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1 TD droit Administratif : commentaire d'arrêt

L'arrêt du 4 Décembre 2003 du conseil d'état est relatif aux actes de gouvernement.
Le Président de la République a, sur proposition du Gouvernement, décidé par une série de décrets
de consulter les élécteurs de la Guadeloupe conformément à l'article 73 de la constitution pour ce qui
concerne le projet de création en Guadeloupe d'une collectivité territoriale demeurant régie par
l'article 73 de la constitution et donc par le principe de l'identite législative avec possibilités
d'adaptations, et se substituant au département et à la région dans les conditions prévues par cet
article.
Un habitant de la Guadeloupe forme un recours pour excès de pouvoir contre le décret décidant de
consulter les électeurs de la Guadeloupe en application de l'article 73 de la constitution; contre le
décret portant organisation de la consultation des électeurs de la Guadeloupe; contre l'arrêté fixant
les caractéristiques des bulletins de vote pour la consultation des électeurs de la Guadeloupe en
application de l'article 73 de la constitution. Ce dernier demande également la suspension des décrets
et de l'arrêté susvisés ainsi que la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 1000 euros au
titre de l'article L 761-1 du code de la justice administrative.
Le conseil d'état est il compétent pour annuler des actes de gouvernement régissant l'organisation
d'un référendum ?
Le conseil d'état considère qu'il n'est pas compétent pour apprécier l'opportunité de la décision du
Président de la République d'organiser une consultation afin de réceuillir, en application de l'article
73 de la constitution, le consentement des électeurs sur le principe de l'une ou l'autre des deux
évolutions institutionnelles envisagées par le dernier alinéa de cet article, ainsi que le choix de la
date de cette consultation, il lui revient, en revanche, lorsqu'il est saisi d'un recours pour excès de
pouvoir contre le décret décidant d'organiser une telle consultation, de vérifier que ce décret n'est pas
entaché d'un vice pouvant affecter la régularité ou la sincérité de la consultation à venir, dont le
résultat peut être contesté devant lui.
Il appartient donc au conseil d'état de vérifier notamment que la question posée dans le cadre de la
consultation prévue par l'article 73 de la constitution répond à une double exigence de la loyauté et
de clarté de la consultation.
La circonstance que le même jour où l'ensemble des électeurs de la Guadeloupe seront invités à
répondre à la question posée par le décret attaqué, les électeurs de Saint?Martin et de Saint-
Barthélemy seront également consultés sur le principe de la transformation de chacune de ces deux
communes en collectivité régie par l'article 74 de la Constitution n'est pas de nature, par elle-même,
à altérer la loyauté et la clarté de la consultation.
Ensuite, aucune disposition applicable à la consultation décidée par le décret attaqué n'impose,
contrairement à ce que soutient le requérant, que la publication du décret précède de deux mois au
moins la tenue du scrutin ; que le moyen tiré de ce que le délai de cinq semaines séparant la
publication du décret attaqué de la date de la consultation serait, par sa brièveté, de nature à priver
les électeurs de la Guadeloupe de leur droit d'exercer un recours effectif devant une juridiction
manque en fait dès lors que, comme en témoigne la présente décision, le Conseil d'Etat, saisi en
temps utile, a pu statuer avant la date de la consultation sur la requête présentée par le réquérant.
De plus, en fixant au jeudi précédant le scrutin la date limite à laquelle devront être adressés à
chaque électeur le texte sur lequel porte la consultation, un jeu de bulletins de vote et les circulaires
imprimées conformément à l'article R. 29 du code électoral par les partis habilités, le décret du 4
novembre 2003 portant organisation de la consultation en Guadeloupe permet que soit diffusée en
temps utile une information suffisante aux électeurs et satisfait ainsi aux exigences de clarté et de
loyauté de la consultation.
D'autre part, 'il appartient au pouvoir réglementaire, en l'absence de dispositions législatives, de
définir les modalités nécessaires à l'organisation de la consultation en rendant applicables, avec les
adaptations justifiées par ce type de scrutin, les dispositions législatives et réglementaires régissant
d'autres consultations électorales ; qu'ainsi l'article 4 du décret attaqué a pu légalement écarter
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l'application de l'article R. 41 du code électoral de la consultation des électeurs en Guadeloupe et


exclure ainsi la possibilité d'adaptation des horaires d'ouverture des bureaux de vote, qui ont été
fixés de huit heures à dix-huit heures en application de l'article 13 du décret.
Ainsi, le requérant n'invoque pas de moyens spécifiques au soutien des conclusions dirigées contre
cet arrêté, dont il demande l'annulation par voie de conséquence de l'annulation des décrets du 29
octobre 2003 et du 4 novembre 2003 ; qu'il résulte de ce qui précède que ces conclusions ne peuvent
qu'être rejetées.

I – l'acceptation de la requête pour excès de pouvoir contre un acte de gouvernement

A) L'évolution du contrôle des actes de gouvernement

Certaines décisions de l'exécutif échappent à tout recours devant quelque juridiction que ce
soit et consitutent cette catégorie très particulière d'acte de l'autorité publique qu'on appelle : actes de
gouvernement. L'immunité juridictionnelle de cas actes est totale : elle concerne à la fois le
contentieux de la légalité et celui de la responsabilité. La théorie des actes de gouvernement ne
respose sur aucun texte; elle a son origine dans la jurisprudence du conseil d'état. ( CE, 9 mai 1867,
Duc d’Aumale).
L’arrêt Prince Napoléon marque l’abandon de la théorie dite du "mobile politique" qui prévalait
jusqu’alors (CE, 1er mai 1822, Laffitte ; CE, 9 mai 1867, Duc d’Aumale ) : désormais, le juge
administratif se reconnaît compétent pour se prononcer sur la légalité d’un acte, même si cet acte n’a
été pris qu’au regard de considérations purement politiques.
Toutefois, la notion d’acte de gouvernement n’a pas été complètement abandonnée par cette
décision, même si son champ d’application en a été fortement réduit. Le juge administratif continue
de considérer qu’il n’est pas compétent pour se prononcer sur la légalité de tels actes. Mais
aujourd’hui les actes de gouvernement n’ont plus qu’un caractère résiduel. On en compte deux
catégories : les actes relatifs aux rapports du pouvoir exécutif avec le pouvoir législatif et les actes
mettant en cause la conduite des relations extérieures de la France.
En ce qui concerne les actes relatifs aux rapports du pouvoir exécutif avec le povuoir législatif, ce
qui nous interesse en espèce, le Conseil d'État considère que constituent des actes de gouvernement :
la décision du Premier ministre de déposer ou, au contraire, de refuser de déposer un projet de loi
(CE, 29 novembre 1968, Tallagrand) ou encore le retrait d’un tel projet ;
- le refus du Premier ministre de proposer au Président de la République de saisir le Parlement d’une
révision de la Constitution (CE, 26 février 1992, Allain) ;
- le décret de promulgation d’une loi (CE, 3 novembre 1933, Desreumeaux) ;
- le décret soumettant un projet de loi au référendum (CE, 19 octobre 1962, Brocas) ;
- le décret de dissolution de l’Assemblée nationale (CE, 20 février 1989, Allain) ;

B) un recours pour excès de pouvoir acceuilli par le conseil d'état.

L'attitude du conseil d'état en matière de référendum a elle aussi subi des infléxions, une
distinction devant être faite selon qu'il s'agit d'un référendum national ou d'un référendum local.
Pour ce qui est des référendums nationaux, la régularité des opérations elles-mêmes est contrôlée par
le conseil constitutionnel. Les opérations préalables, une fois le référemdum décidé, demeurent des
actes administratifs.
A ce titre, elles relèvent normalement du juge administratif (CE, 19 octobre 1962, Brocas). Cette
compétence de principe comporte une double limite. L'une est traditionnelle: si les résultats d'un
référemdum sont devenus définitifs, le juge administratif décidera qu'il n'y a pas lieu pour lui de
porter une appréciation sur les actes préliminaires à ce référendum ( CE, 27 Octobre 1961 le
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regroupement national ).
L'autre limite est apparue plus récemment. Dans la mesure où, à l'occasion du référendum du 25
Septembre 2000 relatif à la réduction de la durée du mandat du Président de la République, le
conseil constitutionnel a admis sa compétence pour connaître des recours formés préalablement à la
tenue du scrutin contre les décrets portant organisation du référendum et de la campagne
référendaire, le conseil d'état a estimé que cette voie de recours parallèle rendait irrecevable la
contestation des mêmes actes devant lui (CE, 1er Septembre 2000, Larrouturou ).
En ce qui concerne les référendums locaux, c'est ce qui nous interesse en espèce, le conseil d'état a
admis de connaître d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un décret du président de la
République.
Tout en se reconnaissant compétent, il a estimé que son contrôle ne devait pas porter sur
l'opportunité de la consultation et le choix de la date. Il lui appartient en revanche de vérifier la
régularité et la sincérité de la consultation à venir.

C'est ainsi que le conseil d'état s'est déclaré compétent pour vérifier la régularité et la sincérité de la
consultation à venir sans pour autant contrôler la tenue du scrutin.

II – les limites apportées par le conseil d'état

A) contrôle de loyauté et de clarté de la consultation.

Les notions de loyauté et de clarté de la consultation sont à l'origine de la décision du 4 mai


2000 du conseil constitutionnel qui se prononcait sur une loi organisant la consultation de la
population de Mayotte.
Ainsi le Conseil Constitutionnel déclare qu'il revient au conseil d'état lorsqu'il est saisi d'un recours
pour excès de pouvoir contre le décret décidant d'organiser une telle consultation, de vérifier que ce
décret n'est pas entaché d'un vice pouvant affecter la régularité ou la sincérité de la consultation à
venir, dont le résultat peut être contesté devant lui.
La seule circonstance que le décret attaqué a mentionné dans ses visas une délibération du congrès
des élus départementaux et régionaux de la Guadeloupe en date du 11 octobre 2003 approuvant le
document d'orientation sur l'évolution institutionnelle de la Guadeloupe n'est pas de nature à altérer
le caractère loyal et clair de la consultation dès lors que la question posée porte seulement sur le
principe de la création d'une nouvelle collectivité se substituant au département et à la région, en
application de l'article 73 de la Constitution précité, sans faire référence à ce document ou à tout
autre projet définissant les modalités de mise en œuvre de ce changement de statut
La circonstance que le même jour où l'ensemble des électeurs de la Guadeloupe seront invités à
répondre à la question posée par le décret attaqué, les électeurs de Saint?Martin et de Saint-
Barthélemy seront également consultés sur le principe de la transformation de chacune de ces deux
communes en collectivité régie par l'article 74 de la Constitution n'est pas de nature, par elle-même,
à altérer la loyauté et la clarté de la consultation

B) la portée de la solution

La pleine réception dans notre droit de la Convention Européenne des droits de l'homme ne laisse
pas de conduire à s'interroger sur la théorie des actes de gouvernement, qui se concilie malaisément
avec le droit à un recours effectif reconnu par la convention.
Considérés par beaucoup comme une verrue du système juridique français, puisqu'ils apparaissent
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comme une faille dans le principe de légalité, les actes de gouvernement ont toutefois eu tendance à
céder du terrain.
Dans le domaine de la conduite des relations internationales, plus particulièrement, le champ des
actes de gouvernement s'est réduit en raison de l'accroissement du contrôle du juge administratif sur
les conventions internationales et du recours de plus en plus large à la théorie dite « des actes
détachables ». Enfin, la théorie de l'égalité devant les charges publiques permet d'ouvrir la
perspective d'un début de responsabilité du fait des actes de gouvernement

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