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RÉSUMÉ
Cet article établit les solutions du problème de l’écoulement souterrain, en régime permanent, dans une strate idéale à
nappe libre, inclinée, rechargée par infiltration efficace. Une équation de conservation spécifique est d’abord établie, sans
utiliser l’hypothèse de Dupuit sur le gradient ni l’équation transitoire de Boussinesq. La robustesse des solutions est testée
avec un logiciel d’éléments finis qui tient compte des fonctions non saturées et qui donc ne fait aucune des hypothèses
requises pour établir la théorie. Les solutions théoriques et numériques sont identiques quand la valeur d’entrée d’air (VEA)
est presque nulle (cas théorique), et décalées de 0 à 20 cm si la VEA vaut -2 kPa. On traite l’exemple d’un aquifère incliné
de la rive nord du Saint-Laurent. La solution du régime permanent correspond à la position moyenne de la nappe quand
l’infiltration efficace prend la valeur moyenne établie sur une base annuelle, l’aquifère amortissant les phénomènes météo-
rologiques. On présente des applications pratiques et des équations simplifiées pour estimer la conductivité hydraulique
saturée à grande échelle, et évaluer la vitesse de Darcy en fonction de l’abscisse.
ABSTRACT
This paper establishes the solutions for the steady state groundwater problem in an ideal sloping unconfined layer,
recharged by an effective infiltration. A specific conservation equation is established first, without using the assumption of
Dupuit for the gradient and the transient equation of Boussinesq. The robustness of the solutions is checked with a finite
element code which takes into account the unsaturated functions, thus making none of the assumptions required to
establish the theory. The theoretical and numerical solutions are identical when the air-entry value (AEV) is almost null (the
theoretical case), and shifted by 0 to 20 cm when the AEV is worth -2 kPa. The case of a sloping unconfined aquifer on the
north shore of the Saint-Lawrence River is treated. The steady state solution corresponds to the average position of the
water table when the considered effective infiltration has the mean value established using an annual basis, the aquifer
deadening the meteorological phenomena. The paper presents practical applications and simplified equations for
estimating the large scale saturated hydraulic conductivity, and for evaluating the Darcy velocity as a function of abscissa
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Sea to Sky Geotechnique 2006
2. PROBLÈME ET SOLUTIONS DE CHAPUIS (2002) vation, pour une largeur unité perpendiculaire à la pente,
peut être obtenue de la façon suivante. En supposant que
On définit (Fig. 1) un axe x horizontal, un axe incliné x’ le l’eau infiltrée sur le petit segment A’C’ ne passe pas entre B
long du substratum, et un axe vertical z. Sur les frontières et C, mais entre C et C’ (typiquement, supposons que OE >
perpendiculaires à la pente, on peut avoir en haut (x = x' = 0) 100 m, BA’ = 10 m et tan α = 0.01 à 0.05, alors A’C’ < 0.1 à
une condition de débit nul ou non (Q = Q0, cas d’un réservoir 0.5 m, et peut être négligé devant OE),
à charge constante h0), et en bas (x = L) une condition de
[1] Qin = N xA’ = N xB = N x’B cos α
charge constante (rivière, canal, lac). La strate, beaucoup
plus longue qu’épaisse, a une pente α faible, inférieure à Qout = sec tion × VDarcy =
cinq degrés dans les aquifères exploités pour l’eau potable.
[2] dh dh
− (BC ) ksat = −ksat hB' cos α
On établit d’abord l’équation de conservation sous une forme dx ' B dx ' B
différentielle spécifique, qui tient compte des particularités où h’B est définie par le segment vertical BA (Fig. 1).
géométriques (Fig. 1). Les axes x et x’ sont orientés de Comme la pente de la surface de la nappe varie avec x et
gauche à droite pour se démarquer des études transitoires diffère de α (le cas général), A n’est pas sur cette surface.
publiées en hydrologie, qui prennent le sens contraire. Les On peut écrire
hypothèses sont : (1) La strate est homogène ; (2) Sa 2
conductivité hydraulique saturée, ksat, est isotrope ; (3) Le [3] hB = hC = zC = zB + BD = zB + h’B cos α
substratum imperméable fait un angle constant α avec dh dz dh '
3 2 [4] = + cos2 α
l’horizontale ; (4) La recharge N (m /m /s) est constante ; (5) dx ' B dx '
B dx '
B
Seul le régime permanent est considéré ; (6) L’écoulement
non saturé est négligé ; (7) Les équipotentielles sont des [5] zB = EB = BF sin α = (constante – x’B) sin α
droites perpendiculaires au substratum imperméable et dz
[6] = − sin α
donc h(x, z) = h(x’) ; et (8) Il en résulte que la vitesse de dx ' B
Darcy est constante le long d’une équipotentielle.
dh dh '
Contrairement aux hypothèses de Dupuit, on ne suppose [7] = − sin α + cos2 α
pas que la pente de la surface de la nappe donne le dx ' B dx '
B
gradient. On ne fait aucune hypothèse sur le gradient.
En régime permanent, le débit entrant est égal au débit
z
recharge N (m/an)
sortant, Qin = Qout (Fig. 1) et donc
N xB' cos α + Q0 =
Qin surface de la nappe
C sur cette surface [8] dh '
A'
C' − ksat hB' cos α − sin α + cos2 α
Qo dx '
A B
C
D
sable surface du terrain
où Q0 est le débit entrant dans la pente à x = 0, qui peut être
Qout
dû, par exemple, à un réservoir à charge constante. En
argile réarrangeant l’éq. [8] on obtient
B
dh '
x ksat hB' cos2 α − ksat hB' sin α +
α
x' dx '
0 E F [9] B
Q
A N xB' + 0
=0
cos α
C
D
α qui est l’équation différentielle à résoudre. On note d’abord
que cette équation diffère de l’équation de Boussinesq
(1877) utilisée pour les aquifères inclinés (voir l’Annexe A).
On note ensuite que, lorsque Q0 = 0 à x = x’ = 0 (cas d’une
ligne de partage des eaux au sommet de la pente), alors
h’(x’ = 0) = 0 est une solution possible selon l’éq. [9], ce qui
α est physiquement correct. Notons aussi que si α = 0,
l’équation [9] se réduit à l’équation classique du substratum
B
horizontal (Bear 1972). Pour résoudre l’éq. [9], posons
Figure 1: Paramètres du problème. Attention aux
[10] Y = h’(x’) et
distorsions d’échelle, la longueur L est très grande par
rapport à l’épaisseur b et l’angle α est faible. Q0 ksat cos2 α
[11] N x '+ =NX d’où
cos α N
L’équipotentielle BC est perpendiculaire au substratum
imperméable (Fig. 1). Le point B est sur le substratum alors N Q0
[12] X = x' + et donc
que C est sur la surface de la nappe. L’équation de conser- ksat cos2 α Nksat cos2 α
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1602
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32
30
28
26
L = 500 m, Ksat = 5e-5 m/s - N = 0.5 m/an
24
5166 noeuds
elevation z (m)
22
20 surface de la nappe
18
16
14
12
10
8
6
4
2
h = 4.00 m
0
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500
-5
Fig. 2. Premier exemple, solution numérique : tan α = 0.04, L = 500 m, N = 0.5 m/y, h(x=L) = 4 m, ksat = 5 x 10 m/s. Attention
aux distorsions angulaires dues aux échelles différentes
1.E-03
AEV = -2 kPa
AEV = -0.25 kPa L’aquifère (Fig. 5) est caractérisé par L = 1000 m, tan α =
-4 -8
1.E-04 1%, ksat = 3 x 10 m/s, et N = 1.9027 x 10 m/s. L’équation
[20] donne a = -1.2557. On présente ici quelques résultats
1.E-05 numériques. Le réseau d’écoulement est similaire à celui du
cas précédent, sauf au voisinage de l’origine (x = 0) où
1.E-06 l’épaisseur saturée n’est pas nulle dans ce cas. Là aussi, le
changement de direction des lignes d’écoulement au-dessus
1.E-07 de la surface de la nappe correspond simplement au
principe de réfraction.
1.E-08
La Figure 6 compare les deux solutions, analytique et
-25 -20 -15 -10 -5 0 5
numérique. Comme précédemment, on trouve un ajuste-
pression interstitielle uw (kPa) ment presque parfait pour une VEA proche de 0 kPa, et une
différence qui atteint environ 20 cm dans le haut de la pente
Fig. 3. Valeurs de k(uw) au-dessus et au-dessous du pour une VEA proche de -2 kPa, et qui s’évanouit quand on
changement de direction de l’écoulement.
se rapproche du pied de la pente.
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22
L = 1000m, pente = 1% - Ksat = 3.0 x 10-4 m/s - N = 0.600 m/an
20
18
5151 noeuds
16
14
12
10
h = 6.00 m
8
6
4
2
0
0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1.0
-4
Fig. 5. Second exemple, tan α = 0.01, L = 1000 m, N = 0.6 m/y, h(x=L) = 6 m, ksat = 3 x 10 m/s.
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2.0
1.5
0.5
Verhoest et Troch (2000) 1.E-04
L’éq. [9] peut servir à estimer ksat à partir de deux valeurs de 2.0E-06
la charge hydraulique, h1(x1) et h2(x2) établies au même
temps, N étant l’infiltration efficace moyenne déterminée sur 1.5E-06
une base annuelle à partir de données météorologiques. On
considère l’éq. [9] sous forme de différences finies. La 1.0E-06
valeur de h’B est définie par (h’1+h’2)/2 à l’abscisse moyenne
x’B = 0.5 (x’1+x’2), entre les deux piézomètres. La valeur de 5.0E-07
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h (m)
9
1.E-08
0.E+00 6. REMERCIEMENTS
-1.E-08
0 100 200 300 400 Ces études ont été subventionnées par le Conseil de
temps (jours) recherche en sciences naturelles et génie du Canada.
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