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Kamto, Maurice. La Volonté de L'état en Droit International PDF
Kamto, Maurice. La Volonté de L'état en Droit International PDF
LA VOLONTÉ DE L’ÉTAT
EN DROIT INTERNATIONAL
par
MAURICE KAMTO
HORS COMMERCE
2007
MARTINUS NIJHOFF PUBLISHERS
Leiden/Boston
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1) Remarques préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
2) Les autorités étatiques à compétence spéciale . . . . . . . . 77
3) Les autres organes de l’Etat . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
a) Les organes législatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
b) Les organes juridictionnels nationaux . . . . . . . . . . . 80
4) Les agents de l’Etat et autres organes de l’administration . . 82
5) Les collectivités territoriales . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
C. Légitimité du représentant de l’Etat et validité de l’expression
de sa volonté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
D. L’expression du consentement de l’Etat dans d’autres contextes 89
Par. 2. Modalités d’expression formelle de la volonté de l’Etat . . . . 94
A. Expression par voie d’accord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
B. Expression par voie d’acte unilatéral . . . . . . . . . . . . . . . 101
1) Position du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
2) L’intention de l’Etat auteur de l’acte unilatéral . . . . . . . . 106
3) Conditions de validité et causes de nullité de l’acte unilatéral 109
a) Conditions de validité liées à la formation de l’acte . . . 110
b) Exigence de la conformité de l’acte aux règles fonda-
mentales du droit international . . . . . . . . . . . . . . . 112
4) Effets juridiques des actes unilatéraux . . . . . . . . . . . . 113
Section II. Volonté débusquée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
Par. 1. Identification de la volonté de l’Etat à travers les actes juri-
diques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
A. Identification à travers la détermination de la nature juridique
d’un document sanctionnant des pourparlers entre des Etats . . 115
B. Identification à travers l’interprétation des traités . . . . . . . . 120
Par. 2. Volonté de l’Etat et pratique subséquente des parties . . . . . 124
A. Le facteur volontaire dans la pratique des Etats : considérations
générales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
B. La pratique confirmative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
C. La pratique modificative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
1) Pratique subséquente, acquiescement, silence . . . . . . . . . 134
2) Auteurs de la pratique subséquente . . . . . . . . . . . . . . 142
3) Pratique extinctive ou désuétude ? . . . . . . . . . . . . . . . 144
C. Pratique subséquente, objecteur persistant, violation persistante 147
Section III. Volonté de l’Etat en situation . . . . . . . . . . . . . . . . . 150
Par. 1. Volonté de l’Etat dans le temps : lex prior, lex posterior. . . . 151
A. La volonté de l’Etat en confrontation avec elle-même dans le
temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
B. La volonté de l’Etat en confrontation avec des normes exté-
rieures à elle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156
Par. 2. Volonté de l’Etat ajustée : lex generalis, lex specialis . . . . . 159
A. Lex specialis et régimes dit « autonomes » : fonction et consé-
cration en droit international . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
1) Clarification conceptuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
2) Nature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161
3) Consécration en droit international . . . . . . . . . . . . . . 162
a) La jurisprudence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
b) Les traités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168
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NOTICE BIOGRAPHIQUE
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PRINCIPALES PUBLICATIONS
(en droit international et en droit comparé)
N. B. : Ne figurent pas dans cette liste nos travaux en droit interne : droit admi-
nistratif, droit constitutionnel et droit national de l’environnement.
22 Maurice Kamto
23
CHAPITRE I
INTRODUCTION GÉNÉRALE :
LES NOTIONS D’ÉTAT ET DE VOLONTÉ
DANS LA PENSÉE JURIDIQUE INTERNATIONALE
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5. Voir Charles Rousseau, Droit international public, t. II, Les sujets de droit,
Paris, Sirey, 1974, pp. 55-93.
6. Voir, entre autres auteurs, P. Daillier et A. Pellet, Droit international public,
7e éd., pp. 408 ss.
7. Publié dans RGDIP, 1992, p. 264. Voir aussi l’avis no 8 du 4 juillet 1992.
8. Marcel Sibert, Droit international public. Le droit de la paix, t. I. Paris,
Dalloz, 1951, p. 99.
9. Voir Christian Dominicé, « La personnalité juridique dans le système du
droit des gens », Theory of International Law at the Threshold of the 21st Cen-
tury. Essays in Honour of Krysztof Skubiszewski, Kluwer Law International,
La Haye, Londres, Boston, 1996, p. 159.
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A. L’Etat-personne morale :
construction et implication juridiques
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38. Corso di dirito internazionale, 1928, cité par A. P. Sereni, op. cit., p. 75,
note 1.
39. A. P. Serini, op. cit., p. 75.
40. Riad Daoudi, Recherches sur la notion de représentation en droit interna-
tional public, thèse, Droit, Paris II, 1978, p. 44 ; du même auteur, « La représen-
tation en droit international public », Mélanges offerts à Paul Reuter. Le droit
international : unité et diversité, Paris, Pedone, 1981, pp. 205-219 ; spéc. p. 209.
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44. Voir notamment les Allemands Jellinek, Gierke, Wolff, Laband, les
Italiens Donati, Anzilotti, Perassi, Baldoni. Les références de leurs ouvrages
sont données par Serini, op. cit., p. 85, n. 1.
45. Ibid., p. 85.
46. Cité par Serini, op. cit., p. 86.
47. Voir dans ce sens R. Carré de Malberg qui va plus loin en disant que
l’Etat acquiert par cela seul « un pouvoir juridique qui suffit à faire de lui un
sujet de droit » (Contribution à la théorie générale de l’Etat, Sirey, Paris, 1920-
1922, rééd., CNRS, 1962, t. I, p. 32).
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56. Jean-Paul Sartre, L’Etre et le Néant, IV, 1, Tel Gallimard, Paris, 1995,
p. 497.
57. E. Kant, Critique de la raison pure (« Dialectique transcendantale »), trad.
A. Tremesaygues et B. Pacaud, PUF (Quadrege), Paris, 1990, p. 395.
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parce que, comme l’a écrit Alfred Rieg d’une formule qui résume
toute la pensée juridique de cette époque : « La volonté est la cause
première du droit. » 62
Mais comment la volonté opère-t-elle dans la formation de l’acte
juridique ? Cette question n’a pas reçu une réponse unique dans la
théorie du droit. La théorie des « volitions normatives » lui assigne
un rôle flou, partiel et variable ; le normativisme kelsenien tient la
formation de l’acte séparée de la norme juridique qu’elle produit, en
sorte que cette norme détachée de son vecteur volontaire vit sa
propre vie dans une absolue pureté. Quant à la théorie des actes de
langage, elle l’aborde d’une manière encore trop tributaire de la lin-
guistique quand bien même un courant de la doctrine volontariste
contemporaine l’invoquerait au secours de sa théorie.
Ces théories respectives n’expliquent cependant ni comment la
volonté disparaît derrière le mécanisme physiologique des volitions,
ni comment s’opère la scissiparité entre elle et la norme qu’elle pro-
duit, ni comment le langage peut dire tout le droit. Le schéma de for-
mation de l’acte juridique montre que la volonté lui est inhérente ;
qu’il est un moyen d’accomplissement de la volonté, en sorte que
l’on ne peut le concevoir sans cette dernière. Pour autant tout le
droit, qu’il soit interne ou international, n’est pas un droit volontaire.
62. Alfred Rieg, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique en droit civil fran-
çais et allemand (thèse), LGDJ, Paris, 1961, p. 5.
63. William James, Précis de psychologie (chap. XXVI), trad. E. Baudin et
G. Berthier, M. Rivière, Paris, 1909, p. 559.
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83. Paul Amselek, « Le rôle de la volonté dans l’édiction des normes juri-
diques selon Hans Kelsen », op. cit., p. 57.
84. Voir spécialement Paul Amselek, op. cit., pp. 48 ss. ; « Philosophie du
droit et théorie des actes de langage », Théorie des actes de langage, éthique et
droit, pp. 130 ss. ; « Ontologie du droit et logique déontique », Cahiers de philo-
sophie politique et juridique de l’Université de Caen, 1995, no 27, pp. 154 ss. ;
Michel Troper, « Les thèses volontaristes du droit : ontologie et théorie de la
science du droit », Controverses autour de l’ontologie du droit (Paul Amselek,
dir. publ.), PUF, Paris, 1989, pp. 53 ss. ; et, du même auteur, Pour une théorie
juridique de l’Etat, PUF, Paris, 1994, notamment pp. 57 ss.
85. Voir « Le rôle de la volonté dans l’édiction des normes juridiques selon
Hans Kelsen », op. cit., pp. 49 ss.
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86. Voir « Le rôle de la volonté dans l’édiction des normes juridiques selon
Hans Kelsen », op. cit., p. 53.
87. Ibid.
88. Ibid., p. 58.
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89. J. L. Austin, Quand dire, c’est faire, traduit de l’anglais, Paris, Seuil, 1970,
p. 37.
90. Ibid., p. 42.
91. Voir Paul Amselek, « Philosophie du droit et théorie des actes de
langage », Théorie des actes de langage, éthique et droit (Paul Amselek, dir.
publ.), Paris, PUF, 1986, p. 109, notamment n. 1.
92. Ibid., p. 111.
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103. Voir H. Ph. Visser’t Hooft, article préc., p. 275 ; voir aussi Georges
Kalinowski, Introduction à la logique juridique. Eléments de sémiotique juri-
dique, logique des normes et logique juridique, Paris, LGDJ, 1965, pp. 44-45 ;
François Rigaux, Introduction à la science du droit, Bruxelles, Editions Vie
ouvrière, 1974, pp. 349-350 ; J. L. Sourioux et P. Lerat, Le langage du droit,
Paris, PUF, 1975, p. 9 ; Eric David, « Le performatif dans l’énonciation et le fon-
dement du droit international », Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Méthodes d’analyse du droit international. Mélanges offerts à Charles Chaumont,
Paris, Pedone, 1984, p. 241.
104. Voir A. Giuliami, « Nouvelle rhétorique et logique du langage normatif »,
Etudes de logique juridique, vol. IV, Le raisonnement juridique et la logique
déontique, Actes du Colloque de Bruxelles (22-23 décembre 1969), Bruxelles,
Bruylant, 1970, p. 65.
105. Ibid., p. 68.
106. P. Weil, « Vers une normativité relative en droit international ? », RGDIP,
1982.
107. Voir G. Kalinowski, op. cit., p. 53.
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A. Position du problème
En droit, la volonté se manifeste dans l’acte juridique. Celui-ci est
révélateur d’une volonté destinée à générer des effets juridiques.
L’acte juridique est en effet un moyen de création de la norme,
l’opération qui aboutit à cette création, la manifestation de volonté
qui donne naissance à la règle de droit 110. Sans doute ne faut-il pas
en conclure radicalement, dans une perspective kelsenienne critiquée
notamment par la théorie des actes de langage — comme on vient de
le voir —, qu’« il est de l’essence même de l’acte juridique d’être
normateur, c’est-à-dire de créer une norme » 111 car il existe des actes
juridiques non normateurs 112. Si donc la volonté est le prédicat de
110. Voir Jean-Paul Jacquet, Eléments pour une théorie de l’acte juridique en
droit international public, Paris, LGDJ, 1972, pp. 20, 52, 56, 66, et 70 ; position
qu’il confirme notamment dans « L’acte juridique : Réflexions d’un internationa-
liste », Droits, 7, 1988, p. 95.
111. J.-P. Jacquet, Eléments pour une théorie de l’acte juridique..., op. cit., p. 70.
112. Voir Paul Amselek, « Les effets non normateurs des actes juridiques
internationaux », 1985 ; id., « Philosophie du droit et théorie des actes de
langage », Théorie des actes de langage. Ethique et droit, op. cit., pp. 109-163 ;
id., « L’acte juridique à travers la pensée de Charles Eisenmann », La pensée de
Charles Eisenmann (P. Amselek, dir. publ.), Economica, Presses universitaires
d’Aix-Marseille, 1986, pp. 31-65 ; voir aussi Jean Combacau, « L’acte juridique.
Ouverture », Droits, 7, 1988, pp. 7-9.
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l’acte juridique, l’effet normateur n’est pas dans tous les cas sa
caractéristique ni un élément essentiel de son identification. C’est
l’élément de volonté qui a suggéré la distinction — voire pour cer-
tains auteurs l’« opposition radicale » 113 — entre l’acte juridique qui
dépend de la volonté et le fait juridique qui serait le surgissement
brutal de ce qui ne dépend pas d’elle ; ce qui ne signifie pas, comme
on le verra, que l’action à l’origine du fait qui par ses conséquences
est réputé être un fait juridique soit toujours involontaire.
Théoriquement, peu importe que l’acte juridique soit le but d’une
délibération en bonne et due forme, d’un « tribunal intérieur » au
cours duquel les différents motifs sont scrupuleusement « pesés » 114.
L’acte juridique, qu’il soit, comme certaines actions, produit subite-
ment sans délibération préalable, sera cependant considéré comme
volontaire et donc comme procédant d’une décision ; car, comme
Hobbes l’a écrit à propos des actions humaines, en lui le temps qui a
précédé est réputé délibération, et par conséquent l’auteur de l’acte
juridique ou même d’un comportement est censé avoir délibéré ou
examiné les cas dans lesquels il est bon d’édicter tel acte ou d’expri-
mer telle position vis-à-vis de l’acte ou du comportement 115.
En pratique, cependant, le processus de formation de la volonté en
droit met la délibération au cœur de l’édiction des actes juridiques
qui sont, on le sait, des actes volontaires. L’intention joue à cet égard
un rôle fondamental : « Intention, comme le mot l’indique, signifie
tendre vers quelque chose », écrit saint Thomas d’Aquin 116. L’inten-
tion est la représentation que l’auteur de l’acte juridique ou d’un
comportement a de la fin ou du but de son action en tant qu’elle
constitue le motif de cette action 117. Mouvement vers une fin donc,
113. Voir par exemple Michel Bastit, « Suggestions sur les origines philoso-
phiques de l’acte juridique », Droits, 7, p. 11. De manière générale, sur la dis-
tinction entre acte juridique et fait juridique, voir Jean Salmon, « Le fait dans
l’application du droit international », Recueil des cours, tome 175 (1982) ; Jean-
Paul Jacquet, « Actes et normes en droit international public », Recueil des
cours, tome 227 (1991) ; J. Combacau et S. Sur, Droit international public,
4e éd., 1999, notam. p. 18.
114. Notons que « délibération » dérive du latin libare qui signifie « peser ».
115. Voir ce que John Hobbes dit à ce sujet de la délibération dans les actes
volontaires, notamment la décision : De la nature humaine, trad. d’Olbach,
éd. E. Naert, Vrin, Paris, 1991, p. 147.
116. Somme théologique, Ia, IIae, trad. A.-M. Rouget, Cerf, Paris, 1984, vol. 2,
p. 98. Rappelons que le mot latin intensio est formé à partir du verbe tendere qui
signifie « tendre », « viser ».
117. Sur l’intention dans l’action, voir Ph. Desoche (op. cit., p. 225) qui la
définit ainsi : « L’intention est la représentation que le sujet a de la fin ou du but
de son action, en tant qu’elle constitue le motif de l’action. »
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140. Serge Sur, « Quelques observations sur les normes juridiques internatio-
nales », RGDIP, 1985, p. 924 ; voir aussi, entre autres auteurs, Francis Rezek,
« Sur le fondement du droit des gens », Theory of International Law at the
Threshold of the 21st Century. Essays in Honour of Krzysztof Skubiszewski,
Kluwer Law International, La Haye, Londres, Boston, pp. 269-274.
141. Voir G. Scelle, Manuel de droit international public, Paris, Domat-
Montchrestien, 1932, réimprimé en 1984, p. 6.
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142. Voir P. Reuter, « Le traité international, acte et norme », APD, t. 32, 1987,
étude reproduite dans Paul Reuter, Le développement de l’ordre juridique inter-
national. Ecrits de droit international, Paris, Economica, 1995, pp. 331-338.
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dit-elle pas dans l’affaire des Essais nucléaires que la règle pacta
sunt servanda est basée, en droit des traités, sur la bonne foi ? 145 —
elle ne dit pas sur la volonté commune des Etats. D’où tire-t-on la
bonne foi sinon d’un ordre moral nécessairement métajuridique ?
Qu’entend la Cour quand elle parle de « principe intransgressible »,
ou Sir Gerald Fitzmaurice lorsqu’il dit de pacta sunt servanda qu’il
est un principe élémentaire mais fondamental de droit et un « prin-
cipe incontestable » 146 ?
S’agissant de l’émergence d’un ordre public international, elle est
la conséquence logique de l’idée qu’il existe des normes juridiques
qui, par leur nature, s’imposent à tous les Etats y compris sans ou
contre leur volonté. De telles normes ne peuvent avoir un fondement
volontaire, ou exclusivement volontaire. A notre sens, elles peuvent
reposer aussi bien sur les nécessités sociales que sur des principes
d’une morale collective. Si l’interdiction de la torture est devenue
une norme de jus cogens, ce n’est pas tant en raison de sa consécra-
tion conventionnelle que du fait que la torture heurte au plus haut
point la morale de l’époque. Et c’est en tant que norme morale juri-
dicisée par une décision juridictionnelle qu’elle est devenue une
obligation erga omnes, non pas parce qu’elle repose sur un socle
formé par la somme des volontés de tous les Etats.
Il n’y a pas d’erreur essentielle dans les constatations fondamen-
tales des théories volontariste et objectiviste. Il est incontestable que
certaines règles de droit international reposent sur la volonté des
Etats et d’autres sur les nécessités sociales ou les exigences morales
qui les imposent à tous afin que soit possible la vie en société.
Comme on l’a relevé avec justesse, la faiblesse de ces théories vient
de leurs « prétentions à la globalité » 147, dans une approche exclusi-
viste qui écarte toute autre doctrine explicative du fondement de la
règle de droit international. Or, à la vérité, « ces théories fournissent
des clés partielles et contribuent, chacune à sa manière, à l’analyse
de la réalité internationale » 148 dont elles ne saisissaient pas au
145. Arrêt du 20 décembre 1974, CIJ Recueil 1974, p. 268, par. 46.
146. Voir son opinion dissidente, CIJ Recueil 1971, p. 264.
147. P. Daillier et A. Pellet, Droit international public, op. cit., p. 107.
148. Ibid. Voir plus particulièrement l’approche critique du volontarisme
comme source unique des obligations et par suite de la normativité internatio-
nale développée par A. Pellet, « The Normative Dilemma : Will and Consent in
International Law-Making », Australian Year Book of International Law, vol. 12,
pp. 22-53, et, du même auteur, « Contre la tyrannie de la ligne droite »,
Thesaurus acroasium, 1992, vol. XIX, Sources of International Law, pp. 287-355.
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CHAPITRE II
150. Voir infra, deuxième partie, chapitre III, « Volonté de l’Etat et responsa-
bilité ».
151. Pierre Bodeau, Le gouvernement en droit international, thèse de droit,
Paris X (à paraître).
152. Annuaire CDI, 1996, vol. 4, p. 209.
153. Ibid.
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70 Maurice Kamto
tion théorique faite par Hart 154 et mise au cœur de la méthode de tra-
vail de la CDI en matière de codification par R. Ago dans le cadre de
la codification du droit de la responsabilité des Etats, suivi notamment
par le dernier rapporteur spécial sur le sujet, M. James Crawford 155.
En pratique le gouvernement, au sens des organes exerçant le pou-
voir exécutif 156, domine la procédure de conclusion des traités. De ce
fait, c’est en son sein que l’on trouve les principaux organes habilités
à exprimer la volonté de l’Etat dans l’ordre juridique international.
Mais ils ne sont pas les seuls ayant la capacité de le faire. Il convient
du reste de distinguer sur le plan théorique entre la représentation
et la capacité à engager l’Etat : dans l’ordre international, la représen-
tation est — hormis le cas de représentation en justice et de repré-
sentation diplomatique — une institution propre au droit des traités,
alors que la capacité à engager l’Etat va au-delà de la représentation
pour viser tous ceux dont le droit international attache des effets juri-
diques à leurs actes en tant qu’actes de l’Etat. Les conséquences
sont cependant les mêmes, dans l’un et l’autre cas, sur le terrain de la
manifestation de la volonté de l’Etat. C’est pourquoi les développe-
ments qui suivent n’insisteront pas outre mesure sur cette distinction,
la combinaison des deux permettant de couvrir tous les actes volon-
taires de l’Etat qu’ils soient de nature conventionnelle ou unilatérale.
154. Voir The Concept of Law, 2e éd., Oxford, Clarendon Press, 1994,
pp. 94 ss. ; traduction en français par M. Van de Kerchove, Le concept de
droit, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires de Saint-Louis, 1976,
pp. 103 ss. Hart appelle « règles primaires » (primary rules), celles qui régissent
la conduite des sujets de droit, et « règles secondaires » (secondary rules), celles
qui concernent la production, le changement et l’application des règles pri-
maires dans un ordre juridique donné. Il convient toutefois de faire remarquer
que cette distinction n’est pas toujours tranchée, car il existe quelques cas où il
est difficile de dissocier nettement les deux catégories de règles.
155. Voir sa présentation des projets d’articles soumis à l’examen de la Com-
mission à sa cinquante-deuxième session, Rapport de la Commission du droit
international, Documents officiels, supplément no 10 (A/55/10), par 60, p. 18.
156. Les deux notions sont distinctes en droit interne. Mais lorsque le droit
international fait référence au gouvernement, il identifie celui-ci à l’ensemble
des organes exerçant le pouvoir exécutif.
157. Convention du 23 mai 1969 entrée en vigueur le 27 janvier 1980, ci-
après citée « Convention de Vienne de 1969 ».
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72 Maurice Kamto
1) Le chef de l’Etat
74 Maurice Kamto
165. Voir Huitième rapport sur les actes unilatéraux par Victor Rodriguez
Cedeño, rapporteur spécial, Nations Unies, Assemblée générale, CDI, doc.
A/CN.4/557, 26 mai 2005, p. 23, par. 122.
166. Voir CIJ Recueil 1974, pp. 266 ss., par. 39 ss.
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76 Maurice Kamto
1) Remarques préliminaires
De nos jours, la volonté de l’Etat peut être exprimée par un éven-
tail de personnes, d’organes ou d’entités bien plus larges que celui
envisagé dans les relations internationales traditionnelles. Le com-
mentaire de l’article 20 du projet d’articles sur la responsabilité des
Etats note :
« Différents responsables ou organes peuvent être habilités à
exprimer le consentement dans différents contextes, conformé-
ment aux dispositions prises par chaque Etat et aux principes
généraux concernant les pouvoirs effectifs et apparents. » 170
78 Maurice Kamto
175. Voir Geneviève Burdeau, « Les accords passés directement entre autori-
tés administratives ou organes publics de pays différents », Mélanges offerts à
Paul Reuter, Le droit international : unité et diversité, Paris, Pedone, 1981,
pp. 103 ss.
176. Voir Pierre-Marie Dupuy, Droit international public, 5e éd., Dalloz,
Paris, 2000, p. 247.
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 79
riane (voir infra, p. 82), se fit par lettres adressées par le chef de
l’Etat du Cameroun et celui du Nigeria au Secrétaire général des
Nations Unies sous les auspices duquel est placée la commission
mixte. Or, les personnalités ainsi désignées par l’un et l’autre pays
avaient en principe les pleins pouvoirs chacune pour engager son
pays, puisque le communiqué final de la première session de ladite
commission citait parmi les documents opposables aux deux parties
ceux approuvés par la commission mixte 177, et donc par les deux
chefs de délégation au nom de leurs pays respectifs.
80 Maurice Kamto
82 Maurice Kamto
84 Maurice Kamto
86 Maurice Kamto
Nations Unies », autant que par la jurisprudence 201. Comme l’a écrit
R. Ago,
« [l’]’organisation de l’Etat est un faisceau de structures réelles.
Et c’est l’Etat lui-même qui « s’organise », qui se donne cet
appareil et qui en prévoit le fonctionnement selon ses propres
critères et selon ses propres modalités. » 202
Pour représenter l’Etat, les organes étatiques ne sont pas nécessai-
rement représentatifs et n’ont pas à satisfaire un critère de légitimité
quelconque, qu’il soit démocratique ou non :
« même dans un Etat réellement institutionnalisé, rien n’impose
que les organes soient investis d’une façon qui leur garantisse
une représentativité par rapport à la collectivité dont l’Etat est
lui-même la traduction légale : à quelques réserves près, l’exi-
gence démocratique est étrangère au droit international, qui
n’attend pas des organes de l’Etat qu’ils fassent preuve de leur
représentativité, mais de leur autorité » 203.
La jurisprudence internationale laisse apparaître à cet égard une
certaine évolution entre la position de l’instance arbitrale et celle de
la CIJ. Alors que la première acceptait d’examiner la question de la
représentativité du représentant de l’Etat — en l’occurrence le chef
de l’Etat — à la lumière tant de l’ordre politique interne que de
l’ordre international, la seconde semble s’en tenir au principe de la
neutralité voire de l’indifférence du droit international vis-à-vis de
l’ordre interne de l’Etat, sauf exception prévue par le droit interna-
tional.
Dans l’affaire des Réclamations françaises contre le Pérou, le tri-
bunal arbitral fut amené à statuer sur la question de savoir si Nicolas
de Pierola, qui avait pris le pouvoir en décembre 1879 après la dis-
parition du gouvernement « légal », avait valablement exprimé la
volonté du Pérou en fixant la créance due par une compagnie fran-
çaise. Le tribunal répondit par l’affirmative dans les termes suivants :
88 Maurice Kamto
90 Maurice Kamto
92 Maurice Kamto
216. Arrêt du 5 avril 1933, CPJI série A/B nos 49-62, 1933, p. 73.
217. Ibid.
218. Arrêt du 10 octobre 2002, CIJ Recueil 2002, par. 317.
219. Ibid., par. 325, V, c).
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 93
94 Maurice Kamto
226. Voir Annuaire CDI, 1966, vol. II, op. cit., p. 12.
227. Ibid.
228. Ibid.
229. Ibid.
230. Voir intervention de M. Tounkine qui appuie sur ce point la position de
M. Ago (Annuaire CDI, 1965, vol. I, p. 28).
231. Ibid.
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 95
96 Maurice Kamto
98 Maurice Kamto
Chacun de ces termes n’a pas fait l’objet d’une définition. Sans
préjudice de leur signification en droit interne, leur emploi en droit
international se rapporte exclusivement à la façon dont l’acte inter-
national par lequel le consentement d’un Etat à être lié par un traité
est établi sur le plan international. Ils sont donc équivalents, en par-
ticulier quant à leurs effets juridiques.
Hormis les cas où le mode d’expression du consentement de l’Etat
à être lié par un traité est prévu par le traité lui-même, ledit consen-
tement doit être « établi », qu’il s’agisse du consentement par la
signature 244, l’échange d’instruments constituant le traité 245, la rati-
fication, l’acceptation, l’approbation 246 ou l’adhésion 247 : dans tous
ces cas, en effet, le consentement à être lié est considéré comme
exprimé lorsqu’il « est par ailleurs établi » que les Etats étaient conve-
nus que l’un ou l’autre de ces modes d’expression aurait un tel effet.
L’utilisation du verbe « établir » de préférence à un autre n’est pas
sans importance dans ces dispositions. Le projet d’articles de la CDI
de 1962 et de 1965 disait : lorsqu’il « ressort des circonstances » que
les Etats étaient d’accord pour donner un tel effet à l’acte considéré.
La nuance n’est pas négligeable. La vérification du consentement se
ferait, suivant cette dernière formulation, à la lumière des événe-
ments extérieurs, alors qu’au regard du libellé des articles pertinents
de la Convention de Vienne de 1969, qui reprennent en gros les dis-
positions du projet d’articles de la CDI de 1966, cette vérification
peut se faire aussi bien à partir de tels événements que de l’intention
de l’Etat. Cet élément d’intention est d’ailleurs l’unique critère à
prendre en compte lorsque le consentement de l’Etat est recherché
dans les pleins pouvoirs de son représentant 248. On verra combien il
est important dans la recherche de la volonté de l’Etat de s’engager
dans le cadre des accords en forme simplifiée 249.
A la Conférence de Vienne de 1968-1969, l’Italie avait proposé
sur ce point un amendement visant à faire adopter la formule :
« lorsque l’intention de l’Etat en question ... a été formellement
manifestée » 250. Cet amendement fut écarté à juste titre : la formule
244. Voir Convention de Vienne de 1969, art. 12, par. 1, al. b), et par. 2, al. a).
245. Voir art. 13, al. b).
246. Voir art. 14, par. 1, al. b).
247. Voir art. 15, al. b).
248. Voir art. 12, par. 1, al. c) ; art. 14, par. 1, al. d).
249. Voir infra, section II du présent chapitre.
250. Voir doc. A/CONF.39/C.1/L.70, Documents officiels de la Conférence,
p. 137.
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 99
est tautologique ou superflue dès lors que référence est faite à l’in-
tention.
Pour sa part, la Suisse avait proposé un amendement tendant à
l’insertion d’une disposition nouvelle (un article 11 bis) introduisant
une « règle supplétive » sur le point de savoir si, dans tous les cas, en
l’absence d’indication sur l’intention des Etats intéressés, le consen-
tement à être lié par un traité s’exprime par la signature ou par la
ratification. Cet amendement fut également écarté 251.
Quoi qu’il en soit, les instruments de ratification, d’acceptation,
d’approbation ou d’adhésion établissent le consentement de l’Etat à
être lié par un traité, soit au moment de leur échange entre les Etats
contractants, soit de leur dépôt auprès du dépositaire, s’il en est ainsi
convenu. Cette disposition de l’article 16 de la Convention de Vienne
amène à se poser la question de savoir à quel moment le consente-
ment à être lié par le traité est établi et prend effet à l’égard des
autres Etats contractants. Dans le cas de l’échange d’instruments, ce
moment est celui de l’échange. Dans le cas du dépôt auprès d’un
dépositaire, il ne fait aucun doute pour la CDI que « la règle générale
existante est que c’est l’acte même du dépôt qui crée le lien juri-
dique » 252, à moins que le traité n’en dispose autrement. Telle a été
l’opinion de la CIJ dans l’affaire du Droit de passage sur territoire
indien 253, que l’article 16 de la Convention a codifiée. Dans cette
affaire, la situation concernait le dépôt de déclarations d’acceptation
de la clause facultative en vertu de l’article 36, paragraphe 2, du
Statut de la Cour.
La volonté de l’Etat ne peut être présumée lorsqu’elle doit se
manifester par un consentement exprès. Dans le cas où une telle exi-
gence n’existe pas, l’intention peut être déterminante.
Dans les affaires du Plateau continental de la mer du Nord, le
Danemark et les Pays-Bas admettaient que, l’Allemagne n’étant pas
partie à la Convention de 1958 sur le plateau continental, cette
convention ne pouvait pas être « en tant que telle obligatoire », c’est-
à-dire qu’elle ne pouvait pas la lier contractuellement. Ils soutenaient
néanmoins que la Convention, ou son régime, en particulier son
article 6, était devenue obligatoire pour la République fédérale
254. Arrêt du 20 février 1969, CIJ Recueil 1969, p. 25, par. 27.
255. Ibid.
256. Ibid., p. 25, par. 28.
257. Ibid.
258. Ibid., pp. 25-26, par. 28.
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 101
1) Position du problème
L’acte juridique unilatéral est une catégorie d’actes aux contours
imprécis dans l’ordre juridique international, et certains auteurs émet-
tent même des doutes sur son existence 260. D’abord, il ne figure pas
au rang du droit applicable par la CIJ en vertu de l’article 38 de son
Statut. Ensuite, admettre l’existence d’actes unilatéraux reviendrait
à dire qu’une obligation juridique peut être créée d’une « manière
purement subjective » (« purely subjective way »), par un simple
acte de volonté 261 non concerté. Enfin, dans la mesure où la décla-
ration unilatérale de l’Etat est, soit une offre, soit une acceptation,
elle n’est en rien différente de l’offre ou de l’acceptation qui se mani-
festent dans le cadre d’une transaction bilatérale aboutissant à un
accord 262 tacite 263 dont il devient un élément constitutif 264. Après
tout, un traité n’est-il pas, de l’avis de certains auteurs, le résultat
d’actes unilatéraux convergents ? 265 Il n’y aurait donc pas lieu de
faire des « déclarations unilatérales » une catégorie d’actes juridiques
276. Arrêt du 20 décembre 1974, CIJ Recueil 1974, p. 267, par. 25.
277. Voir G. Venturini, « Attitudes et actes unilatéraux des Etats », Recueil des
cours, tome 112 (1964), p. 420.
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ment » 287. Comme la CIJ l’a réaffirmé dans l’affaire des Essais
nucléaires (Australie c. France), « [l]a forme n’est donc pas déci-
sive » 288, le droit international n’imposant pas dans ce domaine « des
règles strictes ou spéciales ». La Cour précise :
« qu’une déclaration soit verbale ou écrite, cela n’entraîne
aucune différence essentielle, car de tels énoncés faits dans des
circonstances particulières peuvent constituer des engagements
en droit international sans avoir nécessairement à être consi-
gnés par écrit » 289.
La définition précitée proposée par le rapporteur spécial de la CDI
contient à cet égard une redondance en raison de la référence faite à
la fois à la « volonté de l’Etat » et à son « intention ».
Comme on l’a montré au chapitre I du présent cours — et cela est
communément admis —, il ne peut y avoir de volonté sans inten-
tion ; celle-ci est consubstantielle à celle-là, en sorte qu’il y a lieu de
dire que la volonté ne peut se manifester sans intention. Par exemple,
si une promesse ou une protestation sont la manifestation de la
volonté d’un Etat, il n’est pas douteux qu’elles traduisent également
les intentions de cet Etat sur le plan juridique. Un Etat ne peut pro-
tester, ni promettre, s’il ne veut pas attacher à l’un ou l’autre de ces
actes un effet quelconque. Penser que l’Etat peut vouloir sans inten-
tion, c’est admettre qu’il peut vouloir sans vouloir. Autre chose est
de savoir si l’effet qu’il attache à l’acte est juridique ou politique,
c’est-à-dire si l’acte intentionnel qui est nécessairement un acte
volontaire visait à lier l’Etat juridiquement ou plutôt politiquement.
Divers autres éléments tels que le texte, le contexte, les circonstances
de la formulation de l’acte unilatéral permettront alors de déterminer
la portée de la volonté de l’Etat, c’est-à-dire l’étendue de son champ
intentionnel. Il aurait donc suffi de parler de la manifestation de
volonté non équivoque qui produit des effets juridiques.
Il arrive d’ailleurs qu’afin de lever tout équivoque sur son acte
l’Etat procède à la clarification de son intention. Cette clarification
peut être faite alors même que l’Etat n’a pas accompli la formalité
ultime exprimant de façon certaine son consentement à être lié, en
l’occurrence la ratification. L’acte de clarification apparaît à cet
290. Cette signature apposée par l’ambassadeur Scheffer au nom de son pays
intervenait ainsi le dernier jour ouvert à la signature. Voir Sean D. Murphy,
« Contemporary Practice of the United States relating to International Law »,
AJIL, 2001, vol. 95, no 2, pp. 397-400.
291. Voir Traités multilatéraux déposés auprès du Secrétaire général,
« Treaty », I, XVIII, 10, consultable sur le site http ://www.un.org/law/ice. A
noter qu’Israël a fait la même déclaration le 28 août 2002.
292. Pierre Buhler, « Les Etats-Unis et le droit international », Commentaire,
no 103, 2003, p. 553.
293. Frédérique Coulée, « Sur un Etat tiers peu discret : Les Etats-Unis
confrontés au statut de la Cour pénale internationale », AFDI, 2003, p. 44.
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312. Voir Victor Rodriguez Cedeño, Huitième rapport sur les actes unilaté-
raux, op. cit.
313. CIJ Recueil 1974.
314. CIJ Recueil 2002.
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d’Arabie saoudite aux chefs d’Etat de Qatar et Bahreïn qui les accep-
tèrent par lettres datées respectivement des 21 et 26 décembre 1987,
d’autre part, le procès-verbal de la réunion de 1990.
Si les parties étaient d’accord pour considérer les échanges de
lettres de décembre 1987 comme constituant un accord, Bahreïn sou-
tenait en revanche que
« le procès-verbal du 25 décembre 1990 n’est qu’un simple
compte rendu de négociation, ..., qu’il n’a par suite pas valeur
d’accord international et qu’il ne saurait dès lors fournir de
base à la compétence de la Cour » 321.
Dès lors la Cour était appelée à déterminer la nature juridique du
procès-verbal en question pour se prononcer sur sa compétence,
contestée en l’espèce.
En premier lieu, en s’appuyant sur l’article 2, paragraphe 1, lettre a),
de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, elle obser-
vera qu’un accord international peut prendre « des formes variées
et se présenter sous des dénominations diverses » 322. En ce sens, elle
avait déjà noté, dans l’affaire du Plateau continental de la mer
Egée (Grèce c. Turquie) :
« il n’existe pas de règle de droit international interdisant qu’un
communiqué conjoint constitue un accord international destiné
à soumettre un différend à l’arbitrage ou au règlement judi-
ciaire » 323.
En vue de déterminer si un tel accord avait été conclu, elle avait
tenu compte « avant tout des termes employés et des circonstances
dans lesquelles le communiqué avait été élaboré » 324. Elle procéda de
la même manière dans l’affaire Qatar c. Bahreïn et arrive à la conclu-
sion que le procès-verbal de 1990 « n’est pas un simple compte
rendu de réunion » contrairement à ce que soutenait Bahreïn 325.
En second lieu, la Cour a procédé à la recherche de l’intention des
parties, Bahreïn ayant fait valoir que les signataires du procès-verbal
« n’ont jamais eu l’intention de conclure un accord de cette nature ».
Bahreïn avait produit à cet effet une déclaration ex post de son
321. Arrêt du 1er juillet 1994, CIJ Recueil 1994, par. 22.
322. Ibid., par. 23.
323. CIJ Recueil 1978, p. 39, par. 96.
324. Ibid.
325. CIJ Recueil 1994, p. 121, par. 25.
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fie nullement qu’ils ne doivent pas être pris en compte lorsque cela
s’avère utile 335.
Dans l’affaire de la Délimitation de la frontière maritime
Guinée/Guinée-Bissau, le tribunal arbitral, examinant les travaux
préparatoires de la Convention de 1886 entre la France et le Por-
tugal, a considéré « comme révélateur que les rédacteurs aient pris
soin d’éviter [l’expression limite] dans le texte de l’article III » 336.
Bien que cet article ne fût pas en cause dans cette espèce, le tribunal
estima qu’il pouvait « au moins aider à mieux comprendre les
conceptions des rédacteurs de la Convention en matière de vocabu-
laire juridique » 337. Puis, analysant les dispositions mêmes de la
Convention, il relève que c’est le terme « frontière » qui figure dans
le texte définitif et que ce terme « frontière » est devenu « ligne de
démarcation » et non « limite ». Le Tribunal observe qu’il y a là
« l’effet d’une volonté manifeste dont il convient d’éclaircir le
sens » 338.
Mais, dans le silence, il présume de l’intention des négociateurs
et, considérant qu’une telle présomption a déjà été autorisée par
l’analyse de l’objet et du but de la Convention, le tribunal conclut
qu’elle devient « certitude si l’on replace cet instrument dans le cadre
des circonstances qui ont présidé à sa conclusion » 339.
Les moyens complémentaires d’interprétation ont donc joué un
rôle majeur dans la détermination de la volonté des parties dans la
présente espèce. Le tribunal poursuit d’ailleurs la recherche de l’in-
tention des parties en examinant leurs positions au moment de la
signature de la Convention. Il déclare y trouver des « faits objectifs »
qui, selon lui, expriment mieux que toutes spéculations sur « les
arrière-pensées » des deux gouvernements et conclut que, au regard
des circonstances de l’espèce telles qu’il les a décrites, la proposition
tendant à mentionner les eaux territoriales dans la Convention, aussi
subitement présentée que promptement retirée, « ne saurait constituer
une preuve de l’intention réelle des parties »340.
335. Voir notamment les arrêts rendus par la CIJ dans les affaires suivantes :
Actions armées frontalières et transfrontalières (Nicaragua/Honduras), compé-
tence et recevabilité, arrêt du 20 décembre 1988, CIJ Recueil 1988, pp. 85 ss. et
p. 89 ; Certaines terres à phosphates à Nauru, CIJ Recueil 1992, pp. 247 ss. ;
Ile de Kasikili/Sedudu, CIJ Recueil 1999, pp. 1074-1075, par. 46.
336. Sentence arbitrale du 14 février 1985, par. 72.
337. Ibid.
338. Ibid.
339. Ibid., par. 79.
340. Ibid., par. 82.
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345. Paul Reuter attribue cette pensée à Jules Basdevant : voir P. Reuter, « Le
traité international, acte et norme », étude publiée pour la première fois en 1987
dans le tome 32 des Archives de philosophie du droit et reproduite dans P. Reuter,
Le développement de l’ordre juridique international. Ecrits de droit internatio-
nal. Paris, Economica, 1995, p. 338.
346. Ibid.
347. Ibid., p. 339.
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si l’on peut convenir avec Sir Humphrey Waldock qu’il peut se faire
que la limite séparant l’interprétation du traité de sa modification
tende à s’estomper 355, l’on doit néanmoins distinguer ces deux
aspects : la fonction première de l’interprétation est le dévoilement
du sens et de la portée exacts d’une règle par la recherche de l’in-
tention des parties, alors que la modification est l’expression d’une
volonté nouvelle par rapport au traité existant. La modification est
nécessairement normative, elle n’est que cela, alors que l’interpréta-
tion peut être soit constatative, soit le cas échéant normative ; dans
le cas où une pratique subséquente joue le rôle de moyen d’interpré-
tation, elle est essentiellement confirmative dans la mesure où elle
permet de déceler l’intention initiale des parties. Autrement dit, en
tant qu’indice de la volonté authentique des Etats parties à un traité,
la pratique subséquente reste un moyen d’interprétation, et en tant
que source d’une volonté (obligation) nouvelle, elle donne naissance
à une norme juridique 356.
On peut distinguer deux aspects de la pratique subséquente per-
mettant de mettre en évidence l’incidence du comportement de l’Etat
sur sa volonté initiale exprimée dans un acte juridique ou par rapport
à une situation juridique existante : dans certains cas la pratique sub-
séquente conforte la volonté initiale exprimée formellement ; dans
d’autres cas elle modifie le texte du traité ou la situation juridique exis-
tante pour autant qu’elle traduit un accord tacite des parties. Il s’agit
dans un cas d’une pratique confirmative et de l’autre d’une pratique
infirmative ou modificative, la détermination de la volonté subsé-
quente de l’Etat se faisant par le jeu de l’acquiescement et du silence
que viennent fixer les mécanismes de la forclusion et de l’estoppel.
B. La pratique confirmative
Il se peut qu’une pratique subséquente vienne simplement confor-
ter la volonté déjà exprimée par l’Etat, soit dans un acte juridique,
357. Sentence publiée dans RGDIP, 1992, p. 476 ; obs. J. Basdevant, pp. 570-
571.
358. CPJI série B no 12, p. 24.
359. CPJI série A nos 20-21, p. 119.
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368. Arrêt du 12 octobre 1984, CIJ Recueil 1984, p. 305, par. 130.
369. Sur l’estoppel, parmi une abondante littérature, lire notamment M. Mac-
gibbon, « Estoppel in International Law », ICLR, 1958 ; D. W. Bowett, « Estop-
pel before International Tribunals and Its Relation to Acquiescence », BYBIL,
1957 ; Sir Gerald Fitzmaurice, « The Law and Procedure of the International
Court of Justice 1951-1954 : General Principles and Sources of Law », BYBIL,
1954. Dans la doctrine en langue française, de nombreux travaux abordent au
passage cette notion sans nécessairement lui être exclusivement consacrés.
370. Arrêt du 18 novembre 1960, CIJ Recueil 1960, p. 213.
371. Affaire Elettronica Sicula S.p.A (ELSI), arrêt du 20 juillet 1989, CIJ
Recueil 1989, p. 44.
372. CIJ Recueil 1984, p. 305, par. 130.
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373. Arrêt du 10 octobre 2002 (fond), CIJ Recueil 2002, par. 62.
374. Ibid., par. 63.
375. Ibid.
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C. La pratique modificative
La CDI avait prévu, dans son projet d’articles sur le droit des trai-
tés, un article 38 relatif à la modification des traités par une pratique
subséquente. Selon cette disposition, un traité pouvait être modifié
par la pratique ultérieure suivie par les parties dans l’application du
traité lorsque l’application « établit leur accord pour modifier les dis-
positions du traité ». La CDI attribuait ainsi une valeur interprétative
et modificative à la pratique subséquente 377. Cette hypothèse d’une
modification de facto n’écartait cependant pas l’exigence de la
volonté concordante des parties au traité puisqu’elle concerne les cas
où les parties, d’un commun accord, appliquent en fait le traité d’une
manière qui n’est pas prévue dans ses dispositions. Il s’agit en réa-
lité de l’hypothèse d’une révision non formelle 378 ou déguisée du
traité. Le droit international s’y prête bien plus que le droit interne
dans la mesure où il s’attache fort peu au formalisme dans les modes
d’expression de la volonté des Etats ; la souveraine volonté des Etats
peut s’exprimer sous une variété de formes et seule importe la déter-
mination de cette volonté 379.
Le projet de la CDI est devenu l’article 31 de la Convention de
Vienne de 1969 qui est la codification du rôle de la pratique dans la
395. Voir Sir Gerald Fitzmaurice, « The Law and Procedure... », art. préc.,
pp. 27 ss.
396. Voir l’opinion individuelle de Sir Gerald Fitzmaurice sur l’arrêt du
15 juin 1962 dans l’affaire du Temple de Préah Vihéar, CIJ Recueil 1962,
pp. 55 ss.
397. Voir J. Barale, « L’acquiescement en droit international public », article
préc., pp. 424 et 425.
398. Voir son opinion individuelle précitée, p. 63.
399. CIJ Recueil 1984, p. 309.
2-kamto.qxd 6/02/07 16:03 Page 139
est à distinguer de celle résultant du terme prévu 415. Elle est syno-
nyme de désuétude qui met un accent marqué sur le facteur temps.
La question est de savoir si désuétude ou caducité sont également
des termes synonymes de l’abrogation qui signifie l’extinction d’un
traité, d’une disposition d’un traité ou de tout autre acte normatif par
une décision ou un accord exprès ou tacite des parties. Sir Gerald
Fitzmaurice exposa des vues très éclairantes sur la question dans son
deuxième rapport sur le droit des traités :
« il n’existe pas de principe juridique général de prescription ou
désuétude des traités longui temporis selon lequel la caducité
des traités pourrait résulter simplement de l’écoulement du
temps »,
l’inapplication ou la non-invocation d’un traité pendant une longue
période par toutes les parties, ou le désintérêt manifesté par ces der-
nières à l’égard du traité,
« peut équivaloir à un accord tacite par lequel les parties déci-
deraient de ne pas tenir compte du traité ou de le considérer
comme expiré » 416.
La CDI suivit cette position et s’est gardée d’inclure la désuétude
dans son projet d’articles sur le droit des traités. A ce sujet, elle
releva dans son commentaire sur l’article 39, devenu l’article 42 de
la Convention de Vienne de 1969, que le fondement juridique de la
caducité ou de la désuétude comme cause d’extinction d’un traité est
« le consentement des parties de renoncer au traité, consente-
ment qui doit ressortir implicitement de leur attitude à l’égard
du traité » 417.
La position exprimée par le représentant de l’Iran à la Conférence
de Vienne selon laquelle « il est incontestable » que la caducité « met
fin à un traité sans qu’il soit besoin de l’annuler », et qu’« il en serait
ainsi d’un traité portant sur un mode de transport qui n’existe plus
actuellement » 418, est une appréhension incorrecte du phénomène. En
424. Voir notre intervention dans les débats consécutifs aux communications
sur « La notion de « pratique » en droit international » et « La pratique et la théo-
rie des sources du droit international », dans SFDI, colloque de Genève, La pra-
tique et le droit international, op. cit., pp. 115-116.
425. CIJ Recueil 1986, p. 109, par. 207.
426. Ibid., p. 109, par. 208.
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de certains Etats plutôt que celui d’autres. En effet, face à une viola-
tion persistante d’une norme coutumière certains Etats peuvent gar-
der un silence prudent cependant que d’autres afficheront un soutien
résolu au violateur persistant en fonction de leurs intérêts nationaux
propres ou de leurs relations privilégiées avec l’auteur de la viola-
tion. Parallèlement, il peut y avoir çà et là des condamnations indi-
viduelles ou régionales. C’est cette variété des situations qui se
dégage du tableau contrasté de l’attitude de la communauté interna-
tionale face à la pratique américano-britannique du recours à la force
au cours des années récentes 427.
Pour autant, la non-invocation de la responsabilité de l’auteur
d’un fait ou d’une « pratique » illicites ou le manque de volonté de le
poursuivre n’efface pas l’illicéité de son comportement ni la viola-
tion de l’obligation génératrice de la responsabilité. Le seul cas où
une violation persistante pourrait entraîner le cas échéant une modi-
fication ou un changement de règle serait celui où les membres de la
communauté internationale, soit dans leur ensemble, soit dans une
large majorité comprenant les Etats les plus représentatifs, expriment
des prises de position claires et concordantes face à des situations
similaires. Pour le reste une violation est une violation et ne devrait
générer une norme nouvelle que de façon exceptionnelle. La CIJ ^
ne laisse aucun doute à ce sujet dans l’affaire du Projet Gabcícovo-
Nagymaros (Hongrie/Slovaquie). Elle écrit :
« La Cour fait droit au principe ex injuria jus non oritur lors-
qu’elle conclut que les relations juridiques créées par le traité
de 1977 subsistent et ne sauraient en l’espèce être considérées
comme annulées par un comportement illicite. » 428
430. Jean Combacau, Le droit des traités (Que sais-je ?), Paris, PUF, 1991,
p. 99.
431. Voir P. Daillier et A. Pellet, Droit international public, 7e éd., Paris,
LGDJ, 2002, p. 267.
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soit établi qu’elles ont eu l’intention contraire 435. Il est bien entendu
que ces dispositions ne s’appliquent que si les deux traités sont en
vigueur et en application, autrement dit lorsque le traité n’a pas pris
fin et lorsque son application n’a pas été suspendue en vertu de l’ar-
ticle 59. Le facteur temporel peut-il avoir une quelconque incidence
dans ce cas ? En d’autres termes est-il possible qu’en cas d’incom-
patibilité le traité postérieur ne puisse pas abroger le traité antérieur
du fait que celui-ci a une durée indéfinie alors que le traité postérieur
a une durée limitée ? La CDI a dit qu’on ne saurait dire qu’il y a là
un principe général :
« Cela dépend entièrement de l’intention des Etats lorsqu’ils
ont conclu le second traité, et il est probable que, dans la plu-
part des cas, leur intention aura été d’annuler plutôt que de sus-
pendre le premier traité. » 436
Autrement dit, si la maxime lex posterior s’applique, ce n’est pas
en tant que principe général applicable indépendamment de la
volonté manifeste ou tacite des Etats, mais en vertu de cette volonté
même qu’il faut rechercher en l’occurrence dans l’intention.
La seconde situation prévue par le paragraphe 4 de l’article 30 est
celle où les parties à un traité antérieur ne sont pas toutes parties au
traité postérieur. Le projet d’articles de la CDI envisagerait alors
trois hypothèses, qui ont été ramenées à deux par la Conférence de
Vienne sans pour autant que soit atténuée la complexité du pro-
blème : dans une première hypothèse, il est prévu que dans les rela-
tions entre les Etats parties aux deux traités la règle applicable sera
celle énoncée au paragraphe 3, à savoir que, en cas d’identité du
cercle des contractants d’un traité postérieur et d’un traité antérieur,
celui-ci ne s’applique que dans la mesure où ses dispositions sont
compatibles avec les dispositions de celui-là ; la seconde hypothèse
prévoit que, dans les relations entre un Etat partie aux deux traités et
un Etat partie à l’un de ces deux traités seulement, le traité auquel
les deux Etats sont parties régit leurs droits et obligations réci-
proques, en vertu de la règle pacta tertiis nec nocent, car l’Etat qui
n’est partie qu’à l’un des deux traités est un Etat tiers par rapport à
l’autre traité. Cette seconde hypothèse écarte la confrontation dans le
temps des volontés étatiques avec elles-mêmes dans la mesure où
438. Ordonnance du 14 avril 1992, CIJ Recueil 1992, p. 126, par. 40.
439. Ibid., pp. 126-127, par. 42, 43 et 44.
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formellement res inter alios acta à l’égard des tiers, il n’en repré-
sente pas moins, comme l’a relevé le tribunal arbitral dans le diffé-
rend entre l’Erythrée et le Yémen sur la Souveraineté sur certaines
îles de la mer Rouge, « une réalité juridique qui affecte nécessaire-
ment les Etats tiers car ils ont des effets erga omnes » 445.
445. Sentence arbitrale du 9 octobre 1998, par. 153, Annuaire de droit mari-
time, 1998, pp. 580 ss.
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1) Clarification conceptuelle
2) Nature
La lex specialis (mais aussi le régime autonome) peut être soit une
norme ou un ensemble de normes d’application des règles générales
de droit international, soit une norme ou un ensemble de normes
dérogatoires aux règles générales de droit international, soit une
norme ou un ensemble de normes dérogatoires aux règles générales
de droit international et constituant vis-à-vis de celles-ci un régime
d’exception.
Comme norme d’application de la règle générale à une situation
particulière la lex specialis apparaît comme le prolongement de la
volonté initiale manifestée dans ou par rapport à la règle générale.
C’est une volonté nouvelle qui s’inscrit dans le sillon de la volonté
première dans le but de la prolonger, de la préciser parfois, de
l’adapter à une situation précise.
En tant qu’exception à la règle générale, la lex specialis est déro-
gatoire à cette dernière. Elle exprime une volonté en rupture avec la
règle générale qui paraît inadaptée et inadéquate par rapport à la
situation particulière régie par la règle spéciale. Dans ce cas la
volonté seconde ne prolonge pas la volonté première. Elle ne s’ins-
crit pas dans le sillon tracé par la volonté initiale. C’est une volonté
différente tant ratione temporis que ratione materiae : si la matière
est la même, elle n’est plus régie de la même manière. La contrariété
entre ces volontés successives de l’Etat est réglée par la maxime : lex
posterior priori derogat.
A la vérité, cette maxime n’est pas seulement une norme de règle-
ment des conflits des normes. Elle s’applique aussi bien dans le cas
où la lex specialis est considérée comme une application de la règle
générale que lorsqu’elle constitue une exception à cette dernière.
L’idée fondamentale qui sous-tend cette maxime est que la situation
particulière à laquelle s’applique la lex specialis étant plus précise et
pouvant être mieux appréhendée par l’Etat dans ses contours et ses
implications que la règle générale, la volonté exprimée par l’Etat
dans ce cas doit prévaloir sur la volonté qu’il a exprimée à propos
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448. Il écrit :
« What rules ought to be observed in such cases [i.e. where parts of docu-
ment are in conflict]. Among agreements which are equal . . . that should
be given preference which is most specific and approaches most nearly to
the subject in hand, for special provisions are ordinarily more effective
than those that are general » (De jure belli ac pacis, libri tres) (Book II,
Sect. xxix).
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a) La jurisprudence
Au détour d’un raisonnement dans son arrêt du 1er juillet 1952
dans l’affaire Ambatielos, la Cour internationale de Justice, confor-
tant une déclaration aux dispositions d’un traité, note « qu’une dispo-
sition particulière l’emportant sur une disposition générale, la décla-
ration devrait l’emporter sur l’article 29 du traité de 1926 » 450.
Mais c’est dans une jurisprudence récente que la règle a été affir-
mée à la fois comme un principe de portée générale et avec une par-
ticulière netteté. En effet, comme l’a indiqué le Tribunal internatio-
nal du droit de la mer (TIDM) dans l’affaire du Thon à nageoire bleue,
le principe lex posterior derogat priori est à la vérité « un principe
général de droit reconnu dans tous les systèmes juridiques » 451.
Ce principe prévaut tant en ce qui concerne les règles de fond
qu’en matière des règles de procédure ou de clauses de règlement
des différends, et aussi bien en droit conventionnel qu’en droit cou-
tumier. C’est du reste en droit coutumier que la CIJ consacra cette
règle pour la première fois, en 1960. En effet, dans l’affaire du Droit
de passage sur territoire indien (Portugal c. Inde), la Cour se trou-
vait en présence d’une situation où les rapports entre Etats voisins
n’étaient pas régis par des règles formulées de manière précise, mais
étaient « largement commandés par la pratique ». Autrement dit, il ne
s’agissait pas de relations à base conventionnelle, même si la règle
non écrite était consentie par les Etats en litige.
« Par conséquent, se trouvant en présence d’une pratique
clairement établie entre deux Etats et acceptée par les parties
comme régissant leurs rapports, la Cour doit attribuer un effet
décisif à cette pratique en vue de déterminer leurs droits et
obligations réciproques. Une telle pratique particulière doit
l’emporter sur les règles générales. » 452
453. Arrêt du 20 février 1969, CIJ Recueil 1969, p. 42, par. 72.
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454. Arrêt du 27 juin 1986, CIJ Recueil 1986, p. 137, par. 274.
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455. Avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Recueil 1996, p. 240, par. 25.
456. Arrêt du 17 août 1923, CPJI série A no 1, p. 23.
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b) Les traités
459. Arrêt du 24 mai 1980, CIJ Recueil 1980, p. 40, par. 86.
460. Une telle clause peut être libellée comme suit :
« Rien, dans la présente Convention, ne modifie les droits et obligations
des Etats parties au titre d’autres instruments juridiques existants » ;
ou encore :
« Les dispositions de la présente convention sont sans préjudice des droits
et obligations des Etats parties au titre d’autres instruments juridiques (exis-
tants). »
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461. Ces articles codifiés et adoptés dans leur totalité en seconde lecture par
la CDI en 2001 ont été adoptés par l’Assemblée générale des Nations Unies le
12 décembre 2001 sous la forme d’une résolution 56/83 : voir Documents offi-
ciels de l’Assemblée générale, cinquante-sixième session, supplément no 10 et
rectificatif (A/56/10 et Corr.1). Le texte complet de ces articles figure dans P.-M.
Dupuy, Les grands textes de droit international public, 4e éd., Paris, Dalloz,
2004, pp. 807 ss. Et pour le texte desdits articles accompagné de commentaires
de la CDI, voir James Crawford, La responsabilité de l’Etat pour fait interna-
tionalement illicite. Texte et commentaires, Paris, Pedone, 2004 ; il convient de
signaler que M. Crawford a été le dernier rapporteur spécial de la CDI sur la
question de la « responsabilité des Etats », et qu’à ce titre il lui est revenu de pré-
parer les commentaires discutés et adoptés par la Commission.
462. Entrée en vigueur le 29 décembre 1993 ; voir le texte de cette convention
dans P.-M. Dupuy, op. cit., pp. 814 ss.
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466. Sur l’attitude des Etats-Unis vis-à-vis de la CPI, que certains auteurs ont
tenté de justifier par la position unique de la superpuissance et ses responsa-
bilités particulières dans le contexte international, voir notamment David
J. Scheffer, « The United States and the International Criminal Court », AJIL,
vol. 93, 1999, pp. 12-22 ; Ruth Wedgwood, « The International Criminal Court :
An American View », EJIL, 1999, pp. 93-107. Plus radicale est la position de
John R. Bolton, « The Risks and Weakness of the International Criminal Court
from America’s Perspective », Law and Contemporary Problems, vol. 64, 2001,
pp. 167-180. On trouvera une analyse critique de la position américaine dans
G. Hafner, K. Boon, A. Rübesame et J. Huston, « A Response to the Ameri-
can View as Presented by Ruth Wedgwood », EJIL, 1999, pp. 108-123. Les posi-
tions américaines sont également présentées, entre autres auteurs, par Mahnoush
H. Arsanjani, « The Rome Statute of the International Criminal Court. » AJIL,
vol. 93, 1999, pp. 22-43 ; Flavia Lattanzi, « Compétence de la Cour pénale inter-
nationale et consentement des Etats », RGDIP, 1999, pp. 425-444.
467. Voir supra, chapitre II, section I, paragraphe 2, titre B.
468. Voir Frédérique Coulée, « Sur un Etat tiers peu discret : Les Etats-Unis
confrontés au statut de la Cour pénale internationale », article préc., p. 32.
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fait que l’Etat dont les individus en cause sont des ressortissants est
partie ou non au Statut de la CPI.
Ainsi, bien que les Etats-Unis ne soient pas partie au Statut, des
ressortissants américains auraient pu, en principe, être déférés devant
la CPI. C’est pour se prémunir contre cette perspective que ce pays
a engagé une véritable épreuve de force diplomatique pour que fût
incluse in extremis dans la Convention de Rome une clause permet-
tant de limiter la compétence de la CPI par le biais de la lex spe-
cialis. C’est le sens de l’article 98, paragraphe 2, de la Convention
de Rome qui dispose :
« La Cour ne peut poursuivre l’exécution d’une demande de
remise ou d’assistance qui contraindrait l’Etat requis à agir de
façon incompatible avec les obligations qui lui incombent en
vertu d’accords internationaux selon lesquels le consentement
de l’Etat d’envoi est nécessaire pour que soit remise à la Cour
une personne relevant de cet Etat, à moins que la Cour ne
puisse au préalable obtenir la coopération de l’Etat d’envoi
pour qu’il consente à la remise. »
En se fondant sur cette disposition, les Etats-Unis ont construit un
régime spécial dérogatoire à la Convention de Rome, sur la base
d’un réseau d’accords bilatéraux d’immunité. Il convient de rappeler
que, déjà, avant la formation et la densification de cette lex specialis,
le Gouvernement américain avait, aussitôt après sa « dé-signature »
de la Convention du 17 juillet 1998, négocié une résolution au
Conseil de sécurité 475 qui prévoit une exemption limitée d’une durée
d’un an pour les citoyens des Etats non parties à la Convention —
notamment les ressortissants américains — participant aux missions
de maintien de la paix des Nations Unies ou à des opérations autori-
sées par cette organisation.
Suite à cette pratique contestable au regard de la lettre et de l’es-
prit du Statut de la CPI, les Etats-Unis, sous l’administration du pré-
sident Bush, ont lancé une campagne internationale visant à signer
des accords bilatéraux d’immunité qui soustraient les ressortissants
américains à la compétence de la CPI 476.
Quel que soit le nombre de ces accords et leur force juridique
(signés et ratifiés ou signés et non encore ratifiés), il y a lieu de s’in-
486. On pense par exemple au traitement des prisonniers de guerre irakiens no-
tamment dans la prison d’Abou Graïb dont le scandale a fait le tour du monde.
487. Ces propositions faites par Human Rights Watch méritent attention : voir
« Lettre de Human Rights Watch demandant la résistance continue aux accords
d’impunité des Etats-Unis », 25 octobre 2002, www.hrw.org.
488. Voir Erik Rosenfeld, « Application of US Status of Forces Agreements to
Article 98 of the Rome Status », Washington University Global Studies Law
Review, vol. 2, 2004, pp. 273-293 ; spéc. p. 278.
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A. Volonté agissante
a) Réserves : formulation
490. CDI, Cinquième rapport sur les réserves aux traités, par le rapporteur
spécial Alain Pellet, doc. A/CN.4/508/Add.3 du 23 juin 2000, p. 5, par. 223.
491. Dictionnaire de droit international public, op. cit., p. 764.
492. Ibid., p. 303.
493. Sur la notion de formulation des réserves, voir Pierre-Henri Imbert, Les
réserves aux traités multilatéraux, Paris, Pedone, 1979, pp. 83-86 et 89-90 ;
J.-M. Ruda, « Réservations to Treaties », Recueil des cours, tome 146 (1975),
p. 179 ; et sur l’insistance de l’importance de cette notion dans l’approfondisse-
ment de l’étude du régime juridique des réserves et des déclarations interpréta-
tives, voir A. Pellet, Cinquième rapport sur les réserves aux traités, op. cit.,
pp. 5-34.
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dans la spécialité de son objet et de son but exclut toute réserve qui
ne serait pas acceptée par tous ; d’autre part, l’acceptation de la
réserve par l’organe compétent d’une organisation internationale,
lorsqu’il s’agit d’un acte constitutif d’une organisation internatio-
nale, sauf disposition contraire dudit acte.
Il convient de rappeler qu’en vertu du consentement qui est à la
base de tout traité ces limitations ne constituent nullement une
atteinte à la volonté de l’Etat désireux de faire une réserve. Cet Etat
peut d’autant moins s’en offusquer qu’il s’agit d’écarter toute possi-
bilité de contradiction d’une volonté avec elle-même, ce que rendrait
possible l’admission d’une réserve d’un Etat à un traité auquel il est
partie, mais qui interdit les réserves ou les conditionne à l’accepta-
tion de tous les autres parties audit traité.
L’interaction des volontés à la faveur des réserves autorisées se
traduit par un éclatement du régime juridique du traité : le même
traité met alors en présence des volontés croisées voire contradic-
toires agissant dans le cadre d’un même cercle conventionnel ; le
traité-norme devient un negotium éclaté ne tenant plus que grâce à
l’enveloppe formelle de l’instrumentum, traité-acte.
La réserve est donc une manifestation de volonté dérivée, pas
totalement nouvelle puisqu’elle se greffe à celle exprimée par
l’adoption des normes dont certaines font l’objet de la réserve. Il se
peut qu’elle affecte politiquement les autres Etats qui auraient sans
doute voulu que tous les Etats fussent parties au traité dans les
mêmes conditions. Mais elle n’affecte nullement leurs volontés juri-
diques : la situation de l’Etat qui ne formule pas de réserve, ni ne
l’accepte, n’est pas aggravée si l’Etat qui a formulé la réserve
devient partie au traité dans une mesure limitée, du fait de sa réserve.
Dans le cas où l’Etat qui ne formule pas de réserve n’aurait jamais
consenti à devenir partie au traité s’il avait su que l’autre Etat ferait
la réserve qu’il a faite, il n’est peut-être pas, comme l’a dit la CDI,
« déraisonnable de dire » que pour un Etat qui attache une telle
importance au maintien de l’intégrité absolue de telles ou telles dis-
positions le mieux serait
« de se protéger pendant l’élaboration du traité en faisant accep-
ter une clause interdisant expressément les réserves qu’il juge
tellement inacceptables » 500.
Mais cette solution n’en est pas vraiment une dans la mesure où les
réserves portent généralement sur des dispositions dont l’Etat réser-
vataire n’a pas pu obtenir la suppression ou l’inflexion de leur rédac-
tion dans un sens conforme à ses intérêts, sa volonté ayant été brisée
par des volontés plus fortes ou noyée dans la volonté majoritaire.
Qu’à cela ne tienne, l’Etat qui ne formule pas de réserve peut
empêcher le traité d’entrer en vigueur entre l’Etat réservataire et lui-
même en faisant objection à la réserve.
503. Sentence du 30 juin 1977, RSA, XVIII, pp. 161-162, par. 39.
504. Ibid., p. 162, par. 40.
505. Voir A. Pellet, Huitième rapport sur les réserves aux traités, op. cit.,
pp. 6-7, et les autres exemples mentionnés par le rapporteur spécial, pp. 7-8.
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c) Déclarations interprétatives
521. Voir P. Daillier et A. Pellet, Droit international public, 7e éd., op. cit.,
p. 294 ; Dictionnaire de droit international public, op. cit., p. 62.
522. Voir Annuaire CDI, 1966, vol. II, p. 56.
523. Convention de Vienne de 1969, art. 39.
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527. Voir CNUDI, Deuxième session, Documents officiels, op. cit., p. 78.
528. J. Combacau, op. cit., p. 116.
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juridique auquel il est partie. En cela le retrait est une action de pré-
servation de l’Etat. C’est un acte volontaire, délibéré.
L’article 54 de la Convention de Vienne de 1969 vise l’extinction
ou le retrait d’un traité en vertu des dispositions dudit traité 529 ou par
consentement des parties. Sa rédaction originaire telle qu’elle appa-
raissait à l’article 51 530 du projet d’articles de la CDI sur le droit des
traités a subi des modifications à la Conférence de Vienne. D’abord
à l’alinéa a), le comité de rédaction de la Conférence a mis au plu-
riel le mot « dispositions », estimant avec raison qu’il se peut qu’un
traité contienne plusieurs dispositions concernant son extinction ou
le retrait d’une partie 531. Ensuite, à l’alinéa b), en réponse à un
amendement des Pays-Bas 532 proposant la rédaction suivante : « à
tout moment, par consentement de tous les Etats contractants », le
comité de rédaction a estimé que les Etats contractants qui ne sont
pas encore parties au traité ne doivent pas avoir le pouvoir de déci-
sion lorsqu’il s’agit de mettre fin au traité ; mais qu’ils ont le droit
d’être consultés en la matière. Aussi s’est-il borné à ajouter, à la fin
de cet alinéa b), les mots « après consultations des autres Etats
contractants » 533. Il s’est alors posé la question de savoir comment
un Etat qui n’est pas partie au traité peut être un Etat contractant 534
dans le contexte de ce qui est devenu l’article 54 de la Convention de
1969. Cette question était fondée. A vrai dire, la distinction faite à
l’article 54, alinéa b), entre Etats parties et Etats contractants vise les
cas rares où un traité déjà en vigueur ne l’est pas à l’égard de cer-
tains Etats contractants qui ont exprimé leur consentement à être liés
par le traité, mais ont différé son entrée en vigueur en attendant l’ac-
complissement de certaines procédures. Dans ces cas, les Etats inté-
ressés ne peuvent pas prendre part à une décision sur la fin du traité,
mais ils ont le droit d’être consultés 535 ; ils demeurent néanmoins
des Etats contractants qui ne sont pas parties au traité pendant la
parenthèse où leur volonté exprimée sous forme de consentement à
être lié ne produit pas encore pleinement ses effets juridiques.
Dans sa substance l’article 54 de la Convention de Vienne de 1969
confirme le caractère fondamental de la volonté de l’Etat en droit des
traités. En l’occurrence, quelles que soient les dispositions d’un
traité relativement à sa propre extinction, il est toujours loisible à la
totalité des parties de convenir de mettre fin au traité. La forme que
peut revêtir cet accord est une question d’espèce ; elle est à régler
dans chaque cas, par les parties elles-mêmes. Il n’est point besoin
qu’il revête une forme particulière, car bien qu’on ait pu avancer une
théorie de ce genre inspirée de la pratique juridique interne, il faut
bien convenir, comme on l’a déjà rappelé, que le droit international
est très peu formaliste ; en l’occurrence il ignore la théorie dite du
« parallélisme des formes » ou de l’« acte contraire » 536. Seule inté-
resse, le droit international, l’assurance que le consentement de
l’Etat a été donné ; que sa volonté s’est exprimée. Peu importe la
forme.
En ce qui concerne la dénonciation ou le retrait d’un traité ne
contenant pas de dispositions relatives à l’extinction, à la dénoncia-
tion ou au retrait, s’applique la démarche classique : la volonté de
l’Etat sera mise en évidence à travers la recherche de l’intention.
L’article 56, alinéa a), de la Convention de Vienne de 1969 dispose
à cet égard que, en cas de silence d’un traité relativement à son
extinction, à la dénonciation ou au retrait, de tels actes ne sont pas
possibles, « à moins qu’il soit établi qu’il entrait dans l’intention des
parties d’admettre la possibilité d’une dénonciation ou d’un retrait ».
Le chapeau de cet article 56 met en évidence le principe de la stabi-
lité des traités. Celui-ci doit prévaloir en cas de silence du traité. Les
alinéas a) et b) qui suivent ce chapeau ne constituent donc que des
exceptions comme le montrent bien les mots « à moins que » qui les
B. Volonté fluctuante
Il est des cas où l’Etat se trouve confronté à des situations qui ren-
dent impossible le respect de ses engagements conventionnels. De
telles situations peuvent avoir pour effet, soit de paralyser temporai-
rement la volonté de l’Etat entraînant la suspension du traité, soit
d’anéantir cette volonté, rendant par suite définitivement impossible
l’application du traité.
Il s’agit de situations où les règles du droit des traités, bien que
« chronologiquement et logiquement » 546 premières et primaires, ren-
contrent dans leurs effets sur la volonté de l’Etat dans les traités les
règles de la responsabilité qui sont temporellement et logiquement
secondes et secondaires ; l’impossibilité d’exécuter un traité conduit
logiquement à sa non-application : celle-ci peut consister soit en une
suspension ou en une extinction du traité (règle du droit des traités),
soit en une violation du traité sans conséquence juridique pour l’Etat
en raison des circonstances rendant impossible l’application du traité
(règle du droit de la responsabilité).
Ces situations sont globalement de trois ordres : celles qui relèvent
de l’article 61 de la Convention de Vienne de 1969, où se mêlent
548. L’« événement fortuit » qui était associé à la « force majeure » dans les
premiers projets d’articles sur la responsabilité des Etats a été abandonné par la
CDI dans la version finale de son projet d’article en raison de la difficulté inso-
luble de distinguer les deux notions ainsi que la Commission l’avait déjà relevé
dans le commentaire sous l’article 31 (« Force majeure et événement fortuit »)
de la première partie de son projet d’articles adoptés en première lecture (voir
Annuaire CDI, 1979, vol. II (deuxième partie), pp. 122-133.
549. Voir Annuaire CDI, 1966, vol. II, p. 2.
550. Voir Documents officiels de la Conférence des Nations Unies sur le droit
des traités, doc. A/CONF. 39/14, p. 197, par. 531 a.
^
551. Voir affaire du Projet Gabcíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt
du 25 septembre 1997, CIJ Recueil 1997, p. 63, par. 102.
552. Voir Rapport de la CDI, cinquante-troisième session, Documents offi-
ciels, supplément no 10 (A/56/10), 2001, commentaire sur l’article 23, p. 196.
553. P. Reuter, op. cit., p. 165.
554. Annuaire CDI, 1979, vol. II (deuxième partie), pp. 122-133.
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555. P. Reuter, Introduction au droit des traités, op. cit., p. 166, par. 286.
556. Article 24 des « Articles sur la Responsabilité de l’Etat pour fait interna-
tionalement illicite ».
557. Article 25 des mêmes « Articles... »
558. Voir Rapport de la CDI, 2001, op. cit., p. 208.
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559. Arrêt du 25 septembre 1997, CIJ Recueil 1997, p. 42, par. 54.
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571. Voir P. Reuter, Introduction au droit des traités, 3e éd., Paris, PUF, 1985,
p. 167.
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576. Arrêt du 9 décembre 1978, CIJ Recueil 1978, p. 85, par. 36.
577. Pour une analyse allant dans ce sens, voir P. Reuter, Introduction au
droit des traités, op. cit., p. 168, par. 292.
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a) Droit intertemporel
b) Uti possidetis
591. Sur cette notion, qui a fait l’objet d’une abondante littérature, voir
notamment L. I. Sánchez Rodríguez, « L’uti possidetis et les effectivités dans les
contentieux territoriaux et frontaliers », Recueil des cours, tome 263, 1997, spéc.
pp. 236 ss. ; Marcelo Kohen, « L’uti possidetis revisité : l’arrêt du 11 septembre
1992 dans l’affaire El Salvador/Honduras », RGDIP, 1993, pp. 939-973 ; du
même auteur, Possession contestée et souveraineté territoriale, Paris, PUF,
1997, pp. 425-487 ; J. M. Sorel et R. Mehadi, « L’uti possidetis entre la consé-
cration juridique et la pratique : essai de réactualisation » AFDI, 1994, pp. 11 ss.
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592. Arrêt du 11 septembre 1992, CIJ Recueil 1992, p. 386, par. 41.
593. CIJ Recueil 1986, p. 568, par. 30.
594. Arrêt du 10 octobre 2002, CIJ Recueil 2002.
595. Arrêt du 12 juin 2005, CIJ Recueil 2005.
596. Nous avons fait cette remarque il y a plus d’une quinzaine d’années (voir
notamment notre note de lecture sur l’ouvrage de A. Benmessaoud Trendano,
Intangibilité des frontières coloniales et espaces étatiques en Afrique (Paris,
LGDJ, 1989), dans la Revue juridique africaine, 1990, no 1, pp. 139-140) sans
cependant réussir à faire changer cette terminologie malheureuse de l’« intan-
gibilité des frontières héritées de la colonisation », que la jurisprudence inter-
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nationale a consacrée dans divers arrêts par la suite (affaire Burkina Faso/Répu-
blique du Mali, CIJ Recueil 1986 ; affaire El Salvador/Honduras, CIJ Recueil
1992) alors que dans la résolution du Caire les Etats membres de l’OUA s’enga-
gent à « respecter les frontières existant au moment où ils ont accédé à l’indé-
pendance », ce qui a une signification différente.
597. Voir Marcelo Kohen, « L’influence du temps sur les règlements territo-
riaux », Le droit international et le temps, op. cit., p. 149.
598. CIJ Recueil 1992, p. 408, par. 80.
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226
CHAPITRE III
Volenti non fit injuria (« On ne fait pas tort à qui consent »).
Derrière la formulation de cet adage romain, il y a une présomption
que toute manifestation de volonté est l’expression réelle, libre, sou-
veraine de la puissance de vouloir. En vérité, il n’en est pas toujours
ainsi en pratique, et le droit international lui-même reconnaît qu’il
peut y avoir des cas où la volonté se manifeste sous l’empire de la
contrainte.
Mais la contrainte sous ses différentes formes ne constitue pas la
seule limite à la volonté de l’Etat. Certains modes de formation du
droit international sont porteuses de limites intrinsèques en tant
qu’ils soustraient l’engendrement de la norme à la volonté des Etats :
dans ces cas la création ou la constatation de la norme se fait sans la
volonté des Etats ou en dehors du champ de cette volonté.
1) Fourvoiement de la volonté
a) L’erreur
question car l’Etat concerné aura « cru ce qui ne l’était pas », parce
qu’il se sera trompé 613. Comme l’a exprimé la Cour internationale de
Justice dans un passage célèbre de l’arrêt qu’elle a rendu dans la pre-
mière phase de l’affaire du Temple de Préah Vihéar, « la principale
importance juridique de l’erreur, lorsqu’elle existe, est de pouvoir
affecter la réalité du consentement censé avoir été donné » 614. Telle
est la raison pour laquelle l’erreur est une cause de nullité (ou de
non-validité) du traité.
Le deuxième rapporteur spécial sur le droit des traités, Sir Gerald
Fitzmaurice, était assez confus sur le sens de cette notion. Selon lui,
« l’erreur commise par une partie seulement ne constitue pas
une cause de non-validité, à moins qu’elle ne résulte de
manœuvres dolosives, d’une représentation sciemment fausse,
d’une dissimulation ou non-révélation, ou de la négligence cou-
pable de l’autre partie » 615.
L’erreur comme vice de consentement était pour ainsi dire une erreur
dolosive. La seule exception où l’erreur retrouvait sa vraie significa-
tion, celle qui la distingue du dol, était, d’après lui, celle de l’erreur
commise par une partie qui n’a pas participé à la conclusion initiale
du traité multilatéral et touchant à la base même de la participation
ultérieure de ladite partie 616. Pour le reste, seule une « erreur
mutuelle et identique » pouvait à son sens entraîner la non-validité
du traité dès lors qu’elle empêche les parties de parvenir à un
consensus ad idem 617. Cette conception de l’erreur n’a été consacrée
ni par la Commission du droit international, ni par la jurisprudence,
ni par la Conférence de Vienne sur le droit des traités. En faisant du
dol un vice spécifique et autonome de consentement, la CDI a voulu
le distinguer nettement de l’erreur qui était une notion déjà bien éta-
blie en droit international. Rien n’empêche une partie d’invoquer
valablement l’erreur, en désaccord avec l’autre partie, à charge pour
elle d’en établir la preuve.
613. Voir P.-M. Dupuy, Droit international public, 7e éd., Paris, Dalloz, 2004,
p. 278.
614. Arrêt du 26 mai 1961 (exceptions préliminaires, CIJ Recueil 1961, p. 30.
615. Troisième rapport, de G. G. Fitzmaurice, rapporteur spécial, Annuaire
CDI, 1958, vol. II, p. 25.
616. Ibid. Il s’agit là, suivant une distinction opérée en droit privé, de
l’« erreur spontanée », qu’il faut distinguer de l’« erreur provoquée » par les
manœuvres dolosives d’un cocontractant.
617. Ibid., p. 37.
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frontière nord-est des Etats-Unis. Les négociateurs avaient fait coïncider les
frontières avec le lieu dit « highlands » alors qu’en fait il s’agissait d’un vaste
plateau matériellement insusceptible de servir de ligne de démarcation. Voir La
Pradelle et N. Politis, Recueil des arbitrages internationaux, 1905, I, pp. 306 ss.,
et P. Daillier et A. Pellet, Droit international public, 7e éd., p. 196.
622. Arrêt du 26 mars 1925, CPJI série A no 5, p. 30.
623. Voir présentation du projet d’article 12 (« Erreur et défaut de consensus
ad idem (effets) ») par Fitzmaurice dans son Troisième rapport, préc., p. 25.
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628. CIJ, mémoire de la République du Niger, août 2003, pp. 222 et 223.
629. Marcelo Kohen, Possession contestée et souveraineté territoriale,
op. cit., p. 281.
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b) Le dol
pas dans l’erreur : la tromperie. Seul l’Etat victime du dol peut donc
l’invoquer. En conséquence le dol, lorsqu’il est établi, n’entraîne la
nullité partielle ou totale du traité que pour ledit Etat, sauf dans le
cas d’un traité bilatéral où la nullité du traité pour une partie entraîne
également, ipso facto, l’inexistence du traité pour l’autre partie.
b) La contrainte
La crainte d’avoir à conclure des traités sous l’empire de la
contrainte était très perceptible à la Conférence de Vienne sur le
der si elle n’a pas acquis au fil du temps une valeur coutumière.
Quoi qu’il en soit, si la pression militaire visée par la Déclaration
n’entre pas dans le cas de contrainte prévue par l’article 52 de la
Convention de Vienne de 1969, elle ne saurait, pas plus que la pres-
sion politique ou économique, constituer une cause de nullité d’un
traité. Ces formes de pression relèvent des rapports de force sur les-
quels reposent les rapports entre Etats dans le cadre normal de la
légalité internationale.
Pour autant, on ne saurait dire qu’elles sont sans influence sur les
traités. Ce n’est pas parce qu’elles n’entraînent pas les mêmes effets
juridiques que les formes de contraintes consacrées par la Conven-
tion qu’elles n’affectent pas l’expression du consentement à être lié.
Mais, le droit ayant refusé d’y attacher des conséquences, les faits se
chargent de traduire les réserves de la volonté d’un Etat qui a conclu
sous l’empire des formes de pression visées par la Déclaration. C’est
au moment de l’application du traité que la volonté cherchera
à prendre sa revanche : l’application ne se fera pas de bonne foi ; de
manière générale elle ne sera possible que si à la pression pour con-
clure s’ajoute une pression pour exécuter. C’est l’enseignement que
l’on peut tirer des nombreux accords de paix ou de sortie de crise
signés entre des gouvernements et des forces rebelles — dans le
cadre de conflits internes — avec la caution d’Etats tiers et/ou
des organismes régionaux ou de l’ONU.
On peut faire état, à titre illustratif, de l’« Accord de Linas-
Marcousis » entériné par une conférence des chefs d’Etat réunie à
Paris. L’Accord de Linas-Marcousis a été conclu par les forces poli-
tiques et les rebelles ivoiriens rebaptisés « Forces nouvelles » pour
les rendre « présentables » lors d’une table ronde qui s’est tenue dans
cette localité française du 15 au 23 janvier 2003 à l’invitation du pré-
sident de la République française. Cet accord mettait entre paren-
thèses une partie des institutions constitutionnelles ivoiriennes,
confiait l’essentiel du pouvoir exécutif à un « gouvernement de récon-
ciliation nationale » dirigé par un « Premier ministre de consensus »
inamovible jusqu’à la prochaine élection présidentielle à laquelle il
ne pourra se présenter, et ouvrait un immense chantier législatif
touchant à des questions essentielles de la vie politique ivoirienne
(élections, nationalité, etc.). L’Accord prévoyait un comité de suivi
composé notamment de représentants de diverses organisations et
institutions internationales, d’un représentant des pays du G8, d’un
représentant de la France, mais aucun représentant de l’Etat de Côte
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d’Ivoire 651. Autrement dit, ce dernier était mis sur un même plan que
les forces rebelles qui avaient pris les armes contre le gouvernement
de ce pays. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le président de
l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire présent à la table ronde de
Linas-Marcousis se retira de cette rencontre.
L’Accord de Linas-Marcousis fut approuvé par la Conférence des
chefs d’Etat sur la Côte d’Ivoire qui s’est tenue à Paris du 25 au 26
janvier 2003 et à laquelle prit part le chef de l’Etat ivoirien. Manifes-
tement ce dernier accepta les « Conclusions » de cette conférence
sous la pression politique et peut-être même économique et militaire
des organisations internationales présentes (ONU, Union européenne,
Union africaine, Organisation internationale de la Francophonie, Com-
munauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO))
et surtout du pays hôte. Traité parfois à la limite de la courtoise, le
président ivoirien consentit sans accepter. Comme la suite l’a montré
à suffisance, l’Etat ivoirien qu’il représente au premier chef ne tien-
dra pas sur le terrain les engagements ainsi souscrits en dépit des
pressions et menaces de sanction des Nations Unies. La volonté
qui s’est engagée sous les pressions s’est rebellée une fois sa liberté
retrouvée.
« posé » par la volonté des sujets qui le génèrent par leurs activités et
auxquels il s’applique 653.
Ce droit sans l’Etat qui à l’origine n’apparaissait pas vraiment
comme un défi à la volonté des Etats traduit aujourd’hui l’impuis-
sance de ces derniers dans un contexte de mondialisation. Il s’agit
d’un droit d’une économie néolibérale débridée, qu’insupportent les
contrôles, entraves ou bornes étatiques quels qu’ils soient, et que
tend à consolider une jurisprudence arbitrale qui, surprenant des
règles classiques bien établies, tend à imposer à l’Etat un arbitrage
sans convention spécifique, un consentement récent et actuel de
l’Etat par rapport à un différend précis.
1) Position du problème
peut plus se prévaloir des dispositions de son propre droit pour décli-
ner la compétence de la jurisprudence arbitrale, il ne peut non plus
invoquer son immunité juridictionnelle pour se soustraire à l’arbi-
trage ; au contraire, il peut systématiquement être attrait dans la pro-
cédure arbitrale aux côtés de l’entité publique qui relève de son auto-
rité. En fait, il est parfois contraint à l’arbitrage dans des conditions
discutables, par l’invocation de sa volonté piégée conventionnelle-
ment ou dans son propre acte unilatéral.
En dehors des traités et des actes unilatéraux qui sont des instru-
ments normatifs formels par lesquels se manifeste la volonté des
Etats, le droit international émerge par d’autres voies où le rôle de la
volonté de l’Etat paraît absent du moins dans l’étape ultime de for-
mulation ou de constatation de la norme. Il se peut que dans certains
cas cette volonté soit présente dans la formation de la norme mais
dans des conditions qui ne sont pas toujours aisées à repérer : c’est le
cas dans la formation de certaines normes coutumières. En revanche,
dans d’autres cas, la volonté des Etats paraît totalement étrangère à
l’émergence de la règle de droit international. Celle-ci est identifiée
ou formulée à la faveur d’une volonté étrangère aux Etats, et qui
pourtant s’impose à eux d’une façon ou d’une autre, soit en raison de
la puissance institutionnelle qui la sous-tend : c’est le cas des prin-
cipes généraux de droit et du droit ainsi que de la jurisprudence ; soit
en raison de ladite puissance institutionnelle appuyée sur l’autorité
d’un énoncé normatif émanant d’une autorité reconnue de la science
du droit : c’est le cas de la doctrine.
689. Voir D. Anzilotti, Cours de droit international, op. cit., p. 68, pour qui,
« l’accord tacite se manifeste dans la coutume ».
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jectif qu’est l’opinio juris trace de la volonté réfléchie des Etats par-
ticipants à la formation de la coutume. Car pour la doctrine volonta-
riste la coutume ne peut se former en dehors de cette volonté délibé-
rée qui fait de la norme coutumière un acte posé et non pas supposé
ou constaté. La coutume serait ainsi la manifestation d’un consente-
ment implicite ; il s’agirait d’un accord tacite reposant sur les volon-
tés concordantes mais non explicites des Etats participant à l’émer-
gence d’une pratique constante.
Cette conception qui rapproche fortement coutume et accord
international, quand elle n’assimile pas l’une à l’autre, ramène la
coutume à une res inter alios acta. Elle trouve son principal appui
jurisprudentiel dans le fameux dictum de la CPJI dans l’affaire du
Lotus. Selon la Cour permanente :
« Les règles de droit liant les Etats procèdent de la volonté
de ceux-ci, volonté manifestée dans des conventions ou dans
des usages acceptés généralement comme consacrant des prin-
cipes de droit. » 692
On sait le rôle décisif que joua le président de la Cour perma-
nente, le juge Anzillotti, dans cette affaire : l’arrêt ne put être rendu
que grâce à sa voix prépondérante. Mais cette prise de position de la
Cour est restée quelque peu isolée dans la jurisprudence internatio-
nale ; elle a été sévèrement critiquée et on ne lui reconnaît qu’une
faible autorité 693.
Dans le même esprit, la Cour internationale de Justice dira à pro-
pos d’une coutume régionale ou locale que la partie qui invoque une
coutume de cette nature « doit prouver qu’elle s’est constituée de
telle manière qu’elle est devenue obligatoire pour l’autre partie » ;
pour ce faire elle doit prouver que la règle dont elle se prévaut « est
conforme à un usage constant et uniforme, pratiqué par les Etats en
question, et que cet usage traduit un droit » appartenant à l’Etat qui
revendique la règle coutumière et un devoir pour l’Etat qui la
conteste 694. Mais c’est bien dans les affaires du Plateau continental
de la mer du Nord que la Cour a systématisé la doctrine du Lotus en
laissant apparaître que c’est l’opinio juris, la conviction normative,
qui fonde en définitive la règle coutumière :
695. Arrêt du 20 février 1969, CIJ Recueil 1969, p. 44, par. 77.
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avant tout une violation d’une règle de droit dont les effets se heur-
tent à l’adage ex injuria jus non oritur.
703. Voir notamment P.-M. Dupuy, qui considère que la théorie du « droit
spontané » correspond le mieux à la réalité (« Théorie des sources et coutume
en droit international contemporain », Liber amicorum Eduardo Jiménez de
Aréchaga, Fondación de cultura universitaria, Montevideo (Uruguay), 1994,
p. 63) ; P. Daillier et A. Pellet, Droit international public, 7e éd., op. cit., pp. 324-
325.
704. G. Abi-Saab, « La coutume dans tous ses états, ou le dilemme du déve-
loppement du droit international général dans un monde éclaté », Le droit inter-
national à l’heure de sa codification. Etudes en l’honneur de Roberto Ago,
Milan, Giuffrè, 1987, p. 58.
705. Ibid., p. 59 ; voir aussi « Cours général de droit international public »,
Recueil des cours, tome 207 (1987), p. 176.
706. « La coutume dans tous ses états... », op. cit., p. 60, et « Cours général de
droit international public », op. cit., p. 176.
707. « La coutume dans tous ses états... », op. cit., p. 60.
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708. Arrêt du 12 avril 1960, CIJ Recueil 1960, p. 39 (l’italique est de nous).
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714. Selon Ian Brownlie, cette règle de l’inopposabilité d’une norme coutu-
mière en raison d’une objection persistante a été reconnue par les deux parties
en l’affaire des Pêcheries anglo-norvégiennes (CIJ Recueil 1951, p. 131) et par
des auteurs faisant autorité tels que G. Fitzmaurice, Recueil des cours, tome 192
(1957), pp. 99-100 ; H. Waldock, Recueil des cours, tome 106 (1962), pp. 49-50 ;
M. Sørensen, Recueil des cours, tome 101 (1960), pp. 43-44 ; E. Jiménez de
Aréchaga, Recueil des cours, tome 159 (1978), p. 30. Voir aussi O. Schachter,
Recueil des cours, tome 178 (1982), pp. 36-38. De façon générale elle est égale-
ment admise par la jurisprudence, ajoute-t-il : Droit d’asile, CIJ Recueil 1950,
pp. 277-278 ; Plateau continental de la mer du Nord, CIJ Recueil 1969, pp. 26-
27. Voir aussi l’opinion individuelle du juge Ammoun jointe à cet arrêt (p. 131)
et les opinions dissidentes du juge Lachs (pp. 235-238) et du juge ad hoc
Sørensen, p. 247.
715. G. Abi-Saab, « Cours général de droit international public », op. cit.,
p. 169 ; voir aussi : « La coutume dans tous ses états... », op. cit., pp. 53-65.
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716. CIJ Recueil 1969, p. 41, par. 71. Les analyses des rapports entre la cou-
tume et le traité suscitées par l’arrêt de 1969 ont fait l’objet d’une présentation
systématique par Eduardo Jiménez de Aréchaga dans son cours général de 1978
à l’Académie de droit international : « International Law in the Past Third of a
Century », Recueil des cours, tome 159 (1978), pp. 14-22.
717. Arrêt du 26 novembre 1984 (compétence et recevabilité), CIJ Recueil
1984, p. 424, par. 73. La Cour conclut que n’étant pas saisie en l’espèce de la
violation des dispositions des conventions multilatérales invoquées par les par-
ties mais des principes de droit coutumier, la réserve relative aux traités multila-
téraux contenue dans la déclaration américaine de 1946 ne permettait pas de
rejeter la demande du Nicaragua.
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718. Hans Kelsen. Ecrits français de droit international, op. cit., p. 74.
719. Voir infra, paragraphe 3 de la présente section.
720. Ch. De Visscher, « Problème d’interprétation judiciaire... », p. 219.
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723. Voir sur ce point Robert Kolb, La bonne foi en droit international. Contri-
bution à l’étude des principes généraux de droit, Paris, Genève, PUF/IUAE,
2000, pp. 29-43, et les nombreux auteurs qu’il cite à la page 30 ainsi que l’abon-
dante bibliographie des notes 136 à 193.
724. Voir par exemple P.-M. Dupuy, Droit international public, Paris, Dalloz,
2000.
725. Ibid., p. 3.
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742. Voir M. Virally, « Le rôle des « principes »... », op. cit., p. 201 et p. 206 ;
D. Carreau, op. cit., p. 244.
743. CPJI série B no 17, p. 32.
744. CIJ Recueil 1949, p. 22.
745. CIJ Recueil 1953, p. 19
746. Avis consultatif du 23 juillet 1923, CPJI série B no 5, p. 27.
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750. Avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Recueil 1996, p. 237, par. 18.
751. CIJ Recueil 1974 (fond), p. 24, par. 53.
752. Avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Recueil 1996, p. 237, par. 18.
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766. Voir G. Abi-Saab, « La coutume dans tous ses états... », op. cit., pp. 131-
132.
767. Ibid., p. 133.
768. Ibid.
769. Sur ce principe, voir P. Kovacs, « Développement et limites de la juris-
prudence en droit international », La juridictionnalisation du droit international,
op. cit., pp. 290 ss. Et, sur l’affirmation par la Cour de sa compétence au-delà du
consensualisme, voir Monique Chemiller-Gendreau, « Le droit international entre
volontarisme et contrainte », Mélanges offerts à Hubert Thierry. L’évolution
du droit international, Paris, Pedone, 1998, p. 102.
770. Voir M. Chemiller-Gendreau, op. cit., pp. 102-103.
771. Prosper Weil, Perspectives du droit de la délimitation maritime, Paris,
Pedone, 1987, p. 12.
772. Ibid.
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779. Voir R. Lillich, « The Rigidity of Barcelona Traction », AJIL, vol. 56,
1971, p. 531.
780. CIJ Recueil 1964, p. 63.
781. Quatrième rapport sur la protection diplomatique, de M. J. Dugard, rap-
porteur spécial, doc. A/CN.4/531, Genève, mai-juin-juillet 2003, p. 6.
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789. Cas de l’avis consultatif de la CPJI de 1923 sur les Décrets de nationa-
lité promulgués en Tunisie et au Maroc (entre la France et le Royaume-Uni),
CPJI série B no 4.
790. Cas de l’avis consultatif de la CIJ du 29 avril 1999 dans l’affaire
Cumarawamy, Différend relatif à l’immunité de juridiction d’un rapporteur spé-
cial de la Commission des droits de l’homme, CIJ Recueil 1999, p. 62, où les
parties se sont engagées à se conformer à l’avis émis conformément à l’ar-
ticle VIII, section 30, de la Convention de 1946 sur les privilèges et immunités
des Nations Unies.
791. P. Daillier et A. Pellet (Nguyen Quoc Dinh), Droit international public,
7e éd., p. 910.
792. Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le Territoire pales-
tinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004, CIJ Recueil 2004, par. 59 et 60.
793. Ibid., par. 62 ; Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires,
avis consultatif, CIJ Recueil 1996, p. 237, par. 62.
794. P. Daillier et A. Pellet, op. cit., p. 911.
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795. La question posée par l’Assemblée générale des Nations Unies à la CIJ
était la suivante :
« Quelles sont en droit les conséquences de l’édification du mur qu’Israël,
puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien
occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, selon ce
qui est exposé dans le rapport du Secrétaire général, compte tenu des règles
et des principes du droit international, notamment la quatrième convention
de Genève de 1949 et les résolutions consacrées à la question par le Conseil
de sécurité et l’Assemblée générale ? » (résolution ES 10/14 du 8 décembre
2003, CIJ Recueil 2004, par. 1).
796. Voir Mohammed Bedjaoui « The Reception by Nations Courts of
Decisions of International Courts », dans Th. Frank et G. Fox, op. cit., p. 26.
797. Voir notamment G. Bacot, « Réflexions sur les clauses qui rendent obli-
gatoires les avis consultatifs de la CIJ et de la CPJI », RGDIP, 1980, pp. 1027-
1067 ; R. Ago, « Les avis consultatifs « obligatoires », Mélanges M. Virally,
op. cit., pp. 9-24.
798. CIJ Recueil 2004, par. 163, alinéa 3, lettre A.
799. Ibid., alinéa 3, lettre B.
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qu’il est « dans l’obligation de réparer tous les dommages causés par
la construction du mur dans le territoire palestinien occupé... » 800
On le voit bien, la Cour devient prescriptive. Et, du reste, elle l’est
non seulement pour les protagonistes du conflit israélo-palestinien,
en particulier pour Israël, mais aussi pour les Etats tiers. C’est que la
Cour observe que parmi les obligations violées par Israël figurent
des obligations erga omnes dont tous les Etats peuvent être considé-
rés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient pro-
tégés 801. En l’occurrence, l’obligation qu’ont tous les Etats de veiller
au respect de ces droits emporte obligation pour eux de ne pas
reconnaître la violation du droit international perpétrée par Israël à
travers la construction du mur. La Cour écrit :
« Tous les Etats sont dans l’obligation de ne pas reconnaître
la situation illicite découlant de la construction du mur et de ne
pas prêter aide ou assistance au maintien de la situation créée
par cette construction ; tous les Etats parties à la quatrième
Convention de Genève relative à la protection des personnes
civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, ont en outre l’obli-
gation, dans le respect de la Charte des Nations Unies et du
droit international, de faire respecter par Israël le droit interna-
tional humanitaire incorporé dans cette convention. » 802
Ainsi, les Etats se trouvent-ils liés ou peuvent-ils se voir imposer
une règle de droit formulée ou dégagée en dehors d’eux ; c’est-à-dire
sans leur participation ni leur consentement, ni à leur requête. Qui
plus est, ils sont tenus par des avis donnés en matière non conten-
tieuse dans lesquels ni eux-mêmes ni les Etats directement parties à
un conflit n’ont sollicité la juridiction de la Cour pour trancher le
différend.
813. Arrêt du 25 septembre 1997, CIJ Recueil 1997, p. 40, par. 51.
814. Ibid.
815. Ibid.
816. Ibid., p. 41, par. 53.
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817. Arrêt du 25 septembre 1997, CIJ Recueil 1997, p. 41, par. 52.
818. Ibid., p. 42, par. 54.
819. Ibid., p. 54, par. 79.
820. Ibid., p. 72, par. 123.
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l’affaire. Mais quel eût pu être l’effet d’une telle contestation dès
lors que la règle est réputée être du droit coutumier ? La volonté de
l’Etat n’avait point de part dans ce processus de formulation de la
norme. Même si c’est la Cour qui a « déclaré » cette norme, il faut
bien convenir qu’elle est d’origine doctrinale.
Plus récemment, dans l’affaire de la Frontière terrestre et mari-
time entre le Cameroun et le Nigeria, pour réfuter l’argument du
Nigeria selon lequel l’article 7, paragraphe 2, de la Convention de
Vienne sur le droit des traités vise uniquement la manière d’établir la
fonction d’une personne en qualité de représentant d’un Etat, et non
l’étendue de ses pouvoirs lorsqu’elle exerce cette fonction de repré-
sentation, la Cour s’est appuyée sur les travaux de la CDI en relevant
que :
« dans son commentaire sur ce paragraphe 2, la Commission du
droit international indique expressément que « les chefs d’Etat
... sont considérés comme habiles à représenter leur Etat pour
accomplir tous les actes relatifs à la conclusion d’un traité »
(paragraphe 4 du commentaire sur ce qui était alors l’article 6
du texte préliminaire de la Convention, Annuaire de la Commis-
sion du droit international, 1966, vol. II, p. 20) » 821.
On ne peut certes pas surestimer le rôle de la doctrine dans la for-
mation du droit international, en particulier celle des individus,
auteurs réputés, même si, en s’y référant abondamment les parties
aux procès internationaux lui ouvrent la voie de l’influence sur le
juge 822. La CIJ reste mesurée et exigeante dans le recours à la doc-
trine par rapport à certaines instances arbitrales qui sont apparues
plus enthousiastes à cet égard 823.
Il n’en demeure pas moins, au regard des développements qui pré-
cèdent, que la doctrine joue un rôle non négligeable, même en
droit international contemporain, dans la formulation de ses règles,
leur détermination et leur précision hors du champ de la volonté des
Etats.
824. Voir affaire de l’Ile de Palmas (sentence arbitrale, 4 avril 1928, RSA, II,
p. 831) ; affaire des Zones franches de la Haute-Savoie et du Pays de Gex
(ordonnance 19 août 1929, CPJI série A no 22 ; arrêt du 7 juin 1932, CPJI série
A/B no 46) ; affaire des Concessions Mavrommatis en Palestine (arrêt du 30 août
1924, CPJI série A no 2, p. 19) ; affaire relative à la Juridiction territoriale de la
Commission internationale de l’Oder (avis consultatif, 10 septembre 1929, CPJI
série A no 23, p. 19) ; affaire de l’Ile de Clipperton (sentence arbitrale, 28 janvier
1931, RSA, vol. II, p. 1105) ; affaire des Forêts du Rhodope central (sentence
arbitrale, 29 mars 1933, RSA, vol. III, p. 1405) ; affaires du Plateau continen-
tal de la mer du Nord (arrêt du 20 février 1969, CIJ Recueil 1969, pp. 25-26,
par. 28) ; affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigeria (arrêt du 10 octobre 2002, CIJ Recueil 2002, par. 55).
825. Annuaire CDI, 1966, vol. II, p. 54.
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828. Cet amendement fut adopté par 44 voix contre 19, avec 31 abstentions,
et l’article 31 sur lequel il portait par 99 voix contre zéro, avec une abstention,
ibid.
829. CPJI, 1929, série A no 22, pp. 18 et 19 ; ibid., 1932, série A/B no 46,
p. 141.
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effet. L’existence d’un droit acquis en vertu d’un acte passé par
d’autres Etats est donc une question d’espèce ; il s’agit de
constater si les Etats qui ont stipulé en faveur d’un autre ont
entendu créer pour lui un véritable droit que ce dernier a
accepté comme tel. » 830
La Convention de Vienne de 1969 prévoit à cet égard les mêmes
conditions pour les droits créés au profit d’Etats tiers que pour les
obligations mises à leur charge : un droit naît pour un Etat tiers des
dispositions d’un traité, premièrement, si les parties à ce traité enten-
dent, par cette disposition, lui conférer ce droit, et, deuxièmement, si
l’Etat tiers y consent. Jusque-là, ces dispositions de l’article 36 de la
Convention de 1969 correspondent grosso modo aux deux idées qui
sous-tendent l’article 35 de la Convention relatif aux obligations
pour l’Etat tiers.
Toutefois, il existe des nuances dans la formulation qui créent une
différence de régime entre les deux situations. D’abord, dans le cas
des obligations, le consentement doit se faire par écrit ; une telle exi-
gence de forme n’est pas requise en ce qui concerne les droits.
Ensuite, le consentement doit être exprès dans le cas des obligations,
alors que pour les droits il « est présumé tant qu’il n’y a pas d’indi-
cation contraire ».
L’article 32 du projet d’articles de la CDI, qui est devenu l’ar-
ticle 36 de la Convention de Vienne de 1969, s’arrêtait à cette idée.
La Conférence de Vienne de 1968 y a ajouté le membre de phrase :
« à moins que le traité n’en dispose autrement », que l’on retrouve
dans l’article 36 actuel. Cette formule donne à penser qu’un traité
pourrait, le cas échéant, poser les mêmes exigences de forme à
l’expression du consentement de l’Etat tiers pour les droits comme
pour les obligations.
Cet ajout est sans doute le résultat des débats importants qui
eurent lieu à propos des articles 30, 31 et 32 du projet de la CDI et
qui sont devenus les articles 34, 35 et 36 de la Convention de
Vienne. A la conférence diplomatique de Vienne, certains délégués
n’étaient pas convaincus du bien-fondé de la distinction entre les
règles applicables selon qu’il s’agit des obligations ou des droits
pour les tiers. Ainsi soutenait-on qu’une telle distinction « découle
d’études théoriques » car, selon « la pratique des Etats », un Etat
n’accepte aussi bien une obligation qu’un droit découlant d’un traité
auquel il n’est pas partie que « par une manifestation claire et non
équivoque de son consentement » 831. En prévoyant « le consentement
tacite, voire une présomption de consentement reposant sur la
conduite de l’Etat tiers en question », le projet d’articles de la CDI ne
reflétait donc pas, selon les tenants de cette position, la réalité dans
ce domaine 832. On fit remarquer également que l’exercice d’un droit
par un Etat tiers « nécessite son consentement exprès », au motif
qu’un avantage apparent pourrait créer pour cet Etat des obligations
et engagements auxquels il n’a pas expressément consenti 833.
D’autres délégués encore estimèrent que la présomption du consen-
tement de l’Etat tiers à un droit créé à son profit paraissait « dange-
reuse » dans la mesure où « elle introduit un élément d’incertitude »
susceptible de faire que l’Etat tiers devienne, « contre son gré, pré-
tendument partie au traité à la suite d’une négligence excusable » 834.
Bien que cette position fut appuyée par plusieurs pays 835, elle ne
triompha guère. Et pour cause. Un débat similaire avait déjà eu lieu
au sein de la CDI et le projet final reflétait la solution de compro-
mis approuvée par ses membres. En effet, certains membres de la
Commission, s’appuyant sur les travaux de doctrine, estimaient que
comme pour les obligations la création de droits pour un Etat tiers ne
peut se faire qu’au moyen d’un accord collatéral conclu entre l’Etat
tiers en question et les parties au traité ; car il ne ressortirait claire-
ment ni de la pratique ni de la décision dans l’affaire des Zones
franches — alors jurisprudence de référence en la matière — que
l’institution de la « stipulation pour autrui » soit reconnue en droit
international 836. A l’opposé d’autres juristes, parmi lesquels les
quatre rapporteurs spéciaux chargés du droit des traités, soutenaient
que rien en droit international n’empêche deux ou plusieurs Etats de
créer par un traité un droit en faveur d’un Etat tiers, si tel est leur
volonté ; « ce qui compte dans ce cas, c’est l’intention des parties
841. Voir article 4 du « Projet d’articles sur les clauses de la nation la plus
favorisée » adopté par la CDI à sa trentième session en 1978, Annuaire CDI,
1978, vol. II, deuxième partie. Droits des ressortissants des Etats-Unis
d’Amérique au Maroc, arrêt du 27 août 1952, CIJ Recueil 1952, p. 192.
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846. D. Anzilotti, Cours de droit international, op. cit., pp. 421 et 437.
847. Voir le Dictionnaire du droit international (Wörterbuch des Völker-
rechts), de Karl Strupp (Berlin, 1962, vol. III, p. 546), cité par M. Oussenko.
848. CIJ Recueil 1952, p. 109.
849. CNDUT, Deuxième session, Documents officiels, préc., p. 64.
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313
CHAPITRE IV
VOLONTÉ DE L’ÉTAT
ET ORDRE PUBLIC INTERNATIONAL
Section I. Prolégomènes
Parler d’« ordre public international » signifie qu’il existe en droit
international public un ensemble de
« règles d’importance fondamentale pour la communauté inter-
nationale dans son ensemble auxquelles les Etats ne pourraient,
à peine de nullité, déroger par des conventions contraires » 854.
Cette notion d’ordre public international marque la sortie du droit
international classique qui a prévalu jusqu’au début du XXe siècle, et
qui était exclusivement un droit de coordination des souverainetés.
Elle rompt avec la nature purement intersubjective des relations
interétatiques et du droit international, et laisse apparaître progressi-
vement un droit international objectif auquel les parties ne peuvent
déroger, parce que les obligations qu’il dévoile sont prises à l’égard
de la communauté internationale dans son ensemble. Par conséquent,
leur violation recevrait la sanction de la responsabilité, car il s’agi-
rait « de comportements portant atteinte, au moins autant qu’aux
droits subjectifs de tel Etat particulier, à un ordre public internatio-
nal » 855. Il apparaît bien en effet que l’on est sorti
A. Sacralisation de l’homme
862. Nicolas Valticos, « Diversité des effets des deux guerres mondiales... »,
op. cit., p. 73.
863. Voir article 1 de la Charte.
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B. Exaltation de l’humanité
872. Cité par Koïchiro Matsuura, Directeur général de l’UNESCO dans son
discours d’ouverture à la huitième session du CIB, dans Comité international de
bioéthique, Actes, septembre 2001, vol. 1, p. 83.
873. « Dédoublement du monde », RGDIP, 1996, no 2, pp. 313-320. L’auteur
écrit du reste que « l’humanité est un concept messianique » : La clôture du sys-
tème international. La cité terrestre, PUF, Paris, 1989, p. 43.
874. Juan-Antonio Carrillo-Salcedo, « Le concept de patrimoine commun de
l’humanité », Hommage à René-Jean Dupuy, op. cit., p. 65.
875. Ibid., et Juan-Antonio Carrillo-Salcedo, « La Cour pénale internationale : l’hu-
manité trouve une place dans le droit international », RGDIP, vol. 103, 1999, p. 24.
876. Juan-Antonio Carrillo-Salcedo, « Le concept de patrimoine commun de
l’humanité », Hommage à René-Jean Dupuy, op. cit., p. 65 ; voir aussi G. Abi-
Saab, « Humanité » et « Communauté internationale » dans la dialectique du droit
international », Mélanges R.-J. Dupuy, Paris, Pedone, 1991, pp. 1-12.
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Convention des Nations Unies sur le droit de la mer 877 signée le 10 dé-
cembre 1982 à Montego Bay. Ce concept est réaffirmé dans l’Ac-
cord du 24 juillet 1994 modifiant la partie XI de la Convention de
Montego Bay. On en trouve une autre illustration dans la Conven-
tion de Vienne du 22 mars 1985 pour la protection de la couche
d’ozone qui, dans la définition des termes « effets néfastes », fait
référence aux « matériaux utiles à l’humanité ».
Mais, c’est dès le lendemain de la seconde guerre mondiale que
l’on assiste à l’émergence d’une éthique de l’humain en droit inter-
national 878. Dès le 10 décembre 1948 en effet l’Assemblée générale
de la toute nouvelle organisation mondiale établie par la Charte de
San Francisco adopte la Déclaration universelle des droits de
l’homme. Son projet est d’élever tous les hommes bien qu’il y ait
lieu de douter qu’elle appréhendait en 1948 le genre humain dans sa
totalité 879.
Le traumatisme de la seconde guerre mondiale fit cependant évo-
luer le droit international dans un autre domaine : celui de la lutte
contre le génocide. Le 9 décembre 1948, un jour avant l’adoption de
la Déclaration universelle des droits de l’homme, fut signée la
Convention pour la prévention et la répression des crimes de géno-
cide. Après les génocides oubliés ou inavoués, le génocide juif avait
montré l’ampleur de la menace d’une telle pratique pour l’ensemble
de l’espèce humaine.
Par sa résolution du 11 décembre 1946, l’Assemblée générale des
Nations Unies avait déjà déclaré que « le génocide est un crime du
droit des gens », contraire à l’esprit et aux fins des Nations Unies et
vie pour autant que cela ne se fait pas « arbitrairement », et parce que
l’interdiction de la peine de mort n’est pas encore une règle univer-
selle, il met l’accent sur le respect de la dignité de l’homme vivant.
Ainsi, non seulement il proscrit la torture et les peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants (esclavage, servitude, travail forcé
ou obligatoire, etc.) (art. 7), mais encore il prescrit que toute per-
sonne privée de sa liberté soit « traitée avec humanité et avec le res-
pect de la dignité inhérente à la personne humaine » (art. 10).
De façon plus précise, l’article 2, paragraphe 2, de la Convention
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le
10 décembre 1984, dispose :
« Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit,
qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’ins-
tabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception,
ne peut être invoquée pour justifier la torture. »
L’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique ne peut non
plus être invoqué à cette fin. La Convention proscrit donc de façon
absolue cette pratique dégradante et inhumaine qu’est la torture, dont
l’article premier donne une définition très large.
Ces instruments juridiques de caractère universel, au rang desquels
la Déclaration universelle des droits de l’homme, irradient les instru-
ments juridiques régionaux de protection des droits de l’homme.
C’est le même homme, exalté, qui fait ici l’objet d’attentions parti-
culières sous-tendues par des garanties adaptées au contexte spéci-
fique des différentes régions du monde.
2) Dans la jurisprudence
887. Avis du 8 juillet 1996, CIJ Recueil 1996, p. 257, par. 79.
888. Voir P.-M. Dupuy, « Les « considérations élémentaires d’humanité » dans
la jurisprudence de la Cour internationale de Justice », Mélanges en l’honneur de
Nicolas Valticos. Droit et justice, Paris, Pedone, 1999, pp. 123-124.
889. CIJ Recueil 1996, p. 257, par. 78.
890. P.-M. Dupuy, « La situation des droits de l’homme et du droit humani-
taire dans les fondements du droit international contemporain » (thème 4 de la
Table ronde), La protection des droits de l’homme et l’évolution du droit inter-
national (colloque de Strasbourg de la SFDI), Paris, Pedone, 1998, p. 302.
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A. Position du problème
Il y a lieu de se demander si le concept d’humanité coïncide avec
celui de communauté internationale.
Certains auteurs leur donnent des contenus différents. Selon R.-J.
Dupuy,
« le concept d’humanité ... est plus vaste que celui de commu-
nauté : celle-ci ne rassemble que les contemporains ; l’humanité
se pense au-delà des vivants » 894.
En d’autres termes, la communauté internationale serait actuelle
alors que l’humanité serait transtemporelle 895.
On peut en douter : comme l’humanité, la communauté interna-
tionale est aussi celle d’aujourd’hui et de demain. Et, parce qu’elle
est pérenne, comme l’humanité elle est transtemporelle. En effet,
la communauté internationale ne s’épuise pas dans l’instant de son
identification. Elle peut évoluer dans sa composition et dans sa per-
ception du milieu international et des rapports internationaux. Pour
891. P.-M. Dupuy, « Les « considérations élémentaires d’humanité »... », op. cit.,
p. 118.
892. Ibid., p. 119.
893. Ibid., p. 120.
894. La clôture du système international. La cité terrestre, op. cit., p. 42.
895. Voir René-Jean Dupuy, « Communauté internationale et disparités de
développement. Cours général de droit international public », Recueil des cours,
tome 165 (1979), p. 220, et Juan-Antonio Carrillo-Salcedo, « Le concept de
patrimoine commun de l’humanité », Hommage à René-Jean Dupuy, op. cit.,
p. 65, qui reprend à son compte cette distinction.
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902. Voir première partie du Projet d’articles sur la responsabilité des Etats
adoptée en première lecture par la CDI, Rapport de la Commission du droit
international sur les travaux de sa quarante-huitième session, 6 mai-26 juillet
1996, Nations Unies, Documents officiels, supplément no 10 (A/S1/10).
903. Voir notamment Alain Pellet (« Vive le crime ! Remarques sur les degrés
de l’illicite en droit international », Le droit international à l’aube du XXe siècle.
Réflexions de codificateurs, Nations Unies, New York, 1997, pp. 287-316), qui,
sur ce point, défend une position plus radicale par rapport à celle de R. Ago
(ibid., p. 291), le rapporteur spécial de la CDI qui introduisit cette notion de
« crime international » dans le projet d’articles.
904. Voir Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de
sa quarante-troisième session, Assemblée générale, Documents officiels, supplé-
ment no 10 (A/56/10).
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C. Dans la doctrine
G. Scelle relevait déjà que « [l]a théorie des libertés individuelles
et collectives est à la base même du droit des gens » 905. Cette théorie
905. Précis du droit des gens, t. II, Sirey, Paris, 1934, p. 15.
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927. Voir Jean François Flauss, « La protection des droits de l’homme et les
sources du droit international », La protection des droits de l’homme et l’évolu-
tion du droit international, colloque de Strasbourg de la SFDI, Paris, Pedone,
1998, p. 24, qui fournit sur ce point la jurisprudence dont il est fait état ci-des-
sous.
928. Commission européenne des droits de l’homme, décision du 11 janvier
1961, Autriche c. Italie, requête no 788/60, Annuaire de la CEDH, vol. 4,
pp. 139 ss.
929. Cour européenne des droits de l’homme, arrêt du 18 janvier 1978,
Irlande c. Royaume-Uni, série A no 25, par. 239.
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traité en affirmant que l’article 103 constitue une exception aux prin-
cipes énoncés aux paragraphes 2 à 4 du même article applicables aux
traités successifs.
L’effet exact de l’article 103 sur les relations juridiques entre les
membres des Nations Unies et les Etats non membres est loin d’être
parfaitement clair. Mais, comme le relevait la CDI en 1966,
« la place que la Charte des Nations Unies occupe dans le droit
international contemporain est d’une telle importance, et les
Etats membres des Nations Unies constituent une part si consi-
dérable de la communauté internationale, qu’il paraissait
« indispensable » à la Commission de « réserver une place spé-
ciale » à l’article 103 dans le projet d’articles sur le droit des
traités » 960.
La CDI entendait ne préjuger en aucune façon de l’interprétation et
de l’application de l’article 103 par les organes compétents des
Nations Unies 961. Mais, comme on l’a vu, la pratique de ces organes
a consacré la « primauté » que la Commission lui a reconnue dans le
cadre de ce qui est devenu l’article 30 de la Convention de Vienne.
Les dispositions de cet article contribuent à asseoir l’idée d’une hié-
rarchie des normes internationales fondée sur le caractère objectif de
certaines règles contenues dans des conventions multilatérales qui,
compte tenu de leur objet et de l’étendue de leur champ d’applica-
tion « devraient bénéficier d’une position privilégiée dans l’ordre
juridique international » 962.
963. Voir Gionata P. Buzzini, « La théorie des sources face au droit interna-
tional général. Réflexion sur l’émergence du droit objectif dans l’ordre juridique
international », RGDIP, 2002-2003, p. 582.
964. H. Kelsen, « Théorie du droit international », p. 119 ; voir aussi, Théorie
pure du droit, p. 171.
965. Arrêt du 20 février 1969, CIJ Recueil 1969, pp. 39-40, par. 63 ; voir
aussi p. 28, par. 37 ; dans le même sens, Délimitation du plateau continental
entre la France et le Royaume-Uni, sentence arbitrale du 30 juin 1977, RSA,
vol. XVIII, p. 172, par. 62.
966. Voir arrêt du 12 octobre 1984, CIJ Recueil 1984, spéc. par. 110, 111,
112, 114, 191, 230.
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967. CIJ Recueil 1984, p. 265, par. 19 ; voir aussi l’affaire Elettronica Sicula
Sp.A (ELSI) (Etats-Unis d’Amérique c. Italie), arrêt du 20 juillet 1989, CIJ
Recueil 1989, p. 66 ; affaire de la Sentence arbitrale du 31 juillet 1989 (Guinée-
Bissau c. Sénégal), arrêt du 12 novembre 1991, CIJ Recueil 1991, p. 69, par. 48.
968. CIJ Recueil 1984, p. 424.
969. Dionisio Anzilotti, Cours de droit international, I, op. cit., pp. 87-88
(italique de l’auteur).
970. Georges Abi-Saab, « Cours général de droit international public »,
Recueil des cours, tome 207 (1987), pp. 197-203 ; voir aussi Gionata Piero
Buzzini, « La théorie des sources... », article préc., spéc. pp. 600 ss. (qui reprend
la thèse de G. Abi-Saab), et, du même auteur, « La « généralité » du droit inter-
national général. Réflexions sur la polysémie d’un concept », RGDIP, 2003,
pp. 381-404. Il y distingue la « généralité intrinsèque » liée au contenu, à la
formulation ou à la matière régie par la règle de droit, de la « généralité ex-
trinsèque » qui permettrait d’isoler conceptuellement la notion de « droit inter-
national général », ledit droit pouvant inclure des règles juridiques plus ou
moins individualisées, donc dotées d’un faible degré de généralité intrinsèque.
971. Voir Pierre-Marie Dupuy, « Le juge et la règle générale », RGDIP, 1989
(t. 93), pp. 509-597.
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977. Voir Commentaire de la CDI sur l’article 48 de son projet d’articles sur
la « Responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite », Rapport de la
Commission du droit international, cinquante-troisième session, p. 346.
978. Voir CPJI série A/B no 63, pp. 149-150.
979. Annuaire CDI, 1963, II, p. 54, par. 1.
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C. Le jus cogens
n’est point douteux. En revanche, dire que le jus cogens « ne vise pas
a priori à protéger des valeurs essentielles, mais à garantir l’intégrité
de régimes juridiques généraux » 995 est discutable. Sur le plan théo-
rique d’abord, les régimes généraux porteurs d’intérêts juridiques
généralisés ou objectifs peuvent être efficacement protégés au sein
du cercle des Etats parties à des conventions multilatérales ayant la
nature de traités-lois par des obligations erga omnes partes, ou de
façon plus générale par le droit international général 996. Sur le plan
historique et pratique, les normes de jus cogens consacrées ou sug-
gérées visent toutes à « protéger des valeurs humaines essentielles »
à travers ce qui pourrait y porter gravement atteinte 997.
De nos jours, le jus cogens est entré dans le droit international
positif, même s’il se heurte encore aux critiques de certains Etats et
de certains auteurs. Ses effets juridiques n’y sont pas étrangers : ils
modifient la structure de l’ordre juridique international en introdui-
sant dans son horizontalité un facteur de structuration verticale qui
limite la volonté de l’Etat en lui imposant des normes sans son
consentement voire contre sa volonté.
999. Voir, entre autres auteurs, J. Sztucki, Jus cogens and the Vienna Conven-
tion on the Law of Treaties. A Critical Appraisal, Springer-Verlag, Vienne, New
York, 1974, p. 94 ; Georg Schwarzenberger, International Law and Order,
Londres, 1971, p. 29, et, du même auteur, « International Jus cogens », Texas
Law Rewiew, vol. 43 (1964-1965), pp. 455 ss.
1000. Voir Report of the Sixth Committee to the General Assembly, doc.
A/5601, 6 novembre 1963, par. 18.
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recours à la force dans les relations avec d’autres Etats ou qui garan-
tissent les droits des minorités ethniques religieuses ou linguis-
tiques » 1010 de normes impératives. Il n’y a pas lieu de discuter outre
mesure de la portée juridique des avis rendus par cette commis-
sion : ils font partie de la pratique internationale, une pratique qui a
du reste été élaborée principalement à partir de la doctrine. Ils ne
constituent pas moins d’intéressants indicateurs de tendance de
l’évolution du droit international. Comme l’a relevé un tribunal
arbitral,
« les études sur la notion de jus cogens et l’identification des
normes ont souvent été influencées par des conceptions idéolo-
giques et par des attitudes politiques » 1011
souvent liées au contexte ; et il n’est pas certain que la Commission
pour l’ex-Yougoslavie ait toujours été à l’abri de ces influences car,
tiré du contexte dans lequel la Commission les a identifiées, le carac-
tère de normes impératives de certains droits tels que les droits des
minorités, est sujet à caution.
A vrai dire, le débat sur le point de savoir si le jus cogens est de
la lex feranda ou de la lex lata 1012 est aujourd’hui dépassé : le jus
cogens fait partie du droit positif. Le débat, s’il existe encore, porte
sur les modalités de détermination des normes de cette nature et les
conséquences de celles-ci sur la structure normative du droit interna-
tional.
1018. R. Quadri, « Cours général de droit international public », op. cit., p. 273.
1019. Ibid., p. 272.
1020. Martti Koskeniemi, From Apology to Utopia. The Structure of Interna-
tional Legal Argument, Helsinki, Lakimiesliiton Kustannus, 1989, p. 283.
1021. Voir « Droit des traités à la lumière de la Convention de Vienne. Intro-
duction », Recueil des cours, tome 134 (1971), p. 297.
1022. Voir « L’interprétation des traités d’après la Convention de Vienne sur
le droit des traités », Recueil des cours, tome 151 (1976), pp. 1-114.
1023. Op. cit., p. 323.
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raux qu’un traité est nul s’il est incompatible avec une règle de
jus cogens et d’attendre que la pratique des Etats et la jurispru-
dence des tribunaux internationaux mettent au point la pleine
teneur de cette règle » 1024.
Elle a bien eu raison, vu le rôle de ces deux facteurs dans l’émer-
gence des quelques normes de jus cogens aujourd’hui fermement
établies.
Dans l’avis consultatif du 28 mai 1954 sur les Réserves à la Conven-
tion pour la prévention et la répression des crimes de génocide
comme dans l’arrêt du 5 février 1970 en l’affaire de la Barcelona
Traction pointe encore vaguement l’idée de jus cogens. Mais, comme
on l’a vu, elle reste encore noyée dans la catégorie générale des
obligations erga omnes. En particulier dans son obiter dictum déjà
rappelé, la Cour distingue entre « les obligations des Etats envers
la communauté internationale dans son ensemble » 1025 et les autres.
La formule de l’article 53 de la Convention de Vienne est ici élargie
au-delà de la « communauté des Etats ». La liste des obligations
fournies par la Cour comme exemples d’obligations erga omnes a été
reprise par la CDI pour illustrer les obligations relevant du jus cogens.
Il s’agit
« de la mise hors la loi des actes d’agression et du génocide
mais aussi des principes et des règles concernant les droits fon-
damentaux de la personne humaine, y compris la pratique de
l’esclavage et de la discrimination raciale » 1026.
C’est dans l’affaire du Personnel diplomatique et consulaire des
Etats-Unis à Téhéran que la Cour s’est référée expressément au jus
cogens. Elle a considéré
« qu’aucun Etat n’a l’obligation d’entretenir des relations diplo-
matiques ou consulaires avec un autre Etat, mais qu’il ne sau-
rait manquer de reconnaître les obligations impératives qu’elles
comportent et qui sont maintenant codifiées dans les Conven-
tions de Vienne de 1961 et 1963 » 1027.
Dans son avis consultatif du 8 juillet 1996 sur la Licéité de la
1056. Voir Patrick Daillier et Alain Pellet (Nguyen Quoc Dinh), Droit inter-
national public, 7e éd., p. 220.
1057. Voir A. Cassese, op. cit., p. 118.
1058. Giorgio Gaja, « Jus Cogens beyond Vienna Convention », Recueil des
cours, tome 172 (1981), p. 283.
1059. Ibid., p. 283.
1060. Ibid.
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1062. Les cinq autres sont : légitime défense, contre-mesure en raison d’un
fait internationalement illicite, force majeure, détresse, état de nécessité.
1063. Le texte final du projet d’articles sur la « Responsabilité de l’Etat pour
fait internationalement illicite » a été adopté par la CDI le 9 août 2001 à sa 2709e
séance. Il est contenu dans le Rapport de la Commission du droit international
sur les travaux de sa cinquante-troisième session, Documents officiels, supplé-
ment no 10 (A/56/10), Nations Unies, New York, 2001, pp. 44 ss. (texte et com-
mentaires).
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1064. Voir Annuaire CDI, 1979, vol. I, Nations Unies, New York, 1980, p. 31.
1065. Ibid., p. 32.
1066. Ibid.
1067. Ibid., commentaire sous l’article 29.
1068. Ibid., pp. 33-53.
1069. Voir vol. I, pp. 153-170.
1070. Voir Rapport de la Commission du droit international, quarante-hui-
tième session, Documents officiels, supplément no 10 (A/51/10), Nations Unies,
New York, 1996, pp. 148 ss.
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B. Fondement du maintien
d’un article 20 (ancien article 29) sur le consentement
comme circonstance excluant l’illicéité
1080. Voir Paul Reuter, qui pense qu’il pourrait même prendre la forme
« d’un simple comportement », Annuaire CDI, 1979, vol. I, p. 34, et G. Gaja,
Annuaire CDI, 1979, vol. I, p. 153.
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1089. Voir son deuxième rapport, doc. A/CN.4/425/Add.1, pp. 4-18, par. 165-
180.
1090. Ibid., p. 10, par. 170, n. 394.
1091. Hans Kelsen, « Théorie du droit international public », Recueil des
cours, tome 84 (1953), pp. 12 ss. ; Théorie pure du droit, Dalloz, Paris, 1962,
notamment le chapitre VII : « L’Etat et le droit international. »
1092. Voir Claus Kress, « L’organe de facto... », article préc., p. 122, n. 122.
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384
CHAPITRE V
VOLONTÉ DE L’ÉTAT
ET JUSTICE INTERNATIONALE
1118. Jusqu’à l’année judiciaire 2002, la CIJ s’est prononcée sur des excep-
tions préliminaires dans vingt-deux affaires (voir CIJ Annuaire 2001-2002, n. 2,
pp. 213-214), soit une très grande majorité des affaires portées devant elle par
requête.
1119. CIJ Recueil 1994, par. 41, points 2, 3 et 4 du dispositif.
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1) Le principe
ladite requête. Si elles le font dans le délai fixé par la Cour, celle-ci
les entend ainsi que l’Etat désireux d’intervenir, avant de statuer 1165.
Il résulte de la jurisprudence de la Cour que ce droit d’objection à
la requête à fin d’intervention donne aux Etats parties à la procédure
principale un pouvoir de vouloir, d’une portée certes limitée puis-
qu’il peut être entériné ou non par la Cour. Mais cette volonté des
Etats parties au différend compte. Cela apparaît par une logique a
contrario de l’ordonnance rendue par la Cour le 21 octobre 1999 sur
la requête à fin d’intervention de la Guinée équatoriale dans l’affaire
de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria.
La Cour relève : « Considérant qu’aucune des parties ne s’oppose à
ce que la requête à fin d’intervention de la Guinée équatoriale soit
admise. » 1166
En renversant cette proposition on aboutit à l’idée que l’opposi-
tion des parties aurait probablement changé le raisonnement de la
Cour. Toutefois, on ne peut dire si cette seule volonté des Etats par-
ties aurait suffi à la Cour pour conclure au rejet de la requête à fin
d’intervention, ou si cette volonté ne peut produire un tel effet que
pour autant qu’elle s’accorde avec la propre appréciation de la Cour.
Certes, la Cour note plus loin, au paragraphe 16 :
« Considérant qu’au vu de la position des parties et des conclu-
sions auxquelles elle est elle-même parvenue la Cour estime
que rien ne s’oppose à ce que la requête à fin d’intervention
de la Guinée équatoriale soit admise. »
Mais quelle aurait été la décision de la Cour s’il y avait eu une
divergence entre la volonté des parties et les « conclusions » de la
Cour ? Il y a lieu de penser que l’intervention étant une procédure
incidente, comme pour toutes les questions de procédure, il revient à
la Cour de décider. L’article 84, paragraphe 2, dispose qu’en cas
d’objection elle entend l’Etat désireux d’intervenir ainsi que les par-
ties « avant de statuer » ; donc c’est bien elle qui statue.
1176. Pacta sunt servanda, parce que la compétence de la juridiction est tou-
jours fondée sur l’accord des parties au différend dont elle est saisie.
1177. Voir le texte de cet accord dans le document S/1994/402 (Nations
Unies).
1178. Voir le texte de cette déclaration conjointe dans le document
S/1994/657 (Nations Unies).
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Dans le système juridique interne, nul n’est trop fort pour s’oppo-
ser à l’exécution d’une décision de justice ou pour se soustraire à
l’autorité de l’Etat. Dans le système juridique international, l’Etat
peut paralyser l’exécution d’une décision de n’importe quelle juridic-
tion interétatique, y compris celle de l’« organe judiciaire principal
des Nations Unies » en la rejetant ou en compliquant sa mise en œuvre.
Du coup réapparaît la nature fondamentale de l’ordre juridique inter-
national que l’apparition d’un ordre public dans certains de ses pans
tend parfois à occulter : c’est un ordre d’Etats souverains reposant
sur un droit dominé, malgré tout, par la volonté de ses sujets.
L’évolution récente de la jurisprudence de la CIJ montre cepen-
dant un renforcement du pouvoir de la Cour et une mutation consé-
quente de la force de ses ordonnances en indication de mesures
conservatoires. Il en résulte parallèlement une limitation de la sou-
veraineté des Etats parties à un procès devant la Cour.
Mais en cas d’inexécution pour les arrêts comme pour les ordon-
nances la mise en œuvre du pouvoir de contrainte de la communauté
internationale est aléatoire parce qu’il s’agit d’un pouvoir sous
contrôle.
naux exécutent de bonne grâce les décisions rendues par les cours et
tribunaux internationaux, quand bien même ces décisions ne leur
agréent pas toujours. En général, la partie désavantagée par une déci-
sion manifeste son mécontentement par une pétition de principe
voire dans un silence diplomatique.
Toutefois, l’inexécution, ou le refus d’exécuter, n’est pas un phé-
nomène inédit. Si l’on note quelques cas en ce qui concerne les déci-
sions de la CIJ 1185, on ne trouve pas trace d’un précédent s’agissant
de celles de sa devancière 1186. En revanche, plusieurs cas ont été
relevés à propos des sentences arbitrales antérieures à la Cour per-
manente 1187.
Le refus d’exécution est le fait des Etats pour lesquels les déci-
sions rendues sont défavorables. La décision de rejeter la sentence
ou l’arrêt est un acte de volonté prenant généralement la forme d’une
protestation ou d’une déclaration. En l’occurrence, l’Etat va masquer
sa décision politique par des mobiles juridiques. Les motifs couram-
ment invoqués sont l’excès de pouvoir, la corruption d’un membre
du tribunal, la liberté prise par le tribunal par rapport à une règle
fondamentale de procédure ou la non-prise en compte de certains
faits ou considérations particulièrement importants aux yeux du per-
dant. C’est ce qui ressort de la littérature sur les cas de refus d’exé-
cution de sentences arbitrales 1188 et des rares cas de refus d’exécu-
tion des arrêts de la CIJ.
Ainsi, dans le Northeastern Frontier Dispute de 1831 entre la
Grande-Bretagne et les Etats-Unis, qui donna lieu au tout premier
cas de refus d’exécution, les parties avaient demandé à l’arbitre, le
roi des Pays-Bas, de tracer la frontière entre le Maine et Nova Scotia
suivant une des deux lignes prévues par le Traité de 1783. Mais l’ar-
bitre choisit une troisième ligne intermédiaire entre les deux. Les
Etats-Unis refusèrent d’accepter la sentence sur le motif de l’excès
de pouvoir, mais réglèrent l’affaire en 1842 par voie convention-
nelle 1189.
Dans l’affaire Pelletier de 1885, un citoyen américain avait été
poursuivi devant les tribunaux d’Haïti pour commerce d’esclaves
dans les eaux territoriales de ce pays, et avait été condamné et empri-
sonné. A la suite des plaintes des Etats-Unis, un tribunal fut institué
et se prononça en faveur de Pelletier au motif que la législation
haïtienne assimilant le commerce des esclaves à la piraterie était
contraire au droit international. Mais Haïti protesta contre cette
décision en arguant que l’arbitre avait considéré de façon erronée
que le droit haïtien ne s’appliquait pas parce que les faits avaient eu
lieu à bord d’un navire américain. Le secrétaire d’Etat américain,
T. F. Bayard, partagea l’opinion de Haïti et la sentence ne fut pas
exécutée 1190. Les deux parties étaient d’avis qu’il y avait eu une
mauvaise application du droit international positif par l’arbitre.
L’inexécution résultait donc de la volonté commune des parties.
Dans l’affaire de la Frontière entre la Bolivie et le Pérou, en 1907,
les parties avaient demandé à l’arbitre, en l’occurrence l’Argentine,
de dire à qui appartenait le territoire disputé, en vertu du principe de
l’uti possidetis tel qu’il existait en 1810 ; et si la documentation espa-
gnole disponible n’était pas concluante, de régler le différend ex
æquo et bono dans l’esprit de cette documentation. La décision ren-
due était plutôt favorable au Pérou. La Bolivie refusa de l’exécuter
pendant longtemps, motif pris de ce qu’une décision qui la privait
d’un territoire aussi étendu ne pouvait pas être équitable, mais aussi
de ce qu’il y avait eu excès de pouvoir de la part de l’arbitre 1191.
Diverses autres affaires territoriales et frontalières entre les Etats
d’Amérique latine ont abouti au non-respect des décisions rendues à
ces occasions et à la revendication de la nullité de ces décisions 1192.
1189. Voir Hyde, International Law, 2e éd., 1945, p. 1636, cité par O.
Schachter, op. cit., p. 3, n. 9.
1190. Voir Hyde, op. cit., p. 1640, n. 1, et p. 1641, n. 4 ; voir aussi Moore,
Digest and History of International Arbitrations to Which United States Has
Been a Party, 1757 H., Washington, 1898 ; O. Schachter, op. cit., pp. 3-4, n. 9.
1191. Voir Weiss, RGDIP, t. 135, 1910, p. 17 ; Carlston, The Process of Inter-
national Arbitration, New York, 1946, p. 160 ; O. Schachter, op. cit., p. 4, n. 9.
1192. Voir les exemples fournis par le professeur Oscar Schachter dans son
étude précitée, p. 5, n. 12, et aussi par E. K. Nantwi, op. cit., pp. 85-92.
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sional Measures », AJIL, 92, 1998, p. 684 ; M. Kamto, « Les interactions des
jurisprudences internationales et des jurisprudences nationales », SFDI, colloque
de Lille, op. cit., pp. 435-439.
1209. Arrêt du 27 juin 2001, CIJ Recueil 2001, par. 94.
1210. Ibid., par. 110.
1211. Affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigeria (Cameroun c. Nigeria), demande en indication de mesures conserva-
toires, ordonnance du 15 mars 1996, CIJ Recueil 1996, p. 21, par. 33.
1212. Ibid., p. 21, par. 30.
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1216. Voir sur ce point S. Rosenne, The International Court of Justice, 1957,
pp. 102-103 ; voir aussi Erhan Tungel, L’exécution des décisions de la Cour
internationale de Justice selon la Charte des Nations Unies, thèse, Imprimerie
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POUR CONCLURE