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Optimisation locale au dépend de l’optimisation Globale  Un exemple

L'erreur liée à l'optimisation locale est centrale dans le LEAN.

Où, pour le dire plus correctement, l'erreur consistant à


optimiser localement un processus sans prendre en considération la
dégradation de la performance globale qui en résulte est l'erreur
la plus fréquemment observée dans les organisations classiques
qu'elles soient industrielles ou de service.

Parmi cette catégorie "sous optimisation locale", la première, la


plus importante et la plus systématique est celle qui consiste à
produire dans les lots les plus importants possible. C'est la solution
instinctive de toute personne regardant une tache de son seul point de
vue.

Même si j'ai déjà mentionné cette sous optimisation, il me


parait intéressant d'y revenir pour illustrer comment le "système"
renforce la tendance naturelle du responsable de production à
commettre cette erreur.

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Imaginons une situation de production volontairement simplifiée.


- un site de production tourne 20 jours par mois sur 2 équipes de 8
heures.
- ce site produit 40 références différentes qui prennent
chacune 7 heures à produire + une heure de changement de version.
- en un mois, les 40 équipes de production permettent en moyenne de
produire les besoins d'un mois de consommation moyenne.
Etant donné que l'entreprise a besoin de protéger ses clients
contre des aléas et que les besoins ne sont pas parfaitement stables,
il est prévu d'avoir au minimum un mois de stock de sécurité de
chaque produit. En moyenne, c'est donc un stock moyen de 1,5 mois de
stock de produit finis qui est financé.

Quel est l'indicateur principal par lequel est évalué le manager


de la production?
Dans l'approche classique, il va être évalué par rapport aux
coûts standards. Concrètement, pour dépasser les objectifs, il
faut qu'il mette moins de 7 heures pour faire sa production mensuelle
moyenne. Le manager sait qu'il existe une façon simple d'améliorer
ses résultats. Il suffit d'augmenter la taille des lots de
production. Par exemple, s'il double la taille des lots de production,
au lieu de passer sur 8 heures, 1 heures à changer de version pour 7
heures de production (12.5% du temps total), il pourrait passer sur 15
heures, 14 heures à produire et une seule heure de changement de
version (6.66% du temps total).
En mettant ce plan en pratique, il va pouvoir améliorer ses
indicateurs et produire pendant 20 heures de plus par mois.
Indépendamment des besoins réels qui n'ont pas augmentés, cela
va lui permettre de mieux couvrir ses coûts fixes.
Cette surcapacité et cette surproduction seront d'autant plus les
bienvenus, qu'en produisant chaque référence une fois tous les
deux mois le besoins de stock de produits finis nécessaires sont
largement augmentés.
Ils sont plus que doublés, car, avec deux mois de "tunnel" entre deux
lots de production d'une référence, les besoins ont beaucoup de
temps pour changer. On va tout naturellement devoir porter le stock à
3 mois de besoin moyen.

Ce stock additionnel a bien entendu un coût. Ou plutôt plusieurs


coûts additionnels (qui sont d'ailleurs imparfaitement
représentés par le système comptable):
- coûts de transports augmentés (entre la production et le magasin
existant, ou même vers un magasin supplémentaire, puis pour les
activités de préparation des livraisons);
- surfaces de stockage supplémentaires;
- coût de financement (il aura fallu acheter des matières
premières ou composants sans avoir de revenu supplémentaires
puisque les volumes de vente n'ont pas augmenté);
- risques d'obsolescence (qui sont des risques sournois, parce qu'il
arrivent par a coup, parce que l'on pense toujours que l'on saura
ralentir la production avant que les ventes ne s'arrêtent);
- encore plus difficile à valoriser, le délai plus important entre
la création de défauts et leur découverte. Quand cela se
produira, on aura des coûts supplémentaires vis-à-vis du client
(remplacement ou réparation, livraison en urgence de produits bons,
reprise du stock...) Par ailleurs, ce délai entre la création du
défaut et sa détection rendra plus difficile sa résolution.

Mais sur qui vont retomber ces surcoûts?


- La question du financement du stock des surfaces et des transports
reviendra dans les mains du responsable logistique;
- la problématique de l'obsolescence reviendra au Marketing et
Ventes;
- Les problèmes de qualité livrée seront pour le responsable
qualité.

Ainsi donc le responsable du département Production aura pu


améliorer ses indicateurs au dépend des autres managers de
l'entreprise. Et le système de comptabilité lui donnera raison.

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Tout cela vous semble ridiculement caricatural?

Et bien c'est pourtant la réalité de ce que l'on peut couramment


observer dans la plupart des industries.

En ce qui me concerne personnellement, les visites que je peux faire


décèlent toujours tout ou partie des ingrédients suivants:
- surfaces consacrées au stockage de produits finis considérables;
- surfaces de production réellement affectées à la création
de valeur ajoutée négligeables par rapports au surfaces totales
(principalement occupées par des en cours).
- encadrement de production principalement occupé à gérer ce
que l'on va fabriquer aujourd'hui, ce qui manque pour le fabriquer,
où va-t-on pouvoir le mettre, sur quelle machine va-t-on le faire...
- invocations de mauvaises raisons pour ne pas augmenter le nombre de
changements de versions (on ne maîtrise pas la qualité de ce que
l'on produit juste après le changement de version, les "gens" ne vont
pas comprendre pourquoi on leur fait changer plus souvent, on n'arrivera
jamais à faire les changements plus vite qu'aujourd'hui... puisqu'on
a toujours fait comme cela...)

C'est en voyant de façon nette ces océans de gaspillage que le


praticien LEAN trouve l'énergie et la motivation pour aider
l'entreprise à entamer son voyage vers le LEAN.

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