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MÉMOIRE EN DEMANDE
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1. Que le Tribunal est sans compétence rationae personae car TPS n'est pas un
investisseur étranger, Elexport n'a qu'une participation indirecte et minoritaire
dans le capital de TPS, et les droits attachés à cette participation n'ont pas été
violés;
2. a) Que le Tribunal CIRDI est sans compétence rationae materiae car le différend
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concerne les relations entre les provinces argentines et la société TPS, et qu'il
ne résulte donc pas de l'investissement de Elexport dans la société CGSA; b)
Que le tribunal CIRDI est sans compétence rationae materiae car le litige porte
sur l'application de la législation fiscale argentine et non sur l'application de
l'Accord de 1991;
3. Que le différend n'est pas (encore) né ou n'est pas (encore) réel, car la
procédure fiscale a été suspendue, et TPS n'a pas (encore) été contrainte de
s'acquitter de l'impôt litigieux;
4. Que la requête CIRDI est irrecevable car le différend a été porté devant les
juridictions argentines (exception electa una via, insérée dans l'article 8 de
l'Accord);
5. Que les conclusions tendant à la cessation de la procédure nationale sont
irrecevables car les Tribunaux CIRDI ont uniquement le pouvoir de constater la
responsabilité et, éventuellement, d'accorder des indemnités.
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CIJ, Barcelona Traction, 5 février 1970
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L’Argentine conteste ainsi le jus standi (la qualité pour agir) de la société
Elexport en arguant que cette société en tant qu’actionnaire minoritaire et indirecte de
T.P.S., ne peut pas demander le lancement d’une procédure arbitrale CIRDI.
En vertu de l’article 25, alinea 1 de la Convention de Washington de 1965, « la
compétence du Centre s’étend aux différends d’ordre juridique entre un Etat
contractant et le ressortissant d’un autre Etat contractant qui sont en relation directe
avec un investissement (...) ».
L’Argentine soulève dans le cas d’espèce l’impossibilité de l’actionnaire
minoritaire (Elexport) dans la société argentine (T.P.S.) de se prévaloir de l’Accord
entre l’Argentine et la République française de 1991 et de la Convention de
Washington de 1965, car Elexport n’est pas un investisseur direct dans le capital de
T.P.S.. Comme il est dit dans la présentation des faits, il n’y a pas de lien direct entre la
participation d’Elexport dans le capital et l’investissement lui-même. Dans un cas
comme le nôtre où ce lien est « si éloigné », le tribunal a une tendance à affirmer qu’il
est impossible de considérer que la participation indirecte et minoritaire d’un
investisseur est couverte par la clause arbitrale de TBI2.
Par conséquent, pour tous ces motifs l’Argentine demande au Tribunal de se
déclarer incompétent pour connaître du présent litige au titre de l’exception ratione
personae.
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Tribunal CIRDI, 30 avril 2004, LG&E Energy Corp. c. Argentine, ARB/02/1 ; Tribunal CIRDI, 14
janvier 2004, Enron Corporation and Ponderosa Assets c. Argentine, ARB/01/3, § 52-56
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CIRDI, 25 septembre 1983, Amco Asia Corp.et al. c. Indonésie (nouvelle requête), IRL, vol. 89,
pp. 379-402
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CIRDI, 10 janvier 2005, Consorzio Groupement LESI-DIPENTA c/ République algérienne
démocratique et populaire, ARB/03/08
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CIRDI, 29 novembre 2004, Salini Costruttori SpA et Italstrade SpA c. Jordanie, ARB/02/13
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argentine C.G.S.A. Cette dernière est en effet immatriculée en Argentine où elle a son
siège social. Bien que le capital de cette dernière soit détenu par les deux sociétés
étrangères G.F.Z. et I.G. qui sont elles-mêmes entièrement sous le contrôle de la
société Elexport, le CIRDI n’a pas lieu de se reconnaître compétent en l’espèce car il
n’y a pas là de « relation directe » entre les deux acteurs. Il serait inconcevable de
laisser Elexport agir en l’occurrence en tant qu’investisseur étranger ayant été affecté
par les mesures fiscales prises à l’égard de la société TPS. Le lien est bien trop éloigné,
et les deux sociétés n'ont donc rien à voir dans ce différent déjà cité.
Notons par ailleurs que le principe d’équité et d’égalité de traitement entre les
investisseurs (qu’ils soient étrangers ou nationaux) qui régit le Droit des
investissements, impose que la société TPS soit traitée de la même manière que les
autres investisseurs. Il est en l’espèce impossible de lui accorder un traitement
privilégié par rapport à ses obligations de paiement d’impôt car ceci serait contraire
au principe.
Or, il apparaît qu’en l’espèce TPS a refusé de s’acquitter de ses dettes fiscales
sous prétexte qu’elle en contestait la réalité des sommes et leur légalité. Nous
demandons donc à la partie adverse de nous apporter les preuves de ces allégations
en nous montrant en quoi les réclamations d’impôts impayés n’étaient ni justes ni
légales et en quoi TPS aurait été traitée de façon discriminatoire.
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Pour que la demande soit recevable, le différend doit être déjà né, corresponde
à une opposition réelle entre les parties et il doit diviser encore au moment du
jugement. Dans l’Affaire du Cameroun septentrional, la Cour Internationale a affirmé
qu’elle ne pouvait rendre des arrêts « qu’à l’occasion de cas concrets dans lesquels il
existe au moment du jugement un litige réel impliquant un conflit d’intérêts juridiques
entre les parties »6. En pratique, le CIRDI suit la jurisprudence de la Cour à ce sujet et
exige comme condition de recevabilité de la requête que le différend soit né, réel et
actuel.
Or en l’espèce, avant qu’Elexport saisisse le CIRDI, TPS a déclenché une
procédure judiciaire argentine, et l’Argentine a pris la décision de suspendre
l’exécution des dettes fiscales après que la Cour suprême argentine ait rendu une
ordonnance provisoire suspendant la collecte des impôts.
Dès lors, il n’y a pas de différend entre les parties dans la mesure où aucune
exécution n’a été mise en œuvre et dans la mesure où l’Argentine a accepté de suivre
l’ordonnance provisoire de la Cour suprême.
En effet, au moment où l’on vous parle TPS ne s’est pas acquittée de ses
dettes, elle ne se trouve donc pas en situation de cessation de paiement. De la même
manière, Elexport ne peut alléguer être la victime d’une expropriation indirecte dans la
mesure où dans les faits Elexport n’a pas encore subi la moindre perte.
Il est donc essentiel de ne pas prendre en compte la décision de collecter les
taxes mais au contraire de s’attacher au fait que la collecte en elle-même n’a pas eu
lieu. Dès lors, au moment de la saisine du CIRDI les parties ne sont pas divisées. Le
différend, s’il en est un, n’est pas actuel et la situation est en suspens.
Au contraire, il est important de souligner que l’Argentine a accepté de suivre
l’ordonnance rendue et ceci montre sa bonne foi et sa bonne volonté dans cette
affaire fiscale. Par ailleurs, il est important de noter que cette suspension met les
provinces argentines en situation difficile en les privant de recettes fiscales non
négligeables.
Enfin, il est possible d’envisager qu’Elexport obtienne satisfaction avant que le
CIRDI ait besoin de se prononcer. Dès lors, en l’espèce, le CIRDI est incompétent et il
n’est pas en mesure de s’intéresser au fond de l’affaire pour déterminer s’il y a eu ou
non violation de l’Accord de 1991. En effet, nous le répétons, nous avons affaire ici à
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CIJ, 2 décembre 1963, l’Affaire du Cameroun septentrional (exceptions préliminaires),
cameroun c. Royaume-Uni, Rec. 1963, pp. 15-39
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deux affaires parallèles qui en aucun cas ne sont amenées à se croiser.
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Elexport s’est engagée dans une voie de recours national de l’Argentine, impliquant la
poursuite du processus juridictionnel au terme du respect du système juridique
classique. De plus, en saisissant les juridictions internes, le demandeur s’est
désolidarisé consciemment de la procédure prévue par l’Accord de 1991.
En vue de tous ces arguments, l’Argentine demande au Tribunal de déclarer la
requête du demandeur irrecevable.
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Dans les Affaires Archer Daniels Midland Co. Et Tate Lyle Ingredients Americas,
Inc. c. Etats-Unis du Mexique10; Corn Products International, Inc. c. Etats-Unis du
Mexique11, le Centre aborde les questions de responsabilité de l'Etat et le calcul des
dommages et intérêts.
Dans l’Affaire LG&E Energy Corp, LG&E Capital Corp et LG&E International Inc.
c. République Argentine12, le CIRDI reconnaît la responsabilité de l'Argentine sur le
fondement de deux des quatre articles du BIT invoqués par l'investisseur. Il s'agit là
d'une décision sur la responsabilité uniquement.
De même, le Centre reconnaît la responsabilité de la RDC dans la prétendue
mauvaise application du droit applicable : Affaire Patrick Mitchell c. République
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CIRDI, Archer Daniels Midland Co. Et Tate Lyle Ingredients Americas, Inc. c. Etats-Unis du
Mexique, 20 mai 2005, n° ARB (AF)/04/5
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CIRDI, Corn Products International, Inc. c. Etats-Unis du Mexique, 20 mai 2005, n°ARB
(AF)/04/1
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CIRDI, LG&E Energy Corp, LG&E Capital Corp et LG&E International Inc. c. République
Argentine, 4 octobre 2006, n° ARB/02/1
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Démocratique du Congo13.
Dès lors, après examen des précédents du CIRDI, nous estimons que les
conclusions tendant à la cessation de la procédure nationale sont irrecevables.
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CIRDI, Patrick Mitchell c. République Démocratique du Congo, 1er novembre 2006, n°
ARB/99/7
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CIRDI, MTD Equity SDN. BHD. Et MTD. Chile S.A. c. République du Chili, 21 mars 2007
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CIRDI, Vivendi Universal c. Argentine, 3 juillet 2002
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Conclusion
- à titre principal, qu’il n’est pas compétent pour se prononcer sur la requête introduite
par la Société Elexport
Le représentant de
l’Argentine :
Madame Ekaterina LOGINOVA
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