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du
contradictoire
Présenté
Par
Me Hippolyte B.T. MELI
AVOCAT
Ancien Président de l’Assemblée Générale de l’Ordre des Avocats au Barreau du Cameroun
Le 06 juin 2015
A
YAOUNDE
En
CONFERENCE DE STAGE
Organisé par le
BARREAU DU CAMEROUN
A
L’attention des Avocats en stage dans le ressort judiciaire de la Région du CENTRE.
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Mesdames, Messieurs,
Mes chers Confrères,
J’ai à partager avec vous aujourd’hui quelques réflexions que j’ai accepté
volontiers mener pour votre compte, d’ordre de la Commission de formation de
notre BARREAU, sur le thème ‘’ le respect du principe du contradictoire’’.
N’oublions surtout pas qu’ « au-delà de nos différences, des choix contraires
de nos vies, de nos amitiés et de nos brouilles, une sorte de parenté nous unit :
nous sommes probablement du même côté dans l’immense procès commencé
au premier jour de l’histoire qui oppose chacun à tous » comme le
disait si bien notre confrère Daniel SOULEZ-LARRIVIERE, in ‘’ Paroles
d’avocats’’ un répertoire des modèles des discours d’éloquence en Conférence
de Stage publié en 1994.
Pour bien appréhender le principe, il sera un devoir pour nous d’analyser ses
particularités selon nos règles déontologiques.
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001 - Contenu du principe
001-1 - Enoncé du principe du contradictoire
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aussi comme ‘’un principe fondamental’’ qui doit figurer au premier
chef d’’’ordre public’’.
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001-2 - Les origines du principe du contradictoire
- A) L’histoire
Du Décret des Dieux au débat des Hommes
‘’ Le s E u m é n i d e s ’’
Tragédie par laquelle
ESCHYLE,
Met en scène la naissance du procès moderne, le passage de la parole magico-
religieuse au débat démocratique.
Les faits :
ORESTRE a tué sa mère, CLYTEMNESTRE,
Pour venger le meurtre de son père AGAMEMNON.
La procédure :
Il est poursuivi par les ERINYES qui représentaient l’ancienne Société TRIBALE dans
laquelle la filiation se faisait par la mère.
La défense :
Il trouve un défenseur en la personne d’APPOLLON, traditionnellement considéré
comme l’interprète de ZEUS.
Le Juge :
Pour les départager,
« Je dis que les choses non justes ne triomphent pas avec des
serments. »
Ces paroles sont décisives et prolongées par les CITOYENS en chœur par ces mots :
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« Alors fais ton enquête et prononce le jugement droit. »
A force de persuasion, elle finit par les convaincre et un pacte est conclu, au terme
duquel elles auront en charge la protection de la fécondité de la cité, à condition
d’abandonner l’antique Loi du talion :
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Le procès moderne est donc né du « besoin ressenti de voir les
contestations tranchées par un laïc au moyen des preuves
rationnelles, et non plus par un prêtre à l’aide de procédés
mystiques ». M. Détienne, in Les maîtres de vérités dans la Grèce antique. Paris
MASPERO 1981 P. 99 – 101.
- B) La doctrine et le principe du
contradictoire :
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Selon ces auteurs,
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Le protocole adopté le 10 juin 1998 et entré en vigueur le 25 janvier 2004 relatif
à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, portant création
d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ( article 26 )
Règlement Intérieur intérimaire de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et
des Peuples (article 27)
Le Règlement d’arbitrage de la CCJA ( article 12 )
Le Règlement de procédure de la CCJA ( articles 30 et 31 )
Le Code des Douanes CEAC (articles 300 à 308)
Le Règlement n° 1/99/UEAC-CM – 639 portant règlementation des pratiques
commerciales anticoncurrentielles ( article 20 )
Acte Additionnel n° 4/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 portant règle de procédure de
la Chambre Judiciaire de la CEMAC ( article 7 )
La Constitution ( Préambule)
Le Code de Procédure Civile et Commerciale
Le Code de Procédure Pénale
Le livre des procédures fiscales du CGI (articles L.23 à L. 28)
Loi n° 2006/016 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement
de la Cour Suprême (articles 56 à 65 )
Loi n° 2006/022 du 29 Décembre 2006 fixant l’organisation et le
fonctionnement des tribunaux administratifs ( articles 35 et suivants).
Loi n° 74- 18 du 5 Décembre 1974 relative au contrôle des ordonnateurs,
gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d’Etat modifiée et
complétée par la Loi n° 76-4 du 8 juillet 1976 ( article 10 nouveau )
Décision du MINEFI n° 02/002 du 03 Décembre 2002 portant règlement général
de la Commission des Marchés Financiers (articles 109 à 112 )
ETC…
. La C E D H
24 novembre 1993
08 février 1996
24 février 1995
Cette règle doit par ailleurs recevoir application dans tous les cas
de figure.
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l’instruction préliminaire, c'est-à-dire celui des interrogatoires
menées par la police.
. La CCJA
Arrêt n° 104/2013 du 30 Décembre 2013,
Affaire ABAKAR GAZAMBLE Contre ABAKAR IBI OUMAR
Juridata n° J104-12/2013
ETC…
( CFJ – CAY , Arrêt du 08 Décembre 1970, Affaire SITAMZE Urbain Contre Etat du Cameroun
Oriental, CS/CA , Jugement n° 38 du 30 mars 1995, affaire NYAM Charles Contre Etat du
Cameroun).
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002-3- Ouverture du ‘’droit à un recours-nullité autonome ‘’ en vue
de sanctionner la violation du principe
a) Portée :
Le principe du contradictoire est essentiel pour que chacune des
parties ait la liberté d’attaquer et de se défendre , la possibilité de
connaître et de discuter les documents produits, les témoignages
déposés, d’assister à certaines procédures de preuve telles que les
enquêtes, des mesures d’instruction, l’expertise, dans des délais
raisonnables qui ne les défavorisent pas ;
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c) Le droit à la connaissance des moyens de fait, de droit et de
preuve de l’adversaire :
d) Exceptions :
Les procédures gracieuses qui commandent a fortiori le respect a
posteriori du principe du contradictoire par l’organisation des
procédures d’opposition, de contestation ou des référés;
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L’Arrêté n° 41/DPJ/SG/MJ du 12 Avril 2005 portant homologation et
publication du Règlement Intérieur du Barreau, dans son TITRE VII relatif
aux principes généraux de la profession d’Avocat, Chapitre 3 (Rapport
entre Avocats) Section 2 énonce le principe du contradictoire en ces
termes :
Article 68.1.
« La communication mutuelle et complète des moyens de
fait, des éléments de preuve et des moyens de droit doit se
faire spontanément, en temps utile, et par écrit, pour
permettre dans le respect des droits de la défense, un procès
loyal et équitable. »
Article 68.6.
« La violation de ce principe du contradictoire constitue une
faute pouvant entrainer une sanction disciplinaire. »
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Tout procès engendre nécessairement la recherche de la vérité.
Pour que la vérité soit révélée, le procès civil impose aux parties une
communication spontanée et complète de leurs éléments de preuve,
pouvant aller jusqu’à une collaboration forcée.
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C’est faire référence à un comportement attendu des parties, de leurs
conseils comme du Juge,
C’est faire référence à une qualité humaine que l’on exige aujourd’hui dans
toutes les relations juridiques, lors de la conclusion d’un contrat comme
dans son exécution ou encore à l’occasion de la mise en œuvre d’un droit.
Une telle qualité ne saurait donc être absente du procès, qu’il soit
civil, répressif, disciplinaire, administratif.
Mais il convient de relever que la loyauté n’a pas été exigée par un texte
comme principe directeur du procès.
Est loyal,
Celui qui obéit aux lois de l’honneur et de la probité.
Est rusé,
Celui qui emploi des moyens pour tromper ce qui revient à dire que la
déloyauté comme la ruse seraient à exclure du procès.
Est déloyal
L’avocat qui plaide un dossier en l’absence du confrère contradicteur
L’avocat qui facilite les « significations à poteaux »
L’avocat qui se livre à la communication d’écritures contraires à celles
produites au juge.
La vérité sera parfois réduite au silence dès lors que les méthodes
d’investigations seront jugées déloyales, ou que la production des
documents probants portera atteinte à une intimité ou un secret protégé.
Le procès ne serait pas loyal s’il ne passait pas par la recherche sincère de
la vérité, ce qui conduit les parties à discuter de leurs preuves réciproques,
et leur impose préalablement, de se communiquer volontairement leurs
éléments de preuve.
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Les frontières ne sont pas nettes entre habilité et malice, mais aucun
praticien ne comprendrait qu’on attende de lui un comportement
susceptible, de compromettre les intérêts de son client.
Il est interdit au Juge pénal de former sa conviction sur des faits non
régulièrement produits aux débats, et non soumis à la libre discussion des
parties, ce qui rejoint bien l’idée d’une loyauté réciproque.
La collaboration forcée.
Si une partie ou un tiers détient des éléments de preuve mais ne les
produit pas, la recherche de la vérité exigerait que l’on force leur volonté.
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Dans les matières répressives non strictement pénales (concurrences,
vérification de comptabilité, opérations de bourse) la question est
controversée.
En procédure civile,
C’est parce que le législateur veut que le procès civil soit un lieu
d’affrontement loyal qu’il énonce des dispositions permettent de forcer la
communication.
En procédure pénale,
La loyauté des parties n’est pas indifférente, mais elle est occultée par un
principe supérieur, celui de la présomption d’innocence.
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Si le Juge d’instruction peut obliger les témoins à déposer, il ne peut forcer
l’inculpé à témoigner contre lui-même.
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La CEDH estime qu’il n’était pas possible, par des procédés déloyaux,
de susciter des personnes entendues des déclarations qui les
amèneraient à avouer l’existence de pratiques illimités, dont il
appartenait à la commission de concurrence de rapporter la preuve.
1. Les preuves fournies dans les délais peuvent être écartées parce
que obtenues dans des conditions jugées comme déloyales.
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2. La preuve d’un fait est rapportée mais rejetée dans les débats,
parce que tardivement apportée.
Hors les cas où la Loi en dispose autrement, les infractions sont établies
par tout mode de preuves et que le Juge décide d’après son intime
conviction.
Le Juge ne peut fonder sa décision que sur des preuves qui lui sont
apportées au cours des débats et contradictoirement devant lui .
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Des constats d’adultères moyennant des violations- de
domicile – du secret des correspondances – témoignages
des mineurs- conduisent tout de même à des abus
dangereux .
Si la preuve est rejetée, c’est parce que l’enregistrement est réalisé à l’insu
de l’employé, et pour cette raison il est déloyal.
Se fonder sur des preuves impartiales, c’est assurer une qualité loyale au
procès en permettant au Juge de se déterminer à partir d’éléments non
douteux.
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Mesdames
Messieurs
Mes chers Confrères
Je viens de me livrer à un exercice de présentation sommaire des
enjeux, non exhaustifs, (je le pense) des questions juridiques et
professionnelles véhiculées par le thème de nos échanges du jour.
Nos différences, nos brouilles, nos choix contraires de vie, nos amitiés
doivent ils mettre à mal le respect du principe du contradictoire ?
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