Par sa souplesse, par la liberté d’action qu’il laisse aux individus, le contrat est apparu aux
tenants du libéralisme comme un instrument idéal, comme le seul procédé possible
d’organisation économique et sociale.
Aussi, très tôt, le contrat sera intégré largement dans la construction politico-économique et
devient de ce fait l’instrument du célèbre « Laisser faire-laisser passer »
Un important mouvement législatif a suivi et dans les domaines les plus divers, nous avons
assisté à la multiplication des lois impératives destinées à protéger la partie la plus faible.
Ceci a donné naissance à des droits particuliers dérogatoires du droit civil (droit du travail,
droit des assurances, droit bancaire et depuis quelques années droit du consommateur).
Ces droits relativement récents limitent considérablement l’autonomie de la volonté.
En effet, face aux inégalités engendrées par la liberté contractuelle, l’Etat s’est de plus en
plus arrogé le droit d’intervenir pour limiter ces injustices. Ainsi, le mot cher à Fouillé « toute
justice est contractuelle, qui dit contractuel dit juste » a été remplacé par la formule célèbre «
entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ».
Rappelons que malgré leur importance, les atteintes étatiques portées à la liberté
contractuelle n’ont jamais remis en cause le principe de la liberté contractuelle et la majorité
des contrats est restée et reste gouvernée par l’idée de liberté.
La notion de contrat, de pacte, est une notion fondamentale de la vie en société, sans
laquelle les rapports humains seraient inconcevables.
On sait que le « droit naturel » est extrêmement incertain, faute de contenu qui se retrouve
en tout temps et en tous lieux ; s’il est cependant un concept qui présente cette universalité
et cette permanence, qu’aucune société ou groupe humain n’a pu ignorer, c’est bien celui de
la parole donnée « Pacta sunt servanda » : les accords doivent être respectés.
S’agissant des rapports des membres du groupe social entre eux, cette notion intéresse
fondamentalement le droit civil, entendu au sens large des relations entre sujets de droit (ce
qui inclut le droit des affaires).
Le droit public y est moins sensible, puisqu’il est dominé par un rapport hiérarchique entre
l’état et les sujets de droit. Mais la force de la technique est telle que la puissance publique y
a recours et que les contrats administratifs connaissent un développement continu.
La théorie des contrats apparaît donc occuper en droit privé une place centrale : sur le plan
pratique parce qu’elle est de très loin la source la plus fréquente d’obligations ; sur le plan
théorique parce que les notions qu’elle met en œuvre ont essaimé dans tous les domaines y
compris ceux où il s’agit d’institutions et non d’accords privés (droit de la famille par
exemple).
On peut dire que la théorie des contrats est au cœur du droit privé et qu’elle en innerve
toutes les disciplines.
Au Maroc le contrat est réglementé par le DOC (Dahir des obligations et contrats), texte
législatif datant de 1913 et qui a été institué par les autorités du protectorat français.
Le DOC comprend deux grandes parties : l’une relative aux obligations en général et l’autre
relative aux différends contrats déterminés et aux quasi-contrats qui s’y attachent tels que la
vente, l’échange, le louage, le dépôt et le séquestre, le mandat, le prêt, l’association, le
contrat aléatoire, la transaction, le cautionnement, le nantissement et les différents espèces
de créanciers.
Mais les contrats sont aussi régis par le code de Commerce tel qu’il fût modifié par le DH
n°1-96-8-83 du 1er Août 1992. Il s’agit particulièrement des contrats commerciaux : le
nantissement avec dépossession et sans dépossession. Le contrat d’agence commerciale,
(Art. 393 du C.C), le courtage, la commission et le crédit-bail (Art. 431 à 442), le contrat de
transport des personnes et des choses (Art.443 à 486), contrats bancaires (Art. 487 à 528),
la cession des créances professionnelles (Art. 529 à 536), le nantissement des titres (Art.
537 à 544)
Le DOC comme le code de commerce apparaît comme des codes libéraux mettant l’accent
sur la liberté individuelle et sur la volonté humaine.
La théorie classique repose sur le principe de l’autonomie de la volonté, en vertu duquel les
personnes sont libres de créer leur propre loi : le contrat.
Cette théorie prend sa source dans la doctrine libérale de la fin XIXe siècle « laisser faire,
laisser passer »., « Les hommes naissent libres et demeurent libres et égaux en droits »,
théorie rousseauiste du contrat social. Tous les rapports sociaux reposent sur les volontés
individuelles et libres d’individus égaux.
Selon ce point de vue, la liberté d’un individu ne peut être limitée que par sa propre volonté ;
le contrat est supérieur à la loi qui doit se borner à être supplétive à la volonté des parties.
Le consensualisme présente des dangers notables. D’abord les parties peuvent avoir mal
apprécié la portée de leur engagement ou s’exposer à une fraude du contractant (contrat de
vente d’immeuble, contrat de mariage). D’autre part, les tiers peuvent ignorer des contrats
qui ne seraient pas sans incidence pour eux (constitution d’hypothèque….). Enfin, l’intérêt
général peut lui même à avoir à souffrir du consensualisme : évasion fiscale (contrat de
donation…), violation des règles impératives (contrat du travail…...).
Pour remédier à ces inconvénients, le législateur impose parfois la rédaction d’un acte. Mais
cet acte n’est pas une simple forme probante, c’est alors une condition de validité du contrat.
Le législateur prend en charge la défense de l’intérêt général en posant des règles qui
encadrent la volonté individuelle, voire en imposant certains contrats.
De nos jours, les contrats ne valent qu’autant qu’ils respectent les dispositions législatives
impératives :
Le DOC marocain notamment son article 19 stipule : La convention n’est parfaite que par
l’accord des parties sur les éléments essentiels de l’obligation, ainsi que sur toutes les autres
clauses licites que les parties considèrent comme essentielles «
Quand il s’agit d’une nouvelle loi, législateur, en principe, respecte la force obligatoire du
contrat, la stabilité des situations contractuelles est souhaitable.
Seules les lois d’ordre public écartent la survie de la loi ancienne dans les contrats.
Cependant le législateur impose de plus en plus des règles impératives aux contractants ;
certains juristes soulignent l’interventionnisme de plus en plus accentué du législateur, qui,
généralement dans le but de protéger le plus faible, s’oppose à l’autonomie de la volonté
- la résolution pour inexécution (pour ce qui est des contrats synallagmatiques). Si l’une des
parties a déjà exécuté son obligation, l’exception d’inexécution n’est plus d’aucun secours, la
résolution du contrat sera alors la seule voie pour revenir sur l’exécution déjà réalisée.
- la rescision pour lésion (art. 55 et 56 « est réputée lésion toute différence au-delà du 1/3
entre le prix porté au contrat et la valeur effective de la chose ». La lésion ne vicie la
convention que dans certains contrats où à l’égard de certaines personnes (les incapables
ou le contrat de vente d’immeuble).
La lésion peut être définie comme le préjudice subi par une partie au contrat, résultant d’une
disproportion entre les prestations dès l’origine du contrat.
« La lésion ne donne pas lieu à la rescision, à moins qu’elle ne soit causée par le dol de
l’autre partie ou de celui qui la représente ou qui a traité pour elle, et sauf l’exception ci-après
» (article 55 du DOC)
Même situation dans le cas du contrat à exécution successive, c’est-à-dire un contrat qui
s’inscrit dans le temps et qui est exposé aux aléas du futur.
Nombreux sont en effet, les événements imprévus, extérieurs aux parties qui risquent de
modifier les prévisions initiales et contrarier l’exécution du contrat.
Certains de ces événements vont jusqu’à provoquer une impossibilité d’exécuter. Est alors
sollicitée la théorie de la force majeure pour régler tant le sort du contrat que la
responsabilité civile contractuelle.
D’autres circonstances ont un effet moins radical, elles rendent l’exécution du contrat
beaucoup plus difficile, beaucoup plus onéreuse sans que l’on constate pour autant une
impossibilité d’exécution.
Le contractant défavorisé peut-il obtenir une révision du contrat ? Voir une destruction de ce
contrat ?
Au Maroc, comme en France, les rédacteurs du code civil et du DOC, n’ont pas pris en
compte le phénomène de l’imprévision qui n’est autre qu’une question d’ordre économique et
financier qui se traduit par un déséquilibre important entre les prestations réciproques
(exemple : cas de dépréciation monétaire).
Une célèbre jurisprudence française annonce son hostilité à la théorie de l’imprévision de la
manière suivante :
« Dans aucun cas, il n’appartient aux tribunaux , quelque équitable que puisse leur paraître
leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pou modifier les
conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement
acceptées par les parties » (Cass. Civ. 6 Mars 1876, affaire Canal De Craponne).
Pour remédier à cette situation, les contractants ont la possibilité de prévoir des clauses
d’adaptation automatique dont le meilleur exemple est la clause d’indexation, ou prévoir des
clauses de révision et plus particulièrement de renégociation telle que la clause de hardship
comme en matière des contrats internationaux.
Cette clause qu’on traduit parfois par clause d’imprévision met à la charge des contractants
une obligation de renégocier tout ou une partie du contrat afin de maintenir l’équilibre
contractuel initial. Si les parties n’ont prévue aucune stipulation relative à l’imprévision ; en
l’absence de renégociation spontanée, le contrat devra être exécuté même s’il est
déséquilibré.
Le juriste d’entreprise exerce un rôle préventif auprès des entreprises pour éviter qu’elles encourent des risques
juridiques. Il veille à ce que l’entreprise se développe dans le strict respect du droit. Dans cette optique, le juriste
d’entreprise a pour missions de :
Veiller à l’application de la loi auprès de tous les services de l’entreprise : production, ressources humaines,
etc.
Défendre les intérêts d’une entreprise en cas de contentieux
Veiller à l’application du droit des entreprises
Conseiller sur les questions de droit
Intervenir en cas de litige
Réforme de la justice
Le nouveau droit commercial est en marche
Plusieurs chantiers législatifs sont engagés par le ministère de la Justice et des
Libertés. Près de 20 ans après sa promulgation au Bulletin officiel(1), la révision du
code de commerce est d’actualité. Uniquement son «Livre V» dédié aux difficultés
d’entreprises: redressement judiciaire, liquidation, le rôle des organes de procédure
(juge-commissaire, syndic et contrôleur)… Sa refonte se focalise sur les mesures de
prévention des difficultés des entreprises. Le rôle du dirigeant d’une société sera aussi
renforcé au niveau de la procédure. A l’ordre du jour, également, la création «d’une
nouvelle mesure de sauvetage» pour garantir à une entreprise la poursuite de son
activité. Un commerçant, qu’il soit personne physique ou morale, pourra recourir à ce
type de procédure. Les artisans n’en seront pas en revanche bénéficiaires. «Même la
nature des difficultés auxquelles peut faire face une entreprise a été élargie. Qu’elles
soient des difficultés de nature juridique, économique, financière ou sociale», indique
le plan d’action ministériel de 2015.
«L’avant-projet de loi portant réforme du code de commerce est au Secrétariat général
du gouvernement (SGG). Des discussions sont en cours avec notre département afin
d’y apporter les dernières retouches», déclare le ministre de la Justice et des Libertés
(voir p. 7). Le rôle du SGG, conseiller juridique attitré du gouvernement, est de veiller
notamment à ce que les moutures ne soient pas en contradiction avec la Constitution,
avec des lois générales ou spéciales…
La refonte de la loi 15-95 formant code de commerce sera indiscutablement inscrite
dans la révision de l’organisation judiciaire. La loi la régissant, du 15 juillet 1974, a été
amendée à plusieurs reprises via notamment la création des juridictions de proximité et
la suppression des juridictions communales et d’arrondissements.
«Les modifications successives ont engendré une incohérence de la carte judiciaire.
Qu’il s’agisse des règles de fonctionnement des juridictions, de leur compétence ou de
leur hiérarchisation dans l’organisation judiciaire», relève le ministre de la Justice lors
de la présentation, le 21 novembre 2014 à Rabat, de l’avant-projet de loi relatif à la
nouvelle organisation judiciaire.
Quid des juridictions de commerce régies par la loi 53-95? Sa dernière modification
est entrée en vigueur le 7 mars 2011(2). Sans oublier que le projet de loi sur la
régionalisation avancée chamboule les cartes: on passe de 16 à 12 régions. Toutefois,
l’organisation judiciaire du territoire national diffère de son organisation
administrative.
Le ministère de la Justice et des Libertés promeut «l’unité des juridictions avec une
spécialisation». Le principe est que les instances judiciaires seront réparties en
plusieurs chambres présidées par un juge. Des sections spécialisées seront ainsi créées
au sein des tribunaux de 1re instance: litiges commerciaux, administratifs, civils… Par
contre, il ne sera plus question d’un recours en appel au sein des tribunaux de 1er
degré. Le second round d’un contentieux va automatiquement atterrir à la Cour
d’appel. Le ministère public des juridictions de commerce sera représenté par un
substitut du procureur du Roi près de la juridiction ordinaire. Il ne sera donc plus
question qu’une Cour d’appel de commerce ait son propre procureur général du Roi.
Optimisation des ressources humaines, proximité de la justice, et célérité sont les
principes directeurs de la réforme de l’organisation judiciaire. Celle-ci élargit
également le territoire des règlements à l’amiable et de la médiation (voir encadré). Le
juge pourra les proposer aux parties au procès. Une option qui figure d’ailleurs parmi
les nouveaux amendements du code pénal.
ADS BY BUZZEFF TV
inRead invented by Teads
Médiation judiciaire
L’Etat semble déterminé à promouvoir la justice transactionnelle en droit commercial,
civil, familial… Rappelons à ce titre la loi 08-05 relative à l’arbitrage et à la médiation
conventionnelle. Ces modes alternatives de règlement des litiges sont très prisés par le
monde des affaires. Ils sont insérés dans le code de procédure civile: articles 306 à
327-69. Depuis l’entrée en vigueur de la loi en décembre 2007, certains juristes et
universitaires ont souvent formulé un vœu: créer un code propre à l’arbitrage et à la
médiation. «Je ne sais pas si cette option sera retenue dans le cadre de la refonte du
code de procédure civile?», s’interroge Me Sanâe Lahkim Bennani lors d’une
intervention mi-mai 2015 à la Bourse de Casablanca.
C’est officiel. Mustapha Ramid, ministre de la Justice et des Libertés, annonce qu’une
«loi spéciale sera consacrée à la médiation conventionnelle et judiciaire». Concernant
cette dernière, le ministère de tutelle y croit fortement tout en critiquant cette justice
transactionnelle «fictive». Sans pour autant mettre en cause la responsabilité des juges.
Le responsable gouvernemental fait part de «certaines difficultés à la mise en œuvre»
de la médiation judiciaire. Il ne précise pas lesquelles. «Raison pour laquelle nous
allons lui consacrer une journée d’étude», poursuit le ministre pjidiste lors d’une
présentation de la réforme du code pénal tenue le 20 mai à la faculté de droit de
Casablanc