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JEAN-CHRISTOPHE CARRET

Cerna
Centre d'économie industrielle
de I'Fcole des mines de Paris

LA RÉFORME
DE LA FISCALITÉ FORESTIÈRE
AU CAMEROUN
Débat politique et analyse économique

Photo 1. Enfants Pygmées observant avec attention un chantier d’exploitation forestière dans l’est du Cameroun.
Pygmy children looking with curiosity at a logging chance in eastern Camerron.

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


second.
L’auteur propose une LA DISCUSSION
La principale caractéristique de
restitution thématique de ÉCONOMIQUE SUR LE cette réflexion est qu'elle s'est
la discussion scientifique RÔLE DE LA déplacée du thème de la contri-
bution de l'exploitation des
sur la réforme de la fis- FISCALITÉ forêts tropicales au dévelop-
calité forestière dans les FORESTIÈRE DANS pement économique des pays
pays tropicaux. Il établit LES PAYS TROPICAUX dits du tiers-monde grâce aux
recettes de la fiscalité fores-
ensuite le bilan des trois tière, à celui de l'utilisation de
années qui ont suivi la Cet article retrace le cours la fiscalité forestière comme
d'une discussion entre écono-
réforme de la fiscalité mistes au sujet du rôle de la
une écotaxe, sans toutefois
abandonner le premier thème ;
forestière au Cameroun. fiscalité forestière dans les pays en insistant au contraire sur la
Une interprétation du tropicaux. Il établit ensuite le complémentarité des deux
bilan des trois premières objectifs (Carret, Giraud,
caractère conflictuel de années d'un débat politique 1998).
deux mesures entre l'Etat camerounais et la
En 1992, l'article Tropical
Banque mondiale à propos de
proposées par la la réforme de la fiscalité fores- forest management : reflection
Banque mondiale – la tière au Cameroun. La on the rent distribution
discussion, publié par Hyde et
suppression de la pro- confrontation des deux débats
Sedjo, deux économistes des
permet de mettre en relief la
tection des usines de consistance « économique » de ressources naturelles, a brus-
quement opéré un changement
transformation et l'attri- certaines des convictions poli-
de perspective dans la façon
tiques des deux protagonistes.
bution aux enchères des D'autres, en revanche, nécessi-
d'aborder la question, ouvrant
concessions forestières tent un éclairage supplémen-
ainsi la polémique. Les deux
auteurs remettent, en effet, en
– complète cette taire et ne sont pas analysés
cause chacun des deux rôles
dans le cadre de cet article.
présentation. précédemment assignés à la
La réflexion économique sur le fiscalité forestière dans les pays
rôle de la fiscalité forestière tropicaux. Plusieurs textes
dans les pays tropicaux a ultérieurs ont paru, notamment
débuté, en tant que discussion des textes où les deux auteurs
scientifique, en 1976 quand de l'article de 1992 polémi-
Page, Pearson et Leleand font quent avec deux des auteurs
paraître un article, Capturing précédents (Vincent, 1993 ;
economic rent from Ghanaian Hyde, Sedjo, 1993 ; Vincent,
Timber, proposant une modéli- Gillis, 1998 ; Hyde, 1998) mais
sation microéconomique de sans véritablement sortir de
l'exploitation d'une forêt tropi- l'impasse à laquelle avait abouti
cale. Quelques textes significa- le texte de 1992. De même,
tifs ont ensuite été publiés. quelques textes, dont certains
Nous avons retenu ceux de en français, ont repris les idées
Ruzicka (1979), Gillis (1980), des uns et des autres, mais sans
Repetto et Gillis (1988) et apporter, non plus, d'éléments
Vincent (1990) ainsi que ceux nouveaux.
de Repetto (1990), Gillis
(1992) et Vincent (1992) pour Cette première partie restitue
leur caractère synthétique. les principales étapes de la
Tous les auteurs (à l'exception réflexion entre économistes, en
portant une attention particu-
de Repetto) sont des écono-
lière à la façon dont Hyde et
mistes du développement,
Sedjo ont opéré leurs déplace-
Gillis et Vincent étant de
surcroît de bons spécialistes ments. La référence aux auteurs
des deux principaux pays pro- est utilisée quand le propos est
singulier et non quand la pro-
ducteurs d'Asie du Sud-Est :
l'Indonésie pour le premier position est commune à l'en-
auteur, la Malaisie pour le semble des auteurs.

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DÉFINITIONS DE LA fonction de la taille de l'entre- priétaire de la ressource natu-
RENTE ET DE LA prise (Page et alii, 1976). relle pour prélever la rente du
même nom, compte-tenu des
FISCALITÉ • Troisièmement, les prix
trois difficultés qui rendent son
« FORESTIÈRES » des bois tropicaux, comme
calcul et, donc, son prélève-
ceux des autres matières pre-
ment difficiles. Ce paiement
La rente économique est un mières, connaissent des fluc-
étant légitime (il comporte une
paiement pour l'utilisation tuations conséquentes ils
contrepartie : l'accès à la res-
d'une ressource rare. La rareté peuvent varier, sur une courte
source rare), on doit en toute
indique que la disponibilité de période, du simple au double
rigueur parler de redevances
la ressource n'augmente pas (Ruzicka, 1979).
(royalties en anglais) et non de
avec le prix. Si cette indisponi- • Quatrièmement, dans les pays « taxes » forestières, sauf dans
bilité n'est que temporaire, on tropicaux, l'exploitation fores- un cas particulier, celui de la
parle alors de « quasi-rente ». tière est en grande partie taxe à l'exportation (Gillis,
L'existence d'une « rente fores- réalisée par des entreprises 1980). Nous y reviendrons.
tière » suppose, donc, tout étrangères : des manipulations
simplement, que la ressource des prix de transfert sont donc EFFICACITÉ ET COÛT
forestière n'est pas infinie. possibles. ADMINISTRATIF DU
La rente appartient au pro- • Cinquièmement, la ressource PRÉLÈVEMENT DE LA
priétaire de la ressource rare. forestière n'est pas homogène. RENTE FORESTIÈRE
Dans les pays tropicaux, le Certaines essences et certaines
propriétaire de la ressource qualités de bois sont plus rares L'efficacité d'une redevance
forestière est généralement que d'autres. De plus, certaines forestière mesure sa capacité à
l'État, même si, depuis le som- forêts sont plus facilement transférer la rente forestière au
met de Rio, les peuples de la accessibles que d'autres. La propriétaire de la ressource
forêt (photo 1) font valoir un rente forestière est donc natu- naturelle, c'est à dire, à tenir
droit de propriété rellement différentielle ou compte le plus possible des
« traditionnel » sur la ressource ricardienne (de l'économiste trois caractéristiques de la rente
forestière et revendiquent ainsi, David Ricardo) à la marge forestière précédemment évo-
forts du soutien des organisa- intensive (augmentation de la quées. Mais le propriétaire doit
tions non gouvernementales récolte dans une forêt donnée) comparer le gain ainsi obtenu
environne-mentalistes, une et extensive (mise en produc- avec le coût de l'effort néces-
partie de la rente forestière. tion de nouvelles forêts). saire pour réaliser ce transfert,
En théorie, le calcul de cette Passons sur les deux premières appelé coût administratif
rente forestière ne pose pas de difficultés car elles peuvent (Hyde, Sedjo, 1992), l'admi-
problème. C'est la différence être réglées en utilisant des nistration étant généralement
entre le revenu et le coût com- valeurs conventionnelles. Res- en charge du prélèvement de la
plet (rémunération du capital tent les trois suivantes. Elles rente forestière. Ce coût est
incluse) de l'exploitation d'une caractérisent la rente forestière composé des coûts de contrôle
forêt tropicale. Dans la prati- dans les pays tropicaux celle-ci de l'assiette (matière sur la-
que, en revanche, cinq raisons est transférable, au moins en quelle est assise la redevance)
rendent le calcul de la rente partie, à l'étranger (en jouant et de recouvrement de cette
forestière difficile, voire im- sur les prix des transactions redevance. Il est donc d'autant
possible. entre filiales), fluctuante et plus faible que l'assiette et le
recouvrement de la redevance
• Premièrement, la rémun- surtout inégalement répartie
entre les forêts et les arbres sont faciles à contrôler.
ération du capital comprend
une prime de risque, éventuel- d'une forêt donnée. Ajoutons La possibilité de manipuler les
lement élevée en raison de par ailleurs qu'elle peut être prix de transfert interdit l'utili-
l'instabilité politique et de importante, suffisamment en sation d'une redevance dont
l'insécurité qui caractérisent tout cas pour déclencher des l'assiette est « monétaire », par
généralement les pays tropi- ruées vers l'or vert (Repetto, exemple un impôt sur les
caux, dont l'évaluation est 1990 ; Vincent, 1992) et qu'elle bénéfices ; restent alors celles
subjective (Page et alii, 1976). représente, pour un pays tropi- dont l'assiette est « physique »,
cal, le principal bénéfice volume ou superficie exploités
• Deuxièmement, toutes les « mesurable » de l'exploitation (Gillis, 1980).
entreprises n'ont pas la même de sa ressource naturelle
efficacité productive, les diff- (Gillis, 1980). Dans cette seconde catégorie, il
érences pouvant être impor- existe, en théorie, une rede-
tantes, du simple au double, en La fiscalité forestière est le vance parfaitement efficace la
moyen utilisé par le pro-

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redevance pleinement différen- fluctuation des prix des bois lecter les prix de référence sur
ciée (Gillis, 1980 ; Hyde, tropicaux. les marchés de consommation.
Sedjo, 1992). C'est une rede- Quant à la redevance de super-
Les imperfections inhérentes
vance dont l'assiette n'est en ficie – la fixation, lors des
à une redevance fixe peuvent
vérité pas purement physique, enchères, du prix plancher et
être améliorées :
puisque c'est la rente ricar- surtout du prix de retrait à un
dienne d'un arbre donné. Cette • en utilisant une table des niveau réaliste – elle nécessite
rente étant différente pour cha- valeurs mercuriales, révisée une certaine connaissance,
que essence, chaque qualité périodiquement pour la rede- même imparfaite, des carac-
d'une essence donnée, et selon vance sur le volume, qui de- téristiques de la ressource
la localisation de l'arbre à vient, alors, une redevance ad forestière.
l'intérieur du territoire, il existe valorem, calculée comme un
• En utilisant conjointement
à peu près autant de redevances pourcentage du prix de marché
que d'arbres dans les forêts ces deux redevances, on obtient
de l'essence ;
exploitées, soit un nombre a priori le rapport
considérable. Le coût de • en utilisant un mécanisme efficacité/coût administratif du
d'enchères pour fixer le taux de prélèvement de la rente
contrôle de l'assiette de cette
la redevance de superficie. forestière le plus satisfaisant
redevance est donc prohibitif,
notamment parce que le trait (Hyde, Sedjo, 1992). Les
La première amélioration tient
caractéristique de la forêt tropi- éléments d'appréciation
imparfaitement compte de
cale est d'être une ressource empirique font cependant
l'inégalité de répartition de la
naturelle fortement hétérogène. défaut. Ceux des auteurs qui se
rente forestière, notamment
sont livrés au calcul de la part
celle à la marge extensive, mais
Une redevance fixe, au vo- de la rente forestière prélevée
permet de suivre l'évolution des
lume ou à la superficie (tant par l'Etat dans les pays
prix. La seconde tient mieux
d'unité monétaire par mètre tropicaux ont conclu à une
cube ou par hectare), minimise compte de l'inégalité de répar-
faible appropriation (Page et
ce coût, avec un très net avan- tition de la rente forestière,
aL, 1976 ; Ruzicka, 1979 ;
surtout à la marge extensive,
tage pour la redevance annuelle Repetto, Gillis, 1988 ; Vincent,
mais elle est moins efficace
de superficie. En effet, le 1990). Mais, pour les périodes
pour suivre les évolutions de
contrôle d'une superficie est et les pays ou les régions
prix, même s'il est toujours
plus simple que celui du vo- étudiés (respectivement au
possible de bâtir un indice de
lume de l'ensemble des arbres Ghana en 1970, au Kalimantan
révision annuel du taux de la
récoltés sur cette superficie, dans la première moitié des
redevance.
même si, à l'échelle d'un pays, années 70, en Indonésie et en
ce contrôle n'est évidemment Dans les deux cas, les coûts de Malaisie entre 1970 et le début
pas systématique. Mais l'effi- contrôle de l'assiette augmen- des années 80 et en Malaisie
cacité est médiocre car une tent la redevance ad valorem entre 1966 et 1985), le taux de
redevance fixe ne tient compte nécessite, en effet, de contrôler la redevance à la superficie est
ni de l'inégalité de répartition non seulement les volumes très faible, il n'est pas fixé par
de la rente forestière – elle (photo 2) mais, aussi, les es- des enchères et les redevances
entraîne l'écrémage à la marge sences, chacune ayant un prix sur le volume sont pour partie
intensive et extensive – ni de la de marché différent, et de col- des redevances fixes. Enfin,
aucun de ces auteurs n'a
procédé à une estimation du
coût administratif des
différentes options. Seuls Hyde
et Sedjo (1992 et 1993)
indiquent que cet aspect du
problème vaut d'être examiné
sérieusement. Ils ajoutent aussi
que l'augmentation du taux de
la redevance ad valorem sur le
volume accroît l'incitation à
tricher, c'est à dire à ne pas
payer cette redevance, le gain
du tricheur s'élevant
proportionnellement.
Photo 2. Parc à grumes en forêt (est du Cameroun). Une remarque pour conclure.
Timber yard in a forest (eastern Cameroun) Il existe deux façons de

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contrôler l'assiette d'une prélève aussi une partie L'ancrage au territoire
redevance ad valorem (généralement importante) de national
la rente forestière, ce qui
• sur le chantier Pour un certain nombre
justifierait le recours au terme
d'exploitation forestière et, d'auteurs (Page et alii., 1976 ;
de redevance (Gillis, 1992).
dans ce cas, on parle de Ruzicka, 1979 ; Repetto, Gillis,
redevance d'abattage ; 1988 ; Vincent, 1993 ; Vincent,
RÔLE ÉCONOMIQUE DE
• ou au moment de LA FISCALITÉ
Gillis, 1998), le critère de
l'exportation et, dans ce cas, on répartition de la rente forestière
parle de taxe à l'exportation. FORESTIÈRE dans les pays tropicaux est
l'ancrage au territoire national,
De fait, l'assiette n'est plus la D'un point de vue juridique, c'est à dire la propension à
même car des arbres peuvent l'État voire les populations réinvestir « loca-lement » la
être abattus, puis finalement locales sont propriétaires de la rente forestière. Avec ce
abandonnés en forêt. Le coût rente forestière. Mais la critère, l'Etat sédentaire est
de contrôle de l'assiette, non répartition de la rente forestière préféré aux entreprises,
plus, n'est pas le même. Dans est aussi une question multinationales pour la plupart,
un cas, il faut visiter un certain économique qui peut se et donc nomades par définition.
nombre de chantiers formuler ainsi quelle est la Ce point de vue était très
d'exploitation forestière répartition la plus favorable au largement partagé par les
(suffisamment pour que la développement économique du spécialistes du développement
menace du contrôle soit pays considéré (photo 3) ? Or (Bairoch, 1992), au moins
crédible). Dans l'autre, il faut l'enjeu est de taille puisque, jusqu'à la fin des années 70 et
être présent dans les ports comme nous l'avons dit plus cela pour l'ensemble des
d'exportation, peu nombreux en haut, il existe de fortes activités extractives.
général pour un pays donné, ce présomptions pour considérer
qui est beaucoup moins que les sommes en jeu sont L'efficacité productive du
coûteux, même si, en toute réellement très importantes et bénéficiaire
rigueur, il faudrait comparer que celles-ci constituent le Mais Hyde et Sedjo (1992 et
cette baisse du coût avec la principal et surtout le plus 1993 Hyde, 1998) ont introduit
perte de recettes fiscales due tangible des bénéfices de un changement de perspective.
aux abandons en forêts. De l'exploitation d'une forêt Ils considèrent, en effet, que le
plus, la taxe à l'exportation peut tropicale dans un pays donné, critère pertinent de répartition
être utilisée comme un « tarif certains étant difficilement de la rente forestière dans les
commercial » destiné à mesurables ou longs à se faire pays tropicaux n'est pas
favoriser le développement sentir. Par exemple, les effets seulement l'ancrage au
d'une industrie locale de d'entraînement sur l'économie territoire mais l'efficacité
transformation manufacturière locale ou les transferts de productive du bénéficiaire. Ils
du bois. Dans ce cas, fréquent savoir-faire et de technologie, émettent alors de sérieuses
dans les pays tropicaux, le notamment quand l'entreprise réserves sur l'efficacité de
terme de taxe est conservé, est étrangère (Gillis, 1980). l'administration forestière,
même si la taxe à l'exportation
considérée comme une agence
publique, non seulement à
prélever la rente forestière
(c'est pour cela qu'ils insistent
tant sur le coût administratif)
mais aussi à l'utiliser, car ils
font l'hypothèse que la rente
forestière lui est af-fectée.
Cette dernière hypothèse est
acceptable pour les redevances
forestières, les pays et les
périodes étudiés par les
différents auteurs. Mais le seul
argument empirique proposé
par Hyde et Sedjo est que
l'administration forestière aux
Philippines emploie presque
autant de fonctionnaires que
Photo 3. La répartition de la rente forestière est un enjeu important pour le
l'administration forestière
développement économique du pays qui possède des forêts tropicales.
The distribution of forest income is a major challenge for the economic development
of the country, which has tropical forests.

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américaine, pour une superficie à l'exportation, puis en l'ampleur prise par le
forestière cinq fois moins imposant un arrêt des phénomène de déforestation
importante. Ils suggèrent, donc, exportations de grumes – se dans les pays tropicaux, que les
que l'affectation des redevances sont concrétisées par la auteurs s'interrogent sur la
forestières à cette construction d'usines ayant des possibilité d'utiliser la fiscalité
administration a eu comme rendements en matières très forestière comme une écotaxe.
effet d'augmenter inutilement inférieurs à ceux des usines
La fiscalité comme une
ses effectifs et d'élever ainsi le étrangères ne bénéficiant pas
écotaxe
coût administratif du d'une telle protection. Par
prélèvement de la rente conséquent, une partie de la Il existe deux façons de
forestière. Mais ils ne disent rente forestière « potentielle » a concevoir le rôle d'une écotaxe
rien de la façon dont le surplus été détruite. Non pas à cause (Lipietz, 1999) :
est utilisé par cette d'investissements inadaptés,
administration. A notre avis, ils mais parce que la protection • soit comme une incitation
supposent que les recettes rendait possible – la matière économique destinée à
fiscales sont entièrement première étant moins chère – modifier le comportement du
converties en salaires. Et ils l'existence de rendements en pollueur (dite taxe incitative
considèrent que ce n'est pas matières plus faibles. Telle est « à la Pigou » ou plus
une utilisation efficace de la en tout cas notre interprétation, simplement écotaxe « à la
rente forestière. car les deux auteurs ne sont pas Pigou », Pigou étant le nom de
très précis sur les raisons qui l'économiste à l'origine de la
Sédentariser le théorie des externalités) ;
conduisirent les usines
réinvestissement de la rente
indonésiennes et malaysiennes • soit comme une redevance
par les entreprises
à être moins efficaces que les qui ne modifie pas le
Bien qu'ils semblent usines étrangères utilisant la comportement du pollueur
favorables, pour les raisons que même matière première, cette mais que l'on affecte à la
nous venons d'évoquer, à une dernière condition « la même réparation des dégâts, à
répartition de la rente forestière matière première » étant condition évidemment que les
au profit des entreprises, Hyde évidemment très importante. atteintes portées à
et Sedjo ne discutent pas de la Mais les auteurs ne sont l'environnement soient
possibilité que cette rente ne malheureusement pas très réversibles. Cette dernière est
soit finalement pas réinvestie précis sur cet aspect technique dite redevance
sur le territoire. Or, il existe au du problème. environnementale ou redevance
moins deux façons de Finalement, il ressort de cette affectée.
sédentariser le réinvestissement discussion que les territoires
de la rente par les entreprises ; Pour Repetto et Gillis (1988),
des pays tropicaux ne sont pas la fiscalité forestière peut
• en favorisant les des lieux très propices à une limiter la déforestation, en
entrepreneurs « nationaux » ; bonne utilisation de la rente jouant le rôle d'écotaxe à la
forestière. Subsiste alors l'im- Pigou. Cette proposition prend
• en incitant à la transformation pression de devoir choisir entre appui sur l'analyse proposée
locale de la matière première. Charybde, une administration par Gillis (1980) de l'écrémage.
inefficace « par nature », ou Ce dernier montre que les
Ces deux cas de figure ont été
Scylla, des entreprises redevances les plus
examinés par les auteurs qui
inefficaces car de facto couramment utilisées (car les
sont plutôt favorables à une
protégées. plus simples à administrer)
répartition de la rente forestière
en faveur de l'Etat. Et, de fait, étaient, notamment en
Page et alii. (1976) et Ruzicka RÔLE Indonésie, des redevances fixes
(1979) notent que les ENVIRONNEMENTAL DE ou ad valorem sur le volume et
entreprises nationales sont LA FISCALITÉ que l'augmentation du taux de
ces redevances accroissait
systématiquement moins FORESTIÈRE l'écrémage. Mais l'inverse est
efficaces que les entreprises
étrangères. Quant à Gillis évidemment vrai. Autrement
Si la réflexion sur le rôle de la
(1980) et Vincent (1992), ils dit, plus les taux de ces deux
fiscalité forestière dans les pays
constatent que les politiques de types de redevances sont bas,
tropicaux a débuté dans une
protection des usines de plus l'exploitation est intensive
perspective de développement
transformation menées par la dans une forêt donnée et plus
économique, il était
Malaisie et l'Indonésie à partir elle s'étend en direction des
inéluctable, compte tenu de la
du milieu des années 70 – en forêts marginales. Les causes
montée des préoccupations
exemptant les usines de la taxe de la déforestation sont
environnementales et de
cependant différentes dans les

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deux cas. Dans le premier cas, forêts inframarginales ainsi que Hyde et Sedjo (1992)
elle résulte éventuellement son extension dans les forêts poursuivent la réflexion sur
d'une surexploitation de la marginales et, d'autre part, le l'aménagement durable. Ils se
ressource naturelle, dans le développement d'une industrie demandent si la fiscalité
second, de l'ouverture de de transformation fortement forestière peut inciter
peuplements, les rendant ainsi consommatrice de matière l'exploitant forestier, d'une part,
plus facilement accessibles, première. Par ailleurs, il à diminuer les dégâts causés
notamment aux planteurs et augmente probablement ses par l'exploitation forestière sur
plus généralement aux recettes fiscales, ce qui est les arbres qui restent sur pied
migrants. Par conséquent, plus éventuellement favorable au et, d'autre part, à adopter un
les superficies de forêts développement économique du comportement de sylviculteur
ouvertes à l'exploitation sont pays. en favorisant les arbres
importantes, plus le danger d'avenir. Ils supposent donc,
La notion d'aménagement
d'une déforestation d'origine même s'ils ne le disent pas, que
durable
agricole est grand, ce facteur se les dégâts causés par
conjuguant à une éventuelle Vincent (1990) introduit un l'exploitation d'une forêt
surexploitation des forêts élément nouveau dans le débat tropicale sont éventuellement
inframarginales. sur le rôle environnemental de irréversibles (dans ce cas, la
la fiscalité forestière dans les solution proposée par Vincent
La subvention d'une
pays tropicaux : la notion n'est pas valable) et que
industrie de transformation
d'aménagement durable. Pour l'aménagement durable
Les deux auteurs s'en prennent, lui, aménager durablement une nécessite l'adoption de
aussi, à la politique de forêt tropicale consiste, dans méthodes d'exploitation
subvention d'une industrie de une vision empruntée à forestière à faible impact sur le
transformation. Elle consiste à l'économie des ressources milieu naturel. Ils concluent
exempter les grumes qui sont naturelles, à maintenir le stock par la négative, ce qui était
transformées sur place de taxes de capital naturel à un niveau prévisible. En effet, une taxe
à l'exportation. Or, Gillis constant. Si le peuplement se incitative à la Pigou est efficace
(1980) constate que les usines régénère naturellement après Si l'objectif environnemental
asiatiques qui ont bénéficié de une coupe sélective, il est est atteint en diminuant le
cette exemption ont eu des possible d'exploiter volume de production. C'est le
rendements en matières indéfiniment la ressource cas pour la déforestation. La
inférieurs à ceux des usines naturelle sans entraîner la taxe n'est plus efficace si
étrangères. Cela implique qu'à déforestation. Or, son l'objectif est un aménagement
volume de produits finis hypothèse est que, dans le cas durable, défini comme la
équivalent, une usine de d'une forêt tropicale et à réduction de l'intensité des
transformation protégée condition que la coupe soit dégâts de l'exploitation
consomme plus de grumes que sélective, la régénération forestière.
n'en consommerait une usine naturelle est possible si, après
qui achèterait ces grumes sur le la coupe, des travaux que l'on CONCLUSIONS
marché mondial. Par qualifiera de sylvicoles sont
conséquent, Si la demande de réalisés. La réflexion sur le rôle de la
contreplaqué (dans le cas de fiscalité forestière dans les pays
Il propose, alors, d'utiliser les
l'industrie indonésienne) reste tropicaux a, donc, produit les
recettes de la fiscalité forestière
identique et que le pays résultats suivants : il est
pour financer les travaux
souhaite conserver une part de possible d'augmenter le
destinés à favoriser la
marché équivalente à celle qu'il prélèvement de la rente
régénération naturelle du
avait en exportant des grumes, forestière par l'État en utilisant
peuplement forestier. La
l'exploitation forestière un système de redevances
fiscalité forestière est, donc,
s'intensifie dans les forêts (redevances ad valorem et à la
envisagée comme une
inframarginales et s'extensifie superficie) tel que la différence
redevance affectée à la
en direction des forêts entre le gain fiscal brut et le
réparation des dégâts de
marginales. coût administratif soit positive.
l'exploitation forestière.
En revanche, rien ne garantit
En conclusion, si l'État L'objectif environnemental est
que ce prélèvement ait des
augmente son prélèvement sur plus ambitieux car il ne
conséquences positives pour le
la rente forestière en utilisant consiste plus seulement à
développement économique du
des redevances sur le volume, freiner la déforestation mais à
pays. Tout dépend de la façon
il limite, d'une part, favoriser « l'aménagement
dont la rente forestière est
l'intensification de durable ».
utilisée par l'administration ou,
l'exploitation forestière dans les

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le cas échéant, par les code forestier (le précédent internationales, l'OCDE
entreprises. Par ailleurs, la datait de 1981) avait lui aussi notamment, la Banque
possibilité d'utiliser la fiscalité été réformé. Ces deux réformes mondiale essaie de promouvoir
forestière comme une écotaxe ont été demandées par la l'utilisation des instruments
dépend de l'objectif Banque mondiale. Elles font, économiques (taxes et permis
environnemental : en effet, partie des négociables) dans les politiques
conditionnalités liées au environnementales (Banque
• la réponse est positive si
programme d'ajustement mondiale, 1997). Mis à part
l'objectif environnemental
structurel auquel adhère l'Etat dans les pays anglo-saxons et
consiste à freiner la
camerounais depuis 1988, à scandinaves où la doctrine
déforestation ;
cause notamment (mais pas économique exerce, en ce
• elle est négative si c'est seulement) de son endettement. domaine, une forte influence
pour inciter l'exploitant En 1998, la dette extérieure du sur les décisions publiques, les
forestier à adopter les méthodes Cameroun était de 9,6 milliards politiques environnementales
à faible impact sur le milieu de dollars, soit 110 % de son font généralement plutôt appel
naturel (photo 4), produit intérieur brut, et le à des instruments
comportement que les auteurs service de la dette de 660 réglementaires (normes,
assimilent à l'aménagement millions de dollars, soit 27 % standards). Or, courantes sont
durable. des recettes d'exportation. les situations où les instruments
économiques sont plus
Le cours de la discussion
scientifique restitué, examinons LES PROTAGONISTES : efficaces que les instruments
réglementaires. Si tel est le cas,
maintenant celui du débat L'ÉTAT CAMEROUNAIS
ils permettent en effet, pour un
politique. ET LA BANQUE objectif environnemental
MONDIALE
LA RÉFORME DE LA donné, d'obtenir un coût global
de dépollution plus faible tout
FISCALITE En appelant à une réforme de la en incitant de surcroît à
FORESTIÈRE AU fiscalité forestière au l'innovation technologique.
Cameroun, la Banque mondiale
CAMEROUN visait deux objectifs : L'aménagement durable est
aussi un objectif de la politique
• augmenter les recettes forestière du Cameroun.
La réforme de la fiscalité fiscales de 'Etat ; Autrement dit, l'Etat
forestière au Cameroun (Carret, camerounais et la Banque
1998) a commencé avec l'année • favoriser l'aménagement
durable des forêts mondiale poursuivent bien le
fiscale 1995-1996 (au même objectif
Cameroun, l'année fiscale camerounaises (Ferrer,
O'Hallaran, 1996). environnemental. Mais le
commence en juillet). Peu de premier a choisi, en 1994
temps auparavant, en 1994, le Comme d'autres institutions (article 23 du code forestier),
d'utiliser une norme
environnementale appelée
« plan d'aménagement
durable ». En 1998, le
Ministère de l'environnement et
des forêts a d'ailleurs publié
des Directives nationales pour
l'aménagement durable des
Forêts du Cameroun (Minef-
Oibt-Onadef, 1998),
complétées par un Guide
d'élaboration des plans
d'aménagement des Forêts de
production du domaine
Forestier permanent de la
république du Cameroun.
Cela dit, l'aménagement
durable n'est pas le seul, ni
même le plus important des
Photo 4. Chantier d’exploitation forestière dans l’est du Cameroun. objectifs de la « politique
Logging chance in eastern Cameroon forestière » camerounaise.

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


Celle-ci comporte, en effet, au 1999 a été considérée comme différentes, celles utilisées pour
moins quatre objectifs. Deux une année de pause dans la la redevance d'abattage étant
d'entre eux, la promotion des réforme, les trois premières légèrement inférieures aux
entrepreneurs nationaux et années ayant été marquées par autres. De toute façon, les prix
l'industrialisation (photo 5), ont de nombreux conflits. Nous y de référence étaient dans les
été adoptés « en toute reviendrons. De plus, la deux cas très inférieurs à ceux
indépendance » quand le pays Banque mondiale a lancé, au du marché. De plus, les
est devenu indépendant. Les début de l'année fiscale 1999- réajustements étaient rares
deux autres, l'aménagement 2000, un audit des premières (seule exception, mais
durable et la participation des années de la réforme. Mais, seulement pour la taxe à
populations locales, ont été entre temps, le gouvernement l'exportation, au moment de la
proposés par le camerounais a interdit dévaluation du FCFA, pour
« gouvernement mondial », au partiellement l'exportation de tenir compte non pas d'une
moment du sommet de la terre grumes, ce qui nécessite de évolution des prix mais de la
qui s'est tenu à Rio en 1992, revoir entièrement la fiscalité diminution du coût de
« acceptés » par le Cameroun – forestière. production). Pour tenir compte
comme par les autres pays de la distance de transport
Avant la réforme, la fiscalité
tropicaux – et intégrés parmi intérieur, le Cameroun était
forestière au Cameroun était
les autres objectifs de sa divisé en trois zones :
composée, selon la
politique forestière. D'où la
terminologie proposée plus • I, province de l'ouest ;
réforme, en 1994, du code
haut, de deux redevances et
forestier. • II, provinces du sud-ouest
d'une taxe une redevance
et du littoral ;
En revanche, et aussi annuelle de superficie de 100
surprenant que cela puisse FCFA/ha/an pour tous les • III, provinces du centre et
paraître, l'augmentation des permis (ventes de coupes et de l'est. Une décote de 5 %
recettes fiscales n'était pas, et licences), une redevance était appliquée aux valeurs
n'a jamais été, au moins tant d'abattage ad valorem de 5 % mercuriales Si l'essence était
que la réforme de la fiscalité et, pour les grumes exportées exploitée dans la zone III, ou
forestière n'avait pas en l'état (c'est à dire non une surcote de 5 % si l'essence
commencé, un objectif de la transformées sur place), une était exploitée dans la zone I,
politique forestière du taxe d'exportation ad valorem de façon à limiter (mais était-ce
Cameroun, ni d'ailleurs des de 40 %. suffisant ?) l'écrémage à la
autres pays du bassin du marge extensive.
L'assiette en valeur de la
Congo. La seule utilisation
redevance et la taxe ad valorem Le fonds spécial d'équipement
active de la fiscalité forestière
était administrée par la intercommunal (FEICOM),
par l'Etat camerounais a
commission des mercuriales destiné comme son nom le
consisté à taxer les grumes
douanières (créée en 1973). Les suggère à équiper les
exportées en l'état pour
valeurs mercuriales étaient communes « forestières » en
favoriser le développement de
données par deux tables infrastructures de première
l'industrie de transformation,
politique qui a pour
conséquence « secondaire » de
procurer des recettes fiscales à
l'Etat. De plus, il a
provisoirement renoncé à une
partie de ces recettes en 1999,
car les grumes ont été
partiellement interdites à
l'exportation.

LE BILAN DES TROIS


PREMIÈRES ANNÉES
DE LA RÉFORME
Le bilan se limite
volontairement aux trois
premières années de la réforme
(de 1995-1996 à 1997-1998).
En effet, l'année fiscale 1998-
Photo 5. Usine de transformation au Cameroun. L’industrialisation
est depuis l’indépendance un objectif de la politique forestière
camerounaise.

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


nécessité, percevait 50 % du ce taux est surtout devenu un pour l'ayous exploité dans la
produit de la redevance de prix plancher pour une zone III, et entre 8 et 15 000
superficie, la Direction des attribution aux enchères. FCFA par m3 en fonction du
forêts 12 % du produit de cette degré de non-respect du taux
Les taux de la redevance et de
même redevance, l’Office obligatoire de transformation
la taxe ad valorem ont été
National des forêts (ONADEF) pour la seconde.
revus à la baisse : 2,5 % pour la
les 38 % restants mais aussi
première, 1 7,5 % pour la Le FEICOM a été supprimé.
80 % de la redevance
seconde. Mais leur assiette a Mais 40 % du montant de la
d'abattage et 20 % de la taxe à
été revue à la hausse. Une seule redevance de superficie sont
l'exportation. Quant au Trésor
table des valeurs mercuriales, directement versés par
public camerounais, il
administrée par une l'exploitant forestier aux maires
percevait 20 % de la redevance
commission spéciale et révisée des communes riveraines et 10
d'abattage et 80 % de la taxe à
semestriellement, donne la % aux communautés locales
l'exportation, laquelle
valeur Fob de l'essence (pour la (celles-ci perçoivent de surcroît
représentait, de loin, la source
meilleure qualité, loyale et une redevance informelle de
la plus importante de recettes
marchande – LM) à partir d'en- 1000 FCFA/m3 quand le
fiscales. En effet, en 1994, la
quêtes réalisées auprès des permis est une vente de coupe).
redevance de superficie
consommateurs par trois Les modalités d'emplois de ces
représentait 1 50 FCFA/m3 organismes différents. Bilan les recettes fiscales, notamment
pour une grume récoltée dans montants de la redevance par les communautés locales,
une licence d'une superficie de d'abattage et de la taxe à ont théoriquement été définies
75 000 ha avec un rendement l'exportation ont augmenté par un arrêté à la fin de la
de 5 m3/ha ; la redevance pour la plupart des essences. troisième année de la réforme
d'abattage, 450 FCFA/m3 pour Respectivement de 450 à 2000 fiscale.
un ayous récolté dans la zone FCFA/m3 et de 13 à 14000
III (les deux tiers de la récolte L'ONADEF, lui, n'a pas été
FCFA/m3, pour l'ayous supprimé, seulement les
provenaient de la zone III et exploité dans la zone III. Il affectations dont il bénéficiait.
l'ayous représentait un tiers de existe toutefois des exceptions : Un fonds spécial de
la récolte totale) ; la taxe à la taxe à l'exportation pour le développement forestier a été
l'exportation, 13000 FCFA/m3 sapelli, deuxième essence la créé. Il est alimenté par 40 %
toujours pour un ayous récolté plus exploitée après l'ayous, est du produit de la surtaxe
dans la zone III. Par passée, sans raison connue, de progressive à l'exportation, taxe
conséquent, l'essentiel des
27500 à 21000 FCFA/m3. au faible rendement en raison
recettes fiscales (78 %) des difficultés rencontrées par
alimentait le Trésor public Deux nouvelles taxes ont été l'administration pour calculer
camerounais, à condition créées: son assiette (cette affectation a
évidemment que ces recettes
• une taxe ad valorem sur été supprimée par la loi de
aient été réellement perçues, les finances 1998-1999).
les grumes consommées par les
douanes camerounaises n'ayant
usines de transformation (50 % Le contrôle de l'assiette des
alors pas très bonne réputation.
de la récolte environ au cours deux redevances, effectué
La réforme a modifié le taux, des trois ans de la réforme) ; auparavant par un service du
l'assiette et l'affectation des
• une surtaxe progressive à Ministère de l'environnement et
redevances et de la taxe des forêts, a été confié à la
l'exportation, fixe et payable en
existantes, a introduit deux direction des impôts qui, avant
cas de non-respect du taux
nouvelles taxes et a renforcé le la réforme, était seulement en
obligatoire de transformation
contrôle des assiettes et le charge de leur recouvrement.
fixé à 70 % par le code
recouvrement des redevances et Le contrôle de l'assiette de la
forestier de 1994 (elle
des taxes. taxe à l'exportation (seulement
concernait donc 20 % de la
Le taux de la redevance de récolte au cours de la période pour les grumes exportées en
superficie a été passé de 100 à étudiée). l'état) a été confié à une
1500 FCFA par hectare et par entreprise privée de nationalité
Leurs taux ont été fixés suisse, la Société Générale de
an pour les permis attribués
respectivement à 3,5 % de la Surveillance (SGS), dans le
dans le domaine forestier
valeur mercuriale (au lieu des cadre d'un programme dit de
permanent et devant faire
17,5 % pour les grumes « sécurisation des recettes
l’objet d'un aménagement
exportées en l'état) pour la douanières », une des mesures
durable : les concessions
première, soit environ (car le de l'ajustement structurel. Cette
forestières encore appelées
rendement en matière est dernière avait, par ailleurs,
Unités Forestières
conventionnel) 2 500 FCFA/m3 proposé au gouvernement de
d'Aménagement (UFA). Mais

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


sécuriser le contrôle des l'influence de l'augmentation de contrôle de l'assiette des
assiettes et le recouvrement de du taux de la redevance de quatre autres taxes et
la redevance d'abattage et de la superficie mais aussi grâce à la redevances, celui de la
taxe à l'exportation sur les suppression du FFICOM et, commission en charge d'établir
grumes consommées par les pour les communautés locales, les valeurs mercuriales, ceux
usines. Mais cette proposition a à l'introduction d'une redevance liés au recouvrement des
été refusée, le gouvernement « informelle » (sans qu'elle redevances et des taxes et celui
préférant bâtir son propre fasse l'objet d'un décret) sur les des innombrables réunions qui
« programme de sécurisation volumes exploités dans les ont eu lieu, au cours de ces
des recettes forestières » ventes de coupe. Plus d'un trois années, entre les
(PSRF). Enfin, le nombre et la milliard de FCFA par an ont différentes administrations
fréquence des contrôles fiscaux été versés aux communautés camerounaises, les entreprises
par la direction des impôts ont locales, par l'intermédiaire de et, parfois, la Banque
été augmentés. cette redevance informelle, au mondiale. La seule indication
cours des trois premières supplémentaire est le prix
Quatre conséquences
années de la réforme. proposé par la SGS pour
« mesurables » de la réforme
sécuriser le contrôle de
ont été constatées au cours des • La part des recettes
l'assiette et le recouvrement de
trois premières années. fiscales prélevée en amont du
la redevance d'abattage et de la
processus productif a
Les deux premières sont une taxe à l'exportation sur les
augmenté. C'est le résultat de
estimation grossière, faute grumes consommées par les
l'augmentation du montant des
d'appareil statistique fiable. usines : 1500 FCFA/m3.
deux redevances et de la
Quant aux deux autres, elles Signalons, enfin, à titre
relative stabilité de celui de la
sont le résultat d'une simulation d'information, qu'en 1998, le
taxe à l'exportation. Cette part
à partir d'une entreprise budget annuel (fonctionnement
était, pour l'entreprise-type et si
« type », dont les et investissement) du Ministère
la grume était exportée en
caractéristiques (Carret, 1998) de l'environnement et des forêts
l'état, d'un quinzième des
sont trop nombreuses pour être (hors projets financés par les
recettes fiscales totales avant la
données dans le cadre de cet bailleurs de fonds), rapporté au
réforme et d'un quart après
article. Tous ces résultats sont volume récolté, était d'environ
trois ans de réforme.
donc simplement des ordres de 1200 FCFA/m3 (4 milliards de
grandeur. Les voici, • L'écart de pression fiscale FCFA/3,3 millions de m3).
néanmoins : entre les grumes exportées en
Malgré leur caractère
l'état et celles consommées par
• Rapportées au volume de fragmentaire, ces quelques
les usines de transformation a
bois récolté, les recettes indications invitent à rester
été réduit, sous la double
fiscales (fiscalité forestière prudent sur l'ampleur du
influence de la remontée en
uniquement) réellement bénéfice fiscal net de la
amont et de l'introduction d'une
perçues par l'Etat ont augmenté réforme. Finalement, toute la
taxe à l'exportation sur les
et sont passées (en FCFA question est de savoir Si le coût
grumes consommées par les
d'après la dévaluation) d'une administratif croît plus ou
usines. Cet écart, de 1 à 15
moyenne de 6 000 FCFA par moins vite que les recettes
avant la réforme fiscale, n'était
m3 (années fiscales de 1990- fiscales. Une partie de la
plus que de 1 à 2 après trois ans
1991 à 1994-1995) à 10 réponse se trouve
de réforme.
OOOFCFA par m3 en 1996- vraisemblablement du côté de
1997, puis à 13 000 FCFA en S'agissant de la première la redevance annuelle de
1997-1998. Les recettes conséquence, nous avons superficie et de l'utilisation
fiscales de l'Etat étaient, en montré dans la première partie d'un mécanisme d'enchères
effet, d'environ 10 milliards de qu'il fallait, en toute rigueur, pour fixer son taux. En effet, le
FCFA avant la dévaluation, comparer le bénéfice fiscal brut coût de contrôle de l'assiette de
puis de 30 milliards après deux à son coût administratif. Mais, cette redevance est
ans de réforme et enfin de 40 les données disponibles sont certainement moins élevé que
milliards après trois ans de ré- rares. Le seul coût identifiable celui des redevances ad
forme. Mais, dans le même est celui du contrôle, par une valorem. Autrement dit, il est
temps, la récolte est passée de entreprise privée, la SGS, de vraisemblable qu'il soit
2 à plus de 3 millions de m3. l'assiette de la taxe à nécessaire que la redevance
l'exportation pour les grumes annuelle de superficie prélève
• Les recettes fiscales une proportion importante de la
non transformées sur place. Il
perçues par les communes et
était d'environ 1000 FCFA/m3 rente forestière pour qu'il existe
les communautés locales ont un bénéfice fiscal net.
(en réalité 0,95 % de la valeur
augmenté, non seulement sous
mercuriale). Restent les coûts

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


Cela dit, comme nous l'avons
expliqué dans la partie
précédente, les effets
économiques de l'augmentation
du prélèvement dépendent de la
manière dont les recettes
fiscales sont utilisées. Or, il est
difficile de dire Si
l'augmentation des recettes
fiscales se traduit aussi par une
meilleure utilisation de celles-
ci, notamment parce que la
suppression de l'affectation
d'une partie de ces recettes au
FEICOM, à l'ONADEF et à la
direction des forêts ne constitue
pas une garantie suffisante de
changement dans la qualité de Photo6. Chutes de scierie. Réduire le gaspilage de matière première est un
l'utilisation des recettes gain environnemental.
fiscales. Le problème est le affiné, la réforme a aussi été taxe à l'exportation identique
même pour les conséquences singulièrement laborieuse et (même assiette, même taux) à
de la décentralisation de la conflictuelle. Passons rapide- celle frappant les exportations
perception d'une partie des ment sur le premier aspect, en de grumes. Lors d'une première
recettes fiscales. Il semble en notant simplement que les trois réunion chez le Ministre
effet qu'il n'y ait pas lieu de se premières années de la réforme délégué au budget (la première
réjouir trop vite, le versement ont produit d'innom-brables d'une longue série), quelques
soudain d'une manne de documents, tant administratifs jours après la parution du texte
plusieurs millions de FCFA à que stratégiques ou de loi dans le Journal officiel,
des villages de « brousse » épistolaires. Nous en avons les syndicats industriels
ayant apparemment et dans un recensés plus de 150 et la liste contestèrent l'opportunité d'une
premier temps plus donné lieu n'est pas exhaustive (Carret, telle mesure. En septembre,
à de joyeuses libations qu'à des 1998). Une telle lourdeur était une circulaire rectifia le tir. Pas
investissements productifs. peut-être inévitable. Plus suffisamment, au goût des
importants sont les conflits. syndicats. Au mois d'octobre,
Il existe, cependant, d'autres Toutes les innovations ces derniers décidèrent d'arrêter
bénéfices éventuels des trois introduites par la réforme ont la production dans les usines de
premières années de la réforme été plus ou moins transformation et de mettre
: ceux provenant du transfert en conflictuelles. Mais deux leurs salariés au chômage
amont de la fiscalité forestière mesures ont plus technique. Le gouvernement fit
et de la réduction de l'écart de particulièrement fait l'objet de immédiatement machine
pression fiscale entre les très vives controverses : arrière et publia une nouvelle
grumes consommées sur place circulaire rectificative. La
et celles exportées en l'état. A • la diminution de l'avantage
production reprit dans les
priori, ces deux mesures ont fiscal dont bénéficiaient les
usines. La troisième loi de
pour effet de réduire le usines de transformation ;
finances de la réforme (1997-
gaspillage de matière première
• l'attribution des conces- 1998), qui prévoyait également
en forêt et sur le parc à grume de supprimer l'avantage fiscal
sions aux enchères.
des usines de transformation des usines de transformation, a
(photo 6). Il y aurait, donc, un Le conflit occasionné par la
provoqué un conflit en tous
bénéfice « environnemental » première mesure a points identique au premier.
de la réforme. Mais il n'est pas certainement été le plus
mesurable. Et surtout, il ne spectaculaire Il a aussi été le La proposition de la Banque
correspond pas à l'objectif tout premier de la réforme. La mondiale a provoqué un conflit
environnemental appelé loi de Finances 1995-1996 parce qu'elle contrariait le
« aménagement durable ». prévoyait, en effet, à l'initiative dispositif d'incitations
de la Banque mondiale, de économiques et d'obligations
LES CONFLITS supprimer complètement réglementaires de la politique
l'avantage fiscal dont d'industrialisation du
En plus d'un bilan que l'on peut bénéficiaient les usines de gouvernement camerounais La
qualifier de « discutable », au transformation, en leur protection tarifaire des usines
sens où il mériterait d'être imposant le paiement d'une de transformation est, en effet,

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


un des éléments de la politique • la promotion des 1997, la première mise aux
d'industrialisation poursuivie entrepreneurs nationaux ; enchères (42 concessions pour
par le gouvernement came- 2,5 millions d'hectares) s'est
• l'aménagement durable.
rounais depuis l'indépendance. soldée par un échec.
Elle est destinée à renforcer Le premier objectif pouvant, de Initialement fixé à 300
l'obligation réglementaire à surcroît et éventuellement avec FCFA/ha/an, le prix plancher a
transformer une partie de la raison, être qualifié de été relevé, au dernier moment
récolte sur place. Le code redistribution clientéliste de la et à la demande de la Banque
forestier de 1994 a fait passer rente forestière. mondiale, à 2000 FCFA/ha/an.
ce taux de 60 à 70 % en L'appel d'offre a alors été
indiquant, par ailleurs, que les L'introduction d'un système annulé pour vice de forme.
exportations de grumes seraient d'enchères a commencé à être Quelques mois après, un
discutée au moment de
totalement interdites à partir de deuxième appel d'offre était
1999 et en introduisant une l'élaboration du code forestier. lancé. Vingt-six concessions
surtaxe à l'exportation, en cas Les députés ont obtenu, contre furent proposées au prix
de non respect du taux l'avis de la Banque mondiale, plancher de 1500 FCFA/ha/an.
qu'une partie des concessions
obligatoire de transformation Le choix final des attributaires,
forestières fasse l'objet d'un
pendant la période transitoire. annoncé à la fin de l'année
appel d'offres restreint aux
Ce dispositif a encore été 1997, a été vivement discuté,
seuls entrepreneurs nationaux
renforcé par le code des notamment parce que
et, d'autre part, que les
investissements, révisé en l'utilisation de critères mixtes
1990, qui accordait aux candidats ne soient pas (financier et techniques)
investisseurs dans la seulement sélectionnés selon engendre inévitablement des
transformation du bois au un critère financier mais aussi conflits d'arbitrage mais aussi
selon des critères techniques,
Cameroun la possibilité de parce qu'il y aurait eu certaines
bénéficier d'un statut de point évalués par une seconde irrégularités.
franc industriel, lequel exonère commission.
Une fois les concessions
l'entreprise d'impôt sur les En 1996, et alors qu'aucune
attribuées, les syndicats
bénéfices pendant Sans et concession n'avait encore été
industriels ont demandé :
diminue les droits de douanes mise aux enchères, deux
sur le matériel importé (photo concessions forestières ont été • d'une part, que l'assiette de
7). attribuées par décret la redevance de superficie soit
présidentiel, à la plus grande calculée à partir d'une surface
La nature du conflit
stupéfaction de la Banque dite « utile » (réellement
engendré par la deuxième
mondiale et des ONG comme le exploitable), soit environ 70 %
mesure est un peu plus
WRI (World Resources de la superficie d'une
difficile à saisir car il a
Institute) et le WWF (World concession ;
contrarié non pas un mais deux
Wild Fund), aux présidents des
objectifs de la politique • et d'autre part, que
deux principaux syndicats
forestière camerounaise l'attributaire paie seulement le
industriels. Un an plus tard, en
prix plancher pendant les trois
premières années au cours
desquelles il doit réaliser le
plan d'aménagement durable.
La réalisation de ce dernier
nécessite en effet un
investissement important, de
l'ordre de 3 000 FCFA/ha.
De plus, l'exploitant est tenu
par le plan d'aménagement
durable de n'exploiter chaque
année qu'une seule assiette de
coupe alors que la tendance,
ces dernières années, était
d'attribuer plusieurs assiettes de
coupe par permis. La redevance
de superficie acquiert ainsi,
rapportée au m3 et dans
l'hypothèse ou l'exploitant
Photo 7. Palissade entourant un point franc industriel. Ce statut juridique
n'intensifie pas son
étant destiné à favoriser l’industrialisation.

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


prélèvement, un poids plus question mériterait d'être consistance d'une politique de
important. Si dans le même étudiée avec soin. promotion des entrepreneurs
temps, le taux de la redevance nationaux, en nous gardant de
Le deuxième objectif, en
de superficie est relevé, ce qui tout jugement hâtif et
revanche, n'a pas été atteint.
s'est produit au Cameroun, cela péremptoire. Restent celles qui
C'était prévisible. En effet, la
renchérit encore le coût de la consistent à « protéger » le
fiscalité forestière n'est pas une
matière première et, par développement d'une industrie
écotaxe efficace pour atteindre
extension, le coût d'application manufacturière de
l'objectif environnemental
par les entreprises de la norme transformation et à privilégier
appelé « aménagement
environnementale appelée une norme plutôt qu'une taxe
durable », même réduit à la
« plan d'aménagement pour atteindre l'objectif
seule adoption de méthodes
durable ». Autrement dit, cela environnemental appelé
d'exploitation forestière à faible
n'incite certainement pas les « aménagement durable ».
impact sur le milieu naturel. Ce
entreprises d'exploitation Quelle est la consistance
qui ne veut pas dire que la
forestière à modifier leur économique de ces deux
réforme n'a pas eu, par ailleurs,
comportement, surtout si, par politiques ?
des conséquences
ailleurs, l'exploitation des
environnementales positives
forêts du domaine rural n'est
puisqu'elle a éventuellement
pas soumise à de telles
réduit le gaspillage de matière
contraintes.
première en forêt et dans les
CONCLUSIONS usines de transformation.
La consistance économique de
la politique fiscale
Les deux débats présentés, recommandée par la Banque
évaluons maintenant, comme mondiale au Cameroun est
nous l'annoncions en donc, pour le moins,
introduction, la consistance discutable. De plus, elle a
économique des propositions contrarié la politique forestière
politiques, notamment celles de de l'Etat camerounais :
la Banque mondiale puisque
c'est elle qui a suscité cette • premièrement, en
réforme. diminuant les possibilités de
promotion des entrepreneurs
En demandant au Cameroun de Photo 8. Appliquer la norme envi-
nationaux ou (et c'est là tout le
réformer sa fiscalité forestière, ronnementale a un coût
problème) de redistribution
la Banque mondiale économique.
clientéliste de la rente
poursuivait deux objectifs : forestière ; • La première est une
• augmenter les recettes • deuxièmement, en
alternative possible à
fiscales de l'Etat ; l'augmentation des recettes
diminuant l'avantage fiscal fiscales en matière de
• favoriser l'aménagement dont bénéficiaient les usines de développement économique
durable. transformation ; puisqu'elle « sédentarise » le
Le premier objectif a été • troisièmement, en réinvestissement de la rente
atteint ; les recettes fiscales ont augmentant le poids de la forestière sur le territoire
augmenté. Mais le gain fiscal redevance annuelle de camerounais. Les observations
brut doit être en toute rigueur superficie et, donc, le coût effectuées en Indonésie et en
comparé à son coût d'application de la norme Malaisie invitent, cependant, à
administratif, lequel n'est pas environnementale appelée rester prudent sur l'efficacité
connu avec précision. Cette « plan d'aménagement d'une telle politique. C'est
question mériterait donc d'être durable » (photo 8). certainement pour cela que la
approfondie. De plus, en Banque mondiale a proposé de
D'où le caractère conflictuel supprimer la protection tarifaire
admettant qu'il existe tout de des trois premières années de la
même un bénéfice net, les dont bénéficient les usines
réforme fiscale. camerounaises. Mais est-il bien
conséquences d'une telle
politique pour le Quant à la question de la sûr que la situation
développement économique du consistance « économique » de camerounaise à la fin des
pays ne sont pas évidentes tout la politique forestière du années 90 soit réellement
dépend de l'utilisation qui est gouvernement, elle appelle les comparable avec celles des
faite des recettes fiscales. remarques suivantes. Laissons deux pays d'Asie du Sud-Est à
Comme la première, cette de côté la question de la la fin des années 70 ? Ne faut-il

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)


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Managing tropical forest: Reply. Land
nomics 69 (3) : 319-321.
pas plutôt juger sur pièces plusieurs objectifs, tous aussi
(photo 9) ? Telle est, en tout importants, de son point de LIPIETZ A., 1999.
Economie politique des écotaxes.
cas, notre position. En effet, vue, les uns que les autres. Il Fiscalité de l'environnement. Conseil
une enquête exhaustive dans convient donc de définir plus d'analyse éca nomique, Paris, La
les usines de transformation du précisément la norme documentation Française, 9-39.
bois camerounaises a environnementale adoptée par MINEF-OIBT-ONADEF, 1998.
notamment mis en évidence le Cameroun, de mesurer l'écart Directives nationales pour
que les usines, notamment les entre les pratiques actuelles et l'aménagement durable des forêts
naturelles du Cameroun. Yaoundé,
scieries, transformaient des celles qui résulteront de Cameroun, Ministère de
grumes d'une qualité inférieure l'application de la norme et, l'Environnement et des Forêts, 43 p. +
à celles des grumes exportées enfin, de chiffrer le coût annexes.
et ne pouvaient, par économique de la « mise à la PAGE J. M., PEARSON S. R.,
conséquent, obtenir le même norme », lequel dépend LELAND H. L., 1976.
rendement en matière que les évidemment de l'ampleur de cet Capturing economic rent from
ghanaian timber. Food Research
usines étrangères. écart, puis de les comparer aux Institute, 15 (1) : 25-51.
bénéfices ainsi obtenus.
• La seconde politique REPETTO R., 1990.
Deforestation in the Tropics. Scientific
semble a priori plus Références American 262 (4) : 18-24.
consistante puisque la fiscalité
forestière n'est pas un bibliographiques REPETTO R., GILLIS M., 1988.
instrument économique Public policies and the misuse of
forests sources. Cambridge,
efficace pour inciter BAIROCH P., 1992. Cambridge University Press, World
l'exploitant forestier à adopter Le tiers-monde dans l'impasse. Paris, Resources Institute, 432 p.
les méthodes à faible impact France, Gallimard, 3e édition, 660 p.
RUZICKA I., 1979
sur le milieu. Mais peut-on BANQUE MONDIALE, 1997. Rent appropriation in Indonesian
réduire le passage à The greening of economic policy logging East Kalimantan, 1972/73-
l'aménagement durable à reform. Washington, Etats-Unis, 1976/77. Bulletin of Indonesian
Banque mondiale. Economics Studies, 15 (2) : 45-74.
l'adoption de telles méthodes ?
De plus, l'application d'une CARRET J. C, 1998. VINCENTJ. R., 1990.
La réforme de la fiscalité forestière au Rent capture and the feasibility of
norme environnementale a un Cameroun. Contexte, bilan et tropical forest management. Land
coût. Il faut donc comparer le questions ouvertes. Etude réalisée par economics, 66 (2) : 213-223.
coût de l'application de la le Cerna ô la demande de l'IFIA, 159
p. VINCENTJ. R., 1992.
norme avec ses bénéfices, The tropical timber trade and
notamment ceux qui seront CARRETJ. C., GIRAUD P. N., 1998. sustainable development. Science,
perçus par le pays, puisqu'il ne Les débats sur la fiscalité de 256 : 1651.1655.
l'exploitation des forêts tropicales.
faut pas oublier que Paris, Cerna, 56 p. VINCENTJ. R., 1993
l'aménagement durable est un Managing tropical forests : comment.
FERRER V., O'HALLORAN E., 1996. Land economics69 (3) : 313-318.
objectif « environnemental » The evolution of Cameroon's new
qui a été « suggéré » au forestry legal, regulatory and tax,ation VINCENTJ. R., GILLIS M., 1998.
Cameroun. Ce pays, comme system. Draft paper. Washington, Deforestation and forest land use : a
nous l'avons dit, a une politique Etats-Unis, Banque mondiale, 10 p. comment. The World Bank Research
Observer, 13 (1) : 133-40.
forestière composée de GILLIS M., 1980.

BOIS ET FORETS DES TROPIQUES, 2000, N° 264 (2)

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