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All content following this page was uploaded by Abdelmajid Bouziane on 11 May 2021.
Résumé :
Aujourd’hui, la communication via les réseaux sociaux est au cœur de la stratégie globale des
marques et ce à travers différents formats dont le marketing d’influence; une nouvelle tendance
de promotion basée sur les recommandations de personnes influentes.
L’étude menée adopte une approche qualitative pour analyser le rôle des influenceurs dans les
nouvelles pratiques du marketing digital par le biais des données collectées via des entretiens
semi-directifs avec huit professionnels pour investiguer la problématique suivante : Qui sont ces
influenceurs marocains et quelles relations de partenariats les lient avec les marques ? Suite au
traitement des données via le logiciel Dedoose, les résultats révèlent un manque de structuration
de ce secteur et une dominance des amateurs. Cette situation impacte négativement l’évolution
de la confiance des marques dans ce nouveau format de promotion et l’image de ces acteurs.
L’article se termine avec des recommandations suggérant quelques pistes pour améliorer la
situation.
Mots- clés : marketing d’influence, marketing digital, médias sociaux, consommateurs, Maroc
Abstract :
Social media communication has at present become at the heart of the global strategy of brands
through influencer marketing in its different forms. This new way of promoting brands is based
on influencers’ recommendations.
This article aims to study the development of influencer marketing in Morocco and specifically
focuses on professionals’ views about the influencers’ collaboration and credibility with brands in
the hope of working out good practices as role models to follow.
This study is based on a qualitative approach to analysing the role of influencers in the new
practices of digital marketing. The data was collected through semi-structured interviews with
eight professionals in order to investigate the following problematic: Who are these influencers
and what partnerships relate them to the brands? The data was processed in Dedoose and the
results reveal the dominance of amateurs. This situation has impacted negatively the building of
trust in this new tool of promotion. The article ends with recommendations suggesting ways of
improving the situation.
Key words : influence marketing, digital marketing, social media, consumers, Morocco
À l’ère du digital, il est devenu très fréquent lorsqu’on navigue sur les réseaux sociaux de tomber
sur une publication, une story, un reels, une vidéo ou encore une diffusion en direct d’un
influenceur. Des formats de contenus dans lesquels les influenceurs partagent quotidiennement
leur mode de vie, qui peut s’avérer semblable à celui des stars d’Hollywood pour emporter les
consommateurs connectés dans un voyage virtuel de rêve tout en veillant à les conseiller et à les
accompagner dans leurs choix. Cette pratique, appelée le marketing d’influence, existe depuis
plusieurs années et s’est développée avec internet pour permettre aux marques de profiter de la
notoriété et la communauté des influenceurs pour atteindre une cible plus large et recruter de
nouveaux clients à travers des collaborations et des partenariats.
Différentes études que nous allons exposer dans la revue de littérature, ont démontré l’existence
de différents profils mais aussi une dominance d’amateurs, en ces circonstances, nous menons à
travers cet article une réflexion sur la crédibilité de ces acteurs vis-à-vis des marques et des
consommateurs connectés en traitant la problématique suivante : Qui sont ces influenceurs
marocains et quelles relations de partenariats les lient avec les marques ?
Pour répondre à cette question nous procédons dans la première partie de cet article à une
délimitation de ce domaine (définitions, état des lieux, indicateurs de performance…) pendant
que la deuxième partie est consacrée à la mise en lumière des résultats de notre étude qualitative
menée auprès de 8 professionnels représentants du domaine et personnes- ressources, avant de
conclure avec une conclusion et des propositions et pistes d’amélioration.
1.Cadre théorique
Pour commencer, il est intéressant de revenir sur les composantes de la notion “Marketing
d’Influence” pour mieux situer ce concept novateur. De sa définition connue, “le marketing est
un terme d’origine américaine venant du mot market, c’est-à-dire marché, lieu de rencontre de
l’offre et de la demande” (Joly, 2009, P : 7), et le terme “influence” est considéré comme un
changement d’opinion ou de comportement “The ability to cause or contribute to a change in
opinion or behavior” explique Philip Sheldrake, (2012) dans son guide en ligne. Ce qui nous amène
à la définition présentée par Daniel Carter via (Benamar, Margom, 2020, P:5) “le marketing
d’influence a pour but de promouvoir les produits, d'accroître la notoriété de la marque par le
biais d’influenceurs”.
L’étude sur le marketing d’influence au Maroc, réalisée par Rouissi (2019, p :6-8) démontre qu’il
existe différents types d’influenceurs, dont la typologie est définie selon la taille de leur
communauté (Tableau 1).
"Alors que les marques continuent d'abandonner les techniques publicitaires traditionnelles, les
efforts se concentrent de plus en plus sur ces influenceurs pour approuver leurs produits… et au-
delà, de leurs followers. Ces approbations sont susceptibles d'être interprétées comme du bouche
à oreille électronique hautement crédible" (De Veirman, Cauberghe, & Hudders, 2017, p. 798).
Différentes études ont été réalisées pour cerner et définir ce phénomène que nous synthétisons
dans le tableau 2 ci-après.
Les marques et les influenceurs mettent en place différents types de collaborations et/ou de
partenariats (figure 1) et ce pour atteindre certains objectifs, ces collaborations peuvent être
rémunérées en nature ou en numéraire et le choix reste libre aux parties prenantes (négociation).
Source : Auteurs
Quel que soit le type d’influenceur ou le cadre juridique actuel, chaque influenceur a pour mission
de nouer une relation de confiance avec sa communauté étant son principal capital “Concept de
l’ami de l’influenceur / Best friend effect”. Quelques études au Maroc et ailleurs démontrent les
réactions des socionautes envers les produits exposés sur les réseaux sociaux.
Berrada, Sahbani et Benamar (2017) ont analysé le contenu de la page Facebook de Méditel et
ont dégagé quatre types de contenus marketing qui ont généré des réactions différentes sur les
réseaux sociaux :
-Les contenus ludiques de nature humoristique et/ou divertissante, en général sous forme de
vidéo ont généré plus de vues, likes, partages et commentaires.
Une autre étude sur les produits de luxe exposés sur les réseaux sociaux (Safi, Azouri, et Azouri,
2018) a confirmé, par le biais d’un questionnaire adressé à 120 consommateurs, que ces réseaux
aboutissent à la valorisation du produit de luxe, la fidélité des consommateurs, et incitent à achat.
Une étude semblable par Safi, Azouri, et Saliba (2018) a essayé de chercher l'impact de la publicité
sur Instagram des matières alimentaires sur les attitudes des Libanais (n = 203). Elle a trouvé que
cette publicité a un effet sur les composantes d’attitude cognitives et non pas sur celles affectives
ou conatives. Une étude exploratoire sur les internautes Marocains porte sur les attitudes des
consommateurs envers les marques sur les réseaux sociaux. Rhajbal et Chakor (2016) se sont
entretenus avec 16 personnes (dont 8 femmes) pour vérifier l'impact du style de conversation
dans Facebook sur la confiance en la marque. Les résultats confirment l’impact de la conversation
sur la confiance et même sur l'achat comme l’ont démontré les auteurs : “La confiance peut être
un des résultats escomptés à partir d’une bonne stratégie de communication avec les internautes,
une bonne conversation qui veille à répondre au mieux à la demande et aux questions des
internautes peut engendrer la confiance en la marque.” (p. 418).
De ce fait, différents domaines ne pourront pas bénéficier de ce nouveau format de mise en avant
ou devront faire appel à des influenceurs qui ne sont pas forcément spécialisés dans la matière
pour mettre en avant leurs produits ou services. Ce qui nous amène au points suivant “les
indicateurs de mesure de performance”
Ces indicateurs peuvent permettre aux marques de sélectionner les influenceurs les plus adaptés
à leurs objectifs et ne pas se baser uniquement sur la taille de la communauté. Le choix de
l’influenceur doit être soigneusement fait par la marque car l’impact peut partiellement dépendre
du nombre des abonnés, et quelques fois du secteur d’activité (Trivedi & Sama, 2019) mais aussi
de d’autres critères comme l’adéquation de cette communauté avec la cible (Figure 3).
Source : Auteurs
Figure 3 : Les 7 étapes pour réussir sa stratégie d’influence via les médias sociaux
Source : Increasing the ROI of Social Media Marketing (Kumar & Mirchandani, 2012)
2. Méthodologie de recherche
En partant de notre ambition pour participer à l’évolution de ce domaine au Maroc et sur la base
de la revue de littérature avancée, nos hypothèses de départ se présentent comme suit (Figure
4):
H 1 : L'absence de culture de marketing d’influence fait que ce type de marketing est caractérisé
par un manque de professionnalisme.
H2 : Les critères adoptés pour sélectionner les influenceurs au Maroc freinent l’évolution et le
développement de partenariats crédibles qui répondent aux aspirations des marques.
Source : Auteurs
Pour investiguer les points des professionnels au Maroc, cette étude adopte une approche
qualitative pour analyser leurs perceptions du secteur digital et des annonceurs par rapport au
Marketing d’influence au Maroc et spécialement la relation de partenariat entre les marques et
ces derniers. Le choix de cette approche repose sur un objectif qui vise à générer des données qui
décrivent avec profondeur le marketing d’influence au Maroc.
Tracy (2020) a bien expliqué l’importance de cette profondeur ici : "qualitative research is
especially well suited for accessing tacit, taken‐for granted, intuitive understandings of a culture.
Rather than merely asking about what people say they do, researching in context provides an
opportunity to see and hear what people actually do." (p. 7, italics original). Une des méthodes de
Parmi les trois types d’entretien, on a choisi l’entretien semi-dirigé pour collecter le maximum
d’informations qui peuvent éclaircir la problématique. Il s’agit de poser une question et de poser
d’autres en fonction des réponses fournies par l’interviewé comme l’explique Roulston & Choi
(2018) "In semi-structured interviews, follow-up questions – also referred to as probes – are
formulated relative to what interviewees have already said." (p. 233).
2.3 Cible
Ces entretiens ont été réalisés avec des professionnels ayant l’habitude d’organiser ou de
participer à des campagnes de marketing d’influence et/ ou de mettre en place des partenariats
avec des influenceurs au Maroc. En outre l’ancienneté et l’expertise des interviewés, le choix est
également fait pour assurer la triangulation des avis des différents opérateurs : agences de
communication digitale, annonceurs et influenceurs.
2.4 Échantillon
Pour une représentativité des résultats, 8 professionnels de différents domaines ont été
consultés. Le tableau et figure suivants représente un aperçu détaillé, ainsi qu’un code de
référence pour faciliter la lecture des témoignages confidentiels.
Les données et informations ont été collectées lors des entretiens face à face et des appels sur
WhatsApp à cause des contraintes de distance et de disponibilité. Toutes les réponses aux
questions sont enregistrées et sont d’une durée moyenne de 30 minutes. Pour des raisons
d'éthique, l’autorisation d’enregistrement est demandée et accordée avant l’entretien.
Le protocole suivi dans ces entretiens est conforme à l’entretien semi-directif (voir ci- dessus). Il
commence avec la question « Que pensez-vous des relations de partenariat entre les marques
et les influenceurs ? » et puis les autres questions suivent en fonction du statut de l'interviewé et
Une fois l’échange enregistré, les réponses sont transcrites sur un document Word avant de
procéder au codage des données via le logiciel Dedoose (www.dedoose.com). Ce dernier est un
outil professionnel et très performant surtout pour le traitement et codage des données
qualitatives. Bazeley (2018) a bien recommandé que “Dans un monde de plus en plus numérique,
les chercheurs en méthodes qualitatives et mixtes adoptent de plus en plus les technologies
numériques pour faciliter leurs travaux de recherche. ... Les logiciels qualitatifs se sont
progressivement orientés vers la gestion des types de données en constante expansion.” (p. 21,
notre traduction). Toutefois, pour éviter l’effet négatif de traitement automatique du logiciel et
pour respecter l’espace de réflexion comme l’ont souligné Zhao et les autres (2014), les deux
auteurs ont créé les codes manuellement et ont marqué leurs fréquences dans le corpus transcrit.
Dedoose permet aussi de télécharger et traiter les données enregistrées en format de son. On a
fait recours aux enregistrements en cas de doute.
La démarche du codage est basée sur une exploration préliminaire des enregistrements pour
identifier les tendances récurrentes chez les répondants. Chaque tendance est répertoriée
comme code (pattern). Les données sont ensuite classées automatiquement par catégories et par
type de répondant afin de mener une analyse séparée pour chaque champ et étudier les
verbatims majoritaires constituant la tendance dans les réponses de tous les acteurs approchés.
La figure 6 suivante résume les tendances obtenues via notre étude.
Notre étude examine les avis des professionnels sur le partenariat entre les influenceurs et les
marques. Elle vise à dégager les facteurs influents pour inciter le consommateur à acheter un
produit. Les résultats des entretiens liés aux catégories de perceptions sont comme suit :
Le marketing d’influence représente une opportunité pour les marques souhaitant atteindre
une cible spécifique et gagner en notoriété mais le secteur reste encore amateur et manque de
maturité professionnelle. Le Tableau 4 montre avec unanimité que le secteur souffre de
plusieurs anomalies qui peuvent entraver l’atteinte des objectifs.
Tous les acteurs se sont alignés sur le problème structurel que rencontre le métier et au manque
de clarté quant aux attentes, aux besoins et objectifs à atteindre. Comme le Tableau précédent,
le Tableau 5 témoigne des freins inhérents dans le système qui gère le métier.
Tableau 5 : Perception des acteurs vis-à-vis le partenariat entre les marques et les
influenceurs
Répondants Tendances/patterns
Agences Vide juridique et manque de formation
digitales Cachets très conséquent et problèmes organisationnels de facturation
Absence d'accompagnement, d’encadrement et cachets trop cher
Annonceurs
Absence de stratégie d'influence et de mesurabilité
Absence de modèle économique
Influenceurs Considération du métier comme un passe-temps généralement
Problème de compréhension du métier
La production de contenu est considérée comme faible pour la majorité des acteurs, malgré la
présence de quelques exceptions qui possèdent une ligne éditoriale et proposent un contenu
prometteur d’impact et d’originalité. Les critiques adressées par les interviewés envers les trois
catégories de perceptions peuvent partiellement expliquer l’absence de la publicité digitale
surtout sur les réseaux sociaux (Tableau 6).
3.4 Discussions
Le marketing d’influence est considéré par tous les répondants comme une pratique existante
depuis plusieurs années et qui s’est développé avec l’apparition d’internet et des médias sociaux.
En reprenant les paroles exactes de R1 « Ce phénomène n’est pas forcément lié au digital, étant
donné que les marques ont toujours eu des égéries ou des portes paroles pour leurs images … ».
Cette déclaration qui “peut même agir comme un puissant mécanisme pour l’EWOM” (Sahli,
2021, p. 54) confirme le passage de WOM (word of mouth) vers l’E-WOM (electronic word of
mouth).
Du point de vue des agences de communication digitale, principales intervenantes pour la mise
en place de la stratégie d’influence des marques et la gestion de la relation influenceur, elles
considèrent que cette relation de partenariat est plutôt avantageuse pour les trois parties
(Marques, Influenceurs et Consommateurs). Toutefois, l'absence de mesurabilité met en cause
cette relation qui freine les partenariats. La majorité des partenariats et choix ne se basent pas
sur les indicateurs de performance adaptée, mais plutôt sur la taille de la communauté de
l’influenceur et sa popularité dans un objectif de notoriété alors que les indicateurs avancés dans
la section du cadre théorique peuvent aboutir à des conclusions prometteuses selon l’objectif
marketing à atteindre par la marque.
Sur le plan structurel, les agences souffrent du cachet très conséquent des influenceurs, comme
partagé ici par R2 : « Je suis amené à négocier avec les influenceurs les cachets pour chaque
campagne, et ce dernier n’est pas fondé sur une base précise d’ailleurs j’ai souvent du mal à
justifier cela aux clients. Je me retrouve parfois avec des influenceurs qui vont me facturer des
tarifs complètement différents pour la même prestation sous prétexte que ce n’est pas la même
marque, hors le livrable est souvent de la même qualité ».
Enfin pour les professionnels interrogés, le partenariat avec les influenceurs est une opportunité
qui n’est pas exploité au maximum et a besoin d’être structuré car à aujourd’hui, il s’agit plus d’un
business model permettant de se faire des marges et d’un autre côté il y’a un manque à rattraper
de la part de quelques influenceurs en termes de professionnalisme et respect des engagements
clients. Selon le témoignage de R1 « Pour l’instant ça tourne et ça marche bien mais nous sommes
en train de perdre une occasion de faire bien et en crédibilité et ça concerne les trois acteurs aussi
bien les marques, les influenceurs et les agences ».
Le point de vue des agences confirme nos hypothèses de départ et prouve l’absence d’une
maîtrise et donc la présence d’amateurisme dans la majorité des cas, et ce fait pourraient avoir
pour conséquence de déstabiliser et de freiner l’évolution du secteur, sans oublier l’atteinte de la
crédibilité des professionnels.
Pour les annonceurs, ils rejoignent les agences sur le fait qu’il y a un vrai manque de structuration
du secteur au Maroc, contrairement aux marchés européens, dans lesquels, les influenceurs sont
généralement spécialisés dans les différents domaines qu’ils représentent et d’un autre côté, ils
mentionnent clairement quand le contenu est sponsorisé par une marque et quand il s’agit d’un
L’idée est qu'au Maroc, nous ne sommes pas encore arrivés à ce stade ou à ce degré d’influence.
Établir des partenariats avec de tels influenceurs ne garantit pas un retour sur investissement car
l’influenceur fut l’acteur principal de l’acte de l’influence (Kumar & Mirchandani, 2012). En ce qui
concerne les tarifs, ils sont considérés très chers par rapport à la prestation offerte et quelques
annonceurs aspirent encore à fidéliser plus de fans ou d’employés de l’entreprise et en faire des
ambassadeurs crédibles et exclusifs. Encore une fois, les avis et témoignages des différents
annonceurs interviewés confirment également nos hypothèses de départ, tout en prenant en
compte que ces derniers considèrent qu’il y a également un effort à faire au niveau de la
production du contenu, la transparence, et la tarifs, dans la mesure où ces derniers peuvent
également être des critères qui pourraient impacter l’évolution de ce domaine au Maroc.
D’un autre côté, les influenceurs sont souvent sollicités pour servir de facteur de la poste. Ils
exécutent des actions ou déploient des campagnes sans la moindre marge de manœuvre ou tout
simplement publient un nombre de posts et de stories, ou on leur demande de taguer la marque
et de monter le produit…Les influenceurs interviewés, confirment nos hypothèses par rapport à
la présence des amateurs et l’absence d’une base fiable pour faire évoluer les choses et
encourager les marques, mais ajoutent un point essentiel qui concerne le manque d’une marge
de créativité, ainsi, ils se retrouvent avec des reproches de contenu trop commercial. Enfin, le
manque d’exigence de quelques influenceurs a terni leur image qui est en train de se
décrédibiliser et d’impacter négativement leurs sacrifices pour maintenir leur communauté
engagée sur le long terme.
3.5 Implications
L’étude menée confirme que le partenariat entre les marques de différents secteurs et des
influenceurs de différentes catégories n’est pas uniquement un effet de mode, mais plutôt une
mine d’or pour les annonceurs pour gagner en visibilité et/ ou en notoriété et encore pour mener
des opérations orientées ventes et augmentation de chiffres d’affaire surtout que le digital a
ramené la possibilité de mesurabilité. La longue durée du temps dont les jeunes et adultes passent
devant leurs écrans et l’ère du digital qui a changé les modes de vie sont des arguments solides
pour attirer plus de clients à travers les réseaux sociaux. Pour bien encourager les socionautes à
consommer plus, il faut changer de stratégie du marketing car les 4Ps du marketing mix
traditionnel ne sont pas compatibles avec le marketing sur la toile, il faut les changer avec les 4S
du marketing du web qui sont : Scope (stratégie et objectifs), Site (expérience web), Synergy
(intégration), et System (technologie, exigences techniques, et administration du site web).
Le secteur vie un manque de structuration qui impact l’image des influenceurs auprès des
annonceurs mais également auprès des consommateurs qui commencent à prendre conscience
que le contenu véhiculé n’est pas forcément spontané et qu’il s’agit d’une publicité suite à un
partenariat entre l’influenceur et la marque (annonceur). Étant donné que malheureusement ces
partenariats ou ces publicités ne sont pas clairement annoncés lors de la publication du ceci va
pousser les consommateurs à aller chercher des témoignages plus authentiques via des groupes
ou à d’autres internautes/communautés de la même page de l’influenceur. Le deuxième point
qui nuit à leur crédibilité est l’absence d’une appartenance permanente à une catégorie
spécifique. Ils peuvent changer de domaine et passer d’un influenceur de Voyage, à un
influenceur Gastronomie, Make up….
Les internautes les suivent généralement juste pour découvrir le lifestyle sans forcément être
influencé à adopter le produit et/ ou le service, sauf si le besoin est déjà présent ou qu’une offre
spéciale se présente (code promo, code réduction, rencontre dans un événement, vente privée…).
Ceci amène au manque de confiance (trust) dont le rôle est mis en relief par Ebrahim (2019) qui
la considère comme : “Facteur clé dans la création d'associations positives avec les marques et de
relations à long terme.” (p. 17).
Le troisième point concerne le contenu perçu comme peu original et le fait de recommander des
marques concurrentes, mettra naturellement les abonnés dans une situation perplexe. Cette
crédibilité risque aussi d'être perdue vis-à-vis des marques étant donné que parfois il vaut mieux
approcher un influenceur sympathique authentique avec une base de followers moins importante
Ces trois points ont mis les influenceurs marocains (une grande majorité) and une position de
faiblesse où ils ne sont pas conscients de leur pouvoir et ils courent vers les marques pour obtenir
des produits, pour être invités à des évènements et à des lancements, afin d’avoir une base pour
produire un contenu surtout qu’ils n’ont pas de ligne éditoriale. Il est nécessaire qu’ils passent à
un niveau plus exigeant envers eux-mêmes et envers les marques afin de préserver leur pérennité
et sauver leur business surtout avec l’apparition des nano-influenceurs qui garantissent une
meilleure authenticité de contenu et qui d’ailleurs suscitent de plus en plus les marques selon
l’étude réalisée.
Le partenariat avec les influenceurs est un canal de communication moins cher par rapport aux
canaux de communication offline. Toutefois, les annonceurs se basent essentiellement sur la taille
de la communauté pour faire le choix d'influenceurs et ceci n’est pas souvent adéquat avec
l’objectif du business escompté. Cet objectif est aujourd’hui presque limité à la notoriété du
produit sauf quelques exceptions. Le Maroc souffre toujours d’un manque d’éducation digitale et
de stratégie d’influence. Contacter l’influenceur en fonction de la taille de sa communauté n'est
pas aussi déterminant que mesurer son impact par la qualité de l’interaction (tous les indicateurs
présentés dans la première partie) alors qu’il est possible de fixer des partenariats avec des
objectifs de vente par exemple. D’autre part, les marques n’arrivent pas à se détacher du côté
publicitaire des collaborations et ceci limite la créativité de l’influenceur et, par conséquent, son
audience risque d’être moins intéressée.
Conclusion et perspectives :
Aujourd’hui, il y a une divergence par rapport au statut et le rôle des influenceurs au Maroc, mais
en même temps une convergence et une volonté à bien faire les choses, d’avancer et de participer
à la structuration puis à la maturité professionnelle du secteur. L’analyse de l’existant et l’étude
réalisée, vient confirmer nos hypothèses de départ, la crédibilité des influenceurs est en jeu, des
amateurs profitent du manque de structuration de ce domaine pour l’intégrer et l’utiliser
essentiellement comme source de revenu. Cette situation met en cause la crédibilité des acteurs
et impacte la confiance des marques et des consommateurs connectés, ce qui les poussent à
chercher d’autres moyens plus authentiques pour répondre à leurs problématiques.
Cette situation doit et est entrain de challenger tous les acteurs à devenir plus à l’écoute,
exigeants en termes de qualité des contenus, mais aussi de mettre en place les moyens et
l’implication nécessaires pour tirer le maximum d’avantages de ce secteur et de renforcer à la fois
la crédibilité et la fidélisation à long terme des consommateurs/followers et la confiance entre les
marques et les influenceurs pour bannir les amateurs et les opportunistes.
Certes, une première base est déjà installée mais il y a encore beaucoup de travail à faire.
L'évolution du Marketing d’influence au Maroc est l’affaire de tous les acteurs (agences, marques,
influenceurs et internautes), dont la relation reste très complémentaire, d’où l’importance de
créer une synergie entre toutes les parties prenantes.
D’autres analyses et études qualitatives peuvent aussi être menées pour participer à cette
évolution, notamment pour explorer plus en détail le contenu produit par les acteurs et les
attentes des consommateurs connectées et des marques, le statut de cette activité et perspective
d’évolution en métier et activité principale, la rémunération et le retour sur investissement pour
les marques, la compétence et ability des influenceurs à traiter les sujets exposées notamment
ceux en rapport avec la cosmétique et la santé, engagement de la communauté par rapport à la
taille de l’audience de l’influenceur.
Bibliographie :
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clients des hôtels au Maroc. Alternatives Managériales et Économiques, Vol 3, No 1, 22-40.
Arora, A. S. & Sanni, S. A. (2018): Ten Years of ‘Social Media Marketing’ Research in the Journal of
Promotion Management: Research Synthesis, Emerging Themes, and New Directions, Journal of
Promotion Management, VOL. 0 ( 0), 1–24, DOI: 10.1080/10496491.2018.1448322 .
Benamar, M. & Margom, I. (2020) État des lieux du marketing d'influence au Maroc. Revue
Internationale du Marketing et Management Stratégique, Volume 2, N°4, 1-22.
Berrada, A., Sahbani S. et Benamar, M. (2017) Analyse de l'influence sur marketing de contenu à
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