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Doc hiérarchie des normes

Revue trimestrielle de droit civil 2001, Chroniques p. 749

Hiérarchie des normes : du système au principe


par Pascal Puig Agrégé des facultés de droit ; Professeur à l'Université d'Avignon

** *

        1. Ayant fourni aux juristes du XXe siècle une explication du droit moderne dans lequel ils
évoluent (1), la hiérarchie des normes (2) résistera-t-elle au vent de post-modernité (3) qui souffle sur
notre système juridique en cette aube du IIIe millénaire ? La question mérite d'être posée tant se
multiplient depuis quelques années les désordres en son sein (4), des enchevêtrements multiples aux
inversions de hiérarchie mettant en lumière les faiblesses d'une construction lacunaire et laissant
affleurer de nombreuses contradictions.

        La hiérarchie des normes est en crise. Les causes en sont multiples mais peuvent pour l'essentiel
être ramenées à une combinaison de deux facteurs : d'une part, le foisonnement des sources de droit,
tant internes qu'internationales et européennes, d'autre part, l'accroissement des contrôles de
conformité. Au développement de ces phénomènes, le succès de la théorie normativiste a sans doute
contribué (5), non sans un certain paradoxe. Cette contribution s'est manifestée à des degrés variables
et de manière parfois indirecte.

        2. En fondant la validité d'une norme juridique sur le respect d'une procédure de création prescrite
par une norme supérieure - et, en dernier lieu, par la norme fondamentale - le système kelsénien
conduit le droit à organiser lui-même sa propre production (6) et, par cette « autorégulation » (7), à se
réaliser par degrés successifs. La norme de degré supérieur ne pouvant tout prévoir (8), c'est à celles
de niveau inférieur qu'il revient d'apporter les précisions utiles, et ainsi de suite jusqu'aux normes à
caractère individuel et aux actes de pure exécution matérielle. La détermination du droit s'opère ainsi
par étapes successives en descendant du sommet vers la base de la pyramide des normes. A ce schéma
théorique correspond en France un mode de régulation juridique fondé sur la suprématie de l'Etat et
gouverné, dans une large mesure, par une Administration dont l'omnipotence a atteint sous la Ve
République des proportions inquiétantes (9). Que ce système ait engendré une augmentation
considérable du volume des textes et participé au naufrage du droit commun en favorisant la
spécialisation des branches du droit n'est plus à démontrer.

        En revanche, le « système dynamique de normes » auquel correspondent, selon Kelsen, les ordres
juridiques (10), n'aurait guère dû favoriser une inflation des contrôles au-delà du seul respect des
conditions de création de la norme. L'auteur distingue en effet deux systèmes de normes, l'un de type
statique, l'autre de type dynamique. Dans le premier, la validité des normes résulte de la conformité de
leur contenu à celui d'une norme supérieure, si bien que chacune d'elles se trouve subsumée sous le
fond d'une autre « comme le particulier sous le général » (11) jusqu'à la norme fondamentale qui les
contient toutes. Une telle hiérarchie matérielle peut, selon l'auteur, être observée dans l'ordre moral où,
par exemple, l'interdiction du mensonge, de la tromperie ou du parjure peut être déduite de la norme
plus générale qui ordonne la sincérité (12). C'est donc par voie d'opération logique, en concluant du
général au particulier, que les normes peuvent se déduire l'une de l'autre.

        A cette hiérarchie statique, Kelsen oppose un système dynamique dans lequel une norme n'est pas
valable parce qu'elle a un certain contenu mais parce qu'elle a été créée conformément à ce que
prescrit une norme supérieure, jusqu'à la norme fondamentale supposée qui ne contient rien d'autre que
« l'habilitation d'une autorité créatrice de normes » (13). Dans un tel système, les seuls contrôles de
validité auxquels les normes sont susceptibles d'être soumises portent sur le respect de leur procédure
de création puisque « n'importe quel contenu peut être droit » (14). En cas de contrariété, peut alors
être constatée la nullité de la norme (15), c'est-à-dire son inexistence en tant que telle (16). Mais dès
l'instant que ses conditions de création ont été respectées, sa validité ne saurait, en principe, être
contestée alors même que son contenu se révélerait contraire à celui prescrit par une norme de niveau
supérieur. La pensée kelsénienne conduit ainsi à opérer une distinction fondamentale entre validité et
conformité (17) de laquelle il résulte qu'une norme valable, au sens où les conditions qui règlent sa
production ont été respectées, peut très bien n'être pas conforme au contenu que prescrivent les normes
de degré supérieur.

        L'insigne mérite de cette proposition est de préserver la cohérence de la hiérarchie des normes
malgré la contrariété de fond d'une norme avec les degrés supérieurs de l'ordre juridique, la validité
n'impliquant pas la conformité. Dans cette perspective, il paraît quelque peu difficile d'imputer au
succès du normativisme l'accroissement des contrôles que connaît notre droit positif, lesquels
s'intéressent essentiellement à la conformité matérielle des normes. L'analyse peut toutefois sembler
bien insuffisante à ceux qui recherchent dans l'organisation hiérarchisée des normes une cohérence
substantielle. Or c'est bien ainsi qu'est généralement comprise la hiérarchie des normes et c'est la
raison pour laquelle le mouvement normativiste a indirectement engendré cette inflation des contrôles.

        3. Il est vrai que la théorie pure de Kelsen pouvait paraître sur ce point bien décevante et que,
séduits par la représentation pyramidale de l'ordre juridique, les juristes ont pu avoir la tentation de
l'adapter (18). En séparant les normes de leur contenu, en leur reconnaissant une existence juridique
indépendamment de tout jugement de valeur, elle conduit à « détacher le droit de la société nourricière
» (19) et s'installe, en définitive, « à côté du droit » et du raisonnement juridique (20). Cette neutralité
tant critiquée du kelsénisme conduit des auteurs à n'y voir « qu'une théorie, et non une philosophie du
droit » (21). Mais il est également vrai que cette théorie comprend des nuances que les synthèses et le
temps ont eu parfois tendance à gommer. Ainsi le maître autrichien envisage-t-il assez largement la
possibilité « qu'un seul et même système de normes combine le principe statique et le principe
dynamique » de telle sorte que si les « ordres juridiques ont pour l'essentiel un caractère dynamique »,
il est fréquent qu'une norme règle à la fois la création et le contenu des normes subordonnées (22).
Dans cette perspective, la validité ne tient plus seulement au respect de la procédure d'édiction mais
également à une correspondance de fond. Ainsi la théorie kelsénienne apparaît-elle déjà plus
directement à l'origine des nombreux contrôles de conformité.

        Allant plus loin, certains auteurs soutiennent que le prétendu système dynamique s'avère
incompatible avec la notion même de « système » (23) ou que la hiérarchie qu'il est censé décrire n'est
pas « à proprement parler une hiérarchie des normes » (24) ; seule établit une véritable relation de
norme à norme et constitue par conséquent une « vraie hiérarchie de normes » ce que Kelsen appelle la
« hiérarchie statique » (25). D'autres auteurs ajoutent qu'un système juridique ne saurait être ni
purement dynamique ni purement statique mais présente nécessairement une « dualité » (26) ou un
caractère « mixte » (27) dans la mesure notamment où « toutes les décisions sont toujours justifiées à
la fois par leur conformité au contenu d'un autre énoncé et par l'habilitation conférée à leur auteur »
(28). Le fait est que la hiérarchie des normes qu'exprime le droit positif français, reflet d'une hiérarchie
des autorités publiques (29), évoque au moins autant le système statique que le schéma dynamique
(30).

        Ce n'est qu'ainsi comprise et adaptée que la théorie normativiste de Kelsen a pu favoriser le
développement des contrôles de conformité. Imprimant dans les esprits l'image pyramidale parfaite
d'un ordre juridique tout entier prévisible parce que déductible (31), sans contradiction ni lacune (32),
elle a ainsi renforcé le besoin collectivement ressenti de soumettre les normes à un contrôle matériel
(33).

        4. La manifestation la plus éclatante de cette conception de l'ordre juridique et de son articulation
est sans aucun doute l'institution par la Ve République et le développement d'un contrôle de
constitutionnalité (34). La Constitution apparaît comme la norme juridique supérieure de laquelle
découlent toutes les autres sources de droit au point que la loi votée par le Parlement n'exprime plus la
volonté générale que dans son respect (35).

        Ce « principe de constitutionnalité », ainsi que l'a défini un auteur (36), implicitement né en 1958,
consacré en 1971 par le Conseil constitutionnel (37) puis renforcé par la révision de 1974 (38), se
combine désormais avec le traditionnel principe de légalité pour former ce que l'on peut désigner plus
généralement par « principe de normativité » (39). L'Etat de droit qui en découle impose donc une
hiérarchie des normes non plus seulement formelle et procédurale mais également substantielle (40) et
requiert la mise en place des contrôles destinés à en garantir le respect. L'exigence d'unité de l'ordre
juridique n'est en effet satisfaite que si « le juge peut éliminer de celui-ci, quelle que soit son origine,
toute norme déviante par rapport à la hiérarchie normative » (41).

        5. Le Conseil constitutionnel, initialement destiné à protéger le gouvernement contre les


empiétements du Parlement, s'est ainsi transformé en garant des droits de l'homme et en défenseur des
minorités contre les abus de la majorité gouvernementale. Depuis 1985, il accepte même d'étendre son
contrôle à une loi déjà promulguée lorsque sont soumises à son examen des dispositions législatives
qui « la modifient, la complètent ou affectent son domaine » (42). En refusant, toutefois, par une
célèbre et controversée décision de 1975 (43), de procéder au contrôle de conventionnalité des lois, il a
implicitement délégué cette tâche aux juridictions ordinaires, lesquelles s'en saisiront successivement
dans les arrêts Jacques Vabre (44) et Nicolo (45), développant une jurisprudence protectrice des droits
et libertés fondamentaux face à un Parlement dont le rôle et l'autorité ne cessent de s'affaiblir.

        Pour contourner l'interdiction qui lui est faite de vérifier la compatibilité des lois à la
Constitution, le Conseil d'Etat a par ailleurs développé une théorie dite de « l'écran transparent » par
laquelle il considère que, dans certains cas, les dispositions de la loi qui fait écran entre l'acte
administratif et la Constitution sont suffisamment générales pour être considérées comme «
transparentes » et ne constituer aucun obstacle au contrôle de constitutionnalité d'un décret (46).
Ajoutant aux normes de référence sous l'impulsion de la jurisprudence communautaire (47), la Haute
juridiction administrative accepte désormais de reconnaître la primauté des règlements (48) et des
directives communautaires (49) sur la loi nationale même postérieure (50).

        S'organisent ainsi des contrôles accrus aux différents échelons de l'ordre hiérarchique dont l'effet
paradoxal est de mettre en lumière - parfois même de créer - des phénomènes de désordre.

        6. L'incertitude entoure, par exemple, les conséquences à tirer, au regard de la hiérarchie des
normes, de la déclaration d'inconstitutionnalité par le Conseil constitutionnel d'une loi promulguée
depuis plus de 14 ans (51). De la même manière cherche-t-on en vain à expliquer comment une loi
ayant passé avec succès l'examen préalable de constitutionnalité pourrait être ultérieurement jugée
contraire à une convention internationale elle-même déclarée conforme à la Constitution (52). Que
penser des actes réglementaires qui, faute d'avoir fait l'objet d'un recours en annulation pour excès de
pouvoir dans les deux mois suivant leur publication, s'imposent aux administrés sauf, pour les plus
audacieux d'entre eux, à prendre le risque d'opposer à l'Administration une exception d'illégalité ?
Comment appréhender les lois qui, faute de saisine préalable du Conseil constitutionnel, sont revêtues
d'une force obligatoire que leur inconstitutionnalité, sinon manifeste, du moins probable, devrait
théoriquement remettre en cause ?

        7. De ces quelques illustrations ressort le sentiment d'une hiérarchie des normes marquée du
sceau de la contradiction. Tandis qu'est régulièrement soulignée son ineffectivité (53) et, dans le
prolongement, parfois dénoncée son existence (54), force est dans le même temps d'observer que son
respect ne cesse de se développer au point de devenir l'enjeu d'une lutte de pouvoir.

        En écho à cette réalité contrastée, la doctrine est divisée sur l'analyse qu'il convient d'en faire. Si
certains auteurs, sensibles au parfum d'éternité qu'exhale l'architecture pyramidale, défendent la
permanence (55) et soulignent tant la nécessité que la vigueur du modèle hiérarchique (56), d'autres
annoncent le déclin du modèle kelsénien que les théoriciens du droit proposent de remplacer par des
systèmes complexes reposant sur le pluralisme juridique (57).

        Il serait sans doute tentant de voir dans cette lecture contrastée la énième manifestation d'une
vieille querelle entre les doctrines positiviste et idéaliste, chacune s'efforçant de retrouver dans les faits
les arguments qu'elle ne parvient à imposer définitivement à l'autre. Insuffisamment respectée pour les
uns, trop sollicitée pour les autres, la hiérarchie des normes prend ainsi le masque de Janus, dieu
romain aux deux visages opposés. Mais il est permis de rechercher une interprétation plus conciliante
du phénomène. Menacée d'un côté, vivifiée de l'autre, la même hiérarchie ne saurait subir
simultanément deux influences contraires ayant, au fond, une origine commune. Aussi est-il permis
d'avancer une hypothèse.

        8. Ce qui est aujourd'hui remis en cause n'est pas tant la hiérarchie en elle-même qu'une certaine
conception de celle-ci. Si déclin il y a, celui-ci n'affecte que la systématicité de la hiérarchie, non sa
valeur opératoire qui reste effective. Mais ce déclin traduit dans le même temps un malaise plus
profond en ce qu'il touche aux fondements mêmes du droit. Il exprime en effet la condamnation d'une
conception entièrement hiérarchisée de l'ordre juridique. L'échec est celui d'une construction
intellectuelle fondée sur le rationalisme constructiviste qui prétend réduire le phénomène juridique à
une cascade de raisonnements déductifs développés sous l'autorité omnisciente et omnipotente de
l'Etat.

        Cet échec du système hiérarchique n'empêche nullement la hiérarchie des normes d'être de plus
en plus sollicitée. Seulement son intervention n'a plus pour objet d'aligner le droit positif sur une
théorie pure inapplicable mais tend uniquement à trancher des conflits de normes.

        La hiérarchie des normes a dès lors changé de nature ou, plus justement sans doute, dévoile sa
véritable nature. Elle n'est plus le fondement de l'ordre juridique assurant la liaison cohérente des
règles les unes aux autres mais constitue, plus modestement, un simple mode parmi d'autres de
résolution des conflits de normes. De système, elle est devenue principe. En tant que système (58), la
hiérarchie des normes est condamnée par son ineffectivité. En tant que principe (59), elle est au
contraire renforcée par le développement des contrôles de conformité qui en assurent le respect. Son
éventuelle mise à l'écart n'apparaît plus comme une entorse à l'ordonnancement juridique mais procède
uniquement de la préférence accordée ponctuellement à d'autres principes concurrents.

        L'échec du système hiérarchique (I) invite donc à s'interroger sur l'essor d'un principe
hiérarchique (II).

I. - L'ECHEC DU SYSTEME HIERARCHIQUE


        9. Soutenir l'échec du système juridique fondé sur la hiérarchie des normes peut surprendre tant la
vigueur de cette hiérarchie semble affirmée en doctrine, en jurisprudence et jusque dans la législation
récente. Quelques illustrations suffisent à s'en convaincre.

        En jurisprudence, tout d'abord, c'est bien parce que l'article 55 de la Constitution affirme la
suprématie du traité sur la loi que les juges acceptent d'écarter la seconde pour faire prévaloir le
premier. Si le juge est également tenu d'interpréter le droit national « à la lumière du contenu des
directives non encore transposées », c'est probablement en raison de la supériorité de celles-ci, ce qui
conduit un auteur à les qualifier de « quasi-sources de droit » (60). Enfin, c'est aussi pour se conformer
aux « exigences inhérentes à la hiérarchie des normes » que le juge peut décider de laisser
inappliquées des dispositions législatives incompatibles avec les objectifs d'une directive
communautaire (61).

        A cette consécration jurisprudentielle, la loi a ensuite apporté son renfort. Pour la première fois,
semble-t-il, un texte législatif reconnaît expressément l'existence d'une hiérarchie des normes à
laquelle des codificateurs « à droit constant » sont invités à se référer pour apporter, le cas échéant,
aux dispositions en vigueur les « modifications » qu'impose son respect (62). Faut-il déduire de cette
possibilité de « modification à droit constant » (63) qu'une révision des textes existants en vue
d'assurer leur conformité avec les degrés supérieurs de l'ordre juridique n'emporte aucune modification
substantielle du droit tant il serait acquis qu'aucune disposition non conforme à celles qui lui sont
supérieures n'est susceptible de s'appliquer ? Illusions de la codification à droit constant (64) ou mythe
d'un ordre hiérarchique infaillible ? Les deux sans doute...

        Il faut se garder d'accorder trop de crédit à une théorie dont le pouvoir de séduction tient à une
simplicité trompeuse. Le système pyramidal des normes ne doit son succès qu'au syncrétisme et la
simplification excessive dont il est l'objet. Pour peu que l'on s'interroge sur son contenu, à travers ses
composantes normatives et leur agencement, surgissent d'innombrables difficultés (65) attestant des
incertitudes (A) et du désordre (B) que cette théorie s'avère incapable de résoudre.

A. - Les incertitudes

        10. Les incertitudes proviennent, pour l'essentiel, du pluralisme des sources de droit dont le
développement perturbe le contenu de la hiérarchie des normes autant que son ordonnancement. Du
sommet à la base de la pyramide tendent à s'infiltrer des normes dont la formation échappe, en tout ou
partie, à la médiation étatique, remettant en cause le postulat du positivisme légaliste sur lequel est
encore largement conçue la théorie contemporaine des sources du droit (66). Est ainsi marquée du
sceau de l'incertitude la place qu'il convient d'assigner à de nombreuses normes dans l'architecture
pyramidale, qu'elles émanent de manière prévisible de sources non écrites (1) ou proviennent de façon
plus surprenante de sources écrites (2).

        11. 1) L'écrit a cessé d'apparaître comme une condition essentielle de la normativité (67) sans
que, pour autant, soit clairement définie la place des sources non écrites de droit. Le rang auquel
s'insèrent la coutume, les principes généraux du droit et la jurisprudence dans l'échelle des normes ne
cesse d'interroger, attestant au minimum du caractère inachevé de la pyramide (68).

        - Le droit coutumier a-t-il sa place dans l'échelle des normes (69) ? Dans l'affirmative, peut-on lui
reconnaître une valeur supra-législative et admettre, en conséquence, la validité de la coutume contra
legem ? Si des distinctions sont généralement retenues selon, d'une part, le rayonnement de la règle
coutumière - internationale (70), constitutionnelle (71), commerciale (72), sociale (73), administrative
(74)... - et, d'autre part, l'autorité supplétive ou impérative de la loi à laquelle la première entend
déroger, la réponse demeure souvent incertaine et toujours débattue (75). Elle varie, en particulier,
selon qu'est privilégiée une théorie des sources du droit procédant du positivisme étatique - lequel,
interdisant toute production normative en dehors d'une autorisation de l'Etat, ne saurait tolérer une
coutume contraire à la loi - ou admettant au contraire le pluralisme juridique (76).

        - Dans le prolongement, l'interrogation est permise sur l'existence de principes généraux
contraires à la loi. La perplexité règne le plus souvent sur la solution à retenir (77) tant la nature de ces
principes demeure elle-même mystérieuse (78). Un auteur a toutefois récemment démontré non
seulement que les principes contra legem sont une réalité du droit positif mais que la nature même du
principe le porte à entrer en conflit avec les normes dont il « stérilise l'impératif juridique » (79), ce
qui le situe en-dehors de la pyramide normative.

        Plus fréquemment toutefois, la doctrine se contente d'invoquer, en guise de solution commode,


une subtile distinction entre les principes généraux à valeur législative et les principes fondamentaux à
valeur constitutionnelle (80). Mais ce clivage incertain posé, le débat rebondit sur l'autorité chargée de
proclamer ces derniers : le Conseil d'Etat et la Cour de cassation peuvent-ils dégager de nouveaux
principes fondamentaux reconnus par les lois de la République non proclamés par le Conseil
constitutionnel ? Si l'arrêt Koné rendu le 3 juillet 1996 indique la position du juge administratif (81), il
faudra encore patienter avant de connaître celle du juge judiciaire (82). Une telle pluralité des sources
constitutionnelles présente l'inconvénient majeur de menacer l'unité de l'ordre juridique et de perturber
la cohérence de la hiérarchie des normes. Si le juge constitutionnel ne confirme pas la solution du
Conseil d'Etat, il paraît en effet difficile de reconnaître une pleine valeur constitutionnelle au principe
dégagé par ce dernier. Au mieux ce principe relève-t-il d'un échelon intermédiaire, supra-
conventionnel mais infra-constitutionnel, à la condition toutefois que les juridictions de l'ordre
judiciaire acceptent, elles aussi, de le reconnaître. Face à de telles incertitudes, il n'est que de souhaiter
l'institution d'un « tribunal des conflits constitutionnels » (83) dont la fonction pourrait être assurée par
le Conseil constitutionnel érigé en « organe régulateur des juridictions ordinaires » (84) par le biais,
notamment, de la création d'une exception d'inconstitutionnalité.

        - Enfin, la reconnaissance controversée de la jurisprudence comme source de droit tend à occulter
la question de son niveau hiérarchique. Si l'on a pu reconnaître une valeur « infralégislative et
supradécrétale » aux décisions du Conseil d'Etat (85) et une valeur « supra-législative mais infra-
constitutionnelle » à celles du Conseil constitutionnel (86), il est permis de s'interroger sur l'utilité et
l'effectivité de telles distinctions. Lorsque le Conseil d'Etat dégage un principe fondamental reconnu
par les lois de la République, est-il encore vrai que ses arrêts n'ont qu'une valeur infra-législative ?
Bien que l'autorité reconnue aux décisions du Conseil constitutionnel par l'article 62 de la Constitution
« s'attache non seulement à leur dispositif mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire et en
constituent le fondement même » (87), peut-on réellement reconnaître la même valeur aux réserves
d'interprétation qu'il formule alors qu'il ne dispose d'aucun moyen pour en imposer le respect aux
autres juges (88) ?

        Plus simplement, certains auteurs font remarquer que la jurisprudence s'incorpore à la norme
écrite qu'elle interprète (89), si bien que, faisant corps avec celle-ci, elle en acquiert l'autorité à la
manière des lois interprétatives (90). Particulièrement éclairante des droits européen et
communautaire, cette explication devient inopérante lorsque les décisions sont rendues sans le soutien
d'aucun texte. Le problème revient alors, pour l'essentiel, à celui intéressant les principes généraux :
leur nature, leur valeur. L'explication conduit à une impasse. Pour en sortir, peut-être conviendrait-il
de renoncer à une perception stratifiée du droit pour appréhender l'essence de l'activité judiciaire, non
en termes de concurrence vis-à-vis des sources formelles de droit, mais en termes de
complémentarité : « le juge est la parole vivante du droit » (91), il assure sa réalisation (92) en
exerçant une fonction d'intermédiaire entre des propositions abstraites et leur application concrète
(93).

        Une passerelle peut être tendue entre les sources non écrites et les sources écrites du droit, reliant
d'une part, la jurisprudence et, d'autre part, les circulaires et réponses ministérielles, dans leur qualité
commune de sources interprétatives (94). Il ressort de la comparaison que l'interprétation
administrative précède toujours son équivalent jurisprudentiel, ce qui lui assure une certaine primauté,
mais que le juge peut ultérieurement la combattre en ne la retenant pas (95). Convient-il d'en déduire
la suprématie, dans l'échelle des sources, de la jurisprudence sur les réponses ministérielles ? La
réponse, au demeurant sans réel intérêt pratique, varie dans le temps et selon que la rivalité est étudiée
à l'occasion d'un procès individuel ou de manière plus générale (96). Elle démontre, s'il en était besoin,
que les difficultés de hiérarchisation n'intéressent pas les seules sources non écrites du droit.

        12. 2) Parmi les sources écrites, en effet, subsistent de multiples interrogations. On relèvera
notamment que certains actes normatifs s'insèrent avec difficulté dans la hiérarchie des normes au
motif, soit qu'ils échappent à tout contrôle, soit qu'ils sont considérés comme inapplicables dans l'ordre
interne.

        - Il s'agit, en premier lieu, des actes de gouvernement dont le Conseil d'Etat refuse d'apprécier la
légalité en raison du fort potentiel politique qui les imprègne. Doivent-ils être placés au-dessus de la
Constitution puisqu'ils peuvent la méconnaître ou faut-il les exclure de la hiérarchie dans la mesure où
aucun rang spécifique ne leur est réservé ? Bien que le domaine de ces actes tende à se réduire (97), il
persiste (98) et le problème demeure. Peut-être la solution viendra-t-elle de la Convention européenne
des droits de l'homme à l'aune de laquelle une telle immunité juridictionnelle apparaît critiquable (99).
L'exigence d'un « droit au juge » tout autant que l'idée de l'« Etat de droit » pourraient bien avoir
raison de la théorie des actes de gouvernement, ce qui est parfois regretté (100).

        - Il est, en second lieu, difficile de définir la valeur dans l'ordre juridique interne d'un traité
international ne respectant pas l'exigence de réciprocité formulée à l'article 55 de la Constitution. A
s'en tenir à la lettre du texte (101), il conviendrait de priver simplement le traité de sa supériorité sur la
loi. Conserve-t-il pour autant une valeur législative, de sorte qu'un acte réglementaire devrait
néanmoins s'y conformer ? Ainsi que l'a justement observé un auteur, « il est difficile d'imaginer la
France appliquant, même comme une loi, une convention bilatérale à haute teneur synallagmatique
que l'autre partie n'applique pas » (102). Aussi est-il raisonnable d'admettre, au-delà du texte et de la
jurisprudence constitutionnelle, qu'un tel engagement international devient « inapplicable » dans
l'ordre interne (103), ce qui est une façon élégante de l'exclure de la hiérarchie des normes. Reste que,
pour l'instant, les juridictions judiciaires et administratives refusent de contrôler la condition de
réciprocité. Mais pour combien de temps encore (104) ?

        13. Si l'appartenance de telle ou telle norme au système juridique nourrit parfois la discussion, il
en est de même de l'existence d'une hiérarchie entre certaines normes écrites. Ainsi en est-il
spécialement de celles situées au sommet de la pyramide. L'extension du « bloc de constitutionnalité »
et la résolution par le Conseil constitutionnel des antinomies entre les principes qu'il contient ont en
effet conduit des auteurs à proposer l'existence d'une hiérarchie matérielle des normes
constitutionnelles (105) et, plus généralement, des droits de l'homme (106), dont la configuration
demeure encore incertaine (107). Multipliant les niveaux, certains suggèrent même la reconnaissance
d'une valeur supra-constitutionnelle aux normes les plus fondamentales - telles que les principes de
souveraineté nationale, d'unité de l'Etat, de la nationalité comme condition de la citoyenneté ou encore
la Déclaration de 1789 - dont le respect s'imposerait ainsi au pouvoir constituant lui-même. La
question alimente la controverse (108), à l'instar naguère de la supra-légalité (109), et le Conseil
constitutionnel ne contribue pas à sa clarification (110).

        14. Enfin, ne saurait être éludée l'épineuse question du sommet ultime de la hiérarchie. Faut-il
adhérer au postulat normativiste tant critiqué d'une « norme fondamentale hypothétique » (111), vide
de tout contenu et n'offrant en définitive qu'une illusion, celle d'un « fondement sans fondement »
(112) ? A ce « sophisme de type majeur » (113), certains préféreront sans doute rechercher dans les
doctrines idéalistes les fondements du droit positif, interroger la « loi éternelle » exprimant, selon
Saint Thomas d'Aquin, la « raison divine » présente dans l'ordre naturel (114) ou tenter de découvrir,
dans le prolongement des travaux des représentants de l'Ecole du droit de la nature et des gens, un
droit naturel rationnel et laïcisé. Mais quelle que soit l'option retenue, il est probable que le dernier
étage de la pyramide demeure encore longtemps recouvert d'une aura de mystère.

        15. Espère-t-on découvrir à la base de la hiérarchie l'ordre qui ne règne pas en son sommet ? Cet
espoir est de courte durée à peine s'attarde-t-on sur les conditions de la juridicité.

        - Au titre des velléités peut être rangé le décret du 28 novembre 1983 (115) dont le renfort n'a
permis aux circulaires et instructions interprétatives, ni d'acquérir la valeur d'un acte réglementaire
(116), ni même de devenir effectivement opposables à l'administration (117). Par où l'on voit que la
juridicité ne découle pas automatiquement d'un acte de volonté de l'Etat, en particulier lorsque la
validité de cet acte est elle-même contestable. En revanche, bien qu'elles n'ajoutent pas davantage à
l'ordonnancement juridique (118) et qu'elles ne modifient pas, par elles-mêmes, la situation juridique
des administrés, les directives de l'administration destinées seulement à orienter les décisions
individuelles paraissent investies d'une « certaine valeur juridique, infra-réglementaire mais supérieure
à la circulaire interprétative » (119), du fait de leur opposabilité reconnue tant à l'égard des administrés
que de l'administration.

        - A l'opposé de ce droit mou, parce que dépourvu de véritable force contraignante (120), se
dressent des actes émanant d'organisations patronales à l'attention de leurs adhérents, dont les «
recommandations » s'imposent à ces derniers en vertu d'une alchimie dont la chambre sociale de la
Cour de cassation conserve encore le secret (121). Le particularisme des sources en droit du travail a
beau être invoqué afin, sinon d'expliquer, du moins de légitimer le caractère nécessairement
obligatoire de la recommandation patronale, il n'en demeure pas moins qu'un engagement unilatéral
qui oblige autrui s'apparente davantage à l'expression d'un pouvoir réglementaire de droit privé (122)
nécessairement fondé sur une convention d'habilitation consentie par les membres du groupement
(123), acte sur la réalité duquel il est permis, en l'espèce, d'émettre un doute. De façon moins critique,
l'on décèlera dans cette jurisprudence « créatrice » (124) une illustration supplémentaire des liens
étroits qu'entretiennent, spécialement en droit du travail, le contrat et le statut, le conventionnel et le
réglementaire, et de la manière dont l'exercice des droits subjectifs donne naissance à des normes de
droit positif, de droit objectif (125). Apparaissent en filigrane les traits d'une évolution vers un « droit
négocié » (126) dans lequel la règle, élaborée en concertation avec ses destinataires (127), commande
finalement moins qu'elle ne concilie - ou cherche à le faire...

        - Ce passage d'un droit imposé à un droit consenti provoque en retour un foisonnement des
sources informelles (128) dont témoigne l'inflation des avis (129), recommandations et autres
communiqués (130), constituant autant de sondages institutionnels d'opinions autorisées (131) qu'il
faut probablement se résoudre, malgré leur autorité de fait souvent grande (132), à classer à un rang «
infra-hiérarchique » (133).
        Au même niveau s'inscrit ce qu'il est désormais convenu d'appeler le droit savant, c'est-à-dire un
droit élaboré par des experts qui n'ont ni pour mission, ni pour fonction de dire le droit et dont la
normativité procède de la volonté de ses destinataires de s'y soumettre. Ainsi en est-il notamment, au
plan international, des récents Principes relatifs aux contrats du commerce international élaborés sous
l'égide de l'Institut international pour l'unification du droit privé (UNIDROIT) (134) et, au plan
communautaire, des Principes du droit européen du contrat conçus par la Commission pour le droit
européen du contrat présidée par le Professeur Ole Lando (135). S'ils ne disposent par eux-mêmes
d'aucune force contraignante, étant « plus incitatifs que normatifs » (136), leur autorité morale voire «
virtuelle » (137) les destine pourtant à servir de guide, de « modèle », aux législateurs nationaux,
européens et internationaux en matière contractuelle. C'est dans cette perspective que sous l'impulsion
du Parlement européen (138) se développe l'idée d'un futur code européen des obligations (139) dont
on ne sait encore avec certitude (140) s'il nous promet, dans un esprit de synthèse et de simplification,
la renaissance tant espérée d'un jus commune ou annonce au contraire, faute de compromis satisfaisant,
une superposition de règles (141) dont l'effet sera d'accroître, au nom du pluralisme juridique, la
complexité du droit et, en définitive, de conforter le « mythe du législateur suprême » (142).

        16. Que la hiérarchie des normes ignore de telles dispositions « non normatives » ne saurait, dans
une conception du droit marquée par le positivisme légaliste, appeler la moindre critique. Reste que
cette ignorance justifie les réserves de ceux qu'une théorie des sources du droit purement formelles
laisse insatisfaits. Plus réaliste - mais aussi plus complexe - serait sans doute la prise en considération
de ces forces créatrices du droit (143) dans le cadre d'une théorie des sources substantielles qui, pour
une large part, reste à construire. Ainsi seulement pourraient être dissipées les incertitudes entourant
l'insertion et la localisation de foyers de droit dans l'ordonnancement juridique. Mais le succès de cette
entreprise ambitieuse supposerait que soit mené en parallèle un effort de remise en ordre de la
hiérarchie, seul moyen d'en restaurer la pertinence, tant se multiplient les illustrations d'un désordre en
son sein.

B. - Le désordre

        17. Il serait bien audacieux - et tout aussi inutile - de prétendre opérer un recensement exhaustif
des causes de désordre dans la hiérarchie des normes. Encore faudrait-il que celle-ci soit clairement
définie à l'origine et qu'aucune des parcelles du vaste champ d'investigation qui s'ouvre à la réflexion
n'échappe à la connaissance de celui qui, à travers ces lignes, propose de l'étudier. Le souci de
réalisme et d'efficacité nous conduit donc à limiter cet exposé à quelques-unes des manifestations les
plus significatives de ce désordre.

        Fondée sur une idéologie marquée par le positivisme étatique, la conception française de la
hiérarchie des normes se heurte à deux séries de difficultés dont il peut être rendu compte à travers
deux angles d'analyse complémentaires.

        Le premier, horizontal, met en lumière l'étroitesse d'un système juridique appelé à coexister avec
des ordres juridiques concurrents possédant leur propre hiérarchie des normes. Confrontée au
pluralisme des ordres et à leur délicate articulation, l'échelle interne des normes subit ainsi des causes
exogènes de désordre (1). A celles-ci s'ajoutent des causes endogènes tenant pour l'essentiel à
l'insuffisance des contrôles, qui mettent en lumière l'ineffectivité de la hiérarchie des normes et
détruisent sa cohérence verticale (2).

1. Le pluralisme des ordres


        18. Le système juridique moderne repose sur une conception moniste des sources du droit dans
laquelle l'Etat constitue l'unique « foyer de droit » et la source exclusive de la normativité (144).
Concentrant l'ensemble des pouvoirs de production et d'application du droit, l'Etat entend non
seulement contrôler l'appartenance d'une norme à l'ordre juridique mais également déterminer le rang
hiérarchique qui lui est dévolu. Un bref aperçu du droit positif suffit à se convaincre des nuances que
le pluralisme impose à cette perception hiératique du système juridique, qu'il s'agisse du pluralisme
des sources (145) ou de son prolongement à certains ordres juridiques.

        Aussi apparaît-il que l'une des causes majeures du désordre affectant l'organisation hiérarchique
des normes tient à la position incertaine qu'occupe le système juridique français face aux ordres
international et communautaire. Entre une conception purement moniste fondée sur l'idée kelsénienne
que « personne ne peut servir deux maîtres » (146) et une conception pluraliste admettant la
coexistence simultanée de plusieurs ordres juridiques (147), l'on sait que le système juridique français
a résolument opté pour la première depuis 1946 (148). Or, contrairement à ce qui est parfois soutenu,
ce choix ne permet pas d'assurer une coordination des ordres garantissant l'unité du système juridique.
Chacun d'entre eux revendiquant sa primauté sur les autres, bien improbable apparaît la perspective
d'une conciliation (149). Confirmation de cette crainte ressort de l'examen des relations qu'entretient le
droit français avec le droit international (a) et le droit communautaire (b).

        19. a) Le droit international ne s'insère dans l'ordre juridique interne qu'à la condition d'y avoir
été introduit, sans réception ni transformation, conformément à la procédure que prescrit la
Constitution. Selon le système moniste auquel prétend appartenir la France, droit interne et droit
international ne sont pas d'essence différente mais au traité est reconnu une autorité supérieure à la loi.
La ratification ne dénaturant pas la norme internationale, une loi nouvelle, hiérarchiquement
subordonnée au traité, ne saurait le remettre en cause. A l'opposé de cette conception prévaut le
système dualiste, en vigueur notamment aux Etats-Unis, Royaume-Uni, Japon, Italie, et Allemagne,
selon lequel il existe une différence essentielle entre le droit international et le droit interne. Le
premier n'acquiert de valeur, dans l'ordre interne, qu'à la condition d'y avoir été introduit par un acte
qui en assure la réception et la transformation. La norme internationale devient une norme interne, si
bien qu'une loi nouvelle nationale peut en principe abroger la loi ancienne qu'était devenu le traité
après sa réception (150).

        Le point de vue internationaliste n'est relayé par aucun des systèmes nationaux examinés. Il
postule la suprématie du droit international sur toutes les dispositions de droit interne, même de nature
constitutionnelle : « un Etat ne saurait invoquer vis-à-vis d'un autre Etat sa propre Constitution pour se
soustraire aux obligations que lui imposent le droit international » (151). Une telle conception de
l'ordre international paraît en effet inéluctable. Admettre qu'un Etat puisse se prévaloir d'une norme
interne pour se dispenser d'exécuter un engagement international auquel il a souscrit serait
méconnaître le principe pacta sunt servanda qui est à la base du droit international.

        Ce bref aperçu des différents points de vue en présence suffit à mettre en lumière les
contradictions qui président, de manière générale, à l'articulation du droit interne et du droit
international (152). A celles-ci s'ajoutent des difficultés propres au système juridique français.

        Fidèle au principe d'unité de l'ordre juridique, le droit français détermine non seulement les
conditions auxquelles s'insèrent les normes internationales en droit interne mais également l'autorité
hiérarchique qu'il convient de leur reconnaître. Or, en attribuant aux traités et accords internationaux
régulièrement ratifiés ou approuvés une valeur supra-législative mais infra-constitutionnelle, les textes
constitutionnels comme la jurisprudence contredisent la primauté du droit international.
        20. D'une part, la prééminence de la norme internationale sur les lois ne présente pas un caractère
absolu. Si l'article 55 de la Constitution confère aux traités internationaux régulièrement ratifiés ou
approuvés, sous réserve de réciprocité, une autorité supérieure à celle des lois, cette suprématie ne
bénéficie pas à la coutume internationale. Telle est du moins l'interprétation qui ressort d'un important
arrêt rendu le 6 juin 1997 par le Conseil d'Etat qui a décidé que « ni cet article ni aucune autre
disposition de valeur constitutionnelle ne prescrit ni n'implique que le juge administratif fasse
prévaloir la coutume internationale sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes » (153). Cette
solution, implicitement fondée sur la reconnaissance d'une différence de nature entre la coutume et les
normes de droit écrites visées par l'article 55, en l'occurrence les traités internationaux, pourrait avoir
des prolongements susceptibles d'affecter un peu plus encore la suprématie du droit international. Elle
vient en effet indirectement appuyer une proposition doctrinale audacieuse selon laquelle, en cas de
conflit opposant un traité et une coutume nationale, préférence devrait être donnée à cette dernière au
motif que l'article 55, conçu pour trancher un conflit entre deux droits écrits, n'intéresse pas la
coutume, source autonome de droit (154).

        Bénéficiant d'une suprématie relative à l'égard des règles ayant au moins valeur législative, les
normes internationales sont de surcroît subordonnées à celles de rang constitutionnel. Au regard des
textes, cette soumission résulte principalement des dispositions de l'article 54 de la Constitution (155)
qui impliquent, certes, que la Constitution peut être révisée en considération d'un traité international
mais signifient surtout qu'aucune ratification n'est possible tant que la révision n'a pas été opérée. En
s'opposant ainsi à l'insertion du texte international dans l'ordonnancement juridique national, la
Constitution marque bien sa prééminence dans l'ordre interne.

        21. Cette lecture des textes se trouve, d'autre part, renforcée par la jurisprudence récente tant du
Conseil d'Etat (156) que de la Cour de cassation (157) qui, d'une voix commune, ont affirmé que « la
suprématie conférée aux engagements internationaux ne s'applique pas, dans l'ordre interne, aux
dispositions de valeur constitutionnelle » (158). En d'autres termes, il convient d'admettre que, dans
l'ordre interne, les traités ne sont pas supérieurs à la Constitution, ce qui implique très probablement
qu'ils lui sont subordonnés (159).

        En établissant indirectement la primauté de la Constitution sur le droit international, ces arrêts
contredisent le postulat de celui-ci. Mais en limitant cette suprématie à l'ordre interne, par un discret
emprunt au système dualiste (160), ils admettent que la responsabilité de l'Etat puisse être engagée
dans les conditions du droit international public (161). La dualité des ordres juridiques est-elle pour
autant consacrée ? Rien n'est moins sûr tant il semble impossible de nuancer la théorie d'un ordre
juridique global et nécessairement unique par une « dose », aussi infime soit-elle, de dualisme (162).
La cohérence de la hiérarchie interne des normes en ressort préservée, mais au prix d'une perception
borgne de la réalité (163).

        Observons enfin que la prééminence affirmée dans l'ordre interne de la Constitution sur les
normes internationales apparaissait déjà en filigrane dans la jurisprudence Jacques Vabre de 1975
(164) et Nicolo de 1989 (165). En fondant sur une disposition constitutionnelle la primauté du traité de
Rome sur une loi postérieure, la Cour de cassation puis le Conseil d'Etat avaient implicitement admis
que c'est de la Constitution et d'elle seulement que dépend le rang du droit international (et
communautaire) dans l'ordre juridique interne (166), ce qui implique sa primauté (167). Mais se passer
du soutien textuel de l'article 55 supposait de reconnaître, en tant que telle, la prééminence du droit
communautaire, ce que nos juridictions nationales hésitent encore à admettre.
        22. b) En posant le principe de l'applicabilité directe du droit communautaire dans l'arrêt Van
Gend en Loos, la Cour de justice des Communautés européennes a considéré que « la Communauté
constitue un nouvel ordre juridique de droit international au profit duquel les Etats membres ont
limité, bien que dans des domaines restreints, leurs droits souverains » (168). Le fondement de l'effet
direct doit donc, pour les juges de Luxembourg, être recherché dans la spécificité de l'ordre juridique
communautaire (169).

        Lorsque l'année suivante, dans le tout aussi célèbre arrêt Costa c/ ENEL du 15 juillet 1964 (170),
la Cour proclame le principe de la primauté du droit communautaire, c'est en raisonnant, non pas sur
une hiérarchie entre des normes, les normes d'origine communautaire étant hiérarchiquement
supérieures à celles d'origine nationale, mais en se fondant sur la primauté de l'ordre communautaire
sur l'ordre interne. La décision décrit en effet le droit communautaire comme « un ordre juridique
propre, intégré au système juridique des Etats membres lors de l'entrée en vigueur du traité et qui
s'impose à leurs juridictions » de telle sorte que « le droit né du traité ne pourrait donc, en raison de sa
nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne quel qu'il soit, sans perdre
son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté elle-
même ». La suprématie du droit communautaire est donc celle de l'ordre juridique communautaire,
lequel l'emporte dans son intégralité sur les ordres nationaux et sur toutes les normes de droit interne,
quelle qu'en soit le rang hiérarchique, même constitutionnel (171).

        Un pas de plus semble encore avoir été franchi lorsque, dans l'arrêt Simmenthal du 9 mars 1978
(172), la Cour se réfère à « l'ordre juridique applicable sur le territoire de chacun des Etats membres »
entendu comme l'ordre juridique communautaire intégrant les systèmes nationaux et non plus intégrés
à eux (173).

        Or il faudra attendre 1993 pour que la Cour de cassation reconnaisse expressément le « principe
de primauté du droit communautaire » (174) que le Conseil d'Etat feint encore d'ignorer (175). Pour
accepter de vérifier la conformité au traité de Rome d'une loi nationale postérieure et écarter celle-ci
en cas d'incompatibilité, la Cour de cassation dans l'arrêt Jacques Vabre (176) et le Conseil d'Etat dans
l'arrêt Nicolo se fondent sur une lecture renouvelée de l'article 55 de la Constitution aux termes de
laquelle ce texte « comporte nécessairement, par lui-même, une habilitation donnée implicitement aux
juges à l'effet de contrôler la conformité des lois aux traités » (177). C'est donc encore la Constitution
qui détermine les conditions dans lesquelles s'insère le droit communautaire dans l'ordre juridique
national, contrairement au principe défini par la Cour de Luxembourg.

        Une confirmation de cette contrariété est apportée par le Conseil constitutionnel dans sa décision
Traité de Maastricht du 9 avril 1992 (178). En se référant à plusieurs reprises à l'article 55 de la
Constitution et en considérant que l'ordre juridique communautaire « n'appartient pas à l'ordre
institutionnel de la République française » (§ 34), le Conseil marque en effet clairement sa différence
avec la thèse du caractère spécifique de la Communauté européenne présente dans la jurisprudence
communautaire.

        Le droit constitutionnel refuse ainsi d'opérer une quelconque distinction entre le droit
communautaire et le droit international classique. Il convient sans doute d'y déceler l'expression d'une
résistance du droit français à « l'ordre juridique communautaire » et la volonté de préserver l'intégrité
de l'ordre juridique national (179). Mais cet inévitable conflit opposant la primauté du droit
constitutionnel et celle du droit communautaire (180) provoque une conséquence non négligeable sur
l'agencement interne des normes. Pour reconnaître la supériorité du droit communautaire dérivé sur les
lois nationales, les juridictions nationales, en particulier le Conseil d'Etat, sont obligées d'élever au
rang de traités les règlements et directives communautaires (181).

        C'est en effet dans le seul article 55 de la Constitution que les juges puisent de quoi ériger au-
dessus de la loi le droit international et le droit communautaire, y compris le droit communautaire
dérivé et la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (182). Or qui ne voit le
caractère artificiel et presque anachronique d'un tel raisonnement ? Ainsi que l'a justement observé un
auteur, après avoir tiré les conséquences d'une montée en puissance du processus communautaire en
acceptant de contrôler la conventionnalité des lois, le Conseil d'Etat et la Cour de cassation
s'enferment dans un raisonnement formel qui conduit à nier toute distinction entre un traité
international négocié par les Etats contractants et un acte unilatéral imposé par une autorité à ses
destinataires (183). Et que penser d'un tel syncrétisme lorsque le Conseil constitutionnel tire
précisément argument d'une différence de nature entre les traités internationaux et les actes de droit
communautaire dérivé pour refuser de vérifier la constitutionnalité de ces derniers ? Il y a là un
paradoxe qu'il faudra bien, un jour, élucider.

        23. Force est donc bien d'observer, ce qui n'est guère nouveau, que le système juridique français
ne consacre pas l'exigence de la primauté du droit international et du droit communautaire. Coexistent
plusieurs ordres juridiques et, par conséquent, plusieurs hiérarchies des normes agencées selon des
logiques distinctes rendant, sinon impossible, du moins particulièrement délicate toute tentative
d'imbrication. Sortir du carcan étriqué d'une hiérarchie des normes hermétique aux influences
extérieures est de plus en plus ressenti comme une nécessité. Reste encore à définir les moyens d'y
parvenir. Reste également à assurer la cohérence interne d'une hiérarchie menacée, dans sa pertinence
et son existence, par un phénomène croissant d'ineffectivité.

2. L'ineffectivité de l'ordre

        L'étude du droit positif met en lumière plusieurs manifestations d'ineffectivité de la hiérarchie des
normes, allant de la simple inversion (a) à une véritable incohérence (b).

        24. a) Il se produit une inversion dans la hiérarchie lorsqu'une norme trouve à s'appliquer malgré
sa contrariété à celles de degré supérieur. Deux explications peuvent éclairer l'origine de ce
phénomène : soit il n'existe aucune procédure permettant de constater l'irrégularité, soit cette
procédure existe mais sa mise en oeuvre ou ses effets sont limités dans le temps ou dans l'espace.

        Ainsi n'existe-t-il aucune procédure en droit interne permettant d'apprécier la conformité à la


Constitution du droit communautaire dérivé, lequel bénéficie d'une véritable « immunité
constitutionnelle » (184). Par ailleurs, l'examen de la constitutionnalité des traités et des lois s'inscrit
seulement dans une procédure a priori qui, sauf cas particuliers, demeure facultative. Enfin, tant
l'exception d'illégalité des actes administratifs que l'éviction par le juge de la loi nationale contraire à
un traité ou à un acte communautaire dérivé ne bénéficient qu'au justiciable dont l'audace et la
persévérance se trouvent récompensées.

        De fait, nombreuses sont les normes du système juridique dont la conformité à celles des niveaux
supérieurs est, sinon absente, du moins douteuse. Elles n'en sont pas moins valides et, par ce que l'on a
parfois appelé le « paradoxe de la concrétisation » (185), priment dans leur application celles dont
elles sont pourtant censées tirer leur validité.

        Ces hypothèses d'inversion de l'ordre hiérarchique sont généralement présentées en doctrine


comme interdisant toute conclusion... en termes de hiérarchie des normes. Il est en effet soutenu que
l'application d'une norme, dont le contenu serait présumé être en contradiction avec celui prescrit par
les niveaux supérieurs de l'ordre juridique, n'implique pas sa primauté sur ceux-ci et n'aboutit donc à
aucun renversement de la pyramide. L'explication tiendrait au fait que, en ne prévoyant aucun contrôle
de conformité ou en n'organisant qu'un contrôle limité, les normes de degré supérieur autorisent
l'existence et l'application de normes inférieures pouvant leur être contraires. Du même coup disparaît
ce que des esprits critiques auraient pu analyser comme une contrariété entre deux normes. Il est
toutefois permis de ne pas être totalement convaincu par cette analyse empruntée à Kelsen (186).

        D'une part, il est sans doute un peu trop commode de ne se référer à la hiérarchie des normes que
lorsque son ordre est respecté et conclure à l'absence de toute incidence dans l'hypothèse inverse. De
deux choses l'une en effet : soit la hiérarchie des normes constitue le fondement de l'ordre juridique et
il convient d'en garantir le plus strict respect ; soit elle tolère des situations de désordre qui imposent
d'en relativiser, sinon l'existence, du moins l'autorité. L'ineffectivité de la hiérarchie des normes la
condamne en tant que système juridique. Elle a, de ce point de vue, la « fragilité d'un château de
cartes, puisque l'anomalie remettant en cause l'une des règles menace la tenue de toute la pyramide »
(187).

        D'autre part, le caractère artificiel de l'explication avancée en réduit sensiblement la portée. Est-il
réaliste de prétendre que les autorités investies du pouvoir normatif édictent des normes, lesquelles
sont censées s'imposer aux autorités subordonnées, dont elles autorisent dans le même temps la
violation au prétexte qu'aucune procédure suffisante de contrôle n'est mise en place ? Peut-on
sérieusement soutenir, qu'en l'absence de contrôle adéquat, chaque norme contient à la fois une
exigence à l'attention des normes inférieures et une habilitation à la méconnaissance de cette
exigence ? Toute norme devient-elle simplement « facultative » - « alternative » dirait Kelsen - dès
l'instant que n'est pas assuré son respect aux niveaux inférieurs de la hiérarchie ? Une chose est
l'obligation, une autre est la sanction (188). Réduire à néant le caractère obligatoire d'une norme au
seul motif que ne sont pas mis en place les moyens de son respect semble contraire, sinon à la
définition (189), du moins à la description de la règle de droit et procède, en définitive, d'une inversion
de raisonnement (190).

        En réalité, cette explication tire du droit procédural des conséquences en terme de droit
substantiel qui sont dictées par l'unique dessein de préserver la cohérence d'une hiérarchie des normes
à la fois malmenée dans son agencement et menacée dans son existence. L'argument a la faiblesse des
raisonnements a contrario (191) et la prétention vaine d'une idéologie fondée sur le rationalisme
constructiviste. Imaginer qu'un législateur omniscient adopte une règle et entende, dans le même
temps, permettre sa méconnaissance en dehors des procédures de contrôle qu'il met en place suppose,
d'une part, qu'il soit capable de mesurer l'entière portée des mesures qu'il adopte - et surtout de celles
qu'il n'adopte pas - et, d'autre part, qu'il accepte sciemment de se contredire (192). Or aucune de ces
propositions ne saurait être sérieusement soutenue.

        Dès l'instant que l'on admet l'existence d'un système juridique fondé sur une organisation
hiérarchisée des normes, aucun phénomène d'entropie ne peut être admis sans ruiner la construction
intellectuelle d'ensemble. Une telle hiérarchie serait tout aussi inutile qu'inconcevable. A quoi sert-il
d'expliquer que chaque norme puise sa validité dans sa conformité à celle située au degré supérieur si
cette conformité découle indifféremment du respect comme du non-respect des prescriptions de la
norme habilitante ? La hiérarchie ainsi annoncée n'en est plus une et le système hiérarchique devient
un leurre... sauf à ce que soit assuré à chacun des échelons de la pyramide un contrôle absolu de
conformité. La garantie procédurale du respect de l'ordre hiérarchique devient dès lors la condition
majeure de son maintien. Une conclusion identique s'impose paradoxalement lorsque le désordre ne
provient plus d'une insuffisance mais d'un excès de contrôle. L'inversion dans la hiérarchie fait alors
place à une véritable incohérence.

        25. b) L'ordre hiérarchique devient incohérent lorsqu'une loi, préalablement déclarée conforme à
la Constitution, est par la suite jugée contraire à une convention internationale elle-même
subordonnée, en droit interne, à la Constitution.

        Cette hypothèse (193) allait trouver une illustration remarquable dans l'affaire des « tableaux
d'amortissement » où une loi de validation, s'exerçant à une nouvelle figure législative dite du « grand
écart » (194), avait consacré pour l'avenir une jurisprudence qui frappait de déchéance du droit aux
intérêts les banquiers n'ayant pas remis à l'emprunteur un échéancier des amortissements en même
temps que l'offre préalable mais validé pour le passé les pratiques contraires. Déclarée conforme à la
Constitution par le Conseil constitutionnel ayant estimé la mesure justifiée par un motif d'intérêt
général suffisant (195), cette loi fut ensuite jugée contraire aux dispositions de l'article 6 § 1 de la
Convention européenne des droits de l'homme par certains juges du fond (196). Le résultat aboutissait
donc à la présence dans l'ordonnancement juridique d'une loi à la fois conforme à la Constitution et
contraire à la Convention européenne pourtant conforme à la Constitution. Dans cette perspective, la
hiérarchie des normes devient vite une impossibilité, une énigme, un trompe l'oeil.

        Il convient dans le même temps d'observer que ce contrôle de conventionnalité d'une loi
conforme à la Constitution conduisait les juges du fond à exercer, une nouvelle fois, le même contrôle
de proportionnalité que celui auquel s'était livré avant eux le Conseil constitutionnel, attestant par là
même de la proximité substantielle des droits protégés par les dispositions constitutionnelles et
européennes et de la superposition fréquente des contrôles de constitutionnalité et de conventionnalité
(197).

        Si la Cour de cassation a récemment mis un terme à cette incohérence hiérarchique, estimant que
« l'intervention du législateur, dans l'exercice de sa fonction normative, n'a eu pour objet que de
limiter, pour l'avenir, la portée d'une interprétation jurisprudentielle et non de trancher un litige dans
lequel l'Etat aurait été partie » (198), il n'est pas certain que la Cour européenne des droits de l'homme,
dans l'éventualité où elle serait saisie, tire les mêmes conséquences de ce contrôle de proportionnalité
(199).

        26. L'un des mérites de cette affaire a été de montrer que la multiplication des examens de
conformité - en l'occurrence celui de la conventionnalité des lois exercé par les juges ordinaires -
conduit paradoxalement à mettre l'accent sur leur insuffisance en créant de nouvelles causes de
désordres dans la hiérarchie des normes.

        Ainsi le développement d'un contrôle de conventionnalité des lois promulguées impose-t-il que
soit mis en place un examen a posteriori de constitutionnalité afin de rétablir l'ordre rationnel de la
hiérarchie (200).

        Le contrôle appelle donc le contrôle parce que l'existence du système de hiérarchie des normes
dépend de son effectivité. Il ne saurait tolérer aucun désordre sans risquer de voir son existence remise
en cause. Si toute norme tire effectivement son existence de sa conformité, non seulement formelle
mais également substantielle, à celles qui lui sont supérieures, il convient de se donner les moyens
d'éradiquer toutes celles contraires aux degrés supérieurs de l'ordre juridique (201). Théoriquement
privée de toute autorité, la norme irrégulière doit l'être effectivement.
        27. Le développement d'un tel contrôle généralisé est-il sérieusement envisageable ? Si la
perspective actuelle d'une inflation des procédures de vérification de conformité peut suggérer une
réponse affirmative, force est d'observer qu'aucun système ne permettra de supprimer tout risque de
désordre dans la hiérarchie des normes.

        L'accroissement futur des contrôles de conformité alimente depuis plusieurs années une
discussion soutenue en doctrine, qu'il s'agisse de développer le rôle du Conseil constitutionnel ou des
juridictions ordinaires.

        28. S'agissant du premier, la question est débattue d'un éventuel retour sur la jurisprudence IVG
de 1975 par laquelle le Conseil avait refusé de contrôler la conventionnalité des lois. Partant
généralement d'une critique rigoureuse des arguments présentés au soutien de ce refus et poursuivant
sur les conséquences inopportunes d'un éclatement de ce contrôle entre les juges ordinaires, nombreux
sont les auteurs à souhaiter que le Conseil constitutionnel se ressaisisse de cette attribution (202).
Certains suggèrent même l'institution par voie législative d'une exception d'inconventionnalité calquée
sur le projet avorté d'exception d'inconstitutionnalité devant les juges ordinaires (203).

        Dans une perspective voisine, une réflexion est menée en faveur d'une éventuelle extension au
droit européen du bloc de constitutionnalité (204) et, dans le prolongement, d'un futur contrôle de la
conformité des lois au droit communautaire dérivé (205).

        29. S'agissant des contrôles susceptibles d'être développés par les juridictions ordinaires, la
question majeure intéresse la constitutionnalité des traités et des lois en vigueur dans le prolongement
des arrêts Sarran et Fraisse. Monopole du Conseil constitutionnel lorsqu'il s'exerce a priori, le
contrôle a posteriori pourrait bien prochainement être exercé par les juridictions ordinaires,
transformant l'autorité judiciaire (206) en un véritable pouvoir judiciaire (207) ou, plus largement, en
un pouvoir juridictionnel incluant les juridictions administratives et judiciaires (208). Une telle
évolution fait toutefois l'objet de controverses en doctrine (209) et une préférence semble se dessiner
en faveur de l'institution d'une exception d'inconstitutionnalité restituant ainsi au Conseil
constitutionnel son rôle régulateur (210).

        30. Malgré le développement constaté et envisagé de ces contrôles, la perspective d'un examen
généralisé et cohérent demeure une illusion. La multiplication des contrôles engendre inévitablement
des risques de contradictions d'autant plus insurmontables que s'enchevêtrent sources nationales,
communautaires et internationales. Que l'on songe, par exemple, à la création d'une exception
d'inconstitutionnalité au regard du droit communautaire, tant originaire que dérivé. L'appréciation de
la constitutionnalité des lois en vigueur s'étendra logiquement à celle des traités ratifiés et, par voie de
conséquence, à celle des actes communautaires dérivés (211). Or la primauté du droit communautaire,
affirmée par l'arrêt Costa, doit en principe l'emporter sur toutes les normes nationales quelle qu'en soit
la nature. Force est donc de considérer qu'un contrôle a posteriori de constitutionnalité serait
incompatible avec la primauté du droit communautaire.

        L'existence même d'un système hiérarchique doit être remise en cause faute de pouvoir assurer
parfaitement le respect des exigences de conformité en son sein. Le système hiérarchique est un échec.
Les incertitudes qu'il fait naître et le désordre qui règne en son sein le condamnent. Pourtant, la
hiérarchie des normes reste omniprésente et bien difficile semble la conception d'un ordre juridique
non hiérarchisé. Aussi cette hiérarchie survit-elle mais au prix d'un changement de nature : de système,
elle devient principe.

II. - L'ESSOR D'UN PRINCIPE HIERARCHIQUE


        31. La résolution des conflits de normes en droit interne fait l'objet, dans la pensée juridique
contemporaine, de deux approches différentes dont aucune n'est à l'abri des critiques.

        L'une, dominante, opère une summa divisio entre les conflits selon l'égalité ou l'inégalité
hiérarchique des normes concernées. La concurrence entre des normes de niveaux hiérarchiques
différents se résout ainsi par la priorité donnée à celle située à l'étage le plus élevé. A égalité de niveau
hiérarchique, en revanche, l'interprète trouve à sa disposition plusieurs maximes qui le dispensent de
s'interroger sur les meilleures raisons de décider en faveur de l'une ou de l'autre : specialia generalibus
derogant (212), privatorum conventio juri publico non derogat (213), exceptio est strictissimae
interpretatis (214), lex posterior derogat priori (215).

        Mais de même que toute loi nouvelle n'abroge pas nécessairement la loi plus ancienne (216), que
les exceptions - en supposant qu'elles puissent être définies par rapport aux principes... - ne sont pas
toujours interprétées strictement (217) et ne le doivent sans doute pas (218), les normes supérieures ne
priment pas invariablement celles de niveaux inférieurs, qu'elles expriment un principe ou formulent
une exception, soient d'application générale ou spéciale, postérieures ou antérieures. La distinction
proposée trompe par son apparente simplicité. Nombreuses sont les interférences entre le plan vertical
prétendument hiérarchisé et les plans horizontaux que l'application mécanique de ces quelques
maximes bien définies est censée suffire à ordonner.

        L'autre approche, rarement formalisée mais fréquemment sous-entendue, tempère la distinction


précédente et tend à ramener tout conflit de normes à une question de hiérarchie entre elles.

        Ainsi faudrait-il par exemple considérer que la loi spéciale, dérogeant à la loi générale, lui est
supérieure, de même que la loi ancienne n'est abrogée par la loi nouvelle que parce qu'elle lui est
subordonnée. De la même manière, les exceptions primeraient les principes et l'on pourrait se
demander si les décisions passées en force de chose jugée ne doivent pas être placées au-dessus de la
loi qui ne peut les remettre en cause. Dans le prolongement, il serait permis de s'interroger sur
l'éventuelle supériorité des conventions collectives sur la loi depuis que le Conseil constitutionnel
interdit au législateur, sauf motif d'intérêt général suffisant, de remettre en cause leur contenu sous
peine de méconnaître les dispositions de l'article 4 de la Déclaration de 1789 (219). Il conviendrait
également sans doute de situer le contrat au-dessus de la loi nouvelle dont le caractère d'ordre public
n'est pas suffisamment impérieux pour la rendre immédiatement applicable aux contrat en cours.

        A ces suggestions, dont la liste pourrait être allongée à l'infini, il sera sans doute reproché une
excessive rigidité. Pourtant n'est-ce point à cette tendance, visant à hiérarchiser tout rapport conflictuel
entre des normes, que cède la doctrine qui multiplie les niveaux hiérarchiques intermédiaires et
subdivise à l'excès au sein d'un même niveau ?

        Est-il par exemple nécessaire de créer une hiérarchie entre les normes constitutionnelles pour
résoudre leurs antinomies alors que le Conseil constitutionnel adopte une démarche essentiellement
pragmatique (220) ? A-t-on besoin d'établir une hiérarchie des droits de l'homme pour décider que
certains droits - dits « intangibles » - doivent être privilégiés tandis que d'autres peuvent supporter,
selon les circonstances d'espèce, des atténuations plus ou moins fortes ? La résolution des conflits
entre la liberté d'expression et les droits de la personnalité exige-t-elle l'établissement d'une hiérarchie
entre ces libertés et droits fondamentaux alors que les solutions dépendent avant tout de leur
conciliation au cas par cas (221) ? Si, selon le Conseil d'Etat (222) et la Cour de cassation (223), un
accord international bilatéral ne peut faire échec à l'application de la Convention européenne des droits
de l'homme, est-ce parce que le premier se trouve subordonné à la seconde ou parce que les droits de
l'homme méritent, par leur nature même, une protection renforcée ? De façon similaire, faut-il déduire
de l'arrêt Pordéa que la Cour de cassation fait prévaloir la Convention européenne des droits de
l'homme sur la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 (224) alors qu'une absence de
hiérarchie caractérise en principe les sources internationales (225) ? Quelle est la pertinence d'une
classification hiérarchique des principes de droit devant la démonstration que leur action ne répond à
aucune logique de hiérarchie (226) ? Faut-il maintenir, comme par le passé, une hiérarchie entre les
conventions et accords collectifs conclus à des niveaux différents alors qu'ils sont juridiquement égaux
(227) ? Est-il encore utile de proclamer la supériorité des traités internationaux sur les lois lorsqu'il
suffit de découvrir un principe fondamental reconnu par les lois de la République pour tenir la norme
internationale en échec ? etc.

        Au lieu de réduire la complexité des conflits de normes à une simple question de hiérarchie, ce
qui revient au fond à enfermer la richesse du raisonnement juridique dans une logique purement
formelle et déductive (228), nous proposerons la démarche inverse, à savoir de ramener la hiérarchie
des normes à un simple mode, parmi d'autres, de résolution des conflits.

        A la présence du principe de hiérarchie des normes ainsi préalablement cerné, la théorie juridique
comme le droit positif apportent leur soutien (A). Mais, par rapport au système hiérarchique, le
changement de perspective est tel que l'influence de ce principe reste encore difficile à mesurer (B).

A. - Présence d'un principe hiérarchique

        Si l'hypothèse d'un principe hiérarchique peut être démontrée d'un point de vue théorique (1),
l'analyse du droit positif permet d'en confirmer la présence (2).

1. Présence théorique

        32. La théorie juridique autorise la présence d'un principe hiérarchique aux côtés, le cas échéant,
d'une pyramide normative. La pensée kelsénienne conduit en effet à opérer une distinction
fondamentale entre validité et conformité garantissant sa juridicité à la norme dont les conditions
d'édiction ont été respectées alors même que son contenu serait incompatible avec celui prescrit par les
degrés supérieurs de la hiérarchie (229). La norme en question se trouve simplement affectée d'un «
défaut », lequel provoque un conflit de normes qu'il convient de résoudre (230). Ainsi présentée, la
théorie de la hiérarchie des normes comprend donc deux volets distincts : l'un destiné à fonder
l'existence des normes, l'autre se préoccupant de régler les éventuels conflits entre elles (231).

        Cette analyse ouvre une perspective particulièrement intéressante en ce qu'elle suggère un


dédoublement de la hiérarchie invitant à traiter distinctement la validité des normes, c'est-à-dire leur
appartenance à l'ordre juridique, et leur efficacité dans leurs rapports les unes aux autres. En d'autres
termes, le fait qu'existe peut-être un système normatif hiérarchisé n'exclut pas la présence d'un principe
hiérarchique destiné à trancher les éventuels conflits de normes. Mais encore faut-il que chacun
occupe une sphère bien distincte, ce que ni Kelsen ni ses successeurs ne sont parvenus à assurer de
manière satisfaisante, contribuant ainsi à la confusion actuelle entre hiérarchie formelle et hiérarchie
substantielle.

        33. Aussitôt après avoir distingué entre les systèmes statique et dynamique des normes et rattaché
l'ordre juridique au second, Kelsen envisage assez largement la possibilité « qu'un seul et même
système de normes combine le principe statique et le principe dynamique » de telle sorte qu'il est
fréquent qu'une norme règle à la fois la création et le contenu des normes inférieures (232). Dans le
prolongement, des auteurs expliquent qu'il est parfaitement concevable qu'une norme impose au titre
des conditions de validité de celles qui lui sont inférieures, outre la procédure de création, le respect
d'exigences de fond (233). Dans ce cas, la violation de l'une de ces conditions doit en principe priver la
norme visée de sa validité et entraîner son exclusion du système juridique. C'est là, nous semble-t-il,
que réside la faiblesse de la démonstration. Car priver de validité une norme au prétexte de
l'incompatibilité de son contenu à celui prescrit par les niveaux supérieurs de la hiérarchie suppose
l'existence d'un mécanisme de contrôle suffisamment efficace pour empêcher l'intrusion dans
l'ordonnancement juridique de cette « apparence » de norme. D'où la tentation d'inverser le
raisonnement et de déduire de la mise en place d'un contrôle a priori l'exigence de conditions de
validité (234) tandis que l'organisation d'un contrôle a posteriori révélerait la présence de simples
conditions de conformité puisque, par hypothèse, un tel contrôle ne peut viser que des normes valides
(235).

        L'artifice d'un tel raisonnement s'oppose, selon nous, à son admission. Il érige en effet la
procédure de vérification en critère de qualification des conditions dont elle a pour objet d'assurer le
respect. Autrement dit, ce n'est pas tant la nature des exigences concernant une norme qui commande
la distinction entre validité et conformité que le moment auquel est prévu leur éventuel contrôle, ce qui
n'est guère convaincant.

        34. S'il existe une pyramide de la normativité le long de laquelle descend le « fluide de la validité
» (236), ses exigences ne sauraient concerner que la procédure d'édiction des normes et non leur
contenu matériel. Décider l'inverse exposerait au risque d'une nouvelle confusion entre la validité et la
conformité dont nous avons vu qu'elle était à l'origine de l'impossible superposition des hiérarchies
formelle et substantielle et, au final, de l'échec du système hiérarchique.

        Pour autant, la reconnaissance d'un rapport hiérarchique de production des normes supposerait
résolus au moins deux problèmes majeurs. Il faudrait tout d'abord tenir compte du fait que toute
irrégularité, même de procédure, n'emporte pas nécessairement « inexistence » de la norme (237). Il
conviendrait ensuite de découvrir le fondement des normes juridiques dont la création ne procède
d'aucune habilitation étatique. De ce point de vue, le mystère du pluralisme des sources demeure
inexpliqué et le système dynamique de Kelsen très imparfait.

        Pour peu, en revanche, que le raisonnement soit mené sur le seul terrain de la conformité
matérielle, laissant de côté l'énigme de la juridicité, une place peut être réservée à une hiérarchie
substantielle des normes dont le respect, quoique souhaitable, ne constitue plus un impératif absolu.
Son autorité, en effet, ne tient pas à la nécessité de préserver la cohérence d'un système juridique mais
repose uniquement sur la volonté politique de garantir le respect de certaines règles jugées essentielles
pour la société. C'est pourquoi l'application de ce principe peut demeurer contingente et céder, le cas
échéant, devant des préoccupations supérieures.

        Ainsi précisé dans son fondement théorique, le principe hiérarchique trouve dans le droit positif
la confirmation de sa présence.

2. Présence en droit positif

        35. Parce qu'elle tend à attribuer un rang à la règle en fonction de la priorité d'application qui
paraît devoir lui être reconnue et non seulement d'après l'autorité hiérarchique de sa source, la
hiérarchie matérielle des normes désigne avant tout une hiérarchie des valeurs normatives (238), c'est-
à-dire des valeurs qui fondent les règles du droit positif. Cette proposition, essentiellement vraie parmi
les niveaux élevés de la hiérarchie où se développent les droits fondamentaux, conduit à intégrer au
débat juridique intéressant la résolution du conflit de normes des préoccupations philosophiques,
morales, éthiques et politiques qui traduisent l'aspiration du corps social à un idéal de justice.
        Il est toutefois raisonnable de présumer que ces préoccupations sont jugées d'autant plus
impérieuses qu'est élevée dans la hiérarchie la norme qui les exprime. En d'autres termes, plus une
norme appartient aux degrés supérieurs de la hiérarchie, plus il est permis de penser que les valeurs
dont elle est l'expression méritent de recevoir une application prioritaire. Il est par exemple naturel
d'estimer qu'un principe constitutionnel repose sur des justifications a priori plus fortes qu'une règle
simplement législative ou décrétale. Il en résulte que le principe hiérarchique emprunte au système
hiérarchique sa structure interne. Mais le premier évite les excès du second parce qu'il n'est pas ce
paradigme absolu, inviolable et du même coup inaccessible que constitue le second. Il est simplement
un principe qui, à l'instar de tout principe, entre en concurrence avec d'autres règles qui peuvent lui
faire subir des exceptions. Aussi n'est-il pas étonnant que la présence du principe hiérarchique se
révèle principalement dans les hypothèses où une atteinte lui est portée.

        36. Le droit positif offre-t-il des illustrations d'un tel principe ? La doctrine, tout d'abord, montre
son attachement viscéral à une hiérarchie des valeurs, par-delà celle purement formelle des normes,
notamment lorsqu'elle recherche une hiérarchie matérielle des droits de l'homme ou des normes
constitutionnelles. La jurisprudence, ensuite, illustre à de nombreuses reprises la volonté de ne pas
laisser le juge s'enfermer dans le carcan des recettes toutes prêtes que lui offre le raisonnement
positiviste. Lorsqu'un juge estime préférable d'appliquer la norme inférieure malgré sa contrariété à
une autre de niveau supérieur, il sait développer suffisamment d'ingéniosité pour y parvenir.

        C'est parfois au nom d'un impératif supérieur qu'il décide d'écarter l'ordre hiérarchique
traditionnel. Ainsi en est-il tout spécialement en droit du travail où, au nom d'un principe de faveur
encore incertain (239), la Chambre sociale de la Cour de cassation pose le principe fondamental selon
lequel, en cas de conflits de normes, la plus favorable aux salariés doit recevoir application (240). La
dérogation que l'ordre public social (241) impose à la pyramide des normes atteste de la relativité de
celle-ci. Invitée à céder devant un principe supérieur (242), la hiérarchie des normes n'a que la valeur
d'un principe. Une conclusion identique s'évince de l'analyse des tensions observées entre la hiérarchie
des normes et le droit international privé (243). La primauté de l'ordre interne sur l'ordre international,
qui fonde notamment le recours aux lois de police et à l'exception d'ordre public, heurte la supériorité
des conventions internationales proclamée par l'article 55 de la Constitution. Que des lois de police
puissent s'imposer à des règles de conflit d'origine conventionnelle ou que l'ordre public justifie
l'éviction de règles matérielles émanant d'une convention internationale atteste de la simple valeur de
principe de la hiérarchie des normes.

        Mais le plus souvent, c'est en respectant l'apparence formelle de la hiérarchie des normes que le
juge sait atténuer la rigueur de celle-ci. Par la « magie » d'une interprétation « neutralisante », «
constructive » ou « directive » (244), opérée « à la lumière » ou non d'une autre source normative
qu'au besoin il n'hésite pas à créer de toutes pièces pour les besoins de la cause (245), ce juge qui a en
charge de rendre la justice tranche les conflits de normes en s'affranchissant des contraintes formelles,
puisant dans l'argumentation juridique les raisons de décider de la solution qui lui paraît la meilleure.
Faut-il s'en offusquer alors que ce travail pallie bien souvent les carences d'un législateur passé maître
dans l'art de multiplier les antinomies, incertitudes, renvois dans le vide et autres définitions
inopportunes (246) ? En se livrant ainsi à une réorganisation de la hiérarchie des normes, la
jurisprudence comme la doctrine témoignent de leur préoccupation constante de n'attribuer qu'une
valeur de principe à cette hiérarchie. Dès l'instant, en effet, que cessent les raisons qui justifiaient la
supériorité d'une règle sur une autre, l'ordre de préférence doit être modifié et priorité doit être donnée
à la norme dont la mise en œuvre aboutit à la solution la meilleure.
        37. Enfin, un tel raisonnement n'échappe pas non plus au législateur qui, en certaines occasions,
n'hésite pas à méconnaître des prescriptions de droit international censées pourtant s'imposer à lui. En
droit pénal, par exemple, la règle selon laquelle la rétroactivité de la loi nouvelle plus douce ne
s'applique qu'aux infractions commises avant son entrée en vigueur et « n'ayant pas donné lieu à une
condamnation passée en force de chose jugée » (247) méconnaît les dispositions de l'article 15, § 1, du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prévoient que le délinquant, qu'il soit ou
non déjà condamné, doit bénéficier de la peine plus légère retenue pour la même infraction par une loi
postérieure. La règle internationale, pourtant fondée sur le principe d'égalité des citoyens devant la loi
(248), est ainsi délibérément ignorée par le législateur national dont la préférence pour le principe de
sécurité juridique justifie que les décisions passées en force de chose jugée ne soient pas remises en
cause par la loi nouvelle, fût-elle plus douce.

        Ce refus de plier devant l'autorité de la règle supérieure avant d'avoir pesé les arguments pour et
contre cette soumission, même s'il n'apparaît le plus souvent qu'en filigrane et de façon détournée,
atteste de la présence d'un principe hiérarchique en droit positif. A défaut, les phénomènes
d'ineffectivité de la hiérarchie formelle resteraient une énigme.

        Affirmée la présence de ce principe hiérarchique en droit positif, reste à en mesurer l'influence


dans la résolution des conflits de normes auxquels il est appelé à participer.

B. - Influence d'un principe hiérarchique

        38. La hiérarchie substantielle des normes permet d'habiller d'un vêtement juridique les
jugements de valeur qui inspirent et gouvernent notre société et, pour peu qu'on y intègre les droits
européen et communautaire, ceux qui président au développement des sociétés démocratiques. Il
convient de mettre en avant ces finalités qui imprègnent la hiérarchie des normes afin de les mettre en
lumière et de leur reconnaître le rôle qui leur revient dans la prise des décisions. De cette lecture de la
hiérarchie des normes deux séries de conséquences découlent immédiatement.

        La première est une certaine relativité de la hiérarchie qui contraste avec le caractère absolu et
intangible de celle héritée du schéma kelsénien. L'autorité du principe qui la sous-tend ne tient plus à
un quelconque « idéal positiviste » à atteindre mais dépend, pour chaque cas, de la valeur reconnue à
la règle qu'elle désigne comme prioritaire dans son application. Ce qui fait la force d'une norme,
observe un auteur, « est la valeur des raisons sur lesquelles elle s'appuie (...). Cette valeur s'apprécie à
chaque cas particulier, en fonction des arguments pour et contre » (249).

        La seconde est de réintroduire dans le débat des conflits de normes, trop longtemps dominé par
l'idéologie positiviste, la question des finalités du droit. Le principe hiérarchique réhabilite ainsi le
raisonnement juridique dans sa fonction essentielle qui est d'éclairer les choix. Le juriste se doit « de
choisir » et « de bien choisir » (250). L'argumentation offre, seule, les raisons de décider. Mais reste à
identifier la nature des décisions que la prise en considération de ce principe peut aider à prendre. Si
certaines présentent un degré élevé de certitude (1), d'autres se révèlent plus délicates (2).

        39. 1) Dans un premier temps, le principe hiérarchique conduit à poser en termes de politique
juridique l'organisation des contrôles de conformité aux différents échelons de la pyramide. Tandis que
dans le système hiérarchique de tels contrôles s'imposent à l'évidence afin de garantir la cohérence de
l'ordre juridique, ils ne procèdent plus, dans la perspective du principe de hiérarchie des normes, que
de choix dictés par une appréciation des arguments en présence.
        Ainsi à la question de savoir si, dans le prolongement des arrêts Sarran et Fraisse, les juridictions
ordinaires accepteront de se livrer à un contrôle a posteriori de la constitutionnalité des traités et des
lois, il convient d'ajouter aux savants développements techniques relevés en faveur ou à l'encontre
d'une telle évolution, un argument tiré du principe de sécurité juridique. Cet argument n'a certes jamais
été totalement absent du débat mais la nécessité ressentie d'assurer le respect d'un système juridique
hiérarchisé conduisait probablement à en relativiser la portée (251). Pour l'essentiel, était en effet
acquise l'exigence d'une vérification de conformité à la Constitution des traités et des lois ; seule
demeurait en suspens la question des modalités de ce contrôle : qui ? quand ? avec quels effets ?

        Dans la perspective renouvelée d'un simple principe de hiérarchie des normes, conçu comme un
mode parmi d'autres de résolution des conflits, la sécurité juridique prend une tout autre dimension :
celle d'un principe directement concurrent s'opposant à l'instauration d'un contrôle a posteriori de
constitutionnalité. Le respect des normes constitutionnelles est-il à ce point fondamental qu'il justifie
une atteinte au principe de sécurité juridique lequel impose au contraire de ne pas soumettre un texte
en vigueur à la menace de son éviction ? En raison de la très grande proximité matérielle des normes
de référence applicables aux contrôles de constitutionnalité et de conventionnalité, l'on peut être à la
fois tenté de relever la relative inutilité d'une seconde vérification ayant, au fond, le même objet et
séduit par la perspective d'un renforcement du contrôle déjà opéré. Reste que la perplexité dans
laquelle a plongé l'ensemble des commentateurs la déclaration d'inconstitutionnalité par le Conseil
constitutionnel d'une loi déjà promulguée devrait inciter à la prudence. Par ailleurs, la récente
promotion au rang constitutionnel du principe de sécurité juridique (252) ne peut manquer de freiner
les élans favorables à un contrôle plus étendu de la constitutionnalité des traités et des lois.

        Si le principe hiérarchique intervient dans le choix de l'institution d'un contrôle de conformité, il a
également vocation à intervenir dans les modalités de ce contrôle en tant que règle de conflits. Or, sur
ce point, son influence demeure entachée de plusieurs zones d'ombre.

        40. 2) Dans un deuxième temps, en effet, il convient de mesurer l'influence que le principe
hiérarchique est susceptible d'exercer sur la résolution des conflits opposant des normes de niveaux
distincts. Contrairement au postulat positiviste impliquant, quelles que soient les circonstances
d'espèce, d'accorder la priorité à la norme de degré supérieur, la mise en œuvre du principe de
hiérarchie des normes obéit à davantage de souplesse.

        Les juges ordinaires pourraient ainsi, à l'occasion par exemple du contrôle de conventionnalité
d'une loi, décider de donner la préférence à la loi qu'ils estiment pourtant irrégulière, au motif que des
raisons justifient en l'espèce la mise à l'écart du principe hiérarchique. Malgré l'originalité d'une telle
solution, plusieurs arguments militent en sa faveur.

        Il convient d'admettre que la loi, quoique contraire à la norme internationale, demeure valable
dans l'ordre interne et de surcroît conforme à la volonté générale (253). Appartenant pleinement à
l'ordre juridique, il n'y a aucune raison de la priver, a priori, de son efficacité. Devrait-on s'étonner de
l'ineffectivité de la norme conventionnelle ? Celle de la loi pourrait tout autant être regrettée dans le
choix de la solution contraire. Faudrait-il déplorer la diversité de solutions auxquelles cette liberté de
jugement ne manquerait pas de conduire, selon les espèces et selon les juridictions, sans que ni la Cour
de cassation ni le Conseil d'Etat ne puissent imposer une solution uniforme ? L'argument de
l'éparpillement des solutions est fort tant il menace d'insécurité juridique l'ensemble du système. Mais
si celui-ci redoutait à ce point les divergences de solutions, il devrait sans doute commencer par
supprimer la dualité des ordres de juridictions (254), dont l'existence tient à une évolution historique
marquée par une « conception française de la séparation des pouvoirs » (255) et dont le maintien, bien
que renforcé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel (256), se justifie essentiellement par des «
considérations pragmatiques » (257). Il devrait également ouvrir plus largement le recours en
annulation pour excès de pouvoir des actes administratifs dans la mesure où l'exception d'illégalité ne
profite qu'aux justiciables qui prennent le risque de l'invoquer et non à tous.

        Par ailleurs, cette liberté de choix du juge présenterait l'insigne mérite de mettre le législateur en
face de ses responsabilités et de l'inciter à opérer des choix politiques, tout en évitant d'ériger
artificiellement l'autorité judiciaire en « législateur bis » chargé de rectifier les erreurs de son «
homologue ».

        Que l'on songe, par exemple, au contentieux que nourrit depuis plusieurs années l'applicabilité
directe en droit français des dispositions de la Convention de New York du 26 janvier 1990 relative
aux droits de l'enfant. Si la Cour de cassation lui dénie tout effet direct, le Conseil d'Etat distingue,
disposition par disposition, celles qui bénéficient d'un tel effet. Au-delà de l'argument littéral douteux
selon lequel la Convention ne crée d'obligations qu'à la charge des Etats, il est unanimement admis que
le refus d'admettre la pleine efficacité en droit interne de cette convention se fonde sur des «
considérations d'opportunité » (258) tenant au caractère « préoccupant » (259) de certains des droits
proclamés dont la portée pourrait s'avérer considérable. Mais au lieu de mettre artificiellement « hors
jeu » ce texte (260), ne serait-il pas préférable de permettre au juge d'écarter la protection qu'institue le
traité au profit de la loi nationale dès lors qu'il estime ce choix préférable ? Le principe hiérarchique,
qu'une interprétation renouvelée de l'article 55 de la Constitution autoriserait sans doute à déceler,
mérite-t-il de primer aveuglément le principe de l'intérêt de l'enfant et celui, par exemple, de
l'anonymat du donneur et du receveur (261) ?

        Un raisonnement similaire aurait également permis au Conseil d'Etat, dans l'affaire Koné,
d'écarter directement le traité d'extradition franco-malien au profit de la loi française du 10 mars 1927
disposant que l'extradition n'est pas accordée lorsqu'elle « est demandée dans un but politique », sans
avoir à dégager un principe fondamental reconnu par les lois de la République que n'avait pas
préalablement découvert le Conseil constitutionnel.

        41. Le même principe hiérarchique aurait vocation à régir les relations entre la loi et la
Constitution, appelant sans doute à repenser la fonction du Conseil constitutionnel et l'autorité de ses
décisions. Mais la conciliation des principes législatifs et constitutionnels ne serait-elle pas ainsi mieux
assurée que par l'application bornée d'une hiérarchie formelle dont on ne parvient à tempérer les excès
qu'en multipliant les interprétations audacieuses ? L'économie pourrait certainement être faite de
nombreuses controverses, aussi savantes que stériles, sur la place des principes, droits et règles dans
l'échelle des normes. Outre la complexité qu'elles ne manquent pas d'ajouter, ces réflexions conduisent
souvent à évacuer de la discussion la confrontation des intérêts en présence en réduisant
l'argumentation juridique à une logique déductive.

        Ainsi convient-il de relativiser l'intérêt naguère porté à la nature législative ou constitutionnelle


du droit au respect de la vie privée (262). Il ne semble pas en effet qu'ait été renforcée la règle de
l'article 9 du code civil depuis son rattachement aux normes constitutionnelles (263). De la même
manière aurait-on pu simplifier le débat sur les modalités d'application de l'article 1382 du code civil
aux dommages causés par voie de presse en renonçant à caractériser l'abus qu'impose la lettre de
l'article 11 de la Déclaration de 1789 (264) et en cherchant directement à concilier la liberté
d'expression et le principe de responsabilité pour faute (265).

        Les exemples pourraient être multipliés de discussions formelles sur l'autorité hiérarchique
respective des normes en conflits. Sans supprimer l'intérêt de telles controverses, l'admission d'un
principe hiérarchique tend à en réduire l'influence et à restaurer les conditions d'un indispensable débat
de fond.

        42. Si la reconnaissance d'un principe hiérarchique permet de sauver le naufrage du système de


hiérarchie des normes en distinguant nettement les questions de validité de celles relatives à la
conformité, l'influence de ce principe sur le traitement des conflits de normes appelle une réflexion
plus approfondie tant sont majeurs les bouleversements qu'impose sa présence en droit positif.

        Il n'en demeure pas moins que la hiérarchie des normes doit cesser d'être considérée comme une
fin en soi, un idéal à reproduire, pour être appréhendée comme un simple moyen parmi d'autres
d'atteindre les solutions les plus justes possibles. Edifiée sous le signe de la Raison, elle a donné
naissance à une théorie des sources de droit refermée sur elle-même, constituée de règles abstraites
plus que de solutions concrètes, qui élimine toute appréciation subjective et rejette toute conviction
personnelle - un droit pur, « aseptisé » (266), un droit objectif... Cette idéologie a donné la préférence
aux « catalogues et aux recettes » (267), faisant précéder chaque nouvelle question d'une réponse
préexistante et fournissant, selon l'expression évocatrice d'un auteur, « un droit prêt à l'emploi » (268).

        Mais cette Raison juridique, qui évacue le questionnement sur les finalités du droit (269) et
dissimule la ratio juris derrière le voile de la technique, est aujourd'hui en crise (270). Ce qui est en
cause, observe un auteur, « dans la déconstruction contemporaine des sociétés démocratiques, ce n'est
pas la raison, mais la raison positiviste, la raison instrumentale, c'est-à-dire celle qui ne pose pas le
problème des fins, des valeurs, du sens, mais seulement celui des moyens » (271), autrement dit celle
qui refuse de choisir des fins en croyant maîtriser le choix des techniques (272).

        43. La loi a perdu de sa majesté. Ayant « cessé d'être le mode d'expression de la volonté générale,
pour devenir le lieu d'incarnation de valeurs transcendantes, dont le législateur n'a pas le monopole »
(273), elle n'incarne plus la volonté générale que dans le respect de ces droits et libertés fondamentaux
dont le juge s'est désormais fait le gardien. L'échec de l'organisation législative des sociétés devait
naturellement conduire à renforcer les attributions du juge (274), le temps étant probablement venu
que la France lui fasse davantage confiance (275). S'affirmant par rapport aux autres pouvoirs,
législatif et exécutif, le juge - judiciaire, administratif, constitutionnel, européen, communautaire -
tend ainsi à devenir l'organe majeur des sociétés démocratiques modernes assurant l'ordre autant que la
justice. Mais parce qu'il acquiert sa légitimité par les œuvres (276), c'est à une quête de perfection qu'il
est tenu de se livrer et au renouvellement de laquelle il doit veiller, tel Sisyphe condamné aux Enfers à
rouler éternellement son rocher.

        44. Le droit, dans sa « quête de progrès » (277), implique une liberté de choix autant qu'une
nécessité de choix. Toutes les solutions ne se valent pas et la construction du droit devrait sans doute
être perçue moins comme la volonté infaillible d'un législateur omniscient que comme le résultat de
milliards d'essais et d'erreurs rectifiées. La liberté, l'expérience, génératrices d'un « ordre social
spontané » (278), gagneraient à prendre de l'importance sur le panjuridisme qui menace l'Etat de droit
(279).

        Faut-il attendre de cette souplesse et de ce relatif effacement du droit écrit un recul de la logique,
de la rigueur, de la prévisibilité et craindre, en définitive, un avènement de l'insécurité juridique et de
son corollaire, l'injustice (280) ? Il est vrai que l'insigne mérite d'un système hiérarchique rigide est de
répondre « à un besoin de certitude et d'ordre » (281) mais il n'en demeure pas moins qu'« il est
illusoire de croire qu'une règle ou une solution sont figées pour l'avenir jusqu'à ce que son auteur les
change » car « le droit est bien plus mouvant et instable, perpétuelle rediscussion dans laquelle la
prévisibilité tient plus à la pérennité ou à la transposabilité des raisons de décider qu'à la fixité des
règles » (282). L'on ajoutera que la prolifération des textes engendre l'insécurité, qu'elle est au
contraire source d'antinomies, méconnaissance, ineffectivité et imprévisibilité du droit comme l'a si
vigoureusement stigmatisé le Conseil d'Etat voici dix ans (283).

        Le rationalisme constructiviste n'a pas su prévenir ces effets pervers ; il les a au contraire
renforcés. Que soit aujourd'hui proposé l'abandon d'un système juridique mieux connu pour ses
défauts que pour ses qualités ne surprendra guère. La théorie normativiste cherche en vain à fournir les
clefs d'un ordre juridique qui a cessé de la suivre.

        45. La hiérarchie des normes ne constitue donc pas le fondement du système juridique. Si ordre
et hiérarchie paraissent étroitement associés, l'ordre peut exister dans un certain désordre hiérarchique
dès l'instant que l'agencement des normes au sein du système repose sur le jeu combiné de principes
identifiés. De la complexité qui en résulte peut naître un équilibre, délicat mais précieux, au coeur
duquel s'inscrit l'action régulatrice du juge.

        L'échec du système hiérarchique est celui du rationalisme déductif. L'essor du principe


hiérarchique traduit le retour de l'argumentation et de la dialectique dans le choix des décisions. Puisse
ce principe s'inscrire au centre de nombreux débats à venir...

       (1) Ce qui a sans doute contribué au succès du normativisme ; cf. Ch. Atias, Philosophie du droit,
PUF, coll. Thémis, 1999, p. 38, qui observe, à propos de la pensée de Hans Kelsen, que « pour la
première fois, un philosophe élaborait une théorie qui paraissait donner raison à l'idée que la pratique
se fait d'elle-même ».

       (2) « L'ordre juridique n'est pas un système de normes juridiques placées toutes au même rang,
mais un édifice à plusieurs étages superposés, une pyramide ou hiérarchie formée (pour ainsi dire) d'un
certain nombre d'étages ou couches de normes juridiques », H. Kelsen, Théorie pure du droit, trad. Ch.
Eisenmann, 2e éd. Bruylant-LGDJ, coll. La pensée juridique, 1999, n° 35, p. 224 ; et du même auteur,
Théorie générale du droit et de l'Etat, trad. B. Laroche et V. Faure, Bruylant-LGDJ, coll. La pensée
juridique, 1997, p. 178.

       (3) Cf. spéc. J. Chevallier, Vers un droit post-moderne ? Les transformations de la régulation


juridique, RD publ. 1998.659 et s. ; B. de Sousa Santos, Droit : une carte de lecture déformée. Pour
une conception post-moderne du droit, Droit et société, 1988/10, p. 373 et s.

       (4) V. not. A. Decocq, Le désordre juridique français, in Jean Foyer, auteur et législateur : Ecrits
en hommage à Jean Foyer, PUF, 1997, p. 147 et s. ; M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système
juridique entre ordre et désordre, PUF, coll. Les voies du droit, 1988, p. 15 et s.

       (5) Cf. J. Carbonnier, Droit et passion du droit sous la Ve République, Flammarion, coll. Forum,
1996, p. 38 et s.

       (6) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 35, p. 224. Sur ce phénomène parfois désigné sous
le terme d'« autopoïèse », cf. F. Ost, Entre ordre et désordre : le jeu du droit. Discussion du paradigme
autopoiétique appliqué au droit, Archives de philosophie du droit, 1986, t. 31, Le système juridique, p.
133 et s.

       (7) L. Favoreu et al., Droit constitutionnel, 4e éd. Dalloz, coll. Précis, 2001, n° 83, in fine, p. 58.
       (8) « La norme de degré supérieur ne peut pas lier l'acte qui l'appliquera sous tous les rapports. Il
demeure toujours inévitablement une certaine marge, réduite ou considérable, pour le jeu du pouvoir
discrétionnaire : la norme de degré supérieur n'a jamais, dans son rapport avec l'acte de création de
normes ou d'exécution matérielle qui l'applique, que le caractère d'un cadre à remplir par cet acte », H.
Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 45, p. 336.

       (9) B. Oppetit, L'hypothèse du déclin du droit, Droits, n° 4, Crises dans le droit, 1986, p. 9 et s.

       (10) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 34, p. 197 ; Théorie générale du droit et de l'Etat,
op. cit. p. 167 et s.

       (11) Ibid. p. 195.

       (12) Laquelle peut, à son tour, être déduite d'une norme encore plus générale prescrivant, par
exemple, de « chercher à être en harmonie avec l'univers » (ibid.).

       (13) C'est-à-dire une « règle qui détermine comment doivent être créées les normes générales et
les normes individuelles de l'ordre qui repose sur cette norme fondamentale » (ibid. p. 196).

       (14) Ibid. n° 34, p. 197.

       (15) A condition que soit prévue une procédure de contrôle.

       (16) Car « en vérité, l'idée d'une « norme contraire aux normes » représente une contradiction in
adjecto ; une norme juridique dont on pourrait affirmer qu'elle n'est pas conforme à la norme qui règle
sa création ne pourrait pas être considérée comme une norme valable ; elle serait nulle, autrement dit :
elle ne serait du tout une norme juridique » (ibid. n° 35, p. 264).

       (17) L. Favoreu et al., Droit constitutionnel, op. cit. n° 89, p. 61-62.

       (18) Sur la fréquente adaptation par les juristes français des idées de Kelsen, cf. par ex. P.
Wachsmann, Le kelsénisme est-il en crise, Droits, n° 4, Crises dans le droit, 1986, p. 53 et s.
Adaptations que le maître autrichien avait déjà pu observer, relevant dans le débat que suscitaient ses
idées, des divergences reposant « sur des malentendus qui (...) ne semblent assez souvent pas
absolument involontaires » et déplorant « les arguments que divers adversaires opposent, non pas, à la
vérité, à la théorie, mais aux images déformantes qu'ils en donnent selon leurs besoins » (H. Kelsen,
Théorie pure du droit, op. cit. préface de la 1re édition, p. 4).

       (19) J. Carbonnier, Droit et passion du droit sous la Ve République, op. cit. p. 41.

       (20) Ch. Atias, Philosophie du droit, op. cit. p. 43. V. dans le même sens, Ch. Perelman, Logique
juridique, Nouvelle rhétorique, 2e éd. Dalloz, coll. Bibliothèque Dalloz, 1999, p. 68-69 ; F. Terre,
Introduction générale au droit, 5e éd. Dalloz, coll. Précis, 2000, n° 28 ; G. Vedel, Aspects généraux et
théoriques, Introduction, in L'unité du droit, Mélanges en hommage à Roland Drago, Economica,
1996, p. 1 et s. spéc. p. 4, qui observe que « le malheur est (...) que cette logique normative souveraine
dans son champ, n'épuise pas l'objet que l'on appelle « droit » » ; M. Villey, Philosophie du droit, t. I,
Définitions et fins du droit, rééd. Dalloz, coll. Bibl. Dalloz, 2001, n° 116, p. 137, qui observe que «
jamais on n'a poussé si loin l'indifférence aux fins du droit ».

       (21) B. Oppetit, Philosophie du droit, Dalloz, coll. Précis, 1999, n° 42, p. 63.

       (22) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. spéc. n° 34, p. 197 (nous soulignons).
       (23) J. Wroblewski, Dilemnas of the normativistic concept of legal system, in Rechtstheorie,
Beiheft 5, 1984, p. 326, cité par M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et
désordre, op. cit. p. 56.

       (24) Car « la relation hiérarchique décrite est une relation de norme juridique à acte juridique, à
acte créateur de norme juridique : ce n'est pas une relation de norme à norme (...). Kelsen confond
ainsi norme et acte normateur, norme juridique et acte juridique », P. Amselek, Réflexions critiques
autour de la conception kelsénienne de l'ordre juridique, RD publ. 1978.5 et s. spéc. p. 11.

       (25) Ibid. p. 13.

       (26) G. Timsit, Thèmes et systèmes de droit, PUF, coll. Les voies du droit, 1986, spéc. p. 24-25.

       (27) V. not. M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et désordre, op. cit.
spéc. p. 62.

       (28) M. Troper, Système juridique et Etat, Archives de philosophie du droit, 1986, t. 31, spéc. p.
43.

       (29) D. de Béchillon, Hiérarchie des normes et hiérarchie des fonctions normatives de l'Etat,
Economica, coll. Droit public positif, 1996.

       (30) P. Amselek, Réflexions critiques..., article préc. p. 14.

       (31) Ch. Atias, Philosophie du droit, op. cit. p. 42.

       (32) M. Villey, Philosophie du droit, t. II, Les moyens du droit, rééd. Dalloz, coll. Bibl. Dalloz,
2001, n° 133 et 217.

       (33) Cf. J. Carbonnier, Droit et passion du droit sous la Ve République, op. cit. p. 40.

       (34) « Pour la première fois, un auteur, Hans Kelsen, propose ainsi une théorie de l'ordre juridique
qui non seulement fonde et légitime en droit le contrôle de la constitutionnalité, mais encore en fait le
coeur et même le garant de la validité de l'ensemble du système juridique puisque, sans ce contrôle, la
garantie de la régularité, c'est-à-dire de l'imputation d'une règle à une norme supérieure, clef de voûte
de la théorie kelsenienne, ne serait pas assurée », D. Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel,
5e éd. Montchrestien, coll. Domat droit public, 1999, p. 17.

       (35) Cons. const. décis. n° 85-197 DC du 23 août 1985, Evolution de la Nouvelle-Calédonie (§


27), AJDA 1985.605, note L. Hamon ; RD publ. 1986.395, note L. Favoreu ; D. 1986.45, note F.
Luchaire.

       (36) L. Favoreu, Le principe de constitutionnalité. Essai de définition d'après la jurisprudence du


Conseil constitutionnel, Recueil d'études en hommage à Charles Eisenmann, Cujas, 1975, p. 33 et s.

       (37) Décis. n° 71-44 DC du 16 juill. 1971, Liberté d'association, in Les grandes décisions du


Conseil constitutionnel, 10e éd. Dalloz, 1999, n° 19, p. 252 et s. obs. L. Favoreu et L. Philip.

       (38) Révision constitutionnelle du 29 oct. 1974 élargissant la possibilité de saisine du Conseil


constitutionnel à 60 députés ou 60 sénateurs.

       (39) J. Carbonnier, Droit et passion du droit sous la Ve République, op. cit. p. 39.
       (40) Sur l'admission d'une hiérarchie matérielle, cf. J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, 3e éd.
Dalloz, coll. Méthodes du droit, 1999, n° 70, p. 86-87.

       (41) G. Vedel, Aspects généraux et théoriques, Introduction, in L'unité du droit, Mélanges préc.
spéc. p. 8.

       (42) Décis. n° 85-187 DC du 25 janv. 1985, Etat d'urgence en Nouvelle-Calédonie in Les grandes


décisions du Conseil constitutionnel, op. cit. n° 37, p. 624 et s. obs. L. Favoreu et L. Philip. V. aussi
Cons. const., décis. n° 96-377 DC du 16 juill. 1996, Loi tendant à renforcer la répression du
terrorisme, RFD const. 1996.806, note Th. S. Renoux.

       (43) Décis. n° 74-54 DC du 15 janv. 1975, Interruption volontaire de grossesse, in Les grandes


décisions du Conseil constitutionnel, op. cit. n° 23, p. 313 et s. obs. L. Favoreu et L. Philip.

       (44) Ch. mixte, 24 mai 1975, Soc. des Cafés Jacques Vabre, D. 1975.497, concl. A. Touffait ;
AJDA 1975.567, note J. Boulouis ; RD publ. 1975.1335, note L. Favoreu et L. Philip ; RGDI publ.
1976.347, note J. Foyer et D. Holleaux ; Rev. crit. DIP 1975.124, note P. Lagarde.

       (45) CE Ass. 20 oct. 1989, Nicolo, AJDA 1989.788, note D. Simon ; D. 1990.135, note J.
Sabourin ; RFD adm. 1989.823, note B. Genevois ; RFD adm. 1990.267, obs. D. Ruzié ; RGDI publ.
1990.91, note J. Boulouis ; RTD eur. 1989.771, concl. P. Frydman ; RTD eur. 1989.787, note G. Isaac.

       (46) Cf. L. Favoreu, La constitutionnalisation du droit, in L'unité du droit, Mélanges en hommage


à Roland Drago, Economica, 1996, p. 25 et s. spéc. p. 33 ; L. Favoreu et Th. S. Renoux,
Constitutionnalité des actes administratifs (Contrôle de la), Rép. Contentieux administratif Dalloz,
1992, n° 44.

       (47) CJCE 9 mars 1978, Simmenthal, aff. 106/77, Rec. p. 629, concl. G. Reischl.

       (48) CE 24 sept. 1990, Boisdet, AJDA 1990.863, obs. E. Honorat et R. Schwartz ; Petites affiches,
12 oct. 1990.15, concl. M. Laroque, qui juge illégal un arrêté ministériel pris sur la base d'une
disposition législative votée en 1980 incompatible avec un règlement du Conseil datant de 1972.

       (49) CE 28 févr. 1992, SA Rothmans International France et SA Philipp Morris France, AJDA
1992.210, concl. M. Laroque et p. 329, chron. C. Maugüé et R. Schwartz ; JCP 1992.éd.G.II. 21859,
note G. Teboul ; RFD adm. 1992.425, note L. Dubouis, qui juge illégale la réglementation relative aux
prix des tabacs comme étant incompatible avec les objectifs d'une directive et annule en conséquence
les décisions prises sur le fondement de cette réglementation. Adde l'analyse récente de Y. Galmot, Le
juge administratif français, la Cour de justice des Communautés européennes et les directives
communautaires : l'ébauche d'une cohérence, CJEG juin 1999.chron.207 et s.

       (50) V. pour une synthèse récente, B. Stirn, Le Conseil d'Etat et l'Europe, in L'Etat de droit,
Mélanges en l'honneur de Guy Braibant, Dalloz, 1996, p. 653 et s.

       (51) Décis. n° 99-410 DC du 15 mars 1999, Loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie, JCP


1999.éd.G.I.151, n° 5, obs. J.-H. Robert ; AJDA 1999.324, obs. J.-E. Schoettl ; RTD civ. 1999. 725,
obs. N. Molfessis ; D. 2000.Somm.199, obs. J.-Ch. Car ; JCP 2000.éd.G.I.201, n° 12, obs. B. Mathieu
et M. Verpeaux ; RD publ. 2000.17 et s. obs. D. Rousseau, spéc. p. 39 ; J.-P. Camby, Une loi
promulguée, frappée d'inconstitutionnalité ?, RD publ. 1999, Act. const. p. 655 et s.

       (52) Cf. D. de Béchillon, De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité internationale


des lois par le juge ordinaire (Malaise dans la Constitution), RFD adm. 1998.225 et s. spéc. p. 232.
       (53) V. pour un exemple récent, F. Granet, Perturbations dans la hiérarchie des normes juridiques
in Le droit privé français à la fin du XXe siècle : Etudes offertes à Pierre Catala, Litec, 2001, p. 41 et
s.

       (54) M. Monin, La hiérarchie des normes n'existe pas, D. 1999, n° 30, 2 sept. 1999, Dernière
actualité, p. 1.

       (55) Il suffit, pour s'en convaincre, d'observer l'attachement à la construction kelsénienne que
manifestent la plupart des ouvrages d'introduction au droit. Faut-il y voir un signe supplémentaire de
cette « crise » des introductions au droit naguère vigoureusement dénoncée ? (Ch. Mouly, La crise des
introductions au droit, Droits 1986/4, p. 99 et s.).

       (56) Cf. not. L. Favoreu et al., Droit constitutionnel, op. cit. n° 66 et 80 et s.

       (57) V. not. M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et désordre, op. cit. p.
106 et les réf. citées.

       (58) Nous n'entrerons pas dans le très savant débat sur la notion de « système » et retiendrons la
définition proposée par le Vocabulaire juridique Henri Capitant : « ensemble de règles, considéré sous
le rapport de ce qui en fait la cohérence ».

       (59) Sur les différentes acceptions de ce terme, cf. not. P. Morvan, Le principe de droit privé, préf.
J.-L. Sourioux, Editions Panthéon-Assas, 1999, n° 2 et s. p. 3 et s. spéc. n° 29 et s. p. 33 et s. où
l'auteur définit le principe normatif.

       (60) D. Mainguy, Les directives non transposées, libres propos sur une étrange lumière, Mélanges
Christian Mouly, Litec, 1998, p. 89 et s.

       (61) Cf. par ex. CE 24 févr. 1999, Association de patients de la médecine d'orientation


anthroposophique, JCP 2000.éd.G.I.201, n° 33, obs. B. Mathieu et M. Verpeaux. V. également, CE 3
déc. 1999, Association Ornithologique et Mammalogique de Saône-et-Loire (2 arrêts), RD publ.
2000.289, note P. Cassia et E. Saulnier ; RTD civ. 2000.194, obs. R. Libchaber.

       (62) L. n° 99-1071 du 16 déc. 1999 portant habilitation du gouvernement à procéder, par


ordonnance, à l'adoption de la partie Législative de certains codes (RTD civ. 2000.185, obs. Ch.
Jamin). V. également art. 3 L. n° 2000-321 du 12 avr. 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations (JCP 2000.éd.G.III.20274).

       (63) N. Molfessis, Les illusions de la codification à droit constant et la sécurité juridique, RTD
civ. 2000.186 et s.spéc. p. 192.

       (64) N. Molfessis, chron. préc.

       (65) V. par ex. J.-M. Auby, Sur l'étude de la hiérarchie des normes en droit public. Eléments de
problématique, Mélanges dédiés à Robert Pelloux, Paris, L'Hermès, 1980, p. 21 et s. V. également, M.
Monin, 1989 : Réflexions à l'occasion d'un anniversaire : trente ans de hiérarchie des normes, D.
1990.Chron.27 et s.

       (66) B. Oppetit, Le droit hors la loi, Droits, n° 10, Définir le droit I, 1989, p. 47 et s.

       (67) Sans doute cette condition n'a-t-elle jamais été rigoureusement respectée, une place plus ou
moins importante ayant toujours été occupée par la coutume au sein des sources de droit. Kelsen lui-
même en reconnaît la validité à la condition, toutefois, de supposer l'existence d'une « norme
d'habilitation » (H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 35, p. 226 et s.), ce qui en fait une source
déléguée de droit et non autonome.

       (68) L. Gannagé, La hiérarchie des normes et les méthodes du droit international privé (Etude de
droit international privé de la famille), th. Paris II, 1998, n° 9, p. 9.

       (69) Cf. pour une analyse formelle, G. Teboul, La coutume, source formelle de droit en droit
administratif, Droits, n° 3, La coutume, 1985, p. 97 et s. ; et du même auteur, Remarques sur la
validité des règles coutumières internes dans l'ordre juridique français, RD publ. 1998.691 et s. Comp.
M. Troper, Du fondement de la coutume à la coutume comme fondement, Droits, n° 3, La coutume,
1985, p. 11 et s.

       (70) L. Le Fur, La coutume et les principes généraux du droit comme sources du droit
international public, Recueil d'études sur les sources du droit en l'honneur du doyen François Gény,
Paris, Sirey, 1934, t. III, p. 362 et s. ; S. Sur, La coutume internationale. Sa vie, son oeuvre, Droits n°
3, La coutume, 1985, p. 111 et s.

       (71) R. Capitant, Le droit constitutionnel non écrit, Recueil... en l'honneur du doyen François
Gény, op. cit. t. III, p. 1 et s. ; La coutume constitutionnelle, RD publ. 1979.959 et s. ; S. Rials,
Réflexions sur la notion de coutume constitutionnelle, Rev. adm. 1979.265 et s.

       (72) M. Pedamon, Y a-t-il lieu de distinguer les usages et les coutumes en droit commercial ?,
RTD com. 1959.335 et s. En droit du commerce international, cf. not. D. Bureau, Les sources
informelles du droit dans les relations privées internationales, th. Paris II, 1992, p. 201 et s. ; J.-M.
Mousseron, Lex mercatoria, bonne mauvaise idée ou mauvaise bonne idée, Mélanges dédiés à Louis
Boyer, Université des sciences sociales de Toulouse, 1996, p. 469 et s. ; in Inventer, Centre dr. entr.
Montpellier, 2001.321 et s. et les nombreuses réf. citées.

       (73) Sur les usages d'entreprise, cf. not. H. Blaise, La dénonciation d'un usage d'entreprise par
l'employeur, in Le droit de l'entreprise dans ses relations externes à la fin du XXe siècle, Mélanges en
l'honneur de Claude Champaud, Dalloz, 1997, p. 73 et s. ; P. Ollier, L'accord d'entreprise dans ses
rapports avec les autres sources du droit dans l'entreprise, Dr. soc. 1982.680 et s.

       (74) P. Amselek, Le rôle de la pratique dans la formation du droit ; aperçus à propos de l'exemple
du droit public français, RD publ. 1983.1471 et s. Comp. G. Teboul, A propos de la coutume dans la
jurisprudence administrative, Dialogue intérieur, in Droit administratif, Mélanges René Chapus,
Montchrestien, 1992, p. 589 et s.

       (75) Cf. Ph. Malaurie, Introduction générale, 2e éd. Cujas, 1994, n° 834, p. 257 ; F. Terre,
Introduction générale au droit, op. cit. n° 212, p. 239. V. aussi l'approche sociologique, J. Carbonnier,
Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, 9e éd. LGDJ, 1998, p. 140 et s.

       (76) B. Oppetit, Sur la coutume en droit privé, Droits, n° 3, La coutume, 1986, p. 39 et s. ; et sous
un titre différent, La survie de la coutume et du droit spontané, in Droit et modernité, PUF, 1998, p. 41
et s. ; et sur la « juridicité » de la lex mercatoria, La notion de source du droit et le droit du commerce
international, Archives de philosophie du droit, t. 27, « Sources » du droit, 1982, p. 43 et s. ; et sous un
autre titre, L'émergence de la lex mercatoria, in Droit et modernité, op. cit. p. 53 et s.

       (77) Cf. par ex. F. Terré, Introduction générale au droit, op. cit. n° 254.
       (78) V. spéc. J. Boulanger, Principes généraux du droit et droit positif, in Le droit privé français
au milieu du XXe siècle : Etudes offertes à Georges Ripert, vol. I, Paris, LGDJ, 1950, p. 51 et s. Et
récemment, N. Molfessis, La notion de principe dans la jurisprudence de la Cour de cassation, RTD
civ. 2001.699 et s.

       (79) P. Morvan, Le principe de droit privé, préf. J.-L. Sourioux, Editions Panthéon-Assas, 1999,
spéc. n° 673 et s. p. 643 et s. où l'auteur ajoute que « le principe de droit privé a pour fonction
viscérale de détruire la portée normative, de ruiner la force obligatoire du droit positif. Il est l'outil de
censure de la législation aux mains de la pratique judiciaire. Telle est sa raison d'être », avant de
démontrer que « cette opinion s'acclimate sans peine en droit public ». Rappr. P. Sargos, Les principes
généraux du droit privé dans la jurisprudence de la Cour de cassation - Les garde-fous des excès du
droit, JCP 2001.éd.G.I.306.

       (80) V. not. sur cette distinction, J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, op. cit. n° 77 et s. p. 92 et
s.

       (81) CE Ass. 3 juill. 1996, Koné, D. 1996.509, note F. Julien-Laferriere ; AJDA 1996.722, chron.
D. Chauvaux et T.-X. Girardot ; RTD civ. 1997.787, obs. N. Molfessis ; cf. aussi D. Alland, Un
nouveau mystère de la pyramide : remise en cause par le Conseil d'Etat des traités conclus par la
France, RGDI publ. 1997.237 et s. ; B. Mathieu et M. Verpeaux, La reconnaissance et l'utilisation des
principes fondamentaux reconnus par les lois de la République par le juge : la contribution de l'arrêt
Koné du Conseil d'Etat à l'analyse de la hiérarchie des normes en matière de droits fondamentaux, D.
1997.Chron.219 et s. où le Conseil d'Etat dégage pour la première fois un PFRLR non préalablement
reconnu par le Conseil constitutionnel selon lequel « l'Etat doit refuser l'extradition d'un étranger
lorsqu'elle est demandée dans un but politique » .

       (82) Notons toutefois que la cour d'appel de Paris s'est autorisée à dégager de la loi du 29 juillet
1881 un principe fondamental de liberté de l'imprimerie et de la librairie (Paris, 18 févr. 1992, D.
1992.IR.141).

       (83) N. Molfessis, obs. sur CE Ass. 3 juill. 1996, Koné, RTD civ. 1997.790.

       (84) B. Mathieu et M. Verpeaux, La reconnaissance et l'utilisation des principes fondamentaux


reconnus par les lois de la République par le juge..., chron. préc. p. 221.

       (85) R. Chapus, De la valeur juridique des principes généraux du droit et des autres règles
jurisprudentielles du droit administratif, D. 1966.Chron.99 et s. ; et du même auteur, Droit
administratif général, t. I, 13e éd. Montchrestien, coll. Domat droit public, 1999, n° 140, p. 102 et s.

       (86) G. Vedel et P. Delvolve, Droit administratif, 7e éd. PUF, coll. Thémis, 1980, p. 384.

       (87) Décis. n° 62-18 DC du 16 janv. 1962, Loi d'orientation agricole, in Les grandes décisions du
Conseil constitutionnel, op. cit. n° 13, p. 165 et s. obs. L. Favoreu et L. Philip.

       (88) R. Chapus, Droit administratif général, op. cit. n° 64, p. 39. Comp. L. Favoreu et Th. S.
Renoux, Constitutionnalité des actes administratifs (Contrôle de la), Rép. Contentieux administratif
Dalloz, 1992, n° 353 et s. ; Th. Di Manno, L'influence des réserves d'interprétation, in La légitimité de
la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Economica, coll. Etudes juridiques, t. 8, 1999, p. 189 et s.
spéc. p. 239 à 261.
       (89) V. not. B. Oppetit, Le rôle créateur de la Cour de cassation, in Bicentenaire de la Cour de
cassation, Doc. fr. 1990, p. 159 et s. ; et, sous un titre différent, L'affirmation d'un droit jurisprudentiel,
in Droit et modernité, PUF, 1998, p. 65 et s.

       (90) Ce qui explique la rétroactivité des revirements de jurisprudence, sur laquelle cf. Ch. Mouly,
Le revirement pour l'avenir, JCP 1994.éd.G.I.3776. Comp. Th. Bonneau, Brèves remarques sur la
prétendue rétroactivité des arrêts de principes et des arrêts de revirement, D. 1995. Chron.24. Adde
M.-A. Frison-Roche, Le juge et son objet, Mélanges Christian Mouly, Litec, 1998, p. 21 et s. Et pour
un exemple récent, cf. Civ. 1re, 21 mars 2000, D. 2000.J.593, note (crit.) Ch. Atias ; RTD civ.
2000.592, obs. P.-Y. Gautier et p. 666, obs. (crit.) N. Molfessis ; F. Pollaud-Dulian, A propos de la
sécurité juridique, RTD civ. 2001.487 et s.

       (91) P. Hebraud, Le juge et la jurisprudence, Mélanges offerts à Paul Couzinet, Université des
sciences sociales de Toulouse, 1974, p. 329, spéc. n° 3, p. 333.

       (92) H. Motulsky, Principes d'une réalisation méthodique du droit privé. La théorie des éléments
générateurs des droits subjectifs, préf. P. Roubier, Dalloz, coll. Philosophie et théorie générale du
droit, 1991, rééd. 1948.

       (93) Cf. l'intéressante « théorie des trois plans » proposée par P. Morvan, Le principe de droit
privé, op. cit. n° 650 et s. p. 621 et s.

       (94) B. Oppetit, Les réponses ministérielles aux questions écrites des parlementaires et
l'interprétation des lois, D. 1974.Chron.107 et s.

       (95) R. Libchaber, Réponses ministérielles, pratiques administratives et sources du droit, RTD civ.
1998.216 et s.

       (96) Si le juge saisi d'un litige peut retenir une interprétation différente de celle de
l'administration, l'autorité relative de sa décision semble laisser intacte la valeur de la réponse
ministérielle en dehors de l'espèce tranchée.

       (97) Cf. par ex. CE 25 sept. 1998, M. Mégret, AJDA 1999.240, note F. Lemaire ; et, L.
Baghestani-Perrey et M. Verpeaux, Un nouvel abandon partiel de la notion d'acte de gouvernement
(note sous CE Sect. 25 sept. 1998, M. Mégret), RFD adm. 1999.345 et s.

       (98) F. Salat-Baroux, Persistance des actes de gouvernement (la désignation des membres du
Conseil constitutionnel), concl. sur CE Ass. 9 avr. 1999, Mme Ba, RFD adm. 1999.566 et s.Adde, P.
Serrand, L'irréductible acte de gouvernement, D. 2000.J.335.

       (99) Dans la mesure, toutefois, où ces actes porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la
Convention européenne des droits de l'homme, cf. en ce sens, Th. S. Renoux, Le droit au recours
juridictionnel, JCP 1993.éd.G.I.3675, spéc. n° 6 ; J. Vincent, S. Guinchard, G. Montagnier et A.
Varinard, Institutions judiciaires, Organisation. Juridictions. Gens de justice, Dalloz, 5e éd. coll.
Précis, 1999, n° 78, p. 108.

       (100) R. Chapus, Droit administratif général, op. cit. n° 1152, p. 906, qui fait observer « que les
pouvoirs publics peuvent avoir besoin d'avoir les mains libres (et c'est précisément le cas dans les «
matières de gouvernement ») et qu'il ne faut pas céder à la folie des contrôles qui est une
caractéristique de notre temps » .
       (101) « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par
l'autre partie ».

       (102) J.-F. Lachaume, Juridiction administrative et contrôle de réciprocité des traités et accords


internationaux (art. 55 de la Constitution), note sous CE Ass. 9 avr. 1999, Mme Chevrol-Benkeddach,
RDF adm. 1999.937 et s. spéc. p. 949.

       (103) Ibid.

       (104) Cf. R. Libchaber, Pour un contrôle judiciaire de la ratification des traités internationaux,


obs. sur Civ. 1re, 29 mai 2001, RTD civ. 2001.706 et s.

       (105) Cf. N. Molfessis, Le Conseil constitutionnel et le droit privé, préf. M. Gobert, LGDJ, coll.
Bibl. dr. privé, t. 287, 1997, n° 56, p. 44 et les réf. citées.

       (106) Cf. F. Sudre, Droit international et européen des droits de l'homme, 4e éd. PUF, coll. Droit
fondamental, 1999, n° 119 et s. p. 166 et s. et n° 131, p. 188 ; et du même auteur, Droits intangibles
et/ou droits fondamentaux : y a-t-il des droits prééminents dans la CEDH ?, Mélanges M.-A. Eissen,
Bruylant, 1995, p. 381 et s.

       (107) D. Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 126-127.

       (108) Cf. not., S. Arne, Existe-t-il des normes supraconstitutionnelles ? Contribution à l'étude des
droits fondamentaux et la constitutionnalité, RD publ. 1993.459 et s. ; R. Badinter, Le Conseil
constitutionnel et le pouvoir constituant, in Libertés, Mélanges Jacques Robert, Montchrestien, 1998,
p. 217 et s. ; L. Favoreu et G. Vedel, Souveraineté et supraconstitutionnalité, Pouvoirs 1993, n° 67, p.
71 et s. ; B. Genevois, Les limites d'ordre juridique à l'intervention du pouvoir constituant, RFD adm.
1998.909 et s. ; B. Mathieu, La supraconstitutionnalité existe-t-elle ? Réflexions sur un mythe et
quelques réalités, Petites affiches, 8 mars 1995, p. 12 et s.

       (109) L. Favoreu, La constitutionnalisation du droit, in L'unité du droit, Mélanges en hommage à


Roland Drago, Economica, 1996, p. 25 et s. spéc. p. 41.

       (110) De façon ambiguë, le Conseil décide (décis. n° 92-312 DC du 2 sept. 1992, Traité de
Maastricht II, in Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, op. cit. n° 45, p. 799 et s. obs. L.
Favoreu et L. Philip, spéc. n° 68 et s.) que « le pouvoir constituant est souverain, qu'il lui est loisible
d'abroger ou de compléter des dispositions de valeur constitutionnelle » (§ 19) mais impose dans le
même temps des « réserves » (§ 19) et des « limites » (§ 34) à la souveraineté de ce pouvoir, dont le
respect ne peut être assuré que par le Conseil constitutionnel lui-même... Adde décis. n° 99-410 DC du
15 mars 1999, Loi relative à la Nouvelle-Calédonie, qui relance le débat selon B. Mathieu et M.
Verpeaux, JCP 2000.éd.G.I.201, n° 4.

       (111) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 34, p. 193 et s. ; Théorie générale du droit et de
l'Etat, op. cit. p. 169 et s.

       (112) Ph. Malaurie, Anthologie de la pensée juridique, Cujas, 1996, p. 263. Au fond, résume un
auteur, « toute sa laborieuse démonstration se ramène (...) à cette tautologie : si l'on doit obéir au droit,
c'est parce qu'il faut supposer qu'on doit obéir au droit », P. Amselek, Réflexions critiques autour de la
conception kelsénienne de l'ordre juridique, RD publ. 1978.5 et s. spéc. p. 17.
       (113) « ... à l'égal de la démonstration de l'existence de Dieu par Saint Anselme », G. Vedel,
Aspects généraux et théoriques, Introduction, in L'unité du droit, Mélanges en hommage à Roland
Drago, Economica, 1996, p. 1 et s. spéc. p. 3.

       (114) Thomas d'Aquin, Somme théologique, IIe partie, 1re sect., question 91, art. 1 et question 93,
art. 2, Ed. du Cerf, 1993, t. II, p. 573 et 584-585.

       (115) Sur lequel cf. J.-M. Auby, Le décret du 28 novembre 1983, AJDA 1984.124 ; P. Delvolvé,
De nouvelles modalités pour les actes administratifs unilatéraux, D. 1984.Chron.137 et s. spéc. n° 33 à
35.

       (116) Sur cette conséquence critiquable du décret, cf. P. Delvolvé, De nouvelles modalités pour
les actes administratifs unilatéraux, chron. préc. n° 34.

       (117) Sur l'ineffectivité du décret de 1983 et sa probable illégalité, cf. R. Chapus, Droit


administratif général, op. cit. n° 687, p. 491 et s.

       (118) Selon le critère posé, entre circulaires interprétative et réglementaire, par CE Ass. 29 janv.
1954, Institution Notre-Dame du Kreisker, in Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, 12e
éd. Dalloz, 1999, obs. M. Long, P. Weil, G. Braibant, P. Delvolvé et B. Genevois.

       (119) M. Cliquennois, Que reste-t-il des directives ? A propos du vingtième anniversaire de l'arrêt
Crédit foncier de France, AJDA 1992.3 et s.

       (120) Auquel il conviendrait d'ajouter les déclarations d'intention, formules recommandatoires


voire incantatoires et autres formulations d'objectifs énoncés dans l'article premier de nombreuses lois
(G. Rouhette, L'article premier des lois, in Les mots de la loi, Economica, coll. Etudes juridiques,
1999, p. 37 et s.), expression d'un « droit à l'état gazeux » selon les termes du Conseil d'Etat (Rapport
public 1991, Doc. fr. EDCE n° 43, p. 15 et s. spéc. p. 32) parce que dépourvu de tout contenu normatif
véritable.

       (121) Soc. 29 juin 1999 (2 arrêts), Dr. soc. 1999.795, concl. J. Duplat ; D. 2000.50, note R. de
Quenaudon ; Petites affiches, n° 50, 10 mars 2000.11, obs. S. Joly ; RTD civ. 2000.200, obs. N.
Molfessis ; JCP 2000.éd.G.I.263, obs. P. Morvan ; cf. également, B. Boubli, La force obligatoire des
recommandations patronales, TPS août-sept. 1999.chron.14, p. 6 et s.

       (122) N. Molfessis, obs. préc. spéc. p. 206.

       (123) Ph. Neau-Leduc, La réglementation de droit privé, préf. Th. Revet, Litec, coll. Bibl. dr. entr.
t. 38, 1998, spéc. n° 110 et s.

       (124) Sur le rôle « créateur » de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, cf.


P.-H. Antonmattei, Bref retour sur la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation,
Mélanges Christian Mouly, Litec, 1998, p. 3 et s. ; N. Molfessis, La notion de principe dans la
jurisprudence de la Cour de cassation, RTD civ. 2001.703.

       (125) F. Terré, Sur les sources du droit en général et du droit du travail en particulier, in Les
sources du droit du travail, B. Teyssié (dir.), PUF, coll. Droit, Ethique, Société, 1998, p. 15 et s. spéc.
n° 11, p. 25-26.

       (126) J. Chevallier, Vers un droit post-moderne ? Les transformations de la régulation juridique,


RD publ. 1998.659 et s. spéc. p. 675 et s.
       (127) Rappr. P. Amselek, L'évolution générale de la technique juridique dans les sociétés
occidentales, RD publ. 1982.292, qui observe que « le droit tend à devenir de plus en plus une sorte de
technique de « cogestion » des conduites, qui s'inscrit dans un dialogue permanent et complexe entre
les gouvernants et les gouvernés eux-mêmes ».

       (128) Lequel s'opère au détriment du Parlement dont il a été observé qu'il se « dépouille lui-même
de ses pouvoirs en créant des autorités qui, de droit ou de fait, légifèrent à sa place » : Ph. Jestaz,
Rapport de synthèse, in Le renouvellement des sources du droit des obligations, Journées nationales
Ass. H. Capitant, LGDJ, 1996, p. 175 et s. spéc. p. 179-180.

       (129) L'inflation des avis en droit, Th. Revet (dir.), Economica, coll. Etudes juridiques, 1998.

       (130) Cf. à propos des communiqués de la COB, J.-J. Daigre, Une nouvelle source du droit, le
communiqué ? A propos d'un communiqué de la COB du 4 mai 1999, JCP 1999.éd.G.Act. p. 1277.

       (131) Par où se manifeste souvent un « pouvoir moral » : Ph. Jestaz, Pouvoir juridique et pouvoir
moral, RTD civ. 1990.625 et s.

       (132) Il a par exemple été démontré que la Commission des clauses abusives joue, de facto, un «
rôle quasi-normatif » en étant une « source de textes généraux et impersonnels » même si, de jure, elle
est cantonnée dans « un simple rôle consultatif et de proposition » : L. Leveneur, La Commission des
clauses abusives et le renouvellement des sources du droit des obligations, in Le renouvellement des
sources du droit des obligations, op. cit. p. 155 et s.

       (133) Dans le prolongement de l'exemple précédent, il convient de rappeler que la Cour de


cassation a estimé que les recommandations de la Commission des clauses abusives ne sont pas
génératrices de règles dont la méconnaissance ouvre droit à cassation (Civ. 1re, 13 nov. 1996, D.
1997.Somm.174, obs. Ph. Delebecque ; JCP 1997.éd.G.I.4015, n° 1, obs. Ch. Jamin ; RTD civ.
1997.424, obs. J. Mestre, et p. 791, obs. R. Libchaber).

       (134) Cf. not. B. Fauvarque-Cosson, Les contrats du commerce international, une approche


nouvelle : les principes d'Unidroit relatifs aux contrats du commerce international, RID comp.
1998.463 et s. ; J. Huet, Les contrats commerciaux internationaux et les nouveaux Principes d'Unidroit
: une nouvelle lex mercatoria ?, Petites affiches, 10 nov. 1995.6 et s. ; C. Kessedjian, Un exercice de
rénovation des sources du droit des contrats du commerce international : les principes proposés par
l'Unidroit, Rev. crit. DIP 1995.641 et s. ; C. Larroumet, La valeur des principes d'Unidroit applicables
aux contrats du commerce international, JCP 1997.éd.G.I.4011.

       (135) Les principes du droit européen du contrat, vol. 1, L'exécution, l'inexécution et ses suites,
trad. I. de Lamberterie, G. Rouhette, D. Tallon, Doc. fr. 1997. Sur lesquels cf. not. Ch. Jamin, Un droit
européen des contrats ?, in Le droit privé européen, P. de Vareilles-Sommieres (dir.), Economica, coll.
Etudes juridiques, 1998, p. 40 et s. ; J. Raynard, Les « Principes du droit européen du contrat » : une
lex mercatoria à la mode européenne, RTD civ. 1998.1006 et s.n° 8 ; G. Rouhette, Les codifications
du droit des contrats, Droits, n° 24, La codification, 1996, p. 113 et s. ; D. Tallon, Vers un droit
européen du contrat, Mélanges offerts à André Colomer, Litec, 1993, p. 485 et s. ; Les principes pour
le droit européen du contrat : quelles perspectives pour la pratique ?, Defrénois, 2000, art. 37182, p.
683.

       (136) J. Raynard, chron. préc. p. 1006.


       (137) D. Mazeaud, A propos du droit virtuel des contrats : réflexions sur les principes d'Unidroit
et de la Commission Lando, Mélanges Michel Cabrillac, Dalloz, Litec, 1999, p. 206 et s.

       (138) Résolutions du 26 mai 1989, JOCE C 158/401, 26 juin 1989 ; et du 6 mai 1994, JOCE C
205/518, 25 juill. 1994.

       (139) Cf. not. G. Gandolfi, Pour un code européen des contrats, RTD civ. 1992.707 et s.; R.
Sacco, Non, oui, peut-être, Mélanges Christian Mouly, Litec, 1998, p. 163 et s. ; C. Witz, Plaidoyer
pour un code européen des obligations, D. 2000.Chron.79 et s.

       (140) V. not. B. Oppetit, Droit commun et droit européen, in L'internationalisation du droit,


Mélanges en l'honneur de Yvon Loussouarn, Dalloz, 1994, p. 311 et s. ; J. Gaudemet, Du jus commune
au droit communautaire, in Clefs pour le siècle, Dalloz, coll. Paris II, 2000, p. 1011 et s. ; et sur la
place du droit romain dans cette évolution, Ph. Malaurie, Droit romain des obligations. Droit français
contemporain des contrats et l'Europe d'aujourd'hui, JCP 2000.éd.G.I.246.

       (141) Est à cet égard significative la récente transposition, par la loi du 19 mai 1998, de la
directive du 25 juillet 1985 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, qui s'est traduite
par une juxtaposition des règles nouvelles à celles préexistantes (art. 1386-18 c. civ.) sur les
conséquences de laquelle cf. not. J.-M. Mousseron, Nouveau regard sur les clauses de non-réparation,
Cah. dr. entr. 1998/5, p. 4 et s.

       (142) B. Oppetit, L'eurocratie ou le mythe du législateur suprême, D. 1990.Chron.76 et s. ; ou


sous un titre différent, L'omnipotence technocratique et eurocratique, in Droit et modernité, PUF, coll.
Doctrine juridique, 1998, p. 31 et s. V. également, Ch. Mouly, Le droit peut-il favoriser l'intégration
européenne ?, RID comp. 1985.895 et s. spéc. n° 1 à 44.

       (143) G. Ripert, Les forces créatrices du droit, LGDJ, coll. Reprint, rééd. 1955.

       (144) J. Chevallier, Vers un droit post-moderne..., article préc. spéc. p. 665 et 673.

       (145) Précédemment étudié.

       (146) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 43, p. 318 et s., où l'auteur défend le « caractère
inévitable d'une construction moniste » au motif, résume-t-il, que « le droit international doit être
conçu, ou bien comme un ordre juridique total délégué par le droit étatique et par conséquent
incorporé à celui-ci, ou bien comme un ordre juridique total qui délègue les ordres juridiques
étatiques, qui leur est supérieur, et qui les comprend tous comme des ordres juridiques partiels. Ces
deux interprétations du rapport entre droit international et droit étatique représentent une construction
moniste. Mais la première pose la primauté du droit étatique ; la seconde, la primauté de l'ordre
juridique international » (p. 322).

       (147) V. not. M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et désordre, PUF,
coll. Les voies du droit, 1988, p. 188 et s.

       (148) J. Donnedieu de Vabres, La Constitution de 1946 et le droit international, D. 1948. Chron.5.

       (149) D. Alland, Le droit international « sous » la Constitution de la Ve République, RD publ.


1998.1649 et s.

       (150) Pour une comparaison des différents systèmes, cf. l'étude récente du Conseil d'Etat, La
norme internationale en droit français, Doc. fr. 2000.
       (151) CPJI avis du 4 févr. 1932, Traitement des prisonniers de guerre polonais à Dantzig, série
A/B, n° 44.

       (152) Cf. M. Virally, Sur un pont aux ânes : les rapports entre droit international et droits internes,
Mélanges Rolin, Pédone, 1964, p. 488 et s. En droit administratif, G. Teboul, Ordre juridique
international et ordre juridique interne. Quelques réflexions sur la jurisprudence du juge administratif,
Dr. adm. 1999.697 et s. Adde G. Bachelier, La norme internationale et le droit interne devant le juge
administratif : où en sommes-nous ?, Rev. crit. DIP 2000.1 et s.

       (153) CE Ass. 6 juin 1997, Aquarone, JCP 1997.éd.G.II.22945, note G. Teboul ; RFD adm.
1997.1068, concl. G. Bachelier ; AJDA 1997.630, chron. D. Chauvaux et Th.-X. Girardot ; cf.
également, D. Alland, La coutume internationale devant le Conseil d'Etat : l'existence sans la
primauté, RGDI publ. 1997.1053 et s.

       (154) J. Carbonnier, Variations sociologiques, in Droit pénal, droit européen, Mélanges offerts à
Georges Levasseur, Litec, Gazette du Palais, 1992, p. 20 ; et du même auteur, Droit civil, Introduction,
24e éd. PUF, coll. Thémis, 1996, n° 141-f).

       (155) « Si le Conseil constitutionnel... a déclaré qu'un engagement international comporte une


clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international
en cause ne peut intervenir qu'après la révision de la Constitution ».

       (156) CE Ass. 30 oct. 1998, Sarran, Levacher et autres, RFD adm. 1998.1081, concl. Ch. Maugüé
; AJDA 1998.962, chron. F. Raynaud et P. Fombeur ; RTD civ. 1999.232, obs. N. Molfessis ; cf. aussi
D. Alland, Consécration d'un paradoxe : la primauté du droit interne sur le droit international
(Réflexions sur le vif à propos de l'arrêt du Conseil d'Etat, Sarran, Levacher et autres du 30 oct.
1998), RFD adm. 1998.1094 et s. ; E. Aubin, La neutralisation constitutionnelle de l'exception
d'inconventionnalité ou la fin d'un malaise dans la Constitution, D. 2000.J.152 ; L. Dubouis, Les trois
logiques de la jurisprudence Sarran, RFD adm. 1999.57 et s. ; B. Mathieu et M. Verpeaux, A propos
de l'arrêt du Conseil d'Etat du 30 octobre 1998, Sarran et autres : le point de vue du
constitutionnaliste, RFD adm. 1999.67 et s. ; D. Simon, L'arrêt Sarran : dualisme incompressible ou
monisme inversé ?, Europe 1999, n° 3, p. 4 et s.

       (157) Ass. plén. 2 juin 2000, Mlle Fraisse, D. 2000.J.865, note B. Mathieu et M. Verpeaux ; JCP
2001.éd.G.II.10453, note A.-C. de Foucauld ; cf. également B. Beignier et S. Mouton, La Constitution
et la Convention européenne des droits de l'homme, rang et fonction, D. 2001.Chron. 1636 et s. ; B. de
Lamy et P. Deumier, La hiérarchie des normes : une pyramide à géométrie variable, Petites affiches,
n° 201, 9 oct. 2000.8 et s. ; A. Rigaux et D. Simon, Droit communautaire et Constitution française :
une avancée significative de la Cour de cassation (A propos de l'arrêt Fraisse du 2 juin 2000), Europe,
août-sept. 2000.chron.8, p. 3 et s.

       (158) Le Conseil d'Etat se réfère, pour sa part, aux « dispositions de nature constitutionnelle »
mais il ne semble pas que cette différence de rédaction modifie le sens de la règle.

       (159) V. cep. sur cette interprétation les réserves de D. Simon, L'arrêt Sarran..., article préc.

       (160) Rappr. de l'opinion de certains auteurs qui estiment que le système n'est moniste que dans
l'ordre infraconstitutionnel et devient en revanche dualiste lorsqu'il s'agit d'examiner les rapports entre
la Constitution et le droit international (cf. B. Mathieu et M. Verpeaux, La reconnaissance et
l'utilisation des principes fondamentaux..., article préc. spéc. p. 223 ; A propos de l'arrêt du Conseil
d'Etat du 30 octobre 1998..., article préc. spéc. p. 75).
       (161) Ch. Maugüé concl. pour CE Ass. 30 oct. 1998, Sarran, Levacher et autres, RFD adm. 1998.
1081 et s. spéc. p. 1086, préc.

       (162) D. Alland, Consécration d'un paradoxe..., article préc. spéc. p. 1104. Comp. G. Teboul,
Ordre juridique international et ordre juridique interne. Quelques réflexions sur la jurisprudence du
juge administratif, Dr. adm. 1999.697 et s.

       (163) Rappr. N. Molfessis, La hiérarchie des normes ressuscitée par le Conseil d'Etat, obs. sur CE
Ass. 30 oct. 1998, Sarran, Levacher et autres, RTD civ. 1999.232 et s.spéc. p. 234-235, qui écrit : «
Certes, c'est bien parce qu'il existe un ordre international qu'il est possible de parler d'ordre interne ;
mais l'ordre international sécrété vient précisément, en retour, interdire toute vision d'un ordre interne
autonome, ou si l'on préfère d'un ordre interne auquel il serait possible de conférer quelque existence
indépendante. Il ne peut dès lors exister de hiérarchie des normes propres à l'ordre interne, faute
d'ordre interne reposant entièrement sur des normes de même nature. Si l'on entendait poser une
hiérarchie des normes, dans l'ordre interne, comment pourrait-on en effet y intégrer des traités dont la
spécificité est de transporter avec eux, outre des normes, des juridictions internationales récusant leur
soumission éventuelle à cet ordre interne ? ».

       (164) Ch. mixte, 24 mai 1975, Soc. des Cafés Jacques Vabre, préc.

       (165) CE Ass. 20 oct. 1989, Nicolo, préc.

       (166) Cf. concl. proc. gén. A. Touffait sur Ch. mixte, 24 mai 1975, D. 1975.497 et s. spéc. p. 504,
2e col.

       (167) Cf. D. Alland, Consécration d'un paradoxe : la primauté du droit interne sur le droit
international..., article préc. p. 1094 et s. qui observe que « la Constitution et les organes chargés de
son interprétation ne sont pas en mesure de la placer au-dessous du droit international. Affirmer une
subordination suppose la supériorité de ce à quoi on se soumet, laquelle ne saurait dépendre de ce qui
est subordonné. Or toute l'ingéniosité du monde ne permettrait pas de trouver le moyen pour une
Constitution ou un de ses organes constitués de placer le droit international au-dessus d'elle-même.
D'où leur viendrait la puissance de lévitation permettant de hisser la valeur de quelque norme que ce
soit hors de leur propre portée ? » (p. 1101) ; et l'auteur d'ajouter que la Constitution ne saurait
affirmer elle-même la supériorité du droit international car « en termes de hiérarchie des normes, le
principe de la supériorité d'une norme ne saurait dépendre de l'énoncé d'une norme de rang inférieur »
(p. 1102).

       (168) CJCE 5 févr. 1963, Van Gend en Loos, aff. 26/62, Rec. p. 1, concl. K. Roemer (nous
soulignons).

       (169) Ordre dont la hiérarchie interne se semble pas encore parfaitement définie : l'échec de la
déclaration n° 16 annexée au traité de Maastricht tendant à l'établissement d'une « hiérarchie
appropriée » des actes communautaires en porte le témoignage (cf. R. Kovar, La déclaration n° 16
annexée au traité sur l'Union européenne : chronique d'une mort annoncée ?, Cah. Dr. eur. 1997/3 ; P.-
Y. Monjal, La conférence intergouvernementale de 1996 et la hiérarchie des normes communautaires,
RTD eur. 1996.681 et s.). Si cette déclaration a pu surprendre une partie de la doctrine (J. Boulouis,
Droit institutionnel de l'Union européenne, 6e éd. Montchrestien, coll. Domat Droit public, 1997, p.
247-248), elle aura également nourri les espérances de ceux qui déplorent un « désordre normatif »
communautaire (V. Nicolas, Le désordre normatif, Pouvoirs, n° 69, Europe, de la Communauté à
l'Union, p. 35). Certains voient désormais dans le traité d'Amsterdam les bases d'un ordre
constitutionnel, voire supra-constitutionnel ( H. Gaudin, Amsterdam : l'échec de la hiérarchie des
normes ?, RTD eur. 1999.1 et s.) que vient de couronner la proclamation de la Charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne, prémice d'une future Constitution européenne (cf. not. F.
Benoît-Rohmer, La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, D. 2001.Chron.1483 ; A.
Gruber, La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : un message clair hautement
symbolique, Petites affiches, 22 janv. 2001.4 et s.).

       (170) CJCE 15 juill. 1964, Costa c/ ENEL, aff. 6/64, Rec. p. 1141, concl. M. Lagrange.

       (171) Cf. not. G. Isaac, Droit communautaire général, 7e éd. A. Colin, coll. U, 1999, p. 186.

       (172) CJCE 9 mars 1978, Simmenthal, aff. 106/77, Rec. p. 629, concl. G. Reischl.

       (173) Sur cette interprétation, cf. J. Boulouis, Droit institutionnel de l'Union européenne, 6e éd.
Montchrestien, coll. Domat Droit public, 1997, n° 408.

       (174) Civ. 1re, 13 oct. 1993, Contrats, conc. consom. 1993/12, n° 220, p. 11.

       (175) Deux arrêts récents du 3 décembre 1999, Association ornithologique et mammalogique de


Saône-et-Loire, conduisent toutefois des auteurs à s'interroger sur une éventuelle consécration par le
Conseil d'Etat de la primauté du droit communautaire... sur la Constitution (P. Cassia et E. Saulnier,
RD publ. 2000.289 et s. spéc. p. 302 à 307).

       (176) Bien que la Cour de cassation se fonde, dans un syncrétisme critiquable (F.-Ch. Jeantet, La
Cour de cassation et l'ordre juridique communautaire, JCP 1975.éd.G.I.2743), à la fois sur l'article 55
de la Constitution et sur la spécificité de l'ordre juridique communautaire, paraphrasant ainsi l'arrêt
Costa, elle a refusé de suivre les conclusions de son procureur général qui lui recommandait de ne pas
fonder l'argumentation sur l'article 55 mais sur la « nature même de l'ordre juridique institué par le
traité de Rome », estimant du même coup insuffisante cette dernière justification.

       (177) P. Frydman, concl. sur CE Ass. 20 oct. 1989, Nicolo, RFD adm. 1989.816 et s. spéc. p. 817.

       (178) Décis. n° 92-308 DC du 9 avr. 1992, Traité de Maastricht, in Les grandes décisions du


Conseil constitutionnel, op. cit. n° 45, p. 799, obs. L. Favoreu et L. Philip.

       (179) A. Decocq, Le désordre juridique français, in Ecrits préc. p. 147 et s. spéc. p. 161.

       (180) L. Dubouis, Le juge français et le conflit entre norme constitutionnelle et norme


européenne, in L'Europe et le droit, Mélanges Boulouis, Dalloz, 1991, p. 205 et s.

       (181) R. Libchaber, L'extériorisation progressive de la loi (CE 3 déc. 1999, Association


ornithologique et mammologique de Saône-et-Loire (AOMSL), RTD civ. 2000.195 et s.

       (182) D. de Béchillon, De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité internationale


des lois par le juge ordinaire, article préc. spéc. p. 234.

       (183) R. Libchaber, obs. préc.

       (184) Le Conseil constitutionnel estime que les normes communautaires dérivées, ne pouvant
entrer dans le cadre de l'article 54 de la Constitution, ne peuvent lui être soumises et échappent donc à
son contrôle (décis. n° 77-90 DC du 30 déc. 1977, Taxes européennes, RD publ. 1979.468, note L.
Philip ; RTD eur. 1979.142, note G. Isaac et J. Molinier). La protection des droits fondamentaux est
donc assurée directement par la CJCE qui se réfère aux « traditions constitutionnelles communes aux
Etats membres » contribuant peut-être ainsi à la renaissance d'un jus commune (Ch. Mouly, Le droit
peut-il favoriser l'intégration européenne ?, article préc. spéc. n° 57). Pour autant, le contrôle n'est pas
sans faille dans la mesure où une règle communautaire contraire à un principe constitutionnel français
peut s'imposer au droit national dès lors que ce principe n'est pas « commun » à tous les Etats
membres ou que son interprétation communautariste ne coïncide pas avec l'interprétation nationale qui
en est faite (F. Chevallier, L'exception d'inconstitutionnalité. L'état de droit et la construction de la
Communauté européenne). Adde Th. Meindl, Le contrôle de constitutionnalité des actes de droit
communautaire dérivé en France. La possibilité d'une jurisprudence Solange II, RD publ. 1997. 1665
et s. Comp. la solution prudente de la Cour constitutionnelle allemande du 22 octobre 1986 qui ne
reconnaît son incompétence que tant qu'il existe une protection équivalente des droits fondamentaux
au niveau européen (Ch. Walter, Le contrôle de constitutionnalité des actes du droit communautaire
dérivé par la Cour constitutionnelle allemande, RD publ. 1997. 1285.).

       (185) L. Favoreu et al. Droit constitutionnel, op. cit. n° 94.

       (186) Examinant le cas des « lois inconstitutionnelles » , l'éminent auteur explique qu'en l'absence
de contrôle organisé de constitutionnalité des lois, la Constitution donne au législateur le pouvoir de
donner aux normes qu'il crée un contenu qui peut être ou non conforme à la Constitution. Celle-ci «
crée elle-même cette possibilité par le fait qu'elle ne laisse à aucun autre organe que le législateur la
faculté de décider si les normes édictées par lui en tant que lois sont bien lois au sens de la
Constitution. Les dispositions de la Constitution qui règlent la législation ont alors le caractère de
dispositions simplement alternatives. La Constitution contient tout à la fois un règlement direct et un
règlement indirect de la législation ; et l'organe législatif a le choix entre les deux » (H. Kelsen,
Théorie pure du droit, op. cit. n° 35, p. 269). Et l'auteur d'en conclure de manière générale qu'« entre
une norme supérieure et une norme inférieure d'un ordre juridique, aucun conflit n'est possible qui
détruise l'unité de ce système de normes en rendant impossible de le décrire par un corps de
propositions de droit exemptes de contradictions mutuelles » (op. cit. p. 272 ; adde, sur le même
raisonnement appliqué à la loi étatique contraire à un traité international, op. cit. n° 43, p. 320).

       (187) Ch. Atias, Philosophie du droit, PUF, coll. Thémis, 1999, p. 40.

       (188) Ph. Jestaz, L'obligation et la sanction : à la recherche de l'obligation fondamentale,


Mélanges offerts à Pierre Raynaud, Dalloz, 1985, p. 273 et s.

       (189) Laquelle se réfère généralement à l'exigence d'une sanction étatique, cf. D. de Béchillon,


Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Ed. O. Jacob, 1997. Ph. Jestaz, La sanction ou l'inconnue du droit, D.
1986.Chron.197 et s. Comp. A. Jeammaud, La règle de droit comme modèle, D. 1990.Chron.199 et s.

       (190) F. Terré, Définir le Droit ?, RRJ 1983-2, p. 374 et s. spéc. 376 ; et du même auteur,
Introduction générale au droit, op. cit. n° 27, p. 32-33.

       (191) Lesquels reposent sur le postulat, au demeurant fort contestable, qu'en décidant de soumettre
une situation donnée à une règle qu'elle établit, l'autorité normative a entendu exclure du champ
d'application de cette règle toutes les autres situations.

       (192) Kelsen lui-même avait pressenti le caractère artificiel de son explication lorsqu'il relevait, à
propos des rapports entre la Constitution et la loi, qu'il « est fort possible que ni le législateur
constituant lui-même ni non plus le législateur ordinaire n'aient pas ou en tout cas pas pleinement
conscience de la situation ainsi créée. Mais celui qui décrit objectivement l'état du droit que crée -
consciemment ou inconsciemment - une Constitution qui ne délègue pas le contrôle de la
constitutionnalité des lois à un organe distinct du législateur ne saurait arriver à une conclusion
différente » (H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 35, p. 269).

       (193) D. de Béchillon, De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité internationale


des lois par le juge ordinaire, article préc. spéc. p. 232.

       (194) Ainsi justement baptisée par Th. Revet, obs. in RTD civ. 1996.726.

       (195) Décis. n° 96-375 DC du 9 avr. 1996, Rec. p. 60 ; AJDA 1996.369, chron. O. Schrameck ;


RD publ. 1996.1147, obs. X. Prétot ; RD publ. 1997.13, chron. D. Rousseau ; RFD const. 1996, obs. P.
Gaïa.

       (196) TGI Saintes, 21 févr. 1997, D. 1999.Somm.23, obs. M.-L. Niboyet. Cf. également, J.-P.
Marguénaud, De quelques applications novatrices de la CEDH par les juges du fond en matière de
déchéance du droit aux intérêts, RTD civ. 1999.492 et s. et la jurisprudence citée.

       (197) N. Molfessis, Le contrôle de conventionnalité d'une loi conforme à la Constitution, RTD


civ. 1999.239 et s.

       (198) Civ. 1re, 20 juin 2000 (deux arrêts), JCP 2000.éd.G, n° 27 du 5 juill. 2000, Actualité, p.
1305 ; JCP 2000.éd.G.IV.2383 et 2384 ; R. Libchaber, Les lois rétroactives devant le contrôle de
conventionnalité : la pression des droits de l'homme sur le système juridique français, RTD civ.
2000.676 et s.; J.-P. Marguénaud, Le réfrènement des ardeurs européennes des juges du fond par la
première chambre civile de la Cour de cassation ou comment exposer la France à de nouvelles avanies
strasbourgeoises en relançant l'affaire du tableau d'amortissement, RTD civ. 2000.933 et s.; B.
Mathieu, Une jurisprudence qui pèche par excès de timidité (Obs. sous les décisions de la 1re chambre
civile de la Cour de cassation du 20 juin 2000), RFD adm. 2000.1201 et s. ; N. Molfessis, La sécurité
juridique et la fonction normatrice de la loi, RTD civ. 2000.670 et s.; M.-L. Niboyet, La conformité à
la Convention EDH de la loi de validation du 12 avril 1996 : « l'affaire du tableau d'amortissement »
épilogue judiciaire ?, D. 2000.cah. dr. aff.699 et s. ; J. Sainte-Rose, Le contrôle de la conventionnalité
des validations législatives par le juge judiciaire (concl. sur Civ. 1re 20 juin 2000), RFD adm.
2000.1189 et s.

       (199) J.-P. Marguénaud, préc.

       (200) Cf. Th. Renoux, L'apport du Conseil constitutionnel à l'application de la théorie de la


séparation des pouvoirs en France, D. 1991.Chron.169 et s. qui écrit : « Le respect de la hiérarchie des
normes implique que la loi contraire à la Constitution soit « invalidée » , c'est-à-dire privée
d'application », ce qui suppose la présence d'un contrôle. Or, observe cet auteur, « le droit
constitutionnel français admet le principe de la hiérarchie des normes, mais n'en retire pour l'instant
que des conséquences limitées, puisqu'il ne permet pas aux juges ordinaires d'appliquer la Constitution
plutôt que la loi contraire à celle-ci » .

       (201) « Une cohérence et une sécurité juridique maximales supposent l'existence d'un contrôle
juridictionnel propre à assurer la conformité de chaque norme à celles qui lui sont supérieures en
remontant jusqu'à la norme fondamentale », A. Decocq, Le désordre juridique français, article préc.
spéc. p. 148. Adde D. Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 17.

       (202) G. Carcassonne, Faut-il maintenir la jurisprudence issue de la décision n° 74-54 DC du 15


janvier 1975 ?, in La Constitution, le traité et la loi, contribution au débat sur la hiérarchie des
normes : Cah. Cons. const. 1999, n° 7, p. 93 et s. ; O. Cayla, Lire l'article 55 : comment comprendre
un texte établissant une hiérarchie des normes comme étant lui-même le texte d'une norme ?, in La
Constitution, le traité et la loi, contribution au débat sur la hiérarchie des normes : Cah. Cons. const.
1999, n° 7, p. 77 et s. ; B. Mathieu, Les validations législatives devant le juge de Strasbourg : une
réaction rapide du Conseil constitutionnel mais une décision lourde de menaces pour l'avenir de la
juridiction constitutionnelle (A propos des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme du
28 oct. 1999 et du Conseil constitutionnel 99-422 DC et 99-425 DC), RFD adm. 2000.289 et s. spéc.
p. 297 et s. ; D. Rousseau, Chronique de jurisprudence constitutionnelle 1998-1999, RD publ. 2000.17
et s. spéc. p. 30-31 et 79 ; Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 417. V. contra B. Genevois,
Faut-il maintenir la jurisprudence issue de la décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975 ?, in La
Constitution, le traité et la loi..., préc. p. 101 et s.

       (203) D. de Béchillon, De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité internationale


des lois par le juge ordinaire, article préc. spéc. p. 240 et s.

       (204) E. Picard, Vers l'extension du bloc de constitutionnalité au droit européen ? A propos de la


décision du Conseil constitutionnel n° 92-312 DC du 2 septembre 1992 Traité sur l'Union européenne,
RFD adm. 1993.47 et s.

       (205) V. Cons. const. décis. n° 98-400 DC du 20 mai 1998, Droit de vote et d'éligibilité aux
élections municipales, D. 2000.Somm.58, obs. P. Gaïa ; AJDA 1998.531 ; RFDA 1998.671, note B.
Genevois.

       (206) Expression préférée par les parlementaires de la IVe République craignant qu'un pouvoir
judiciaire calqué sur le modèle américain ne débouche sur un contrôle de constitutionnalité des lois par
les juridictions ordinaires et, en définitive, sur un « gouvernement des juges » (Th. Renoux, L'apport
du Conseil constitutionnel à l'application de la théorie de la séparation des pouvoirs en France, D.
1991.Chron.169 et s.).

       (207) V. contra, A. Decocq, Le désordre juridique français, article préc. spéc. p. 163. Rappr. en
faveur d'une « autorité judiciaire nouvellement définie », J. Vincent, S. Guinchard, G. Montagnier et
A. Varinard, op. cit. 1999, n° 86-2.

       (208) Th. Renoux, Le Conseil constitutionnel et l'autorité judiciaire, préf. L. Favoreu, Economica,


1984.

       (209) Cf. not. G. Carcassonne, Faut-il maintenir la jurisprudence issue de la décision n° 74-54 DC


du 15 janvier 1975 ?, article préc. p. 93 et s. qui milite pour un contrôle a posteriori « subsidiaire ».
Comp. Ch. Maugüé, L'arrêt Sarran entre apparence et réalité, in La Constitution, le traité et la loi,
contribution au débat sur la hiérarchie des normes, Cah. Cons. const. 1999, n° 7, p. 93 et s.

       (210) V. l'étude très complète de R. Ricci, Le Conseil d'Etat et la loi : vers la recevabilité d'une
exception d'inconstitutionnalité ?, Petites affiches, 7 oct. 1999, n° 200, p. 11 et s. et 8 oct. 1999, n°
201, p. 4 et s. V. contra, G. Carcassonne, article préc. spéc. p. 97-98.

       (211) Cf. F. Chevallier, L'exception d'inconstitutionnalité. L'état de droit et la construction de la


Communauté européenne, préc.

       (212) « Ce qui est spécial déroge à ce qui est général » , H. Roland et L. Boyer, Adages du droit
français, 4e éd. Litec, 1999, n° 418, p. 843.

       (213) « La convention privée ne déroge pas à l'ordre public », ibid. n° 340, p. 678.
       (214) « Les exceptions doivent être interprétées restrictivement », ibid. n° 125, p. 231.

       (215) « La loi postérieure déroge à la loi antérieure » , ibid. n° 202, p. 387.

       (216) Ex. : la loi nouvelle générale n'abroge pas la loi ancienne spéciale.

       (217) V. les exemples cités par H. Roland et L. Boyer, op. cit. n° 125, p. 232.

       (218) L. Robine, L'interprétation des textes exceptionnels en droit civil français, th. Bordeaux,
Librairie de l'Université, 1933.

       (219) Cons. const. décis. n° 99-423 DC du 13 janv. 2000, Loi sur les 35 heures, JO 20 janv. 2000,
p. 992 ; JCP 2000.éd.G.I.261, n° 17, obs. B. Mathieu et M. Verpeaux.

       (220) D. Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 127.

       (221) V. par ex. J. Ravanas, Liberté de la presse et responsabilité civile : l'illusion d'une hiérarchie
des normes en conflit, note sous Civ. 2e, 24 janv. 1996, D. 1997.J.268 et, du même auteur, Liberté
d'expression et protection des droits de la personnalité, D. 2000.Chron.459 et s.

       (222) CE 22 mai 1992, Mme Larachi, Rec. p. 203.

       (223) Civ. 1re, 11 mars 1997, D. 1997.400, note M.-L. Niboyet ; JCP 1998.éd.G.I.101, n° 3, obs.
H. Fulchiron ; RTD civ. 1998.520, obs. J.-P. Marguénaud. V. plus généralement, B. Dutoit et F.
Majoros, Le lacis des conflits de conventions en droit privé et les solutions possibles, Rev. crit. DIP
1984.565 et s.

       (224) Civ. 1re, 16 mars 1999, D. 1999.IR.101 ; RTD civ. 1999.469, obs. R. Perrot et 2000.944,
obs. J. Raynard; RGD publ. 1999.748, note H. Muir Watt ; JDI 1999.773, note A. Huet ; Gaz. Pal. 2
mars 2000, note M.-L. Niboyet ; Rev. crit. DIP 2000.182, obs. G. Droz, arrêt dans lequel la Cour de
cassation paralyse l'application de la Convention de Bruxelles en incorporant à l'ordre public
international, visé par son article 27.1, le droit d'accès à un juge garanti par l'article 6 § 1 de la
Convention européenne des droits de l'homme. V. également, CJCE 28 mars 2000, Krombach, RTD
civ. 2000. 944, obs. J. Raynard.

       (225) Cf. not. l'étude du Conseil d'Etat, La norme internationale en droit français, Doc. fr. 2000, p.
9-10.

       (226) P. Morvan, Le principe de droit privé, op. cit. n° 639 et s. p. 598 et s.

       (227) M. Despax, La place de la convention d'entreprise dans le système conventionnel, Dr. soc.
1988.9.

       (228) « Les rapports entre les règles sont empreints d'une relativité manifeste et la hiérarchie est à
reconstruire sans cesse. La lutte de la précision formelle contre la justice est permanente », Ch. Atias,
Quelle positivité ? Quelle notion de droit ?, Archives de philosophie du droit, t. 27, Sources du droit,
1982, p. 209 et s. spéc. p. 231.

       (229) Cf. supra n° 2.

       (230) L. Favoreu et al., Droit constitutionnel, op. cit. n° 91 et s.


       (231) Ibid. n° 90, où ces auteurs distinguent ainsi le « rapport de production » et la « force
dérogatoire » de la norme.

       (232) H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit. n° 34, p. 197, où l'auteur estime que les ordres
juridiques ont seulement « pour l'essentiel » un caractère dynamique, ce qui le conduit à évoquer très
fréquemment l'hypothèse d'une combinaison de systèmes (cf. par ex. à propos de la Constitution, p.
226, 264, 267 et s.).

       (233) Est donné l'exemple d'une Constitution qui pourrait très bien contenir l'interdiction de la
limitation du droit de grève : L. Favoreu et al., Droit constitutionnel, op. cit. n° 89.

       (234) Les contrôles a priori empêchent en effet que « quelque chose » devienne une norme ou
assurent la correction de l'acte défectueux (ibid. n° 90).

       (235) « Seule une norme valide peut être ou ne pas être conforme », ibid. n° 89.

       (236) J. Carbonnier, Droit civil, Introduction, 24e éd. PUF, coll. Thémis, 1996, n° 114, p. 187.

       (237) P. Amselek, Le rôle de la volonté dans l'édiction des normes juridiques selon Hans Kelsen,
RRJ 1999-1, p. 37 et s. spéc. p. 44.

       (238) Rappr. B. Beignier, Hiérarchie des normes et hiérarchie des valeurs : les principes généraux
du droit et la procédure civile, in Le droit privé français à la fin du XXe siècle : Etudes offertes à
Pierre Catala, Litec, 2001, p. 153 et s. où l'auteur suggère de dissocier la hiérarchie des normes de la
hiérarchie des valeurs (spéc. p. 170).

       (239) Si des auteurs enquêtent sur cette règle émergente (A. Jeammaud, Le principe de faveur.
Enquête sur une règle émergente, Dr. soc. 1999.115 et s.), d'autres s'interrogent déjà sur ce qu'il en
reste (D. Bocquillon, Que reste-t-il du « principe de faveur » ?, Dr. soc. 2001.255 et s.).

       (240) V. pour un recensement des applications de cette règle, J.-M. Olivier, Les conflits de
sources en droit du travail interne, in Les sources en droit du travail, PUF, coll. Droit, éthique, société,
1998, p. 194 et s. n° 223 et s.

       (241) Th. Revet, L'ordre public dans les relations de travail, in L'ordre public à la fin du XXe
siècle, Th. Revet (dir.), Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 1996, p. 43 et s.

       (242) Lequel n'est lui-même pas absolu puisque le droit du travail connaît également des
dérogations in pejus notamment justifiées par les contraintes du marché, cf. B. Boubli, Le juge, la
norme et le droit du travail, in Les sources en droit du travail, op. cit. p. 29 et s. spéc. n° 15.

       (243) Cf. L. Gannagé, La hiérarchie des normes et les méthodes du droit international privé
(Etude de droit international privé de la famille), th. Paris II, 1998, spéc. t. II, p. 217 et s.

       (244) Sur ces types de réserves utilisées notamment par le Conseil constitutionnel, cf. D.
Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 151 et s.

       (245) Cf. par ex. CE Ass. 3 juill. 1996, Koné, préc.

       (246) V. not. A. Viandier, La crise de la technique législative, Droits, n° 4, Crises dans le droit,
1986, p. 45 et s.

       (247) art. 112-1, al. 3, nouv. c. pén.


       (248) Cf. R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel. Problèmes généraux de la science
criminelle. Droit pénal général, 6e éd. Cujas, 1988, n° 248, p. 337.

       (249) Ch. Mouly, Le droit peut-il favoriser l'intégration européenne ?, article préc. spéc. n° 70, p.
945.

       (250) Ch. Atias, Une crise de légitimité seconde, Droits, n° 4, Crises dans le droit, 1986, p. 21 et s.

       (251) De la même manière, au fond, que les arrêts Jacques Vabre et Nicolo ont en leur temps
sacrifié le principe de la séparation des pouvoirs sur l'autel de la hiérarchie des normes.

       (252) En reconnaissant l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la


loi (décis. n° 99-421 DC du 16 déc. 1999, JO 16 déc. 1999, p. 19041 ; cf. M.-A. Frison-Roche, Le
principe constitutionnel de l'accessibilité et de l'intelligibilité de la loi, D. 2000. Chron.361 et s.), le
Conseil constitutionnel a implicitement consacré le principe de sécurité juridique (B. Mathieu, La
sécurité juridique : un produit d'importation dorénavant « made in France », D. 2000, n° 4, Point de
vue, p. VII. ; N. Molfessis, Les illusions de la codification à droit constant et la sécurité juridique,
RTD civ. 2000.186 et s.) espéré depuis longtemps par la doctrine (C. Lepage, Le principe de sécurité
juridique est-il devenu un principe à valeur constitutionnelle ?, Gaz. Pal. 27-29 juin 1999.doctr. p. 2 et
s. ; B. Mathieu, La sécurité juridique : un principe constitutionnel clandestin mais efficient, Mélanges
Patrice Gélard, Montchrestien, 2000, p. 302 et s. ; B. Pacteau, La sécurité juridique, un principe qui
nous manque, AJDA 1995.151 et s.).

       (253) L'argument se heurte peut-être à la position du Conseil constitutionnel qui considère que la


loi votée « n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution » (Cons. const. décis.
n° 85-197 DC du 23 août 1985, Evolution de la Nouvelle-Calédonie, (§ 27), préc.) y compris l'article
55 de celle-ci. Mais les juges sont-ils tenus de s'y conformer ?

       (254) D. Truchet, Fusionner les juridictions administratives et judiciaires ?, Etudes offertes à Jean-
Marie Auby, Dalloz, 1992, p. 111 et s.

       (255) Th. Renoux, L'apport du Conseil constitutionnel à l'application de la théorie de la séparation


des pouvoirs en France, D. 1991.Chron.169 et s.

       (256) Sur l'apparition à l'échelon constitutionnel du dualisme juridictionnel, cf. Th. S. Renoux,


chron. préc. ; et du même auteur, Le Conseil constitutionnel peut-il être reconnu comme un tribunal
des conflits ?, in La légitimité de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Economica, coll. Etudes
juridiques, t. 8, 1999, p. 273 et s. spéc. p. 274.

       (257) J. Vincent, S. Guinchard, G. Montagnier et A. Varinard, Institutions judiciaires,


Organisation. Juridictions. Gens de justice, Dalloz, 5e éd. coll. Précis, 1999, n° 62-1, p. 82-83.

       (258) F. Terré et D. Fenouillet, Droit civil. Les personnes. La famille. Les incapacités, 6e éd.
Dalloz, coll. Précis, 1996, n° 997, p. 838.

       (259) D. de Béchillon, De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité internationale


des lois par le juge ordinaire, article préc. spéc. p. 230.

       (260) M.-C. Rondeau-Rivier, La Convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant devant la
Cour de cassation, un traité mis hors jeu, D. 1993.Chron.205 et s.
       (261) L'hypothèse sous-entendue étant celle visée à l'article 7 de la Convention proclamant le droit
de l'enfant, « dans la mesure du possible, de connaître ses parents ».

       (262) Si une partie de la doctrine analysait la décision du Conseil constitutionnel du 12 janvier


1977 comme la consécration du droit au respect de la vie privée découlant de l'article 66 de la
Constitution (L. Favoreu, Le Conseil constitutionnel et la protection de la liberté individuelle et de la
vie privée, Mélanges offerts à Pierre Kayser, t. II, PUAM, 1979, p. 411 et s. ; P. Kayser, Le Conseil
constitutionnel, protecteur du secret de la vie privée à l'égard des lois, Mélanges offerts à Pierre
Raynaud, Dalloz, 1985, p. 329 et s.), une autre partie considérait que le droit au respect de la vie
privée n'avait pas, en lui-même, valeur constitutionnelle (N. Molfessis, Le Conseil constitutionnel et le
droit privé, préf. M. Gobert, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 287, 1997, n° 157 et s. spéc. n° 161). V.
pour une synthèse des arguments en présence, T.-S. Renoux et M. de Villiers, Code constitutionnel, 2e
éd. Litec, 2001, sous art. 66 Constit.

       (263) Après avoir rattaché le droit au respect de la vie privée à l'article 66 de la Constitution


(décis. n° 94-352 DC du 18 janv. 1995, JCP 1995.éd.G.II.22525, obs. F. Lafay), le Conseil
constitutionnel le fonde désormais sur l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme (décis. n° 99-
416 DC du 23 juill. 1999, RTD civ. 1999.724, obs. N. Molfessis ; D. 2000.Somm.265, obs. L.
Marino ; AJDA 1999.738, note J.-E. Schoettl).

       (264) Telle était la volonté de certains juges du fond tendant à restreindre l'application de l'article
1382 en matière de presse aux seules hypothèses d'abus de la liberté d'expression (V. not. Paris, 19
nov. 1990, D. 1991.IR.9).

       (265) V. en dernier lieu, Ass. plén. 12 juill. 2000, D. 2000.Somm.463 et RTD civ. 2000.842, obs.
P. Jourdain ; JCP 2000.éd.G.II.10439, note A. Lepage, qui rappelle que l'application de l'article 1382
du code civil n'exige pas l'existence d'une intention de nuire (V. aussi dans la même affaire, Civ. 2e, 2
avr. 1997, JCP 1998.éd.G.II.10010, note C. Bigot ; JCP 1998.éd.G.I.185, n° 11, obs. G. Viney ; D.
1997.411, note B. Edelman).

       (266) Ch. Atias, Une doctrine de combat pour un droit menacé, Mélanges Christian Mouly, Litec,
1998, p. 13 et s. spéc. p. 18.

       (267) Ch. Atias, Progrès du droit et progrès de la science du droit, RTD civ. 1984, n° 9.

       (268) Ch. Atias, Philosophie du droit, op. cit. spéc. p. 143 à 148.

       (269) M. Villey, Philosophie du droit, t. I, Définitions et fins du droit, op. cit. n° 108 et s. qui
déplore « la mort des fins ».

       (270) Cf. J. Chevallier, Vers un droit post-moderne ?..., article préc. spéc. p. 668-669.

       (271) D. Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 454.

       (272) Ch. Atias, Une crise de légitimité seconde, article préc.

       (273) R. Libchaber, L'extériorisation progressive de la loi (CE 3 déc. 1999, Association


ornithologique et mammologique de Saône-et-Loire (AOMSL), RTD civ. 2000.195 et s. spéc. p. 196-
197.

       (274) Ch. Mouly, Le droit peut-il favoriser l'intégration européenne ?, article préc. spéc. n° 57, p.
936.
       (275) Rappr. Ph. Jestaz, Les sources du droit : le déplacement d'un pôle à un autre, RTD civ.
1996.299 et s.spéc. p. 311, note 11, qui observe qu'à l'opposé des pays de common law qui donnent
aux juges « un rôle excessif en ce qu'ils leur abandonnent des choix de société pour lesquels un débat
devant les représentants élus du peuple paraîtrait indispensable », « à l'évidence, la France ne fait pas
suffisamment confiance à ses juges ».

       (276) Rappr. l'analyse avancée pour légitimer le rôle du Conseil constitutionnel par D. Rousseau,
Droit du contentieux constitutionnel, op. cit. p. 464 et s. ; et les observations élogieuses du doyen
Vedel dans sa préface, spéc. p. 8 ; cf. également de manière plus développée, D. Rousseau, La
jurisprudence constitutionnelle : quelle « nécessité démocratique » ?, in La légitimité de la
jurisprudence du Conseil constitutionnel, Economica, coll. Etudes juridiques, t. 8, 1999, p. 363 et s.

       (277) G. Cornu, Le visible et l'invisible, Droits, t. 10, 1989, Définir le droit ?, p. 27 et s. ; in L'art
du droit en quête de sagesse, PUF, coll. Doctrine juridique, 1998, p. 419 et s.

       (278) F. Hayek, Droit, législation et liberté, 3 vol. PUF, coll. Quadrige, 1995, spéc. vol. I, Règles
et ordre, chap 2, p. 41 et s. où l'auteur oppose deux catégories d'ordres : un ordre confectionné,
arrangé, construit, voulu, artificiel (taxis) et un ordre spontané, mûri par le temps, auto-généré et
endogène (kosmos).

       (279) Cf. spéc. G. Carcassonne, Société de droit contre Etat de droit, in L'Etat de droit, Mélanges
en l'honneur de Guy Braibant, Dalloz, 1996, p. 37 et s. ; J. Rivero, Etat de droit, Etat du droit, in L'Etat
de droit, Mélanges préc. p. 609 et s. ; V. déjà R. Savatier, L'inflation législative et l'indigestion du
corps social, D. 1977.Chron.43 et s.

       (280) V. not. P. Roubier, L'ordre juridique et la théorie des sources du droit, in Le droit privé
français au milieu du XXe siècle : Etudes offertes à Georges Ripert, vol. I, Paris, LGDJ, 1950, p. 9 et
s. spéc. p. 21-22.

       (281) M. Villey, Philosophie du droit, t. II, Les moyens du droit, op. cit. n° 133, p. 163.

       (282) Ch. Mouly, Le droit peut-il favoriser l'intégration européenne ?, article préc. spéc. n° 70, p.
945.

       (283) Rapport Public 1991, Doc. fr. EDCE n° 43, p. 15 et s. où le Conseil d'Etat dénonce « la
surproduction normative, l'inflation des prescriptions et des règles » lesquelles engendrent par leur
complexité et leur inaccessibilité « un sentiment d'angoisse diffuse » avant d'observer que cette
inflation implique une « dévalorisation : quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu'une
oreille distraite ». Ce « sentiment d'insécurité juridique » est encore aggravé par « la fréquence des
changements » auxquels ne manque pas de participer le recours trop fréquent aux lois rétroactives,
changements qui entraînent à leur tour un phénomène d'ineffectivité parce que « la loi dont on change
à chaque saison, la loi « jetable », n'est pas respectable ».

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