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#15 – RESPONSABILITE DE L’EXPERT-COMPTABLE

La responsabilité de l’expert-comptable peut être engagée en cas de manquement à ses


obligations professionnelles, selon l’origine des faits elle peut être qualifiée de :
• faute civile ;
• faute pénale ;
• faute disciplinaire liée à l’exercice d’une profession règlementée.

I. Responsabilité civile

1. Les obligations des parties

La lettre de mission, fait naître des droits et des obligations pour les deux parties contractantes :
• L’expert-comptable a une obligation de moyens (sauf cas très précis1), il effectue donc
des diligences normales et avisées
• L’entité cliente doit permettre la bonne exécution des travaux comptables
o obligation de rémunération ;
o devoir d’information ;
o coopération loyale.

2. Etendue de la responsabilité civile

La responsabilité civile de l’expert-comptable est de nature contractuelle dans ses relations avec
son client ou délictuelle vis-à-vis des tiers ou quasi-délictuelle.

1
Par exemple, la remise des déclarations fiscales dans les délais est une obligation de résultat de
l’expert-comptable.

-1-
a) Responsabilité contractuelle

La responsabilité contractuelle est celle qui résulte de l’inexécution ou de la mauvaise exécution


des obligations d’un contrat par l’une des parties. Les obligations des parties sont depuis le 1er
décembre 2008 obligatoirement consignées au sein d’une lettre de mission (décret n° 2012-432
du 30 mars 2012, art. 151).
Le fait générateur sera constaté par l’inexécution de l’obligation contractuelle et le dommage par
l’absence de la contrepartie qui doit être normalement fournie en application des termes du
contrat.
Le défaut de conseil constitue la plus grande source de conflits sur la responsabilité des experts-
comptables.

b) Responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle

La responsabilité civile délictuelle2 est l’obligation de réparer le dommage causé par des
agissements intentionnels.
Si les agissements ne sont pas intentionnels, il s’agira dans ce cas de responsabilité quasi-
délictuelle.
L’expert-comptable verra alors sa responsabilité engagée en cas de
• Faute
o en lien direct avec le contrat, c’est-à-dire la lettre de mission. Une faute devient
délictuelle dès lors qu’elle cause un préjudice aux tiers.
• de préjudice causé à un tiers
o direct ;
o certain ;
o licite ;
o prévisible.
o et d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Notons que les clauses limitatives de responsabilité qui pourraient être définies entre l’expert et
son client au sein de la lettre de mission ne sont pas opposables aux tiers.
Dans toutes ces situations, c’est la victime qui devra prouver la faute.

2
L’article 1240 du Code civil (anciennement 1382)

-2-
3. Fondement juridique de la responsabilité civile

L’étendue de la responsabilité civile de l’expert-comptable est fixée dans l’ordonnance du 19


septembre 1945 (art. 17) : ≪ Les experts-comptables, les sociétés d’expertise comptable, les
succursales, les associations de gestion et de comptabilité et les salariés mentionnés à l’article
83 ter et à l’article 83 quarter et les professionnels ayant été autorisés à exercer partiellement
l'activité d'expertise comptable sont tenus, s’ils sont établis en France, de justifier un contrat
d’assurance selon les modalités fixées par décret pour garantir la responsabilité civile qu’ils
peuvent encourir en raison de l’ensemble de leurs travaux comptables et activités. ≫.

Cette ordonnance peut être complétée par le Code civil, à l'article 1231-1 en cas de faute
contractuelle (non-respect des travaux énoncés dans la lettre de mission) ou aux articles 1240
et suivants du Code civil pour les fautes délictuelles.

4. L’exercice en action

a) Les demandeurs

L’action en responsabilité peut être exercée soit par les représentants légaux de l’entité afin de
réparer un préjudice subi par cette dernière, soit par tout intéressé afin de réparer un préjudice
personnel (tiers).

b) La prescription de l’action

Les actions en responsabilité contre l’expert-comptable se prescrivent selon le droit commun.


Depuis la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l’article 2224 du Code civil prévoit que les actions
contractuelles et délictuelles se prescrivent par cinq ans à compter du jour ou le titulaire du droit
a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d’agir.
Ce délai peut être abrégé par une disposition de la lettre de mission en ce sens en vertu de
l’article 2254 du Code civil. La durée de la prescription ne peut dans ce cas être réduite à moins
d’un an. Cette durée ne peut être aménagée avec un client consommateur ou non-professionnel.
Il convient de ne pas confondre ce délai de cinq ans avec le délai de conservation des documents
comptables du client qui est fixe à dix ans (C. com., art. L. 123-22).

c) La compétence d’attribution

Lorsque l’action est intentée contre un expert-comptable personne physique, une société civile
professionnelle d’expert-comptable ou une société d’exercice libéral, le tribunal compétent sera
le tribunal de grande instance (TGI).
A contrario, si l’action est intentée contre une société d’expertise comptable qui est commerciale
par la forme, le tribunal compétent sera le tribunal de commerce.

-3-
II. Responsabilité pénale de l’expert-comptable

La responsabilité pénale ne peut être engagée qu’en cas de contravention, délit ou crime.
Les délais de prescriptions figurent à l’article 7 à 9 du code de procédure pénale :
• Contravention : 1 an
• Délit : 6 ans
• Crime : 20 ans
La loi peut réduire ces peines dans certains cas.

1. Fondement juridique de la responsabilité pénale


Les éléments constitutifs de la responsabilité pénale sont :
• élément légal : un texte répressif3 doit prévoir l’infraction ;
• élément matériel : il doit y avoir au minimum un commencement d’exécution, l’infraction
n’a pas à devoir être réalisée complètement. La tentative est toujours punissable en cas
de crime. En cas de délit, la tentative est punissable si un texte le prévoit ;
• élément moral : cet élément nécessite l’existence d’une faute. La faute peut évidemment
être intentionnelle mais elle peut également résulter d’une faute d’imprudence, de
négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité de l’auteur
des faits.

La responsabilité pénale de l’expert-comptable pourra également être recherchée s’il commet


un délit d’initié4 ou un délit de divulgation d’informations financières5. Ces délits ne visent pas
expressément l’expert-comptable mais ce dernier pourrait être concerne du fait des
informations qu’il est susceptible de détenir sur l’entité.

3
Code penal art. 111-3
4
Code mon. fin., art. L. 465-1
5
Code mon. fin., art. L. 465-3, al. 1

-4-
2. Les infractions concernant l’expert-comptable

Nature de l’infraction Texte de lois Peines encourues


Faire usage du titre d’expert-
Ord. 19 sept. 1945,
comptable sans être inscrit ou Un an d’emprisonnement et 15 000 €
art. 20 et C. pén.,
exercer illégalement la profession d’amende
art. 433-17 et 433-25
d’expert-comptable

Exercice ou conservation des


Ord. 19 sept. 1945,
fonctions malgré l’existence d’une Un an d’emprisonnement et 15 000 €
art. 20 et C. pén.,
suspension ou d’une radiation d’amende
art. 433-17 et 433-25
du tableau
Ord. 19 sept. 1945,
art. 21 et Un an d’emprisonnement et 15 000 €
Violation du secret professionnel
C. pén., art. 226-13 d’amende
et 226-14

3. Les acteurs

Les initiateurs de la responsabilité pénale peuvent être :


• L’état en tant que défenseur de l’ordre public
• Les victimes présumées

L’action peut être déclenché à l’initiative des victimes suite à une plainte ou par un agent de l’Etat
suite à un constat spontané de l’infraction.

Les accusés peuvent être :


• Les personnes physiques professionnelles ou non professionnelles
• Les personnes morales si un texte le prévoit
• Les acteurs principaux et les complices

Les conséquences peuvent être des sanctions d’ordre :


• Pécuniaire
• Peines de prison
• Interdictions diverses (interdiction de gérer par exemple)

III. Responsabilité disciplinaire de l’expert-comptable

Faire partie d’une profession réglementée implique d’avoir un comportement exemplaire et une
qualité de travail élevée.

Les experts-comptables sont tenus de respecter les règles de la profession et de s’abstenir de


réaliser des actes contraires à l’honneur et la probité.

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Faute de respect de ces règles, ils peuvent mettre en jeu leur responsabilité disciplinaire. Cette
responsabilité est distincte de la responsabilité civile, dans la mesure ou la faute disciplinaire ne
peut donner lieu au versement de dommages-intérêts, mais uniquement à des sanctions
professionnelles.

1. Les acteurs

Les initiateurs de la responsabilité disciplinaire peuvent être :


• Les victimes présumées (dont L’état)
• Les instances dont relèvent les professionnels

2. Déclenchement de la mise en responsabilité

L’action peut être déclenché dans les cas suivants :


• Constat d’un dysfonctionnement par les victimes présumées qui informent les instances
dont relève le professionnel
• Auto-saisine des instances même en l’absence de victimes si elles ont connaissance
d’insuffisance dans la qualité du travail, ou de faits pouvant nuire à l’honorabilité.
• Les accusés peuvent être :
• Les personnes physiques membres de la profession règlementée (en leur nom ou en tant
que représentant de la société)

3. Les sanctions

La nature des sanctions dépend de la gravité des faits et du règlement de la profession.


Elles peuvent aller jusqu’à la radiation de l’individu entrainant l’interdiction définitive d’exercer.

IV. Secret professionnel de l’expert-comptable

Lorsque l’expert-comptable est mis en cause, il est autorisé à s’affranchir du secret professionnel
au nom du droit de libre défense. Toutefois, il n’est autorisé à produire que des éléments utiles
à sa mise hors de cause.

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