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Analyse linéaire n°

Objet d’étude : ………………………


Parcours : …………………………………

Le discours du vieux Tahitien Diderot


Supplément au voyage de Bougainville
Introduction
L’auteur : Diderot est un philosophe des Lumières (18°siècle) qui a lancé le projet de l’Encyclopédie,
auteur de nombreux ouvrages philosophiques qui posent la question de la place de l'homme dans le
monde et des rapports entre les hommes.

L’œuvre : cette œuvre se présente comme une suite au récit fait par le navigateur Bougainville qui a
découvert Tahiti mais en fait il s’agit pour Diderot de critiquer la colonisation européenne.

L’extrait : dans ce discours, Diderot donne la parole à un vieillard Tahitien qui tente d’alerter son
peuple sur les dangers que représente pour eux la venue du navigateur français ; dans ce passage
précisément, le vieillard s’adresse directement à Bougainville lui-même.

ce texte permet-il de combattre pour l’égalité ?

Le mouvement de l’extrait (= les différentes parties) :

 Le vieillard se lance d’abord dans un réquisitoire contre les Français = il établit la liste de
toutes les conséquences négatives qu’a eues l’arrivée des Français (l1 à 10)
 Il conteste la prétendue supériorité des Français pour mieux démontrer que ces derniers
n’ont pas le droit de s’approprier les terres des Tahitiens ni de les mettre en esclavage.

Un rappel des actes commis par les Français depuis leur arrivée et qui
souligne la corruption amenée par ces colonisateurs sur le mode de vie des
Tahitiens, fondé sur des valeurs importantes (= bonheur, harmonie avec la
nature, partage) :
 Deux verbes de parole « s’adressant » et « ajouta » prouvent que Diderot donne la parole à
un Tahitien (+ habile sur le plan argumentatif)
 L’apostrophe « Et toi », le tutoiement et la périphrase dépréciative « chef des brigands »
employée pour désigner Bougainville montrent la colère et le ressentiment du vieux tahitien
contre les Français.
 Le verbe à l’impératif « écarte » et l’adverbe de manière « promptement » témoignent de la
volonté de se débarrasser rapidement de la présence des Français (ce qui suggère que leur
présence constitue un danger)
 Le parallélisme « nous sommes innocents ; nous sommes heureux » et l’ antithèse entre
« brigands » et « innocents » met en évidence le lien entre l’innocence et le
bonheurimpression qu’il s’agit d’un paradis sur terre, protégé du mal représenté par la
civilisation c’est ce qu’on a appelé le « mythe du Bon Sauvage »
 L’emploi du pronom « nous » confirme que le vieillard parle au nom de son peuple
 La négation restrictive « tu ne peux que nuire à notre bonheur » suggère que les français ne
peuvent rien apporter de bon.
 Le polyptote « heureux », « bonheur » insiste sur l’idée de bonheur, qui est une valeur
importante pour les Tahitiens.
 La personnification de la nature « pur instinct » permet de mettre en valeur une vie en
harmonie avec la nature, en opposition à la civilisation que veulent imposer les Français.
 L’emploi du passé composé « tu as tenté », « as prêché », « as partagé », « es venu » met en
valeur l’énumération des actes commis par les Français depuis leur arrivée.
 Les verbes dépréciatifs « nuire », « effacer » témoignent de la volonté de destruction des
valeurs et du mode de vie tahitien par les Français.
 La répétition du pronom indéfini « tout est à tous » permet de définir une autre valeur des
tahitiens = le partage
 L’emploi du verbe « prêcher » à connotation religieuse montre la volonté des Français de
« convertir » les tahitiens à leur mode de vie.
 La forme négative « je ne sais quelle distinction » exprime le mépris du vieillard pour l’idée
de propriété privée que voudraient leur inculquer les Français et qui paraît absurde, à
l’encontre des valeurs tahitiennes.
 Les termes appartenant au champ lexical de la communauté « communes », « partagé »
prouvent que l’idée de communauté concerne également les relations entre hommes et
femmes (= très différent des notions de mariage et de fidélité apportées par les Français)
 L’anaphore « Et tu… »accentue l’ impression que le vieillard dresse la liste des méfaits
accomplis par les Français.
 Le champ lexical de la violence « fureurs », « féroce », « haïr », « égorgés », « sang »,
l’allitération en [f] « fureurs », « folles »,« féroces » et la gradation « haïr »/ « égorgés »/
« teintes de votre sang » (=hyperbole) permettent de dénoncer la violence introduite par les
Français dans les relations amoureuse car ils ont semé, avec leur principe de propriété,
la discorde et la jalousie.
 Le champ lexical de la transformation « sont devenues », « es devenu », « ont commencé à »
souligne le changement apporté par la présence française.

Le vieux Tahitien conteste la prétendue supériorité des Français pour mieux


démontrer que ces derniers n’ont pas le droit de s’approprier les terres des
Tahitiens ni de les mettre en esclavage.
Le vieux Tahitien (et Diderot à travers lui) conteste la prétendue supériorité des Français

 Le parallélisme et la négation « Tu n’es ni un Dieu ni un démon » suggèrent que les Français


n’ont aucun pouvoir qui puisse les placer au-dessus des hommes.
 La question rhétorique et la conjonction « donc » dans « qui es-tu donc » mettent en
évidence l’indignation du vieillard au sujet des pouvoirs que s’attribuent les Français au nom
de cette prétendue supériorité.
 Le chp lex de la communication « entends » (ici au sens de « comprends »), « langue », « dis-
nous », « tu me l’as dit », « ce qu’ils ont écrit » souligne la volonté du vieux Tahitien de
s’appuyer sur le témoignage du traducteur « Orou » pour mieux comprendre les véritables
intentions des Français, ce qui est confirmé par la citation de la phrase écrite par ces derniers
« Ce pays est à nous ».

Le vieux Tahitien (et Diderot à travers lui) démontre que les Français n’ont aucun droit sur son
pays.

 La répétition de cette phrase sur un mode exclamatif « Ce pays est à toi !» exprime le
désaccord et l’indignation du vieillard.
 L’emploi d’une périphrase « cette lame de métal » pour désigner l’épée, arme des Français,
peut prouver que les Tahitiens ignorent l’usage de l’épée et qu’ils ne la reconnaissent pas
comme une arme mais on peut aussi l’interpréter comme un signe de mépris de la part du
vieillard qui montre son absence de crainte.
 Deux questions rhétoriques qui s’enchaînent dont la deuxième apporte une réponse à la
première « et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? » suggèrent que le vieillard connaît
déjà les arguments de Bougainville et qu’il peut prouver qu’ils n’ont aucune validité.
 Le vieillard s’appuie alors sur l’argument de la réciprocité grâce à l’emploi de la subordonnée
hypothétique « Si un Tahitien débarquait un jour … » + répétition du déterminant possessif
« vos « devant « côtes », « pierres », « arbres » + anaphore de « Ce pays est à… » en
remplaçant les derniers mots + emploi du verbe « qu’en penserais-tu ? » qui souligne la
volonté de faire réfléchir son interlocuteur en inversant les rôles entre Tahitiens et Français.
 Le vieillard conteste également le droit du plus fort à travers la succession d’une phrase
exclamative « Tu es le plus fort ! » et d’une phrase interrogative « Et qu’est-ce que cela
fait ? » : la loi du plus fort ne constitue pas un argument ! (c’est même l’inverse car l’usage de
la force prouve justement l’absence de justification !)

Le vieux Tahitien (=Diderot) utilise encore l’argument de la réciprocité pour prouver que les
Français ne considèrent pas les Tahitiens comme des êtres humains.

 Le vieillard souligne l’incohérence et la mauvaise foi des Français à travers deux antithèses :
entre « méprisables bagatelles » et « toute une contrée » (les Français ne tolèrent pas que
les Tahitiens leur prennent quelques petits objets alors qu’eux-mêmes sont venus voler leur
pays) et entre « Tu n’es pas esclave » et « Tu veux nous asservir » ; cela prouve que les
Français ne traitent pas les Tahitiens comme leurs égaux.
 Le vieillard suggère encore que les Français sont convaincus de l’infériorité des Tahitiens à
travers l’emploi du verbe de pensée « Tu crois donc », la négation «le Tahitien ne sait pas »
et la comparaison « comme de la brute » (où le mot « brute » se rapporte aux Tahitiens)

Le vieux Tahitien (=Diderot) poursuit son argumentation en montrant que les Tahitiens se
comportent avec plus d’humanité que les Français.

 L’antithèse entre « la brute » et « ton frère » et la métaphore « vous êtes deux enfants de la
nature » mettent en avant l’idée de fraternité universelle des êtres humains.
 Le parallélisme et la question rhétorique « quel droit as-tu sur lui qu’il n’est pas sur toi ? »
mettent en valeur l’idée d’égalité.
 L’anaphore de « T’avons-nous » et la succession de questions rhétoriques soulignent le fait
que les Tahitiens se sont comportés avec humanité envers les Français.
 La métaphore du miroir « Nous avons respecté notre image en toi » confirme que les
Tahitiens voient en chaque être humain un égal qui mérite le respect.

Conclusion :
 Ce texte s’inscrit bien dans le combat pour l’égalité puisque Diderot remet en cause la
supériorité des Européens sur les peuples colonisés et insiste sur les idées d’humanité et de
fraternité. Il critique également l’ethnocentrisme des Européens et illustre bien ce que dira
l’ethnologue Levi-Strauss quelques siècles plus tard « Le barbare est celui qui croit en la
barbarie. »
 On retrouve les idées des Lumières, comme dans la DDFC d’Olympe de Gouges.

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