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Savoirs et textes
19 | 2019
Dire et vouloir dire dans les arts du langage anciens et
tardo-antiques
Martin Rueff
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/methodos/5778
DOI : 10.4000/methodos.5778
ISSN : 1769-7379
Éditeur
Savoirs textes langage - UMR 8163
Référence électronique
Martin Rueff, « La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études de cas » :
note analytique », Methodos [En ligne], 19 | 2019, mis en ligne le 11 mars 2019, consulté le 19 mars
2020. URL : http://journals.openedition.org/methodos/5778 ; DOI : https://doi.org/10.4000/
methodos.5778
Les contenus de la revue Methodos sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative
Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études d... 1
Martin Rueff
NOTE DE L'AUTEUR
La conférence de Carlo Ginzburg « Ethnophilologie : deux études de cas » qui sert de
référence aux analyses d’Irène Rosier et de Denis Thouard a été publiée dans la revue
Socio-anthropologie, n° 36, 2017, p. 155-177. Pour permettre aux lectrices et aux lecteurs de
Methodos de s’orienter dans la pensée et dans les débats, nous proposons ici une
description analytique de cet essai. On trouve au § 3 un résumé de cette conférence.
Toutes les notes sont de Martin Rueff
« Il est peu d’occupations aussi intéressantes, aussi
attachantes, aussi pleines de surprises et de
révélations pour un critique, pour un rêveur dont
l’esprit est tourné à la généralisation, aussi bien
qu’à l’étude des détails, et, pour mieux dire encore,
à l’idée d’ordre et de hiérarchie universelle, que la
comparaison des nations et de leurs produits
respectifs ».
Charles Baudelaire, « Exposition universelle de
1855 », Œuvres complètes, Paris, Gallimard,
« Bibliothèque de la Pléiade », 1976 p. 953.
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10 Que voulait dire Menocchio et d’où lui venaient de telles idées ? C’est donc pour répondre
à ces deux questions que Carlo Ginzburg nous invite à plonger dans la vie du meunier. On
comprend alors pourquoi la philologie permet de lever l’obstacle épistémologique de
notre accès aux cultures populaires : quand nous serions tentés de comprendre les propos
de Menocchio à partir de nos propres catégories d’entendement, l’historien philologue
nous amène à les comprendre autrement ; quand, à l’inverse, les propos de Menocchio
nous échappent, il nous en propose une traduction.
11 Cette méthode avait été élaborée dès le premier livre de Carlo Ginzburg, I Benandanti
(1966) qui fut traduit en français sous le titre Les batailles nocturnes 11. Le livre explorait sur
la base d’une série de procès de l’Inquisition un phénomène jusqu’alors inconnu dans la
région du Frioul. Des hommes et des femmes, pour la plupart issus d’un milieu paysan se
dénommaient eux-mêmes les benandanti (à savoir les gens du bien) et soutenaient devant
les inquisiteurs qu’étant nés coiffés (à savoir la tête enveloppée dans le sac du liquide
amniotique), ils étaient contraints d’abandonner leur corps en esprit quelques fois par an,
parfois transformés en animaux, pour aller combattre contre des sorcières et des sorciers
et assurer la fertilité des moissons. Alors que les benandanti clamaient haut et fort qu’ils
étaient des anti-sorciers, les inquisiteurs les considéraient comme de véritables sorciers
qui participaient à des cultes diaboliques. Les inquisiteurs recouraient à toutes sortes de
stratégies (de la question orientée à la torture parfois), et essayaient de convaincre les
benandanti d’avouer ce qu’ils voulaient leur faire dire, mais ils n’ont pas réussi à effacer
ces voix « qui se sont tues ».
12 On comprend mieux peut-être en quoi l’œuvre de Carlo Ginzburg relève de
l’ethnophilologie. Il n’est pas difficile de mesurer en quoi elle intéresse le philosophe –
qu’il s’agisse de réfléchir au partage des voix dans le dialogue platonicien, ou de manière
moins historique, à la question de l’usage chez Wittgenstein ou à l’indétermination de la
traduction chez Quine12.
13 L’historien a dit ce qu’il devait à la tradition philologique et aux maîtres de la philologie
du XXe siècle 13 : Gianfranco Pasquali, Gianfranco Contini, Sebastiano Timpanaro, mais
aussi Erich Auerbach et Leo Spitzer14. Si la philologie est la discipline savante qui veut
établir la lettre véritable des textes savants, l’ethnophilologie de Carlo Ginzburg est
l’entreprise qui consiste à employer la rigueur des méthodes philologiques pour faire
entendre à travers la lettre des textes la vérité des voix soumises15. Cette question revient
dans un texte merveilleux de Rapports de force qui porte sur un matériau plus directement
ethnographique : « Dans les voix de l’autre ». C. Ginzburg y étudie une révolte indigène
dans les îles Mariannes, telle que la rapporte le père jésuite Le Gobien dans L’histoire des
îles Mariannes, nouvellement converties à la religion chrétienne, de la mort glorieuse des premiers
missionnaires qui y ont prêché la foi. C’est pour lui l’occasion de réfléchir sur la manière dont
la voix de l’indigène est rapportée dans le texte du père jésuite, mais aussi celle de se
demander quel rôle attribuer au discours rapporté dans l’écriture de l’histoire. Il rappelle
la polémique qui court dans les écrits de Mascardi puis dans ceux du père Rapin. La
question de la citation est d’importance (p. 75). En analysant la question
historiographique du report des voix, et par un crochet par Mably, Ginzburg rencontre
Bakhtine et la définition du roman polyphonique.
14 2.2. Quant à la casuistique historique de Carlo Ginzburg, elle marque la microhistoire dans
sa dimension polémique – l’étude de cas s’oppose à l’histoire quantitative et statistique ;
elle est un défi à l’histoire de la longue durée à la Braudel. Le choix du cas pose toute une
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droits. Inversement une philosophie sans sujet présente du droit une conception
fondée sur la jurisprudence »27.
21 Gómez Suárez de Figueroa (1539-1616 qui devait se faire connaître sous le nom de plume
Garcilaso de la Vega, « el Inca », est le fils d’un conquistador Espagnol et d’une princesse
Inca. Après une carrière militaire ratée il se consacre aux lettres, apprend le latin et
l’italien, mais reste attaché à ses multiples origines ethniques et linguistiques. Dans les
premières pages de ses écrits, il se présente fièrement comme « Inga », « el Inca » c’est-à-
dire comme un membre de la famille royale Inca. Ses Comentarios reales de los Incas, dont la
première partie est publiée à Lisbonne en 1609 (la seconde partie paraîtra à titre
posthume en 1617) sont considérés comme la plus ambitieuse de ses œuvres historiques.
Garcilaso note que les Espagnols ont fait du terme huaca, qu’ils traduisent par idole, un
signe de la grande diffusion de l’idolâtrie chez les populations indigènes des Andes. Or
Garcilaso souligne que la signification d’idolâtrie n’est qu’une seule des nombreuses
significations que peut prendre le terme huaca. Huaca renvoie en effet à toute sorte
d’anomalie, mais aussi aux phénomènes naturels grandioses tels que la source d’une
rivière, ou les impressionnantes montagnes couvertes de neige qui traversent le
Pérou. Traduire « Huaca » par idole, c’est laisser penser que les populations indigènes
idolâtraient leurs montagnes, alors qu’ils veulent tout juste signifier « qu’elles ont
quelque chose de particulier et d’extraordinaire, qui les oblige d’en parler avec beaucoup
de respect et de vénération. ». Garcilaso souligne que les Espagnols se sont rendus
coupables d’une autre erreur : il n’y a pas de verbe pour le nom Huaca qui signifie
« idolâtrer ou commettre idolâtrie » (I, 124). Mais « si l’on en prononce la dernière syllabe
au plus profond du gosier, huaca passe pour un verbe et signifie pleurer. » Il s’agit là d’une
affaire de prononciation : qu’on prononce la dernière syllabe comme une gutturale ou
comme une palatale, la signification du mot s’en trouve changée.
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23 Le second cas étudié par Carlo Ginzburg est celui de John David Rhys, un contemporain de
Garcilaso. Rhys naît au pays de Galles en 1534 et meurt en 1619. Il étudie la médecine à
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Sienne puis enseigne le latin à Pistoia. Pendant son séjour en Italie il publie un livre en
italien sur le latin (Regole della costruttione latina, Venise 1567) et un autre en latin sur la
langue italienne (Perutilis exteris nationibus de Italica pronunciatione et orthographia libellus,
Padoue 1569). Ce dernier, comme son titre l’indique, s’adresse aux étrangers désireux
d’apprendre à parler et à écrire l’italien : Allemands, Anglais, Français, Espagnols,
Polonais, Portugais. Rhys décrit la prononciation de chacune des lettres de l’alphabet
italien de manière comparative, en recensant les variations régionales et en les
replaçant dans une perspective linguistique plus générale. Ginzburg cite la description de
la prononciation de lettre « n », ainsi que du phonème « gn ». Il souligne que les
descriptions de Rhys sont bien plus fines et détaillées que celles de Garcilaso : « et
pourtant une similitude entre les deux est indéniable ». Il se demande alors si cette
ressemblance est due à l’héritage partagé des grammairiens grecs et latins que Rhys a
approfondi et repris ou si on peut aussi considérer l’hypothèse que Garcilaso aurait lu le
manuel de Rhys sur la prononciation de l’italien.
24 Il souligne :
« Les deux hommes vivaient plus ou moins à la même époque en des lieux
différents, et tous deux furent capables de considérer les langues (y compris la leur)
dans une perspective comparatiste, grâce à leur position marginale dans la
société ».
25 Garcilaso adopte un point de vue de philologue lorsqu’il s’attache à conserver la pureté de
sa langue maternelle. Son attention particulière à ne pas altérer l’orthographe originelle
du quechua et de l’espagnol a peut-être été encouragée par Rhys et par la focalisation sur
l’exactitude orthographique dont il fait montre dans De Italica pronunciatione et
orthographia libellus.
26 Il est impossible de savoir si Garcilaso a effectivement lu Rhys. « Ce que nous savons »,
commente Ginzburg,
« c’est qu’au début de sa carrière littéraire Garcilaso a appris l’italien et qu’il a passé
plusieurs années à traduire les Dialoghi d’amore de Léon l’Hébreu : une langue
étrangère comme l’italien lui a donc permis de se distancier de sa langue maternelle
et paternelle et d’adopter un point de vue qu’on appellerait, aujourd’hui,
comparatiste ».
27 Or, souligne Ginzburg, on pourrait considérer que la trajectoire de Rhys fut similaire :
« il quitta le Pays de Galles pour l’Italie, dont il apprend la langue et analyse la
structure du latin en se servant de l’italien et en adoptant le point de vue d’un
italien. Il se livre aussi à un autre exercice : analyser la langue italienne par le
truchement du latin ».
28 La philologie comparative a permis à Rhys de se consacrer à une analyse rigoureuse et
passionnée de sa langue maternelle. Il en va de même pour Garcilaso.
29 On peut soutenir sans paradoxe que Garcilaso et Rhys furent l’un et l’autre des
« ethnophilologues » : si ce terme semble aller de soi pour Garcilaso, il n’en est pas moins
adéquat pour décrire l’approche comparative ambitieuse de la prononciation et de
l’orthographe italiennes de Rhys.
« La philologie, loin d’être incompatible avec une démarche comparative, en est
évidemment l’un des meilleurs instruments ».
30 Il n’y a certes pas lieu de réserver le terme d’ethnophilologie à la reconstruction de
traditions orales marginales, ni même de l’employer « pour rejeter la philologie au nom
de l’ethnologie comparative »32. De tels arguments ne méritent pas d’être pris au sérieux.
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Si on appréhende le terme « philologie » au sens large, comme nous y invite Vico, alors
son lien avec « l’ethnologie » devient évident.
3.3. Les deux conclusions de Carlo Ginzburg sur ces deux cas
31 Carlo Ginzburg peut alors tirer deux conclusions en comparant en ethnophilologue les
deux comparaisons de ses ethnophilologues.
« La première est, en un sens large, politique. Garcilaso de la Vega et John Rhys ont
fini par défendre leur langue maternelle marginalisée (respectivement le quechua
et le gallois) à travers un long itinéraire qui impliquait une profonde immersion
dans une troisième langue : il s’agissait alors de l’italien ; ce serait l’anglais
aujourd’hui ».
32 La seconde conclusion est historique – mais elle a des implications théoriques. Le cas de
Garcilaso de la Vega – un locuteur natif capable d’établir les différentes prononciations du
mot huaca, n’est certainement pas habituel et on peut même le qualifier d’exceptionnel :
mais un « cas exceptionnel pour ce qui est des preuves à notre disposition, comme avec
Garcilaso, pourrait bien renvoyer à un phénomène en réalité bien plus répandu ». D’une
part, en effet ce cas offre un avertissement aux linguistes qui ne peuvent pas faire
autrement, quand ils se penchent sur des textes du passé, que de s’appuyer sur des textes
écrits, lesquels pourraient correspondre parfois à des translittérations inadéquates.
D’autre part, ce cas est aussi un avertissement adressé à ceux qui réfléchissent sur la
traduction dans une perspective théorique plus large. On peut regretter que dans le
Dictionnaire des intraduisibles « la relation asymétrique entre les catégories de
l’observateur (ou devrions-nous dire du « traducteur » ?) et les catégories de l’acteur ne
semble pas sans conséquence dans le cadre d’une réflexion sur les traductions et leurs
respectives inadéquations ».
33 On ne saurait omettre les contextes « asymétriques dans lequel les traductions ont lieu le
plus souvent ». C’est sur cet avertissement que s’achevait la conférence de Genève.
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36 Après celle de Saint Jérôme qui décrivait un traducteur en ces termes, « sed quasi captivo
sensus in suam linguam victoris jure transposuit - il a pour ainsi dire transposé le sens
dans sa langue, comme des captifs, par droit de conquête », la virulence de Nietzsche doit
être entendue comme un avertissement.
« TRADUCTIONS. — On peut évaluer le sens historique que possède une époque à la
façon dont cette époque fait les traductions et cherche à s’assimiler les temps passés
et les livres anciens. Les Français du temps de Corneille et encore ceux de la
Révolution s’emparèrent de l’antiquité romaine avec des façons que nous n’aurions
plus le courage d’avoir — grâce à notre sens historique supérieur. Et l’antiquité
romaine elle-même, de quelle façon violente et naïve tout à la fois fit-elle main
basse sur tout ce qui est grand et bon dans la plus ancienne antiquité grecque !
Comme ils transposaient alors dans le présent romain ! Comme ils effaçaient, avec
intention et sans souci, la poussière des ailes du papillon ! C’est ainsi qu’Horace
traduisait çà et là Alcée ou Archiloque, ainsi faisait Properce, de Callimaque et de
Philetas (des poètes du même rang que Théocrite, si nous avons le droit de juger) : il
leur importait peu que le véritable créateur ait vécu telle ou telle chose et en ait
marqué les traces dans ses vers ! — en tant que poètes, ils étaient mal disposés à
l’égard de l’esprit fureteur archéologique qui précède le sens historique, en tant que
poètes ils n’admettaient pas ces choses toutes personnelles, les noms, et tout ce qui
était propre à une ville, à une côte, à un siècle, comme une mise et un masque, et ils
s’empressaient de mettre en place ce qui était actuel et romain. Ils semblaient
vouloir nous demander : « Ne devons-nous pas renouveler pour nous ce qui est
ancien et nous accommoder à sa façon ? Ne devons-nous pas avoir le droit
d’insuffler notre âme à ce cadavre ? Car enfin il est mort et tout ce qui est mort est
si laid ! » — Ils ne connaissaient pas la jouissance du sens historique, le passé et
l’étranger leur était pénible, et pour eux, en tant que Romains, c’était là une
incitation à une conquête romaine. En effet, traduire c’était alors conquérir, — non
seulement en négligeant l’historique : bien plus, on ajoutait une allusion à un
événement contemporain, et, avant tout, on effaçait le nom du poète pour mettre le
sien en place — on n’avait pas à cause de cela le sentiment du vol, on agissait, au
contraire, avec la meilleure conscience de l’imperium Romanum », Friedrich
Nietzsche, Le Gai savoir, aphorisme 83)34.
37 Comme souvent, la leçon de Nietzsche est de vigueur. Au-delà de sa dimension
philologique, elle invite la philosophie à se demander ce que l’on dit du langage quand on
l’interroge depuis la traduction. Or, en matière de traduction, les philosophes et les
poètes n’ont aucun avantage. Ceux-ci plus que ceux-là savent qu’il leur est devenu
impossible de rester sur leur quant-à-soi et que leur tour de Babel flotte en débris mobiles
sur les vagues agitées de leurs effets personnels. Mieux, le poète est celui pour qui le
« quant-à-soi » répond à la formule « l’un dans l’autre ». Oui, l’un dans l’autre parce que
c’est dans l’altérité foncière de la langue et des langues que l’un se débat pour affirmer
l’intraduisible dont il est fait. L’intraduisible dont on peut dire, après Artaud, que chacune
et chacun d’entre nous, nous sommes faits.
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NOTES
1. Cf. Thomas Browne (2007), Le Jardin de Cyrus, Paris, Corti ; traduction B. Hoepffner.
2. Charles Louis de Montesquieu (1991), Pensées, Spicilège, Louis Desgraves (éd.), Paris, Robert
Laffont, coll. « Bouquins », n°1970.
3. Cf. « Aristote, encore une fois », in Carlo Ginzburg (2003), Rapports de force : Histoire, Rhétorique,
Preuves, Paris, Gallimard-Le Seuil. On pense notamment au passage suivant : « Sur un ton
tranchant, Aristote rejette donc aussi bien la position des sophistes, qui voyaient dans la
rhétorique un simple art de convaincre en mobilisant l’émotion, que celle de Platon, qui, dans le
Gorgias, l’avait précisément condamnée pour cela. À l’encontre de ces deux thèses, Aristote
repère dans la rhétorique un noyau rationnel : la preuve ou, plus précisément, les preuves. C’est
là qu’il faut chercher le lien entre historiographie, au sens que nous lui donnons, et la rhétorique,
au sens d’Aristote » (p. 44).
4. Cf. le collectif dirigé par Denis Thouard (2007), L’interprétation des indices, Enquête sur le
paradigme indiciaire avec Carlo Ginzburg, Lille, Presses du Septentrion.
5. Carlo Ginzburg ([2005] 2010), Le fil et les traces, Vrai Faux Fictif, trad. française, Martin Rueff,
Lagrasse, Verdier 2010, p. 16-17. On pourrait faire remarquer à l’historien qu’Aristote évoque
moins une histoire de couple qu’un triangle dont il ne faut pas omettre la philosophie : « Voilà
pourquoi la poésie est une chose plus philosophique et plus noble que l'histoire : la poésie dit,
plutôt le général, l'histoire le particulier ».
6. Edward Sapir (1985), Selected Writings in Language, Culture, and Personality, University of
California Press et Benjamin Lee Whorf (1956), Language, Thought, and Reality: Selected Writings of
Benjamin Lee Whorf, MIT Press. Impossible d’entrer ici dans le débat passionnant qu’a suscité
l’hypothèse Sapir-Whorf.
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La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études d... 13
7. Je me contente de renvoyer ici aux synthèses suivantes : Giorgio Raimondo Cardona (1980 2), I
ntroduzione all’etnolinguistica, Bologne, il Mulino ; Gabriele Costa (2007), « Pragmatica e tradizione
nell’etnolinguistica », Quaderni di Semantica, 28, p. 203-214 et, du même, (2008), Etnolinguistica
comparata, Roma, Viella.
8. Alessandro Duranti (2007), Etnopragmatica. La forza nel parlare, Roma, Carocci.
9. Je pense ici au chapitre V de la première section de Sein und Zeit qui articule affection,
spatialité et compréhension. On sait l’influence que ces analyses auront pour la philosophie de
l’expression de Maurice Merleau-Ponty et l’herméneutique d’Henri Maldiney.
10. Carlo Ginzburg ([1976] 1980), Le fromage et les vers. L’univers d’un meunier du XVI e siècle, Paris,
Aubier.
11. Carlo Ginzburg (1980), Les batailles nocturnes : sorcellerie et rituels agraires en Frioul, XVI e-XVIIe
siècle, Lagrasse, Verdier ; Paris, Flammarion, coll. « Champs » (n o135), 1984.
12. Willard V. Quine (1974), The Roots of Reference, La Salle (Ill.), Open Court, essai 3, surtout p. 83.
13. Cf. Lorenzo Valla (1993), La donation de Constantin, préface de Carlo Ginzburg, Les Belles
Lettres.
14. « Dès la conclusion de l’article que je consacrais à ce procès je soulignais la possibilité de
déchiffrer dans les documents de l’Inquisition non seulement les superpositions des juges, mais
aussi (et cela était bien plus inattendu) ces voix qui exprimaient une culture irréductiblement
différente : les voix des accusés. La lutte, l’opposition restaient bien au centre, mais elles se
déplaçaient sur un plan culturel, déchiffrable à travers une lecture attentive des textes. Les écrits
des philologues romans me poussaient dans cette direction : ceux d’Erich Auerbach, de Leo
Spitzer ou encore de Gianfranco Contini. J’ai essayé d’apprendre d’eux cet art de « lire
lentement » (c’est la définition de la philologie donnée par Roman Jakobson) en l’appliquant à
des textes non littéraires », Carlo Ginzburg (2010), Le fil et les traces p. 374-375. Sur Auerbach, cf,
notamment, « Tolérance et commerce. Auerbach lit Voltaire », ibidem, p. 169-204. Cf. Mythes
emblèmes traces, morphologie et histoire, Lagrasse, Verdier, 2010, p. 10 et Le fil et les traces, Lagrasse,
Verdier, 2010, p. 434-437.
15. « La lettre tue. Sur quelques implications de la deuxième épître aux Corinthiens », 2. 3. 6,
Critique, juin-juillet 2011, tome LXVII, n°769-770, « Sur les traces de Carlo Ginzburg », p. 576-605.
16. Cf. notamment Carlo Ginzburg (2015), « La parole oblique. Une réflexion sur les Provinciales de
Pascal », conférence prononcée en mémoire de Francesco Orlando, Institut Culturel Italien de
Paris, 18/02/2015, mais aussi : (2003), « Machiavelli, l’eccezione e la regola. Linee di una ricerca in
corso », « Quaderni storici », 112, p. 195-213.
17. Littérature et exemplarité, Emmanuelle Bouju, Alexandre Gefen, Guiomar Hautcoeur & Marielle
Macé (éds.), Rennes, P.U.R, 2007 ; et Construire l'exemplarité. Pratiques littéraires et discours historiens
(XVIe-XVIIIe siècles), Laurence Giavarini (éd.) (2008), Dijon, EUD. Le numéro récent des Annales
consacré aux Savoirs de la littérature (mars-avril 2010) consacre sa première partie à
« L’exemplarité » (cf. Jérôme David, « Une réalité à mi-hauteur », exemplarités littéraires et
généralisations savantes au XIXe siècle », p. 263-290 et Barbara Carnevali, « Mimésis littéraire et
connaissance morale, la tradition de ‘l’éthopée’ », p. 291-322.
18. On aurait là un nouvel avatar des liens complexes de ce que Jean-Claude Pariente avait
analysé dans son livre classique : (1973), Le langage et l’individuel, Paris, Armand Colin. P. Pachet
avait attiré l’attention sur ce point dans « Les exemples de Vincent Descombes », in Vincent
Descombes. Questions disputées, op. cit., p. 355-374 (sur exemple, paradigme, cas, p. 371-374). Mais
on rappellera aussi que b.
19. Cf. Carlos Lobo (2000), Le phénoménologue et ses exemples, étude sur le rôle de l’exemple dans la
constitution de la méthode et l’ouverture du champ de la phénoménologie husserlienne, Paris, Kimé.
20. Cf. Giorgio Agamben (2008), Signatura rerum, Paris, Vrin. Dans ce traité de la méthode, le
paradigme occupe une position centrale, mais Giorgio Agamben avait déjà consacré à
Methodos, 19 | 2019
La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études d... 14
l’exemplarité des développements cruciaux. Cf. (1990), La communauté qui vient, essai sur la
singularité quelconque, Paris, Seuil, Bibliothèque du 20ème siècle.
21. Cf. Alain Badiou (1988), L’être et l’événement, Paris, Le Seuil.
22. Cf. Claude Romano (2010), Au cœur de la raison, la phénoménologie, Paris, Gallimard, collection
« Folio », p. 25-26 ; p. 428-449. Cf. aussi p. 209 : « pour qu’une description de l’expérience soit
possible, il faut que cette description soit bel et bien une description de l’expérience et non d’autre
chose ».
23. Cf. Giorgio Agamben (2008), Signatura rerum, p. 34. Le paradigme d’Agamben se distingue du
paradigme platonicien (p. 27-28) : « plus semblable à l’allégorie qu’à la métaphore, le paradigme
est un cas singulier qui n’est isolé du contexte dont il fait partie que dans la mesure où, en
présentant sa propre singularité, il rend intelligible un nouvel ensemble dont il constitue lui-
même l’homogénéité » (p. 19).
24. Cf. le collectif Penser par cas, Jean-Claude Passeron et Jacques Revel (éds) (2005), Paris, EHESS
éditions. L’introduction (signée par J.-Cl. Passeron et J. Revel) s’intitule significativement
« Penser par cas. Raisonner à partir des singularités » (p. 9-43).
25. André Jolles (1972), Formes simples, Paris, Seuil.
26. André Jolles (1972), Formes simples, p. 151.
27. Gilles Deleuze (2003), « Réponse à une question sur le sujet », in Deux régimes de fous, textes et
entretiens, 1975-1995, David Lapoujade (éd.), Paris, Minuit, p. 326-328.
28. Comme l’indique l’entrée « Traduire » du Vocabulaire des Institutions européennes, le mot
hellenizein, « traduire en grec », était parfois utilisé pour indiquer l’opération de translittération,
ce qu’atteste par exemple un passage des Antiquités judaïques de Flavius Josèphe (I, 6, 1),
Vocabulaire européen des philosophies. Dictionnaire des intraduisibles, sous la direction de Barbara
Cassin, Paris, 2004, p. 1307.
29. On parlerait volontiers ici d’une indétermination de l’homophonie.
30. Carlo Ginzburg renvoie ici à Mercedes López y Baralt (2005), « La traducción come etnografía
en los Andes: el Inca Garcilaso », in Ead., Para decir el Otro. Literatura y antropología en nuestra
America, Madrid, p 119-146 et à Serge Gruzinski (1999), La pensée métisse, Paris, Fayard.
31. Kenneth Lee Pike, le linguiste américain, anthropologue et missionnaire, a souligné
l’opposition entre deux niveaux d’analyse, celui de l’observateur, et celui de l’acteur, baptisé
respectivement niveau étique (de phonétique) et niveau émique (de phonémique). Partant du
langage, Pike a fini par mettre sur pieds une théorie unifiée de la structure du comportement
humain – le titre de son œuvre la plus ambitieuse, publiée d’abord en trois parties entre 1954 et
1960 pour être ensuite réimprimée dans une version révisée et étendue en 1967 : Language in
Relation to a Unified Theory of Structure of Human Behavior (2nd ed.), The Hague, Netherlands,
Mouton.
32. Carlo Ginzburg renvoie ici aux propositions de Francesco Benozzo (2007), « Etnofilologia »,
Ecdotica 4, p. 208-230 ; (2010), Etnofilologia. Un’introduzione, Napoli.
33. « Placer la langue de la traduction dans le vocabulaire du consensus démocratique ne va donc
pas sans paradoxe, ni sans difficulté : l’opération implique de réduire, d’affaiblir, voire de nier
totalement tous les conflits qui sont inscrits en elle. Ce tournant éthique de la traduction,
révélateur d’une mutation du discours politique général allant dans ce sens (parvenir à une
société pacifiée, sans conflits, vivre dans un monde sans ennemis…) s’impose au prix d’une
réduction de la différence entre l’un (ou soi) et l’autre, d’une confiance sans doute assez
fallacieuse dans la réciprocité et l’empathie. Ce sont ces paradoxes et ces difficultés que
j’aimerais en partie défaire pour redonner à la traduction son potentiel de négativité active. La
négativité de la traduction ne tient pas seulement à la perte supposée qui se produit dans le
passage d’une langue à l’autre. Comme espace de la relation, la traduction est aussi le lieu d’un
conflit qu’il s’agit de réguler pour préserver une forme de pluralisme. La traduction agonique
pourrait être le nom de cet antagonisme apprivoisé. Son potentiel est à la fois théorique (l’envers
Methodos, 19 | 2019
La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études d... 15
de la dialectique), politique (comment penser la différence qui ne se réduit pas, le conflit qui ne
se résout pas) mais aussi pratique (beaucoup de praticiens de la traduction connaissent bien des
aspects scéniques de cette confrontation conflictuelle avec l’autre, l’autre langue, l’autre auteur,
l’autre texte…). Indiquer les voies par lesquelles la traduction est aujourd’hui engagée dans le
discours du consensus, conduit à montrer aussi comment elles constituent une mutation
discursive par rapport à des discours antérieurs et dans l’histoire longue des discours sur la
traduction. Dans certains lieux, la traduction continue à faire jouer les conflits (polémique du
traduire et polémique dans le traduire) ». Tiphaine Samoyault (2016), « La traduction agonique »,
Po&sie 156, 2016/ 2, p. 127-135, ici, p. 127. Voir aussi (2014), « Vulnérabilité de l’œuvre en
traduction », Genesis 38, p. 57-68. Et (2016), « Traduction et violence », in Le Comparatisme comme
approche critique/ Comparative Literature as a Critical Approach, Anne Tomiche (dir.), Garnier, coll.
« Rencontres- littérature générale et comparée ».
34. Le philosophe heideggérien Jean Beaufret se révèle nietzschéen lorsqu’il évoque en ces
termes la traduction du grec energéia par le latin actus : « son plus extrême péril est précisément
de capter ce qu’elle prétend transmettre ». (Jean Beaufret (1973), Dialogue avec Heidegger, Paris,
Minuit, 1973, p. 123). Encore faudrait-il préciser que la conquête n’est pas le seul but de la
traduction romaine qui appartient à un horizon bien plus large de translatio. Cf. Florence Dupont
& Emmanuelle Valette-Cagnac (2005), Façons de parler grec à Rome, Paris, Belin.
RÉSUMÉS
Le 15 septembre 2016, Carlo Ginzburg était invité par le Groupe Genevois de Philosophie à tenir
une conférence dans le cadre d’un colloque consacré à « La philosophie et son histoire : un débat
actuel ». En étudiant les deux cas de Garcilaso de la Vega et de John David Rhys, Ginzburg
apportait une contribution de poids à l’ethnophilologie – si la philologie est la discipline
académique qui permet d’établir la lettre des textes, l’ethnophilologie devient sous sa plume
l’entreprise qui invite à employer la rigueur des méthodes philologiques pour faire entendre la
vérité des voix soumises. La leçon pour la traductologie contemporaine est importante – la
traduction n’est pas une simple opération pacifique. Elle implique des relations de force.
September 15 of 2016, Carlo Ginzburg was holding a conference at the international symposium
organized by the “Groupe Genevois de Philosophie”: « Ethno-philology :two case studies ».
Starting from two cases studies, (Garcilaso de la Vega and John David Rhys) Ginzburg was
offering an important and personal contribution to ethno-philology. If philology is the academic
effort to fix the letter of uncertain texts, it becomes with Ginzburg the application of straight
philological methods to political situations. The aim of his ethno-philology is to hear subaltern
voices. The lesson for the theory of translation is very important: translation is not a pacific
operation. It implies strength relationships.
INDEX
Mots-clés : ethno-philologie, étude de cas, relations de force, traductologie
Keywords : ethno-philology, case studies, strength relationships, theory of traduction
Methodos, 19 | 2019
La conférence de Genève de Carlo Ginzburg : « Ethnophilologie : deux études d... 16
AUTEUR
MARTIN RUEFF
Université de Genève
Methodos, 19 | 2019