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Trématodes

Année académique 2023-24


Plan
• Caractéristiques générales
• Douves ou distomatoses
– Distomatoses hépato-biliaires
• Fascolia hepatica, …
• Opisthorchis spp et Clonorchis sinensis
– Distomatoses pulmonaires
• Paragonimus spp
– Distomatoses intestinales
• Heterophyes heterophyes, Fasciolopsis buski
• Schistosomoses ou bilharzioses
– Schistosomoses hépato-spléniques et hépato-intestinales
• Schistosoma mansoni et S. japonicum
– Schistosomoses génito-urinaires
• S. haematobium
LES SCHISTOSOMOSES
(BILHARZIOSES)
Schistosoma mansoni et autres espèces

Agents de schistosomoses,
schistosomiases ou bilharzioses

http://www.cdc.gov/parasites/fasciola/epi.html
Cas clinique
Femme 32 ans
• Anamnèse
– Hématurie, asthénie, T° modérée
– ATCD: néant, archéologue, séjour de
plusieurs semaines en Egypte, à nager
dans le Nil après une soirée…
• Clinique
– Examen physique sans particularité
– Biologie
• Sang: Hyperéosinophilie modérée
• Urines: hématurie

présence d’œufs de
Schistosoma haematobium
Agents pathogènes
• Espèces
– Six espèces chez l’homme mais présents chez d’autres espèces
mammifères comme singes, bétail, chats, chiens, …
– Trois espèces principales
• Schistosoma mansoni, S. haematobium et S. japonicum
– Trois espèces mineures
• S. mekongi, S. intercalatum et S. guineensis
• Morphologie
– Adultes
• Localisés dans les plexus veineux mésentériques, urogénital ou rectal
• Male 10 à 15 mm; femelle : 15 à 30 mm
• Deux ventouses: orale au niveau de l’œsophage et l’autre ventrale (fixation)
• Durée de vie 5 à 10 ans
– Œufs
• Ovalaires ou arrondis présentant souvent un éperon selon les espèces
Epidémiologie
• Prévalence
– 200 millions de cas dans le monde
– 200.000 morts/an
– 90% des cas en Afrique sub-saharienne
• Répartition géographique
– S. mansoni : Afrique sub-saharienne, Amérique du Sud, (Proche Orient)
– S. haematobium: Afrique, Proche-Orient
– S. japonicum: Asie en particulier Chine et Philippine mais éradiquée au
Japon
– Autres
• S. mekongi quelques foyers en Asie du Sud Est
• S. intercalatum et S. guineensis: Afrique de l’Ouest
Schistosomiase en Afrique
et en Amérique latine

Schistosoma mansoni
Présent en Afrique sub-saharienne,
Amérique du Sud, (Proche-Orient)
Schistosoma haematobium
Afrique et Proche-Orient

Wertheim H. et al. Atlas of Human Infectious Diseases


Schistosomiase en Asie

Schistosoma japonicum
• Présent en Chine et aux
Philippines (et Indonésie)

Wertheim H. et al. Atlas of Human Infectious Diseases


Cycle évolutif
• Cycle dans l’environnement
– Ponte par les femelles dans les veinules de l’intestin/ vessie
– Effraction de la paroi avec libération des œufs qui sont éliminés
• Par les selles (S. mansoni, S. japonicum, S. mekongi, S. intercalatum et
S.guineensis)

• Par les urines (S. haematobium)

– Libération de miracidium au contact de l’eau douce à T° 18-33°C


– Infestation du mollusque d’eau douce spécifique selon les espèces
Cycle évolutif
• Cycle dans l’environnement
– Maturation pendant 1 mois avec polyembryonnie
(1 miracidium --> milliers de cercaires)
– Libération de cercaires dans l’eau douce où transformation en
furcocercaires
– Durée de vie de furcocercaires courte (qlq heures) dans l’eau
– Attirée par chimiotactisme vers l’hôte où pénétration active au
travers de la peau intacte
Schistosomiase

Eclosion d’un œuf de S. haematobium


avec libération d’un miracidium

Schistosoma mansoni – furcocercaire (500 µm)

ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et tropicales. 3 ème édition.


Libération d’un miracidium

ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et tropicales. 3 ème édition.


Hôtes intermédiaires

Biomphalaria sp Bulinus sp Oncomelania sp

Escargots d’eau douce selon l’espèce de Schistosoma


http://www.cdc.gov/dpdx/schistosomiasis/gallery.html
http://www.nhm.ac.uk/nature-online/species-of-the-day/scientific-advances/disease/bulinus-truncatus/index.html
Cycle évolutif
• Cycle chez l’homme
– Transmission transcutanée par pénétration active des parties
immergées dans l’eau
– Migration des schistosomules vers les vaisseaux sanguins et
lymphatiques
– Remonte la circulation sanguine via les veines jusqu’aux poumons,
puis cœur
– Gagne les vaisseaux porte au niveau du foie où transformation en
vers adultes après 2 à 3 mois
– Après accouplement, les vers adultes migrent vers les veines
mésentériques ou vésicales selon les espèces:
• Veines mésentériques pour S. mansoni, S. japonicum et S. mekongi et S.intercalatum
• Veines vésicales pour S. haematobium
– Les femelles vont pondre dans les plexus veineux
Accouplement de Schistosoma mansoni
Femelle

La femelle plus petite se loge dans le canal gynécophore du mâle

ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et tropicales. 3 ème édition.


http://www.cdc.gov/dpdx/schistosomiasis/gallery.html#mansoniadults
Cycle de Schistosoma spp

Migration vers les poumons et le


cœur puis le foie via la circulation
sanguine

Contamination transcutanée active


par des furcocercaires
Transformation et accouplement
en vers adultes dans le système
porte du foie
Cycle de Schistosoma spp

Migration vers les poumons et le


cœur puis le foie via la circulation
Migration vers les veines
sanguine
mésentériques ou vésicales
selon espèces

Transformation et accouplement
en vers adultes dans le système
porte du foie

Elimination des œufs dans les selles


ou les urines selon les espèces
Cycle évolutif de la schistosiamose
Life Cycle of the Schistosome.

Ross AG et al. N Engl J Med 2002;346:1212-1220.


Transmission par contact avec l’eau

Transmission dans les zones rurales


Les enfants sont souvent plus infectés que les
adultes
Attention aux touristes revenant de zones
endémiques

http://www.nhm.ac.uk/nature-online/species-of-the-day/scientific-advances/disease/biomphalaria-
choanomphala/index.html
Epidémie de schistosomiase en France

Infections à S. haematobium

Trois familles en France


8 personnes sur 11
Une famille en Allemagne
3 personnes sur 5
Physiopathologie
• Action irritante des cercaires lors du passage transcutané
• Migration des schistosomules et des adultes
• Réactions autour des œufs dans les tissus
– Libération des œufs dans un organe creux (vessie, intestin, …):
excrétion via les selles ou les urines
– Ponte dans des organes pleins (foie, poumons, …):
• Formation d’un granulome bilharzien
• Scléroses secondaires et calcification des tissus contaminés
• Fibrose hépatique avec hypertension portale
Tableau clinique
Phase aiguë
• Phase de contamination
– < Pénétration des furcocercaires
– Souvent asymptomatique
– Dermatite cercarienne survenant endéans 24h après le bain
infectant, disparition spontanée après une semaine = papules
prurigineuses
– Plus marquée pour les espèces asiatiques S. japonicum et S. mekongi
– Certaines espèces aviaires peuvent causer des symptômes identiques
Phase aiguë
Dermatite cercarienne ou dermatite des nageurs

Papules prurigineuses d’apparition rapide (<24h)


après contact avec l’eau infectée

ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et tropicales. 3 ème édition.


Tableau clinique
Phase aiguë

• Phase d’invasion = Fièvre de Katayama


– Migration et maturation des Schistosoma dans le sang
– Réaction d’hypersensibilité aux antigènes circulants
– Plus fréquent dans les infections à S. mansoni et S. japonicum
– Début 1 à 2 mois après la contamination
– T° à début brutal, asthénie, céphalées, myalgies, arthralgies, toux
sèche, diarrhées
– Clinique: hépatosplénomégalie, lymphadénopathies,
hyperéosinophilie
– Résolution souvent spontanée après 1 semaine
Tableau clinique
Phase chronique

• Généralités
– Infections chroniques chez patients vivant en zone endémique
– Sévérité de la maladie selon
• Quantité d’œufs dans les tissus
• Distribution anatomique
• Durée et l’intensité de l’infection
Tableau clinique
Phase chronique
• Schistosomiase urogénitale
– Schistosoma haematobium
– Atteinte vésicale fréquente avec hématurie micro- puis macroscopique
– Signes d’irritation mictionnelle:
• Douleurs mictionnelles, dysurie, pollakiurie
– Atteinte des organes génitaux
• Urétrites, épididymites, prostatites, salpingites, vaginites, lésions génitales….
– Complications
• Fibroses et sténoses des voies urinaires, fistules urétérales, hydronéphrose,
insuffisance rénale avec syndrome néphrotique (< dépôts de complexe-
immuns, pyélonéphrites à répétition), cancer de la vessie
Infection à S. haematobium
Lésion cutanée au niveau génital

Lésion hypertrophique
au niveau de la vulve

Collection Dr A. Theunis CHU Saint-Pierre


Tableau clinique
Phase chronique

• Schistosomiase intestinale
– Schistosoma mansoni, S. intercalatum, S. guineensis
– Atteintes intestinales et hépato-spléniques
– Trouble du transit, diarrhée, constipation, douleurs
abdominales et rectales, sang dans les selles
– Complication: hypertension portale < S. mansoni
• Schistosomiase artério-veineuse avec atteinte hépatique
– Schistosoma japonicum et S. mekongi
– Atteintes hépatospléniques sévères
– Ictère, varices œsophagiennes, hypertension portale,
hémorragies digestives (< ruptures varices œsophagiennes),
ascite, œdèmes, …
– Souvent mauvaise évolution clinique
Tableau clinique
Atteintes extra-intestinales et urinaires
• Pathogènes responsables
– Schistosoma japonicum, S. mansoni
• Conséquences de
– Migrations erratiques des parasites
– Embolisations d’œufs vivant par les anastomoses porto-caves
• Atteintes neurologiques
– Myélites transverses: paraplégies
– Atteintes du SNC: épilepsies, troubles neurologiques focaux
• Atteintes pulmonaires
– Embolisations dans les poumons: hypertension pulmonaire avec dyspnée
• Atteintes cutanées
– Lésions papulo-nodulaires parfois ulcérées
Infections à S. mansoni
Hypertension portale

Varicosités de la paroi abdominale

Patient 34 ans présentant une hypertension portale avec varices œsophagiennes


http://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMicm0803551
Aspects cliniques des infections
à Schistosoma spp From Dr. Xiao-Nong Zhou.

Ascite due à l’hypertension portale Atteinte cutanée


Infection à S. japonicum
King CH. N Engl J Med 2009;360:106-109. ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et
tropicales. 3ème édition.
Diagnostic biologique
• Diagnostic indirect
– Période d’invasion jusqu’à 4 à 6 semaines après la
contamination
– Hyperéosinophilie, sérologie (utile aussi dans le suivi)
• Diagnostic direct
– Deux à trois mois après la phase d’invasion
– Recherches des œufs dans les urines
• Schistosoma haematobium
• Culot de sédimentation des urines de 24h ou 1ère miction du matin
ou après un effort physique
Diagnostic biologique
• Diagnostic direct (suite)
– Recherches des œufs dans les selles
• Les six espèces peuvent être rencontrés (y compris
S.haematobium)
• Diagnostic différentiel en fonction de la taille et de la
forme des œufs, présence et localisation de l’éperon
– Biopsies
• Si examens des selles ou urines négatifs
• Biopsies rectales ou vésicales: très sensibles
• Présence et aspect des œufs
• Réaction granulomateuse avec de nombreux éosinophiles
Aspects morphologiques des œufs
Eperon apical
Eperon latéral

Schistosoma haematobium

Schistosoma intercalatum
Schistosoma mansoni

Schistosoma japonicum
Eperon latéral
Ash Orihel’s Atlas of Human Parasitology
Granulome bilharzien

Granulome dans une biopsie de vessie Granulome dans une biopsie rectale

Œufs de S. haematobium
Œufs de S. mansoni

Ross AG et al. N Engl J Med 2002;346:1212-1220. ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et
tropicales. 3ème édition.
Œufs de S. haematobium

Collection Dr A. Theunis CHU Saint-Pierre


Coupe transversale
Femelle lovée dans le canal gynécophore du mâle

Collection Dr A. Theunis CHU Saint-Pierre


Autres examens complémentaires

• Colonoscopie ou cystoscopie
– Au niveau de la vessie ou du tube digestif
– Ulcérations, polypes, hémorragies, varices
œsophagiennes…
– Biopsies pour examen anatomopathologique
• Examens radiologiques
– Echographie, Radiographie, CT-Scan, …
Examens radiologiques
Dilatation calicielles urétérales
Epaississement de la paroi Polype avec hydronéphose

Echographie de la vessie

Urographie intraveineuse
CT scan abdominal

ANOFEL. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et


tropicales. 3ème édition.
Hydronéphrose et atrophie rénale Ross AG et al. N Engl J Med 2002;346:1212-1220.
Traitement
• Remarques générales
– Débuter le traitement antiparasitaire après la phase d’invasion
• Praziquantel
– Actif sur les douves adultes mais non sur les vers immatures et les œufs
– Des œufs viables peuvent être sécrétés pendant plusieurs semaines
après le traitement
– Attention en début de traitement, possibilité d’une «décharge
antigénique » < lyse des vers avec augmentation de l’éosinophilie et des
anticorps
– Prise de corticoïdes nécessaire en cas de symptomatologie sévère
– Surveillance post-thérapeutique avec contrôle à 2 mois, 6 mois et 1 an:
contrôle de l’éosinophilie, hématurie, recherche de parasites
– Traitement chirurgicale si nécessaire
Prévention
• Précautions individuelles
– Eviter les baignades dans les eaux douces ou saumâtres stagnantes
y compris les immersions très courtes
– Préférer les baignades en eau de mer ou en piscine
– Attention contamination via vêtements mouillés
• Précautions collectives
– Lutte organisée par l’OMS dans 28 pays
– Traitement avec du praziquantel à grande échelle des populations
à risque: 74,3 millions de personnes en 2015
– Accès à l’eau potable
– Amélioration de l’assainissement, l’éducation sanitaire
– Lutte contre les gastéropodes
http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs115/fr/index.html
Campagnes organisées par
l’OMS visant les enfants
Résumé
• Schistosomiase se contracte lors de bains en eau douce contenant des
fusocercaires
• Hôtes intermédiaires = mollusques
• Symptomatologie lié à la migration et rétention des œufs. Elle dépend de
l’organe contaminée: atteintes génito-urinaires ou intestinales selon les espèces
• Schistosomiase urinaire (S. haematobium) : hématurie
• Schistosomiase intestinale complication hépato-splénique (ascite, …)
• Diagnostic < mise en évidence d’œufs dans les urines/ les selles ou dans une
biopsie (rectale, vésicale, …)
• Examens biologiques: hyperéosinophilie, sérologie positive utile pendant phase
d’invasion
• Imagerie pour le bilan d’extension
• Traitement à base de praziquantel doit être débuté après la phase d’invasion
• Contrôle de la maladie: traitement de masse, éducation, accès à l’eau, gestion
de l’eau et lutte contre les mollusques
Questions ?
• Quelles sont les modes de prévention dans la lutte
contre la schistosomiase ?
• Citez trois exemples de trématodes associés à la
survenue de néoplasies.
• Quelles sont les différences entre le cycle de Fasciola
hepatica et Opisthorchis spp ?
• Citez des exemples de nématodes et de trématodes
dont la contamination se fait par voie transcutanée.
Olivier DENIS
denis.olivier@ulb.be

Maya HITES
Maya.Hites@hubruxelles.be

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