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SELECTION DES BENEFICIAIRES POUR LES PROGRAMMES

DE SECURITE ALIMENTAIRE
Aide-mémoire à l’intention des ONG

Ce document est issu du travail collaboratif d’ONG partenaires du cluster sécurité alimentaire. Deux réunions
de travail, suivies d’une restitution en réunion du cluster, ont permis de formuler les éléments présentés ici.

METHODOLOGIE
Durant les ateliers, les ONG participantes ont présenté leur méthodologie de sélection des bénéficiaires. Sur la
base de ces présentations, deux types d’approche ont été identifiés et qualifiés selon leurs phases. Un exercice
commun FFOM (Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces) a ensuite été mené pour chaque approche.

Sur la base de cette analyse, un certain nombre de questions liées aux méthodologies de sélection ont été
débattues. Cet aide-mémoire visera à apporter des éléments d’orientation permettant aux ONG de prendre ces
questions en compte.

Les deux types d’approche sont :

- Méthode participative
- Méthode quantitative / systématique

Les résultats préliminaires ont été présentés en réunion du cluster, et les commentaires des partenaires
intégrés pour aboutir au présent document.
CONTENU

1 Résumé des types d’approche utilisés ________________________________________ 1


1.1 Méthode participative ______________________________________________________ 1
1.2 Méthode quantitative / systématique _________________________________________ 3

2 Eléments préliminaires pour orienter le choix de méthodologie ___________________ 4


2.1 Les objectifs de la sélection des bénéficiaires ____________________________________ 4
2.2 sélection, suivi et impact au niveau individuel et communautaire ___________________ 4

3 Recommandations sur la méthode __________________________________________ 5


4 Travailler avec les mêmes bénéficiaires que la campagne précédente? _____________ 5
5 Comment sélectionner les villages ? _________________________________________ 7
6 Quelle place pour les groupements dans le programme de relance de la campagne
agricole ? __________________________________________________________________ 8
7 Quels aspects transversaux prendre en compte ? ______________________________ 9
7.1 Protection transversale _____________________________________________________ 9
7.2 Comment définit-on un ménage ? ____________________________________________ 10
7.3 qu’est-ce que la vulnérabilité _______________________________________________ 11
1 RESUME DES TYPES D ’APPROCHE UTILISES

1.1 METHODE PARTICIPATIVE


PHASES CARACTERISTIQUES
- Réflexion participative et publique sur les critères de vulnérabilité, définition de classes de « bien
être » (équivalent des groupes socio-économiques très pauvres, pauvres, moyens et nantis utilisés par
la méthode HEA) et identification des classes prioritaires pour une assistance. La méthode du Piling
présentée précédemment par le cluster peut par exemple être utilisée pour cette phase. Cette phase
peut débuter par une assemblée générale du village pendant laquelle des participants à un atelier de
réflexion et les membres d’un comité de sélection pourront être élus ou validés par la communauté.

- Sélection par les autorités locales / services techniques locaux (ACDA) / comité de sélection sur la base
de ces critères et classes

- Validation publique des listes finales, lors d’une nouvelle AG par exemple.

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FFOM
Forces Opportunités

- Identification des différents groupes de - Compréhension des normes culturelles, des valeurs,
population, de leurs besoins spécifiques, de et des éventuelles tensions dans l’environnement
leurs préférences et des capacités existantes local dans une optique de « do no harm »
(pour ne pas les réduire)
- Acceptance / appropriation par la communauté qui
- Participation des communautés pour adapter va jouer un rôle actif dans les processus de prise de
les critères aux vulnérabilités et besoins décisions qui la concerne (responsabilisation)
spécifiques
- Peut permettre une bonne vision par classe sur la
- Nécessite peu de moyens matériels base d’un échantillon

Faiblesses Menaces

- Ne constitue pas en soi une baseline pour le - Si les dynamiques sociales ne sont pas bien
suivi de l’impact des projets à l’échelle appréhendées, le groupe de sélection peut être
individuelle biaisé

- S’il n’y a pas une bonne analyse sociale préalable


(protection), la méthode participative peut causer
l’exposition / stigmatisation / exclusion de certains
groupes ou ménages

- Éventuels risques de pressions sur le comité de


sélection

- Approche subjective ; la capacité de l’animateur à


détecter les choix problématiques et à orienter les
échanges devra prévenir une sélection
problématique

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1.2 METHODE QUANTITATIVE / SYSTEMATIQUE
PHASES CARACTERISTIQUES
- Enquête sur l’ensemble de la population de la zone ciblée

- Présentation des critères « techniques » de sélection à la population cible. Ces critères devraient être
définis sur la base des indicateurs clés de la sécurité alimentaire (score de consommation alimentaire
ou de diversité alimentaire, indice des stratégies de survie, accès à la terre,…), complétés par des
critères spécifiques selon la nature du projet et les spécificités des groupes ciblés.

- Sélection sur la base de ces critères

FFOM
Forces Opportunités

- ciblage prenant compte directement des - Facilitera un suivi d’impact à l’échelle


objectifs et indicateurs du projet (si individuelle
vulnérabilités spécifiques prises en compte
dans les critères de sélection)

- Constitue une baseline

Faiblesses Menaces

- Très lourd (moyens et temps) - Peut ne pas saisir les vulnérabilités


spécifiques en l’absence d’étude préalable

- Pas d’appropriation par les populations si


manque de communication

- Sans participation des communautés, risque


de développer ou entretenir un sentiment
d’assistanat

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2 ELEMENTS PRELIMINAIRES POUR ORIENTER LE CHOIX DE METHODOLOGIE

2.1 LES OBJECTIFS DE LA SELECTION DES BENEFICIAIRES


La méthodologie de sélection des bénéficiaires a un impact important sur le déroulement et l’impact des
projets. Elle doit être choisie en tenant compte des facteurs suivants :

- Qualité, pertinence et efficacité de l’aide (redevabilité envers les populations):


o Prise en compte des vulnérabilités, des besoins spécifiques et des capacités existantes
o Priorisation des bénéficiaires qui en ont (le plus) besoin
- Participation et appropriation :
o La méthodologie pourra favoriser une meilleure appropriation du projet par les
communautés cibles si elle est choisie avec leur participation. Les formes de participation ne
doivent pas être imposées au risque d’être inappropriées au contexte.
o A l’inverse, une méthodologie non adaptée pourrait accroitre la vulnérabilité ou la
marginalisation de certains groupes, causer un rejet ou dans une moindre mesure ne pas
favoriser l’adhésion des partenaires locaux et des bénéficiaires eux même au projet.
- Préparation du suivi et de l’évaluation d’impact :
o La méthodologie choisie va influencer la nature des premières informations obtenues sur les
ménages bénéficiaires du projet. Elle met en place des éléments qui influenceront les aspects
qualitatifs et quantitatifs de l’étude d’impact.

2.2 SELECTION, SUIVI ET IMPACT AU NIVEAU INDIVIDUEL ET COMMUNAUTAIRE


Lors de la campagne 2014, on a pu observer un phénomène de redistribution des semences au sein des villages
pour lesquels toute la population n’avait pas été bénéficiaire directe d’un appui en semences et outils.

L’impact des kits sur la production agricole des ménages ciblés a donc été bien moindre que souhaité. Les
ménages ayant bénéficié de la redistribution n’ont également a priori pas bénéficié des rations de protection
des semences. Enfin, le phénomène ayant été constaté a postériori, il n’y a pas de données de suivi des
ménages non accompagnés pour estimer l’impact de cette redistribution sur la production à l’échelle
communautaire.

Il y a donc deux hypothèses possibles :

- Une redistribution non contrôlée, sans consommation des semences, résulte au final en un gain de
production au niveau communautaire équivalent au gain qui aurait été observé sans redistribution.
L’impact au niveau des ménages individuels est par contre moindre (redistribution d’une quantité
identique entre plus d’individus).
- Une redistribution non contrôlée, avec consommation des semences par les ménages non-suivis,
représente une perte de production pour la communauté et pour les ménages ciblés.

Pour la campagne 2015, ceci doit être une leçon apprise qui doit être intégrée dans le dispositif de sélection
et de suivi des ménages. Il faudra décider dès le début du projet si l’on souhaite suivre l’impact au niveau de
la communauté ou au niveau des ménages cibles. Ce choix devra ensuite être pris en compte dans les
critères de sélection des bénéficiaires et dans les outils de suivi à mettre en place.

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3 RECOMMANDATIONS SUR LA METHODE
• Travailler à l’échelle du village

o Dès le démarrage de l’opération, informer les autorités locales de la nature du projet, de ses
objectifs et de ses limites. Le partage d’information avec la communauté ciblée permettra
une participation informée.

o Prévoir la mise en place d’un mécanisme de gestion et traitement des doléances / plaintes
(redevabilité)

• Adopter une méthode mixte

o Atteindre tous les objectifs de la sélection des bénéficiaires

o Possibilité de phaser l’approche et de la compléter post-distribution

• Phase 1 : Approche participative pré-distribution pour cibler de manière rapide et pertinente les plus
« vulnérables » et ainsi limiter le facteur de redistribution incontrôlée qui pourrait résulter d’un
mauvais ciblage.

• Phase 2 : Enquête de vulnérabilité pouvant se faire post-distribution pour établir une baseline.
L’établissement d’une baseline signifie que cette enquête doit être faite le plus rapidement possible
après la distribution afin de capter la situation des ménages avant que le projet ai pu avoir un impact
sur leur niveau de sécurité alimentaire. Cela signifie également que des ménages non bénéficiaires
devront être intégrés à l’enquête comme « population témoin »

o Sur échantillon : le suivi d’impact se fera au niveau communautaire

o Sur toute la population ciblée : le suivi d’impact pourra être fait au niveau individuel

• Phase 3 : L’étude d’impact en fin de projet doit être prise en compte dès le démarrage. Seule une
approche comparative permettra d’évaluer l’impact propre au projet, et de s’affranchir un minimum
des facteurs externes et indépendants du projet qui auront pu influencer positivement ou
négativement la sécurité alimentaire des ménages. Cette approche comparative nécessitera donc de
suivre des ménages « témoins », et de les intégrer lors de la définition de la baseline et de l’évaluation
finale.

4 TRAVAILLER AVEC LES MEMES BENEFICIAIRES QUE LA CAMPAGNE


PRECEDENTE?
• Doit-on les exclure automatiquement?

• L’appui était-il suffisant pour garantir un cycle de production viable ?

• Ont-ils sacrifié leur potentiel individuel par solidarité ? (cas des redistributions des semences)

• Ont-ils subi des pertes indépendantes de leur volonté ?

 On ne peut pas les exclure par principe

• Doit-on ne retravailler qu’avec eux?

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• Tous les ménages les plus vulnérables avaient-ils pu être appuyés pour la campagne
précédente?

• La vulnérabilité des autres ménages a-t-elle évolué?

 On ne peut pas exclure les autres ménages par principe

Dans le contexte mouvant de la RCA, et étant donné les limitations de l’action sur la campagne précédente,
l’appui antérieur n’est donc pas un critère de sélection.

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5 COMMENT SELECTIONNER LES VILLAGES ?
Procéder du macro au micro

• Identifier les préfectures et sous-préfectures prioritaires (macro):

• Utiliser les documents d’orientation stratégique nationaux:

• SRP

• IPC, CFSAM et EFSA

• Valoriser l’expérience de l’ONG dans le pays. La connaissance des dynamiques sociales


spécifiques à une zone est un élément important pour le succès d’un programme. Cela
permettra notamment de repérer et d’intégrer les groupes et minorités qui pourraient être
mis ou se mettre à l’écart pendant les phases participatives.

• Identifier les villages au sein des unités territoriales retenues (meso)

• Les ONG devraient chercher à collecter en continu des informations sur leurs zones
d’intervention (enquêtes, études de type HEA, suivi des programmes existant). Les alertes et
évaluations RRM peuvent également être de bons indicateurs. Sur cette base, il peut être
possible d’identifier des villages prioritaires.

• L’approche participative décrite plus haut peut également être appliquée à l’échelle d’une
sous-préfecture. Un atelier participatif avec les autorités locales et les services techniques de
la zone (préfet, sous-préfets, maires, chefs de village, agents de l’action sociale, de l’ACDA, de
l’ANDE,…) peut permettre de produire une liste de villages prioritaires.

• A l’heure actuelle, on observe une évolution différenciée de la sécurité en fonction des zones
de la RCA. Dans les zones en cours de stabilisation, des dynamiques de retours ou de
réinstallation des personnes déplacées internes ou des réfugiés se mettent en place. Ces
retours dans des villages dont le tissu socio-économique et le potentiel productif ont été
affaiblis par la crise, peuvent constituer un nouveau choc. Les villages susceptibles d’accueillir
des retours ou réinstallations devraient donc être considérés en priorité afin de les préparer à
mieux absorber les futurs chocs.

• Au sein de ces villages on pourra alors sélectionner les ménages bénéficiaires (micro)

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6 QUELLE PLACE POUR LES GROUPEMENTS DANS LE PROGRAMME DE RELANCE
DE LA CAMPAGNE AGRICOLE ?
Le programme de relance de la campagne agricole est basé sur des distributions aux ménages individuels. Les
groupements ne devraient donc pas être ciblés directement en tant que tels. Cependant, les groupements ont
des fonctions spécifiques qui peuvent être prises en compte pour améliorer l’impact du programme.

Trois fonctions devraient être considérées :

- Fonction sociale : les groupements peuvent jouer un rôle psychosocial important en facilitant les
échanges entre les agriculteurs et en favorisant l’entraide.
- Fonction productive : la mise en commun de moyens de production à travers les groupements peut
permettre aux ménages qui, individuellement, n’ont pas la capacité de cultiver une surface importante
de mieux les valoriser.
- Fonction économique : la mise en commun de la production peut permettre de trouver de nouveaux
débouchés ou de la vendre plus facilement.

Dans le cadre d’un programme de relance de la campagne agricole avec des ménages vulnérables, on peut
s’attendre à ce que le potentiel de production soit trop faible pour avoir des visées économiques. Les fonctions
sociales et productives peuvent par contre permettre aux ménages de cultiver dans de meilleures conditions.

Il est donc possible que des ménages choisissent de valoriser une partie des semences reçues à travers un
groupement.

Dans le cas où l’on accompagnerait les ménages bénéficiaires à travers une démarche de groupement, une
évaluation approfondie des groupements pourra s’avérer nécessaire. Certains groupements sont développés
par rapport à une quatrième fonction : la captation de l’aide. Ces groupements sont généralement fictifs ou
non-fonctionnels et pourraient desservir l’intérêt des bénéficiaires.

Dans le cadre du programme, la distribution se fera donc au niveau des ménages individuels, mais
les partenaires devraient prévoir la possibilité d’accompagner les ménages ciblés souhaitant
valoriser une partie des semences par une démarche collective. Les approches Champ Ecole
Paysan et Caisse de résilience peuvent être particulièrement adaptées pour cela.

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7 QUELS ASPECTS TRANSVERSAUX PRENDRE EN COMPTE ?

7.1 PROTECTION TRANSVERSALE


L’intégration de la protection transversale (« protection mainstreaming ») dans les programmes de sécurité
alimentaire vise à donner aux ONG et partenaires de l’action humanitaire les outils nécessaires pour prendre
en compte les spécificités de chaque zone d’intervention et communauté ciblée, et éviter non seulement de
nuire (in)volontairement aux populations ciblées (principe du « do no harm »), mais aussi d’aller au-delà en
priorisant leur sécurité et dignité. Ces outils permettent également de garantir que les communautés ont un
accès effectif à l’assistance fournie, et que des mécanismes de redevabilité et de participation adaptés sont mis
en place dans une volonté d’autonomisation des populations ciblées.

Une bonne analyse du contexte et des dynamiques sociales, ainsi que l’intégration de mécanismes
participatifs permettant de détecter des spécificités critiques des communautés ciblées sont essentielles pour
construire un programme de qualité, répondant aux besoins et inclusif. C’est également crucial pour éviter la
stigmatisation ou marginalisation de certains groupes lors de l’établissement participatif des classes de bien-
être et des critères de ciblage.

Une analyse des risques liés à chaque contexte spécifique et aux activités planifiées doit également permettre
de mieux comprendre comment intégrer les aspects de la protection transversale dans les programmes de
sécurité alimentaire. Une telle analyse permettra d’appréhender les risques que peuvent avoir nos activités
pour l’intégrité physique et psychologique des bénéficiaires (risques de prédation, de violence lors de l’accès
aux champs, etc.), mais aussi les différentes barrières qui pourraient empêcher les bénéficiaires d’avoir un
accès effectif à l’assistance. Ces barrières peuvent être physiques et sécuritaires (liées à la distance, au temps,
au manque de liberté de mouvement, etc.), mais aussi économiques (par ex. barrages illégaux), culturelles,
religieuses, politiques ou simplement dues à un manque d’information sur le service fourni.

Développer une checklist Protection permettrait d’avoir un document de référence pour assurer la prise en
compte de ces éléments clés de la protection transversale, et ainsi ajuster le ciblage et les programmes dans la
mesure où le niveau de violence impacte très fortement la sécurité alimentaire. L’analyse des dynamiques de
déplacement et de la diversité des moyens de subsistance constitue également un très bon élément d’analyse
pour anticiper les chocs et renforcer au maximum les capacités et mécanismes de résilience existants.

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7.2 COMMENT DEFINIT -ON UN MENAGE ?
Il existe plusieurs définitions de ce qu’est un ménage, par exemple, les personnes vivant sous un même toit, les
personnes vivant dans une même concession, les membres d’une famille qui dépendent des mêmes sources de
revenu,…

Dans le cadre de programmes humanitaires, il est important de bien définir ce que l’on considère comme un
ménage afin de garantir une équité dans l’assistance. Un ménage, son fonctionnement et sa configuration sont
des constructions sociales issues de facteurs culturels et économiques. L’organisation des ménages peut donc
varier en fonction du contexte local.

On remarque par exemple que les ménages polygames peuvent en fait être constitués de plusieurs
« unités domestiques », composées chacune d’une femme et de sa famille, organisées autour du chef de
ménage. En pratique, chaque unité peut avoir des besoins équivalents à ceux d’un ménage monogame.

Le CICR, afin de tenir compte de la polygamie et des ménages pluricellulaires, propose alors une définition
simple pour les programmes humanitaires : « une femme, un ménage ». On peut noter que cette définition
marche pour les ménages monogames. Selon cette définition un ménage polygame avec 6 femmes sera
considéré, pour l’assistance humanitaire, comme 6 ménages. Cette définition permet le plus souvent
d’apporter un bon niveau d’équité et est donc un bon choix par défaut.

Cette définition pourra par contre poser problème pour l’assistance à des jeunes hommes venant d’acquérir
leur indépendance et venant de s’installer sur leur propre parcelle. Elle pourra également poser un problème
dans les cas où le chef de ménage accapare l’ensemble de l’assistance humanitaire. Ce dernier point va
cependant au-delà de la question de la définition de ce qu’est un ménage, et soulève une question de suivi à
appréhender au cas par cas par chaque ONG dans sa zone d’intervention.

Il est important d’adopter une définition de ménage correspondant à la réalité de la zone


d’implémentation du programme humanitaire concerné. Ce qui nécessite une bonne connaissance
du contexte et des éléments culturels.

La définition du CICR est également celle qui fonctionne le plus souvent : « une femme, un
ménage ».

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7.3 QU’EST-CE QUE LA VULNERABILITE
Si nous souhaitons que les programmes humanitaires répondent au maximum aux besoins spécifiques des
communautés et personnes ciblées et aient un impact positif sur leur situation, il est important de mener une
réflexion sur ce qu’est la vulnérabilité.

Une personne, un ménage ou une communauté n’est pas vulnérable en soi mais par rapport à quelque
chose. Cette vulnérabilité est liée aux caractéristiques de chaque personne qui sont liées à son identité ou sa
situation et à des dynamiques de pouvoir, qui font que cette personne est susceptible d’être affectée par un
risque. Elle correspond ainsi à une faiblesse ou un manque de capacité pour faire face à une situation donnée.
La vulnérabilité peut donc être comprise comme une faible capacité de résilience.

A partir de là, que peut-on dire des différents « types de vulnérabilité » que l’on envisage habituellement ?

- Vulnérabilité basée sur le statut (enfants non accompagnés, personnes âgées, femmes enceintes,
personnes handicapées, minorité, personnes déplacées, réfugiés, etc.) : quand on considère ce type de
vulnérabilité, on pense à des facteurs qui, à priori, peuvent exposer une catégorie de personnes
partageant une ou des caractéristiques communes à un risque. Il s’agit donc d’un statut exposant des
personnes à un risque, et de l’incapacité de ces personnes à faire face à cette situation donnée et
subvenir à un besoin essentiel. Par exemple, un vieillard ou une personne handicapée peut ne pas
être en état de subvenir à ses besoins de manière autonome. Pourtant, la communauté dans laquelle
vit ce vieillard ou cette personne handicapée peut avoir des systèmes sociaux de soutien aux
personnes âgées. Par opposition, un jeune homme de bonne condition physique, mais exclu de la
communauté, peut ne pas avoir accès à certains services ou supports et se retrouver sans soutien face
à une situation particulière (perte de son capital productif par exemple).
- Vulnérabilité basée sur des indicateurs et un score : dans cette approche, on peut distinguer deux
types d’indicateurs ; ceux qui reflètent un état à un instant donné (score de consommation
alimentaire) et ceux qui indiquent une tendance d’évolution, un risque (index des stratégies
d’adaptation). Les indicateurs reflétant un état concernent en fait souvent la conséquence d’une
vulnérabilité confrontée à un changement de contexte. Un score alimentaire bas reflète par exemple
un changement de contexte que les stratégies d’accès à l’alimentation n’ont pas pu compenser. Ils
peuvent cependant indiquer une situation aggravant la vulnérabilité. Les indicateurs reflétant un
risque indiquent directement une vulnérabilité. Une stratégie de survie stable mais dépendant
d’éléments fragiles indique une vulnérabilité forte par rapport à un changement affectant ces
éléments.

7.3.1 QUE RETENIR ?


- Une vulnérabilité est définie par rapport à une situation et à des facteurs du contexte
(environnemental, économique, social) pouvant affecter cette situation. Elle peut être définie comme
une incapacité à faire face à un changement de ces facteurs. Elle est une absence/faiblesse de
résilience par rapport à ces facteurs.
- Une vulnérabilité peut s’exprimer à l’échelle individuelle, du ménage, ou de la communauté.
- La vulnérabilité d’une unité sociale (personne, ménage, communauté) ne peut pas être analysée sans
considérer cette unité dans un ensemble supérieur (la personne dans le ménage, le ménage dans la
communauté) et les mécanismes de compensation qui existent à cette échelle. Dans certains cas, la
vulnérabilité d’une personne pourra être exprimée dans son incapacité à bénéficier du soutien de sa
communauté.

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7.3.2 QUELLE CONSEQUENCE POUR L’ACTION HUMANITAIRE ?
- Se concentrer sur des facteurs indiquant à priori des vulnérabilités (statut, scores) peut nous amener
à ignorer des mécanismes de résilience existants et ainsi de ne pas orienter notre aide vers les
personnes les plus vulnérables, c’est-à-dire celles ayant le plus haut risque de voir leur situation se
dégrader vers, ou stagner à, un niveau insupportable sur le moyen long terme. La compréhension des
dynamiques sociales est donc essentielle pour identifier les vulnérabilités les plus aigües.
- La compréhension des mécanismes locaux de compensation et de lutte contre les vulnérabilités peut
également permettre d’utiliser l’intervention humanitaire pour les renforcer plutôt que de créer des
structures artificielles et temporaires.
- La compréhension des vulnérabilités, et des mécanismes de compensation ou d’élimination de ces
vulnérabilités, autrement dit des mécanismes de résilience, est essentielle pour la construction de
programmes humanitaires ayant une réelle stratégie de sortie.

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