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Mission exploratoire – Diagnostic initial

M. Dupaquier

Qu’est-ce qu’un projet humanitaire ?


L’objectif du projet humanitaire est de garantir la sécurité humaine. La santé est « ce n’est pas
seulement l’absence de maladie, mais le bien-être physique, mental, social » (OMS). Cette définition
est très large.
Lors de la venue d’une crise, on va faire en sorte que le niveau de la qualité de vie ne tombe pas à
zéro, et on va tenter de le faire remonter au niveau pré-crise. Dans la phase d’urgence, on limite les
dommages de la crise, dans la phase post-urgence, on va chercher à effacer les effets de la crise. Au-
delà de ces actions, si on veut faire monter le niveau de vie au-delà du niveau initial, il s’agit de
développement.
Une crise humanitaire peut être une catastrophe naturelle, un conflit armé, etc.
Les domaines d’intervention au niveau de la santé peuvent être multiples. La santé publique selon le
CICR se décompose entre : nourriture, eau, environnement et hygiène, promotion de la santé, maladies
communes, blessés de guerre, et maladies psychosociales.
- Nourriture : Elle se décline en une chaîne : production (agriculture), réseau commercial
(distribution), disponibilité (ce que l’on peut trouver), accessibilité (pouvoir d’achat), consommation
(habitudes alimentaires, régimes alimentaires), utilisation biologique (ingestion par l’organisme). C’est
une chaîne qui a deux bouts. Si il y a un problème à un moment dans cette chaîne, il faut déterminer
où se situe le problème au niveau de cette chaîne.
- Eau : Source, stockage, distribution, utilisation, consommation, traitement des eaux usées.
- Environnement hygiène, gestion des déchets, humains, gestion déchets solides,énergie,
contrôles des vecteurs, habitat, architecture du site.
- Promotion santé : prévention primaire, prévention secondaire, traitement, prévention
tertiaire, investigation des épidémies, gestion des épidémies
- Maladies communes : soins médicaux familiaux, soins médicaux, soins pro dans
dispensaires, transfert, hospitalisations, soins spécialisés
- Blessés de guerre (CICR) : Aide immédiate, poste de premier secours, évacuation, soins
chirurgicaux, soins opératoires, réhabilitation
- Psychosocial : inter sociale communautaire,…
Les secteurs de base de SPHERE sont :
- L’eau et l’hygiène
- La sécurité alimentaire
- La nutrition
- L’aide alimentaire
- L’abris et l’environnement
- Les produits non alimentaires
- Santé

Le diagnostic initial
Mission Exploratoire
Master AHI 2006 – 2007

Il faut définit clairement les étapes du cycle de projet et le cadre logique (objectifs, résultats, moyens)
en fonction des indicateurs humanitaires
 L’évaluation initiale est la première étape du cycle de projet après la catastrophe et permet
d’évaluer les besoins de la populations et voir si on peut y remédier.
 L’analyse d’une stratégie c’est l’étape suivante.
 La planification / Conception, c’est le montage de projet.
 La mise en œuvre : pour les organisations qui dépendent de fonds propres. Pour les
organisations qui dépendent de fonds institutionnels, il faut ajouter la recherche de fonds.
 Le suivi / évaluation : c’est le monitoring des indicateurs qui démontre ou pas la réussite et la
pertinence du projet. Il va permettre l’évaluation d’impact (évaluation ex-post). L’analyse de
l’impact permet de déterminer si la crise a encore des effets sur la population.
Les objectifs du diagnostic initial pour le CICR : « rassembler les informations en fonction des
problèmes pour définir les déséquilibres ».

Les étapes du diagnostic :


 La collecte de l’information sur le contexte et les données clefs dans chaque secteur. Elle va
aller jusqu’à l’ouverture de mission.
 L’analyse / l’identification des causes permet d’établir le profil de la crise, comparer les
données récoltées avec des normes minimales et déterminer les causes des problèmes affectant
les populations.
 Prioriser c'est-à-dire déterminer les secteurs prioritaires, les populations cibles et/ou les zones
géographiques et déterminer le degré d’urgence requis pour l’intervention.
 Définition des réponses à apporter, c'est-à-dire quelle intervention mener pour répondre aux
problèmes donnés.

La préparation de la mission exploratoire


C’est la première équipe envoyée sur le terrain pour faire l’analyse initiale d’une mission (d’un pays).
Avant cela, il y a un contexte de veille qui permet une réaction plus rapide.
 Récolter l’information depuis le siège : presse, cartes, photos vidéos, études anthropologiques,
systèmes d’alerte précoce, sites Internet, autorités, etc.
 Composer l’équipe : on va chercher des compétences complémentaires. Ce sera : d’abord un
chef de mission. Ensuite il faut en général au minimum un logisticien (achats, services,
support, etc.) et un administrateur. En plus on peut penser à un ingénieur agronome, infirmier,
psychologue, un hydraulicien, d’autres ingénieurs. La mission peut évoluer et on fera varier
l’équipe sur le terrain. En général, on est limité par les fonds et il faut rationaliser les
ressources humaines sur le terrain. La mission exploratoire va souvent aussi commencer la
mission.
 Emporter du matériel : moyens de communication (téléphones satellites), ordinateur (bases de
donnée) et imprimante, appareil photo, GPS, kit d’analyse d’eau, kit de mission exploratoire,
de l’argent, matériel d’administration, appareil photo et caméra. Selon la situation on va
pouvoir trouver plus ou moins de matériel sur place : il faut le prendre en compte.
 Savoir choisir l’équipe locale : c’est très important car ce sont des gens sur qui la mission va
reposer. On peut se servir de contacts que l’on a au siège. Il faut que ces gens soient capables
de comprendre l’action. Il y a des zones où il est très difficile de trouver des gens formés. Il
faut aussi briefer le personnel local. Le personnel peut être partial. Il faut décoder les
problèmes.

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1ère étape : En quoi consiste la collecte d’information sur le terrain ?


Elle permet d’obtenir des données sur les points suivants :
 Le contexte
 Les problèmes rencontrés par les populations
 Les réponses que l’organisation pourrait apporter
 Les contraintes externes
 Les contraintes internes
 Les conditions critiques, par exemple l’enregistrement légal sur le terrain.
 Les opportunités, par exemple avec les organisations partenaires

Les composantes de la collecte d’information


 Des sources : ONG locales, autorités, population, bénéficiaires vulnérables / non vulnérables,
éduqués / non éduqués, hommes / femmes, presse locale, services de santé, infrastructures,
recherche d’information générale, militaires, groupes armées, universités, commerçants,
transporteurs, les religieux, etc. Il faut varier les sources et les catégoriser. Il faut trianguler les
sources pour avoir des informations plus fiables (une même information chez différentes
sources).
 Des moyens : les méthodes fondamentales (questionnaires, observation directe, analyse des
intervenants, études de cas, études anthropométriques…) et les méthodes de discussion
(interview, entretien, focus group, brain storming, méthodes spécifiques en fonction de la
méthode…).
 Des indicateurs : le climat, informations économiques et politiques, sécurité, santé, culturel,
nutritionnel, environnement général, déterminants démographiques, et tout différencier
hommes / femmes, lois (propriété foncière), profil de la crise, profil des populations, aide et
coordination, habitat et infrastructures.

Générer de l’information : un exercice délicat


Les clefs du succès …
 L’information doit être précise et non biaisée : les meilleures sources d’information doivent
être consultées.
 L’information doit être opportune : le diagnostic doit être mené au plus tôt après la catastrophe
/ la crise, et au plus près de l’intervention.
 L’information doit être constamment mise à jour afin de réévaluer les besoins et l’adéquation
de la réponse et des actions menées.
 Les problèmes urgents doivent être distingués des problèmes chroniques afin de différencier
ce qui relève d’une « situation normale » et ce qui résulte de la crise et fournir ainsi une aide
aux plus nécessiteux de tous.
 Les méthodes d’enquête, les terminologies et les classifications utilisées doivent être
reconnues et acceptées.
 Les enquêteurs doivent être sensibles et attentifs au contexte spécifique local afin d’éviter de
créer trop d’attentes parmi les population et d’engendrer de faux espoirs.
Enfin, il faut trianguler et éviter les biais qui faussent l’information (sources et méthodes).

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Le plus important est le bon sens !!!

Le plus dur : analyser / identifier les causes aux problèmes


 Un problème humanitaire est toujours collectif. Il concerne une population ou un/des
groupe(s) de populations.
On peut le définir de plusieurs manières :
- L’écart entre un état constaté et exprimé (a priori non satisfait) et un état souhaité,
pour une population donnée.
- L’écart par rapport à une norme acceptée / acceptable.
- Le déséquilibre entre les besoins fondamentaux des victimes et les services dont
disposent les victimes pour y faire face…
 On distingue entre les problèmes diagnosticables (absolus) qui comprennent des problèmes
perçus par les populations et les problèmes diagnostiqués par l’évaluateur. On va essayer de
traiter en priorité l’intersection des problèmes diagnostiqués et les problèmes perçus.

Comment fait-on ?
D’abord :
 Du global au local, du général au spécifique.
 L’urgence s’analyse dans le temps : il faut prendre en compte le moyen et le long terme.
 Les problèmes interagissent
Ensuite avec méthode
 Méthode d’analyse spatiale : carte, etc.
 Méthode d’analyse temporelle : journal de bord, historique, chronologie, calendrier
saisonniers, etc.
 Méthode d’analyse des liens et relations : arbre à problème, etc.
 Méthode de hiérarchisation et de classement : échelle de bien-être en fonction de l’IDH, etc.

Méthode de l’arbre à problème


 On part d’un problème central : mortalité des moins de 5 ans.
 Le problème a des effets : détresse, urgence.
 Le problème a des causes qui ont des causes :
- diarrhée due à l’hygiène, due au manque d’eau et à l’absence de latrines...
- rougeole due à un faible taux de vaccination
- paludisme due aux moustiques dus à l’absence de moustiquaires
L’objectif est d’aller le plus loin possible dans les causes pour permettre une bonne hiérarchisation et
une bonne gestion de priorité des problèmes ainsi que pour déterminer les moyens de réaction.
On cherche aussi à établir un maximum de liens possibles…

Prioriser

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Il faut rechercher :
 L’ampleur des problèmes
 L’urgence des problèmes
Mais ce n’est possible que si on connaît :
 La faisabilité
 Les contraintes internes (mandat, savoir faire, RH, argent) et externes (sécurité, autorisation de
travailler, avions, disponibilité matériaux, etc.).

Enfin déterminer le type d’intervention


Les réponses en matière d’intervention correspondent à l’ensemble des mesures que nous envisageons
de mettre en place pour résoudre totalement ou partiellement les problèmes collectifs d’une population
donnée
Il en existe plusieurs types :
 Aide directe aux populations en biens et services
 Réalisation d’infrastructures
 Formation et sensibilisation
 Appui organisationnel : ONG locales, etc.
Et puis, il faut mélanger pour obtenir une intervention pour toucher au mieux la population cible.

Cas pratique : mission exploratoire au Kenya


 Arbre à problèmes : problèmes centraux : santé, sécurité alimentaire, eau, IDPs.
 Equipe exploratoire. Certains domaines sont essentiels : hydraulique, nutrition,
eau/assainissement. Il peut aussi y avoir des problèmes de protection, d’accès. Il faut éviter de
multiplier le nombre d’acteurs. En général, peu d’organisation font du médical pur.
- Chef de mission qui pourrait s’occuper logistique, gestion programme (suivi budgétaire…),
administration, gestion RH.
- Logisticien qui serait éventuellement administrateur (recherche d’info administrative…).
- Nutritionniste ou sécu. alim.
- Ingénieur eau/assainissement
ou chef de mission + médecin + hydro
 Stratégie
 Priorités

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MORTALITE DES
MOINS DE 5 ANS

Inadéquation
Malnutrition des
structures de
Prévalence santé
maladies
hydriques
Manque Fort taux de Qualité de
de prévalence l’eau
nourriture
Hygiène
Manque Pas de
de bétail protectio
Semence n eau
pas adaptée Mauvaise
s
Vol
pratiques
Pâturage Educatio
n
Problème Culture
d’irrigation Vente
Croyance
s
Manque d’eau Accès point
d’eau

Manque
infrastructure Eau distance
s payant
SECHERESSE e
Sécurité

Cas du Liban
 Equipe : log + distribution + chef
 On a deux grandes problématiques : les déplacés et les personnes non déplacées. Le pays est
riche mais sur les lieux des bombardements, les gens ont tout perdu et il n’y a plus rien. Il y a
des problèmes d’accès.
 La mission exploratoire va aller sur place et déterminer : le nombre, les besoins. Les
problèmes se regroupent. Les populations sont éduquées. La mission exploratoire va faire une
évaluation rapide (éventuellement un tout petit questionnaire). Les rues sont vides et on sait
qu’il y a environs 30 000 personnes. On fait du mapping, on projette les besoins. On va voir
les autorités. Il faut bien choisir le personnel local. La solidarité est très grande et les libanais
vont se regrouper chez les populations palestiniennes. Ces populations ont un grave problème
de protection (tous les camions sont des cibles israéliennes). Il n’y a pas de malnutrition, mais
la situation alimentaire peut très rapidement se dégrader. Pour l’hydraulique, on peut faire des
stocks et des unités de déminéralisation. La distribution se fait en kit d’immeuble en

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Mission Exploratoire
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immeuble. Ces populations ont un goût et connaissent une diversité alimentaire qu’on ne peut
pas négliger. Il faut penser à aller voir la boulangerie qui distribue le pain… industriel.

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