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LE CADRE D’EXERCICE DES LIBERTES PUBLIQUES

Existe-il un régime politique idéal qui puisse assurer l’existence, l’exercice et la protection
des libertés publiques ?
Face à cette question, l’on est tenté directement de répondre par l’affirmative pour affirmer
sans ambages que de régime politique existe. Il est constitué par la Démocratie.
Pourtant, en doctrine, certains théoriciens émettent de sérieuses réserves quant au bien fondé
d’un tel postulat. Pour eux, l’institution de la démocratie ne peut constituer la condition idéale
d’existence des libertés publiques. Pour Waline, par exemple, « le régime démocratique n’est pas
nécessairement un régime de liberté ». D’où la recherche d’autres principes d’organisations
politiques, entreprise par plusieurs théoriciens.

§1 - La Démocratie

Etymologiquement, la démocratie signifie. « le gouvernement du peuple, par le peuple et


pour le peuple ».
En tant que système, la démocratie peut avoir plusieurs types de fondements et dè
caractéristiques. De ce fait, elle peut être de type libéral ou populaire. Laquelle de ces deux formes
paraît alors plus respectueuse de l’idée de liberté ?
Au niveau de la démocratie libérale, c’est l’idée de liberté qui est mise en avant. Ce qui
implique avant tout le respect des opinions (pluralisme = diversité) et la conciliation par voie de
compromis.
En matière de démocratie libérale, lune des manifestations de l’idée de pluralisme est
constitué par le pluralisme idéologique. A ce niveau, la liberté d’opinion et d’expression est la règle :
absence de doctrine officielle unique, refus du dogmatisme.
Face à cette hypothèse, peut-on dire pour autant que le régime politique actuellement en
vigueur à Madagascar, dont les pouvoirs publics ainsi que ies libertés publiques sont organisés et
déclarés, non pas par un texte à valeur supra constitutionnelle comme ce fut le cas avec la Charte de
la Révolution Socialiste, mais plutôt par une Constitution, est un régime respectueux de la liberté
d’opinion et d’expression ?
Toutefois, la mise en œuvre d’un régime démocratique ne demeure pas uniforme. Elle varie
suivant deux concepts différents. Tel que le Professeur Georges Burdeau se plaît à souligner : « il
existe une démocratie politique et une démocratie sociale ».

La démocratie politique

La démocratie politique est une forme d’organisation politique qui tend à donner au peuple
le pouvoir par l’organe des représentants élus. Elle s’exprime par le libre exercice des libertés
publiques. Le peuple choisit librement ses gouvernants qui exercent leurs pouvoirs dans un système
approprié. L’individu participe à la direction des affaires publiques en procédant aux choix des
gouvernants.
Il s’agit en lin de compte d’une « démocratie représentative ». Dans un tel système,
souveraineté appartient à l’ensemble des citoyens (souveraineté nationale) qui l’exercent uniquement
par l’intermédiaire de représentants élus.
Ce genre de système constitue-t-il une garantie suffisante pour assurer l’existence des
libertés publiques ?
La réponse à donner à cette question doit demeurer assez nuancée. Parmi l’une des
conséquences logiques engendrées par l’application de ce système, il faut relever la « nécessité du
mandat impératif assorti du droit de révocation ou rappel » (ou recall). Le peuple qui est souverain a
toujours le droit d’exiger de ses représentants le respect de sa volonté et de les révoquer
éventuellement. Pourtant, selon Montesquieu, « Tout homme qui a le pouvoir est tenté d’en abuser ».

La démocratie sociale

C’est dans le projet de la Constitution française du 19 avril 1946 que l’idée de la démocratie
sociale a fait pour la première fois son apparition en France.
Le projet en question comporte une Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. La
déclaration proclamait pour la première fois en France un certain nombre de droits <—f-
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nouveaux, qu’on appellera plus tard « droits de deuxième génération » ; droit au développement
physique, intellectuel et moral, protection de la santé, droit au loisir, droit à l’assistance.
Mais outre l’énumération de ces droits, le même projet avait trait aux conditions
économiques du travail et au droit de propriété.
A l’instar de ia Constitution française de 1946, la Constitution malgache de 1992 reconnaît
également à tout individu le droit à ia protection de sa santé, le droit à son développement intellectuel
11
•■ Croit d’assistance.
Au fond, la démocratie ne doit pas rester une démocratie purement politique. Car la liberté
politique peut engendrer l’oppression. L’appréciation de la liberté doit dépasser le cadre politique.
Tous procédés démocratiques doivent s’étendre aux domaines économique et social. La démocratie
sociale vise avant tout la libération de l’homme de toutes les formes de domination et non seulement
de l'oppression politique.
Quant aux techniques de réalisation d’une telle démocratie, elles varient suivant la pratique
ccinstitutionnelle observée par chaque pays.
Dans une démocratie populaire, les techniques de réalisation portent sur la collectivisation et
I■
tature du prolétariat. Dans les démocraties occidentales, les formules utilisées varient de la
participation à l’autogestion ou à la cogestion.
Bref, eu égard aux divers systèmes juridiques adoptés par chaque pays, les techniques de
réalisation de la démocratie sociale prennent base, soit sur la révolution, soit sur des réformes de
structure, soit sur l’attribution à l’Etat d’une puissance extrême, soit enfin sur le jeu normal des
Constitutions.
A Madagascar, ies techniques de réalisation de ia démocratie sociale pratiquées sous la
deuxieme et la troisième République présentent beaucoup de différences. En 1975, la démocratie
sa rie doit être définie et mise en œuvre selon l’esprit, de la Charte de la Révolution socialiste. En
revanche, en 1992, la réalisation du même objectif doit avoir pour base le jeu normal de la
Constitution. Autrement dit, il faut que tout le mécanisme juridique de protection des libertés
»r - es prévu par la Constitution doit être scrupuleusement mis en œuvre, aussi bien au regard du
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tionnement des diverses institutions judiciaires qu’au regard de l’attribution de leurs
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La doctrine de l’Etat de droit s’est développée à partir des travaux des juristes allemands du effet, la
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19 siècle. Bien que la doctrine comporte plusieurs idées différentes, on retrouve chez Hans démocratie
KELSEN des formules qui donnent une donnent une définition générale du concept. politique aussi
Selon cet auteur, « Dès lors que l’on reconnaît que l’Etat est un ordre juridique, tout Etat est bien que la
un Etat de Droit, et ce terme d’Etat de droit représente un pléonasme. En fait cependant, on l’emploie démocratie
pour désigner un type d’Etat particulier, qui répond aux postulats de la démocratie et de la sécurité sociale peuvent
juridique. En ce sens spécifique, l’Etat de droit est un ordre juridique relativement centralisé qui bien contenir
représente les traits suivants : la juridiction et l’administration y sont liées par des lois, c’est-à-dire toutes les
par les normes générales qui sont décidées par un Parlement élu par le peuple, avec ou sans la deux le germe
collaboration d’un chef d’Etat qui est placé à la tête du gouvernement ; les membres du d’une limitation
gouvernement y sont responsables de leurs actes ; les tribunaux y sont indépendants ; et les citoyens sinon d’une
s’y voient garantis certains droits de liberté, en particulier la liberté de conscience et de croyance et là suppression de
liberté d’exprimer leurs opinions ». ces mêmes
De cette formulation développée par Hans KELSEN se dégagent deux concepts de l’Etat de droits et
droit. Celui-ci se caractérise par deux principes fondamentaux qui sont : celui de la séparation des libertés. D’où la
pouvoirs et celui de la soumission de l’Etat au Droit. proposition de
1- Le principe de la séparation des pouvoirs recherche
d’autres
Quelle est la signification de ce principe ? Et dans quelle mesure sa mise en œuvre assure-t- principes
elle la garantie des libertés publiques ? d’organisation
politique des
La théorie ou le principe de la séparation des pouvoirs a pour origine la distinction des trois libertés
fonctions de l’Etat qui sont : la fonction législative, la fonction exécutive ou gouvernementale et la publiques.
fonction juridictionnelle ( art. 41 de la Const). §2 -
La fonction législative L’Etat de Droit
La fonction législative consiste à édicter des règles obligatoires de caractère général et
impersonnel, c’est-à-dire s’adressent à tous les individus sans distinction, qui sont rattachés à l’Etat.
Elle se traduit en actes appelés lois et, éventuellement, en actes juridiques ayant valeur législative
(décrets-lois, ordonnances).
La fonction exécutive
La fonction exécutive consiste à assurer l’exécution des lois et aussi à prendre tous les actes
nécessités par le fait de gouverner et d’administrer dans des domaines très variés (dans
l’administration générale dans la diplomatie, dans la police, dans la gestion financière, etc...)
La Constitution malgache de 1992 a également consacré trois titres différents au principe de
la séparation des pouvoirs. Les titres IV, V et VI traitent respectivement du pouvoir exécutif, du
pouvoir législatif et du pouvoir judiciaire.
Mais dans quelle mesure la distinction des trois fonctions de l’Etat se présente-t-elle comme
étant d’un intérêt capital pour la garantie des libertés publiques ?
La séparation des pouvoirs ou, si l’on veux, l’équilibre des pouvoirs a pour but la sauvegarde
de la liberté. .Sa théorie a été érigée en dogme par les révolutionnaires de 1789, soucieux d’empêcher
tout retour de l’absolutisme royal. L’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen
du 26 août 1789 stipule que : « ... Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée,
ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a pas de Constitution ». <•
Au demeurant, ce principe est toujours considéré comme « la meilleure garantie possible
contre l’arbitraire des gouvernants, la confusion et le désordre ». Si la séparation des pouvoirs permet
d’espérer un certain équilibre, la confusion des pouvoirs, elle, aboutit à coup sûr à la dictature, voire
au totalitarisme.
Les avertissements de Montesquieu, souligne Charles Cadoux, sont, en effet, plus que
jamais d’actualité : « il faut que le pouvoir arrête le pouvoir ».

2- La soumission de l’Etat au Droit

L’Etat ne peut-il être jamais soumis au Droit ? Parce que sinon, il se serait alors simplement
soumis à sa propre volonté.
La conception positiviste admet volontiers une telle hypothèse. Selon cette conception, on
peut, dans cette perspective, concevoir une autolimitation de l’Etat. Car il n’y a pas d’autre droit que
celui qui a été posé par l’Etat, qui est l’expression de la volonté de l’Etat.
Hans KELSEN appelle ce processus, l’AUTO-OBLIGATION DE L’ETAT
(Selbstverpflichtung des Staates). L’auteur explique que, selon la doctrine traditionnelle, l’Etat, qui
existerait comme une réalité sociale indépendamment du droit, commencerait par
se soumettrait ensuite à ce droit - pour ainsi dire de sa libre volonté. Et c’est alors seulement qu’il
serait un Etat de droit.
Toutefois, l’idée de l’Etat de droit demeure, au fond, une sorte d’idéal. Car l’un des deux
principes qui le caractérisent, à savoir le principe de la séparation des pouvoirs, perd, avec le temps,
de sa valeur absolue. Il ne reflète plus exactement la réalité. On parle même de son affaiblissement.
Bien qu’il soit « magnifié dans la théorie constitutionnelle classique », ce principe subit un recul car
on croit moins à sa « vertu » et qu’en conséquence, les exceptions, atténuations (ou entorses) soient
plus facilement admises ou tolérées.
Ce phénomène de recul est d’ailleurs largement illustré par des dispositions
constitutionnelles définissant même une légalité de crise pour période exceptionnelle.
Autrement dit, les libertés publiques doivent faire l’objet d’aménagement particulier suivant
chaque circonstance.

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