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détermine ces faits.

Au contraire, tout son travail aura comme visée théorique


principale de démontrer le bien-fondé, la ratio qui précède et commande la forme
linguistique. « Le vocable est le signe des notions qui sont dans l’âme », cette définition
traduit bien cette conception du langage, selon Scaliger, qui représente des concepts
innés, diront plus tard les cartésiens.
S’il maintient que « la grammaire est la science qui permet de parler conformément
à l’usage », Scaliger n’insiste pas moins sur le fait que « même si le grammairien accorde
de l’importance au signifié [significatum] qui est une sorte de forme [forma], il ne le fait
pas pour son propre compte, mais pour transmettre le résultat à celui dont le métier est
de rechercher la vérité ». Il s’agit bien du logicien et du philosophe, et l’on comprend
que pour Scaliger comme pour toute la tradition grammaticale, l’étude de la langue
n’est pas une fin en soi, et n’a pas d’autonomie, mais fait partie d’une théorie de la
connaissance à laquelle elle est subordonnée. Mais ce geste de Scaliger s’accompagne
d’un autre qui essaie de cerner le champ de la grammaire, en insistant d’abord sur le
fait qu’elle n’est pas un art, mais une science. Tout en l’immergeant implicitement dans
une procédure logique, il la différencie de la science logique en excluant de la
grammaire la science du jugement. Il la différencie aussi de la rhétorique et de
l’interprétation des auteurs, pour la construire enfin comme une grammaire normative,
correction du langage, à deux volets : étude des éléments composants (morphologie) et
de leur organisation (syntaxe).
Comment se construit plus précisément cette grammaire ainsi conçue ? « Le
vocable, écrit Scaliger, comporte trois modifications : l’octroi d’une forme, la
composition et la vérité. La vérité, c’est l’adéquation de l’énoncé à la chose dont il est le
signe ; la composition, c’est la conjonction des éléments selon les propositions
correspondantes ; la forme se donne par création [creatio] et par dérivation
[figuratio 5]. » Il serait logique, donc, qu’il y ait trois types d’explications [rationes] dans
la grammaire : « la première relative à la forme, la seconde à la signification, la
troisième à la construction ».
Un souci constant de systématisation, inspiré de la logique d’Aristote, préside à
l’ouvrage. Il faut que l’analyse commence par les parties pour arriver à la composition
du tout ; cette méthode est meilleure « parce qu’elle suit l’ordre de la nature ; elle est
meilleure parce qu’elle met en valeur la supériorité d’esprit du maître [tradentis] et
parce qu’il faut avoir disposé tous les éléments dans un ordre bien établi avant
d’appeler l’esprit à travailler dessus ».
Dans cet ordre d’idées Scaliger divise les éléments linguistiques en catégories :
d’abord ceux qui composent le mot (ils peuvent être simples comme les lettres, et
composés comme les syllabes), ensuite il pense visiblement à une unité discursive
supérieure au mot, la phrase et ses sous-ensembles, car il distingue à l’intérieur de cette

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