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Comportement des métaux à grande

vitesse de déformation : modélisation

par Gérard GARY


Directeur de Recherche au Laboratoire de mécanique des solides
du Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

1. Caractérisation ......................................................................................... M 3 036 – 2


1.1 Problématique des essais dynamiques ..................................................... — 2
1.2 Essai à la barre de Hopkinson .................................................................... — 4
1.2.1 Description de la technique ............................................................... — 4
1.2.2 Limitations du système conventionnel ............................................. — 5
1.2.3 Commentaires..................................................................................... — 6
2. Modélisation.............................................................................................. — 6
2.1 Généralités ................................................................................................... — 6
2.2 Modèles courants ........................................................................................ — 7
2.2.1 Tendances des réponses expérimentales......................................... — 7
2.2.2 Plasticité dynamique .......................................................................... — 8
2.2.3 Viscoplasticité ..................................................................................... — 8
2.3 Intégration dans les codes .......................................................................... — 8
2.4 Identification des paramètres ..................................................................... — 8
3. Conclusion ................................................................................................. — 9
Références bibliographiques ......................................................................... — 9

a modélisation du comportement des matériaux à grande vitesse de défor-


L mation est un domaine scientifique qui a pris son essor dans la seconde moi-
tié du XX e siècle. Il est lié à des développements industriels particuliers. Les
premiers travaux ont été motivés par des problèmes militaires concernant la
perforation des blindages métalliques. Dans ce cas, le domaine des vitesses de
déformation est très élevé et le chargement est proche d'un état de pression pure
correspondant à un état de contrainte sphérique. La caractérisation du matériau
est alors réalisée au moyen d'essais de choc plaque sur plaque à très grande
vitesse (plusieurs centaines de mètres par seconde).
De tels chargements et les modèles associés ne seront pas considérés ici. On
s'intéressera en revanche à des chargements au cours desquels les phénomènes
de plasticité sont mis en jeu et pour lesquels la partie déviatorique du tenseur
des contraintes conditionne l'essentiel de la réponse des matériaux sollicités.
Les situations industrielles correspondantes sont rencontrées notamment
dans les études de crash automobile, domaine dans lequel la gamme des vites-
ses de déformation est située en deçà de 1000 s –1. Dans ce domaine, la plupart
des métaux présentent des phénomènes de durcissement dynamique dont ren-
dent qualitativement compte certaines classes de modèles de comportement.
Ces phénomènes doivent être également pris en compte dans l'analyse des pro-
cédés de mise en forme des métaux, notamment par usinage où la gamme des
vitesses de déformation peut dépasser 10 4 s –1.
Les calculs numériques réalisés dans le domaine du crash automobile le sont
le plus souvent au moyen de codes industriels dits explicites, car au moins

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l'algorithme d'intégration en temps y est explicite (les éditeurs les plus connus
en France sont ESI, Mecalog et Dynalis dont les codes ont respectivement pour
nom commercial PAM-CRASH, RADIOSS et DYNA). Les premiers calculs ont été
réalisés avec des modèles de plasticité ne prenant pas en compte les effets de
vitesse. La prise en compte de ces derniers s'est avérée nécessaire avec le
besoin de réaliser des calculs prédictifs. Pour des raisons historiques, des modè-
les empiriques ont été développés, dits de plasticité dynamique, dans lesquels la
vitesse de déformation intervient comme paramètre supplémentaire.
L'élaboration de modèles de comportement pertinents et leur adéquation avec
les codes explicites utilisés en dynamique restent des problèmes ouverts.
Cette élaboration nécessite naturellement une phase expérimentale de carac-
térisation où des vitesses de déformation significatives doivent être mises en
jeu. On doit alors avoir recours à des moyens d'essais particuliers dont le plus
classique est le système dit des barres de Hopkinson.
La phase de modélisation n'est pas strictement consécutive à la phase de
caractérisation ni strictement antérieure à la phase de calcul. Les hypothèses
classiquement utilisées pour les essais statiques, d'homogénéité des champs de
contrainte et de déformation dans l'éprouvette, ne sont en effet pas toujours
valides en dynamique, à cause de la présence non négligeable d'effets transi-
toires dans l'échantillon. Pour les métaux, auxquels nous nous intéressons ici,
ces hypothèses sont acceptables. En revanche, on ne sait pas réaliser d'essais à
vitesse de déformation constante, paramètre dont on recherche l'influence.
L'analyse de l'essai n'est donc pas triviale et peut nécessiter la modélisation de
l'essai avec un outil de calcul numérique. On considère néanmoins le plus sou-
vent la vitesse de déformation comme constante au cours d'un essai en se
basant sur le fait que la mise en vitesse a lieu dans la phase élastique et que la
variation de vitesse dans la phase plastique a une très faible influence sur la
réponse du matériau. L'ordre de grandeur de l'effet de la vitesse de déformation
est en effet globalement comparable au logarithme de cette dernière.

1. Caractérisation (M )
Masse Accéléromètre
tombante
1.1 Problématique des essais dynamiques

Les essais de comportement dynamique sont le plus souvent com-


pris comme l'extension des essais quasi statiques à des situations de
chargement rapide. Les hypothèses d'homogénéité des champs
mécaniques dans le banc d'essai comme dans l'éprouvette parais-
sant aller de soi, il est tentant de négliger les effets transitoires dus à Nid-d'abeilles F = F0
la propagation d'ondes dans l'échantillon. Cependant, cette vision
conduit à des résultats erronés dès que le temps caractéristique (la
durée significative) de l'essai n'est plus assez grand devant le temps
de propagation des ondes élastiques dans la machine d'essai.
Pour illustrer ce propos, considérons la représentation idéalisée
et simplifiée d'un essai assez couramment utilisé, l'essai au « puits δ Mesure optique
de chute ». On s'intéresse à l'exemple d'un essai de compression de
nid-d'abeilles d'aluminium pour lequel on peut admettre, en pre-

mière approximation, que la réponse est à effort F0 constant
(figure 1).
Dans cette simulation, on mesure la force de deux manières :
— on considère d'abord un ressort qui supporte l'échantillon et
dont on mesure le raccourcissement δ  ;
— on déduit également la force de la décélération de la masse tom-
bante mesurée au moyen d'un accéléromètre placé en son milieu. Figure 1 – Schéma unidimensionnel d'un essai au puits de chute

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Pour des raisons de simplicité, nous modélisons cet essai comme


unidimensionnel (figure 1). On se place donc dans le cadre de la
propagation des ondes élastiques unidimensionnelles dans lequel force déduite de la mesure d'accélération
on peut écrire des relations de proportionnalité entre les sauts de
contrainte ∆ σ , de vitesse particulaire ∆V et de déformation à tra-

Force
vers le front d'onde ∆ ε [2][3] :
∆ σ = – ρ C∆V , ∆V = – C∆ ε (1)
avec C célérité des ondes élastiques (5 000 m/s pour les aciers),
ρ masse volumique.
La contrainte et la vitesse particulaire à tout instant et pour toutes
les sections de la masse tombante et du ressort peuvent alors être duite du raccourcissement
force déduite
calculées en régime transitoire (c'est-à-dire sans faire de moyennes du ressort Force
temporelles). La figure 2 décrit l'évolution des vitesses aux points réelle F0
de mesure. De ces deux vitesses, on peut déduire la variation de lon-
gueur du ressort (par intégration) et l'accélération vue par l'accélé-
romètre (par dérivation, et on doit supposer ce dernier de
dimension finie pour éviter les accélérations infinies). On obtient les Temps (ordre de grandeur : ms)
deux mesures de force représentées sur la figure 3.
On constate que les deux méthodes donnent des résultats différents Figure 3 – Forces mesurées
avec, dans les deux cas, une forte surestimation (pouvant dépasser
100 % d'erreur) de l'effort maximal. Toutefois, on peut calculer que les
efforts périodiques mesurés ont une moyenne égale à la valeur impo-
sée. Lorsque le temps caractéristique de l'essai est très grand par rap-
Cet exemple est volontairement caricatural et excessif. Il indique
port à la période de chaque système, il peut donc être légitime de
néanmoins que, dans une situation réelle, il faut comparer les temps
négliger la variation périodique et ne considérer que la moyenne. Si
caractéristiques de l'essai avec la bande passante des capteurs et de
ces mesures sont associées à une mesure de déplacement fiable, l'éva-
la chaîne d'acquisition (pour une masse tombante cubique en acier
luation de l'énergie absorbée par l'échantillon n'est pas trop mauvaise.
d'un demi-mètre de côté, le temps d'un créneau de la figure 2 est
d'environ 200 µs). Si la fréquence d'acquisition n'est pas bien supé-
rieure à la fréquence des signaux transitoires (ici 5 kHz), le résultat
observé peut être complètement modifié par le filtre que constitue
la chaîne de mesure et même les valeurs moyennes peuvent être
erronées.
Vitesse (ordre de grandeur : m/s)

Vitesse de chute initiale


Le problème de la mesure étant supposé réglé, ce qui ne va pas
de soi comme nous venons de le voir, les essais dynamiques diffè-
Vitesse de l'accéléromètre
rent encore des essais quasi statiques par l'introduction de phéno-
mènes de couplage indissociables de la vitesse. Ainsi, on admet
généralement que l'essai dynamique est adiabatique (pas
d'échange thermique avec l'extérieur) car la chaleur produite lors de
la déformation n'a pas le temps d'être diffusée pendant la très brève
Vitesse de l'extrémité du ressort
durée de l'essai. L'éprouvette est donc soumise à une augmentation
de température au cours de l'essai. Dans le cas d'essais de compres-
sion, l'expansion radiale de l'échantillon induite par l'effet Poisson,
dû à la quasi-incompressibilité plastique du matériau, est contrariée
0 par des effets inertiels conduisant à un confinement. L'incidence de
Temps
cet effet est toutefois faible pour les métaux sans être complètement
Instant du choc négligeable.

Temps (ordre de grandeur : ms) Rappelons que nous nous intéressons ici au domaine correspon-
dant aux colonnes sur fond bleu dans le tableau 1.

Figure 2 – Vitesse aux points de mesure (0)

Tableau 1 – Phénomènes à prendre en compte selon la vitesse de déformation

Vitesse de déformation 10 – 4 à 1 s –1 1 à 50 s –1 50 à 5 000 s –1 > 5 000 s –1


(pour mémoire) (pour mémoire)

Sécurité dans Sécurité dans


Domaines d'application Phénomènes quasi les transports. les transports Protection des satellites et
statiques Protections contre applications militaires [1]
Protections antisismique
les explosions
Thermique Isotherme Adiabatique Adiabatique Adiabatique

Effet Transitoire Négligeable Existant Important Très important

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1.2 Essai à la barre de Hopkinson


Pour une gamme de vitesses de déformation allant de 50 à
5 000 s –1 qui correspond à la gamme de vitesse de la plupart des

Déformation (unités arbitraires)


applications industrielles civiles, l'effet transitoire ne peut pas être 1
négligé. Pour améliorer la qualité de la mesure, lorsqu'on ne peut
utiliser des capteurs directement liés aux grandeurs à mesurer Onde
(méthodes optiques rapides par exemple), la solution consiste à réfléchie
tenir compte explicitement des phénomènes de propagation 0
d'onde, démarche qui conduit naturellement à l'utilisation d'un sys-
tème de barres. En effet, l'analyse transitoire de structures tridimen- Onde
sionnelles est trop complexe pour être efficacement prise en transmise
compte alors que l'utilisation de barres unidimensionnelles la rend
possible, comme nous allons le rappeler. –1
Onde
incidente
1.2.1 Description de la technique
0 500 1 000 Temps ( µs)
Pour réaliser un essai de compression dynamique avec des barres
dites de Hopkinson [4] (appelées système SHPB pour Split Hopkin-
son Pressure Bar, ou barres de Kolsky [5][6] du nom de celui qui a le
Figure 5 – Ondes de base. Essai de compression d'un échantillon
premier utilisé le système dans sa configuration actuelle), on place
d'aluminium
un petit échantillon entre deux longues barres identiques et de
limite élastique élevée par rapport à celle du matériau testé. Des jau-
ges de déformation sont collées sur les deux barres. Avec un projec- Les forces aux faces entrante et sortante s'écrivent respecti-
tile, on induit une onde élastique longitudinale de compression vement :
dans la barre entrante. Une partie de cette onde se réfléchit à l'inter- Fe ( t ) = Sb E ( εi ( t ) + εr ( t ) )
face barre-échantillon, une autre partie se transmet à l'échantillon (3)
puis induit une onde dans la barre sortante (figure 4). Fs ( t ) = Sb E εt ( t )
Les ondes sont connues aux points A et B par l'intermédiaire de la avec E module d'Young des barres (2 × 1011 Pa pour l'acier)
mesure et de l'enregistrement des déformations longitudinales
Sb leur section.
associées. La nécessité de connaître en A l'onde incidente, induite
par le choc de l'impacteur, et l'onde réfléchie, dépendant de la Pour des essais traditionnels visant à caractériser le comporte-
réponse de l'échantillon, impose la position optimale du point de ment mécanique de matériaux métalliques, on vérifie la quasi-éga-
mesure au milieu de la barre. La nécessité, d'autre part, de considé- lité des forces entrante et sortante (voir la figure 6). On admet alors
rer la barre comme unidimensionnelle n'autorise pas de placer la généralement que les états de contrainte et de déformation dans
jauge de déformation trop près d'une extrémité. l'échantillon sont homogènes (ce qu'on peut vérifier par un calcul
transitoire élastoplastique) et on déduit simplement les grandeurs
L'enregistrement typique d'un essai de compression d'un échan-
mécaniques des mesures globales. Cette situation est propre aux
tillon métallique est représenté sur la figure 5.
métaux, et plus généralement aux matériaux compressibles de
Les ondes doivent être ensuite virtuellement transportées aux module élastique élevé. Elle est discutée au paragraphe 1.2.2.2. Pour
contacts entre les barres et l'échantillon. On peut alors calculer les d'autres matériaux, l'existence de l' « équilibre » ne garantit pas
efforts et les déplacements (en intégrant les vitesses, directement l'homogénéité des champs mécaniques.
accessibles) aux faces correspondantes.
Ces hypothèses donnent accès, en particulier, à l'évolution de la
Les vitesses particulaires aux faces entrante et sortante s'écrivent contrainte, de la déformation et de la vitesse de déformation au
respectivement : cours de l'essai. Pour ce même essai, ces grandeurs, en valeurs
nominales, sont représentées sur la figure 7.
Ve ( t ) = –C ( εi ( t ) – εr ( t ) )
(2)
Vs ( t ) = –C εt ( t )
avec C célérité des ondes de compression dans les barres (5 000 m/s
pour l'acier) , ε i , ε r et ε t , respectivement les ondes de déformation 10
« incidente », « réfléchie » et « transmise » enregistrées aux points A
(pour les deux premières) et B (pour la troisième) de la figure 4 et

Force F (kN)
représentées sur la figure 5.
Force sortante

5
Projectile Barre entrante Barre sortante Force entrante

–A –B
V
Jauge 1 Jauge 2
0
Échantillon
0 200 500
Temps ( µs)
Dimensions typiques : diamètre 20 mm, longueur de barres 3 m,
échantillon millimétrique
Figure 6 – Égalité des forces entrante et sortante pour un échantillon
Figure 4 – Montage de la barre de Hopkinson métallique

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chargement au travers de l'échantillon. Selon que ce temps est plus


ou moins négligeable devant la durée de l'essai, l'hypothèse est
plus ou moins valide. Elle est néanmoins généralement vérifiée
Vitesse de déformation (s–1)
Contrainte nominale (MPa)

pour les matériaux métalliques.


600
Le caractère uniaxial de l'essai est également le résultat d'une
Vitesse de déformation approximation et des approches plus fines ont été proposées par
divers auteurs. Ils ont proposé des améliorations tenant compte des
400 effets de l'inertie radiale et des frottements aux interfaces barre-
échantillon [15][16][17].

1.2.2.3 Adaptation de la rigidité des barres


200
Le système conventionnel des barres de Hopkinson constitué de
Contrainte
barres métalliques répond correctement aux besoins des essais
pour la plupart des matériaux métalliques. Cependant, lorsque le
0 matériau à tester est de très faible résistance, comme par exemple
0 10 des matériaux « structure » comme le nid d'abeilles, les barres
Déformation nominale (%)
métalliques ne permettent pas de mesures précises, en particulier
pour la force entrante.
F
Contrainte nominale :
S0 On doit alors avoir recours à des barres de faible impédance,
presque inévitablement constituées d'un matériau viscoélastique tel
Déformation nominale :
∆h que le Nylon. L'utilisation de telles barres est plus délicate. Elle
h0
nécessite notamment la connaissance précise de la propagation des
1 ∆h ondes dans ces barres dont la formulation est plus complexe que
Vitesse de déformation nominale :
h0 dt dans le cas élastique [18]. En effet, l'onde se modifie significative-
ment dans le transport à cause du couplage entre les effets géomé-
Figure 7 – Contrainte et vitesse de déformation en fonction triques (caractère tridimensionnel de la barre) et les effets dus au
de la déformation (valeurs nominales) caractère viscoélastique du matériau [19]. Retenons donc que les
barres métalliques ne permettent de réaliser des essais de qualité
que sur les matériaux métalliques compacts.
On observe que la vitesse de déformation n'est pas constante au
cours de l'essai, ce qui correspond au cas général. On se rapproche 1.2.2.4 Durée de mesure
des essais à vitesse de déformation constante, avec l'utilisation d'un
impacteur classique cylindrique, seulement lorsque la réponse du La proportionnalité entre les grandeurs mécaniques associées à
matériau se rapproche d'une réponse plastique parfaite, sans une onde dans une barre [équation (1)] sur laquelle la technique des
écrouissage (à condition seulement de considérer contrainte et barres de Hopkinson est fondée ne s'applique qu'à une onde se pro-
déformation nominales). pageant dans une seule direction, ce qui oblige à mesurer séparé-
ment l'onde incidente (se propageant dans un sens) et l'onde
Il faut souligner que la barre de Hopkinson donne accès aux gran- réfléchie (se propageant dans l'autre sens). Cela limite la durée de
deurs globales de force et déplacement aux deux faces de l'échan- mesure ∆T fonction de la longueur des barres [20] :
tillon. Toutes les grandeurs mécaniques sont obtenues moyennant
des hypothèses complémentaires qui sont complètement indépen- ∆T = L/C
dantes du moyen d'essai. Elles ont été largement considérées dans avec C célérité,
la littérature [7]. L longueur de la barre entrante.
La longueur de la barre sortante est choisie pour que l'onde trans-
1.2.2 Limitations du système conventionnel mise ne soit pas perturbée par sa réflexion à l'extrémité pendant ce
temps de mesure. Par conséquent, pour un essai de comportement,
1.2.2.1 Analyse précise du transport des ondes la déformation totale ne pourra excéder le produit de la vitesse de
déformation moyenne par ∆T .
Pour réaliser un transport virtuel précis des ondes entre les points Exemple : la durée de la mesure ne dépassera pas 400 µs
de mesure et l'échantillon (transport dans le futur pour l'onde inci- (C  5 000 m/s) pour une barre d'acier de 2 m de long et la déforma-
dente, transport dans le passé pour les deux autres), il est néces- tion totale sera alors limitée à 20 % pour un essai à une vitesse de
saire de prendre en compte le caractère tridimensionnel des barres déformation moyenne de 500 s –1. Pour réaliser un essai à 50 s –1
et d'introduire (par une technique de traitement de signal) la correc- jusqu'à 80 % de déformation nominale, il faudrait donc une barre 40
tion de dispersion qui traduit la modification du signal dans son fois plus longue (80 m).
transport [8][9][10][11].
Un calage temporel précis (à la microseconde près) est également En raison de cette limitation, le système conventionnel des barres
nécessaire. On utilise dans ce but une technique basée sur la simu- de Hopkinson ne permet pas de réaliser des essais à des vitesses de
lation de la réponse transitoire initiale élastique de l'échantillon. déformation moyennes (inférieures à 200 s –1).
Cette technique permet d'obtenir des mesures précises dans la zone D'un autre côté, pour les raisons évoquées au paragraphe 1.1, les
des petites déformations [12]. machines traditionnelles, sans précautions particulières, ne donnent
pas non plus de résultats fiables aux vitesses de déformation
1.2.2.2 Homogénéité des champs mécaniques moyennes. La limite supérieure de ces techniques n'est pas claire-
ment établie car elle est liée de manière particulière au matériau
La déduction d'une relation contrainte-déformation en moyenne testé, au type d'éprouvette et à la machine utilisée ; elle varie entre
à partir des mesures globales n'a de sens que si les champs de 1 s –1 et quelques 10 s –1. Parmi les recherches de techniques expéri-
contrainte et de déformation dans l'échantillon sont approximative- mentales couvrant ce domaine, il en existe une fondée sur l'utilisa-
ment homogènes [13][14]. Cette hypothèse d'homogénéité des tion de barres dont l'aboutissement est proche [21][22][23][24][25].
champs de contrainte et de déformation n'est cependant, en toute La limitation de la durée de l'essai reste toutefois encore d'actualité
rigueur, jamais correcte. Il existe en effet un temps de transfert du pour les barres de Hopkinson.

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1.2.2.5 Uniaxialité du chargement


Zones en cisaillement
1.2.2.5.1 Cas des matériaux massifs
Cylindre
On a souligné, au paragraphe 1.2.2.1 la précision requise par le extérieur
Cylindre
transport des ondes. Ce transport suppose en outre la localisation F intérieur
précise de l'interface barre-échantillon et l'uniformité des barres.
Cette condition rend délicate la mesure lorsqu'on veut réaliser des F
chargements plus complexes que la compression, tels que la trac-
tion ou le cisaillement [26][27]. F

Dans le cas de la traction, la liaison entre les barres et l'éprouvette Échantillon


ne peut plus être ponctuelle. Si l'éprouvette est vissée dans les bar-
res, les zones de serrage présentent généralement une impédance
mécanique différente de celle des barres. Si on a recours à des Figure 9 – Montage pour cisaillement de tôles
mors, comme en statique, ils représentent eux-mêmes une rupture
d'impédance. Cette rupture d'impédance modifie les ondes et rend
le dépouillement de l'essai délicat. S'ajoutent à cela des problèmes 1.2.2.6 Adiabaticité du chargement
technologiques liés à la création de l'onde de traction. Plusieurs
techniques ont été proposées [28][29][30][31][32][33][34], mais L'adiabaticité de l'essai aux barres de Hopkinson est vérifiée tant
aucune ne se distingue particulièrement. que la très courte durée de l'essai ne permet pas d'échange de cha-
Dans le cas du cisaillement, il existe un essai de qualité compa- leur entre l'échantillon et les barres. Pour les métaux, on suppose
rable à celui de l'essai de compression. On utilise des barres dans généralement que la quasi-totalité du travail plastique est dissipé en
lesquelles on induit des ondes de torsion. Le déplacement appliqué chaleur. Il est donc possible d'évaluer l'amplitude de l'élévation de
à l'échantillon est alors une rotation, et ce dernier doit donc être température et de procéder à une éventuelle correction tenant
tubulaire. Si de plus il est de faible épaisseur, on peut admettre que compte du radoucissement correspondant du matériau.
la déformation de cisaillement y est homogène.

1.2.2.5.2 Cas des tôles métalliques 1.2.3 Commentaires


Pour les produit minces, les essais de compression doivent être
conçus pour prévenir le flambage. Deux techniques le permettent, la Les moyens d'essais dynamiques ont de nombreuses limitations,
miniaturisation des éprouvettes et le collage. Nous avons réalisé en particulier pour les sollicitations différentes de la compression
des essais de compression dynamiques sur des échantillons simple et dans le domaine des petites déformations. Cette limitation
d'épaisseur 1,2 mm et de 1,5 mm de longueur utile (essai quasi affecte tout d'abord les matériaux de faible résistance en contrainte
impossible en statique). Pour les tôles plus minces, on réalise des (problèmes d'adaptation d'impédance et de grande déformation) et
sandwichs de tôles collées permettant d'augmenter l'épaisseur de les matériaux fragiles (faibles déformation à la rupture). Elle est heu-
l'échantillon. reusement moins contraignante pour les matériaux métalliques. Le
Nous avons également mis au point un essai de traction, utilisant comportement élastique dynamique de ces matériaux ne diffère en
une éprouvette en forme de chapeau [35] (figure 8). effet pas du comportement statique et l'étude de la plasticité dyna-
mique peut tolérer un certain nombre d'approximations raisonna-
Les appuis sont dessinés de sorte qu'il n'y ait aucune variation bles et commodes. Il reste qu'on ne peut pas réaliser d'essai à
d'impédance dans le système barre-appuis. On n'accède cependant vitesse de déformation constante, ni à température constante, et
pas directement à la déformation de la partie utile de l'éprouvette, que le dépouillement des essais qui va servir de support à la modé-
mais on peut l'estimer de manière assez simple. lisation devrait en tenir compte.
La réalisation d'éprouvettes tubulaires à partir de tôles n'est pas Ces effets restant faibles, une vérification a posteriori peut, le plus
aisée. On utilise donc un montage qui transforme la compression en souvent, être suffisante.
cisaillement [36] (figure 9).
Une observation attentive du montage révèle que l'interface entre
les barres et l'échantillon n'est pas ponctuel. Il s'ensuit que la phase
de mise en équilibre de l'éprouvette est plus longue (devant la durée 2. Modélisation
de l'essai) que dans le cas classique de la compression et, en parti-
culier, que la phase élastique du chargement y est plus difficile à
modéliser.
Toute modélisation est construite en vue de prédire, in fine, la
Cet essai ne permet donc pas de mesures fiables à de trop faibles réponse d'une structure (ici métallique) à un chargement (ici dyna-
déformations, en particulier dans le domaine élastique. mique). Pour mener à bien une telle prédiction, tous les aspects du
comportement doivent être envisagés, y compris la rupture. On ne
prendra pas ici en considération la problématique la plus générale
(analysée en [37] par exemple) pour concentrer notre attention sur
le comportement traditionnel reliant entre elles les grandeurs
mécaniques macroscopiques. Dans le cas des métaux, les modèles
capables de prendre en compte la sensibilité à la vitesse sont
dérivés de la plasticité classique.

2.1 Généralités

Partant de la plasticité classique, la question qui se pose dans


Figure 8 – Montage de traction pour éprouvette de tôle notre cas est de prendre en compte l'effet de vitesse.

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En faisant des considérations générales physiques et thermo-


dynamiques sur les lois de comportement [38], on montre que les
variables mécaniques généralisées Q ( t ) – contrainte – et q ( t ) – Dynamique
déformation – peuvent être reliées de la façon suivante :
600

Contrainte (MPa)
t
Q ( t ) = G [ H –∞ ( q ( τ ) ; q ( t ), q̇ ( t ), … ) ] (4)
400
où H décrit l'histoire du chargement.
Cette forme met en évidence que les deux types de grandeur ne Quasi statique
Quasi-statique
jouent pas un rôle symétrique. La réponse mécanique instantanée
200
dépend de l'histoire de la géométrie, de sa valeur actuelle et de la
valeur de ses dérivées temporelles d'ordre supérieur.
Si nous limitons notre attention aux formulations susceptibles 0
d'être intégrées de façon simple dans les codes de calcul, la rela- 0 10 20 30
tion (4) peut être écrite sous la forme suivante, dite incrémentale :
Déformation (%)
d σ = f ( d ε, ε, ε̇, ε̇˙…, α i … ) (5) résultats expérimentaux
modèles
avec αi des paramètres internes qui prennent en compte
Figure 10 – Évolution de la relation de comportement avec la vitesse
l'histoire du processus.
de déformation dans le cas de l’acier doux
L'évolution des paramètres α i , doit donc être décrite en complé-
ment de la relation (5). Leur dépendance de l'histoire se traduit
explicitement par le fait que les trajets de charge et de décharge
sont, en général, différents.
Dans le cas général, les grandeurs intervenant dans la formule (5) rimentaux
Points expérimentaux
sont des grandeurs tensorielles. On imagine donc aisément la com- Contrainte (MPa)
600
plexité que peut prendre cette relation. Les simplifications essentielles
faites dans le cas des matériaux métalliques consistent à ne pas consi-
dérer les dérivées temporelles de la déformation d'ordre supérieur à 1, 400
et à décrire la vitesse de déformation par une grandeur scalaire.
Ces hypothèses simplificatrices sont justifiées par deux catégo- 200
ries de raisons : Modèle
— l'une est que la programmation des lois dans les codes en est 0
d'autant simplifiée ; –5 –3 –1
— l'autre est que, de toutes façons, on ne dispose pas d'une lg de la vitesse de déformation (en s–1)
variété assez grande d'essais, en particulier en dynamique, qui per-
mettrait d'identifier un plus grand nombre de paramètres.
Figure 11 – Évolution de la contrainte associée à une déformation
Il apparaît ici que la pertinence et la qualité des lois qui vont être de 3 % dans le cas de l’acier doux
construites, même dans ce cadre, vont dépendre de la façon dont
seront appliquées les hypothèses simplificatrices. Pour les maté-
riaux métalliques, les lois sont en outre construites de telle façon
que la disparition de l'effet de vitesse conduit au comportement On observe que la limite d'élasticité apparente augmente avec la
plastique classique. vitesse et que l'écrouissage diminue. L'évolution, avec la vitesse de
déformation, de la contrainte associée à une déformation donnée va
Deux principaux types de lois sont alors considérés, les modèles donc dépendre de cette déformation. L'allure de la dépendance,
de plasticité dynamique et les modèles viscoplastiques. pour une déformation de 3 % est représentée sur la figure 11.
Il semble que la sensibilité à la vitesse augmente au-delà d'une
zone de la vitesse de déformation qui dépend des matériaux, tout
2.2 Modèles courants comme l'amplitude de l'augmentation. Cette zone est malheureuse-
ment souvent située dans le domaine des vitesses moyennes où la
mesure est difficile.
2.2.1 Tendances des réponses expérimentales
2.2.1.2 Chargements avec saut de vitesse
2.2.1.1 Chargements continus
Un certain nombre d'auteurs s'est intéressé à l'influence de l’his-
On considère la réponse à des essais classiques uniaxiaux au toire de la vitesse de déformation sur l'évolution de la contrainte
cours desquels la vitesse de déformation n'a pas de variation bru- d'écoulement. La technique la plus utilisée consiste à appliquer un
tale. Les résultats trouvés dans la littérature sont abondants [7]. La saut de vitesse de déformation en utilisant des barres de Hopkinson
tendance générale, commune à tous les matériaux, est assez bien de torsion (le chargement dynamique est déclenché pendant un
illustrée par la réponse de l'acier doux. essai statique) ou, plus rarement, en utilisant des barres de com-
Pour ce dernier, la sensibilité à la vitesse est relativement signifi- pression avec un impacteur à diamètre brusquement variable
cative, l'évolution en fonction de la vitesse de la relation unidimen- [[27][39][40][41][42]. Un résultat typique tiré de [42] est présenté sur
sionnelle contrainte-déformation (établie en compression) à l'allure la figure 12.
décrite sur les figures 10 et 11. On observe que le saut de vitesse ne se traduit pas par un saut de
Les différents modèles devront donc rendre compte de ce type contrainte et que le niveau de contrainte atteint est différent de celui
d'évolution. obtenu avec un essai à vitesse de déformation constante.

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Sokolovsky et Malvern [52], généralisé au cas tridimensionnel par


400 Perzyna [53] :

Contrainte (MPa)
300
1  J2  s ij
ė ij = ------- ṡ ij + γ Φ  ---------------
- – 1 ---------
200 2µ  k ( w p )  J2 (7)
100 1
V1 V2 ε̇ ii = ------- σ̇ ii
3K
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
avec e ij partie déviatorique de la vitesse de déformation,
Déformation (%)
s ij déviateur de contrainte,
Titane avec des vitesses de déformation : V1 = 10–4 s–1
K module de compressibilité élastique,
V2 = 25 s–1
µ module de cisaillement élastique,
Figure 12 – Illustration de l'influence de l'histoire de la vitesse J2 second invariant du tenseur des contraintes,
de déformation wp travail de déformation plastique,
Φ fonction qui décrit la sensibilité à la vitesse de défor-
mation.
Les modèles courants ne rendent pas compte de cet effet, quel
que soit leur type (considéré § 2.2.2 et 2.2.3). La raison est que des Cette fonction peut être exprimée de différentes façons, présen-
chargements avec saut de vitesse sont rarement rencontrés dans les tées ci-dessous dans le cas unidimensionnel (pour des raisons de
applications industrielles et qu'on n'a donc pas cherché à introduire simplicité) :
un paramètre interne [au sens général de la relation (5)] nécessaire
à la description de ce phénomène. ε̇ = ( 1 ⁄ E ) σ̇ + Φ ( σ, ε )

avec E module d'Young,


2.2.2 Plasticité dynamique
σ – f(ε)
Φ ( σ, ε ) = ε˙0 exp  ------------------- (formulation exponentielle),
cf ( ε )
Pour des raisons historiques, ces modèles sont les plus utilisés. Ils
ont été spécifiquement développés pour les codes explicites. Les 1
-----
promoteurs les plus connus en sont Johnson-Cook [43], Zerilli- σ m
Armstrong [44] et Steinberg [45]. Par exemple, le modèle de Stein- Φ ( σ, ε ) = ε̇  --------- (formulation puissance),
f(ε)
berg décrit l’évolution de la contrainte d’écoulement de la manière
suivante : K
Φ ( σ, ε ) = ---- [ σ – f ( ε ) ] (formulation de Malvern),
B
σ y = [ YT ( ε̇ p, T ) + Y Af ( ε p ) ] [ G ( p, T )/G 0 ] (6)
où f ( ε ) est la relation contrainte-déformation quasi statique et où c,
K, B, m, ε˙0 sont des coefficients.
avec Y Af ( ε p ) la contrainte d’écoulement quasi statique ;
Ce type de formulation a la faveur des scientifiques car sa cohé-
YT ( ε̇ p, T ) la variation de cette contrainte due à la sensi- rence physique (au sens de la thermodynamique par exemple) a été
bilité à la vitesse de déformation et à la tem- vérifiée. Sa principale faiblesse est qu'il est en général impossible
pérature ; de trouver un jeu de coefficients capable de décrire le comporte-
G ( p, T ) une fonction de la contrainte hydrostatique et ment d'un matériau donné sur une plage de vitesses de déformation
de la température. importante.
On notera que, dans ce type de modèle, la déformation plastique
intervient comme paramètre interne et que c'est la vitesse de défor-
mation plastique qui prend en compte l'effet de vitesse. C'est un 2.3 Intégration dans les codes
paramètre scalaire, le plus souvent défini comme la vitesse de
déformation équivalente au sens de Mises. C'est l'équivalent Mises
du tenseur des vitesses de déformation. La plupart des modèles intégrés dans les codes sont les modèles
De nombreuses variantes de ces modèles ont été proposées dans de plasticité dynamique. Il ne sont pas en général exprimés de façon
la littérature [46][47][48][49]. incrémentale [voir équation (6)] ce qui permet de garantir la stabilité
Cette catégorie de modèles a bénéficié de développements de l'algorithme. Leur relative robustesse permet le plus souvent de
importants dus à leur utilisation courante. Moyennant le bon choix passer outre l'effet parasite d'importantes oscillations de la vitesse
des paramètres, ils rendent correctement compte de la plupart des de déformation dues à l'algorithmique (essai initial d'un incrément
essais sur une large plage de vitesses de déformation. élastique). Pour remédier à ce défaut, un algorithme a été proposé
par Nematt-Nasser [54] (essai initial d'un incrément plastique). On
L'identification des paramètres, dont le nombre se situe en géné- peut également utiliser un algorithme inspiré de la viscoplasticité
ral entre 5 et 10, n'est cependant pas immédiate. (disponible dans DYNA).

2.2.3 Viscoplasticité
2.4 Identification des paramètres
Les modèles de viscoplasticité sont plus anciens. Ils ont été déve-
loppés pour être utilisés dans les codes implicites, généralement
pour décrire des phénomènes visqueux lents (fluage, relaxation). Il va de soi que la finesse de la description du comportement, quel
On en trouve un certain nombre dans la littérature [50][51]. Nous que soit le type de modèle utilisé, va de pair avec le nombre de para-
citerons, à titre d'exemple, le modèle incrémental introduit par mètres à identifier.

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Ce travail présente, en particulier en dynamique, des difficultés de mes ni de standards pour les essais dynamiques (il existe toutefois
principe, lié à deux principaux aspects : des recommandations éditées, pour l'Europe, par l'association
— il n'existe pas d'essai dynamique à vitesse de déformation DYMAT [55]) et la simple extrapolation de méthodes quasi statiques
constante ; peut conduire à des résultats erronés.
— les essais disponibles sont pour la plupart unidimensionnels. Le choix de la relation de comportement la mieux adaptée va
Pour palier cette difficulté, les éditeurs de logiciel proposent sou- dépendre ensuite de la finesse des résultats recherchés et des
vent des méthodes inverses permettant de retrouver les paramètres modèles disponibles dans le code de calcul. Sa validation reste un
d'un modèle à partir de résultats bruts d'essais. Cette méthode n'est problème délicat, d'abord parce que de nombreuses sources
pas critiquable dans son principe. Toutefois, elle donne toujours un d'erreurs sont inhérentes au calcul lui-même (finesse des maillages,
résultat. Il est donc bon d'en vérifier la cohérence, ce qui nécessite choix des éléments, qualité de la description du chargement),
une compréhension du sens physique des paramètres de la loi... qui ensuite parce que les essais dynamiques de structure, plus encore
malheureusement n'en ont pas toujours un. que les essais de caractérisation, produisent souvent des résultats
L'identification d'une loi est donc un travail délicat qui n'est pas imparfaits.
facilité par la grande variété de lois disponibles dans les codes de La prévision de la réponse mécanique d'une structure (pare-chocs
calcul. d'une automobile) soumise à un chargement dynamique (choc fron-
tal) met en œuvre des calculs numériques qui nécessitent une
bonne description du comportement dynamique des matériaux.
Cette description passe par le meilleur choix du modèle, à la fois au
3. Conclusion sens de son adéquation avec l'algorithmique du code de calcul et,
bien sûr, de sa pertinence mécanique. Cette dernière est tributaire,
de manière essentielle, de la qualité de la caractérisation expéri-
La caractérisation et la modélisation du comportement dynami- mentale du matériau réalisée sous sollicitations dynamiques. De
que des matériaux métalliques est un domaine déjà ancien qui fait manière plus indirecte, elle est également tributaire des essais de
toujours l'objet de recherches actives. En effet, les difficultés expéri- structure utilisés pour valider les prévisions (signe d'un certain
mentales nécessitent encore un travail en vue d'améliorer l'analyse manque de maturité du calcul en dynamique). Plusieurs maillons de
des essais et d'étendre leurs domaines d'applications. Contraire- cette chaîne présentent encore des faiblesses qui justifient l'activité
ment au cas des essais statiques traditionnels, il n'existe pas de nor- scientifique en amont de ce domaine.

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