur

• Le dépôt de la requête doit être accompagné

ou suivi dans les trente jours d’une offre de
concordat préventif par le débiteur. A défaut,
la requête est déclarée irrecevable.
• elle est parfois insignifiante, le débiteur y
exposant des solutions parfois inadaptées
voire impossibles pour le redressement de son
entreprise
B- Des effets provisoires automatiques de la saisine

• La recevabilité de la demande d’ouverture

exige du juge le prononcé de la suspension
provisoire des poursuites individuelles et la
désignation d’un expert rapporteur.
1- La décision de suspension provisoire des poursuites individuelles

• La proposition de concordat préventif déposée

par le débiteur est transmise sans délai au
président du tribunal régional. Celui-ci rend
une décision de suspension des poursuites
individuelles qui s’applique dans un domaine
déterminé et produit un certain nombre
d’effets.
a- Le champ d’application de la suspension provisoire des poursuites
individuelles

• objectif premier poursuivi par le débiteur à

travers l’introduction de sa requête
• ne concerne pas toutes les poursuites contre
le débiteur en difficulté
 Les poursuites concernées

• La décision de suspension des poursuites

individuelles suspend ou interdit toutes
poursuites individuelles tendant à obtenir le
paiement des créances désignées par le
débiteur et nées antérieurement à ladite
décision, qu’il s’agisse de demandes en
paiement, de voies d’exécution ou de mesures
conservatoires.
 Les poursuites concernées (suite)

• Pour qu’une poursuite individuelle soit

suspendue en vertu d’une telle décision, il faut
qu’elle porte sur une créance antérieure à la
décision de suspension des poursuites
individuelles expressément visée par le
débiteur dans sa requête et qu’elle n’ait pas
encore produit un effet définitif, peu importe
qu’elle ait été engagée avant ou après la
décision de suspension.
 Les poursuites concernées (suite)

• La suspension des poursuites individuelles

s’applique à tous les créanciers
chirographaires et munis de privilèges
généraux ou de sûretés réelles spéciales
notamment un privilège mobilier spécial, un
gage, un nantissement ou une hypothèque.
 Les poursuites exclues

• les créanciers de salaires

• les créanciers munis d’une sûreté personnelle
• Les créances nées après la décision de
suspension des poursuites individuelles
• Les actions tendant à la reconnaissance des
droits ou des créances contestées
• Les actions pénales contre le débiteur
b- Les effets de la suspension provisoire des poursuites individuelles

• Sur les créanciers:

• - suspension de poursuites
• - interdiction de poursuites
• Sur le débiteur:
• - Interdiction de certains actes
• - Sauf autorisation judiciaire motivée
 2- La désignation d’un expert rapporteur

• Le président de la juridiction désigne un

expert chargé d’une manière générale
d’effectuer une étude de faisabilité des
solutions proposées par le débiteur dans le
concordat préventif eu égard à la situation
économique et financière de ce dernier.
 a- Le statut de l’expert rapporteur

• soumis au même statut que le syndic (article 8

alinéa 2 renvoyant aux articles 41 et 42
AUPCAP).
• rapports entre expert et créancier
• remplacement, assistance et révocation
 b- La mission de l’expert rapporteur

• Apprécier la situation économique et financière du

débiteur
• Contrôler le débiteur quant aux actes interdits
• Entendre le débiteur et les créanciers et prêter ses bons
offices pour la conclusion du concordat préventif
• Rédiger et déposer un rapport sur la situation
économique et financière du débiteur, sur ses
perspectives de redressement et sur toutes autres
mesures contenues dans les propositions du concordat
préventif dans un délai de 2 mois sauf prorogation
motivée d’un mois.
 II- L’ouverture et le déroulement du règlement préventif

• L’ouverture du règlement préventif s’effectue

par le biais de l’homologation du concordat
préventif. Dès cette décision, la procédure voit
son déroulement se consister essentiellement
en une exécution du concordat préventif ainsi
homologué.
 A- L’homologation du concordat préventif

• L’homologation du concordat préventif, qui

matérialise l’ouverture de la procédure de
règlement préventif exige non seulement un
concordat conclu mais également un
concordat au contenu encadré.
 1- L’exigence d’un concordat conclu

• accord entre le débiteur et les créanciers.

• délais ou les remises
• concordat proposé mais non conclu par un
créancier, pas possibilité d’ouverture du
règlement préventif.
2- L’exigence d’un concordat au contenu encadré

• saisine de la juridiction compétente par son

président ou d’office sur informations
• Refus d’homologation lorsque :
• Elle constate la cessation des paiements du
débiteur.
• Elle rejette le concordat préventif proposé par le
débiteur du fait de l’absence de l’une de ses
conditions de validité.
• Elle constate que le débiteur n’est pas en difficulté.
 2- (suite)

• Homologation lorsque les conditions suivantes

sont réunies :
• les conditions de validité du concordat sont
réunies ; il s’agit, en l’absence de précision, des
conditions de validité du contrat et, plus
spécifiquement, des conditions de validité du
concordat de redressement judiciaire
• aucun motif tiré de l’intérêt collectif ou de l’ordre
public ne paraît de nature à empêcher le
concordat ;
 2- (suite)

• le concordat offre des possibilités sérieuses de

redressement de l’entreprise, de règlement du
passif et des garanties suffisantes d’exécution ;
• les délais consentis n’excèdent pas trois ans
pour l’ensemble des créanciers et un an pour
les créanciers de salaires.
• Extension…
 2- (suite)

• Il n’appartient donc pas au juge rendre le

concordat « homologable » en retouchant les
termes du concordat pour le rendre conforme
à la loi. Il doit rejeter ou entériner en l’état.
• Caractère d’ordre public des délais du
concordat
 B- L’exécution du concordat préventif

• La décision d’homologation du concordat

préventif déclenche l’exécution de celui-ci qui
n’est pas sans incidents.
 1- Le déclenchement de l’exécution du
concordat préventif homologué

• fin de la mission de l’expert rapporteur.

• Suspension des poursuites des créanciers
• Liberté du débiteur
• Contrôle des organes de la procédure (juge-
commissaire, syndic, contrôleurs) et du
représentant du ministère public
2- Les incidents d’exécution du concordat préventif homologué

• Dans certains cas et sous certaines conditions,

le concordat préventif peut faire l’objet d’une
modification, d’une annulation ou d’une
résolution.
 a- La modification du concordat préventif

• Pas de modification unilatérale

• Pas de modification conventionnelle
• Modification judiciaire
b- L’annulation et la résolution du concordat préventif

• La résolution et l’annulation du concordat

préventif sont organisées par les articles 139 à
143 de l’AUPCAP.
 Les cas de résolution et d’annulation du
concordat préventif

• Il y a résolution du concordat préventif en cas :

• d’inexécution grave de ses engagements concordataires par le
débiteur ou des remises et des délais consentis,
• d’interdiction d’exercer une activité commerciale frappant le
débiteur d’une durée et d’une nature incompatibles avec la
poursuite de l’activité de son entreprise par location-gérance ou
cession d’entreprise,
• de faillite personnelle ou d’interdiction de diriger, gérer ou
administrer une entreprise commerciale frappant les dirigeants
de la personne morale débitrice qui continuent d’assumer, en
droit ou en fait, la direction, sauf délai raisonnable de 3 mois
maximum accordé par le tribunal régional.
 (suite)

• Le concordat est annulé en cas de dol

résultant d’une dissimulation d’actif ou d’une
exagération du passif si le dol a été découvert
après l’homologation du concordat préventif.
 Les actions en nullité et en résolution

• L’action en résolution peut être exercée sur

requête par un créancier ou par les contrôleurs
du concordat. De même, le juge peut se saisir
d’office. L’AUPCAP ne limite pas cette possibilité
aux seuls créanciers signataires du concordat.
• En revanche, l’action en nullité du concordat
préventif ne peut être intentée que par le
représentant du Ministère Public qui apprécie
l’opportunité de l’exercer ou non.
Les effets de l’annulation et de la résolution du concordat préventif

• La résolution ne libère pas les cautions qui

sont intervenues pour en garantir l’exécution
totale ou partielle alors que l’annulation les
libère, de plein droit, sauf si celles-ci avaient
connaissance du dol lors de leurs
engagements.
 (suite)

• Cessation des paiements constatée =

ouverture du redressement judiciaire ou de la
liquidation des biens
 Le recours contre la décision de la juridiction compétente

• Toutes les décisions prononcées par la

juridiction compétente dans le cadre du
règlement préventif sont exécutoires par
provision et ne peuvent être attaquées qu’en
appel dans les 15 jours qui suivent leur
prononcé.
• Appel
• Merci de votre aimable attention
Pr. Mayatta Ndiaye MBAYE
mayatta.mbaye@gmail.com