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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Kamel BOURAOUI

Le texte de cet ouvrage est un condensé extrait de certains livres


de l’auteur couronnés par un prix de l’Académie nationale de
Médecine de Fraance, actualisé et validé par un comité de lecture
international

Pharmacologie
moléculaire pour
le praticien

Actualités et futur de la thérapie

2018

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Kamel BOURAOUI
Professeur émérite de médecine
Interniste et pharmacologue
Lauréat de l’Académie nationale de médecine (Paris)
Lauréat du prix maghrébin de médecine (Casablanca)

Le texte de cet ouvrage est un condensé extrait de certains livres de l’auteur


couronnés par un prix de l’Académie nationale de Médecine de Fraance,
actualisé et validé par un comité de lecture international

pharmacologie
moléculaire
pour le praticien

Actualités et futur de la thérapie

ISBN : 978-9938-00-970-5

2018

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

L’auteur
L’auteur interniste et pharmacologue est ancien assistant hospitalo-
universitaire de médecine interne (responsable de la consultation
d’hypertension artérielle et de diabétologie, et co-responsable des ur-
gences médicales de l’hôpital universitaire de Sousse), ancien profes-
seur agrégé de pharmacologie, ancien professeur de médecine et ac-
tuellement professeur émérite de pharmacologie clinique et thérapeu-
tique. Il est diplômé de la Faculté de Médecine Saint-Antoine de Paris et
a poursuivi son cursus post-universitaire à Paris (Hôpital Fernand Widal,
Institut de pharmacologie de Paris, Institut français de la santé et de la
recherche médicale, Institut Pasteur de Paris), en Tunisie (hôpitaux
universitaires) et à Londres (University College Hospital) dans les
domaines suivants : médecine interne, pharmacologie fondamentale,
pharmacologie clinique, toxicologie clinique, chimie médicale, statistiques
biomédicales et immunopathologie. Il est par ailleurs lauréat du de
l’Académie nationale de médecine (France) et du prix maghrébin de
médecine.
Méthodologie
À partir d’une banque de données personnelle actualisée, une recherche
bibliographique relative à chaque sujet traité dans ce travail, a été faite,
en s’aidant des ouvrages de référence. Par la suite un autre travail a
consisté à synthétiser l’information, à l’équilibrer, à l’homogénéiser et à la
présenter de la façon la plus succincte possible, tout en garantissant son
actualisation au jour le jour.
Conflits d’intérêt
L’auteur n’est lié à aucun groupe privé. Il n’a jamais été rémunéré par un
groupe privé et n’a jamais été pris en charge par un organisme privé
pour des congrès. Ce livre n’est financé par aucun groupe privé

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Quand le doigt montre la lune, l’imbécile regarde le doigt


Proverbe chinois
Je n’apprécie guère ceux dont le verbe dépasse le savoir et encore moins
ceux dont le savoir dépasse l’intelligence
Un théologien arabe du moyen âge
Rien n’est cru si fermement que ce que l’on sait le moins
Montaigne
Le secret d’ennuyer c’est de vouloir tout dire
Voltaire
La croyance que rien ne change provient soit d’une mauvaise vue, soit
d’une mauvaise foi. La première se corrige, la seconde se combat
Nietzsche
Il y a deux manières d’ignorer les choses, la première c’est de les ignorer ;
la seconde, c’est de les ignorer et de croire qu’on les sait. La seconde est
pire que la première
Victor Hugo
Ce qui est simple est faux, ce qui est compliqué est inutile
Paul Valéry
L’élève :
Monsieur, je n’ai pas compris
L’enseignant :
Comment veux-tu me comprendre mon enfant? Le bon Dieu m’a octroyé un
don par lequel il m’a distingué de tous les humains : je peux parler durant
deux heures sans que personne ne puisse me comprendre et sans que je
ne me comprenne moi-même
Taha Hussein
l’essentiel est sans cesse menacé par l’insignifiant
René Char
Ce qui limite le vrai, ce n'est pas le faux, c'est l'insignifiant
René Thom
D’abord ils vous ignorent, puis ils se moquent des vous, ensuite ils vous
combattent et enfin vous gagnez
Gandhi

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Ouvrages de l’auteur
Ouvrages de l’auteur (Professeur émérite Kamel BOURAOUI)

♦Publiés avant 1998 ; épuisés

Collection : « Synthèse clinique et thérapeutique »


•Manuel intégré de médecine d’urgence
•Démarches du diagnostic médical
•Manuel de pharmacothérapie (volume I) : couronné par le prix maghré-
bin de médecine (Casablanca 1998)
•Manuel de pharmacothérapie (volume II) : couronné par le prix
maghrébin de médecine (Casablanca 1998)
Collection : « Guides pratiques de consensus clinique et thérapeuti-
que »
•Stratégies en médecine interne
•L’ordonnance médicale
Autre
•Pratique médicale quotidienne
♦Enseignement et pratique des prescriptions de première ligne

Collection couronnée par l’académie nationale de médecine (Paris)


•Thérapeutique médicale quotidienne couronné par un prix de
l’Académie nationale de médecine (Paris, 2012 )
•Pharmacologie clinique courante couronné par un prix de l’Académie
nationale de médecine (Paris, 2012 )
• Pharmacovigilance praticienne, couronné par un prix de l’Académie
nationale de médecine (Paris, 2012 )
•Cas cliniques commentés de prescriptions couronné par un prix de
l’Académie nationale de médecine (Paris, 2012 )

♦Autres livres

♦En format A4
• Physiopathologie pratique ; mécanismes des maladies et des
traitements correcteurs
ISBN : 978-9938-00-933-0
•Le diagnostic à la consultation
ISBN : 978-9938-00-935-4
•Éléments de thérapeutique médicale
ISBN : 978-9938-00-930-9

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• Les urgences en médecine
ISBN : 978-9938-00-929-3
• Pharmacologie clinique; des concepts fondamentaux aux ap-
plications thérapeutiques.
ISBN : 978-9938-00-934-7
• Pharmacologie clinique générale.
ISBN : 978-9938-00-936-1
• Risques et précautions d’emploi des médicaments; accidents
thérapeutiques et intoxications aiguës.
ISBN : 978-9938- 00-931-6
• L’essentiel du nouveau résidanat tunisien; bases fondamentales,
démarches cliniques et prescriptions.
ISBN : 978- 9938-00-937-8
• Prescriptions des familles thérapeutiques.
ISBN : 978-9938-00-932-3

♦En format A5
• Épistémologie de la thérapeutique médicale.
ISBN : 978-9938-00-943-9
• Cas cliniques commentés de prescriptions.
ISBN : 978-9938-00-944-6
•Pharmacologie clinique cardiovasculaire et respiratoire.
ISBN : 978-9938-00-938-5
• Pharmacothérapie néphrologique.
ISBN : 978-9938-00-939-2
• Pharmacothérapie endocrino-métabolique.
ISBN : 978-9938-00-940-8
• Pharmacothérapie neurologique.
ISBN : 978-9938-00-941-5

♦En format de poche


• Compagnon de prescriptions des médicaments.
ISBN : 978-9938-00-972-9
• Précis du diagnostic médical.
ISBN : 978-9938-00-947-7
• Pratique quotidienne de la médecine.
ISBN : 978- 9938-00-945-3
• ABC de l’urgence vitale en médecine.
ISBN : 978-9938-00-949-1
• Précis du traitement médical.
ISBN : 978-9938-00-946-0

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• Précis de pharmacovigilance praticienne.
ISBN : 978-9938-00-948-4
• Précis de pharmacologie clinique.
ISBN : 978-9938-00-950-7
• Physiopathologie du nouveau résidanat tunisien; ouvrage pour
la révision accélérée.
ISBN : 978-9938-00-964-4
• Synthèse clinique et thérapeutique du nouveau résidanat tuni-
sien ; ouvrage pour la révision accélérée
ISBN : 978- 9938-00-965-1

• Prescriptions et médecine interne.


ISBN : 978-9938-00-957-6
• Prescriptions et pneumo-allergologie.
ISBN : 978-9938-00-956-9
• Prescriptions et pathologie digestive.
ISBN : 978-9938-00-955-2
• Prescriptions et cardiologie.
ISBN : 978-9938-00-951-4
• Prescriptions et néphrologie.
ISBN : 978-9938-00-952-1
• Prescriptions et maladies endocrino-métaboliques.
ISBN : 978-9938-00-953-8
• Prescriptions et neurologie.
ISBN : 978-9938-00-954-5
• Antibiothérapie courante.
ISBN : 978-9938-00-958-3
•Thérapie du diabète.
ISBN : 978-9938-00-959-0
• Thérapie de l’hypertension artérielle.
ISBN : 978-9938-00-960-6
• Prévention médicamenteuse du risque cardiovasculaire.
ISBN : 978-9938-00-961-3
• Prise en charge des troubles ioniques.
ISBN : 978-9938-00-962-0
• Le traitement symptomatique en médecine.
ISBN : 978-9938-00-963-7

• Lexique des urgences vitales ; identification et trousse


d’urgence.
ISBN : 978-9938-00-987-3
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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• Lexique du traitement médical de première ligne.
ISBN : 978-9938-00-971-2
• Pharmacocinétique pour le praticien.
ISBN : 978-9938-00-969-9
• Pharmacologie moléculaire pour le praticien.
ISBN : 978-9938-00-970-5
• Lexique des diagnostics orientés par la plainte.
ISBN : 978-9938-00-986-6
• Fondements épistémiques et scientifiques de la médecine ac-
tuelle.
ISBN : 978-9938-00-967-5
• Réflexions sur l’enseignement de la médecine après quarante
années d’expérience.
ISBN : 978-9938-00-968-2
• Lexique de précautions d’emploi des médicaments.
ISBN : 978-9938-00-966-8
• Familles thérapeutiques de première ligne.
ISBN : 978-9938-00-985-9

Pour que les médecins le sachent en Tunisie et ailleurs, pour


que cela ne se répète plus dans notre pays :

Ces livres mettent en application les recommandations des instances inter-


nationales, préconisées depuis plus de trente ans et particulièrement celles
relatives aux prescriptions rationnelles. Ils reflètent l’esprit de
l’enseignement de pharmacologie et de thérapeutique de la Faculté de
médecine de Sousse que j’assure depuis cette date sous le libellé pharma-
cothérapie. J’ai du résister à l’hostilité farouche de certaines personnes qui
ont voulu briser cet enseignement, dont ils ont réduit le volume horaire, au-
dessous de toutes les normes établies dans les Facultés de médecine. On a
ainsi fait reculer le domaine des prescriptions rationnelles en Tunisie de
plusieurs décennies. On a également empêché l’officialisation de tout
enseignement relatif aux prescriptions rationnelles dans les Facultés de mé-
decine, faisant ainsi obstacle à la formation des formateurs dans ces do-
maines et allant à l’encontre des recommandations internationales, particu-
lièrement celles de l’OMS, faisant de la Tunisie une exception, tout en
faisant perdre à la nation des sommes d’argent faramineuses. Ces person-
nes qui se sont cachées derrière le rideau de la science et de la politique,
ont fini par me nommer dans une direction du ministère de la santé publi-
que à Tunis et m’ont privé de mon indemnité d’essence en tant que chef de
service, nommé d’ailleurs sans lieu d’affectation, ce qui ne s’est jamais vu.
Le soutien de générations d’étudiants et de certains collègues m’a aidé à
atténuer les dégâts. Aussi, j’ai tenu le coup malgré tout cela pendant
plusieurs années au prix de beaucoup de sacrifices. Il faut rappeler que le
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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
progrès d’une nation se mesure par le nombre de livres (ISBN) publiés
chaque année. On m’a empêché de donner plus, en me privant de tout
accès aux hôpitaux et de tout équipement de laboratoire en raison de mon
passé de militant des droits de l’homme. Mais Dieu merci avec les
cinquante ouvrages de médecine que j’ai pu réaliser, la Tunisie est ac-
tuellement en tête des pays arabes et africains en nombre d’ISBN de
médecine. Je dois également mesurer la chance que j’ai de pouvoir offrir
gratuitement sur Internet certains livres, malgré le fait que j’ai toujours
disposé de zéro millime de budget de fonctionnement.

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Table des matières

Chapitre1- Données fondamentales 10

Chapitre2- Génomique et protéomique 13

Chapitre3- Concepts de base en pharmacodynamie 22

Chapitre4- Neurotransmetteurs et système nerveux autonome 35

Chapitre5- Interférences avec les systèmes de neurotransmission


53

Chapitre6- Prostaglandines et dérivés apparentés 64

Chapitre7- Pharmacogénétique et pharmacogénomique 71

Chapitre8- Prescriptions et terrains génétiques particuliers 81

Chapitre9- Induction enzymatique et inhibition enzymatique 89

Chapitre10- Thérapies biologiques et anticytokines 105

Chapitre11- Monoxyde d’azote, radicaux libres et stress oxydatif


111

Chapitre12- Bases biologiques de la thérapie à visée


psychiatrique 117

Chapitre13- Implications de certains concepts moléculaires 124

Chapitre14- Actualités et perspectives de la thérapie 128

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre1- Données fondamentales

I- Signalisation et communications cellulaires


•Les cellules ont besoin d’interagir avec leur environnement, au
cours du développement embryonnaire et de la vie adulte, afin de
contrôler leur devenir ainsi que l’homéostasie tissulaire. Ces inte-
ractions mettent en jeu l’émission de signaux extracellulaires qui
agissent à courte ou longue distance. Ces signaux sont interprétés
par la cellule réceptrice via une cascade de modifications physi-
ques et biochimiques.
•Des anomalies de cette signalisation ont été incriminés à
l’origine de certains phénomènes pathologiques et peuvent re-
présenter de ce fait des cibles pour le traitement.

II- Le phénomène pathologique et les processus de commu-


nication cellulaire
•Le «moléculaire» sous-jacent au « pathologique » est un pro-
cessus complexe de signalisation et de communications cellulai-
res. Le corps humain contient différents types cellulaires program-
més pour répondre à une série de signaux contrôlant la prolifé-
ration cellulaire, la différentiation cellulaire et la mort cellulaire
programmée (apoptose).
•Vu sous l’angle de la communication cellulaire, le phénomène
pathologique peut être conçu comme la transmission d’un mes-
sage aberrant. La thérapeutique peut viser la correction de ce
message ou de ses conséquences.
•L’altération des mécanismes impliqués dans les processus de
communication cellulaire, provoque des troubles pathologiques et
en particulier des cancers. La cellule cancéreuse est caractérisée
par sa capacité à ne plus communiquer avec son environnement,
c’est-à-dire, d’échapper aux mécanismes de contrôle de la pro-
lifération cellulaire et de perdre ses capacités d’adhérence aux
autres cellules.
•Il y a de plus en plus d’études montrant une modification
d’expression des canaux ioniques dans les tumeurs. L’implication
des canaux ioniques dans les cancers est intéressante, car ce sont
des cibles potentielles pour lesquelles la pharmacologie est sou-
vent assez bien établie.
•Deux types de molécules sont à la base de la communication

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
cellulaire: la molécule informative (signal) qui est un messager et
la molécule de réception : récepteur du messager qui est une struc-
ture protéique. Les molécules informatives peuvent être des neu-
rotransmetteurs, des facteurs de croissance, des hormones, des
cytokines, des anticorps, des médiateurs de l'inflammation.
•Le transport vésiculaire (Nobel de médecine 2013) implique des
sacs minuscules dont la membrane enferme des composants tels
que des hormones ou des neurotransmetteurs, capables de li-
vrer ce fret, comme autant de cargos ponctuels, au bon endroit et
au bon moment.
•Trois classes de gènes contrôlent différentes facettes du transport
par les vésicules et leur fusion avec d’autres membranes. Ce
mécanisme de transport, quand il est défaillant, peut
se traduire par des maladies neurologiques, du diabète ou des dé-
sordres immunitaires, implique plusieurs protéines, dont certaines
sont présentes sur la vésicule et sur la membrane avec laquelle
elle doit fusionner.

III- Les modalités de communication cellulaire


•La communication cellulaire peut se faire par les jonctions com-
municantes (jonctions GAP) qui assurent un couplage métaboli-
que et un couplage électrique entre les cellules.
•L'adhérence cellule-cellule implique les molécules appelées
CAM (Cell Adhesion Molecules). Il existe plusieurs familles de
CAM, les deux principales étant la superfamille des immunoglo-
bulines et la famille des cadhérines, qui sont des glycoprotéines
qui s'expriment à la surface cellulaire. Les molécules d’adhésion
sont impliquées dans l’athérosclérose, dont les conséquences (in-
farctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux etc.…) re-
présentent la première cause de mortalité.
•La communication à distance, se fait par l'intermédiaire de molé-
cules sécrétées. Ces molécules sécrétées peuvent être: des hormo-
nes, (signalisation endocrine), des neurotransmetteurs (acides
aminés ou dérivés des acides aminés) et des facteurs de crois-
sance. Il existe deux types de cellules assurant la transmission de
signaux à distance. Il s’agit d’une part des neurones, qui rentrent
en contact avec les cellules cibles (parfois très éloignées) par l'in-
termédiaire de leurs axones. D’autre part, il s’agit des cellules en-
docrines, qui libèrent des molécules dans le sang (les hormones)
et qui agissent sur les cellules cibles, situées dans tout l'orga-
nisme. (On parle alors de signalisation endocrine).

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Dans la signalisation de proximité, les cellules émettrices et les
cellules cibles sont proches. On distingue dans ce cas deux types
de communication : la communication paracrine et la communica-
tion autocrine. En cas de communication paracrine, les cellules
émettrices et les cellules cibles appartiennent à deux types
cellulaires différents. Les cellules cibles étant à proximité des
cellules émettrices. Un des exemples de système paracrine est
celui de la sécrétion par la cellule de molécules qui, en cas de
processus cancéreux, ont une durée de vie très courte et ne
diffusent pas vers les cellules éloignées mais seulement vers les
cellules situées à proximité. Un autre exemple est celui du rôle
endocrinien (hormonal) de l'adipocyte. Depuis 1994 dates à
laquelle la leptine a été découverte par Zhang et ses
collaborateurs, il est possible de parler de tissu adipeux en termes
de glande paracrine et non plus comme un lieu de stockage simple
dont les secrétions influencent le développement de certains can-
cers. Dans la communication autocrine, les cellules émettrices et
cibles sont du même type cellulaire. Les cellules produisent un
signal qui peut se fixer sur leurs propres récepteurs. Ce type de
communication permet de coordonner l'action de groupe de
cellules. Il est parfois impliqué dans les cancers. Dans certain cas,
on parle de signalisation contact dépendant (juxtacrine) où les si-
gnaux sont transmis le long de la membrane plasmique, par
l’intermédiaire de protéines ou de lipides, qui sont intégrées à la
membrane et sont capables d’affecter la cellule émettrice et/ou la
cellule immédiatement adjacente.

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre2- Génomique et protéomique

I- Données de base
C’est en 1869 que le médecin suisse Miescher isola à partir de
leucocytes de pus de plaies infectées, une substance organique
riche en phosphore qu'il baptisa nucléine. La nature chimique de
cette substance, fut élucidée par les travaux de Kossel à partir de
1882 jusqu'à ceux de Levene en 1927. Il s'agissait de l'acide dé-
soxyribonucléique ou ADN, qui est un polymère d'unités
dénommées nucléotides. Les polynucléotides biologiques qui
exercent différentes fonctions sont l’ADN et l’ARN ou acide ribo-
nucléique. L’ADN qui est une molécule géante, se présente sous
la forme d’une double hélice. Cet acide nucléique est le support
moléculaire de l'information génétique (l’ARN l’est pour certains
virus) et c’est par conséquent le support de l'hérédité et du codage
des composés biologiques (les ARN et les protéines) L'ARN joue
plusieurs rôles: il peut être le messager qui copie l'information
génétique de l'ADN, il peut aussi jouer un rôle catalytique, ce qui
est lié à sa capacité à former des structures complexes. Il est ex-
porté du noyau par les pores nucléaires, pour fournir l'information
et permettre la synthèse des protéines par les ribosomes.
L’ADN, que l'on trouve dans le noyau, contient le génome, néces-
saire à la formation des protéines, mais ne peut sortir du noyau.
Génome est le terme utilisé pour décrire l'ensemble des gènes
portés par les chromosomes d'une cellule. Un gène peut être défini
comme une portion d’ADN qui concourt à une fonction. Cet ADN
est constituée d’un alphabet doté de 4 lettres correspondant à qua-
tre bases azotées: l’adénine, la thymine, la cytosine et la guanine.
Une fois que le génome humain a été séquencé à la fin des années
1990, les biologistes se sont aperçus avec surprise que nous
n'avions qu'environ 25000 gènes, nombre à peine plus grand que
celui de la souris et bien inférieur à celui du riz. Par ailleurs,
l’homme possède 75% de gènes communs avec le tétrodon, (un
poisson asiatique) et 98% de gènes communs avec le chimpanzé.
Qu’est e qui fait que l'homme parle un langage articulé,
possède un cerveau si puissant tandis que le chimpanzé
résiste bien mieux à tant de maladies, du sida à certains
cancers? D’où vient alors notre particularité, si elle ne dépend
pas du nombre de nos gènes et pourquoi les êtres humains ont-ils

13
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
aussi peu de gènes ? La supériorité et la complexité de l’homme,
doit être par conséquent recherchée dans quelques mutations
subtiles, quoique déterminantes qui restent d’ailleurs très
largement inconnues. Comment ces gènes sont régulés et expri-
més dans le détail est une question centrale de la biologie.
Les bases azotées, mentionnées plus haut, sont les composés es-
sentiels de l'ADN et de l'ARN. Il s’agit des bases puriques et des
bases pyrimidiques. Les bases puriques qui sont des dérivés de la
purine, contenues dans l'ADN ou l'ARN sont principalement
l'adénine (A) et la guanine (G). Les bases pyrimidiques, dérivées
de la pyrimidine, contenues dans l'ADN sont la cytosine et la thy-
mine (T) et dans l'ARN on trouve la cytosine (C). Les sucres en
C5 ou pentoses (ribose dans l’ARN ou désoxyribose dans l’ADN)
se lient aux bases azotées. Ce sont des liaisons N-osidiques. Un
nucléoside est donc formé d’une base azotée et d’un sucre liés par
une liaison N-osidique. La liaison d’un nucléoside avec un phos-
phate se fait par une estérification. L’ester obtenu est un nucléo-
tide, qui est formé par conséquent d’une base azotée, liée par une
liaison osidique avec un sucre, lui-même lié par une liaison ester
avec un phosphate.
Les bases azotées s’apparient sous la forme de deux paires : A-T
et C-G. C’est la combinaison de ces bases chimiques qui constitue
les gènes, lesquels commandent chacun, la fabrication de
protéines différentes, nécessaires à la survie de l’organisme.
Il convient de mentionner ici l’apport des puces à ADN. Une puce
à ADN ou biopuce, ou micromatrice d'ADN est un ensemble de
molécules d’ADN fixées en rangées ordonnées sur une petite sur-
face. Elle permet d'analyser le niveau d’expression des gènes
transcrits dans une cellule, un tissu, un organe, un organisme ou
encore un mélange complexe, à un moment donné et dans un état
donné par rapport à un échantillon de référence. Son principe re-
pose sur la propriété que possède l'ADN dénaturé de reformer
spontanément sa double hélice lorsqu'il est porté face à un
brin complémentaire (réaction d’hybridation). Les quatre bases
azotées de l'ADN ont en effet la particularité de s'unir deux à deux
par des liaisons hydrogène. Si un patient est porteur d'une ma-
ladie, les brins extraits de l’ARN d'un patient (rétranscrits en
ADN), vont s'hybrider avec les brins d'ADN synthétiques
représentatifs de la maladie.
Il existe dans un gène des zones codantes (exons) et des zones non
codantes (introns). En effet on sait aujourd’hui qu’il existe un

14
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
nombre inattendu de gènes ne codant pas de protéines et on estime
que les ARN non codants représentent plus d’un tiers des ARN
présents dans le cytoplasme.
Dans son ouvrage le vivant post-génomique, Henri Atlan, attire
notre attention sur le concept de « post-génomique », en tant que
biologie qui prend acte du fait que le programme génétique est
une impasse. Il se demande comment des structures fonctionnelles
aussi complexes que les virus et les réseaux de neurones
émergent-elles? Découlent-elles nécessairement d’un projet
intentionnel, voire d’une volonté providentielle? Ou bien ces
ensembles complexes sont-ils capables de s’organiser eux-mêmes
?
L’auteur soutient que la génétique, entendue comme la genèse
d’un être vivant, n’est pas dans les gènes et substitue au modèle
génétique, celui de l’auto-organisation ou de la complexité. C’est
paradoxalement au moment même où on transcrit le génome hu-
main, que certains se détachent du modèle du déterminisme gé-
nétique.

II- Entorses à l’hérédité mendélienne


L’ADN reste le support de l’hérédité mais, il n’est plus le seul. En
effet, on assiste, actuellement à l’effritement de ce concept, car on
a réalisé que les propriétés des organismes vivants émergent du
fonctionnement global des gènes dont le pouvoir est modelé et li-
mité par l’environnement. Il existe différentes entorses à
l’hérédité mendélienne, dont on citera:
-L’hérédité mitochondriale transmise exclusivement par la mère.
-La disomie uniparentale : il peut arriver que pour une paire don-
née de chromosomes, un individu reçoive bien deux copies, mais
deux copies issus d’un seul et même parent.
-L’empreinte génomique parentale : certains gènes localisés sur
les chromosomes non sexuels, présents en deux copies chez les
hommes et chez les femmes, sont exprimés à partir d’un seul
allèle, issu selon les cas du père et de la mère.

15
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
III- Épigénétique
On découvre petit à petit de nouveaux modes de transmission de
l’information qui ne passent pas par l’ADN, on parle alors
d’épigénétique qui met en évidence des mécanismes héréditaires
indépendants de l’ADN. Ce type de changement est réversible,
mais transmissible de cellule en cellule, et même des cellules
sexuelles à l’embryon.
Classiquement un gène est un segment d’ADN qui code une
protéine, et les protéines contribuent à déterminer le phénotype
d’un individu, c’est-à-dire l’ensemble de ses caractéristiques
physiques, visibles ou invisibles, Si l’on change la séquence d’un
gène, on change la structure de la protéine qu’il code et, au final,
le phénotype. L’ADN est central dans cette conception classique.
Avec l’épigénétique, on découvre que c’est faux.. D’abord, un
gène peut être inactivé sans pour autant être muté, c’est-à-dire
sans que l’enchaînement des bases adénine, guanine et cytosine
soit modifié. Seul son état d’activité change, sous l’effet de
modifications comme la méthylation des cytosines. Cet état
d’activité (ou d’inactivité) peut être transmis, ce qui a des
conséquences sur le phénotype.
Ainsi l’'épigénétique étudie les facteurs qui ne sont pas codés par
la séquence d’ADN et qui régulent l'activité des gènes en facili-
tant ou en empêchant leur expression et permet une lecture diffé-
rente d'un même code génétique. Ces modifications résultent de
l’environnement d’un gène au sens large, du plan moléculaire au
plan écologique : la cellule, le tissu, l’organe, l’individu et
l’ensemble de ses conditions de vie, comme son alimentation, ses
activités ou son lieu d’existence.
Cette notion alimente les thèses créationnistes. Elle suscite aussi
un débat parmi les biologistes, qui souhaitent cependant rester
dans le cadre darwinien. La théorie synthétique de l’évolution, qui
concilie génétique et sélection naturelle est aujourd’hui largement
remise en question.
Les marques chimiques épigénétiques les mieux caractérisées sont
les groupes méthyle (CH3). .Elles sont ajoutées sur l’ADN ou sur.
les histones (protéines localisées dans le noyau autour desquelles
s’enroule l’ADN). Le plus souvent, leur présence empêche l’accès
des facteurs de transcription aux gènes.

16
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Après la publication de la carte du génome humain en 2003, qui
reste globalement identique tout au long de la vie, des
scientifiques américains ont réalisé en 2015 la première carte de
l'épigénome humain, en clarifiant les commandes biochimiques
qui stimulent ou inhibent l'expression de l'ADN. Les chercheurs
sont de plus en plus persuadés que l'épigénome joue un rôle
important dans l'apparition de maladies comme le cancer,
l’Alzheimer ou l'autisme. À propos d’autisme, il convient de
mentionner certaines données récentes. Les premiers gènes
impliqués dans l’autisme ont été identifiés en 2003 par une équipe
française; ils jouent un rôle dans la connectivité neuronale.
Depuis, une soixantaine de gènes impliqués de manière certaine
dans les troubles autistiques ont été identifiés mais, dans 65% des
formes d’autisme, on n’a pas encore trouvé de gènes associés_
Loin de réduire la cause de l’autisme à un seul gène ou même à la
seule cause génétique, tous ces travaux indiquent que le syndrome
a des origines multiples

IV- L’interférence ARN


Le mécanisme de l’interférence ARN, a été probablement sélec-
tionné au cours de l'évolution, pour prémunir les cellules contre
l'introduction de gènes (en particulier de virus ou de transposons).
Il permet également de nettoyer la cellule d'ARN messagers
(ARNm) non fonctionnels.
Les ARN interférents (Si ARN ou ARNi) synthétisés ex vivo sont
capables d’interférer avec les ARN in vivo chez les mammifères.
Ils se fixent sur l’ARN messager qui leur correspond, ce qui a
pour effet « d’éteindre » de manière très spécifique l’expression
d’un gène. Plusieurs axes de recherche sont entrain d’exploiter ac-
tuellement l’idée de modifier ces ARNi pour rendre silencieux tel
ou tel gène en cause dans une maladie. Il en découle un immense
potentiel thérapeutique, puisque l’interférence ARN, se positionne
comme un traitement envisageable, à chaque fois qu’une maladie
se développe sous l’influence d’un gène surexprimé ou muté. La
dégénérescence maculaire liée à l’âge est la première application
thérapeutique. L’injection d’ARN interférents permet d’éteindre
le gène du facteur de croissance endothélial vasculaire (VEGF)
responsable de la maladie (nature médecine, 2005).

17
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
V- La pléiotropie des fragments d’ADN
La pléiotropie des fragments d’ADN a confirmé des intuitions an-
ciennes, à savoir que le même fragment d’ADN sert à coder plu-
sieurs protéines. En association avec d’autres fragments, il consti-
tue des gènes délocalisés, dont l’existence a rendu problématique
la définition même du gène. En effet, plusieurs réponses diffé-
rentes sont apportées à la question : qu’est-ce qu’un gène ? Les
réponses varient suivant que l’on se place du point de vue de sa
structure, de son expression protéique, de l’implication d’un
fragment d’ADN dans plusieurs fonctions biologiques ou
biopathologiques, etc.
Il existe de grandes analogies entre des structures d’ADN prove-
nant d’espèce extrêmement différentes, où le même fragment rem-
plit des fonctions différentes suivant le contexte. Ainsi l’idée que
le fonctionnement et le développement des organismes seraient
tout entiers déterminés par l’exécution de «programmes» inscrits
exclusivement dans la structure linéaire de l’ADN est
actuellement très discutée.

VI- La protéomique
La protéomique désigne le domaine qui étudie les protéomes,
c'est-à-dire l'ensemble des protéines, leur environnement ainsi que
leur état physiologique et physiopathologique. C’est la fille de la
génomique. La protéomique étudie également la structure pri-
maire, secondaire et tertiaire des protéines, ce qui permet
d’envisager une « pharmaco-protéomique», voie plus prometteuse
que la thérapie génique pour concevoir de nouveaux médica-
ments.
Les protéines, composées d’un enchaînement d’acides aminés,
constituants élémentaires du vivant, doivent pour remplir leurs
fonctions, se replier selon des formes complexes très spécifiques,
que l’on appelle «structure tertiaire » définie dans un espace tridi-
mensionnel (3D). L’accès à la structure 3D de cibles thérapeuti-
ques, obtenues expérimentalement ou par modélisation molécu-
laire, fournit des informations particulièrement utiles. La modéli-
sation moléculaire permet de localiser dans la structure 3D les ré-
gions-clés pour la fonction biologique et les différents sites de
fixation des ligands ou stimulants (pouvant être des médica-
ments). Elle aidera par exemple à différencier dans un récepteur
les motifs structuraux responsables de l’activité agoniste

18
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
(stimulante) ou antagoniste (inhibitrice) de ligands, ce qui aura un
impact direct sur la conception de nouvelles molécules ayant un
mode d’action spécifique. La configuration dans l’espace de la
protéine est sa signature téléonomique. C’est elle qui lui confère
une action définie et spécifique. Cette configuration dans l’espace
doit-elle être conçue comme réalité quantique ou macroscopique ?
Intégrée dans un tout fonctionnel, cette structure est un projet
biologique qui peut engendrer des fonctions: respirer, digérer,
etc…
De plus en plus souvent, les chercheurs s’efforcent à dépister les
anomalies biologiques, qualitatives ou quantitatives, des protéines
qui accompagnent les états pathologiques observés. La plupart du
temps, il est constaté un défaut de production d’hormones ou
d’enzymes ou encore une inadéquation de la réponse du ou des ré-
cepteurs aux stimuli. Ces dysfonctionnements peuvent être mis en
évidence, beaucoup plus facilement que par le passé, grâce à de
nouvelles techniques. Ainsi la possibilité de produire aisément,
par recombinaison génétique, des cibles thérapeutiques humaines
(enzymes, récepteurs, etc.) a bouleversé la recherche pharmaceuti-
que. Plusieurs stratégies thérapeutiques découlent de la dé-
monstration d’une relation entre gène (s) et maladie.
Lorsque les cibles biologiques impliquées dans une maladie ont
été caractérisées (ADN, ARN, protéine), il est nécessaire de dé-
couvrir des molécules s’y fixant (ligands) et modulent leur fonc-
tion. D’un point de vue biologique, les classes de cibles les plus
importantes sont les récepteurs membranaires des médiateurs
(45% des cibles), les enzymes (28%), les canaux ioniques (5%) et
les récepteurs nucléaires (2%).
À l’échelle moléculaire si nous pouvions, à partir de la séquence
linéaire d’une protéine, simuler son repliement tertiaire, nous
pourrions accéder à la structure de toutes nos cibles biologiques.
Le repliement est une transition du désordre vers l'ordre, pas celle
d'une structure unique vers une autre. Malheureusement, mo-
déliser ce processus à l’échelle atomique est l’un des défis les plus
difficiles du calcul en biologie. La principale difficulté dans la
simulation du repliement d’une protéine est le temps.
Pour de petites protéines, le temps de repliement peut s'étendre de
10-6 secondes à 10-3 secondes. Il est l’un des problèmes majeurs de
la biologie moléculaire. De nombreuses maladies neuro-
dégénératives ou autres sont considérées comme résultant d'une
accumulation de protéines « mal repliées ».

19
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Il faut, en moyenne, une journée de calcul à un ordinateur pour
simuler juste une nanoseconde (milliardième de seconde) de ce re-
pliement. À ce rythme, il faudrait presque trois ans pour simuler
une microseconde de repliement et peut être une ou deux dé-
cennies pour analyser le repliement d’une seule protéine. La mo-
délisation du repliement des protéines à partir de la séquence li-
néaire reste aujourd’hui un défi majeur.
C’est la complémentarité chimique (nature des éléments de recon-
naissance) et géométrique (forme) entre un ligand et son récepteur
qui assure la transmission du signal initiant la réponse biologique.
L’expression de criblage ou criblage à haut débit, désigne dans le
domaine du médicament, les techniques visant à étudier et à
identifier des molécules aux propriétés nouvelles, biologiquement
actives. L’expression haut débit, évoque ici l’utilisation de
la robotique et de la bio-informatique, pour accélérer la phase de
test des molécules, en vue de processus de production de médica-
ments. Pour encore accélérer les découvertes, en limitant les ris-
ques liés à des produits ou organismes susceptibles d’être dange-
reux, on a développé des techniques de criblage virtuel en travail-
lant avec des modèles mathématiques de molécules ou protéines
et en cherchant à créer toutes les combinaisons possibles. On peut
aujourd’hui cribler quelques 100000 molécules par jour et par ci-
ble à des coûts raisonnables. Si, dans cette démarche, le méca-
nisme d’action des molécules retenues à l’issue du criblage est
fixé par le choix même de la cible, il reste à montrer, notamment
dans des modèles in vivo, qu’il conduit aux effets thérapeutiques
escomptés.
Sur près de 25000 gènes que comporte le génome humain, seule-
ment 500 rendent compte du mécanisme d’action des médica-
ments existants. Si on estime qu’environ 10% de tous les gènes,
peuvent constituer des cibles thérapeutiques intéressantes, des
perspectives s’offrent encore à la recherche thérapeutique. Mais
comment reconnaître ces gènes dans le génome? Sur les trois
milliards de bases du génome humain, 99,9 % sont identiques
d’un individu à l’autre. Les variations ou polymorphismes des
0,1 % restant, pourcentage pourtant infime, mais représentant trois
millions de nucléotides, sont à la base des différences entre les
individus. Parmi celles-ci figure la sensibilité aux médicaments.
Ainsi, l’approche réductionniste (physicaliste) du vivant peut être
féconde pour l’avancement des sciences bio-cliniques. En fait ra-
res sont encore les exemples concrets de médicaments di-

20
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
rectement dérivés du modélisme moléculaire. On peut citer les in-
hibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (utilisés
particulièrement dans l’hypertension artérielle et l’insuffisance
cardiaque), les inhibiteurs des protéases du virus de
l’immunodéficience humaine dans le traitement du sida et le
traitement spécifique de la leucémie myéloïde chronique ca-
ractérisée par la présence du chromosome Philadelphie (Ph) par
les inhibiteurs de la tyrosine-kinase. Le chromosome de Phila-
delphie est le résultat d’une translocation réciproque (ou un
échange de matériel génétique) entre les chromosomes 9 et
22 aboutissant à la fusion des gènes BRC et ABL, ce qui forme le
gène chimère BRC-ABL créant ainsi une mutation de l’oncogène
ABL. Les récepteurs à la tyrosine kinase sont une superfamille de
récepteurs liant des hormones (protéines circulantes), des facteurs
de croissance (protéines générés localement) et des éphrines,
(protéines des surfaces cellulaires).

21
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre3- Concepts de base en pharmacody-


namie

I- Différents types d’action des médicaments


A- Les mécanismes d’action pharmacologiques des médicaments
supposent une interaction entre ces derniers et l’organisme
•Les mécanismes pharmacologiques de l’effet clinique des médi-
caments peuvent être spécifiques ou non spécifiques:
- Non spécifiques, par exemple : diurèse osmotique induite par le
mannitol ou l’urée.
- Spécifiques : le mécanisme d’action du médicament suppose une
interaction entre médicament et une cible moléculaire. Les cibles
moléculaires des médicaments disponibles actuellement sont au
nombre de 500. On estime qu’il existe plus de 10000 cibles poten-
tielles
•On distingue quatre grand types de mécanismes d’action des
médicaments
1-action au niveau des récepteurs (p ex. bêtastimulants ou bêta-
bloquants)
2-action sur les canaux ioniques (p ex. activateurs des canaux
potassiques)
3-action sur une enzyme (p ex l’allopurinol est un inhibiteur de la
xantine oxydase)
4-action sur les transports des molécules (p ex inhibition de la
pompe à sodium par les digitaliques)
5-action physico-chimique (p ex anti-acides)
6-action sur la synthèse des macromolécules; ADN, ARN et
protéines (antibiotiques, antimitotiques, antiviraux).
•Il existe cependant des effets non pharmacologiques des médica-
ments
- Effets placebo : Substances supposées inactives utilisées dans
des études contrôlées pour la comparaison avec des produits
présumés actifs, ou prescrites dans le but de soulager des
symptômes ou de répondre aux désirs de traitement du patient.
Un placebo peut être n’importe quel type de geste thérapeutique
(dont des techniques chirurgicales et psychologiques), y compris
bien entendu les médicaments (sous toutes les formes
d’administration).

22
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Effets

Non pharmacologiques Pharmacologiques

Placebo Nocebo Spécifiques Non spécifiques

Physicochimique (mannitol, urée)

canal ionique
Récepteur

Enzyme Pompe
Synthèse de l’ADN et l’ARN
Inhibition
Induction

Fig (A)-Mécanismes d’action des médicaments

-Effet nocebo : effet contraire à l’effet placebo sans relation avec


les propriétés pharmacologiques du médicament.
B- Physiopathologie et identification des cibles
•De plus en plus souvent, les chercheurs s'efforcent à dépister la
ou les anomalies physiologiques qui accompagnent les états
pathologiques observés chez 1'homme.
•La plupart du temps il est constaté un défaut de production
(hormones, enzymes) ou encore une inadéquation de la réponse
du ou des récepteurs aux stimuli. Le récepteur désigne une
structure protéique par laquelle est médiée l’action des médi-
caments.
•Ces dysfonctionnements peuvent être mis en évidence beaucoup
plus facilement que par le passé, grâce à de nouvelles techniques.
Ainsi la possibilité de produire aisément, par recombinaison
génétique, des cibles thérapeutiques humaines (enzymes,
récepteurs, etc.) a bouleversé la recherche pharmaceutique qui a
systématisé le criblage in vitro.
• La miniaturisation, l’automatisation et l’informatisation des tests
ont aussi grandement contribué à cette mutation. On peut au-
jourd’hui cribler quelques 100000 molécules par jour et par cible
à des coûts raisonnables.

23
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
100 Réponse

50

Log concentration

Fig B)-Courbes doses réponses en présence de concentration croissante de


l’antagoniste compétitif
En ordonnée : pourcentage de l’effet, Déplacement de la courbe effet dose de l’agoniste
A vers la droite en présence de concentration croissante 1, 2, 3, de l’antagoniste
compétitif D. On note une baisse apparente de l’affinité de l’agoniste pour le récepteur
sans baisse de l’activité intrinsèque (l’amplitude de l’effet reste inchangée)

100

A= Agoniste

50 A+ C= Agoniste + antagoniste non compétitif

Kd Log concentration

Fig (C)-Courbe dose réponse en présence et en l’absence d’antagoniste non


compétitif
En ordonnée : pourcentage de l’effet , L’antagoniste non compétitif entraîne une baisse
de l’activité intrinsèque sans baisse de l’affinité, estimée par Kd.

•Si, dans cette démarche, le mécanisme d'action des molécules

24
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
retenues à l'issue du criblage est fixé par le choix même de la
cible, il reste à montrer, notamment dans des modèles in vivo,
qu'il conduit aux effets thérapeutiques escomptés.
•L’originalité d'un nouveau médicament provient donc surtout de
l'originalité et de la pertinence de la cible biochimique choisie en
relation avec la maladie visée. Ce choix, relève de disciplines
diverses regroupées sous le terme de génomique fonctionnelle.
•Sur les 30000 à 35 000 gènes que comporte le génome humain,
seulement 10% de tous les gènes, soit environ 3000, peuvent
constituer des cibles thérapeutiques intéressantes, des perspecti-
ves. Mais comment reconnaître ces 3000 gènes dans le génome?

II- Récepteurs
A- Nature
•Le récepteur désigne une structure protéique par laquelle est mé-
diée l’action des médicaments.
•Le médicament qui produit l’action biologique est l’agoniste.
L’antagoniste se fixe sur le même site mais ne déclenche pas cet
effet. L’antagoniste est dit compétitif s’il déplace l’agoniste des
sites récepteurs.
•Dans la plupart des cas, on n’a que des preuves indirectes de
l’existence des sites récepteurs.
•Certaines protéines plasmatiques lient spécifiquement un mé-
dicament mais ne produisent pas d’effet. Il ne s’agit pas de ré-
cepteurs mais d’accepteurs.
•On distingue les récepteurs physiologiques comme ceux des
hormones ou ceux des neurotransmetteurs (exemple: atropine et
récepteurs muscariniques) et ceux par l’intermédiaire desquels les
médicaments exercent une action pharmacologique.
•Un même récepteur peut être stimulé ou inhibé par plusieurs
médicaments et un même médicament peut inhiber ou stimuler
plusieurs récepteurs.
B- La liaison récepteur-ligand
Cette liaison a les caractères suivants:
-Elle est déterminée par la loi d’action des masses
[M] + [R] ↔ [MR]
[M]= concentration en médicament
[R]= concentration en récepteur
[MR]= concentration en complexes médicament-récepteur.
25
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Réponse en pourcentage de
l’effet maximum

100

A
B
50

dose

Fig (A)-Courbe dose réponse en coordonnées semi logarithmiques pour


3 médicaments A, B et C
A et B sont deux agonistes complets provoquant tous les deux un effet maximum ;
ils ont la même activité intrinséque (même efficacité). A est plus puissant que B, en
raison d’une affinité pour le récepteur supérieure à celle de B (50% de l’effet
maximum de A apparaît pour une dose inférieure à celle qui fait apparaître 50% de
l’effet maximum de B. C est un agoniste partiel, il n’atteint jamais l’effet maximal
malgré une occupation complète des récepteurs. Son affinité pour le récepteur est
supérieure à celle de B et inférieure à celle de A, mais son activité intrinsèque est
inférieure à celle de A et B.

-Elle est spécifique et stéréo-spécifique


-Elle est de haute affinité
-Elle est réversible
-Elle est de type électro-covalent soit ionique dit polaire, soit
hydrogène, soit apolaire.
-Le nombre de site récepteur est limité donc saturable.
-Elle provoque des modifications de la structure spatiale du ligand
et de celle du récepteur.

26
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
C- La régulation du nombre de récepteurs n’est due qu’au ligand
agoniste et non à l’antagoniste
•La régulation du nombre de récepteurs permet de moduler
l’activité du médicament. Ainsi, l’effet obtenu est variable selon
l’affinité ou le degré de liaison du ligand pour son récepteur.
L’intensité de l’effet dépend de deux facteurs:
•Le nombre de récepteurs occupés. La relation entre le nombre de
récepteurs occupés et la concentration du médicament n’est pas li-
néaire, elle est de type « michaelienne ».
•L’état des récepteurs: l’administration répétée de l’agoniste peut
induire un changement conformationnel du récepteur qui devient
réfractaire. Cela expliquerait la désensibilisation ou tachyphylaxie
(c’est le cas des récepteurs cholinergiques). Cette
désensibilisation peut également être la conséquence d’une di-
minution de l’activité du deuxième messager intracellulaire.
L’action prolongée d’un antagoniste augmente la sensibilité du
récepteur pour son ligand naturel. Par exemple: le blocage bêta-
adrénergique augmente la sensibilité des récepteurs bêta aux
catécholamines (d’où le risque d’accidents cardio-vasculaires lors
du sevrage). Il en est de même du blocage prolongé des récepteurs
dopaminergiques par les neuroleptiques, qui induit des
dyskinésies; celles-ci sont dues à l’hypersensibilité réactionnelle
de ces récepteurs à la dopamine endogène.
D- Activité intrinsèque et affinité du médicament
•L’activité intrinsèque est déterminée par rapport à une substance
de référence pour chaque classe de médicament étudié. Elle
traduit l’aptitude à activer le récepteur après interaction. On dé-
montre que l’amplitude de l’effet observé est dans le même
rapport que celui de l’activité intrinsèque qui traduit l’efficacité
du médicament. Si on symbolise l’activité intrinsèque par α on a
EM= α MR où EM est l’effet du médicament M pour une dose
donnée de M et MR la concentration en complexes médicament-
récepteur. L’effet maximum du médicament (Emax) est tel que
Emax = αx r où r est le nombre total de récepteurs. Si on appelle
YM l’effet relatif du médicament, on a
YM = EM / Emax .
• On définit la constante d’affinité en fonction de la capacité de
liaison du médicament et de sa concentration au niveau du site
récepteur.

27
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
L’affinité est la capacité du médicament M à former en présence
de récepteurs R des complexes MR. Elle est proportionnelle à la
puissance pharmacologique. On détermine la concentration du
médicament pour laquelle 50 % des récepteurs sont occupés: c’est
la constante d’affinité (Kd). Kd est d’autant plus petit que
l’affinité est grande.
E- Antagonistes
Les antagonistes peuvent être irréversibles ou réversibles.
1- Irréversibles
Ce sont des substances qui se fixent de façon covalente donc ir-
réversible sur les récepteurs. Exemple : la phénoxybenzamine sur
les récepteurs alpha. Ce type de substance diminue le nombre de
récepteur disponibles pour l’agoniste. Graphiquement, cela se tra-
duit par une diminution de l’affinité et de l’intensité de l’effet
maximum.
2- Les antagonistes compétitifs
Ce sont des substances qui se fixent de façon réversible aux récep-
teurs. Leur activité intrinsèque est égale à 0. Cependant, certains
antagonistes compétitifs ont paradoxalement une activité agoniste
intrinsèque non négligeable. Exemple: le pindolol est un bêta-blo-
quant qui a une activité sympathomimétique intrinsèque.
L’antagoniste compétitif se fixe spécifiquement sur le récepteur.
Graphiquement, cela se traduit par un déplacement vers la droite
de la sigmoïde effet-dose parallèlement à l’axe des abscisses (Kd
diminue, ce qui signifie l’existence d’une baisse apparente de
l’affinité, mais l’activité intrinsèque est maintenue).
3- Les antogonistes non compétitifs
L’antagoniste se fixe de façon non spécifique, réversible sur un
site du récepteur différent de celui de l’agoniste, d’où une dimi-
nution de la constante d’activité intrinsèque de l’agoniste et non
de la constante d’affinité.

28
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
III- Les principaux types de récepteurs
A- Les récepteurs couplés directement à un canal ionique
Ce sont des récepteurs pour des neurotransmetteurs rapides. La
liaison du signal entraîne une ouverture rapide du canal qui est
spécifique de certains ions. Il existe plusieurs exemples:
-le récepteur nicotinique à l’acétylcholine (canal sodique) dont la
stimulation entraîne une dépolarisation et qui est antagonisé par
les gangioplégiques dans le système nerveux végétatif et par les
curares au niveau de la plaque motrice;
-le récepteur GABA A (canal chlore), dont la stimulation entraîne
une hyperpolarisation et qui est potentialisé par la plupart des
anesthésiques généraux;
-le récepteur NMDA au glutamate (calcium, sodium) dont la sti-
mulation entraîne une dépolarisation.
B- Les récepteurs couplés à des systèmes effecteurs par une pro-
téine G
1- Les protéines G
Elles se composent de trois éléments différents α, β et γ. La sous-
unité α est capable de lier les nucléotides (GTP ou GDP). Au
repos, la protéine G porte un GDP. Lorsque le récepteur
membranaire lie la molécule signal, il change de conformation
afin de pouvoir s’associer à une protéine G. L’interaction entre le
récepteur et la protéine G provoque un échange du GDP par le
GTP, activant ainsi la protéine. La protéine G se sépare du
récepteur et se dissocie pour donner d’un côté la sous-unité α et le
dimère βγ . La sous-unité α portant le GTP peut exercer selon le
type de protéine G, quatre fonctions différentes conduisant toutes
à la formation d’un second messager, avant de revenir à l’état de
repos initial sous l’effet d’une lente hydrolyse du GTP en GDP :
•Interférence avec l’AMP c
-stimulation de l’adénylate cyclase pour les récepteurs liés aux
protéines Gs ( type β 2)
-inhibition de l’adénylate cyclase pour les récepteurs liés aux
protéines Gi ( type récepteurs muscariniques, certains effets α2)
•Stimulation de la phosphodiestérase spécifique du GMPc qui
accélére son hydrolyse en diminuant sa concentration.

29
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• Activation d’une phospholipase membranaire C. L’effet se tra-
duit par une dégradation du phosphatidyl-inositol biphosphate
(PiP2) en diacylglycérol (DAG) et inositol triphosphate (IP 3).
•Régulation des canaux ioniques
Les protéines G, déclenchent sous l’effet du signal, pour certains
récepteurs, l’ouverture d’un canal ionique. L’ion diffuse alors
dans le canal dans le sens d’un gradient de concentration en jouant
le rôle de second messager. Selon le sous type de récepteur l’effet
peut s’exercer par un flux de Na, de K ou de Ca par le biais du
cycle des phosphoinositides.
2- Principaux systèmes effecteurs couplés aux protéines G
(transduction du signal)
• Système adénylate cyclase -AMP c
-stimulation de l’adénylate cyclase pour les récepteurs liés aux
protéines Gs ( type β 2)
-inhibition de l’adénylate cyclase pour les récepteurs liés aux
protéines Gi ( type récepteurs muscariniques, certains effets α 2)
•Stimulation de la phosphodiestérase spécifique du GMPc qui
accélére son hydrolyse en diminuant sa concentration.
• Activation d’une phospholipase membranaire C. L’effet se
traduit par une dégradation du phosphatidyl-inositol biphosphate
(PiP2) en diacylglycérol (DAG) et inositol triphosphate (IP 3).
•Régulation des canaux ioniques
Les protéines G, déclenchent sous l’effet du signal, pour certains
récepteurs, l’ouverture d’un canal ionique. L’ion diffuse alors
dans le canal dans le sens d’un gradient de concentration en jouant
le rôle de second messager. Selon le sous type de récepteur l’effet
peut s’exercer par un flux de Na, de K ou de Ca par le biais du
cycle des phosphoinositides.
3- Principaux récepteurs couplés aux protéines G
• muscariniques
• adrénergiques
• dopaminergiques
• sérotoninergiques (certains récepteurs 5 HT 1, couplés à
l’adényl cyclase ou à l’IP3)
• nombreux récepteurs peptidiques
• récepteurs des opiacés
C- Les récepteurs possédant une activité enzymatique
30
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
1- L’enzyme est le plus souvent une tyrosine-kinase
L’erlotinib (un inhibiteur de la tyrosine kinase au niveau du ré-
cepteur du facteur de croissance épidermique humain EGFR de
type 1) est utilisé dans certains cas de carcinome pulmonaire non
à petites cellules et dans le carcinome du pancréas.
Le géfitinib (un inhibiteur de la tyrosine kinase au niveau du ré-
cepteur du facteur de croissance épidermique) est utilisé dans
certains cas de carcinome pulmonaire non à petites cellules.
Le lapatinib (un inhibiteur de la tyrosine kinase) est proposé dans
le traitement du cancer du sein avancé ou métastasé avec
surexpression de la protéine HER-2.
Le sorafénib (un inhibiteur de plusieurs kinases) est utilisé dans le
traitement du carcinome rénal métastasique et dans
l’hépatocarcinome.
Le sunitinib (un inhibiteur de certaines tyrosine kinases) est utilisé
dans le traitement des tumeurs stromales gastro-intestinales avan-
cées et/ou métastasées (GIST) et de tumeurs rénales.
2- Les récepteurs membranaires à activité guanylate-cyclase
Les guanylate-cyclases sont localisées au sein de la membrane
plasmique et dans le cytosol et sont exprimées dans la plupart des
types cellulaires. Elles jouent le rôle de récepteurs pour des
agonistes extracellulaires (médiateurs peptidiques, toxines bac-
tériennes, NO), et pour des agents intracellulaires
(Ca2+,nucléotides). Les peptides natriurétiques (ANP, urodilatine,
BNP et CNP) ont un rôle hormonal et sont secrétés par le flux
sanguin et se lient aux récepteurs de type guanylate cyclase. Le
BNP a été découvert en 1988 dans le cerveau. En fait il est sécrété
principalement par le ventricule cardiaque gauche. C’est un
marqueur sélectif des atteintes du ventricule cardiaque gauche.
L’utilisation thérapeutique du BNP recombinant, nésiritide, est
controversée.
D- Les récepteurs intracellulaires
•Il s’agit de récepteurs pour des signaux lipophyles. Les signaux
concernés sont les hormones stéroïdes, les vitamines D, les
hormones thyroïdiennes et les acides rétinoïques.
•Leur site d’action est situé dans le noyau des cellules cibles. Ils
entraînent une modulation de l’expression génétique par aug-
mentation ou diminution de la transcription de certains gènes. La

31
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
latence de l’action est de 30 mn à quelques heures et la durée est
de 24 à 48 h.

IV- Déterminisme génétique de l’effet des médicaments


•La pharmacogénétique est l’étude de l’influence de la variabilité
physiologique de notre génome en relation avec la réponse aux
médicaments. Elle, vise par l’identification de séquences spécifi-
ques de notre génome à identifier des sujets répondeurs ou non
répondeurs à certains médicaments ainsi que des sujets à risque de
développer des effets indésirables.
•Son objectif est de contribuer à l’individualisation du traitement
médicamenteux, à savoir la sélection d’une substance et
l’adaptation de sa posologie, par l’évaluation directe (génotypage)
ou indirecte (phénotypage) de la constitution génétique du patient.
•Elle est donc à distinguer de la pharmacogénomique qui étudie
non pas les modifications de séquence de notre génome mais le
profil d’expression de nos gènes par des techniques appropriés
(puces à ADN). La pharmacogénomique reprend quant à elle
l’implication du génome dans son ensemble en étudiant l’effet
d’un médicament sur le profil d’expression génique général au
niveau tissulaire.
•Dans le cadre de la pharmacogénomique, on ne se focalise plus
sur la différence entre individus mais plutôt sur la différence
d’expression d’un panel de gènes selon le traitement.
•Les deux approches sont donc différentes et l’ont peut décrire la
pharmacogénétique comme l’outil permettant d’établir le
traitement optimal pour chaque individu, tandis que la pharma-
cogénomique est plutôt impliquée dans la recherche du meilleur
médicament selon les différents profils d’expression génique mis
en évidence dans un groupe d’individus.
•Le tableau (I) résume les principaux polymorphismes génétiques
affectant l’effet pharmacologique.

Tab (I)-Polymorphismes génétiques affectant l’effet pharmacologique


enzyme de conversion de IEC (énalapril, captopril) Intensité et durée de l’effet
l’angiotensine variables
récepteur β 2-adrénergique agonistes β 2 (salbutamol) Bronchodilatation variable, ef-
fets cardiovasculaires
récepteurs dopaminergi- antipsychotiques (cloza- Efficacité variable, agranulo-
ques D2, D3 et D4 pine,halopéridol) cytose
glucose 6-phosphate médicaments «oxydants» Anémies hémolytiques ai-
déshydrogénase (G6PD) (aspirine, primaquine, sul- guës
fapyridine)
32
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
HERG quinidine Syndrome du QT long
cisapride Torsades de pointes
récepteur sérotoninergique clozapine Efficacité variable
5-HT2A
canaux potassiques terfénadine, disopyramide, Syndrome du QT long
meflaquine
récepteur à la ryanodine anesthésiques volatils halo- Hyperthermie maligne
génés, succinylcholine
thymidylate synthase 5-fluorouracile Efficacité et toxicité héma-
tologique
* Certaines corrélations restent controversées dans la littérature ou à confirmer sur un plus
grand nombre de patients. CYP, cytochromes P450; DPD, dihydropyrimidine dés-
hydrogénase;. ML: métaboliseurs lents; MUR: métaboliseurs ultrarapides.

V- Notion de second messager, transduction et systèmes ef-


fecteurs
A- AMPc
1- Métabolisme
La synthèse est réalisée à partir de l’ATP sous l’action de
l’adénylcyclase et la dégradation se fait en AMP sous l’action de
la phosphodiestérase
2- Effets biologiques
-Un grand nombre d’hormones peptidiques utilisent l’adénosine
monophosphate cyclique (AMPc) comme second messager.
- L’augmentation du taux cellulaire de l’AMPc entraîne plusieurs
conséquences.
° Inhibition de l’agrégation plaquettaire, bronchodilatation, va-
sodilatation
° Effet inotrope positif au niveau du coeur
° Intervient dans les métabolismes glucidiques et lipidiques .
3- Interférences médicamenteuses
* L’augmentation du taux intracellulaire de l’AMPc peut se faire
par une stimulation de l’adenylcyclase ou une inhibition de la
phosphodiestérase.
* La diminution du taux de l’AMPc dans la cellule peut se faire
par une stimulation de la phosphodiestérase ou une inhibition de
l’adenylcyclase.

33
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
B- IP3 et DAG
• La phospholipace C présente sur la face interne de la membrane
cellulaire transforme le phosphatidyl inositol-4,5-diphosphate
(PiP2) de la membrane cellulaire en IP3 et DAG qui en tant que
seconds messagers, ont différents effets. L’effet du DAG est
beaucoup plus durable que celui de l’IP3 par le fait que le Ca2+
libéré par ce dernier est immédiatement pompé.
•Le DAG lipophile reste dans la membrane cellulaire où il active
la protéine kinase C.
C- GMP c
•A côté de l’AMPc, le guanosine monophosphate cyclique
(GMPc) est également un second messager. Le GMPc est formé
par une guanylylcyclase et dégradé par une phosphodiestérase.
•Le GMPc exerce également son action principalement via une
activation d’une protéine kinase (kinase G). Le facteur atrial
natriurétique (ANF) et le monoxyde d’azote (NO) agissent, entre
autres, via le GMPc.
D- Ca2+
La concentration des ions Ca2+ dans le cytoplasme est très faible.
Plusieurs actions du calcium sont médiées par la calmoduline. La
calmoduline est une pe-tite protéine. Les ions calcium vont
s’associer à la calmoduline. C’est ainsi que les ions calcium par
l’intermédiaire de la calmoduline vont, par exemple, contrôler
l’activité des protéines-kinases et des pompes ioniques, la
dégradation du glycogène et la contraction musculaire.

34
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre4- Neurotransmetteurs et système


nerveux autonome

I- Neurotrasmission
C’est la ransmission de l'influx nerveux au niveau d'une synapse,
entre deux neurones, ou d'une jonction, entre un neurone et une
cellule non neuronale. On distingue la neurotransmission
chimique, impliquant des neuromédiateurs (mode de neuro-
transmission le plus fréquent), et la neurotransmission électrique
par des jonctions communiquantes [gap junctions] entre deux
cellules.

II- Structure et fonction du système nerveux autonome


•Les systèmes nerveux sympathique et para-sympathique corres-
pondent au système neuro-végétatif, souvent appelé système
nerveux autonome. Les organes effecteurs de ce système sont les
muscles viscéraux (myocarde, muscles lisses de la paroi des
vaisseaux et des viscères) et les glandes.
•La contraction des muscles viscéraux et la sécrétion des glandes
sont automatiques. Le système nerveux autonome apparaît plutôt
comme un système régulateur et il n’intervient que pour en
modifier le rythme et l’étendue en fonction des besoins de
l’organisme.
A- Système nerveux sympathique
•Le constituant essentiel du système sympathique est une chaîne
ganglionnaire paire située dans la cavité du tronc, de chaque coté
de la colonne vertébrale. Les centres sympathiques médullaires
s’étagent de C8 à L2.
•Le neurone pré-ganglionnaire sympathique rejoint le ganglion de
la chaîne sympathique par un rameau communiquant blanc (avec
myéline). Ce neurone est court et cholinergique, libérant comme
neurotransmetteur l’acéthylcholine.

35
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

α1A

α1 α1B

α1D

α2A
Récepteurs adrénergiques
α2
α2B

α2C

β1

β β2

β3

Fig (A)-Les différents types des récepteurs adrénergiques

•Le neurone post-ganglionnaire fait suite au neurone pré-gan-


glionnaire par l’intermédiaire d’une synapse au niveau d’un
ganglion de la chaîne ganglionnaire. Le neurone post-gan-
glionnaire s’engage alors dans un rameau communiquant gris
(sans myéline) qui lui permet d’atteindre l’effecteur, et
notamment le cœur. Ce neurone post-ganglionnaire est long et
adrénergique, libèrant comme neurotransmetteur la noradrénaline.
B- Système nerveux parasympathique
•La pièce maîtresse du système para-sympathique est le nerf
pneumogastrique, ou nerf vague ( Xème paire crânienne). Ce nerf
dessert pratiquement tous les organes logés dans les cavités
thoraciques et abdominales (cœur, poumons, foie, estomac). Les
centres para-sympathiques médullaires s’étagent de S2 à S5.
•Le neurone pré-ganglionnaire para-sympathique est toujours très
long. Le relais s’effectue dans un ganglion situé au voisinage de
l’organe innervé, parfois même dans la paroi de cet organe. Il en
résulte que le neurone post-ganglionnaire est toujours très court.
Les fibres pré-ganglionnaires sont myélinisées et cholinergiques

36
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
(acétylcholine). Les fibres post-ganglionnaires sont amyélinisées
et cholinergiques (acétylcholine).
•De part leurs conformations, le système parasympathique est
plus rapide que le système sympathique.

III- Rôles du système nerveux autonome


D’une façon générale, on peut dire que le système nerveux
sympathique tend le plus souvent à préparer l’organisme à
l’action : activité accrue du cœur, augmentation de la glycémie,
intensification du métabolisme, irrigation sanguine orientée vers
les muscles aux dépens de la peau, apport d’oxygène facilité (di-
latation des bronches), travail digestif ralenti. Le système nerveux
parasympathique inverse ces effets et a donc plutôt un effet
inhibiteur.

IV- Principes de base de la neurotransmission


•Le corps de la cellule nerveuse produit les enzymes qui partici-
pent à la synthèse de la plupart des neurotransmetteurs.
•Les enzymes agissent sur les précurseurs moléculaires utilisés
par le neurone pour former le neurotransmetteur.
•Le neurotransmetteur est stocké dans des vésicules au niveau de la terminaison
nerveuse. La quantité stockée dans une vésicule (habituellement plusieurs milliers de
molécules) constitue un quantum.
•Certains neurotransmetteurs sont libérés continuellement par les
segments terminaux, en quantité toutefois insuffisante pour
induire une réponse physiologique significative.
•Un potentiel d’action qui atteint le segment terminal peut activer les échanges de
Ca et déclencher la libération simultanée de neurotransmetteurs à partir de
nombreuses vésicules, en induisant la fusion entre la membrane des vésicules et
celle de la partie terminale de l’axone. Une solution de continuité se forme à travers
laquelle les molécules sont expulsées par exocytose vers la fente synaptique.
•Les neurotransmetteurs diffusant à travers la fente synaptique, se
lient brièvement aux récepteurs, et les activent, ce qui provoque
les réponses physiologiques. Selon le récepteur, la réponse peut
être excitatrice (c’est à dire, induire un nouveau potentiel
d’action) ou inhibitrice (c’est à dire, inhiber un nouveau potentiel
d’action).

37
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

SNC et neurones

Nicotiniques Ganglions autonomes


N1

Récepteurs
cholinergiques Plaque motrice N2

Muscariniques M1
M2
M3
M4
M5

Fig (B)-Les différents types des récepteurs cholinergiques

•L’interaction entre neurotransmetteur et récepteur doit être rapi-


dement interrompue de sorte que les mêmes récepteurs puissent
être activés de manière répétée. Soit le neurotransmetteur est
rapidement réabsorbé vers l’intérieur des terminaisons nerveuses
présynaptiques par l’intermédiaire d’un processus actif
(recaptage), puis dégradé par les enzymes proches des récepteurs,
soit il diffuse vers les aires voisines où il est inactivé.

38
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
V- Principaux systèmes des neurotransmetteurs
A- Noradrénaline
•Elle est le neurotransmetteur de la plupart des fibres sympathi-
ques post-ganglionnaires et de nombreux neurones. Le précurseur
tyrosine est converti en dopamine, qui est hydroxylée en
noradrénaline par la dopamine β-hydroxylase. Quand elle est
libérée, la noradrénaline agit sur les récepteurs adrénergiques,
processus interrompu par sa recapture à l’intérieur des neurones
présynaptiques suivie de sa dégradation par la monoamine-oxy-
dase et sous l’effet de la catéchol O-méthyltransférase (COMT) à
localisation principalement extraneuronale. La tyrosine-hy-
droxylase et la monoamine-oxydase régulent les taux intraneu-
ronaux de noradrénaline.
•L’action de la stimulation adrénergique dans les différents orga-
nes ou tissus est résumée dans le tableau suivant :

Organe tissu Récepteur Stimulation


Vaisseaux sanguins β2 Vasodilatation : β 2
α1 et α2 Vasoconstriction : α1 et α2
Cœur β1 Eeffet inotrope+
Effet chronotrope+
Effet dromotrope+
Effet bathmotrope+
Hypoxie relative
Intestin β 1 , β 2, Relaxation
α1 Contraction des sphincters
Pancréas α2 diminution de la sécrétion d’insuline
β2 augmentation de la sécrétion
d’insuline
Glycogénolyse hépatique α1 Hyperglycémie
et musculaire
β2 Glycogénolyse et gluconéoge-
nèse++++
Lipolyse β1 Acides gras non estérifiés
α Acides gras non estérifiés
Rein (sécrétion de rénine) α1, β Augmentation de la sécrétion de ré-
nine
α2 Inhibition de la libération
Rate α Contraction
Vessie β2 Rrelaxation du detrusor
α1 Contraction du trigone et du
sphincter
Utérus β2 Relaxation
Tissus adipeux β1, β 2, β 3 augmentation de la lipolyse

39
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Oeil β2 augmentation de la sécrétion de
l’humeur aqueuse
α1 contraction du sphincter (my-
driase)
glandes sudoripares α1 sécrétion localisée
Muscles pilomoteurs α1 Contraction, horripilation
Muscles squelettiques β2 Contraction, tremblements, glyco-
génolyse, captage du potassium
Bulbe α2 (centraux) Inhibition de tonus adrnénergique
périphérique

• Il existe 9 récepteurs adrénergiques divisés en trois groupes :


α1, α2, β qui comprennent chacun 3 membres. Les récepteurs
adrénergiques α1 sont majoritairement post-synaptiques. Ils
comprennent les sous types α1A, α1B et α1D.
•Ils se retrouvent presque exclusivement sur les cellules muscu-
laires lisses (vaisseaux sanguins dont les grosses artères
coronaires, voies respiratoires, tractus digestif et uro-génital), où
leur activation se traduit par une contraction musculaire. Ces
récepteurs jouent un rôle crucial dans le contrôle du tonus vas-
culaire et de la pression artérielle. Les récepteurs adrénergiques
α2 comprennent les sous types α2A, α2B, α2C. Voir figure (A).
•Les récepteurs β1 sont essentiellement cardiaques. Les récep-
teurs β-2 sont localisés essentiellement au niveau des vaisseaux et
des muscles lisses. Les récepteurs β3 sont localisés princi-
palement sur les adipocytes, où leur activation stimule la lipolyse.
Une mutation de ces récepteurs a été associée à des dysfonc-
tionnements métaboliques , notamment l’insulino-résistance et
l’obésité.
•Les effets des sympathomimétiques sur le rythme cardiaque sont
résumées dans le tableau suivant :

Amine sympa- Récepteur Rythme cardiaque Pression


thomimétique activé réflexe effet di- réflexe et artérielle
rect direct
Noradrénaline α, β1 ↓ ↑ ↑ou ↓ ↑
bloquée par l’atropine
Phenylephrine α1 ↓ 0 ↓ ↑
bloquée par l’atropine
Isoprénaline β1, β2 ↑ ↑ ↑ ↓
Dobutamine β1 0 ↑ ↑ 0

•L’action de la stimulation adrénergique et cholinergique sur les


principaux métabolismes est résumée dans le tableau suivant :

40
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
organe classe influx adrénergique influx cholinergique
réponse réponse
glandes sudoripa- α1 sécrétion localisée sécrétion généralisée
res
médullosurrénale sécrétion d’adrénaline
et de noradrénaline
(principalement nico-
tinique et secondaire-
ment muscarinique).
Muscle squeletti- β 2 augmentation de la contrac-
que tilité, glycogénolyse, captage
de K+.
Foie α1, β 2 Glycogénolyse et gluconéoge-
nèse++++
Pancréas α2 diminution de la sécrétion de
Ilôts(cellule β) l’insuline+++
β2 augmentation de la sécrétion
de l’insuline+

B- Dopamine
•Un acide aminé, la tyrosine, est repris par les neurones dopami-
nergiques et transformé par la tyrosine hydroxylase en 3, 4-
dihydroxy-phényl-alanine (DOPA), qui est décarboxylée en
dopamine sous l’effet de la décarboxylase aromatique. Après
libération, la dopamine agit sur les récepteurs dopaminergiques.
•La dopamine est le neurotransmetteur de certains nerfs périphéri-
ques et de nombreux neurones centraux.
• Les divers récepteurs caractérisés à l’heure actuelle appartien-
nent tous à la famille des récepteurs à 7 hélices membranaires
couplés à une protéine G.
Il existe 5 sous types de récepteurs dopaminergiques connus qui
se répartissent en deux groupes, récepteurs D1-like couplés à Gs
et récepteurs D2-like couplés à Gi. Les récepteurs D1-like in-
cluent les récepteurs D1 et D5. Ils induisent en réponse à la liaison
d’un agoniste, la formation d’AMP cyclique par activation de
l’adénylate cyclase via la protéine Gs. Les récepteurs D2-like
incluent les sous types D2, D3 et D4 et leurs isoformes.
-D3 et D4 jouent un rôle dans le contrôle de la pensée (ils limitent
les symptômes négatifs au cours des processus schizophréniques),
alors que l’activation des récepteurs D2 contrôle le système
extrapyramidal.

41
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

tyrosine
Phentolamine (-) clonidine
(niveau (niveau cental)
périphérique)
tyrosine
(+) tyrosine hydroxylase
métabolites
désaminés (+)
(-)
L-dopa α méthyltyrosine

MAO Dopa décarboxylase NAD


récepteur α2 Prazocine
(-) (-)
(-) Dopamine Carbidopa et Benzéraside
Récepteur α1
IMAO dopamine-bêta-hydroxylase
(-)
(-) NAD
Noradrénaline
réserpine Disulfiram
(NAD)
Norepinephrine
récepteur
bêta
(-)
amphétamines
(-)
Recapture
(+)
guanéthidine
(-)

bêtastimulants

Cocaïne et antidépresseurs tricycliques

Fig (B)-Tansmission adrénergique, métabolisme de la noradrénaline et interférences


médicamenteuses.
°NAD : noradrénaline ; MAO : monoamine oxydase ; IMAO : inhibiteur de la
monoamine oxydase, COMT : Cathéchol-O-méthyl transférase.
° La noradrénaline est synthétisée au niveau de la terminaison nerveuse présynaptique
à partir de la dopamine par la dopamine bêta-hydroxylase. Elle est stockée dans des
vésicules. Une fois libérée, la noradrénaline agit sur des récepteurs post synaptiques
adrénergiques de type bêta et alpha entraînant un effet sympathicomimétique. La
noradrénaline agit également sur des récepteurs présynaptiques de type alpha 2
entraînant une diminution de la libération du neurotransmetteur d’ou une action
sympathicolytique. Le catabolisme de la noradrénaline est assuré par la MAO et la
COMT. une action sympathicolytique.

-Le récepteur D5 qui augmente l’AMPc est du groupe des ré-


cepteurs D1. Les récepteurs D1 et D5 sont couplés positivement à
l’adénylcyclase par une protéine Gs.
-Les récepteurs D2 et D4 sont couplés négativement à l’adénylate
cyclase par une protéine Gi.

42
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
-Le récepteur D3 vient d’être mis en évidence dans le système
nerveux central.
-Le récepteur D4 appartient à la famille des récepteurs D2 et a
pour antagoniste spécifique la clozapine.
•Enfin, Des études récentes ont pu démontrer l’interaction fonc-
tionnelle entre les D1 et les D2. Le blocage de D1 atténue les
effets du blocage de D2. À l’inverse la stimulation D2 antagonise
l’effet de la stimulation D1 sur l’adénylcyclase. Des effets
particuliers de certains médicaments (comme l’apomorphine,
agoniste D1 et D2) s’expliqueront par leurs impacts différents sur
ces types de récepteurs.
C- L’acétylcholine
•Elle représente le principal neuro-transmetteur des motoneurones
bulbospinaux, des fibres préganglionnaires autonomes, des fibres
post-ganglionnaires cholinergiques (parasympathiques), et de
nombreux neurones du SNC .
•Le tableau suivant résume la réponse cellulaire à la stimulation
des récepteurs muscariniques
Localisation Réponse cellulaire à la sti- Pro- Effecteur
mulation téine
G
M1 SNC, nerfs Mobilisation du calcium Gq Phospholipase C-β
M2 NC, cœur Effet inotrope négatif Gi Inhibition de l’adenylcyclase
Muscle ↓ de la relaxation du mus- Gk
lisse cle lisse
ralentissement du rythme Gi canaux potassiques
cardiaque
inhibition neuronale des Go Inhibition présynaptique de la
canaux calciques libération des neurotransmet-
teurs
M3 Muscle mobilisation du calcium, Gq Phospholipase C-β
lisse, glan- contraction du muscle
des exocri- lisse, sécrétion exocrine
nes
M4 SNC, nerfs - Gi inhibition de l’adenyl-cyclase
Gk
Inhibition présynaptique Gu inhibition neuronale des canaux
de la libération des neuro- calciques
transmetteurs
M5 SNC - Gq Phospholipase C-β

• L’acétylcholine est synthétisée par la choline acétyltransférase à


partir de la choline et de l’acétylcoenzyme A mitochondrial.
Lorsqu’elle est libérée, l’acétylcholine stimule les récepteurs

43
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Toxine botulinique

pyruvate dehydrogénase Recepteur muscarinique


post-synaptique
(-)
exocytose

pyruvate AcCoA ACH


ACH (+)
CoA

ACH
AC COA+choline ACH
(+)

Recepteur muscarinique
pré-synaptique
(+)

Récepteur Nicotinique

choline acetylcholinestérase
acétyltransférase
(-)

anticholinestérasiques acide acétique

Choline

Fig (A)-Interférences médicamenteuses avec le système cholinergique


AcCoA : Acetyl Coenzyme A ; ACH : Acetylcholine; R: récepteur.
L’acétylcholine est synthétisée par la choline acétyltransférase à partir de la choline et de
l’acétylcoenzyme A. Elle est stockée dans des vésicules présynaptiques. Lorsqu’elle est li-
bérée, l’acétylcholine stimule les récepteurs cholinergiques spécifiques de type
muscarinique post synaptique et nicotiniques. Cette stimulation est rapidement neutralisée
par hydrolyse locale de l’acétylcholine en acide acétique et choline par l’acetylcholine
estérase.
La toxine botulinique inhibe l’exocytose de l’acetylcholine à partir des vésicules de
stockage, les anticholinestérasiques inhibent la dégradation de l’acétylcholine par
l’acétylcholinesterase.

cholinergiques spécifiques, cette stimulation étant rapidement


neutralisée par hydrolyse locale de l’acétylcholine estérase. Les
44
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
taux d’acétylcholine sont régulés par la choline acétyltransférase
et par la capture de la choline. On distingue différents types de
récepteurs cholinergiques
-nicotiniques N1 (dans la médullaire surrénale et les ganglions
sympathiques) ou N2 (dans le muscle squelettique) où le com-
plexe récepteur-canal est formé de quatre sous-unités protéiques
différentes qui traversent la membrane et s’associent pour former
un pore central (canal) par où passera le flux ionique (prin-
cipalement Na+). Les molécules d’acétylcholine se lient aux deux
sous-unités α et induisent un changement de conformation qui
entaînera une ouverture des canaux pendant 1 milliseconde)
-muscariniques M1 (système nerveux autonome, striatum, cortex
et hippocampe) ou M2 (système nerveux autonome, cœur, muscle
lisse intestinal, rhombencéphale, et cervelet). Il existe d’autres
types de récepteurs muscariniques. Voir figure (B).

Le tableau suivant résume les effets du blocage des récepteurs


cholinergiques :

Site Effets du blocage type de récepteur


Appareil broncho-pulmo- Dilatation, diminue le retour M1, M2, M3
naire veineux
Cœur Tachycardie M2 post, M1 pré
Iris Mydriase, augmentation de ?
la tension intra-oculaire
Tractus gastro-intestinal Effet spasmolytique avec re- M1, M3
laxation de la musculature
lisse (constipation), diminu-
tion des sécrétions gas-
triques, contraction des
sphincters
Véssie Rétention ?
Glandes salivaires Salive épaisse ?
Glandes sudoripares Anhydrose ?
Système nerveux central Perturbation de la mémoire M1

D- Histamine
1- Métabolisme et effets biologiques
•L’histamine est une amine biogène localisée essentiellement au
niveau des mastocytes et des basophiles. Elle se forme par dé-
carboxylation de l’histidine au sein de quatre catégories de cel-
lules: les mastocytes du conjonctif, les leucocytes basophiles, les
cellules enterochromaffines du tractus digestif, les cellules vas-

45
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
culaires endothéliales. Sa dégradation est assurée par l’histamine
N-méthyltransférase. Le métabolite inactif formé est dégradé par
les MAO B.
•L’histamine se trouve libérée en grande quantité :
- dans diverses conditions physiopathologiques (la libération de
l’histamine par le mastocyte et le basophile ainsi que celle des
autres substances vaso-actives joue un rôle fondamental dans
l’allergie de type 1), au même titre que la sérotonine, les kinines
et les leucotriènes;
- par divers médicaments ou toxiques, qui provoquent la dégra-
nulation des basophiles et des mastocytes .
•Ses principaux effets biologiques sont l’augmentation des sécré-
tions gastriques, la contraction des fibres viscérales qui explique
son effet bronchoconstricteur et la dilatation des capillaires. Son
administration IV entraîne une hypotension chez l’homme et une
triple réaction de Lewis (douleur, rougeur, chaleur) par voie in-
tradermique.
•L’histamine est un neuromédiateur central. Les corps cellulaires
des neurones histaminergiques sont localisés essentiellement dans
l’hypothalamus postérieur (2003).
2- Récepteurs et antagonistes
•Quatre récepteurs de l’histamine, tous heptahélicoïdaux couplés
aux protéines G sont identifiés, H1, H2, H3 et H4. Leur ca-
ractérisation a suivi la définition des divers rôles de l’histamine
dans l’organisme, sauf pour le récepteur H4 récemment déterminé
uniquement à partir de son analogie structurale avec H3. En effet,
l’existence d’H4 n’avait pas été soupçonnée avant la définition du
gène correspondant.
•Les récepteurs H1 sont impliqués dans les phénomènes allergi-
ques (vasodilatation dépendante de l’endothélium, contraction des
muscles lisses) et au niveau central dans le maintien de l’état de
veille.
•Les récepteurs H2 sont impliqués dans, régulation de la sécrétion
acide de l’estomac et dans la vasodilatation.
•H1 et H2 participent également au contrôle de l’activité des mo-
nocytes-macrophages et des lymphocytes T.
•Les récepteurs H3 sont présents au niveau central et périphérique
avec une localisation présynaptique. Ils contrôlent la libération
neuronale d’histamine et d’autres neuromédiateurs.

46
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

L-tryptophane

Tryptophane hydroxylase

L-5-hydroxy-tryptophane

Décarboxylase des acides L-


aminés aromatiques

Mélatonine 5-hydroxy-tryptamine
(sérotonine, 5-HT)

Monoamine oxydase
(MAO)

5-hydroxy-indole
acétaldéhyde
Aldéhyde Aldéhyde réductase
déshydrogénase

Acide 5-hydroxy-indole 5-hydroxy-tryptophol


acétique (5-HIAA)

Fig (C)-Synthèse et dégradation de la sérotonine

•Les récepteurs H4 seraient présents surtout sur les cellules hé-


matopoïétiques périphériques et la moelle osseuse et, notamment
les éosinophiles, les neutrophiles et les lymphocytes T CD4+,
avec une expression possible dans les basophiles et les mastocytes
(2002).
•Les anti-histaminiques n’empêchent ni la biosynthèse, ni la libé-
ration de l’histamine à partir des lieux de fixation, ils n’accélèrent
pas sa destruction. Ce sont in vitro et in vivo des antagonistes
pharmacologiques des récepteurs histaminergiques H1 et H2.
• Les effets de la stimulation de ces deux types de récepteurs sont
résumés dans le tableau suivant :
Site Effet Nature
vaisseaux vasodilatation H1 + H2
augmentation de la per- H1
méabilité capillaire accessoirement H2
Cœur tachycardie H2
47
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
bronches bronchoconstriction H1
intestin augmentation du péristal- H1
tisme
sécrétion gastrique accroissement H2
mastocyte inhibition de H2
l’histaminolibération

E- La sérotonine (5-hydroxytryptamine ou 5-HT)


•La sérotonine est une amine biogène synthétisée à partir du
tryptophane. La sérotonine est appelée également 5-hydroxytryp-
tamine. Le tryptophane est hydroxylé par la tryptophane
hydroxylase en 5-hydroxytryptophane, puis décarboxylé en sé-
rotonine.Voir figure (C).
•Elle est produite par les noyaux du raphé médian, par les neuro-
nes du pont et de la partie haute du tronc cérébral.
•Elle joue un rôle important dans la régulation du sommeil la
thermorégulation et l’hémostase. Elle est douée également
d’effets vasculaires complexes et contracte les fibres lisses.
•Elle jouerait un rôle important dans certains syndromes neurop-
sychiques, certains états inflammatoires et dans le dumping
syndrome ; elle est sécrétée par les tumeurs carcinoïdes du grêle.
•La sérotonine est le médiateur dont les récepteurs distincts sont
les plus nombreux. Au moins 14 gènes codent pour ces récep-
teurs. Par convention, ces récepteurs sont répartis en 7 familles en
fonction des analogies de structure des gènes. Les récepteurs 5-
HT3 sont des récepteurs-canaux à perméabilité cationique. Leur
stimulation entraîne une dépolarisation rapide et génère un poten-
tiel d’action. Les récepteurs des autres familles sont couplés aux
protéines G. Les effets de la sérotonine via ces récepteurs
conduisent à l’augmentation ou à la diminution du potentiel
d’action du neurone stimulé.
•Il existe aujourd’hui environ 15 sites reconnus fixant la séroto-
nine. Ces sites « récepteurs » ne répondent pas tous à une fonction
physiologique bien précise. La mise au point d’agonistes
permettra d’avancer dans l’élucidation de cette question. Le point
de départ de la recherche provient de l’analyse des effets de la 5-
HT.
•Le tableau suivant résume les principaux médicaments interfé-
rant avec les récepteurs de la sérotonine :

Récepteur Action Exemples Indications


5-HT1A Agoniste Buspirone, ipsaperone Anxiété, dépression
partiel

48
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
5-HT1b/1D Agoniste Triptans Migraine
5-HT2A/2C Antagoniste Methysergide, risperi- Migraine pour Methysergide, schi-
done,clozapine zophrénie pour les deux autres
5-HT3 Antagoniste Setrons : Ondanse- Vomissements induits par la chi-
tron ; Granisetron miothérapie anticancéreuse
(Kytril*)
5-HT4 Agoniste Cisapride (Prépulsid*) Reflux oesophagien
Transport Inhibiteur Inhibiteurs du recap- Dépression, trouble obsessionnel-
de la 5- tage de la sérotonine compulsif
HT (IRS)

F- Acides aminés
1- L’acide γaminobutyrique (GABA)
•L’acide γ-aminobutyrique (GABA) constitue le principal neuro-
transmetteur inhibiteur. Il est libéré par un tiers des synapses du
système nerveux central. Il hyperpolarise les neurones en
augmentant leur conductance membranaire au Cl- .
• Le GABA active trois familles de récepteurs, les récepteurs-
canaux ioniques GABAA et GABAC et les récepteurs GABAB
couplés aux protéines G (qui potentialisent la formation de
l’AMPc)..
•Le récepteur GABA de type GABAA (activant les canaux du Cl)
intervient dans les effets des hypnotiques/anxiolytiques.
Il se compose de plusieurs sous-unités (α, β, γ et δ). La sous-unité
γ2 est nécessaire pour obtenir une réponse complète du récepteur
aux benzodiazépines.
•L’activation du GABA peut se faire de deux manières:
-soit en modulant les récepteurs GABAA: c’est le cas de phéno-
barbital et de deux benzodiazépines utilisés comme anti-épilepti-
ques (diazépam; clonazépam) tous trois anti-épileptiques
majeurs ;
-soit en augmentant la concentration du GABA au niveau de la sy-
napse en jouant sur son métabolisme. Cet axe de recherche a été
fructueux, puisqu’il a donné naissance à de nouveaux anti-
épileptiques.
2- Glycine
La glycine est également un neurotransmetteur inhibiteur, prin-
cipalement dans la moelle épinière.
3- Glutamate

49
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Le glutamate synthétisé à partir de la glutamine, constitue le
principal neurotransmetteur excitateur au niveau central. Il est
chargé dans les vésicules synaptiques par un transporteur vési-
culaire du glutamate (VGLUT). Après sa libération. Il peut activer
des récepteurs du glutamate de type AMPA ou NMDA et être par
la suite recapturé par un transporteur membranaire des acides
aminés excitateurs (EAAT). Dans les cellules gliales, le glutamate
peut être transformé à nouveau en glutamine.
•Il dépolarise les neurones en augmentant la conductance mem-
branaire au Na+. Il excite presque tous les neurones centraux en
activant plusieurs types de récepteurs membranaires d’acides
aminés excitateurs.
•Comme pour tous les neurotransmetteurs, les récepteurs au
glutamate peuvent être divisés globalement en deux catégories,
soit les récepteurs ionotropes (ou récepteurs-canaux), et les ré-
cepteurs métabotropes couplés aux proteines G (ou récepteurs à
sept passages transmembranaires). Les récepteurs ionotropes du
glutamate sont des canaux ioniques cationiques (perméables au
sodium et au potassium, et dans certains cas au calcium)
possédant un site de liaison pour le glutamate. La liaison du
glutamate au récepteur induit un changement de conformation
permettant l’ouverture du canal ionique après un délai ne dépas-
sant pas la milliseconde. Ces récepteurs sont habituellement
divisés en trois familles, soit les récepteurs AMPA, les récepteurs
kaïnate (KAR) et les récepteurs NMDA.
•Les récepteurs du glutamate sont des récepteurs excitateurs et
sont les médiateurs d’effets toxiques importants par
l’intermédiaire d’une augmentation du Ca, des radicaux libres et
de la protéinase. Dans les neurones, la synthèse de l’oxyde ni-
trique (NO), à laquelle participe la NO synthétase, augmente en
réponse au glutamate.
•Les antagonistes des récepteurs NMDA (p. ex. 2-aminophospho-
novalérate) présentent des activités anticonvulsivantes. La
lamotrigine, un médicament anti-épileptique semble agir au moins
partiellement en réduisant la libération présynaptique de
glutamate.
G- Signalisation purinergique
•Le noyau purine est une structure hétérocyclique commune à
plusieurs molécules jouant un rôle central en biologie. Parmi les
purines on retrouve notamment l’adénine, une des bases présentes

50
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Glutamate décarboxylase
(+)

Glutamate
GABA Glyoxylate

(+) GABA (+) transaminase


transaminase
Semi-aldhyde
succinique α-Oxoglutarate Glycine

Cycle de Krebs
Succinate

Aspartate Oxaloacétate

(+) Transaminase

Récepteurs NMDA (+)


(1) et (2)

Fig (D)-Métabolisme du GABA et rôle des acides aminés excitateurs et inhibiteurs dans la
neurotransmission centrale
(1) Le blocage des récepteurs NMDA (N-Méthyl-D-aspartate) présente un effet anticonvulsivant sur
les modèles animaux mais le développement des dérivés bloquant ce type de récepteurs s’est heurté
à des problèmes de toxicité.
(2) Les récepteurs au glutamate de type NMDA liés à un canal voltage dépendant entraînant, suite à
une activation répétitive, l’ouverture d’un canal calcique. La pénétration massive de calcium dans la
cellule entraîne une neurotoxicité dont la sévérité peut engendrer la mort neuronale. Ce mécanisme
serait à l’origine des lésions neuronales extensives secondaires à l’ischémie, l’hypoxie, l’épilepsie et
certaines maladies neurodégénératives.. Le blocage des récepteurs NMDA survenant même
plusieurs heures après la lésion neuronale peut se révéler « neuroprotecteur ».
-L’aspartate est un acides aminés excitateur au même titre que le glutamate.
-Le GABA est un acide aminé inhibiteur au même titre que la glycine

dans les acides nucléiques. Lorsque l’adénine est couplée à un


noyau ribose, on obtient le nucléoside adénosine, une molécule
impliquée dans la physiologie cellulaire à de multiples niveaux.
Lorsqu’elle est phosphorylée en nucléotide, l’adénosine est
impliquée dans le métabolisme énergétique de la cellule,
notamment sous forme d’adénosine triphosphate (ATP) et
d’adénosine diphosphate (ADP) .
•L’adénosine et l’ATP sont des dérivés nucléosides et nucléotides
de l’adénine, une purine. Tant dans le système nerveux central
que périphérique, ces molécules peuvent agir à titre de

51
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
neurotransmetteur. Comme les neurotransmetteurs plus classi-
ques, l’ATP (mais pas l’adénosine) peut être empaqueté dans des
vésicules synaptiques et co-libéré avec d’autres neurotransmet-
teurs. Après sa libération, une partie de l’ATP peut être convertie
en adénosine par l’action de deux enzymes, une
ectodiphosphohydrolase, qui convertit l’ATP en ADP et AMP,
puis une ecto-5’-nucléosidase, qui convertit l’AMP en adénosine.
•Les récepteurs purinergiques sont divisés en deux grandes fa-
milles : les récepteurs P1, qui représentent les récepteurs de
l’adénosine et les récepteurs P2 qui sont les récepteurs de l’ATP.
Ces derniers sont, de plus, divisés en deux sous-familles : les
récepteurs P2X et P2Y. Il existe quatre récepteurs de type Pl : les
A1, A2A, A2B et A3. Alors que le Al et le A3 sont des récepteurs
métabotropes couplés à la protéine Gi/G0 les récepteurs A2A et A2B
sont couplés à la protéine Gs. Les récepteurs Al et A2A sont les
plus abondants dans le cerveau. Le blocage du récepteur Al par les
méthylxanthines, comme la caféine et la théophylline serait
responsables de l’effet stimulant de cette classe de composés. Il
existe sept récepteurs dans la famille des P2X. Il s’agit de
récepteurs ionotropes perméables aux cations. De nombreux tra-
vaux explorent actuellement le rôle des divers récepteurs
purinergiques dans la nociception (récepteurs P2X), la cognition
et la neuroprotection (récepteurs Pl).
H- β-endorphine et autres endorphines
•La structure d'une endorphine est celle d'un polypeptide (asso-
ciation d'un grand nombre de peptides) constituée par une longue
chaîne d’acides aminés. On ne connaît pas avec précision la
fonction des endorphines. Elles sont présentes dans le cerveau, la
moelle épinière et le tube digestif. Le rôle des endorphines a pu
être mis en évidence chez l'animal. Il a été démontré que les ré-
cepteurs morphiniques (récepteurs opiacés) entraînaient, chez le
mammifère, des sensations de plaisir. En effet, les endorphines
participent à l'analgésie physiologique, c'est-à-dire au système
naturel destiné à lutter contre d'éventuelles douleurs apparaissant
à l'intérieur de l'organisme et susceptibles de survenir. Elles
agissent en se fixant sur les mêmes récepteurs membranaires des
cellules nerveuses que la morphine. Le nom de peptides opioïdes
qui leur a été donné provient de cette faculté analgésique à l'instar
des enképhalines. Autrement dit une endorphine serait l'équivalent
d'une morphine naturelle .

52
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Les récepteurs aux endorphines-enképhalines (opiacés) sont
classés d’une part en µ1 et µ2 (touchant l’intégration sensori-
motrice et l’analgésie), d’autre part en δ1 et δ2 ( agissant sur
l’intégration motrice, la fonction cognitive et l’analgésie), enfin
en k1, k2, et k3 (conditionnant la régulation de l’équilibre hy-
drique, l’analgésie, et l’absorption d’aliments).

Chapitre5- Interférences avec les systèmes de


neurotransmission

I- Système cholinergique et récepteurs cholinergiques


A- Principales interférences médicamenteuses
1- Agents présynaptiques (Toxine botulinique)
•La toxine a du Clostridium botulinium est l’agent responsable du
botulisme. Elle bloque de façon irréversible le transport de
l’acétylcholine vers la fente synaptique.
•Elle est indiquée dans le blépharospasme (fermeture spasmodi-
que des yeux), le spasme hémifacial et le torticolis spasmodique.
•Contre-indications : myasthénie, syndrome de Lambert-Eaton,
allergie.
2- Agonistes cholinergiques
•Parasympathomimétiques « vrais » ou « directs » qui stimulent
directement les récepteurs muscariniques. Il s’agit de
l’acétylcholine, d’autres esters plus stables de la choline comme le
Carbachol, la Métacholine ou le Bétanéchol et d’autres alcaloïdes
à effet muscarinique comme la Pilocarpine et l’Arécholine qui
sont également des agonistes muscariniques.
•Le Bétanéchol est un stimulant direct M3. Il est indiqué dans la
rétention post-vagotomie, le mégacolon, la rétention urinaire. Le
Carbachol est utilisé pour évaluer la réactivité bronchique.
3- Anticholinesthérasiques
-réversibles : la Prostigmine est indiquée dans la myasthénie,
l’atonie post-opératoire, le surdosage par les curares antidépola-
risants et dans le glaucome. Ceux à effet central type Rivastig-
mine sont utilisés dans la maladie d’Alzheimer.
-irréversibles : Organophosphorés (Parathion).

53
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Les organophosphorés sont des toxiques utilisés essentiellement
comme insecticides déterminant un syndrome cholinergique. Le
traitement de ce syndrome se base sur l’atropine et le recours à un
antidote le contrathion (Pralidoxime) qui est un regénérateur de
cholinestérase.
4- Curares
Médicaments qui bloquent les jonctions neuromusculaires. Ils
sont utilisés par les anesthésistes pour relâcher les muscles
squelettiques au cours des interventions chirurgicales et prévenir
les contractions musculaires.
- Dépolarisants : Succinylcholine
-Antidépolarisants : d-tubocurare antagonisés par les anticholi-
nestérasiques
5- Ganglioplégiques
Les ganglioplégiques bloquent les récepteurs ganglionnaires N1 et
s’opposent à l’action du système nerveux autonome. Leurs effets
sont de type sympatholytique et parasympatholytique et
dépendent de la prédominance exercée par un système sur l’autre.
Leur utilisation thérapeutique est actuellement très limitée. Le
Trimetaphan est encore utilisé dans le traitement de certaines
crises hypertensives. En anesthésiologie, il permet d’obtenir et de
maintenir une hypotension bien contrôlée à cause de son action
hypotensive marquée et de courte durée.
6- Parasympatholytiques
Ces médicaments bloquent les récepteurs muscariniques ; on
distingue :
-les antispasmodiques parasympatholytiques type Butylhyoscine
(Buscopan)
-les bronchodilatateurs anticholinergiques
-les antisécrétoires anticholinergiques : type Probanthine qui était
utilisée comme antiulcéreux
-les antivertigineux type Scopolamine
-l’atropine : indiqué dans la bradycardie sinusale, dans la pré-
vention des réflexes vagaux et dans les diarrhées.
-les antiparkinsoniens anticholinergiques centraux type Trihexy-
phénidyle (Artane*)

54
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
B- Syndromes toxiques liés à l’interférence avec le système choli-
nergique
1- Syndrome anticholinergique (atropinique)
•Médicaments responsables : antihistaminiques, antiparkinso-
niens, atropine, scopolamine, amantadine, antipsychotiques, an-
tidépresseurs, spasmolytiques, myorelaxants, mydriatiques,
plantes (ex: Datura stramonium), champignons (ex: Amanita
muscaria)
•Signes
-Peau sèche, flush, soif, bouche sèche, diminution de la sécrétion
lacrymale
-Constipation, ralentissement de la vidange gastrique, abolition
des bruits intestinaux
-Mydriase et troubles de l’accommodation, hypertension intra-
oculaire (risque de glaucome aigu en cas de glaucome à angle
fermé)
-Tachycardie, arythmies
-Fièvre modérée, hyperthermie
-Excitation, confusion mentale, hallucination ou delirium, dy-
sarthrie, altération de la conscience
-Mouvements de cueillette des doigts, myoclonies, mouvements
choréoathétosiques, convulsion.
-Dépression respiratoire
2- Syndrome cholinergique
•Médicaments responsables : insecticides organophosphorés,
carbamates, physostigmine, edrophonium, certains champignons.
•Effets muscariniques: nausées, vomissements, douleurs abdomi-
nales, diarrhées, hypersalivation, larmoiement, hypersudation,
incontinence urinaire et fécale, myosis avec troubles de
l’accommodation visuelle, bradycardie, hypotension, bronchos-
pasme
•Effets nicotiniques: fasciculations musculaires, crampes puis
paralysie, troubles sensitifs, tachycardie, hypertension.
•Effets centraux: biphasique (stimulation puis dépression du sys-
tème nerveux central), agitation, tremblements, convulsion,
confusion, ataxie, somnolence.

55
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
II- Système adrénergique
A- Médicaments interférant avec le système adrénergique
1- Sympathomimétiques
a- Bêta-stimulants (β +)
β+ (ne jamais associer aux IMAO)
•Bêta2-stimulants (β2+): utilsés essentiellement comme relaxants
utérins et comme bronchodilatateurs. Risques d’arythmie,
d’aggravation de l’angor (CI: troubles du rythme et angor),
risques d’augmentation de la glycémie (lipolyse, diminution du
K+)
•Bêta 1-stimulants (β1+): (Dobutamine): utilisés dans le traite-
ment de courte durée de l’insuffisance cardiaque aiguë et le choc
cardiogénique. Risques d’angor et d’arythmie (CI: troubles du
rythme, cardiomyopathies obstructives).
b- Alpha-stimulants (α+)
Ne jamais associer aux IMAO.
•Alpha1-stimulants (α1+)
type Phénylephrine (Néosynéphrine*) qui est un stimulant rela-
tivement spécifique des récepteurs α1, utilisé localement comme
décongestionnant nasal et comme hypertenseur dans les
hypotensions orthostatiques non induites par les IMAO. EI : bra-
dycardie réflexe; diminution du débit cardiaque, mydriase. CI:
HTA, Angor, artériopathies des membres
•Alpha2-stimulants (α2+)
Les alpha2-stimulants centraux (Alphaméthyldopa, clonidine)
sont utilisés comme antihypertenseurs. EI : hypotension or-
thostatique, bouche sèche, impuissance, somnolence et dépression
qui les contre-indiquent.
c- Alpha-stimulants et bêta-stimulants
type adrénaline et noradrénaline.
L’adrénaline est utilisé surtout dans le choc anaphylactique.
EI : risque d’angor et d’arythmie
CI: troubles du rythme et de l’étage ventriculaire cardiomyopa-
thies obstructives, angor, HTA, association aux IMAO.

56
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
2- Sympatholytiques
a- Bêtabloquants
Indiqués essentiellement dans l’HTA, l’angor et l’insuffisance
cardiaque et comme antiarythmiques.
- Risque d’aggravation d’un asthme (la β1 sélectivité n’empêche
pas la CI)
- Risque d’aggraver une insuffisance cardiaque (CI). Cas parti-
culier du Carvédiol (vasodilatateur et oxydant).
- Risque d’aggraver un bloc (C.I: troubles de la conduction)
- Risque d’aggraver un syndrome de Raynaud (C.I)
- Risque d’aggraver un angor de Prinzmetal (C.I).
- Risque de masquer les signes d’une hypoglycémie chez le dia-
bétique (surveillance, intérêt des dérivés cardiosélectifs qui lais-
sent intacts les possibilités de la glycogénolyse).
- Risque d’augmenter le taux des L.D.L. (Intérêt des dérivés à
activité sympathomimétique intrinsèque?)
- Risque d’aggraver un ulcère.
b- Alphabloquants
•α1 et α2 bloquants (régitine, antihypertenseur majeur): tachycar-
die réflexe et augmentation du travail du cœur (C.I, angor,
hypotension).
•α1 bloquants
-type Prazosine utilisé comme antihypertenseur et Urapidil (en
même temps alpha 2 stimulant central), utilisé également comme
antihypertenseur.
Ils sont contre-indiqués en cas d’hypotension et ne doivent pas
être associés aux IMAO non sélectifs. Leurs principaux effets
indésirables sont : hypotension initiale, tachyphylaxie, troubles du
transit, sècheresse de la bouche.
-L’Alfuzosine (Xatral*) est utilisé dans l’adénome de la prostate
en raison de l’effet relaxant sur la musculature lisse de la prostate
(trigone vésical et urètre).
3- Médicaments interférant avec le métabolisme
La figure (B) résume le métabolisme de la noradrénaline, la
transmission noradrénergique et les différentes interférences
médicamenteuses avec le système adrénergique.
a- Libérateurs de la NAD (sympathomimétiques indirects)
type Ephédrine et amphétamine
C.I: association aux IMAO: risque d’accès hypertension sévère.
57
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
C.I: HTA, angor, cardiothyréose, troubles du rythme, atteinte
myocardique risque d’aggravation.
b- Inhibiteurs de la libération et/ou stockage de la NAD (sympatholytiques
indirects)
Guanéthidine (Isméline*) était utilisé dans l’HTA.
Bretylium: effet anti-arythmique.
Réserpine: abandonné comme antihypertenseur (risque
d’aggravation d’un ulcère gastroduodénal). C.I = IMAO
Risque d’hypotension (effet sympatholytique).
Effets dus à la prédominance parasympathique (diarrhée, brady-
cardie, myosis).
c- Médicaments interférant avec le recaptage axonal
Ce sont les tricycliques utilisés comme antidepresseurs.
-C.I association aux IMAO et aux sympathomimétiques.
-Risque d’hypotension (effet sympatholytique), effets anticholi-
nergiques (C.I: adénome de la prostate et glaucome à angle
fermé), troubles du rythme et de la conduction (C.I).
d- Inhibiteurs du catabolisme des catécholamines
1- Inhibiteurs du COMT
Médicaments nouveaux utilisés actuellement pour potentialiser
des effets de la L-Dopa dans le Parkinson, type Entacapone (Com-
tan*)
2- Inhibiteurs des MAO (IMAO)
Hypotension (effet sympatholytique)
C.I: angor, troubles du rythme, troubles tensionnels (aggravation)
a- Non sélectifs
-Utilisés comme antidepresseurs
-Risques d’interaction: accès hypertensifs avec tous les sympa-
thomimétiques et la tyramine (C.I)
b- Sélectifs
-IMAO A: Toloxatone (Humonyl*) et Moclobémide (Mocla-
mide*) utilisés dans le traitement de la dépression.
Pas de risque d’interaction avec les aliments riches en tyramine.
-IMAO B utilisé dans le traitement du Parkinson: Sélégiline
(Déprémyl*).
B- Syndrome sympathomimétique
Médicaments responsables : cocaïne, amphétamine et dérivés, dé-
congestionnants (phénylpropanolamine et dérivés), théophylline,
caféine.

58
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
-Effets stimulants centraux: agitation, logorrhée, hyper-réactivité
motrice, délire paranoïde, tremblements, hyperréflexie,
convulsions, hyperthermie modérée.
-Effets périphériques: hypertension, choc, tachycardie, arythmies,
mydriase, piloérection, hypersudation.

III- Action sur les récepteurs dopaminergiques


A- Agonistes dopaminergiques
1- périphériques (Dopamine utilisés dans les états de choc) .
Risques de troubles du rythme et de tachycardie (C.I: troubles du
rythme, IMAO, phéochromocytome).
2- Centraux
-La Bromocriptine est un médicament qui stimule les récepteurs
centraux de la dopamine d’où l’augmentation de la sécrétion de
P.I.F (Prolactine inhibitor Factor) et l’inhibition de la sécrétion de
prolactine qui en résulte. Il peut ainsi induire l’ovulation en cas de
stérilité par hyperprolactinémie. Le médicament comporte un
risque d’hypotension, de troubles psychiques, de troubles digestifs
et de troubles du rythme (C.I: arythmies et troubles psychiques) .
-Il existe d’autres agonistes dopaminergiques dérivés de l’ergot de
seigle (Lisuride, pergolide) qui ont une action antiprolactine et
une action antiparkinsonienne (par effet prédominant sur les
récepteurs centraux D2 dopaminergiques).
B- Bloqueurs des récepteurs dopaminergiques (Neuroleptiques)
•Utilisés essentiellement comme antipsychotiques. Le métoclo-
pramide est également un inhibiteur dopaminergique D2 doué
également de propriétés prokinétiques (accélération de la vidange
gastrique et contraction du sphincter oesophagien inférieur). Il est
indiqué dans le traitement des vomissements et le reflux
oesophagien.
•Risques d’effets extrapyramidaux et de syndrome aménorrhée
galactorrhée.
•Effet alpha (-) et parasympatholytique.

59
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
IV- Système sérotoninergique (5-HT)
A- Interférences médicamenteuses
Les médicaments qui interfèrent avec le système sérotoninergique
sont les suivants :
•Les triptans, agonistes 5-HT1b/1D , utilisés comme antimigai-
neux de la crise.
•Les sétrons, agonistes 5HT3, utilisés comme antivomitifs dans
les vomissements de la chimiothérapie anticancéreuse.
• Le cisapride, agoniste 5-HT4 accélère la motricité oeso-gastro-
intestinale et contrate le sphincter oesophagien inférieur par
stimulation de la libération de l’acétylcholine à partir des termi-
naisons nerveuses du plexus myantérique entraînant la stimulation
des récepteurs M3 sans effet sur les récepteurs nicotiniques. Il est
indiqué dans le reflux gastro-oesophagien. Ses effets para-
sympatomimétiques se traduisent par des crampes abdominales et
des diarrhées. Il est contre-indiqué en cas d’occlusion digestive
organique.
•La clozapine est un antagoniste des récepteurs 5HT2A ayant une
forte affinité pour les récepteurs D4 et une faible affinité pour les
récepteurs D2. il n’affecte pas la transmission noradrénergique de
la voie nigrostriatale.
•La dihydroergotamine, antagoniste 5HT7, est utilisée comme an-
timigraineux.
• La Fluoxétine (Prozac*), la Paroxétine (Deroxat*), la Sertaline
(Zoloft*) et la Fluvoxamine (Floxyferal*) sont des inhibiteurs
sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS), utilisés comme
antidépresseurs.
B- Syndrome sérotoninergique
1- Circonstances de survenue
•Complication précoce survenant habituellement dans les 2 jours
suivant l’introduction du traitement incriminé. Il est du, le plus
souvent, à l’association de deux médicaments ayant chacun un
effet sérotoninergique. Il existe quelques cas liés à un seul
médicament, souvent dans un contexte de surdosage. Parfois, le
syndrome sérotoninergique survient lors de l’introduction d’un
médicament sérotoninergique trop tôt après l’arrêt d’un autre
médicament sérotoninergique à longue demi-vie d’élimination.
•Le syndrome a des similitudes avec les syndromes carcinoïdes
liés à des tumeurs intestinales sécrétant la sérotonine
60
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Le principal diagnostic différentiel est le syndrome malin des
neuroleptiques.
2- Critères du diagnostic du syndrome sérotoninergique
•Les premières descriptions remontent aux années 1960. Le syn-
drome sérotoninergique a alors été décrit comme la conséquence
d’une interaction pharmacodynamique entre IMAO (inhibiteurs
de la monoamine oxydase) et opiacés.
L’analyse sémiologique des nombreux cas rapportés a permis
d’établir des critères diagnostiques.
•Au moins trois des signes cliniques suivants sont présents, fai-
sant suite à l’introduction d’un médicament augmentant l’activité
sérotoninergique ou à une augmentation de sa posologie :
-Altération de l’état mental
-Agitation
-Myoclonies
-Hyperréflexie
-Tremblement
-Incoordination motrice
-Sueurs abondantes
- Fièvre
- Diarrhée
•Les autres causes possibles ont été exclues (infectieuses, méta-
boliques, toxiques).
•Les troubles coïncident avec le début du traitement ou
l’augmentation récente des doses d’un médicament sérotoniner-
gique ; en l’absence d’une adjonction ou d’une augmentation des
doses d’un traitement neurololeptique.
3- Substances impliquées
•Le syndrome sérotoninergique est une conséquence connue de
l’interaction pharmacodynamique entre les inhibiteurs de la
monoamine oxydase et les autres antidépresseurs. Il est également
favorisé par une interaction entre les inhibiteurs sélectifs du
recaptage de sérotonine et d’autres familles thérapeutiques :
IMAO sélectif de type A, antidéprésseurs tricycliques, lithium,
IMAO B utilisé dans la maladie de parkinson (sélégiline), pé-
thidine ainsi que d’autres morphininques (dextrométhorphane,
hydromorphone, tramadol), buspirone, neuroleptiques atypiques,
triptans et Erythromycine (qui est un inhibiteur de CYP3A4). Ce
dernier médicament peut engendrer le même syndrome en cas
d’association avec les tricycliques. Le linézolide qui est un anti-
61
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
biotique, a une activité IMAO non sélective et expose au même
risque d’interaction.
•Un intervalle doit être respecté entre les différents antidéprés-
seurs pour éviter ce syndrome selon les modalités mentionées plus
loin. Mais le syndrome peut être observé en cas de monothérapie
d’antidépresseur pour le moclobémide, les ISRS, les tricycliques.
•Le tableau suivant résume les substances responsables de syn-
drome sérotoninergique et les mécanismes impliqués :

Classe Mécanisme
Antidépresseurs •Par inhibition du métabolisme de la sérotonine
et lithium - Inhibiteurs réversibles de la monoamine oxydase : les IMAO
sont au premier plan du risque de syndrome sérotoninergique,
qu’ils soient non sélectifs (l’iproniazide, un antidépresseur),
sélectifs de type A (le moclobémide, un antidépresseur) ou
sélectifs de type B (la sélégiline, utilisée comme antiparkinso-
nien).
•Par inhibition de la recapture de la sérotonine
- Antidépresseurs tricycliques : imipraminiques qui sont des
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradré-
naline (l’amitriptyline, l’amoxapine, la clomipramine, la désipra-
mine, la dosulépine, l’imipramine).
-Antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la
sérotonine (IRS) (citalopram, escitalopram, fIuoxétine, fIu-
voxamine, paroxétine, sertraline).
- Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la nora-
drénaline : venlafaxine. Milnacipran.
•Par augmentation non spécifique de l’activité de la sérotonine
•Pour le lithium le mécanisme est indéterminé
Antiparkinsoniens •Par inhibition du métabolisme de la sérotonine
- inhibiteur réversible de la monoamine oxydase
•Indéterminé
- Agonistes dopaminergiques
Antalgiques et antimigrai- •Par inhibition de la recapture de la sérotonine : Certains
neux opiacés (le dextrométhorphane, l’hydromorphone, la péthidine,
le tramadol).
•Par agonisme des récepteurs sérotoninergiques : antimi-
graineux (dérivés de l’ergot : dihydroergotamine et ergotamine,
triptans : almotriptan, élétriptan, naratriptan, sumatriptan,
zolmitriptan)
Divers • Par inhibition du métabolisme de la sérotonine
- Inhibiteur réversible de la monoamine oxydase (isoniazide)
•Par agonisme des récepteurs sérotoniergiques
- buspirone(Anxiolytique)
• Le linézolide, un antibiotique, a une activité IMAO non
sélective et expose au même risque d’interaction
•Par antagonisme des récepteurs sérotoninergiques :
- Neuroleptiques atypiques clozapine (Léponex) Olanzapine

62
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
(Zyprexa)
•Par libération de la sérotonine
oxitriptan (Tript-OH), diéthylamide (LSD), cocaïne
•Comme précurseurs de la sérotonine (L-tryptophane)
•Indéterminé : antihistaminiques
•Le bupropion (alias amfébutamone) utilisé dans le sevrage
tabagique est un amphétaminique qui inhibe la recapture des
amines biogènes.
•La sibutramine, anorexigène inhibiteur de la recapture des
amines biogènes.
- Phytothérapie
• Le millepertuis antidepresseur (extrait de plante médicinale,
inducteur enzymatique du CYP3A4 et de la glycoprotéine P).

4- Traitement
•Il s’avère symptomatique et toujours basé sur l’arrêt des médica-
ments incriminés. Une hospitalisation en milieu spécialisé s’avère
parfois nécessaire pour faire face aux troubles neurologiques et
végétatifs graves et d’un pronostic parfois défavorable. Il n’y a
pas de preuve concernant l’efficacité des antagonistes sé-
rotoninergiques ou des antagoniste bêta-adrénergiques, parfois
proposés.
•En fait, l’attitude doit être essentiellement préventive. Il convient
d’éviter l’association de deux médicaments ayant des effets
similaires sur la transmission sérotoninergique (par exemple
association de deux antidépresseurs) qui constituent des
associations à risque, d’ailleurs signalées dans les monographies
du Vidal. Concernant les antidepresseurs, il faut un intervalle de
21 jours si passage IMAO à un IRS et un intervalle de 35 jours si
passage IRS à un IMAO .
•Une attention particulière doit être accordée aux décongestion-
nant nasaux, et aux antitussifs dont certains contiennent des
sympathomimétiques ou des dérivés opiacés.

63
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre6- Prostaglandines et dérivés apparen-


tés

I- Structure
•Les précurseurs essentiels de la synthèse des prostaglandines
(PGs) sont l’acide linoléique, dont la désaturation hépatique
permet la synthèse des acides gras polyéthyléniques et, à un degré
moindre, les acides linolénique et eicosapentaénoïque.
•Les prostaglandines primaires sont des acides gras polyinsaturés
à 20 atomes de carbone, dérivant de l’acide prostanoïque. Voir
figure (A).
Elles sont classées en six séries A, B, C, D, E, F. Le chiffre ac-
compagnant la lettre de série indique les doubles liaisons sur les
chaînes latérales. Toutes les prostaglandines comportent un hy-
droxyle en 15 sous le plan de la molécule. Les prostaglandines les
plus étudiées sont les PGE2 et les PGF2α. La lettre α de la
désignation de la prostaglandine F indique que les 2 hydroxyles
en 9 et 11 sont sous le plan de la molécule. La lettre β désigne la
prostaglandine F dont l’hydroxyle en 9 est au-dessus du plan de la
molécule.
•Les dérivés apparentés ou prostanoïdes sont les endopéroxydes
(PGG2), les thromboxanes (TX), la PGI2, les acides gras
hydroxylés et les leucotriènes.
Les prostaglandines et les leucotriènes dérivent des acides gras polydé-
saturés à 20 carbones ω 6 et ω 3 (d’où le nom d’eicosanoïdes donné à
l’ensemble) et plus particulièrement de l’acide arachidonique, sous l’action
de la cyclooxygénase (prostaglandines) et de la lipoxygénase
(leucotriènes). La figure (B) résume les voies de synthèse des prosta-
glandines.

II- Biosynthèse et biotransformations


•On connaît mal les facteurs qui orientent l’acide arachidonique
vers les prostaglandines (PGI2 ou thromboxanes), plutôt que vers
la voie des leucotriènes. Les phospholipases, enzymes clés de la
libération de l’acide arachidonique (à partir des phospholipides
d’origine membranaire), jouent un rôle essentiel dans la
biosynthèse de ces médiateurs.

64
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

COOH
Acide

Cyclooxygéna
se

O
PGH2
COOH

OH
Prostacycline Thromboxane synthase
synthase
COOH
O
O COOH

OH OH
PGI2 TXA2

O
O OH

O O O

PGE2 PGD2 PGF2α


Fig (A)-structures chimiques et biosynthèse des principales
prostaglandines
PG :Prostaglandine ; TX : thromboxane ; PGI2: prostacycline; PGH2, PGE2,
PGD2, et PGF2α : différentes formes d’endoperoxydes.

Un certain nombre de facteurs limitants (ou favorisants) sont


susceptibles de modifier cette biosynthèse. Voir figure (C).
•Les PG, quelle que soit leur origine, ont une demi-vie
d’élimination très brève (T1/2α= quelques minutes, t1/2 β= une
dizaine de minutes), étant rapidement inactivées, particulièrement
au niveau pulmonaire et rénal. Le mécanisme mis en jeu est celui

65
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
de la bêta-oxydation et de l’oméga-oxydation, mécanismes de
dégradation habituels des acides gras. Cette dégradation limite
sérieusement l’efficacité des PG introduites par voie veineuse
(passage pulmonaire).
A- Effets pharmacologiques
Les eicosanoïdes (et les PG en particulier) sont impliqués dans de
nombreux processus physiologiques ou pathologiques.
1- Système nerveux central
Les prostaglandines pourraient être des neurotransmetteurs. La
prostaglandine PGE2 détermine une hyperalgie.
2- Muscle lisse vasculaire et bronchique
Les PGE2 induisent une relaxation musculaire lisse bronchique et
vasculaire (rénale en particulier); de la même manière, chez le
fœtus ou nouveau-né, ces produits empêchent la fermeture du
canal artériel.
La PGF2α est, au contraire, un puissant bronchoconstricteur et
vasoconstricteur pulmonaire.
L’équilibre entre la prostacycline (PGI2) et le thromboxane
(TXA2) joue un rôle majeur dans la régulation de la circulation
rénale lors de la diminution du volume circulant efficace: il s’agit
d’un effet vasodilatateur en équilibre avec le système va-
soconstricteur rénine-angiotensine/catécholamines.
3- Appareil urinaire et équilibre hydrosodé
Les PG contractent les fibres lisses urétérales. PGA12 et PGE2
entraînent une augmentation de l’excrétion de Na+, K+, H2O.
4- Appareil respiratoire
Les PGF2α sont bronchoconstrictrices et les PGI1 sont bron-
chodilatatrices
5- Tube digestif
Les PGI1 et les PGE2 inhibent la sécrétion acide gastrique et, de
manière indépendante de cet effet, exercent un pouvoir cyto-
protecteur par augmentation du flux sanguin muqueux et sti-
mulation de la sécrétion de mucus et de bicarbonates. Il en résulte
une augmentation de la résistance aux agents agressifs,
particulièrement aux anti-inflammatoires non stéroïdiens.
66
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
PGE1, PGE2, PGF2α ont un effet moteur très important sur la
musculature longitudinale intestinale, et relaxant sur les muscles
circulaires.
6- Agrégation plaquettaire
Le TXA2 et la PGI2 jouent un rôle très important dans l’agrégation
plaquettaire, le premier comme proagrégant puissant, la seconde
comme anti-agrégant. L’enrichissement du régime en acide
oméga 3 eicosapentaénoïque (huile de poisson) est un moyen de
favoriser la synthèse des PGI2 et donc de diminuer l’agrégabilité
plaquettaire.
7- Effet sur l’utérus gravide
Toutes les PG (à l’exception des PGI2) ont un effet stimulant sur
le muscle utérin. PGF2α a une action constamment efficace alors
que PGE2 ne provoque de contraction utérine qu’au cours de la
gestation. L’efficacité ocytocique des PG est d’autant plus grande
que le terme est proche. Cette action de contraction du corps
utérin s’accompagne de relaxation du col, favorisant ainsi
l’expulsion foetale.
8- Actions métaboliques
Les PGE2 sont hyperglycémiantes. Certaines prostaglandines
activent l’adénylcyclase, alors que d’autres l’inhibent avec
comme conséquence une inhibition de la formation de l’AMPc à
partir de l’ATP et une inhibition de la lipolyse.
9- Actions sur la douleur et l’inflammation
On peut citer comme exemple les anti-inflammatoires non sté-
roïdiens qui sont des inhibiteurs de la cyclo-oxygénase.
Les antileucotriènes inhibent la part de l’inflammation et de la
bronchoconstriction due aux leucotriènes. Les antagonistes des
leucotriènes ont actuellement leur place dans les recommanda-
tions internationales pour le traitement de l’asthme léger et mo-
déré persistant et l’asthme lié à une intolérance aux AINS.
10- Actions sur l’hémostase

67
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Prostaglandines E2, F2, D2

(+)
Prostaglandines synthétase
Thromboxanes A2, B2

Prostacycline PGI2

(+)

(+) Prostacycline
synthétase

Prostaglandines H2
Prostaglandine G2

Thromboxanes (+)
synthétases Cyclo-xygénases

Acide arachidonique

(+)
lipoxygénases

Leucotriènes LTB4, LTC4, LTE4

Fig (B)- Voies de synthèse des prostaglandines

La prostacycline (PG I2) est le plus puissant anti-agrégant pla-


quettaire connu. Elle est trente fois plus puissante que la PGE1. Le
thromboxane A2 est le plus puissant pro-agrégant connu. On sait
que l’effet antiagrégant de l’acide acétylsalicylique est lié en
grande partie à l’inhibition irréversible de la cyclooxygénase qui
modifie la balance TXA2/PGI2.

68
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
B- Applications cliniques (actuelles) des prostaglandines
1- Bases
Les PG (et/ou leurs dérivés) ont trouvé actuellement un certain
nombre d’applications approuvées ou potentielles, essentiellement
dans les sphères gynécologique, digestive, cardiovasculaire, et
dans le traitement de l’insuffisance érectile. L’antagonisme des
prostaglandines peut ête à l’origine d’effets thérapeutiques
importants.
2- Indications reconnues des prostaglandines et analogues
Les produits commercialisés actuellement sont soit les PG elles-
mêmes (PG), soit des dérivés. Les indications reconnues des PG
sont particulièrement bien ciblées:
•Pathologie ulcéreuse digestive, secondaire aux AINS :
L’utilisation du Misoprolol (Cytotec*), analogue de la prosta-
glandine E1 est utilisé à titre d’antisécrétoire et de cytoprotecteur
de la muqueuse gastro-duodénale, surtout pour la prévention des
lésions digestives induites par les AINS. Sa demi-vie courte im-
pose une répétition fréquente des prises (2 à 4 fois par jour),
éventuellement contraignante. La contre-indication chez la femme
en période d’activité génitale est également un élément limitant
important.
• Les dérivés des prostaglandines E2 par voie locale (Prostine E2
gel) ou générale sont prescrits pou l’induction d’interruption de
grossesse ou d’accouchement provoqué. CI générales : asthme,
angor, hypertension, troubles du rythme, antécédents thrombo-
emboliques, diabète grave, glaucome, hyperthyroïdie, ulcère
gastrique.
•L’Ilomédine (Iloprost*) analogue de la prostacycline est prescrite
dans le traitement des artériopathies graves périphériques
(maladie de Buerger). Ce médicament anti-ischémique entraîne
une dilatation artériolaire et veinulaire, une inhibition de
l’agrégation et de l’adhésion plaquettaire.
•Alprostadil, PG E1 (Prostine VR*) est prescrit pour maintenir la
perméabilité du canal artériel chez les nouveau-nés porteurs de
malformations cardiaques ducto-dépendantes.

69
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• L’époprosténol (Flolan*) est utilisé dans la prévention de
thrombose dans les circuits de circulation extracorporelle pour son

Antagonistes

Antagonistes des (-)


thromboxanes Inhibiteurs de la cyclo-oxy génase (AINS)

(-)
PGI2

Thromboxanes Phospholipide membrannaire

Inhibiteurs de la (-) (-)


thromboxane (-) Inhibiteurs de la
synthétase phospholipase A2

Acide arachidonique
endopéroxydes

(-) Inhibiteurs de la lipo-


Antagonistes PGE2, PGF2α (-) oxygénase

Antagonistes des leucotriènes leucotriènes

(-)

Fig (C)- Interférences des médicaments et des prostaglandines

effet antiagrégant plaquettaire. C’est également un médicament de


l’HTAP entraînant une vasodilatation directe au niveau de la
circulation artérielle pulmonaire
• L’injection intracaverneuse de l’alprostadil (Caverject*) a été
préconisée dans les impuissances, neurologiques ou vasculaires;
ce produit, métabolisé localement, entraînant, semble-t-il, moins
de priapisme que les thérapeutiques « classiques » (par papavérine
+ phentolamine).
•La prostaglandine E2 a été essayée comme bronchodilatateur
dans l’asthme, mais les effets secondaires, nausées, vomisse-
ments, diarrhées, sont trop importants.
•Le latanaprost, analogue de la prostaglandine F2α, est proposé
dans le glaucome à angle ouvert, seul, Xalatan, ou associé au
timolol, Xalacom.

70
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre7- Pharmacogénétique et pharmaco-


génomique

I- Concepts de base et définitions


A- Concepts de base
• La pharmacogénomique est l’étude de la variabilité de notre gé-
nome en relation avec la réponse aux médicaments et des
mécanismes génétiques des variations individuelles de la réponse
médicaments. Ces connaissances visent l’adaptation de certains
traitements à chaque patient.
• Par l’identification de séquences spécifiques de notre génome,
elle vise à identifier des sujets répondeurs ou non répondeurs à
certains médicaments ainsi que des sujets à risque de développer
des effets indésirables.
•Pour une dose donnée de médicament, la réponse des individus
est plus ou moins forte, excessive chez certains et faisant courir
un risque de toxicité, insuffisante chez d’autres et pouvant
entraîner l’inefficacité du traitement.
• Le mécanisme d’interposition entre le gène et la réponse de l’or-
ganisme a deux origines possibles.
L’une pharmacodynamique, s’il s’agit d’une modification du ré-
cepteur auquel le médicament vient se lier. L’autre, pharmaco-
cinétique, s’il s’agit d’une modification du métabolisme de celui-
ci liée à une différence dans l’équipement enzymatique.
• Il existe certes des atypies entraînant des variations dans
l’activité d’une enzyme, mais il existe le plus souvent une va-
riabilité individuelle de la réponse aux médicaments. Par exemple,
les cytochromes hépatiques, enzymes oxydant les xénobiotiques
et jouant un rôle central dans leur métabolisme, peuvent exister
chacun sous plusieurs centaines de variétés, appelés iso-enzymes.

71
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Le terme " pharmacogénétique " est apparu dès la fin des années

N A N B

Taux sérique Taux sérique

Fig (A)-Histogramme de répartition de la population en fonction des taux sériques


faisant distinguer deux sortes de populations.
A : cas de l’INH, pharmacogénétique monogénique et répartition bimodale dans la
population.
B: pharmacogénétique polygénique (répartition unimodale)

cinquante pour désigner les " modifications des réponses phar-


macologiques sous l’influence de l’hérédité ". À cette époque,
l’analyse génétique n’était possible que par l’analyse des expres-
sions phénotypiques, en particulier des différences interindivi-
duelles dans l’équipement enzymatique et ses conséquences sur le
métabolisme des produits. Dans un certain nombre de cas,
devenus classiques, tels la sensibilité à la succinyldicholine ou le
métabolisme de l’isoniazide, l’identification du phénotype par des
tests biologiques a pu conduire à des applications cliniques encore
utilisées aujourd’hui.
•La pharmacogénomique s’adresse au gène lui-même et non plus
seulement à son expression. Elle englobe la pharmacogénétique et
la renouvelle en identifiant les variations du génome responsables
des modifications des réponses de l’organisme. Lorsque les liens
entre les mutations d’un ou plusieurs gènes et leurs traductions au
niveau d’une enzyme ou d’un récepteur, ainsi que les
conséquences cliniques de celles-ci, sont établis, l’analyse du
génome, désormais rapide et sûre, permet d’éviter le recours à des
dosages et à des tests biologiques souvent longs, délicats, parfois
imprécis et toujours indirects.

72
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
• En médecine, les tests qui visent à mieux choisir un médicament
et la dose à prescrire en fonction des caractéristiques du patient,
constituent l’un des segments de marché du diagnostic
moléculaire les plus porteurs, avec des croissances annuelles de
l’ordre de 25 %.
B- Objectifs
• La pharmacogénétique a pour objectif l’individualisation du
traitement médicamenteux, à savoir la sélection d’une substance
et l’adaptation de sa posologie, par l’évaluation directe
(génotypage) ou indirecte (phénotypage) de la constitution gé-
nétique du patient.
•La variation génétique a des implications sur la réponse au traite-
ment instauré pouvant être en relation avec une variabilité
pharmacocinétique ou pharmacodynamique
•Les effets pharmacocinétiques incluent les fluctuations interindi-
viduelles d’absorption, de distribution, de métabolisme ou
d’excrétion du médicament, pouvant résulter en des concentra-
tions inappropriées du médicament ou de ses métabolites avec
comme conséquences une diminution de l’effet thérapeutique ou
une toxicité accrue. La connaissance de l’enzyme qui catalyse la
voie principale du métabolisme d’un médicament fournit une base
pour comprendre les conséquences thérapeutiques des variations
du génotype de cette enzyme.
•Les effets pharmacodynamiques impliquent des variations
d’efficacité ou de toxicité entre individus malgré une concentra-
tion adéquate du médicament au site d’action. La variation au
niveau du gène impliqué module l’effet thérapeutique par son rôle
dans les mécanismes d’action du médicament.
•La pharmacogénétique peut être impliquée dans les mécanismes
pathogéniques. Dans ce cas, la variation génétique est liée à la
pathologie. La réponse au traitement est donc directement liée à
1’hétérogénéité de la pathologie et aux différents mécanismes
pathogéniques. Un médicament ayant pour cible une molécule
impliquée dans la pathologie pour un sous-groupe de patients et
active chez celui-ci peut ne pas montrer la même efficacité chez
des patients appartenant à un autre sous-groupe.

II- Polymorphismes génétiques


Le tableau suivant résume les principaux polymorphismes gé-
nétiques affectant la réponse aux médicaments en relation avec

73
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
des modifications de la pharmacodynamie ou de la pharmaco-
cinétique:
Gène Médicaments - substrats Conséquences cliniques
liées au polymorphisme
Enzymes du métabolisme
CYP2C9 anticoagulants oraux (warfa- Hémorragies chez les ML
rine, acénocoumarol)
sulfamides hypoglycémiants Hypoglycémie chez les ML
(glibenclamide, glipizide)
CYP2C19 oméprazole Théoriquement :efficacité
accrue chez Ml, utilisation de
doses adaptées, en fait
aucune conséquence clini-
que n’est retrouvée.
Clopidogrel Les métaboliseurs lents sont
résistants au clopidogrel du
fait d’une absence
d’activation métabolique de
ce médicament. La FDA
recommande le génotypage
du CYP2C19 chez les ma-
lades candidats aux stents
coronariens et au
clopidogrel.
CYP2D6 antidépresseurs tricycliques Inefficacité chez
MUR/toxicité chez ML
codéine Absence d’analgésie chez
ML (prodrogue)
dihydropyrimidine déshy- 5-fluorouracile Neurotoxicité chez les ML
drogénase
N-acétyltransférase 2 isoniazide Neurotoxicité chez les ML
hépatotoxicité
thiopurine S-méthyltransfé- azathioprine, mercaptopu- Hématotoxicité, myélosup-
rase rine, thioguanine pression chez les ML

uridine diphosphate glucu- irinotécan Diarrhée, neutropénie


ronosyltransférase
Transporteurs
MDR1 ou multi-drug resis- digoxine, antiprotéases anti- Biodisponibilité et efficacité
tance rétrovirales antiépileptiques, variables
tacrolimus Résistance au traitement
anticancéreux en cas de
surexpression de la protéine
Certaines corrélations restent controversées dans la littérature ou à confirmer sur un plus
grand nombre de patients. CYP, cytochromes P450; DPD, dihydropyrimidine dés-
hydrogénase;. ML: métaboliseurs lents; MUR: métaboliseurs ultrarapides.

74
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
A- Polymorphismes génétiques et susceptibilité aux médicaments
•Le séquençage complet du génome humain et la mise au point de
technologies performantes d’analyse des gènes a permis
l’identification de variations de séquences dans les gènes cibles
des médicaments.
1- Phénotypes métaboliques
•Certaines voies métaboliques montrent une distribution d’activité
bimodale ou trimodale, suggérant qu’elles sont contrôlées par un
seul gène, et l’on a identifié des polymorphismes de ces gènes.
Voir figure (A).
•Les polymorphismes génétiques peuvent être responsables de va-
riations d’expression ou d’activité des enzymes du métabolisme
des médicaments. Ils s’expriment dans la population générale sous
la forme de différents phénotypes métaboliques, définissant
généralement deux groupes d’individus:
-métaboliseurs rapides ou MR : activité normale (phénotype EM)
pour « extensive metabolizers » qui ont un métabolisme actif.
-et métaboliseurs lents ou ML : déficit d’activité enzymatique
(phénotype PM) pour « poor metabolizers » qui ont une cataly-
tique plus faible voire aucune activité métabolique.
•L’existence de métaboliseurs ultrarapides ou MUR (activité
augmentée correspondant à des patients ayant une double ou de
multiples copies du gène) ou de métaboliseurs intermédiaires
(MI) avec activité réduite (phénotype 1M) pour « intermediate
metabolizers » est possible pour certaines enzymes. Il s’agit dans
ce cas de sujets hétérozygotes pour le gène codant une enzyme
n’ayant aucune activité métabolique.
•La fréquence des différents phénotypes est variable en fonction
de l’enzyme et, pour une même enzyme, variable en fonction de
l’origine ethnique ou géographique des populations étudiées. Les
conséquences cliniques des polymorphismes génétiques dé-
pendent de plusieurs facteurs: importance de la voie métabolique
polymorphe dans la clairance globale du médicament, ad-
ministration du médicament sous forme active ou de pro-drogue,
activité des métabolites.
•Ces polymorphismes sont de la plus grande importance clinique
lors de l’administration de médicaments pour lesquels il n’existe
pas d’autre voie d’élimination. Les conséquences cliniques d’un
phénotype PM vont alors découler de l’accumulation du

75
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
médicament ou, le cas échéant, de l’absence de formation de
métabolites actifs.
2- Système du cytochrome P. 450
•La première étape du métabolisme de nombreux médicaments
est catalysée par un groupe d’oxydases à fonction mixte, les cyto-
chromes P450 (CYP), localisés dans la membrane du réticulum
endoplasmique dans le foie et l’intestin. Ces systèmes
enzymatiques oxydent les molécules de médicament par le biais
d’un grand nombre de réactions, comprenant les réactions
d’hydroxylation aromatique, de N-déméthylation, d’O-démé-
thylation et de sulfoxydation. Les produits de ces réactions sont en
général plus polaires que les molécules dont ils dérivent (et plus
facilement excrétés par le rein).
• Certaines de ces enzymes présentent un polymorphisme généti-
que donnant parfois naissance à des enzymes ayant une activité
métabolique réduite ou nulle et susceptible de provoquer une
toxicité dose-dépendante. Inversement, lorsque la toxicité ou les
effets métaboliques sont dus à un métabolite, les individus
présentant une faible activité enzymatique répondront mal au
médicament, tandis que ceux dotés, pour des raisons génétiques,
d’une activité élevée répondront au médicament de façon accrue.
Parmi les exemples d’enzymes oxydantes présentant une
distribution polymorphe, on peut citer CYP2D6, CYP2C9 et
CYP2C19.
B- Prédiction de la réponse aux médicaments: phénotypage ou
génotypage
•On vient d’inaugurer l’ère de la prescription médicamenteuse
individualisée.
•Certains tests sont dorénavant disponibles (phénotypage et gé-
notypage) et utilisables en pratique clinique afin d’identifier les
différentes activités enzymatiques ou les variantes alléliques. Ils
sont une aide à l’individualisation de la thérapeutique afin de
prédire la posologie adéquate du médicament approprié à chaque
patient, en anticipant les effets indésirables ou l’inefficacité
thérapeutique. Ils permettent, par ailleurs, de faire la distinction
entre un problème de compliance et un métabolisme ultrarapide,
ou entre un abus médicamenteux (opiacés) et un déficit méta-
bolique.
1- Les méthodes de phénotypage
76
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Les méthodes de phénotypage reposent soit sur une mesure de
l’activité enzymatique soit sur l’administration d’un substrat-test
(en général un médicament), suivie d’une mesure des quantités
résiduelles de substrat et/ou de leurs métabolites à partir d’un
échantillon biologique, urinaire ou sanguin. On détermine le
rapport métabolique entre la quantité de substance retrouvée sous
forme inchangée et celle d’un (ou plusieurs) métabolite (s),
rapport qui est le reflet de l’activité enzymatique étudiée. Les
méthodes de phénotypage présentent certains inconvénients
(absence d’un substrat-test présentant toutes les qualités requises,
spécificité, innocuité ou contre-indications) qui limitent leur
utilisation.
2- Le génotypage
•En pratique, le génotypage est plus largement utilisé que le phé-
notypage puisqu’il est applicable à l’analyse de l’ensemble des
polymorphismes affectant non seulement la pharmacocinétique
des médicaments, mais également leurs effets (récepteurs, cibles
protéiques). Des études de corrélation phénotype/génotype,
complétées parfois par la caractérisation fonctionnelle in vitro des
variants, sont un préalable nécessaire à l’utilisation de ces tests.
•Le génotypage permet l’analyse des mutations génétiques fonc-
tionnelles importantes codant pour des enzymes spécifiques. Il
peut être réalisé par polymerase chain reaction (PCR) couplée à
une analyse par restriction (Restriction fragment length polymor-
phism ; RFLP) après hydrolyse avec l’aide d’enzymes de
restriction ou plus simplement au moyen de sondes fluorescentes
hybridant spécifiquement chaque allèle. Il a donc l’avantage de
permettre une détermination directe des informations génétiques
de l’individu, et comme il ne nécessite pas la prise d’un substrat
test, il est moins invasif.

III- Quelques applications pratiques


A- Position du problème
Le décodage intégral du génome humain fait entrevoir des pers-
pectives passionnantes, mais les retombées concrètes de cette
avancée sur la prise en charge des patients se font attendre. Dans
quelle mesure la pharmacogénétique va-t-elle modifier nos
habitudes de prescription ? quelles sont les conditions nécessaires
pour ne tirer le meilleur parti pour nos patients ? quels risques
pourraient entraîner un recours immodéré à ce nouveaux type de
77
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
tests ? quels critères de rationalité le praticien doit-il exiger avant
de demander un génotypage ?
B- L’intégration de la pharmacogénétique à la pratique médicale
•L’intégration de la pharmacogénétique à la pratique médicale est
une nouvelle approche thérapeutique qui pourrait augmenter
l’efficacité des médicaments et diminuer les risques de toxicité en
ciblant, par l’étude de marqueurs génétiques, le traitement en
fonction des caractéristiques propres des patients. Il est plus
probable que l’apport de la pharmacogénétique se portera sur
l’efficacité, plutôt que sur la toxicité thérapeutique.
•L’implémentation de tests de pharmacogénétique permettant de
stratifier la population selon une probabilité de réponse à un
traitement sera sans doute plus aisée étant donné que ces tests
pourraient être recommandés par les praticiens et remboursés plus
facilement vu le plus grand nombre de patients pour qui ces
mesures pourraient être appliquées.
•Parmi les exemples importants, on peut citer le CYP2D6, impli-
qué dans le métabolisme de plus d’une centaine de médicaments
(anti-arythmiques, β-bloquants, psychotropes, dérivés opiacés à
visée analgésique ou antitussive), soit 20 à 25% de l’ensemble des
médicaments d’usage courant et d’intérêt thérapeutique majeur.
On sait maintenant que la phenformine est métabolisée par un
autre cytochrome présentant un polymorphisme, l’enzyme
CYP2D6. Les patients qui présentent génétiquement une activité
CYP2D6 faible courent un risque particulier d’acidose lactique
après traitement par la phenformine.
•Des adaptations de la posologie des antidépresseurs en fonction
du phénotype sont proposées par de nombreux auteurs qui
recommandent des doses pouvant aller de 30% de la dose stan-
dard conventionnelle pour les ML, à plus de 200% pour les MUR.
•En cancérologie, le dépistage de la maladie de Gilbert (déficit
partiel en glucuroconjugaison) est effectué lorsque l’on envisage
un traitement par l’irinotécan pour éviter des toxicités hé-
matologiques ou digestives très graves.
Le cas de la thiopurine méthyl-transférase (TPMT), enzyme
responsable de l’élimination de la 6-mercaptopurine et de
l’azathioprine, illustre particulièrement bien l’intérêt de la
pharmacogénétique. La thiopurine méthyltransférase est l’enzyme
clef de l’élimination de l’azathioprine. Les variations de son

78
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
activité peuvent expliquer les différences interindividuelles de
l’efficacité et de la toxicité du médicament.
La population générale peut être divisée en 3 groupes ayant des
niveaux d’activité TPMT différents : 89 % des individus ont une
forte activité TPMT dite normale, 11 % des sujets ont un niveau
d’activité intermédiaire et 0,1 % ont une activité TPMT quasi
nulle. Ces variations sont liées à la présence de mutations dans le
gène de la TPMT. Le test phénotypique permet de détecter le
phénotype normal, hétérozygote ou homozygote du patient. Les
individus hétérozygotes, porteurs d’un allèle normal et d’un allèle
muté, ont une activité intermédiaire, et les individus homozygotes,
dont les 2 allèles sont mutés, sont totalement déficients. En cas de
phénotype normal, une dose normale du traitement peut être
prescrite. Si l’activité est intermédiaire ou faible, la posologie doit
être diminuée du fait du risque d’hématotoxicité. Si l’activité est
nulle, le traitement doit être évité. Dans tous les cas, un
génotypage permettra de préciser le type de mutation et/ou de
découvrir de nouvelles mutations.
•La variabilité interindividuelle dans la perception de la douleur et
la réponse aux opiacés est bien connue. De très nombreux gènes
ont été proposés comme candidats pour l’étude de la composante
génétique de la douleur et la pharmacogénétique des opiacés. Il
apparaît clairement que plusieurs polymorphismes génétiques
contribuent à moduler la nociception et la réponse antinociceptive
aux morphiniques ; en particulier ceux intervenant dans la
pharmacocinétique et métabolisme des opiacés (cytochrome
P450) ou de neurotransmetteurs (catéchol-O-méthyltransférase),
ainsi que ceux affectant la pharmacodynamique ou les cibles
thérapeutiques comme le récepteur µ aux opiacés ou le plus
inattendu récepteur à la mélanocortine 1. La codéine subit au sein
de l’organisme une transformation qui permet sa métabolisation
rapide en morphine à hauteur de 10% en moyenne de la dose
administrée. L’élément responsable de cette transformation est le
cytochrome CYP2D6. Toutefois l’efficacité de la métabolisation
est variable suivant les individus et les groupes ethniques et on
divise la population en trois groupes : les métaboliseurs faibles,
normaux ou forts.
•Phénotype d’acétylation
On distingue selon la vitesse d’acétylation de l’isoniazide (I.N.H)
par la N-acétyltransférase dans le foie, des acétyleurs rapides
(A.R) et des acétyleurs lents (A.L).

79
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
A posologies égales les AL sont plus exposés aux effets indésira-
bles de l’INH que les A.R.
•Le développement de la pharmacogénétique intéresse directe-
ment d’autres classes thérapeutiques, par exemple les anticoa-
gulants, les immunosuppresseurs ou les anti-protéases.
•Le génotypage de l’enzyme qui métabolise les AVK au niveau
du foie (cytochrome P450 2C9 ou CYP2C9) et la cible protéique
des AVK, la vitamine K époxyde réductase (VKORC1) permet
d’identifier les différents variants allèliques du patient et donc de
définir son génotype qui permettra d’individualiser précocement
la posologie d’AVK. Durant la phase d’initiation du traitement
par anticoagulant le patient est exposé à un risque de surdosage et
donc à un risque hémorragique accru. Les adaptations de
posologies peuvent être très importantes: 0,7% de la population
occidentale dont le génotype comprend des métaboliseurs lents du
CYP2C9 nécessitent des doses réduites d’anticoagulants oraux de
l’ordre de 80% par rapport à la dose journalière conseillée pour
débuter le traitement. Chez les personnes porteuses de gènes
homozygotes TT (SNP C1173T) de VKORC1 qui représentent
16% de la population occidentale, les doses doivent être réduites
de 50%. Ces tests génétiques ont fait l’objet d’une
recommandation de l’administration américaine, la Food and
Drug Administration (FDA) en 2007. Ces génotypages sont déjà
proposés aux cliniciens dans quelques laboratoires hospitaliers.
•Un médicament utilisé dans le traitement du sida, l’abacavir
(Ziagen), provoque des effets indésirables de type allergique chez
10 % des patients. Un allèle HLA est très prédictif de ces effets.
Un premier grand essai clinique prospectif, contrôlé et randomisé
de pharmacogénétique, PREDICT-1, a montré en 2007 que le test
fondé sur la détection de ce motif HLA est parfaitement prédictif
du risque allergique. Malgré cela, très peu de collègues utilisent
ce test. Il n'est certes pas remboursé. A l’inverse, les tests
pharmacogénétiques sont très utilisés aux Etats-Unis et dans
d’autres pays européens, au Royaume-Uni notamment.
•Le glipizide, un hypoglycémiant administré par voie orale, est
métabolisé par le CYP2C9 et l’on observe qu’une dose usuelle de
ce produit provoque chez les sujets CYP2C9 présentant un
phénotype de «mauvais métaboliseurs» une diminution excessive
de la concentration du glucose dans le sang exposant à
l’hypoglycémie grave.

80
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre8- Prescriptions et terrains généti-


ques particuliers

I- Déficit en glucose-6-phosphate-deshydrogénase (G6PD).


•Le polymorphisme de la G6PD affecte un processus protégeant
les érythrocytes envers l’action de substances à haut potentiel
oxydatif ; sa fréquence élevée dans les populations méridionales
et africaines est expliquée par la relative résistance envers la
malaria qu’elle conférerait aux porteurs. Dans cette classe figurent
aussi les mutations du canal potassique HERG prédisposant à
l’allongement du QT induit par des médicaments, les déficits en
glutathion affectant la résistance des cellules envers les radicaux
libres , les porphyries...
•Le déficit en G6PD (glucose-6-phosphate-deshydrogénase) où
l’administration de certains médicaments oxydants aux sujets por-
teurs peut causer une hémolyse liée à la disparition du glutathion
réduit.
• Le déficit en G6PD type africain (activité enzymatique 8 à 20 %
de la normale).
Risque d’hémolyse moindre que dans le type méditerranéen après
administration des médicaments incriminés.
- Seules les hématies les plus vieilles sont détruites.
- Même si l’administration du médicament se poursuit, l’hémolyse
peut se limiter d’elle même.
• Le déficit en G6PD type méditerranéen (activité enzymatique 0
à 4 % de la normale).
Le déficit enzymatique est plus important que dans le précédent.
-Les épisodes hémolytiques ne se limitent pas d’eux mêmes et ex-
posent aux conséquences parfois mortelles de l’hémolyse intra-
vasculaire: anurie et choc.
•Les autres variants sont encore mal définis. Il faut considérer
comme potentiellement dangereux, les variants s’accompagnant
d’une activité enzymatique < 20 %, mais la corrélation entre la
gravité clinique et l’activité enzymatique n’est pas absolue.
•Médicaments pouvant provoquer une hémolyse en cas de déficit
en G6P
Ils sont résumés dans le tableau (I)

Tab (I)-Médicaments pouvant provoquer une hémolyse en cas de déficit en G6P

81
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Antalgiques Anti-infectieux Divers
•Aspirine • Quinine •Quinidine
• Acétalinide • Primaquine •Bleu de méthylène
• Phénacétine •Pamaquine •B.A.L
• Glafénine •Pentaquine • Probénécide
• Sulfamides • Phytoménadione
• Dapsone
P.A.S
• Nitrofurantoïne
•Acide nalidixique

II- Phénotype d’acétylation de l’isoniazide


A- Aspects fondamentaux
•L’acétylation de l’isoniazide réalisée grâce à la N-acétyl trans-
férase présente dans le cytosol de la cellule hépatique est la voie
métabolique essentielle d’inactivation de ce médicament chez
l’homme. La N-acétylation est contrôlée par une paire d’allèles
situés sur un seul site génique, le déficit transmis sur le mode
autosomique récessif. Ce déficit est lié à une anomalie génétique
en N-acétyltransférase de type 2 (NAT2). Les sujets homozygotes
pour le déficit NAT2 ont le phénotype acétyleur lent alors que les
sujets homozygotes sans le déficit ou n’ayant qu’un des deux
allèles (hétérozygotes) ont le phénotype acétyleur rapide.
L’expression de NAT2 peut être déterminée par des techniques de
génotypage à partir de lymphocytes. Outre l’allèle de référence
correspondant au phénotype acétyleur rapide, NAT2* 4, il existe
au moins 25 allèles mutants . Certains mutants n’ont pas de
conséquence sur le phénotype et la capacité d’acétylation . Le
phénotype peut être étudié à partir de l’acétylation de l’isoniazide,
et plus couramment maintenant de la caféine.
B- Répartition dans la population
•Dans une population choisie au hasard, les sujets se répartissent
en deux sous population selon la vitesse avec laquelle ils
acétylent ces médicaments: acétyleurs lents (AL) ou inactivateurs
lents et acétyleurs rapides (AR) ou inactivateurs rapides. Ce
polymorphisme génétique conditionne l’efficacité et surtout la
toxicité des médicaments subissant la réaction d’acétylation.
•A posologies égales les acétyleurs lents (AL) sont plus exposés
aux effets indésirables de l’INH que les acétyleurs rapides (A.R).
•La prévalence du déficit d’acétylation est fréquente dans de
nombreuses populations européennes et d’Amérique du Nord (de
82
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
40 à 70 %) . Il est plus faible en Asie, où il est inférieur à 30% .
Dans certains groupes ethniques comme chez les Esquimaux, le
déficit est presque inexistant. Le déficit en NAT2 implique de
nombreux médicaments dont l’isoniazide, les sulfamides, la
procaïnamide, l’hydralazine, la dapsone, la phénelzine,
l’acébutolol et la caféine. Les conséquences cliniques sont ex-
trêmement variées.
•L’histogramme de répartition du taux sanguin ou de la demi-vie
de l’I.N.H est bimodal. Les AL ayant des demi-vies plus longues
et des taux sanguins d’I.N.H plus élevés que les A.R. Cette
distribution bimodale traduisant le caractère monogénique du
contrôle génétique de l’acétylation est retrouvée pour la concen-
tration plasmatique ou urinaire des autres médicaments subissant
cette réaction.
•Le mode de transmission du phénotype d’acétylation est auto-
somal récessif pour les AL et dominant pour les AR. Les AL
seraient par conséquent des homozygotes recessifs et les AR des
homo ou hétérozygotes dominants. On a constaté que les AL sont
plus prédisposés que les AR au développement d’un lupus
spontané (à distinguer du lupus induit). Inversement, il semble
exister une plus grande prévalence d’acétyleurs rapides chez les
diabétiques que dans la population générale. Enfin les trisomiques
21 semblent se comporter comme des AL.
C- Conséquences cliniques
•Les conséquences cliniques sont extrêmement variées.
Concernant l’hépatotoxicité, il semble que celle des sulfamides
soit favorisée par le type d’acétylation. Dans une étude pros-
pective, tous les patients atteints d’hépatite aux sulfonamides
étaient acétyleurs lents (100 %) alors que, dans la population
témoin, ce phénotype n’était observé que chez 55 des sujets. Dans
d’autres études, les atteintes hépatiques et d’autres types
d’hypersensibilité aux sulfamides étaient aussi reliés au phénotype
acétyleur lent. Le rôle du déficit d’acétylation dans
l’hépatotoxicité du sulfamide pourrait être le suivant. Dans ce cas,
les sulfamides sont métabolisés de façon préférentielle par une
autre voie métabolique, l’oxydation par des CYP. Cela pourrait
conduire à une formation accrue de métabolites réactifs, en
particulier des hydroxylamines qui nécessitent une détoxication
très active. L’augmentation de ces métabolites toxiques pourrait
favoriser la survenue d’hépatites. La fréquence des hépatites aux

83
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
sulfamides est de l’ordre de 1 % alors que le phénotype acétyleur
lent est de l’ordre de 50 %. Cela montre qu’il n’est pas le seul
facteur impliqué dans l’hépatotoxicité de ces médicaments. Un
déficit dans la capacité de détoxiquer les métabolites réactifs
pourrait également être en jeu. En revanche, ce déficit n’apparaît
pas impliqué dans l’hépatotoxicité de l’association sulfa-
méthoxazole-triméthoprime chez les patients coinfectés par le
virus de l’immunodéficience humaine.
•De façon similaire, la capacité d’acétylation paraît influencer
l’hépatotoxicité de la dihydralazine. Chez les acétyleurs rapides,
la dihydralazine est principalement détoxifiée par acétylation.
Chez les acétyleurs lents, une plus grande fraction de mé-
dicaments est oxydée par le CYP 1A2 en un métabolite réactif
modifiant le CYP lA de lui-même et conduisant ainsi à la for-
mation d’anticorps anti CYP 1A2 et à une hépatite de type auto-
immun .
D- Implications de l’acétylation de l’isoniazide sur la posologie
•C’est surtout pour l’isoniazide (INH) que la détermination du
phénotype d’acétylation est capitale, car elle permet d’ajuster les
doses du médicament en fonction de chaque malade ce qui permet
d’éviter les accidents toxiques de surdosage auxquels sont expo-
sés les AL. On préconise actuellement de ne pas dépasser pour
l’I.N.H la dose de 7 mg/kg/j, quand on n’a pas la possibilité de
phénotyper le malade.
•On distingue selon la vitesse d’acétylation de l’isoniazide
(I.N.H) par la N-acétyltransférase dans le foie, des acétyleurs
rapides (A.R) et des acétyleurs lents (A.L).
•A posologies égales les AL sont plus exposés aux effets indésira-
bles de l’INH que les A.R.
•Certes en l’absence de dosage sanguin de l’INH, on continue à
prescrire des doses standards d’I.N.H. En fait pour prévenir les
effets indésirables favorisés par le surdosage, il faut rechercher la
dose ajustée calculée pour chaque malade et variant selon le phé-
notype d’acétylation.
Cette dose D’, est telle que: D’(mg/j) = 2 x poids du sujet (kg)/I3.
I3 étant l’indice d’inactivation quotidienne, il est égal à:
(C3 + 0,6)/D. C3 étant la concentration du médicament dans le
sang, exprimée en microgramme/ml et mesurée à la troisième
heure, après administration d’une dose test (D) par voie orale. D
étant exprimée en mg/kg.

84
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
III- Pharmacogénétique dans le domaine cardiovasculaire
•Deux gènes-clés expliquent environ 50% de la variabilité inte-
rindividuelle de réponse aux AVK : le CYP2C9 qui métabolise les
AVK (les métaboliseurs lents et les métaboliseurs intermédiaires
représentent 0,7 et 14% de la population occidentale) et la
vitamine K epoxyde réductase (VKOR) qui recycle la vitamine K
oxydée dans le foie.
•Les polymorphismes génétiques de ces deux gènes-clés sont
relativement prédictifs d’une part de la dose nécessaire d’AVK à
l’état d’équilibre, et d’autre part du risque de surdosage, tant
durant la période d’initiation du traitement qu’au long cours.
Ainsi en connaissant les génotypes du CYP2C9 et de VKOR, on
peut affiner la dose d’AVK nécessaire à chaque patient, tout en
prenant en compte les autres facteurs que sont l’âge, le poids et les
médicaments associés. Les adaptations de posologies peuvent être
très importantes : les rares métaboliseurs lents du CYP2C9 (0,7%
de la population occidentale) nécessitent des doses réduites de
80% par rapport à la dose journalière conseillée pour débuter le
traitement ; chez les homozygotes AA (SNP-1369G>A) de
VKOR qui représentent 16% de la population occidentale, les
doses doivent être réduites de 50%. Avec les techniques récentes
de biologie moléculaire, le résultat du génotypage peut être rendu
en 24 heures, ce qui permet chez un patient en relais héparine-
AVK de débuter l’anticoagulant oral en connaissance de la dose la
plus adaptée à son génotype. Ces génotypages sont déjà proposés
aux cliniciens dans quelques laboratoires et devraient rapidement
être développés largement.

IV- Pharmacogénétique en neuropsychiatrie


Les implications du polymorphisme du gène MDR1, codant pour
une pompe membranaire qui chasse les médicaments hors du
cytoplasme sont importantes à considérer. Exprimé dans
l’endothélium de la barrière hématoencéphalique, ce transporteur
s’oppose à la pénétration cérébrale d’un nombre important de
médicaments et en particulier les anti-épileptiques. Le principal
polymorphisme de ce gène a été associé au risque d’épilepsie
résistante au traitement. Le risque d’épilepsie résistante étant le
même pour tous les anti-épileptiques. Si certains antiépileptiques
étaient connus pour échapper à cette pompe d’afflux, ils seraient
une alternative thérapeutique intéressante qui pourrait être

85
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
orientée par le génotypage ; mais actuellement cette information
n’est malheureusement pas disponible.

V- Pharmacogénétique dans le domaine de l’oncologie


•La variabilité génétique observée dans les tumeurs est consi-
dérablement plus importante que dans notre ADN génomique non
tumoral. C’est pourquoi le génotypage des tumeurs présente un
intérêt majeur pour la pharmacogénétique (comme l’est d’ailleurs
dans un domaine similaire le génotypage des virus et des bactéries
pour la prédiction de leur résistance aux traitements).
•L’exemple classique est celui de la thiopurine methyl transférase
(TPMT) impliquée dans l’élimination de l’azathioprine (Imurel)*
et la 6-mercaptopurine utilisées dans les leucémies de l’enfant et
la maladie de Crohn. Il existe de rares métaboliseurs lents (0,3%
,de la population) et environ 10% de métaboliseurs intermédiaires.
Le risque chez les métaboliseurs lents est celui d’une neutropénie
profonde qui fait prescrire maintenant chez tous les patients ce
génotypage afin de détecter les quelques rares sujets à risque.
Chez ces derniers, soit en optera pour un autre traitement, soit on
réduira la posologie d’environ 90% avec une surveillance
hématologique rapprochée.
•L’imatinib (Glivec*) est un inhibiteur de tyrosine kinase qui s’est
imposé dans le traitement de la leucémie myéloïde chronique en
inhibant l’activité du gène de fusion bcr-abl généré par la
translocation à l’origine du « chromosome de Philadelphie ».
Certains patients, après plusieurs mois de traitement, récidivent
alors qu’ils reçoivent toujours régulièrement l’imatinib.
Chez ces patients échappant au traitement, des mutations de bcr-
abl ont été mises en évidence; ces dernières modifient la
conformation tridimentionnelle de la protéine bcr-abl, emêchant
l’imitinib de pénétrer dans la poche catalytique de la protéine et
donc d’inhiber son acivité tyrosine kinase. Pour l’instant ce
génotypage de la tumeur au stade de la récidive ne fait
qu’expliquer les raisons de la récidive facilement constatée
cliniquement et biologiquement.
La récente saga de l’Iressa* (gefitinib), un autre inhibiteur de
tyrosine kinase, dirigé contre le récepteur membranaire de l’EGF
(couplé à une tyrosine kinase) est également intéressante. Le
gefitinib s’est avéré un traitement décevant des cancers
pulmonaires non à petites cellules, avec environ 10% de patients
répondeurs. Il a été montré que la plupart des patients ayant une
86
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
réponse initiale au gefitinib présentaient avant traitement des
mutations du récepteur à l’EGF au sein de leurs tumeurs. Ces
mutations entraînent une augmentation de l’activité tyrosine
kinase du récepteur qui n’est plus régulée.

VI- Pharmacogénétique dans le domaine des allergies médi-


camenteuses
•La détection des sujets à risque de développer des accidents
immunoallergiques médicamenteux graves est importante. Il
s’agit pour l’instant surtout d’accidents cutanés à type de Steven
Johnson ou Lyell. Les patients à risque présentent des groupes
HLA particuliers mais qui diffèrent pour chaque médicament. La
valeur prédictive des tests pharmacogénétiques est en général très
importante.
•Cependant, compte tenu du fait de la rareté des événements
indésirables, plusieurs milliers de patients doivent être génotypés
avant d’identifier un patient à risque. Si l’événement indésirable
immunoallergique est plus fréquent, comme c’est le cas pour
l’abacavir, avec un niveau de preuve important, la pertinence
clinique du dépistage systématique des patients à risque est forte,
ce d’autant que des alternatives thérapeutiques peuvent être
proposées à ces patients.

VII- Pharmacogénétique dans le domaine de l’ analgésie


•Enfin, dans le domaine de l’analgésie, certains morphiniques
comme la codéine ou le tramadol sont des médicaments fai-
blement actifs sous forme inchangée, et qui doivent être méta-
bolisés dans le foie par le CYP2D6 en composés actifs (la codéine
est tranformée en morphine). Chez les sujets déficients en
CYP2D6 qui représentent environ 8% de la population oc-
cidentale, il n’existe pas d’effet analgésique. Cependant, l’utilité
pratique de demander un génotypage est limitée, d’une part car les
patients reçoivent souvent des combinaisons d’antalgiques qui
vont estomper la différence entre les métaboliseurs lents et rapides
et, d’autre part, car en attendant le résultat du génotypage le
patient doit bénéficier d’un traitement et l’attitude la plus
pragmatique est donc d’essayer le traitement en prévenant le
patient d’une possibilité d’inefficacité. Par contre, si le médecin
disposait préalablement de l’information selon laquelle le patient
est métaboliseur lent du CYP2D6, il pourrait d’emblée éviter de
prescrire du tramadol ou de la codéine, les sachant inefficaces.
87
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
VIII- Perspectives
•Des puces à ADN permettant le génotypage simultané de plu-
sieurs dizaines de milliers de polymorphismes sont actuellement
disponibles pour des coûts de plus en plus bas. Il est probable que
ces génotypages étendus pourront être réalisés à la naissance et les
résultats intégrés dans notre carte de santé. On n’aura plus alors à
attendre le résultat du génotypage avant de pouvoir choisir le
traitement et/ou la dose ; les logiciels de prescription nous
indiqueront que le médicament choisi est soit contre-indiqué chez
ce patient donné, soit qu’il convient de baisser la posologie, soit
qu’il faut renforcer la surveillance vis-à-vis de tel ou tel
événement indésirable. Avant d’en arriver là, alors que la
technologie est déjà prête, il reste cependant dans les prochaines
années à définir quels sont les polymorphismes génétiques
fonctionnels chez l’homme et identifier ceux qui peuvent être
pertinents sur le plan clinique.

88
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre9- Induction enzymatique et inhibition


enzymatique

I- Bases
•Les médicaments subissent dans l’organisme, essentiellement
dans le foie, des biotransformations qui aboutissent dans la grande
majorité des cas à l’apparition des dérivés moins toxiques, moins
actifs, plus hydrosolubles et plus facilement éliminés dans les
urines que le médicament lui-même. Mais l’apparition d’un dérivé
de biotransformation plus actif ou plus toxique que le médicament
reste possible.
•Les enzymes microsomiales du réticulum endoplasmique lisse
hépatique représentent les principales enzymes de biotransforma-
tion des médicaments. Ces enzymes sont inductibles, c’est-à-dire
qu’elles peuvent augmenter en quantité sous l’action de certaines
substances chimiques (médicaments ou autres substances), appe-
lées pour cette raison substances inductrices d’enzymes ou agents
inducteurs. Ces agents inducteurs, en stimulant de la sorte les
biotransformations des médicaments peuvent diminuer ou annuler
leur effet thérapeutique ou encore favoriser leur toxicité.

II- Voies biochimiques du métabolisme


A- Aperçu sur les voies biochimiques du métabolisme
•Le métabolisme des médicaments implique une vaste gamme de
réactions chimiques, qui comprennent l’oxydation, la réduction,
l’hydrolyse, l’hydratation, la conjugaison, la condensation et
l’isomérisation. Les enzymes qui interviennent sont présentes
dans de nombreux tissus, mais sont généralement plus concentrées
dans le foie. Pour nombre de médicaments, le métabolisme a lieu
en 2 phases distinctes.
•Les réactions de phase I comportent la formation d’un groupe
fonctionnel nouveau ou modifié ou bien une scission (oxydation,
réduction, hydrolyse); ce sont des réactions de type non
synthétique.
•Le système d’oxydation microsomiale est le plus important de
ces systèmes. Il est composé de trois éléments: une fraction lipidi-
que, la cytochrome P-450 réductase et le cytochrome P-450 qui
est une hémoprotéine enzymatique.

89
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Induction enzymatique

+
+

Bio transformation de l’INH


Raccourcissement de la
Biotransformation du Paracétamol demi-vie de cholécalciférol

Ostéomalacie ou rachitisme
Métabolites hépatotoxiques

Lésions hépatiques

Augmentation de la tolérance de Diminution de l’effet de


certains médicaments certains médicaments

Fig (D)-Principales conséquences cliniques indésirables de l’induction enzymatique

•Les réactions de phase II comprennent la conjugaison avec un


composé endogène (exemple l’acide glycuronique, le sulfate, la
glycine) et sont par conséquent des réactions de type synthétique.
Les métabolites formés par des réactions de synthèse, sont plus
polaires et plus facilement excrétés par les reins (dans l’urine) et
le foie (dans la bile) que ceux provenant de réactions non
synthétiques.
•Certains médicaments ne sont soumis qu’à des réactions de
phase I ou bien à des réactions de phase II; ainsi, la numérotation
des phases reflète une classification fonctionnelle plutôt que sé-
quentielle.
B- Les enzymes du cytochrome P-450
•Le cytochrome P450 est un système complexe d’isoenzymes. Il
est composé de trois éléments: une fraction lipidique, la cyto-
chrome P-450 réductase et le cytochrome P-450 qui est le
groupement prosthétique des mono-oxydases. Il s’agit d’une
hémoprotéine enzymatique dont l’atome de fer central peut être
oxydé ou réduit de façon réversible. Ce cytochrome a été appelé
ainsi, parce qu’il peut se combiner au monoxyde de carbone en
présentant alors sous forme réduite une bande d’absorption à 450
mµµ.
90
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Les enzymes du cytochrome P-450 sont regroupées en 14 fa-
milles de gènes caractéristiques des mammifères qui ont en
commun l’identité de la séquence et la présence de 17 sous-fa-
milles. Elles sont désignées par le sigle commun CYP, suivi d’un
nombre arabe qui indique la famille, d’une lettre qui indique la
sous-famille et d’un autre nombre arabe qui indique le gène
spécifique. Les enzymes de sous-familles 1A, 2B, 2C, 2D, et 3A
sont fondamentales pour le métabolisme des mammifères; le
CYP1A2, le CYP2C9, le CYP2C19, le CYP2D6 et le CYP3A4
sont importants pour le métabolisme de l’homme. La spécificité
des enzymes contribue à expliquer de nombreuses interactions en-
tre les médicaments. Des Différences génétiques d’un patient à
l’autre peuvent modifier ces interactions.
•Quatre de ces isoenzymes sont impliquées dans le métabolisme
d’environ 90% des médicaments couramment utilisés : CYP 1A2,
CYP 2C9, CYP 2D6 et CYP 3A4.
•Certains médicaments sont métabolisés par plusieurs isoenzy-
mes.
•Certains isoenzymes font défaut chez certains sujets. Ainsi le
CYP 2D6 fait plus ou moins défaut chez environ 5 % de la po-
pulation générale.
•Des évaluations de l’importance relative des différents cyto-
chromes dans le métabolisme d’un médicament sont effectuées
permettent quelques prévisions approximatives et la formulation
de quelques mesures de prudence.
•Les variations individuelles rendent difficile la prévision de
l’effet clinique d’une dose donnée d’un médicament. Certains
patients peuvent métaboliser un médicament si rapidement que
des taux sanguins et tissulaires thérapeutiquement efficaces ne
sont pas atteints; chez d’autres, le métabolisme peut être si lent
que des effets toxiques surviennent avec des doses usuelles.
•Par exemple, les taux plasmatiques de phénytoïne à l’état
d’équilibre varient de 2,5 à plus de 40 mg/l (10 à plus de 160
µmol/l) entre des sujets ayant tous reçu une dose journalière de
300 mg. Cette variabilité est due en partie à des différences de
quantité de l’enzyme clé, le CYP2C9, présente dans le foie, et à
des différences d’affinité de cette enzyme pour le médicament.
•Des facteurs génétiques jouent un rôle prépondérant dans
l’apparition de ces différences. Des états pathologiques conco-
mitants (hépatopathie chronique en particulier) et des interactions

91
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
médicamenteuses (surtout celles impliquant l’induction ou
l’inhibition du métabolisme), y contribuent également;

III- Induction enzymatique


A- Les enzymes inductibles
•Il s’agit de systèmes enzymatiques localisés essentiellement dans
les microsomes hépatiques. Le terme de "microsomes" est souvent
utilisé pour désigner l’ensemble du réticulum endoplasmique lisse
et rugueux, isolé par centrifugation différentielle.
•Les enzymes microsomiales sont essentiellement localisés dans
la fraction lisse.
•Elles stimulent plusieurs types de réactions biochimiques inter-
venant dans la biotransformation des médicaments: réactions
d’oxydation ou plutôt d’hydroxylation, réactions de réduction,
réactions d’hydrolyse et réactions de conjugaison de conjugaison.
L’activité de ces enzymes subit l’influence de plusieurs facteurs
tels que l’âge, le sexe, le régime alimentaire et l’état pathologique.
•Ainsi une insuffisance hépatique peut diminuer leur activité.
Parmi ces systèmes enzymatiques, certains, comme par exemple
les enzymes de conjugaison, n’ont pas simplement pour substrat
les médicaments et les autres substances chimiques exogènes;
elles peuvent en effet intervenir dans le métabolisme de certaines
substances endogènes comme la bilirubine et certains stéroïdes
hormonaux.
B- Agents inducteurs et mécanismes de l’induction enzymatique
1- Les agents inducteurs
•Les agents inducteurs des enzymes microsomiales sont représen-
tés par plusieurs substances. Ils augmentent l’activité de très
nombreux systèmes enzymatiques, dont l’ensemble du système du
cytochrome P450, et ne sont généralement pas spécifiques d’une
isoenzyme particulière du CYP 450.
•On en connaît actuellement près de 200. Dans certains cas,
l’effet inducteur d’enzyme n’est qu’une réalité biochimique, sans
répercussion clinique sur l’effet des médicaments dont les
enzymes de biotransformation ont été induits.
Dans d’autres cas, les agents inducteurs induisent des conséquen-
ces cliniques parfois notables, et leur connaissance est importante
en thérapeutique. Le tableau montre les principaux représentants
de cette dernière catégorie d’agents inducteurs.
92
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Il convient de mentionner ici que deux agents inducteurs diffé-
rents n’induisent pas forcément les mêmes conséquences clini-
ques. De très nombreuses substances chimiques de
l’environnement, en dehors des médicaments, sont des inducteurs
enzymatiques, dont le tabac et l’alcool en prise chronique, et aussi
des produits industriels dont des insecticides.
2- Principaux agents inducteurs d’enzyme
• Voir tableau (II)

Tab (II)-Principaux agents inducteurs d’enzyme


Médicaments
Hypnosédatifs •Barbituriques:
Thiopental (Pentotal);
Amobarbital (Eunoctal);
Pentobarbital (Nembutal);
Hexobarbital (Noctivane);
Vinylbital (Optanox)*;
Phénobarbital (Gardénal);
Sécobarbital (Imménoctal)
•Glutéthimide (Doridène)
•Méthaqualone (Mandrax)*
•Chlordiazépoxide (Librium)*
• Méprobamate (Equanil)*
Anti-épileptiques • Phénobarbital (Gardénal)*
= barbiturique
• fosphénytoïne nPhénytoïne (Dihydan; Solantyl)
•Carbamazépine (Tégrétol)*
•Primidone (Mysoline)*, dérivé du Phénobarbital.

antirétroviraux l’efavirenz et la névirapine sont inducteurs enzy-


matiques.

Divers •Rifampicine (Rimactan)*=


•antituberculeux
•Griséofulvine (Griséfuline) = antifungique
•Anti-inflammatoires pyrazolés: Phénylbutazone
(Butazolidine; Phénylbutazone)
•le millepertuis
• le bosentan
• et à un moindre degré: l’oxcarbazépine, le modafi-
nil, l’aminoglutéthimide
Toxiques
•Ethanol (alcoolisme chronique)
•Tabac
•DDT (insecticide organochloré)

3- Mécanismes de l’induction enzymatique


93
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Après administration d’un agent inducteur, le poids du foie et le
taux des protéines hépatiques et microsomiales peuvent augmen-
ter. On note aussi un accroissement du réticulum endoplasmique
lisse, alors qu’il n’y a pas d’effet sur le réticulum endoplasmique
rugueux ou granulaire contenant les ribosomes.
•Les inducteurs d’enzyme semblent agir en augmentant la syn-
thèse des enzymes microsomiales ainsi que le taux du cytochrome
P-450.
L’augmentation du taux du cytochrome P-450 est précédée par
une élévation franche de l’acide delta-aminolévulinique synthé-
tase (ALA synthétase). Cette enzyme est l’enzyme initiale de la
biosynthèse de l’hème à partir de l’acide delta-amino-lévulinique.
L’hème qui est indispensable à la formation de cytochrome P-450
règle la biosynthèse de l’ALA synthétase par un phénomène de
rétrocontrôle négatif.
•L’augmentation de l’activité enzymatique aboutit quand à elle à
la prolongation de la demi-vie de ces enzymes, qui est due non
seulement à la diminution de la vitesse de leur dégradation, mais
aussi et surtout à une augmentation de leur biosynthèse. Cette
synthèse de novo des protéines enzymatiques est due à une acti-
vation de l’ARN polymérase ou transcriptase qui favorise la syn-
thèse de l’ARN messager, comme l’atteste l’inhibition de l’induc-
tion enzymatique par les inhibiteurs de la synthèse des protéines:
l’éthionine qui diminue le taux de l’ATP, la puromycine qui blo-
que le transfert des acides aminés de l’ARN soluble aux protéines
microsomiales et l’actinomycine D qui inhibe la synthèse de
l’ARN messager.
•Le phénomène d’induction enzymatique peut se développer au
bout de plusieurs jours ou semaines et persister pendant la même
période après l’abandon de l’agent inducteur. Il est cependant plus
prolongé pour certains agents inducteurs qui s’accumulent dans
les graisses de l’organisme comme le DDT, insecticide organo-
chloré.
•L’induction enzymatique n’est pas la seule voie utilisée par les
êtres vivants pour détoxifier les tissus. Les cellules possèdent
naturellement des transporteurs membranaires de médicaments
qui sont eux aussi inductibles et l’accroissement de leur
expression peut être la source d’échecs thérapeutiques quand la
cible du médicament est intracellulaire. Ceci est le cas pour
plusieurs familles de médicaments, dont les cytostatiques, les

94
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
médicaments immunomodulateurs, antirejet de greffe et les an-
tiviraux.
Ces transporteurs de xénobiotiques sont nombreux. Le plus connu d’entre
eux est une glycoprotéine de 170 kDa (d’où son nom de « gp 170 »). Cette
protéine est aussi appelée MDR1 (« multi drug resistance ») car elle est une
cause d’échec de certaines chimiothérapies au cours desquelles MDR1 est
surexprimée dans les cellules tumorales. Le blocage sélectif de ces
transporteurs de xénobiotiques est l’objet de nombreux travaux visant à
retarder l’échappement aux chimiothérapies et traitements antiviraux.
C- Conséquences indésirables de l’induction enzymatique
1- Interactions médicamenteuses aboutissant à la diminution
ou à l’annulation de l’effet thérapeutique de certains mé-
dicaments
a- Principes
•Quand un agent inducteur d’enzyme est administré en même
temps qu’un médicament pouvant d’ailleurs être lui-même induc-
teur d’enzyme, la stimulation des enzymes de dégradation de ce
médicament par les agents inducteurs peut aboutir à la diminution
de la concentration de ce médicament à l’état d’équilibre et par
conséquent, à une diminution de son effet thérapeutique ou à une
annulation de cet effet. À l’inverse, après l’arrêt de l’inducteur,
des signes de surdosage peuvent survenir, l’élimination du mé-
dicament étant ralentie.
L’induction enzymatique peut mettre 2 à 3 semaines pour se
développer totalement. Elle persiste pendant un laps de temps du
même ordre quand l’inducteur enzymatique est arrêté. Ce délai
implique que les conséquences cliniques des interactions médi-
camenteuses par induction enzymatique surviennent parfois à dis-
tance de la modification du traitement.
Les tableaux montrent les principales interactions médicamenteu-
ses qui répondent à ce mécanisme, et l’attitude pratique qu’il faut
adopter en cas de prescription simultanée d’un agent inducteur et
d’un autre médicament dont le métabolisme a été stimulé par cet
agent.

95
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
b- Principales interactions médicamenteuses résultant de l’induction enzy-
matique aboutissant à une diminution ou une annulation de l’effet
thérapeutique
• Elle sont résumées dans le tableau III. Les chiffres suivis d’une lettre minuscule, ren-
voient au tableau IV qui est la légende du tableau III.

Tab (III)-Intéraction médicamenteuse résultant de l’induction enzymatique


Agent inducteur Médicament dont la dégra- Conséquence Attitude prati-
dation est accélérée clinique de l’in- que
teraction
Contraceptifs oraux 1a 1b
Anticoagulants oraux 2 a 2b
coumariniques
Phénytoïne 9a 9b
Antidépresseurs tricycli- 3a 3b
ques
Griséofulvine 4a 4b
Corticostéroïdes 5a 5b
Digitoxine (digitaline) 7a 7b
Digitoxine (digitaline) 6a 6b
Doxycycline 7a 7b
Gluthétimide Anticoagulants oraux 2a 2b
coumariniques
Phénytoïne Digitoxine (digitaline) 6a 6b
Doxycycline 7a 7b
Contraceptifs oraux 7a 7b
Phénobarbital 9a 9b
Primidone 9a 9b
Corticostéroïdes 5a 5b
Rifampicine Anticoagulants oraux 2a 2b
coumariniques
Corticostéroïdes 5a 5b
Contraceptifs oraux 1a 1b
Tolbutamide 8a 8b
Griséofulvine Anticoagulants oraux 2 a 2b
coumariniques
Phénylbutazone Digitoxine 6a 6b
Anticoagulants oraux 2 a 2b
coumariniques
carbamazépine Anticoagulants oraux 2a 2b
coumariniques
Phénytoïne 9a 9b
Phénobarbital 9a 9b
Doxycycline 7a 7b
Méthaqualone Anticoagulants oraux 2 a 2b
coumariniques
Primidone Anticoagulants oraux 2 a 2b
coumariniques
Les chiffres suivis d’une lettre minuscule, renvoient au tableau suivant qui est la légende du

96
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
tableau précédent
c- Attitude pratique devant les principales interactions médicamenteuses par
induction enzymatique aboutissant à une diminution ou une annulation de
l’effet thérapeutique et leur importance.
•Voir tableau (IV) ; les chiffres arabes renvoient au tableau III

Tab (IV)-Attitude pratique devant les principales interactions médicamenteuses par induc-
tion enzymatique
1 a) Annulation de l’effet contraceptif des contraceptifs oraux minidosés en oes-
trogènes et par conséquent survenue de grossesse malgré le contraceptif.
b) Il faut utiliser des contraceptifs oraux contenant de fortes doses d’hormone; ex:
Gynovlane
21, qui contient 50 mg d’Ethinylestradiol et 3 mg d’acétate de Noréthistérone.
2 a) Diminution de l’effet anticoagulant. Risque d’accident hémorragique à l’arrêt de
l’agent inducteur.
b) Il faut pratiquer des contrôles plus fréquents du taux de prothrombine (TP),
adapter la posologie en fonction de la valeur du TP et prévoir la diminution de la
posologie des antivitamines K à l’arrêt de l’agent inducteur.
3 a) Diminution de l’effet antidépresseur des tricycliques
b) Augmenter les doses de l’antidépresseur si besoin est.
4 a) Diminution de l’effet antifungique de la Griséofulvine
b) Des doses plus importantes de Griséofulvine pourraient être nécessaires.
5 a) Diminution de l’effet thérapeutique des corticostéroïdes; des cas d’aggravation
d’asthme corticodépendant ont été rattachés à ce phénomène.
b) Des doses plus importantes de corticostéroïdes sont parfois nécessaires.
6 a) Diminution de l’effet thérapeutique de la Digitoxine (Digitaline)*
b) Des doses plus importantes de digitaline sont parfois nécessaires. Le contrôle
du taux sanguin de la Digitaline quand il est nécessaire assure une adaptation
rationnelle de la posologie.
7 a) La concentration plasmatique de Doxycycline peut s’abaisser à des valeurs
inférieures aux taux minimaux inhibiteurs.
b) Augmenter les doses Doxycycline, si pas d’effet thérapeutique.
8 a) Effet hypoglycémiant diminué
b) Contrôles plus fréquents de la glycémie et adaptation judicieuse de la dose de
tolbutamide.
9 a) Le phénobarbital, la Phénytoïne, la Primidone et la Carbamazépine sont des
anti-épileptiques tous inducteurs enzymatiques. Certains d’entre eux sont parfois
associés dans le traitement des épilepsies. Ils peuvent engendrer réciproquement
une diminution de leur taux sérique.
b) L’importance clinique de ces interactions par induction enzymatique est in-
connue. De toute façon, la surveillance clinique de tout traitement anti-épileptique
est de règle, et le dosage sanguin des antiépileptiques, pratiquement sys-
tématique dans les services spécialisés, permet l’adaptation de la posologie.

97
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
2- Influence de l’environnement et de l’alcool sur l’effet de
certains médicaments
•L’alcool éthylique, le tabac et le DDT peuvent diminuer le taux
sanguin de certains médicaments par accélération de leur méta-
bolisme.
L’influence de ces substances sur l’organisme humain pose des
problèmes sociologiques et écotoxicologiques d’actualité.
Pour ce qui est de l’effet inducteur de ces toxiques, on se bornera
à citer les faits suivants: des études faites chez des alcooliques de
sexe masculin ont montré la disparition plus rapide dans le sang
du Tolbutamide par rapport au sujet normal et au sujet cirrhotique
non alcoolique; d’autres études ont montré que l’alcoolisme
chronique accélère la dégradation de l’Antipyrine du Phénobarbi-
tal et du Méprobamate. On a noté chez ces mêmes sujets une
augmentation de la clairance de la Warfarine et de la Phénylbuta-
zone.
•Certaines substances contenues dans la fumée du tabac pour-
raient être inductrices d’enzyme comme en témoigne l’inefficacité
du Dextropropoxyphène chez une proportion non négligeable de
fumeurs et l’accroissement du métabolisme de la Phénacétine
chez cette même catégorie de sujets.
Enfin, on a constaté pour le DDT une diminution significative de
la demi-vie de la Phénylbutazone chez les travailleurs d’une usine
de cet insecticide. •Une diminution de la demi-vie de l’Antipyrine
a été observée dans certains cas.
3- Majoration de la toxicité de certains médicaments par les
agents inducteurs
•L’action des enzymes microsomiales sur certains médicaments
engendre parfois l’apparition de métabolites dits "réactifs", qui
peuvent se fixer par des liaisons covalentes aux macromolécules
tissulaires et déterminer des lésions. Les agents inducteurs, en in-
duisant la formation des enzymes microsomiales, favorisent l’ap-
parition de ces métabolites réactifs. Deux situations rencontrées
en pratique clinique illustrent ce problème.
a- La toxicité hépatique de l’association INH-Rifampicine
•La toxicité hépatique de l’INH, relativement fréquente en cas
d’association avec la Rifampicine, demeure exceptionnelle quand
l’INH est administré isolément. On explique actuellement le rôle

98
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
favorisant pour l’hépatotoxicité de l’association INH-Rifampicine
par l’effet inducteur enzymatique de la Rifampicine.
•L’hépatite induite par l’Isoniazide serait plus fréquente chez les
acétyleurs rapides, qui produisent dans leur organisme une plus
grande quantité d’acétylhydrazine, dérivé métabolique de l’INH,
que chez les acétyleurs lents. Une réaction d’oxydation microso-
miale hépatique transforme l’acétylhydrazine en son dérivé
"réactif", qui détermine une nécrose après liaison covalente irré-
versible aux macromolécules de la cellule hépatique. La Rifam-
picine, en stimulant cette réaction microsomiale, accroît la for-
mation du dérivé instable hépatotoxique. L’arrêt de l’INH, qui
doit être immédiat, peut entraîner la régression de l’ictère.
b- Une augmentation du risque d’effets indésirables de certains cytotoxiques
•Un risque de majoration de la neurotoxicité a été décrit pour le
busulfan et l’ifosfamide en association avec la phénytoïne, ainsi
que pour l’ifosfamide en association avec le phénobarbital ou la
primidone. Le mécanisme semble être une augmentation du
métabolisme hépatique de l’ifosfamide par l’effet inducteur du
phénobarbital, avec formation de métabolites toxiques.
•Une augmentation du risque de réactions d’hypersensibilité
(éruption, hyperéosinophilie) lors de l’association de procarbazine
avec un antiépileptique inducteur enzymatique a été observée. Le
mécanisme évoqué est une augmentation du métabolisme de la
procarbazine par l’inducteur.
c- En cas d’intoxication aiguë par le Paracétamol ou Acétaminophène
•La majoration de l’hépatotoxicité de ce médicament par l’alcool
semble répondre aux mêmes mécanismes.
•En effet, l’alcool accélère la transformation du Paracétamol en
son ou ses métabolites réactifs hépatotoxiques par induction en-
zymatique.
•En conclusion, il faut éviter dans la mesure du possible l’associa-
tion d’un inducteur enzymatique avec un médicament transformé
en un métabolite réactif comme la Phénacétine, le Furosémide ou
l’Acétaminophène. Malgré ses risques hépatotoxiques, l’associa-
tion INH-Rifampicine dans le traitement de la tuberculose est
utilisée en raison des avantages qu’elle présente.
d- Toxicité de certains médicaments liée très probablement à leur effet in-
ducteur d’enzyme
i Ostéomalacie du traitement anti-épileptique

99
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Les hydantoïnes et la Primidone accélèrent par induction le cata-
bolisme de la vitamine D, qui est rapidement métabolisée en dé-
rivés inactifs éliminés par voie biliaire. Le même phénomène a été
constaté avec le Phénobarbital également, qui entraîne une
disparition anormalement rapide de la vitamine D3 ou Cholé-
calciférol et de son dérivé 25 hydroxycholécalciférol.
Chez les malades épileptiques traités à long terme par la Phény-
toïne ou le Phénobarbital, des ostéomalacies avec hypocalcémies
et augmentation des phosphatases alcalines sont parfois obser-
vées. Parfois seules les anomalies biologiques sont constatées. On
note chez ces malades un abaissement des taux plasmatiques du
25 hydroxycholécalciférol. Ce dérivé actif de la vitamine D appa-
raîtrait également plus rapidement.
D’autres agents inducteurs comme la Phénylbutazone ou certains
neurosédatifs ont été incriminés également dans la survenue de
cette ostéomalacie. Le traitement de ce trouble consiste à admi-
nistrer le 25-hydroxycholécalciférol (Calcifédiol).
ii Aggravation des porphyries hépatiques
•Les porphyries hépatiques sont des affections caractérisées par
une production excessive d’ALA synthétase, dont la synthèse est
normalement réprimée par l’hème.
•Cette production excessive d’ALA synthétase serait en relation
avec une variation du gène opérateur dont la réponse au gène re-
presseur est faible.
•Le déclenchement des crises de porphyrie chez les malades at-
teints de porphyries hépatiques par les barbituriques et d’autres
agents inducteurs comme le Chlordiazépoxide, le Glutéthimide, le
Méprobamate, la Phénytoïne, l’Ethanol et la Griséofulvine
pourrait s’expliquer par le fait que ces médicaments induisent la
formation intrahépatique d’ALA synthétase. Leur prescription est
par conséquent contre-indiquée en cas de porphyrie hépatique.
e- Tolérance métabolique
•La tolérance métabolique est un phénomène caractérisé par la
diminution progressive de l’effet pharmacologique d’un médica-
ment au fur et à mesure qu’on continue son administration, ce qui
nécessite l’augmentation de la dose pour obtenir le même effet
qu’au début de traitement.
Les barbituriques et l’éthanol provoquent par induction enzymati-
que la formation de leurs propres enzymes de dégradation. La
dose de barbituriques nécessaire pour aboutir à un effet hypnoti-

100
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
que ou la dose d’alcool nécessaire pour obtenir l’effet souhaité
sont, par conséquent, augmentées après administration prolongée.

IV- Inhibition enzymatique


A- Considérations générales
•L’administration concomitante de l’inhibiteur et du médicament
normalement oxydé aboutit à une diminution du métabolisme de
ce dernier et donc à une augmentation de sa concentration
sanguine jusqu’au seuil de toxicité. Certaines substances sont
susceptibles d’inhiber des activités enzymatiques du foie. Les plus
connues inhibent le cytochrome P-450. L’inhibition enzymatique
est un phénomène plus dangereux car plus brutal que l’induction.
•Exemples d’interactions résultant de l’inhibition enzymatique:
cimétidine et antivitamine K (hypocoagulabilité); cimétidine et
théophylline (convulsions et troubles digestifs); troléandomycine
et dihydroergotamine (nécrose des extrémités par vaso-
constriction). Un exemple classique: les torsades de pointes
(danger de mort subite) induites par l’association terfénadine
(antihistaminique H1, retiré du commerce) métabolisée par
CYP3A4 et le kétoconazole puissant inhibiteur de cette enzyme.
•L’inhibition du métabolisme du médicament peut conduire à une
réduction de la clairance, un allongement de la demi-vie, une
accumulation du médicament lors du traitement d’entretien, et
donc à des effets indésirables. Contrairement à ce qui se passe
pour l’induction, la synthèse de nouvelles protéines n’est pas
impliquée, et l’effet se développe au fur et à mesure que le
médicament et ses métabolites éventuels s’accumulent (fonction
de leur demi-vie d’élimination). Puisque les substrats qui se
partagent une enzyme unique peuvent entrer en compétition pour
accéder au site actif de la protéine, un grand nombre de substrats
CYP peuvent également être considérés comme des inhibiteurs.
Cependant, certains médicaments sont des inhibiteurs particu-
lièrement puissants (et parfois peuvent ne pas être des substrats);
c’est dans l’utilisation des produits de ce dernier type que les
cliniciens doivent être les plus vigilants quant aux risques
d’interactions.
•La cimétidine, mais pas les autres bloquants des récepteurs H2,
est un inhibiteur puissant du métabolisme oxydatif d’un grand
nombre de médicaments, notamment la warfarine, la quinidine, la

101
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
nifédipine, la lidocaïne, la théophylline et la phénytoïne. Elle peut
être à l’origine de réactions indésirables graves.
•Les antifongiques kétoconazole et itraconazole sont de puissants
inhibiteurs des enzymes de la famille de CYP3A. Lorsque les taux
de fluconazole sont élevés, à la suite de fortes posologies ou d’une
insuffisance rénale, ce médicament peut également inhiber
CYP3A.
•L’érythromycine et la clarithromycine (des macrolides) inhibent
le CYP3A4 à un niveau cliniquement significatif, contrairement à
l’azithromycine.
•Certains inhibiteurs des canaux calciques, notamment le dil-
tiazem, la nicardipine et le vérapamil peuvent également inhiber
CYP3A, comme le peuvent également certains substrats des
enzymes, tels que la ciclosporine.
•Des exemples de substrats CYP3A comprennent également la
quinidine, la lovastatine, la simvastatine, l’atorvastatine, la ni-
fédipine, la lidocaïne, l’érythromycine, la méthylpredsinolone, la
carbamazépine, le midazolam et le triazolam.
•La phénytoïne, inducteur d’un grand nombre de systèmes notam-
ment CYP3A, inhibe CYP2C9. Le métabolisme CYP2C9 du
losartan en ses métabolites inactifs est inhibé par la phénytoïne,
avec une perte éventuelle des effets antihypertenseurs.
•L’accumulation du cisapride, un prokinétique, et de la terfé-
nadine, un antihistaminique, secondaire à l’inhibition de CYP3A
provoque un allongement du QT et des torsades de pointes. Des
produits alternatifs moins dangereux ont été développés après
l’échec des mesures prises pour éviter la co-prescription de ces
médicaments avec les inhibiteurs du CYP3A, ce qui a permis de
supprimer leur commercialisation.
•La ciclosporine peut entraîner une toxicité sérieuse lorsque son
métabolisme CYP3A4 est inhibé par l’érythromycine, le
kétoconazole, le diltiazem, la nicardipine ou le vérapamil.
•Le risque de myopathies avec certains inhibiteurs de l’HMG-
CoA réductase (lovastatine, simvastatine, atorvastatine) est at-
tribué à l’inhibition du CYP3A4. Un médicament de cette classe
(la cérivastatine) a été retiré du commerce en raison d’une
incidence particulièrement élevée de cet effet indésirable, même
si, dans ce cas, les études cellulaires font évoquer la participation
de l’inhibition d’une autre voie.
•Le fitonavir, un antiviral inhibiteur très puissant du CYP3A4, est
souvent ajouté aux traitements du VIH, non pas en raison de ses
102
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
effets antiviraux, mais parce qu’il diminue la clairance des autres
agents anti-VIH, et augmente ainsi leur efficacité.
•Le jus de pamplemousse (mais pas le jus d’orange) inhibe la
CYP3A, surtout à fortes doses. Le risque d’effets indésirables
peut être majoré chez les patients qui prennent des médicaments
entraînant une inhibition, même modeste, du CYP3A (par
exemple la ciclosporine, certains inhibiteurs de HMG-CoA
réductase); ces patients doivent donc s’abstenir de prendre du jus
de pamplemousse.
•Le CYP2D6 est fortement inhibé par la quinidine et également
bloqué par un certain nombre de neuroleptiques comme la
chlorpromazine et l’halopéridol et par la fluoxétine. L’effet
analgésique de la codéine dépend de sa transformation en mor-
phine via CYP2D6. Ainsi la quinidine réduit-elle l’efficacité
antalgique de la codéine chez les métaboliseurs forts (EM).
Comme la désipramine est largement métabolisée par le CYP2D6
chez les EM, les taux sont nettement augmentés lors de
l’administration concurrente de quinidine, de fluoxétine ou par les
neuroleptiques qui inhibent le CYP2D6. La demi-vie très longue
de la fluoxétine et la lenteur de la formation de son métabolite
inhibiteur CYP2D6 expliquent pourquoi les conséquences cli-
niques de l’interaction de la fluoxétine avec les substrats du
CYP2D6 peuvent n’apparaître qu’après plusieurs semaines de
traitement.
La 6-mercaptopurine, métabolite actif de l’azathioprine, est
métabolisée non seulement par la TPMT mais également par la
xanthine oxydase. L’administration d’allopurinol, un inhibiteur
puissant de la xanthine oxydase, avec des doses standard
d’azathioprine ou de 6-mercaptopurine, peut entraîner une toxicité
(insuffisance médullaire) capable de mettre en jeu le pronostic
vital.
B- Inhibition du transport médicamenteux
•L’exemple le mieux étudié est la glycoprotéine P. La quinidine
inhibe la fonction de la glycoprotéine P in vitro, et il est clair
actuellement que le doublement tardif de la digoxinémie
lorsqu’elle est administrée avec la quinidine est la traduction in
vivo de cette action, notamment parce que la quinidine (par
augmentation de la biodisponibilité de la digoxine et réduction de
la sécrétion rénale et hépatique) exerce des effets sur les sites
d’expression de la glycoprotéine P. Beaucoup d’autres mé-

103
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
dicaments élèvent également la digoxinémie, par exemple
l’amiodarone, le vérapamil, la ciclosporine, l’itraconazole et
l’érythromycine, vraisemblablement par un mécanisme similaire.
La réduction de la pénétration dans le système nerveux central de
multiples inhibiteurs de protéase du VIH (avec le risque de
faciliter la réplication virale à ce niveau) semble due à
1’exc1usion du médicament du système nerveux central par
l’intermédiaire de la glycoprotéine P. Une approche thérapeutique
par l’inhibition de la glycoprotéine P a donc été proposée pour
augmenter la pénétration du médicament dans le système nerveux
central.
•Un certain nombre de médicaments sont sécrétés par un système
de transport tubulaire rénal des anions organiques. L’inhibition de
ces systèmes peut entraîner une accumulation excessive de ces
médicaments. Les salicylés, par exemple, réduisent la clairance
rénale du méthotrexate, interaction qui peut conduire à une
toxicité du méthotrexate. La sécrétion tubulaire rénale contribue
de façon significative à l’élimination de la pénicilline, qui peut
être inhibée (pour augmenter ses effets thérapeutiques) par le
probénécide.
L’inhibition du transport tubulaire cationique par la cimétidine
diminue la clairance rénale du dofétilide et de la procaïnamide et
de la NAPA, son métabolite actif.

104
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre10- Thérapies biologiques et anticyto-


kines

La figure A résume les mécanismes d’action des anticytokines

I- Cytokines
A- Considérations générales
•En réponse à une agression,l’organisme synthétise des protéines
qui sont des cytokines et des molécules d’adhésion ; Ces molé-
cules permettent aux cellules de communiquer entre elles afin
d’initier, développer et achever les réponses inflammatoires et/ou
immunes.
Les cytokines qui sont des glycprotéines souvent glycosylées,
synthétisables par de nombreux types cellulaires agissant à de très
basses concentrations. Elles ont une masse molaire comprises
entre 6.000 et 60.000 daltons. La plupart des cytokines ne sont pas
détectables dans la circulation à l’état physiologique.
•es récepteurs de surface provoquent une cascade de seconds
messagers.
• Elles ont de nombreuses activités biologiques. Leur activité est
transitoire et peut être régulée à tous les niveaux de l’expression
des gènes. Les facteurs ne sont produits que par des cellules
activées en réponse à un signal inducteur.
•Elles agissent sur différentes lignées de manière stimulante ou
inhibitrice et ont une action synergique ou antagoniste avec
d’autres facteurs.
•Les cytokines jouent un rôle de pivot dans les processus de
communication intercellulaire induisant la synthèse de nouveaux
produits lorsqu’elles se sont fixées sur leurs récepteurs spéci-
fiques.
B- Implications physiopathologiques

105
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Interaction normale
Cytokines pro- 1-Liaison d’une cytokine
inflammatoires pro-inflammatoire à son
Récepteur cytokine récepteur induit un signal
pro-inflammatoire à la
cellule.
Signal pro-inflammatoire

Neutralisation de cytokines Anticorps


monoclonal 2-Inhibition de la liaison
cytokine-récepteur par des
Récepteur soluble récepteurs solubles ou
des anticorps monoclaux.

Aucun Signal

Blocage de récepteur
3-Inhibition de la liai-
son cytokine-récepteur
par une interaction
d’un récepteur
antagoniste ou des
Anticorps anticorps monoclo-
monoclonal naux avec le récepteur

Aucun Signal

Activation de voies anti-inflammatoires 4-Des cytokines


anti-inflammatoires
inhibent
Cytokines
l’expression de
Anti-inflammatoires
cytokines pro-in-
flammatoires : IL-4,
IL-10, IFN-4

Inhibition du signal pro-inflammatoire

Fig (A)-Mécanismes d’inhibition de l’activité des cytokines pro-inflammatoires

La présence de différentes cytokines, dans les tissus ou organes,


au cours des maladies, qu’elles soient d’origine infectieuse,
immune, carcinologique ou dégénérative, est probablement la
règle. La démonstration d’un rôle physiopathologique, pour un
nombre limité d’entre elles, peut aboutir à l’utilisation de médi-
caments anticytokine(s) qui s’opposent aux signes ou symptôme
de la maladie considérée. Seule l’éviction de l’agent causal

106
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
permettrait une action curative.
•Les cytokines impliquées dans l’inflammation sont multiples.
Les plus importantes sont le TNFα et l’IL-1 (interleukine-1)
qu’il est déjà possible d’inhiber dans plusieurs maladies humai-
nes. L’IL-1 joue un rôle dans la régulation du système immuni-
taire. Elle stimule directement les cellules souches précoces et agit
de manière synergique avec d’autres cytokines par de nombreuses
catégories de cellules.
• Le TNFα est une protéine membranaire qui peut être clivée par
une métalloprotéinase membranaire appelée TNF convertase
enzyme (TACE). Ainsi le TNFα peut exercer sa fonction soit « à
distance » par la forme soluble soit lors de contacts inter-
cellulaires par la forme membranaire.
La fixation du TNFα sur son récepteur aboutit, soit à l’activation
des voies d’apoptose, soit à l’activation des voies de la
transcription des gènes impliqués dans l’immunité et
l’inflammation.
•De nombreux travaux ont démontré le rôle pathogénique de l’IL-
1 dans de nombreuses maladies auto-immunes comme la
polyarthrite rhumatoïde, les maladies inflammatoires intestinales,
et les maladies granulomateuses. L’élément primordial dans la
pathogenèse de ces maladies est un déséquilibre entre production
d’IL-1 et de l’antagoniste du récepteur de l’IL-1 (IL-1Ra).
•On dispose de nouvelles thérapeutiques ciblant l’IL-15, l’IL-17,
l’IL-18 qui seront bientôt disponibles.
•Les inhibiteurs du TNF α et de l’IL-1 qui sont les 2 principales
cytokines de l’inflammation ont été d’abord évalués en clinique
dans le choc septique. Malheureusement , ces inhibiteurs ont
entraîné plutôt une aggravation du pronostic des patients ou n’ont
montré aucune efficacité. L’intérêt de ces molécules s’est avaré
par la suite majeur dans plusieurs maladies auto-immunes au
premier rang d’entre elles la polyarthrite rhumatoïde et la maladie
de Crohn.
• L’IL-1 et le TNFα sont contrôlées de manière spécifique par des inhibi-
teurs naturels : récepteurs solubles, Il-1Ra (antagoniste du récepteur de
l’IL-1), auto-anticorps naturels anti-IL-1α. Ces facteurs naturels sont à
l’origine des approches thérapeutiques actuelles.
Pratiquement tous les récepteurs de cytokines sont retrouvés sous
forme soluble dans les liquides biologiques à des concentrations
beaucoup plus élevées que celles des cytokines correspondantes.
Pour le TNFα, on retrouve les 2 types de récepteurs p55 et p75
sous forme soluble. L’étanercept est une chimère formée de 2
107
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
molécules p75 couplées à une partie Fc d’IgG1 humaine.
•Le récepteur de type II de l’IL-1, qui ne transmet pas de signal
lorsqu’il est membranaire, est essentiellement libérée sous forme
soluble. Son rôle physiologique est de réguler l’action de l’IL-1
ayant ainsi un effet anti-inflammatoire.
•L’Il-1Ra bloque la fixation de l’IL-1 sur son récepteur. Sa pro-
duction est induite par l’inflammation et rentre ainsi dans le cadre
des protéines de l’inflammation comme la CRP. Il ya une
corrélation positive entre le degré d’inflammation et le taux cir-
culant d’Il-1Ra. La production d’Il-1Ra débute après celle de l’IL-
1.

II- Agents biologiques actuellement disponibles pour le trai-


tement des maladies auto-immunes
Agents Principe actif Indications reconnues
Enbrel* Etanercept Polyarthrite rhumatoïde
Spondylarthrite ankylosante
Arthrite chronique juvénile
Remicade* Infliximab Polyarthrite rhumatoïde
Maladie de Crohn
Humira* Adalimumab Polyarthrite rhumatoïde
Maladie de Crohn,
Psoriasis
Kineret* Anakinra Polyarthrite rhumatoïde
Avonex* IFN-βla Sclérose en plaques
Betaferon* IFN-βlb Sclérose en plaques
Rebif* IFN-βla Sclérose en plaques
Raptiva* Efalizumab Psoriasis
Amevive* Alefacept Psoriasis
Antegren* Natalizumab Sclérose en plaques (phase
III)
Maladie de Crohn (phase III)
Mabthera* Rituximab Les lymphomes non hodgki-
niens expriment le CD20

108
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
III- Efficacité, tolérance
A- Efficacité
Ces molécules se distinguent par leur efficacité sur le plan clini-
que, structural et sur divers points comme l’amélioration de la
qualité de vie, la diminution de la mortalité cardiovasculaire. En
terme d’efficacité, globalement, le nombre de patients à traiter
(Number Needed to Treat [NNT]) pour obtenir une amélioration
de 50 % des signes et symptômes varie entre 4 et 6 avec ces neuf
molécules. Leur ratio tolérance/efficacité est en leur faveur. Leur
efficacité anti-inflammatoire permet de diminuer les risques liés à
l’inflammation chronique. Toutefois leur tolérance doit être
pondérée par plusieurs points.
• L’utilisation d’agents biologiques neutralisant les cellules im-
munes et les cytokines s’associent avec succès aux traitements
immunosuppresseurs classiques des maladies auto-immunes.
• Afin de prévenir toute réaction auto-immune, le système immun
a développé plusieurs mécanismes de contrôle au niveau central
(tolérance centrale) et périphérique (tolérance périphérique). Ces
mécanismes permettent un fin réglage de l’équilibre entre pro-
cessus inhibiteurs et activateurs.
• Les thérapies anticytokiniques initialement développées blo-
quent les effets du TNF- α. L’IL-1 et le TNFα sont contrôlées de
manière spécifique par des inhibiteurs naturels : récepteurs
solubles, ILl-1Ra (antagoniste du récepteur de l’IL-1), auto-an-
ticorps naturels anti-IL-1α. Ces facteurs naturels sont à l’origine
des approches thérapeutiques actuelles.
•Pratiquement tous les récepteurs de cytokines sont retrouvés sous
forme soluble dans les liquides biologiques à des concentrations
beaucoup plus élevées que celles des cytokines correspondantes.
Pour le TNFα, on retrouve les 2 types de récepteurs p55 et p75
sous forme soluble.
B- Tolérance
1- Infections
•Un taux d’infections sévères (sévérité définie par
l’hospitalisation ou la mise sous antibiothérapie intraveineuse ou
le décès) augmenté avec un taux d’événements pour 100 pa-
tients/année (95 % CI) autour de 4 (intervalle de confiance à 95 %
significatif) quelle que soit la molécule. La recherche d’infection
préexistante (hépatite B ou C, infection due au VIH, tuberculose
109
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
évolutive ou latente, infection pulmonaire, sinusienne, dentaire)
est un élément clé de la tolérance. Ce sur-risque infectieux est très
largement majoré par la dose de corticoïdes reçue quotidien-
nement et il devient significatif dès le seuil de 0,1 mg/kg/j
d’équivalent prednisone franchi.
2- Risque tumoral
Un sur-risque tumoral concernant les cancers cutanés non méla-
nomateux qui justifie une surveillance cutanée régulière.
3- Autres problèmes de prescriptions
•Un sur-risque de perforations digestives largement majoré par la
prise concomitante de corticoïdes quel que soit le traitement de
fond ou DMARD associé ;
•Une surveillance régulière de l’hémogramme et des ASAT-
ALAT est nécessaire ainsi que le contrôle régulier du profil li-
pidique pour le tocilizumab. Pour le rituximab, la surveillance
régulière du taux d’immunoglobuline est requise. IV

110
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre11- Monoxyde d’azote, radicaux libres


et stress oxydatif

I- Monoxyde d’azote
A- De l’EDRF au NO
•Dès 1977, l’équipe américaine de Murad avait montré que la
trinitrine libère du monoxyde d’azote, lui-même activateur de la
guanylyl-cyclase cytosolique de la cellule musculaire lisse. Le
prix Nobel 1998 fut attribué à Furchgott, Ignarro et Murad pour
leurs travaux sur le NO ou monoxyde d’azote, (initialement
considéré comme EDRF pour « endothelium derived relaxing
factor ») et la découverte du rôle de médiateur de NO.
•Le NO peut être synthétisé dans toutes les cellules à partir de L-
arginine sous l’action d’une enzyme, la NO-synthétase cons-
titutive endothéliale suite à une augmentation des ions Ca2+
cytosolique. Ces ions se lient à la calmoduline qui active la NO-
synthétase calcium-calmoduline dépendante dont le substrat est
l’arginine.
• L’activité de la NO-synthétase constitutive est NADP-NADPH
dépendante. Le NO formé active la formation de GMPc par
stimulation de la guanylate cyclase dans les cellules productrices
et dans les cellules avoisinantes. La NO-synthétase est activée par
l’acétylcholine, l’histamine, la sérotonine, la bradykinine. Voir
figure (A).
•La vasodilatation coronaire est sous la dépendance du NO. Le
NO formé diffuse immédiatement dans les cellules musculaires
lisses sous-jacentes induisant la vasodilatation par activation de la
guanylate cyclase cellulaire.
• Le rôle de NO a été étendu à la neuromédiation. Dans les neu-
rones, l’augmentation de calcium peut être la conséquence no-
tamment de l’activation des récepteurs NMDA du glutamate. NO
est synthétisé et diffuse immédiatement sans stockage préalable,
contrairement aux neuromédiateurs classiques.
B- Les NO-synthases et l’effet pathogène du NO
•En fait trois NO-synthétases sont distinguées. Les types I et III
sont constitutifs et présents particulièrement dans le système
nerveux central et l’endothélium vasculaire. Le type II est in-
ductible par des agents pro-inflammatoires, endotoxines (lipo-
111
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
polysaccharides bactériens, LPS) interleukine 1β, TNFα, inter-
féron γ, principalement dans les macrophages et les cellules
musculaires lisses. Cette induction augmente la formation de NO
qui interviendrait dans diverses situations pathologiques, comme
l’inflammations et les états de choc. L’excès de NO est aussi mis
en cause dans la dégénérescence tissulaire notamment au niveau
du cerveau. Dans le foie, NO peut avoir des effets cytoprotecteurs,
anti-apoptose, ou au contraire des effets cytotoxiques selon les
conditions expérimentales utilisées. Les NO-synthases sont aussi
surexprimées dans certains cancers.
C- Le NO et les donneurs de NO
• La trinitrine, ou nitroglycérine (Trinitrine simple*, Lénitral*,
Natispray*) et le nitrite d’amyle (qui n’est plus commercialisé)
sont utilisés depuis la moitié du XIXe siècle comme vasodilata-
teurs et anti-angoreux. Ils provoquent une vasodilatation généra-
lisée très rapide avec diminution du retour veineux, des résis-
tances vasculaires périphériques et de la pression d’éjection
systolique.
•Les effets thérapeutiques des dérivés nitrés sont restés très
longtemps incompris. Ils sont maintenant attribués à la formation
enzymatique de NO par des glutathion-S-transférases et des
cytochromes P-450. Ils sont donneurs de NO. Ces dérivés nitrés
sont donc des pro-drogues, ou pro-médicaments, c’est-à-dire des
molécules nécessitant une transformation dans l’organisme pour
exprimer leur activité médicamenteuse.
•Les sydnonimines sont des médicaments plus récents donneurs
de NO, utilisés également comme anti-angoreux: molsidomine
(Corvasal*, Molsidirex*, Molsidomine*), et linsidomine (Corvasal
Intraveineux*, Corvasal Intracoronaire*).
•Remarque : ne pas confondre NO; monoxyde d’azote (nitric
oxid, en anglais), avec N2O, protoxyde d’azote (nitrous oxide, en
anglais) utilisé en anesthésie depuis le XIXe siècle .

II- Radicaux libres et stress oxydatif


A- Considérations générales

112
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Acétylcholine Histamine Bradykinine ATP

L-arginine

(+) (+)
(+) (+) (+)
NO
NO NO NO synthase
NO
Cellule
endothéliale NO

NO
(+)
Cellule musculaire
lisse vasculaire guanylate cyclase

↑ GMPc

Relaxation

Fig (A)- Relaxation endothéliale NO-dépendante produite par les vsodilatateurs


L’action desdifférentes substances au niveau de leurs récepteurs membranaires des cellules
endothéliales aboutit à une libération de l’oxyde nitrique (NO). Le NO diffuse au niveau des
cellules musculaires lisses des vaisseaux activant alors la guanylate cyclase. Ceci provoque
une augmentation de la concentration intracellulaire de guanosine monophosphate
cyclique(GMPc) et par conséquent une relaxation.

•Les espèces réactives de l'oxygène ou ROS (radicaux libres) sont


des produits biologiques du métabolisme qui exercent des effets à
la fois positifs et négatifs sur le corps. Les ROS comprennent des
radicaux libres comme le radical hydroxyle (OH-), un radical (O2-
), l'anion superoxyde oxyde nitrique (NO-), ainsi que d'autres
oxydants (par exemple, le peroxyde d' hydrogène (H2O2), le
peroxynitrite (ONOO-) etc…
•La principale source de formation des ROS se fait via le com-
plexe lié à la membrane de la NADPH oxydase et la chaîne de
transport d'électrons (principalement complexe 1 et 3 ) de la
mitochondrie au cours du métabolisme aérobie.
Les radicaux libres sont connus pour être responsable du vieil-
lissement cutané et sont liés aux maladies neurodégénératives
mais ils sont également essentiels pour combattre les bactéries et
les micro-organismes au quotidien.

113
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
B- Mécanisme d’action d’un radical libre
•L’oxygène que nous respirons est transportée par nos globules
rouges pour être distribuée à l’ensemble de nos tissus et cellules.
Il diffuse au travers de la membrane cellulaire et parvient aux
mitochondries.
Comme vu juste au dessus, des molécules provenant de
l’alimentation sont amenées à la mitochondrie pour que celle-ci
nous fournisse de l’énergie. La dégradation des nutriments libère
une grande quantité d’énergie qui est récupérée et transmise à nos
mitochondries sous forme d’électrons hautement énergétiques.
•Ces électrons sont transférés d’un site protéique à un autre de la
membrane interne de la mitochondrie, jusqu’au dernier site
permettant la création de l’ATP (l’énergie).
Ce dernier site protéique s’appelle : Cytochrome oxydase. La
cytochrome oxydase est le site où intervient la quasi-totalité de
l’oxygène resîré. L’oxygène participe à la synthèse de l’ATP en
captant très facilement les électrons accumulés le long de la
chaîne de transport, de ce fait, la molécule d’oxygène passe par
des formes intermédiaires très toxiques que l’on appelle dérivés
actifs de l’oxygène, les premiers radicaux libres de l’organisme.
•La cytochrome oxydase est censée retenir ces formes d’oxygène
très toxiques, mais environ 5 à 10 % de ces radicaux libres vont
réussir à fuir à l’extérieur de la mitochondrie.
Une fois sortie de la mitochondrie, les radicaux libres vont ar-
racher un électron à une molécule voisine pour ser stabiliser. De
ce fait, ils perdent leur toxicité, en revanche, ils laissent derrière
eux des molécules qui ont perdu un électron et qui se transforment
à leur tour en radicaux libres condamnées à chercher à leurtour
auprès d’’autres molécules l’électron manqua nt à chacune d’entre
elles. Ainsi débute une réaction en chaîne dévastatrice…
C- Les effets du radical libre

114
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Radicaux libres

Mlolécule saine

Fixation des radicaux libres sur la molécule


saine et sa transformation en radical libre

Fig ( )-Radicaux libres et stress oxydatif

•Sur leur passage, les radicaux libres vont : dénaturer des protéi-
nes, oxyder des lipides, provoquer des cassures où des mutations
des brins d’ADN et détruire des membranes cellulaires jusqu’à la
mort de la cellule. Personne ne peut échapper à ce processus qui a
lieu à l’intérieur de chacune des cellules
•Les effets négatifs des radicaux libres sont regroupés sous le
terme de stress oxydatif ou oxydant. Les conséquences négatives
des ROS sont graves et impliquées pratiquement dans toutes les
maladies : diabète sucré, sclérose en plaques, asthme, polyarthrite

115
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
rhumatoïde et bien d’autres maladies mortelles telles que les
maladies cardiovasculaires, le cancer, les maladies
neurodégénératives telles que la maladie d'Alzheimer et la
maladie de Parkinson ainsi que du vieillissement (peut-être en
raison du raccourcissement des télomères).
•Le stress oxydatif est dangereux lorsque la formation et la
concentration de ROS dépasse l'activité endogène d’auto-défense
d’antioxydants de l'organisme. Ce stress est corrélé avec le
vieillissement. Le stress oxydatif chronique accélère en effet le
vieillissement des cellules. On a démontré que l'une des raisons
pour lesquelles l'exercice régulier exerce ces effets thérapeutiques
est parce qu'il régule l'activité antioxydante endogène de
l'organisme, ce qui réduit le risque absolu de lésions cellulaires
par le stress oxydatif.
•Par ailleurs, le cancer est l’une des pathologies les plus fré-
quentes du vieillissement. Le stress oxydant chronique stimule la
croissance tumorale et la propagation des cellules cancéreuses
dans le corps. Chez des femmes atteintes d’un cancer du sein, le
stress oxydatif chronique stabilise une protéine appelée HIF qui
génère une angiogenèse,. Le stress oxydatif pourrait également
être à l’origine du cancer dans le sens où le mécanisme d’action
est identique à celui de l’apparition.

116
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre12- Bases biologiques de la thérapie à


visée psychiatrique

I- Problématique de la matérialité de l’esprit


•La question des bases biologiques de la conscience reste un pro-
blème d’actualité. Contrairement à ce qu’a déclaré René Descar-
tes au XVIIe siècle, à savoir que le corps et l'esprit étaient entière-
ment séparés, la nouvelle conception est que tout ce qui se produit
dans notre esprit, résulte de processus cérébraux.
•Tout traitement pharmacologique en psychiatrie, postule en fait
l’existence d’une base biologique (moléculaire) aux troubles men-
taux. La question des limites d’une explication biologique de la
conscience, a été désignée par le terme « problème du fossé
explicatif ». Certains pensent que ce fossé traduit l’irréductibilité
des propriétés subjectives à des propriétés physiques et qu’il s’agit
d’un fossé ontologique. Pour le matérialisme physicaliste, le men-
tal est réductible au biologique qui est lui même réductible à la
physique. Ainsi, le physicalisme nie que l’esprit soit une subs-
tance et décrit la conscience comme une propriété d’un orga-
nisme, ensuite il essaie d’expliquer le comportement conscient par
l’activité cérébrale. Une telle identification, peut signifier entre
autres, qu’il n’y a pas de différence mentale par exemple entre
deux croyances, sans une différence entre les positions et les
mouvements des particules qui composent les corps. Michel
Bitbol, qui s’intéresse à la conscience dans un esprit phénomé-
nologique, discute la possibilité de réduire la conscience à un
processus neuronal dans son ouvrage La conscience a-t-elle une
origine ?. Cette question majeure de l’épistémologie confronte la
philosophie et les neurosciences. La thèse principale de Jean-
Pierre Changeux, dans son ouvrage, l’homme neuronal, relève du
réductionnisme matérialiste. Pour lui, l’homme n’a plus rien à
faire de l’esprit, puisque la neurophysiologie enseigne chaque
jour, avec plus de détail, que nous ne sommes que des entités
neuronales. En fait, il y a eu une évolution importante dans la
conception du mécanisme matérialiste, particulièrement en raison
des progrès de la mécanique de l’infiniment petit. Actuellement,
la thèse physicaliste ne peut être ni prouvée ni réfutée. Elle reste
encore trop vague pour prétendre à la vérité scientifique et
demeure cantonnée aujourd’hui, dans son statut métaphysique.

117
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
•Les théories de « l’émergence » revendiquent quant à elles un
physicalisme non réductionniste. Pour l'émergentisme, les entités
mentales transcendent le physiologique, tout en émanant de lui.
Le mental émerge de la complexification progressive des systè-
mes matériels, auxquels il est cependant irréductible. Dans cet
ordre d’idées, Roger Penrose physicien et mathématicien anglais,
a proposé une explication physique de la conscience. Il écrit dans
the Emperor’s New Mind: « c’est notre manque de compréhension
des lois fondamentales de l’univers qui nous empêche de saisir la
notion d’« esprit » en termes de physique. Searle, quant à lui
admet parfaitement l’unité de nature, entre le cerveau et l’esprit, y
compris pour ce qui relève des aspects les plus subjectifs de la
conscience, à l'instar de la grande majorité des philosophes de
l'esprit. Mais il se distingue par son naturalisme non-réduc-
tionniste, qu'il qualifie de «biologique». Dans La redécouverte de
l'esprit, il développe pour la première fois cette conception, en dé-
fendant une position anti-réductionniste des états qualifiés
d'«émergeants». Il conçoit en fait l'émergence non pas seulement
comme une différence de niveau de description, mais aussi
comme un processus causal vertical, à la fois ascendant et des-
cendant. La thèse centrale soutenue par Searle dans son ouvrage
la redécouverte de l’esprit est que la conscience est la marque
première de l’esprit et que l’intentionnalité ne caractérise que
certains états conscients. L’intentionnalité étant un concept
majeur de la philosophie de l’esprit du vingtième siècle, issu
d’Aristote et de la philosophie médiévale. Pour Husserl, il s’agit
de la caractéristique de la conscience d’être toujours dirigée vers
un objet (toute conscience est conscience de quelque chose). La
conception de Searle, s’oppose à la conception représentationnelle
de l’esprit. La thèse des représentationnalistes se concentre sur
l’intentionnalité et sinon ignore la conscience, du moins
l’explique en termes de représentation mentale. Searle apporte
comme argument à ses idées, le fait qu’il existe dans la nature
toutes sortes de propriétés émergentes ou holistiques, telles que la
"liquidité" de l'eau ou la couleur du ciel, qui ne sont pas présentes
à l'échelle des constituants des choses qu'elles caractérisent.
Refusant le dualisme de Descartes, qui voudrait séparer l’esprit du
corps, il considère, que le physique peut être aussi mental et que
la conscience, se situe à un niveau supérieur aux processus neuro-
physiologiques, même si elle en dépend. Pour lui, il existe chez
l'homme un niveau supérieur, irréductible aux gènes comme aux

118
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
neurones, où apparaît la conscience, c'est-à-dire l'esprit et la
possibilité d'une vie intellectuelle.
•Les nouvelles techniques de neuroradiologie montrent qu'une
certaine « matérialité » de la pensée est inscrite dans le cerveau.
On compte aujourd'hui une vingtaine de laboratoires à travers le
monde (aux Etats-Unis et en Europe) spécialisés dans l'analyse
neuroradiologique des phénomènes psychiatriques, grâce au dé-
veloppement de deux techniques majeures de radiologie qui ont
permis l'émergence de cette nouvelle discipline. Il s’agit de la "to-
mographie par émission de positons" (TEP), qui consiste à identi-
fier et à quantifier différents éléments du métabolisme cérébral au
moyen de certains isotopes produits par un cyclotron et de l'ima-
gerie par résonance magnétique (IRM), surtout la résonance
magnétique fonctionnelle (RMN), qui fournit les meilleures ima-
ges, de la morphologie in vivo, des diverses structures cérébrales.
La neuro-imagerie appliquée aux affections psychiatriques couvre
différents domaines. On peut citer parmi eux, le développement
cérébral, la pédopsychiatrie, l'étude des psychoses, (particulière-
ment la schizophrénie et les phénomènes hallucinatoires), ainsi
que l'analyse des effets des drogues licites et illicites et des théra-
peutiques médicamenteuses (neuroleptiques et antidépresseurs).
Des résultats laissent aujourd'hui clairement penser que l'autisme
ainsi que certaines psychoses sont la conséquence directe d'un
trouble de la maturation du cerveau durant la grossesse et le bas
âge.

II- Approche réductionniste de la thérapie à visée psychia-


trique
•Le réductionnisme a montré ses limites en thérapeutique psy-
chiatrique. Dagognet estime pourtant, que les progrès de la
pharmacodynamie ont réorienté et redéfini la maladie mentale,
idée que ne semble pas partager Alain Ehrenberg, dans La fatigue
d'être soi, en écrivant « La maîtrise de l'esprit humain par l'action
pharmacologique n'est ni pour demain ni pour après-demain ».
C’est en fait sur la théorie mono-aminergique des troubles men-
taux, que se base la thérapie psychotrope. Mais bien que les médi-
caments psychotropes aient des effets moléculaires spécifiques, il
n’y a pas toujours de parallélisme entre leurs effets moléculaires
et leurs effets cliniques. Jusqu’à présent les effets moléculaires de
ces médicaments se limitent à l’interférence avec des récepteurs
ou les neurotransmetteurs centraux, des mono-amines (noradré-

119
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
naline, adrénaline, sérotonine, dopamine) .
•Commençons par aborder le problème des neuroleptiques ou an-
tipsychotiques (voir figure A). Les conceptions modernes de la
schizophrénie soulignent l’importance d’un déséquilibre du sys-
tème dopaminergique entre le lobe frontal (voie méso-corticale) et
les centres sous-corticaux (voie méso-limbique). Ce déséquilibre
ne suffit pas à tout expliquer, mais il y a un consensus que cette
dysfonction du système dopaminergique est souvent à la base du
syndrome psychotique (hallucinations, idées délirantes, pensée
désorganisée, comportement «catatonique») et que tous les antip-
sychotiques ont un effet sur ce système. Ainsi, les neuroleptiques,
bloquent les récepteurs D2 et D3 de la Dopamine (récepteurs do-
paminergiques). Comme tous les antipsychotiques sont des an-
tagonistes dopaminergiques, on a supposé que la schizophrénie est

traitement des états d’agitation effet atropinique (sècheresse de la


bouche, constipation, troubles

effet sédatif neuroleptiques


(neuroleptiques sédatifs)

blocage des récepteurs


alpha périphériques

blocage des récepteurs histaminiques centraux


effet adrénolytique
(hypotension hydrostatique)
blocage des récepteurs centraux de la dopamine
?

syndrome malin ?
Inhibition de la sécrétion du P.I.F

traitement de la schizophrénie dyskinésies

prédominance du système augmentation de la sécrétion de


cholinergique central prolactine

syndromes parkinsoniens hyperprolactinémie

Fig (A) - Bases physiopathologiques du traitement neuroleptique classique

120
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
associée à une hyperactivité des voies mésolimbi-
que/mésocorticale, dopaminergiques. Ce concept est actuellement
très discuté, puisque les nouveaux neuroleptiques, se sont avérés
avoir des propriétés moléculaires différentes. C’est le cas de la
Clozapine qui est un antagoniste des récepteurs sérotoninérgiques
5HT2A. Elle a une affinité pour les récepteurs D4 et son affinité
pour les récepteurs D2 est faible.
•En ce qui concerne les antidépresseurs, la cause de la dépression
et les mécanismes d’action de ces médicaments sont inconnus.
Les bases biochimiques de l’effet antidépresseur ne sont pas très
précises. Elles découlent des hypothèses mono-aminergiques
basées sur l’idée que la dépression résulterait d’une diminution de
l’activité centrale des systèmes noradrénergique et/ou sérotoni-
nergique centraux. Cette théorie pose de nombreuses questions,
mais elle n’a pas pu être remplacée par une meilleure. Plus ré-
cemment, on s’est intéressé aux effets des antidépresseurs sur la
régulation des récepteurs du cerveau. L’objectif pharmacologique
pour l’ensemble des médicaments proposés à ce jour aux
cliniciens, était d’augmenter la concentration cérébrale en mo-
noamines. Il s’agit essentiellement d’un mécanisme d’inhibition
enzymatique de la dégradation des monoamines, pour les inhi-
biteurs de la monoamine oxydase ou d’un mécanisme de blocage
du transporteur chargé de la recapture des monoamines, pour les
inhibiteurs de la recapture qui peuvent être plus ou moins sélectif,
comme c’est le cas des inhibiteurs du recaptage de la sérotonine,
dont la fluoxétine, commercialisée sous la dénomination
(Prozac*). Sans entrer dans des détails techniques, «Les inhibi-
teurs du recaptage de la sérotonine ne font pas mieux q’un
placebo », était en 2008, la conclusion d’une étude, publiée dans
la revue Plos, qui venait appuyer une publication de 2003 « du
British medical Journal ». La suspicion montait immédiatement
d’un cran supplémentaire à l’égard de cette nouvelle génération
d’antidépresseurs.
•Dans le domaine de l’anxiété, (voir figure B) une théorie
biologique de ce trouble, a été élaborée grâce à la connaissance
des récepteurs aux benzodiazépines. La sérotonine semble
également jouer un rôle qui n’est pas totalement élucidé dans l’an-
xiété. Le GABA est un neurotransmetteur inhibiteur majoritaire
du système nerveux central. Il active trois familles de récepteurs,
les récepteurs-canaux ioniques GABAA et GABAC et les récep-
teurs GABAB couplés aux protéines G. L’occupation des sites

121
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Traitement des anxiétés Traitement anticonvulsivant

Effet sédatif
(certains dérivés)
Effet anxiolytique Effet anticonvulsivant

Récepteurs centraux

(+) (+)
(+)
Benzodiazépines

Réponse à la stimulation de GABA libéré


localement au niveau de la moelle

(+)

Traitement de la spasticité

Fig (A)-Effets pharmacologiques et thérapeutiques des anxiolytiques

benzodiazépines, médicaments anxiolytiques, par les agonistes


(stimulants) des récepteurs des benzodiazépines, induit un
changement de conformation du récepteur GABA qui est un canal
anionique sélectif, faisant entrer du Cl-. Ceci augmente l’affinité
de la liaison au GABA et stimule les effets du GABA sur la
conductance au Cl- de la membrane neuronale, engendrant une hy-
perpolarisation.
•La chimiothérapie a été d’un certain apport, dans la psychose
maniaco-dépressive, appelée actuellement maladie bipolaire.
Cette affection est caractérisée par des perturbations cycliques de
l’humeur, sous forme d’épisodes de dépression mélancolique ou
d’accès maniaque, avec un état habituel dans l’intervalle des
accès, pouvant évoluer dans certains cas, sur un mode unipolaire.
Les régulateurs de l’humeur utilisés dans le traitement de
l’affection, constituent une classe pharmacologique restreinte
représentée par les sels de lithium, la carbamazépine et l’acide
valproïque, valproate (Dépakote) ou valpromide (Dépamide). Ces
3 dernières substances ont des potentialités équivalentes dans les
indications psychiatriques. Dans la manie et les désordres affectifs
bipolaires, le lithium a un effet stabilisant sur l’humeur. Il est uti-
122
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
lisé comme traitement prophylactique de la maniaco-dépressive. Il
traverse les membranes cellulaires par diffusion passive ou en em-
pruntant les mécanismes de transports cellulaires actifs des ions
sodium, potassium et calcium, sur lesquels il va agir, entraînant
dès lors des modifications de l’équilibre hydroélectrolytique et
membranaire. Son mécanisme d’action est inconnu. Cet exemple
montre que parfois, une efficacité cliniquement prouvée, ne va pas
forcément de paire avec un mécanisme d’action connu.

123
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre13- Implications de certains concepts


moléculaires

a- Le cytochrome P450 et ses incidences communautaires


•Le système enzymatique du cytochrome P-450 intervient dans le
métabolisme de la phase I d’oxydation microsomiale. Ce système
du cytochrome P-450 est une superfamille d’isoenzymes micro-
somiales qui transfèrent des électrons et par conséquent catalysent
l’oxydation de nombreux médicaments. Les enzymes du cyto-
chrome P-450 sont regroupées en 14 familles de gènes caractéris-
tiques des mammifères. Elles sont désignées par le sigle commun
CYP, suivi d’un nombre arabe qui indique la famille, d’une lettre
qui indique la sous-famille et d’un autre nombre arabe qui indique
le gène spécifique. Quatre de ces iso-enzymes sont impliquées
dans le métabolisme d’environ 90% des médicaments
couramment utilisés : CYP 1A2, CYP 2C9, CYP 2D6 et CYP
3A4.
•Ces enzymes sont inductibles c’est à dire qu’elle peuvent aug-
menter en quantité sous l’action de certaines substances chimi-
ques (médicaments ou autres substances), appelées pour cette
raison substances inductrices d’enzymes ou agents inducteurs.
Ces agents inducteurs en stimulant de la sorte les biotransforma-
tions des médicaments peuvent diminuer ou annuler leur effet
thérapeutique ou encore favoriser leur toxicité. Les médicaments
inducteurs d’enzymes peuvent eux-mêmes engendrer certains ef-
fets indésirables en relation directe avec les effets inducteurs. Les
inducteurs d’enzymes semblent agir en augmentant la synthèse
des enzymes microsomiales ainsi que le taux du cytochrome
P450.
•L’inhibition enzymatique est un phénomène plus dangereux car
plus brutal que l’induction. Sachant que d’innombrables médica-
ments (imidazolés, macrolides, cimétidine, inhibiteurs calci-
ques...) ou des composés alimentaires (jus de pamplemousse) sont
susceptibles d’inhiber le CYP3A4, il convient de surveiller de
près ce type d’interactions et ses conséquences cliniques, en cas
d’administration simultanée d’un médicament métabolisé par un
cytochrome donné et d’un inhibiteur de ce cytochrome.
Ainsi le système des cytochromes P450 est impliqué dans un
grand nombre d’interactions médicamenteuses, à l’origine d’effets

124
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
indésirables parfois graves, dont l’impact communautaire en fait
un problème fondamental de pharmacovigilance. Les progrès ac-
tuels en pharmacogénomique peuvent contribuer à éviter ce type
d’effets indésirables.
b- Réductionnisme, toxidromie et iatrogénie
•La pathologie iatrogène et les syndromes toxiques peuvent imiter
pratiquement toutes les maladies spontanées, rencontrées en clini-
que. On parle de toxidromie pour désigner les syndromes
toxiques, quant à l’« iatrogénie » elle signifie tous les effets
néfastes, induits par les moyens thérapeutiques utilisés, qui sont
essentiellement médicamenteux ; elle concerne dans ce cas, les
effets indésirables des médicaments qui sont le domaine d’études
de la pharmacovigilance.
•La toxidromie est liée à des toxiques non médicamenteux ou
bien à des médicaments utilisés à des doses suprathérapeutiques
(toxiques) par erreur, ou dans le but d’une tentative de suicide et
qui se comportent alors comme des toxiques. Le terme de
toxidromie désigne souvent les syndromes liés aux intoxications.
Ainsi différents entités cliniques sont décrites (syndrome
cholinergique, syndrome adrénergique, syndrome
sérotoninergique etc….) et peuvent aider au diagnostic étiolo-
gique de l’intoxication en l’absence d’une anamnèse précise.
•L’entité morbide peut être ainsi reconstituée de toute pièce, par
une substance chimique qui interagit avec des structures molé-
culaires de l’organisme. Mais cela ne veut pas dire que tout ce qui
s’est passé entre cette interaction et l’apparition des mani-
festations cliniques est complètement élucidé.
•Cette pathologie provoquée peut contribuer à expliquer certains
mécanismes physiopathologiques spontanés, observés en dehors
de tout agent chimique extérieur. On peut la considérer de ce fait
comme une sorte de pathologie expérimentale, involontaire chez
l’être humain, mais inévitable, du fait qu’un médicament commer-
cialisé même depuis plusieurs années, peut être considéré comme
étant encore en phase d’expérimentation (phase 4 des essais clini-
ques).
c- Cas du traitement anti-agrégant plaquettaire
L’importance que ce traitement a acquise durant les deux der-
nières décennies, tient à la place importante qu’il occupe dans la
pharmacoprévention du risque cardiovasculaire, première cause
de mortalité humaine et problème majeur de santé publique.
125
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
L’agrégation plaquettaire participe à la formation possible d’une
thrombose au contact d’une plaque d’athérome, pouvant
engendrer l’occlusion d’une artère, avec comme conséquence
possible la nécrose d’un territoire cardiaque ou cérébral, situé en
aval de la thrombose, engendrant un infarctus du myocarde dans
le premier cas ou un accident vasculaire cérébral dans le second.
Le traitement anti-agrégant plaquettaire va nous mener d’un
concept moléculaire à des perspectives communautaires. •Les
médicaments anti-agrégants, peuvent interagir avec différentes
cibles, pour engendrer un même effet thérapeutique, pouvant
résulter de mécanismes moléculaires différents, dont les plus
importants sont les suivants :1-inhibition des phosphodiestérases,
comme c’est le cas du dipyridamole empêchant l’hydrolyse de
l’AMPc, ce qui entraîne une augmentation de la concentration
d’AMPc ; 2-inhibition de la cyclo-oxygénase, entraînant un
blocage de la formation de tromboxane A2, comme c’est le cas de
l’acide acétylsalicylique (Aspirine) ; 3-agents qui inhibent la sous
unité P2Y12 du récepteur de l’ADP, comme le Clopidogrel, ou le
Prasugrel ou encore le Ticagrelor, entraînant une inhibition
spécifique, non compétitive et irréversible de la liaison de l’ADP
à son récepteur plaquettaire ; 4-médicaments inhibiteurs des
récepteurs GPIIb/IIIa entraînant une inhibition de la liaison du
fibrinogène à ces récepteurs étape essentielle de l’agrégation des
plaquettes, comme c’est le cas de l’Abciximab ou l’Eptifibatide.
Mais attention pou une indication donnée, on ne peut que
mentionner le médicament qui a bénéficié d’études cliniques
concernant cette indication.
Ainsi, les indications actuelles des anti-agrégants plaquettaires
(selon les recommandations en 2012 de la haute autorité de santé
(HAS) sont les suivantes :
•En prévention primaire, une inhibition plaquettaire au long cours
par aspirine seule (75-160 mg/j) est recommandée lorsque le ris-
que cardio-vasculaire est élevé. En prévention secondaire,
l’inhibition plaquettaire est recommandée : 1-en monothérapie par
75-325 mg/j d’aspirine (clopidogrel en cas de contre-indication à
l’aspirine) après accident vasculaire cérébral ou accident ischémi-
que transitoire ou en cas de maladie coronarienne stable (y com-
pris après pontage) ou d’artériopathie oblitérante des membres
inférieurs; 2-en bithérapie (aspirine 75-160 mg/j + clopidogrel),
après infarctus du myocarde (avec ou sans pose de stent) ou pose
d’un stent hors contexte d’infarctus du myocarde; 3-en bithérapie

126
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
aspirine + prasugrel ou aspirine + ticagrelor dans les suites d’un
syndrome coronarien aigu.

127
Pharmacologie moléculaire pour le praticien

Chapitre14- Actualités et perspectives de la


thérapie

I- Clonage, cellules souhes et thérapie génique

A- Clonage
Voir figure A
Le clonage désigne la technique qui consiste à introduire, dans le
cytoplasme d’un ovocyte préalablement énucléé, un noyau d’une
cellule issue d’un autre animal. Cette manipulation délicate
permet de reconstituer un embryon qui, une fois transplanté dans
une femelle receveuse, pourra se développer à terme.
L’importance de la question éthique soulevée par la perspective
d’application de cette technique à l’homme a rapidement conduit
à distinguer le clonage reproductif aboutissant à la naissance d’un
jeune, du clonage non reproductif dit« clonage thérapeutique» se
limitant à la production de cellules embryonnaires. Dans le pre-
mier cas, on laisse le noyau récapituler in vivo toutes les étapes du
développement, apportant ainsi la preuve qu’il a pu retrouver
l’état totipotent du noyau de l’œuf fécondé. Dans le deuxième cas,
on interrompt très tôt cette reprogrammation des étapes du dé-
veloppement, avant l’implantation de l’embryon, alors que les
cellules embryonnaires commencent à se différencier. Le recours
au clonage pour la production de cellules embryonnaires à des
fins thérapeutiques chez l’homme, prend en compte l’aptitude
qu’ont les cellules souches embryonnaires de pouvoir être diffé-
renciées aisément in vitro en un grand nombre de types cellulai-
res. Mais ce clonage thérapeutique nous place dans le même
temps devant une situation redoutable: celle d’avoir à décider a
priori de créer des embryons humains dont le statut ontologique,
dès les tous premiers stades du développement, est au cœur du dé-
bat éthique. L’emploi des seules cellules souches adultes permet-
trait, au moins en partie, de faire l’économie de ce débat.
B- Cellules souches
Voir figure B
Il est possible actuellement de créer plusieurs embryons humains
128
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
à partir de la technique du clonage par transfert nucléaire. La
«médecine régénérative » est une nouvelle perspective théra-
peutique basée sur le potentiel des cellules souches. Elle pourrait

Cellules embryonnaires

Introduction du noyau dans la cellule


énucléée

Ovocyte préalablement Noyau d’une cellule


énucléé issue d’un autre
animal

Fig ( )-Clonage thérapeutique

fournir dans le futur de nouveaux traitements médicamenteux


inaugurant une révolution conceptuelle à savoir: l’autoréparation
de l’organisme. Le prix Nobel 2012 de médecine a couronné les
travaux de deux lauréats ayant découvert que l’on peut obtenir des
cellules souches, encore non différenciées en tel ou tel type cellu-
laire (musculaire, sanguine, intestinale…), à partir de cellules
adultes qui s’étaient pourtant déjà spécialisées pour une fonction
donnée. Ces découvertes ont bousculé ce que l’on pensait des cel-
lules souches et élargissent les possibilités d’utilisation de ces der-
nières. Ces travaux ont permis de trouver une nouvelle façon de
129
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
créer des cellules souches, en permettant à des cellules adultes
d’être reprogrammées pour devenir "pluripotentes».
La « médecine régénérative » est aujourd’hui un grand défi de la

Cellule
adulte
spécialisée
Cellule
embryonnaire

Nobel 2012
Reprogrammation
des cellules adultes
pour devenir

Possibilité de concevoir
des substances
Cellules adultes thérapeutiquement
différenciées utiles

embryons créés
par la technique
du clonage par
transfert nucléaire

Fig (B)-Potentialités thérapeutiques des cellules souches et


possibilité de reprogrammer des cellules adultes différenciées
pour obtenir des cellules souches

recherche biomédicale. Cette nouvelle perspective thérapeutique


pourrait fournir dans le futur de nouveaux traitements qui régénè-
rent les cellules de l’organisme, inaugurant une révolution
conceptuelle : l’autoréparation de l’organisme. On pensait que le
cerveau et la moelle épinière ne pouvaient se réparer. La dé-
couverte de cellules souches neuronales, au cœur du cerveau

130
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
adulte a bouleversé cette croyance. Depuis 2003, on sait que notre
cortex, grâce à elles, fabrique durant des décennies de nouveaux
neurones. Détecter ces cellules souches chez des personnes en vie
est donc de première importance pour mieux traiter les tissus
nerveux lésés. En 2004, une équipe française avait identifié dans
le cerveau une molécule-clé capable de guider les cellules souches
neuronales vers les zones où elles étaient nécessaires. Désormais,
il va peut-être devenir possible de détecter in vivo et en temps réel
leur division et leur prolifération. Un immense espoir pour la
compréhension et la thérapie cellulaire du cerveau.

C- Transfert génique
Le transfert génique consiste à transférer l’ADN à la cellule.
L’ADN exogène ainsi transféré entraîne la modification du gé-
notype de la cellule dont la conséquence est la modification de
son phénotype. La thérapie génique est l’application du transfert
génique aux maladies humaines, en apportant un nouvel ADN
Vecteur
transportant le
nouveau gène

Membrane cellulaire

Gène

ARNm

Golgi Réticulum

Fig C) – Principes de la thérapie génique

131
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
codant pour une « protéine thérapeutique ». Cette nouvelle
stratégie pour le traitement de certaines maladies héréditaires et
acquises fait appel à différentes techniques de biologie
moléculaire. Le schéma général de la thérapie génique est
résumé dans la figure . C
Un vecteur transportant un gène exogène codant pour une protéine
donnée est introduit dans la cellule cible où il est transféré au
niveau du noyau où a lieu la transcription de l’ADN en ARN
messager. Cet ARNm se déplace au niveau du réticulum
endoplasmique et de l’appareil de Golgi et permet la synthèse de
la nouvelle protéine thérapeutique qui est par la suite secrétée
dans la circulation. Cette nouvelle stratégie pour le traitement de
certaines maladies héréditaires et acquises fait appel à différentes
techniques de biologie moléculaire. On a cru un peu vite que par
l’introduction dans l’organisme du malade de la version normale
du gène défectueux, allait constituer une panacée.

II- CRISPR-Cas9
Découvert en 2012, l’outil CRISPR-Cas9 pour (CRISPR asso-
ciated protein 9) associe un ARN jouant le rôle de guide à une en-
zyme découpeuse d’ADN pour substituer, un gène à un autre avec
deux zones de coupe actives, une pour chaque brin de la double
hélice. Il s’agit donc d’une endonucléase Cette enzyme peut être
utilisée pour modifier facilement et rapidement le génome des
cellules animales et végétales. La technique d’édition de
génome CRISPR-Cas9, a été développée à partir de 2012, par plu-
sieurs chercheurs. Outre sa fonction d'origine bactérienne dans
l'immunité, la protéine Cas9 est utilisée comme un outil du génie
génétique, pour induire des cassures double brin dans l'ADN. Ces
cassures peuvent conduire à l'inactivation d’un gène ou à l'intro-
duction de gènes hétérologues.
Mais que se passera-t-il si on utilise cette technique révolution-
naire pour produire des lignées d’hommes «augmentés». Le
spectre de 1’eugénisme ressurgit.
Cette technique laisse entrevoir la possibilité de modifier les
cellules germinales de l’embryon pour corriger des mutations
génétiques, ce qui changerait ainsi le génome de la descendance.
Tant qu’elle est utilisée pour la recherche et pour corriger des
mutations liées à des maladies, cette technique semble très
prometteuses. Cete « boîte à outils » détient en effet un grand po-
tentiel thérapeutique. Les premières applications ont été réalisées

132
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
sur des animaux et notamment des primates. Grâce au coût de dé-
veloppement réduit de la technique, des scientifiques ont déjà créé
des vaches sans cornes (pour éviter qu'elles se blessent). On a
même prévu de ressusciter des espèces disparues comme
le mammouth par exemple. Des perspectives de santé publique se
dessinent avec les travaux d’une équipe américaine qui a même
réussi à rendre un moustique résistant au paludisme et prévoit de
le libérer dans la nature, pour transmettre ce gène de résistance à
l'ensemble de l'espèce, afin d’éviter la contamination des 500 000
victimes humaines annuelles liées à cette maladie.
CRISPR-Cas9 ouvre également la voie à de nombreuses solutions
de thérapie génique, telles que, le traitement de la mucoviscidose,
de l'hémophilie, de l’Alzheimer ou la guérison du cancer. Toute-
fois, concernant les premiers tests de lutte contre le SIDA, le
VIH est parvenu à trouver la parade à la mutation induite et
reprendre ainsi sa réplication. Les scientifiques suggèrent que les
lecteurs de gènes à la base de Cas9 peuvent être capables d'éditer
les génomes de populations entières d'organismes. Mais on com-
mence déjà à s’inquiéter de la possibilité de modifier le patri-
moine génétique des cellules germinales, en raison de
l’accessibilité et de la relative simplicité de l’utilisation de Cas9.
Le 18 avril 2015, des chercheurs de Canton ont publié un article
dans Protein & Cell, annonçant avoir utilisé la technique
CRISPR/Cas9 pour modifier génétiquement des embryons hu-
mains. Selon Junjiu Huang, qui a dirigé ces recherches, cet article
aurait été refusé par Science et Nature. Pour la première fois, en
2016, une équipe de médecins et de biologistes chinois a injecté
des cellules génétiquement modifiées par CRISPR-Cas9 à un
homme souffrant d’un cancer pulmonaire avec métastases. Ce
malade était dans une situation critique, puisque, aucun des traite-
ments classiques ne ralentissait la progression de la maladie.
Une étude publiée par la revue Nature en 2017, a grâce à la
technique Crispr-Cas9 réussi à effacer chez des embryons hu-
mains une mutation à l’origine d’une grave maladie cardiaque.
Compte tenu de la réglementation, les embryons n’étaient pas
destinés à être implantés et leur développement a été interrompu
après quelques jours.

III- Nanomédicaments
Avec l’échelle nano, on est exactement à la taille des molécules,
or les maladies sont liées à des anomalies à l’échelle moléculaire,

133
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
bien que l’on ne sache pas toujours de quel type d’anomalie il
s’agit, ni ce qui se passe en amont de ces anomalies. Une capsule
de taille nanométrique est, de fait, si petite, qu’elle peut entrer
dans la cellule pour y délivrer, au cœur même de sa cible, le médi-
cament souhaité. Cette propriété est déjà exploitée par l’industrie
pharmaceutique pour agir directement et sans effet secondaire sur
les cibles. Les nanotechnologies promettent même la régénération
de tissus lésés voire morts. Une dizaine de «nanomédicaments»
sont déjà sur le marché, notamment un antifongique (Ambisome)
et des agents de chimiothérapie anticancéreuse. Aujourd’hui, un
grand nombre de molécules, efficaces mais très toxiques, ne
peuvent pas être délivrées sans une cascade d’effets secondaires
graves ; c’est en particulier le cas en chimiothérapie. Insérer ces
molécules dans des nanocapsules peut éviter ce problème majeur
est un enjeu important de fabrication, car les nanovecteurs, dont la
fabrication est aujourd’hui maîtrisée en laboratoire, délivrent leur
charge aux seules cellules cancéreuses ou infectées par un virus
ou une bactérie, grâce aux éléments chimiques qui recouvrent la
capsule et qui indiquent à l’organisme l’adresse spécifique de li-
vraison. Par exemple le paclitaxel, un anticancéreux qui fait partie
de la classe des taxanes, est administré avec un solvant très toxi-
que pour les cellules. Il est désormais entouré d’une nanocapsule
d’albumine. Or la tumeur, pour se nourrir, émet une quantité très
importante de protéines spécifiques pour capter l’albumine. Le
médicament est ainsi préférentiellement délivré aux cellules
cancéreuses.

IV- Futur de la médecine et génomique


1- Considérations générales
Les progrès de la génomique vont-ils engendrer la naissance
d’une médecine prédictive et bouleverser les traitements médi-
caux ?
La génomique fonctionnelle est une approche consistant à étudier
le rôle du génome constitué d’ADN, support de l'information
héréditaire, dans les processus biologiques. Il reste encore
beaucoup à découvrir dans ce domaine.
Il y a des interactions complexes qui limitent le pouvoir prédictif
des tests génétiques. L'influence d'un gène peut être à la fois po-
sitive et négative. La situation est encore plus confuse, lorsque
plusieurs gènes sont en cause, ce qui est notamment le cas dans le
diabète, les maladies cardiovasculaires et de nombreuses formes
134
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
de cancer. Pour ces maladies, on ne sait pas faire la part de l'envi-
ronnement, du mode de vie, des gènes et de leurs interactions. De
tout façon, mettre en évidence chez quelqu’un un gène prédis-
posant par exemple à un cancer donné, ne signifie pas forcément
que la personne sera atteinte par ce cancer. On imagine alors la
complexité des problèmes, quand il s’agit d’envisager une thé-
rapeutique préventive. Certains spécialistes doutent du fait que la
médecine prédictive va s'imposer. Mais connaître des gènes de
susceptibilité et découvrir leurs fonctions, faciliterait
l’identification des processus biologiques impliqués dans une
maladie. Par exemple on sait aujourd’hui qu’en fonction du profil
génomique de certains cancers, il faut préférer certains traitements
et exclure d’autres.
2- Création en 2010 de la première cellule contrôlée par un gé-
nome synthétique
C’est en ces termes que la revue américaine « Science » a an-
noncé la publication, dans ses colonnes, d’une réalisation
scientifique majeure dans l’histoire des technologies du vivant.
Des chercheurs ont réussi à construire, par synthèse chimique,
l’ADN entier d’une bactérie et à démontrer qu’il fonctionne nor-
malement. Cette bactérie dont les parents sont des ordinateurs
s’est mise à proliférer par divisions successives à peine
« terminée ». Avec la conception de cette bactérie, l’aire de la
biologie synthétique est arrivée. Certaines équipes travaillent ac-
tuellement à la production de certains médicaments par ce type de
bactéries. C’est là un nouveau pas vers des horizons dont rêvent
de nombreuses équipes travaillant dans les biotechnologies: fabri-
quer des microbes au génome taillé sur mesure et qui, grâce à
leurs caractéristiques génétiques choisies, produiraient des quan-
tité infinies de substances rares.
3- Un ADN constitué de six lettres
Un article publié le 8 mai 2014 dans la revue Nature, révèle qu’on
a réussi à créer, pour la première fois, une version de la bactérie
Escherichia coli (E. coli) dont l’ADN n'est pas constitué des
quatre lettres composant toute molécule d’ADN, depuis l'appari-
tion de la vie sur Terre, mais de six lettres. Cette prouesse,
soulève des questions éthiques. Verra-t-on un jour l'avènement de
créatures dotées d’un code génétique « enrichi », codant pour des
protéines qui n'existent pas encore ? Cette perspective, est

135
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
d’autant plus inquiétante, que les chercheurs ont aussi fait en
sorte que ces deux lettres supplémentaires soient ensuite
transmises aux descendantes des bactéries E. coli dont l'ADN
avait été ainsi modifié.
Une avancée scientifique aussi majeure ne peut qu'inciter à la pru-
dence. En effet, ces travaux montrent qu'il sera certainement pos-
sible à l'avenir de créer des êtres vivants artificiels, dotés de codes
génétiques mi-naturels mi-synthétiques codant pour des protéines
fonctionnant de façon très différente de celles que nous connais-
sons aujourd'hui et dont les effets pourraient très bien affecter
l'environnement ou la santé de façon totalement inattendue.
Les biologistes semblent plutôt enthousiastes pour le moment, à
l’idées des perspectives thérapeutiques possibles. Ils estiment que
les paires supplémentaires pourront être capables de coder pour
des protéines n'existant pas à l'état naturel et dont les effets seront
potentiellement bénéfiques pour la santé : par exemple la mise au
point de nouvelles classes d'antibiotiques ou bien, la possibilité de
venir réguler l'expression de tel ou tel gène, de façon par exemple
à éviter la survenue de telle ou telle maladie.

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Pharmacologie moléculaire pour le praticien
Index

communication autocrine,
A 12
communication cellulaire,
acétylation de l’isoniazide, 10, 11
82, 84 communication paracrine,
Activité intrinsèque, 27
12
ADN, 13, 14, 15, 16, 19,
Communications cellulaires,
134, 135
10
affinité, 27
consensus, 4, 120
agents inducteurs, 92 criblage, 20
Agonistes cholinergiques, Curares, 54
53
cytochrome P-450, 94
Agonistes dopaminergiques,
59
D
AMPc, 33
annulation de l'effet Déficit en glucose-6-
thérapeutique, 95 phosphate-
Antagonistes, 28 deshydrogénase, 81
Anticholinesthérasiques, 53 diabète, 134
antipsychotiques, 120
ARN, 13 E
association INH-
Rifampicine, 98 émergence, 118
auto-organisation, 15 émergentisme, 118
empreinte génomique
autoréparation de
parentale, 15
l’organisme, 129
enzymes du cytochrome P-
450, 90
B
enzymes inductibles, 92
biopuce, 14
Bloqueurs des récepteurs F
dopaminergiques, 59
Fluoxétine, 60
fossé explicatif, 117
C
canaux ioniques, 121 G
cancer, 135
Cas9, 132 GABA, 49
cause, 121, 134 Ganglioplégiques, 54
gène, 16, 19, 132, 134
Cellules souches, 128
génome humain, 20
Clonage, 128
137
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
génome synthétique, 135 matérialisme physicaliste,
génomique, 13, 134 117
génomique fonctionnelle, matérialité de l’esprit, 117
134 médecine prédictive, 134
génotypage, 77 médecine régénérative, 129
Glutamate, 49
glycine, 49 N
Nanomédicaments, 133
H
nanotechnologies, 134
Hérédité mendélienne, 15 naturalisme non-
hérédité mitochondriale, 15 réductionniste, 118
Histamine, 45 neuroleptiques, 120, 121
hypertension artérielle, 21 Neurotransmetteurs, 35

I P
imagerie par résonance Parasympatholytiques, 54
magnétique, 119 Penrose, 118
Induction enzymatique, 89, Pharmacogénétique, 71
92 phénotypage, 76
information, 16, 134 physicalisme, 117
inhibiteurs de l’enzyme de physicaliste, 20
conversion, 21 porphyries hépatiques, 100
inhibiteurs de la tyrosine- preuve, 128
kinase, 21 protéomique, 13, 18
inhibiteurs des protéases, 21 psychotropes, 119
inhibition enzymatique, 89,
101 R
Inhibition enzymatique, 101
récepteur, 11, 18, 20, 122
insuffisance cardiaque, 21
réductionnisme, 119
intentionnalité, 118
interférence ARN, 17 réductionnisme matérialiste,
117
L
S
Les protéines G, 29
schizophrénie, 120
Lisuride, 59
Searle, 118
sensibilité, 20
M
signal, 11, 12, 20
maladie bipolaire, 122 Signalisation, 10
stress oxydatif, 111

1
Pharmacologie moléculaire pour le praticien
structure tertiaire, 18 T
Sympatholytiques, 57
thérapie génique, 18
Sympathomimétiques, 56
tomographie par émission
Syndrome
de positons, 119
anticholinergique, 55
Toxine botulinique, 53
Syndrome cholinergique, 55
Transfert génique, 131
Syndrome sérotoninergique,
Trihexyphénidyle, 54
60
troubles mentaux, 117
Syndrome
sympathomimétique, 58
Système sérotoninergique, V
60 voies de signalisation, 10

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